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1091. (1888) Journal des Goncourt. Tome III (1866-1870) « Année 1866 » pp. 3-95

Au milieu de l’exposition de sa vie de travail et de privation d’amour, dans le sens élevé du mot, Taine est interrompu par Gautier qui jette : « Tout cela est une théorie du renoncement stupide… La femme, prise comme purgation physique ne vous débarrasse pas de l’aspiration idéale… Plus on se dépense, plus on acquiert… Moi, par exemple, j’ai fait faire une bifurcation à l’école du romantisme, à l’école de la pâleur et des crevés… Je n’étais pas fort du tout. […] Un peu de mon enfance m’est revenu, un souvenir de ces voyages, où la nourrice (qui avait élevé mon frère) mangeait avec nous. […] Ils vous rabougrissent l’intelligence… Puis moi, sur l’éducation, j’ai des idées philosophiques… Ça tient peut-être à la manière dont j’ai été élevée… Oui, ma mère ne m’a pas gâtée ! […] C’est chez une cousine, un peu plus âgée que mon frère, et élevée avec lui.

1092. (1767) Salon de 1767 « Peintures — Vernet » pp. 130-167

-vous ne savez pas, l’abbé, combien vous êtes un mauvais plaisant… l’espace compris entre les rochers au torrent, la chaussée rocailleuse et les montagnes de la gauche formaient un lac sur les bords duquel nous nous promenions ; c’est de là que nous contemplions toute cette scène merveilleuse ; cependant il s’était élevé, vers la partie du ciel qu’on appercevait entre la touffe d’arbres de la partie rocailleuse et les rochers aux deux pêcheurs, un nuage léger que le vent promenait à son gré. […] Mais si ces personnages n’y étaient pas, il y avait proche de moi, sur la rive du grand bassin, une femme qui se reposait avec son chien à côté d’elle ; en suivant la même rive, à gauche, sur une petite plage plus élevée, un groupe d’hommes et de femmes, tel qu’un peintre intelligent l’aurait imaginé ; plus loin, un paysan debout, je le voyais de face, et il me paraissait indiquer de la main la route à quelque habitant d’un canton éloigné. […] Si l’on imagine un plan vertical élevé sur la cime de ces deux chaînes de montagnes, et assis sur le milieu de cette fabrique de bois, on aura au-delà de ce plan, vers le fond, toute la partie éclairée de la composition, en deçà, vers le devant, toute sa partie obscure et de demi-teinte ; on y voit les objets nets, distincts, bien terminés, ils ne sont privés que de la grande lumière. […] La lune élevée sur l’horizon et à demi cachée dans des nuées épaisses et noires, un ciel tout à fait orageux et obscur, occupe le centre de ce tableau, et teint de sa lumière pâle et faible et le rideau qui l’offusque et la surface de la mer qu’elle domine.

1093. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Histoire du Consulat et de l’Empire, par M. Thiers. Tome xviii » pp. 84-92

Le spectacle d’hommes remarquables par le caractère, l’intelligence, le talent, pensant différemment les uns des autres, se le disant vivement, rivaux sans doute, mais rivaux pas aussi implacables que ces généraux qui, en Espagne, immolaient des armées à leurs jalousies ; occupés sans cesse des plus graves intérêts des nations, et élevés souvent par la grandeur de ces intérêts à la plus haute éloquence ; groupés autour de quelques esprits supérieurs, jamais asservis à un seul ; offrant de la sorte mille physionomies, animées, vivantes, vraies comme l’est toujours la nature en liberté ; — ce spectacle intellectuel et moral commençait à saisir et à captiver fortement la France.

1094. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Les poëtes français. Recueil des chefs-d’œuvre de la poésie française »

Pour elle, quoique Dieu l’ait faite douce et tendre, Elle suit son chemin, distraite, et sans entendre Ce murmure d’amour élevé sur ses pas.

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