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1024. (1910) Rousseau contre Molière

Il veut dire très nettement : « La comédie a pour but de faire rire honnêtement les gens bien élevés. » De faire rire ; elle doit fait rire. […] Mais pour cela, il faut qu’elle soit intellectuelle et élevée intellectuellement. […] Ici, le couplet de Sganarelle et celui de Chrysale mis en belle prose : « J’aimerais cent fois mieux une fille simple et grossièrement élevée qu’une fille savante et bel esprit qui viendrait établir dans ma maison un tribunal de littérature dont elle se ferait la présidente. […] Pourquoi Rousseau, si large d’esprit, si généreux, si libéral, si émancipateur, si élevé, est-il sur cette question dans le même état d’esprit que le bourgeois des bourgeois, que d’ordinaire il aimé si peu qu’il suffit que celui-ci soit d’un avis pour qu’il soit d’un autre ? […] Il n’y a que des passions naturelles, sentiment religieux peu éclairé et peu élevé, primitif, chez Orgon, avidité et luxure chez Tartuffe, vaincues par une intervention royale.

1025. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Le maréchal de Saint-Arnaud. Ses lettres publiées par sa famille, et autres lettres inédites » pp. 412-452

Agriculteur pendant quinze ans, vivant dans un frottement continuel avec la classe peu élevée de la société, il n’a pas toute la dignité, toute la tenue désirables. […] Tu feras lire cette lettre à ma gracieuse sœur : son âme élevée me comprendra. […] Peut-être le repos forcé de la traversée me remettra-t-il : dans tous les cas, je me connais et je sais qu’au moment solennel la machine se remontera au diapason le plus élevé, dût-elle ensuite retomber affaissée sur elle-même !

1026. (1872) Nouveaux lundis. Tome XIII « Ma biographie »

Il avait le mérite dès lors de concevoir l’idée de cette Revue élevée et forte qu’il a réalisée depuis. […] Il faut songer, en effet, qu’âgé alors de 36 ans, n’ayant aucune fortune que ce que me procurait ma plume, ayant débuté en 1824 de compagnie avec des écrivains distingués, parvenus presque tous à des postes élevés et plus ou moins ministres, je n’étais rien, vivais au quatrième sous un nom supposé, dans deux chambres d’étudiant (deux chambres, c’était mon luxe), cour du Commerce. […] Sainte-Beuve, concernant la vie du poète latin. — Je lis encore, sur un petit exemplaire des Commentaires de César, qui lui venait aussi de son maître, ce court jugement de collège, daté, signé et paraphé : « César, grand capitaine et grand littérateur, d’un génie aussi élevé que d’un courage ardent, a laissé des Commentaires célèbres par la pureté du style, par la sagesse de la narration, par la justesse des idées. — Boulogne, 23 juin 1818.

1027. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « M. BALLANCHE. » pp. 1-51

Il avait trente-huit ans en 1814, ayant vécu jusque-là dans l’étude, dans la rêverie, dans les affections et les souffrances individuelles, s’étant élevé naturellement à une moralité générale, douce, pieuse, plaintive, chrétienne, mais n’ayant pas approprié sa pensée à son siècle, n’ayant pas trouvé la loi, la formule de sa philosophie, n’ayant pas deviné l’énigme. […] Dans le récit qu’il a donné d’un voyage à la grande Chartreuse fait en 1804 avec monsieur et madame de Chateaubriand, il est question, comme dans le Vieillard et le Jeune Homme, d’une conversation entre un jeune mélancolique qui repousse toute science, toute tentative humaine, et un prêtre tolérant qui maintient la science et la croit conciliable avec une religion élevée. « Comment, s’écrie en finissant le narrateur, comment un jeune homme paraît-il détrompé à ce point de toutes les choses de la vie ? […] N’est-ce point parce qu’étant privées d’eau sur les lieux élevés et exposées à l’ardeur du soleil, cette divine Providence, qui donne sa parure aux lis des champs, a voulu que leur calice pût retenir la rosée du matin, et que la fleur épanouie rendît à sa tige le bienfait qu’elle en avait reçu avant d’éclore ? 

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