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53. (1904) La foi nouvelle du poète et sa doctrine. L’intégralisme (manifeste de la Revue bleue) pp. 83-87

Nous déclarerons donc qu’à notre sens la Poésie n’est pas l’apanage exclusif de la littérature, et même des vers, mais que les vers constituant la forme de langage qui tend à la plus haute expression du rythme, et le rythme étant la condition essentielle de toute poésie, il s’ensuit que ladite forme est la plus apte à réaliser celle-ci. […] À conception haute, œuvre haute. […] Cette question correspond encore, en hautes sciences, à certains autres problèmes, fort connus des savants, mais que les poètes se font ordinairement gloire d’ignorer. […] Quant au rythme, nous l’avons dit plus haut, il n’a avec les règles prosodiques que des rapports de maître à serviteur. […] Et n’est-ce pas à ces fins que nous ont préparés tous nos glorieux devanciers, grands initiés de tous les âges, prophètes et voyants, grands émancipateurs de la conscience humaine, dont nous ne pouvons évoquer le souvenir sans une étreinte au cœur, mais dont le verbe puissant sonne si haut tout au fond de notre rêve, que nous levons la tête pour les suivre ?

54. (1888) Les œuvres et les hommes. Les Historiens. X. « M. Fustel de Coulanges » pp. 15-32

Quels que soient, d’ailleurs, les titres différents que M. de Coulanges donne à ses ouvrages, ils ne sont tous, si j’en saisis bien le sens et la portée, que les chapitres écrits d’un livre qui se continue, que les parties échafaudées d’un ensemble historique embrassé de haut, comme on embrasse tout un pays du sommet de ses montagnes. […] Singulière destinée pour les exécuteurs des hautes œuvres de la Providence ! […] Le principe romain du pouvoir politique tel que la République l’avait affirmé, l’Empire le concentra et l’éleva à sa plus haute puissance. […] Dans ce système, comme je l’ai indiqué plus haut, ce qu’on a pris pour de l’abjection chez le peuple romain, était la preuve de sa solidité politique. […] Je l’ai dit plus haut : c’est l’Histoire retournée, bout pour bout.

55. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — R — Régnier, Henri de (1864-1936) »

Il revoit le passé, et, dans cette vision rétrospective des joies d’alors, pendant que s’efface le présent, apparaît la Gardienne de son adolescence, la chimère qui jadis emplissait son âme tout entière, celle qui jamais ne se désouvint de lui-même quand il errait au plus fort de la mêlée humaine, oublieux d’espérances plus hautes : Je suis la même encor, si ton âme est la même Que celle que l’Espoir aventurait au pli De sa bannière haute, et je reste l’emblème Du passé qui résiste à travers ton oubli. […] Albert Mockel M. de Régnier est surtout un droit et pur artiste ; son vers a des lignes bien tracées, des couleurs transparentes et rares disposées avec justesse ; il démontre une grande probité d’écriture, un idéal d’art austère, la volonté d’un homme qui garde haut sa conscience. […] C’est dire que cet écrivain, préoccupé d’une philosophie élevée et grave, comme préoccupé constamment de la recherche des plus hautes raisons des choses et comme alourdi du legs glorieux d’aïeux féodaux, ne dédaigne point les beautés calmes de la nature, ni la simplicité touchante des prairies. […] Francis Vielé-Griffin, son compagnon de route et qu’il faut compter également parmi eux, fut aussi de « ces jeunes hommes qui, guidés par leur seule foi dans l’Art, s’en furent chercher Verlaine au fond de la cour Saint-François, blottie sous le chemin de fer de Vincennes, pour l’escorter de leurs acclamations vers la gloire haute que donne l’élite ; qui montèrent, chaque semaine, la rue de Rome, porter l’hommage de leur respect et de leur dévouement à Stéphane Mallarmé, hautainement isolé dans son rêve ; qui entourèrent Léon Dierx d’une déférence sans défaillance et firent à Villiers de l’Isle-Adam, courbe par la vie, une couronne de leurs enthousiasmes ».

56. (1890) L’avenir de la science « IX »

Mais leur vue est courte et bornée, en ce qu’ils ne s’aperçoivent pas que la polymathie est la condition de la haute intelligence esthétique, morale, religieuse, poétique. […] Il était d’ailleurs difficile au XVIIe siècle de deviner la haute critique et le grand esprit de la science. Leibniz le premier a réalisé dans une belle harmonie cette haute conception d’une philosophie critique, que Bayle n’avait pu atteindre par trop de relâchement d’esprit. […] L’antiquité avait merveilleusement compris cette haute et large acception de la philosophie. […] Pénétration la plus intime des secrets de la psychologie spontanée, haute habitude de la psychologie et des sciences philosophiques, étude expérimentale de l’enfant et du premier exercice de sa raison, étude expérimentale du sauvage, par conséquent connaissance étendue des voyages, et autant que possible avoir voyagé soi-même chez les peuples primitifs, qui menacent chaque jour de disparaître, au moins avec leur spontanéité native ; connaissance de toutes les littératures primitives, génie comparé des peuples, littérature comparée, goût délicat et scientifique, finesse et spontanéité ; nature enfantine et sérieuse, capable de s’enthousiasmer du spontané et de le reproduire en soi au sein même du réfléchi.

57. (1885) Les œuvres et les hommes. Les critiques, ou les juges jugés. VI. « Paul de Saint-Victor » pp. 217-229

Quant au détail, en ce livre, il est si exquis et d’un intérêt si poétique et si raffiné, que les avaleurs de feuilletons, qui n’ont faim que des vulgaires surprises de l’aventure, n’ont su trouver probablement aucune saveur à cette littérature élevée… Pour mon compte, n’ai-je pas entendu traiter cette haute littérature d’ennuyeuse ? […] Alors que la littérature matérialisée se dit naturaliste, quand elle se fait tout bêtement abjecte et n’aspire plus qu’à donner aux hommes les plus ignobles sensations ; alors que le public, plus stupide encore qu’elle n’est abjecte, trouve cette littérature toute-puissante, un livre comme celui de Paul de Saint-Victor, haut d’inspiration, spirituel dans tous les sens du mot, idéal et grandiose, doit nécessairement avoir l’honneur de l’insuccès… Et s’il ne l’a pas, j’ose le dire ! […] C’est un livre en toutes ses parties ; et quoique nous n’en ayons que le premier volume aujourd’hui, nous pouvons par celui-là préjuger la haute valeur de l’ouvrage entier. […] Quand l’auteur des Deux Masques va, par exemple, chercher l’Histoire, — dont il a besoin pour montrer jusqu’où plongent les racines du génie d’Eschyle et faire le lumineux décompte de ce qui est de la personnalité et de la race, — et qu’à travers l’antique Hérodote, et plus haut et plus loin qu’Hérodote, il va la chercher, cette fuyante histoire, jusque dans les derniers éloignements et les derniers effacements du passé, il la saisit et l’amène sous le regard par la force de la couleur, et il la pousse sur nous, pour ainsi dire, vainqueur des âges et des lointains ! Cette puissance du retrouvé et du rendu dans la peinture historique, personne parmi les écrivains modernes ne la possède à un plus haut degré que Saint Victor, si ce n’est Michelet.

58. (1888) Les œuvres et les hommes. Les Historiens. X. « Crétineau-Joly » pp. 367-380

L’intérêt brûlant dont je parlais plus haut a peut-être été trop brûlant… On a craint d’y exposer ses doigts. […] On n’aime pas que quelqu’un y parle très haut, et on s’y met du coton dans les oreilles contre la vérité âprement exprimée. […] Idée plus haute qu’une ironie ! […] III Car c’est à dater du Régent que le mal fait par les d’Orléans s’élargit et grandit comme un gouffre… Malgré son impuissance politique et ses vices, le Régent, à qui Crétineau-Joly, que j’appelais une coquette de vérité il n’y a qu’un moment, accorde trop généreusement « des éclairs de génie et des conceptions diplomatiques d’une haute portée », le Régent est encore, si on y regarde de près, le meilleur de ces trois hommes que j’ai nommés plus haut et dont le pire est encore le second, mais dont le troisième acheva à son profit le mal commis par les deux autres.

59. (1858) Cours familier de littérature. VI « XXXIVe entretien. Littérature, philosophie, et politique de la Chine » pp. 221-315

Après la religion et la philosophie, la politique est la plus haute application de la littérature aux choses humaines. […] Cette étude nous conduira aux plus hautes théories du gouvernement des sociétés. […] Il ressemble aux sages les plus distingués de la haute antiquité. […] Il fut dans les hautes affaires ce qu’il avait été dans la philosophie spéculative, philosophe et homme d’État à la fois. […] Platon n’est pas plus haut, Montesquieu plus analysateur, Fénelon plus pieux, J.

60. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre premier. La structure de la société. — Chapitre IV. Services généraux que doivent les privilégiés. »

Député élu à la chambre basse, membre héréditaire de la chambre haute, il tient les cordons de la bourse publique et empêche le prince d’y puiser trop avant. […] Mêmes sentiments dans le bas clergé, et encore plus vifs ; car il est exclu des hautes places, non seulement comme inférieur, mais encore comme roturier120. […] — Voyez par contraste le luxe des prélats qui ont un demi-million de rente, la pompe de leurs palais, les équipages de chasse de M. de Dillon, évêque d’Evreux, le confessionnaux garnis de satin de M. de Barrai, évêque de Troyes, l’innombrable batterie de cuisine en argent massif de M. de Rohan, évêque de Strasbourg. — Tel est le sort des curés à portion congrue, et il y en a beaucoup qui n’ont pas la portion congrue, que la mauvaise volonté du haut clergé en exclut, qui, avec leur casuel, ne touchent que 400 à 500 livres, qui réclament en vain la maigre pitance à laquelle ils ont droit par le dernier édit. « Une pareille demande, dit un curé, ne devrait-elle pas être acceptée de bon gré par MM. du haut clergé qui souffrent des moines jouir de 5 à 6 000 livres de rente par chaque individu, tandis qu’ils voient les curés, au moins aussi nécessaires, réduits à la mince portion, tant pour eux que pour la paroisse ?  […] Si l’institution d’une chambre haute est repoussée, c’est que la plèbe des gentilshommes ne veut pas souffrir aux grandes familles une prérogative dont elles ont abusé. […] Qui dit sire ou seigneur, dit « le protecteur qui nourrit, l’ancien qui conduit139 » ; à ce titre et pour cet emploi, on ne peut lui donner trop, car il n’y a pas d’emploi plus difficile et plus haut.

61. (1860) Cours familier de littérature. X « LVIIIe entretien » pp. 223-287

Je dévorais déjà de l’œil les longues années qui me séparaient encore de la tribune et des hautes affaires d’État, ma vraie et entière vocation, quoi que mes amis en pensent et que mes ennemis en disent. […] Il écrit, le front haut, sur des feuilles sans nombre, Sans courber comme nous sa taille sous l’effort, Dans l’œuvre de l’esprit attitude du fort. […] Par un beau soir d’octobre, toute cette société, les jeunes gens à pied, les femmes à cheval, les enfants sur des ânes, partit pour visiter les plus hauts sommets des montagnes qui séparent le bassin de la Loire du bassin de la Saône. […] Alexandre a le charme : qu’il se garde bien de chercher mieux ; qu’il se garde de vouloir, à l’exemple de ses amis, planer plus haut que nature dans le vague espace des abstractions. […] C’est Joseph Autran, qui depuis a pris tant et de si larges et de si hautes places dans la littérature poétique de nos jours.

62. (1854) Histoire de la littérature française. Tome I « Livre II — Chapitre quatrième »

Tout ce savoir ne lui donna pas l’ambition ni peut-être l’idée de la haute poésie, et il se contenta de suivre les traces de Marot, sur lequel il raffina. […] Cet éloge des biens de l’esprit est déjà de la haute poésie la Renaissance et la Réforme ont passé par là. […] Il n’y avait pas de genre si haut chez les anciens dont l’école de Ronsard ne voulût doter notre poésie. […] On blâmait Ronsard D’apparaître trop haut au simple populaire. […] Il descendit du trépied de Delphes ; il cessa de pindariser95 ; il daigna aimer moins haut.

63. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Geoffroy de Villehardouin. — I. » pp. 381-397

À l’entrée du carême suivant (1200), Baudouin, comte de Flandre, et la comtesse sa femme, se croisèrent à Bruges : deux des plus hauts barons de France, Simon de Montfort et Renauld de Montmirail, prirent aussi la croix, et le bruit s’en répandit avant dans les terres. […] Villehardouin, par exemple, pour nous en tenir à lui, possédait à un haut degré le don de la parole et l’art d’insinuer les conseils que d’ordinaire la prudence lui dictait : c’est un témoignage qu’ont rendu de lui ses contemporains, et c’est ce qui ressort et s’entrevoit aussi d’après l’Histoire qu’il a laissée. […] Au doge qui les accueillait avec honneur et les interrogeait, ils montrèrent leurs lettres de créance, et le doge leur dit : Seigneurs, j’ai bien vu vos lettres, et je sais très certainement que vos seigneurs sont les plus hauts hommes qui soient aujourd’hui de ceux qui ne portent point couronne. […]  » Là y eut si grand bruit et si grande noise qu’il semblait vraiment que toute terre tremblât ; et quand ce bruit fut apaisé, Henri (Dandolo), le bon duc de Venise, monta au lutrin et, parlant au peuple, leur dit : « Seigneurs, voilà un très grand honneur que Dieu nous fait, quand les meilleurs et les plus braves gens du monde ont négligé toute autre nation et ont requis notre compagnie pour une si haute cause que la vengeance de Notre-Seigneur. » Cette scène si parlante et si pathétique, précédée par un traité de commerce et de conquête en commun, si bien conçu et si sagement combiné, peint l’esprit d’un gouvernement et d’un peuple. […] Avant que l’on commençât à chanter la grand-messe, le duc de Venise monta au lutrin pour parler au peuple et leur dit : « Seigneurs, il est certain que nous sommes unis, pour la plus haute chose qui soit, à ce qu’il y a de plus haut dans le monde parmi ce qui est en vie aujourd’hui dans la chrétienté.

64. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Correspondance de Buffon, publiée par M. Nadault de Buffon » pp. 320-337

Montesquieu écrit peu (autant du moins qu’on en peut juger par ce qu’on a), et il écrit sans prétention : son grand esprit, sa forte et haute imagination, sa faculté élevée de concevoir et son talent de frapper médaille ou de graver, sont tout entiers tournés et employés à ses compositions savantes et rares. […] Enfin, à l’heure de la réconciliation (novembre 1774), il y a une lettre à Voltaire qui est à la fois d’une haute emphase et d’une extrême modestie. […] Buffon était une exception ; il avait assez d’amour-propre pour cela ; il possédait au plus haut degré la faculté du dédain contre l’offense ; il l’avait bien autrement que Montesquieu. […] Buffon avait l’amour-propre haut et tranquille, d’un équilibre stable : il se jugeait lui et ses œuvres comme la postérité elle-même l’allait faire, comme ses contemporains le faisaient déjà. […] Et cependant il ne saurait se contraindre à être le collecteur, l’investigateur minutieux, l’observateur de détail ; ses sens même y faisaient obstacle ; ses yeux étaient mauvais ; sa taille droite et haute était d’un maréchal de France, on l’a dit, plus que d’un homme de laboratoire ou de cabinet.

65. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre V. Premiers aphorismes de Jésus. — Ses idées d’un Dieu Père et d’une religion pure  Premiers disciples. »

Une haute notion de la divinité, qu’il ne dut pas au judaïsme, et qui semble avoir été de toutes pièces la création de sa grande âme, fut en quelque sorte le principe de toute sa force. […] La plus haute conscience de Dieu qui ait existé au sein de l’humanité a été celle de Jésus. […] Jésus n’arriva pas sans doute du premier coup à cette haute affirmation de lui-même. […] Le motif dont il appuyait ces maximes de haute charité était toujours le même : « … Pour que vous soyez les fils de votre Père céleste, qui fait lever son soleil sur les bons et sur les méchants. […] Philon, dans le monde judéo-égyptien, arrivait en même temps que Jésus à des idées d’une haute sainteté morale, dont la conséquence était le peu de souci des pratiques légales 263.

66. (1767) Salon de 1767 « Peintures — Du Rameau » pp. 288-298

Tableau de 10 pieds 8 pouces de haut, sur 14 pieds de large. […] Tableau de 10 pieds 5 pouces de haut, sur 5 pieds de large. […] Tableau de 10 pieds 5 pouces de haut, sur 5 pieds de large. […] Tableau d’1 pied 11 pouces de haut, sur 2 pieds 2 pouces de large. […] Je crois que c’est de ceux têtes-là dont j’ai dit un mot plus haut, parmi les tableaux.

67. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre II. La Renaissance. — Chapitre VI. Milton. » pp. 411-519

Il conçoit la plus haute des beautés idéales, mais il n’en conçoit qu’une. […] Un peu plus haut, celui-ci posait ce dilemme : « Dites-moi, cette liturgie est-elle bonne ou mauvaise ? […] Il laisse à la chaîne la haute raison, mère des principes ; il n’a délivré que la raison subordonnée, interprète des textes. […] Il rencontre dans Samson une tragédie froide et haute, dans le Paradis regagné une épopée froide et noble, et compose un poëme imparfait et sublime, le Paradis perdu. […] Les dames anglaises apprendront par son exemple à reconnaître sur le visage de leur mari « quand il va aborder d’abstruses pensées studieuses. » Leur sexe ne monte pas si haut.

68. (1881) La psychologie anglaise contemporaine « M. Herbert Spencer — Chapitre II : La psychologie »

La vie est donc bien une correspondance, sous ses formes les plus hautes et les plus basses. […] Comme la vie la plus haute se trouve dans les milieux les plus compliqués, de même la vie la plus basse ne se rencontre que dans des milieux d’une simplicité singulière. […] L’hypothèse expérimentale suffit aussi à expliquer le progrès des plus basses aux plus hautes formes de la raison. […] De plus, leur ressemblance est la plus haute possible : c’est celle qu’on appelle égalité ou identité. […] Cette perpétuelle alternance est la caractéristique de toute conscience, depuis la plus basse jusqu’à la plus haute.

69. (1901) Figures et caractères

Il est alors au plus haut de sa pensée. […] La pratique du devoir remplaçait la chance du haut fait. […] Je lui prête la haute vieillesse d’un Goethe ou d’un Tolstoï. […] Une haute grâce y règne en sa belle ordonnance. […] Mais montons plus haut.

70. (1867) Cours familier de littérature. XXIV « CXLIIe entretien. Littérature cosmopolite. Les voyageurs »

La plupart de ces caves ont quarante à cinquante marches de descente, et fort hautes. […] Le portail qui est au haut est tout à fait magnifique. […] Le haut, qui est un grand demi-dôme, est peint de moresques d’or et d’azur appliquées fort épais. […] La chapelle est octogone, couverte d’un haut dôme. […] Il est si haut élevé, qu’en regardant en bas dans la place, les hommes ne paraissent pas hauts de deux pieds, et regardant, au contraire, de la place dans le salon, on ne saurait reconnaître les gens.

71. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « M. Necker. — I. » pp. 329-349

Necker, dont la fortune était faite, s’était retiré de la banque à ce moment ; il était devenu ministre de la république de Genève auprès de la cour de Versailles, et il visait plus haut : il aspirait à une carrière politique en France. […] Necker, on le verra, possédait à un haut degré cette finesse et presque ce raffinement d’observation, qui faisait de lui un homme très spirituel ; on se demande seulement si c’est là un des traits qui devaient se relever avec tant de soin dans un portrait de Colbert. […] Mais, à l’époque de son premier ministère, l’opinion publique en France, dans la haute société, semblait une reine sans tache, et à laquelle un homme d’État, qui voulait le bien, n’avait, pour marcher droit, qu’à se confier sans réserve. […] Mais il semble, à la manière dont il en parle, qu’il ne l’avait observé que de haut. […] Necker ne prétendait relever que de la chambre haute de l’opinion, mais est-ce que la sottise, telle qu’il l’entendait, n’y pénétrait pas tout comme ailleurs ?

72. (1933) De mon temps…

Sa gloire se mêle désormais à la leur, et sa disparition laisse vide un espace de lumière qu’elle remplissait de la haute clarté de son génie. […] Je le revois encore en sa haute taille, à la fois massive et élégante, avec son beau visage pâle, aux yeux vifs, sa moustache blanche. […] L’écolier, d’ailleurs, s’y montrait un maître dont la maîtrise accusait une haute influence shakespearienne. […] Ils s’en référaient respectueusement à son haut conseil, et sa mort leur causa un vide profond. […] Cet atelier était haut perché et il y faisait froid l’hiver.

73. (1890) L’avenir de la science « VII »

Souvent même cette pru-dente abstention est un acte de vertu scientifique, et ceux-là sont les héros de la science qui, plus capables que personne de se livrer à de hautes spéculations, ont la force de se borner à la sévère constatation des faits, en s’interdisant les généralités anticipées. […] Les lexicographes ne sont pas en général de très grands philosophes, et pourtant le plus beau livre de généralités n’a pas eu sur la haute science une aussi grande influence que le dictionnaire très médiocrement philosophique par lequel Wilson a rendu possibles en Europe les études sanscrites. […] On peut affirmer que, sans cet attrait, jamais les premiers érudits des temps modernes, qui n’étaient soutenus ni par une haute vue philosophique, ni par un motif immédiatement religieux, n’eussent entrepris ces immenses travaux, qui nous rendent possibles les recherches de haute critique.

74. (1890) L’avenir de la science « XX »

Pour rendre intelligibles au vulgaire les hautes théories philosophiques, on est obligé de les dépouiller de leur forme véritable, de les assujettir à l’étroite mesure du bon sens, de les fausser. […] La science et la philosophie doivent conserver leur haute indépendance, c’est-à-dire ne poursuivre que le vrai dans toute son objectivité, sans s’embarrasser d’aucune forme populaire ou mondaine. […] Est-ce de la haute philosophie, ou, dans l’art, des productions pures et sévères, de hautes créations morales ?

75. (1870) La science et la conscience « Chapitre IV : La métaphysique »

Ce n’est pas seulement la théologie mystique d’un saint Jean, d’un Gerson, d’une sainte Thérèse, d’un Fénelon qui le dit ; c’est la haute et sévère théologie d’un Bossuet, d’un Malebranche, d’un Leibnitz, d’un Maine de Biran. […] Toutes ces hypothèses, qui visent à l’explication la plus complète et la plus haute des choses, n’ont plus de valeur du moment qu’elles contredisent le sentiment de la réalité interne ou externe. […] Telle est la nécessité logique des méthodes et des idées que la science moderne, avec ses incessants et admirables progrès, ne conclut pas sur ces points de haute philosophie autrement que la science ancienne, si imparfaite et si incomplète. […] Que si au contraire c’est le Dieu révélé par le sens intime, le mysticisme prend alors un tout autre caractère, et, au lieu d’annuler les facultés propres de l’âme humaine, il ne fait que les porter à leur plus haute puissance. […] Quoi qu’il arrive, un tel pays n’oubliera point qu’il a fait la révolution de 89 et proclamé les droits de l’homme du haut de la plus grande tribune qui ait jamais été ouverte à la conscience humaine.

76. (1889) Le théâtre contemporain. Émile Augier, Alexandre Dumas fils « Émile Augier — Chapitre VIII »

Devenu riche, il veut jouir : le voilà pris du goût des scandales et des plaisirs de haut vol.  […] Sa femme, ayant apporté huit cent mille francs, dans le ménage, en dépense, haut la main, cent vingt mille par an. […] La haute position commerciale qu’il a conquise, les deux millions qu’il a gagnés, Bernard les doit à sa direction et à ses conseils. […] Mot de nature, trait de haut comique qui part du fond de l’observation. […] Emile Augier a élevé son sujet dans une plus haute sphère.

77. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Première partie. — Chapitre VIII. »

Il ne le fut pas seulement par l’appareil dont il s’entourait, parcourant les campagnes sur un char, aux sons d’une musique préparée pour adoucir et charmer les esprits ; il enseigna dans ses vers la plus haute métaphysique, celle que le polythéisme n’affirmait pas ; l’essence immortelle de l’âme, et la plus pure morale, celle que la mythologie démentait par ses profanes exemples. […] Sans doute, dans quelques vers épars d’Empédocle sur les premières ébauches de création fortuite, on pourrait voir ce panthéisme où, depuis tant de siècles, ont abouti souvent la fausse imagination et la fausse science ; mais il semble, au contraire, malgré les éloges de Lucrèce, que le poëte d’Agrigente était spiritualiste au plus haut degré dans sa Cosmogonie comme dans sa morale. […] Envoie vers moi, sous la conduite de la piété qui le guide, un char docile, etc. » Puis, s’animant à cet espoir d’un appui céleste et d’une vérité descendue d’en haut, le poëte disait tout à la fois dans un esprit de confiance et de doute : « Ose, et alors tu pourras librement courir sur les hautes cimes de la sagesse. […] Un peu enveloppée de nuages, comme l’était la philosophie ancienne, elle semble se proposer une espérance encore plus haute qu’elle ne l’exprime et avoir pour dernier terme ce qui élève bien plus que ce qui abaisse l’humanité. […] On pourrait supposer Empédocle, d’après quelques vers de ses descriptions imitées par Lucrèce ; mais nulle trace du rhythme connu de ses poëmes ne se trouve dans le fragment cité ; et ce fragment, au contraire, sous la main d’un habile éditeur germanique, s’emboîte, avec peu de changements, dans les libres circuits de la strophe pindarique : Nous terminerons ici une étude trop incomplète sur cette haute poésie philosophique et religieuse puisée aux mêmes sources que celles du poëte thébain et s’animant parfois de la même ardeur.

78. (1929) Critique et conférences (Œuvres posthumes III)

F., un beau brun, côtelettes épaisses, voix de stentor, parle beaucoup et très haut. […] Mais je reprends les choses d’un peu plus haut. […] Cranmer Byng, sonne haut et clair dans le plein air de la joie… et du souci de vivre. […] rien de l’anecdote ; c’est Vénus, c’est Mars, toujours quelque sentiment porté à son plus haut degré. […] Fiacre spécial où le cocher était juché derrière et plus haut que le toit.

79. (1870) De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés « De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés — Chapitre XIII : Affinités mutuelles des êtres organisés »

Peut-être est-ce en partie pour cela que presque tous les naturalistes regardent comme de la plus haute valeur les ressemblances des organes de haute importance vitale et physiologique. […] De même, nul ne soutiendra que les organes rudimentaires ou atrophiés soient d’une haute importance vitale ou physiologique ; pourtant on sait qu’ils ont souvent une très haute valeur en classification. […] Il est évident qu’un certain ensemble constant de caractères divers est surtout de la plus haute valeur en histoire naturelle. […] Nous verrons clairement, un peu plus loin, pourquoi les caractères embryologiques sont d’une si haute importance à ce même point de vue. […] Geoffroy Saint-Hilaire a fortement insisté sur la haute importance des relations de connexité entre les organes homologues.

80. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre XXV. Mort de Jésus. »

Il était sûrement au nord ou au nord-ouest de la ville, dans la haute plaine inégale qui s’étend entre les murs et les deux vallées de Cédron et de Hinnom 1158, région assez vulgaire, attristée encore par les fâcheux détails du voisinage d’une grande cité. […] Ce triste soulagement des condamnés vulgaires n’allait pas à sa haute nature. […] Selon une tradition, Jésus aurait prononcé cette parole, qui fut dans son cœur, sinon sur ses lèvres : « Père, pardonne-leur ; ils ne savent ce qu’ils font 1178. » Un écriteau, suivant la coutume romaine, était attaché au haut de la croix, portant en trois langues, en hébreu, en grec et en latin : LE ROI DES JUIFS. […] Désormais hors des atteintes de la fragilité, tu assisteras, du haut de la paix divine, aux conséquences infinies de tes actes. […] La présence auprès de lui de ce précieux dépôt lui assurait sur les autres apôtres une sorte de préséance, et donnait à sa doctrine une haute autorité.

81. (1865) Cours familier de littérature. XX « CXVIIIe entretien. Littérature américaine. Une page unique d’histoire naturelle, par Audubon (2e partie) » pp. 161-239

L’entrée, adroitement ménagée vers le haut, sur le côté, a la forme d’une arche surbaissée. […] Ceux de la grotte cherchaient généralement leur nourriture, ou faisaient leurs évolutions si haut au-dessus du moulin, ou de la crique, que ceux du moulin ne les rencontraient jamais. […] Enfin arriva le tour des enfants, et à cause de leur race on les porta à de hauts prix. […] Mais dans le creux d’un arbre, où toutes nichent en communauté, il se trouve plus haut ou plus bas, suivant la convenance générale. […] Rien n’est plus vif et plus joyeux ; du haut des vieux troncs et des arbres tombant de décrépitude, la voix du pivert se fait entendre, et tous ses camarades lui répondent.

82. (1864) William Shakespeare « Première partie — Livre II. Les génies »

Les voilà haut, les voilà loin ; ce ne sont plus que des points noirs. […] Ajax fils d’Oïlée est de moins haute taille qu’Ajax fils de Télamon. […] Les roues du char étaient faites d’yeux et si hautes qu’on avait peur. […] Cherchez une plus haute formule, vous ne la trouverez pas. […] Peut-être la plus haute expression de l’Allemagne ne peut-elle être donnée que par la musique.

83. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Entretiens de Gœthe et d’Eckermann (suite) »

Gœthe n’était pas un physicien, un géomètre ; mais il était un naturaliste, il avait à un haut degré le génie de l’histoire naturelle, le sens et le tact du monde organique, et, de ce côté, en se confiant en sa force, il ne se trompait pas. […] S’il classait les autres, il se classait aussi lui-même ; il s’estimait à son taux, ni trop haut, ni trop bas. […] Aussi ses rapports personnels avec Gœthe, tout en étant bons et parfaitement convenables, s’en trouvaient quelquefois un peu gênés : « Tieck, disait Gœthe à ce propos, est un talent d’une haute signification (très-significatif, c’était encore un des mots favoris de Gœthe), et personne ne peut mieux que moi reconnaître ses mérites extraordinaires ; mais si on veut l’élever au-dessus de lui-même et l’égaler à moi, on se trompe. […] L’Avare surtout, dans lequel le vice détruit toute la piété qui unit le père et le fils, a une grandeur extraordinaire et est, à un haut degré, tragique. […] Gœthe, qui connut et ne goûta que médiocrement Mme de Staël, ne paraît pas avoir eu une bien haute idée de Chateaubriand, le grand artiste et le premier en date de la génération nouvelle.

84. (1880) Les deux masques. Première série. I, Les antiques. Eschyle : tragédie-comédie. « Chapitre VIII, les Perses d’Eschyle. »

Le monde finit à ses hautes murailles où les archers veillent sur les plates-formes. […] » — « Pousse de hautes lamentations !  […] » — « Les hauts cris ! jette les hauts cris ! » — « Oui, les hauts cris. » — « Baigne tes yeux de larmes ! 

85. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « DE LA LITTÉRATURE INDUSTRIELLE. » pp. 444-471

Avec plus d’un illustre, le discours ne sort plus de là : c’est un cri de misère en style de haute banque et avec accompagnement d’espèces sonnantes. […] Sur ce point comme sur presque tous les autres qui touchent à la littérature, il ne s’élève pourtant aucun blâme, aucun rire haut et franc : la police extérieure ne se fait plus. […] Cependant de grands et hauts talents, obsédés ou aveuglés, cèdent au torrent et y poussent, imitent et encouragent les déportements dont ils croient pouvoir toujours se tirer eux-mêmes sans déshonneur. […] Je crois, par exemple, que ç’a été une faute au Journal des Débats, resté après tout à la tête de la littérature quotidienne, d’obéir en cette crise à son système de prudence, et de ne pas protester tout haut. […] Mais tant que cette espèce de courage ne manquera pas aux hommes de talent haut placés, il y aura de la ressource contre le mal137.

86. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Mirabeau et Sophie. — II. (Lettres écrites du donjon de Vincennes.) » pp. 29-50

Dans l’admirable Mémoire ou Lettre justificative adressée à son père, le ton est tout oratoire et atteint par moments à la haute éloquence. […] Je vous adresse des vérités respectueuses, mais hautes et fortes, et il est digne de vous de les entendre et d’en convenir. Tout cela est fait pour être dit debout, le front haut, le geste animé, la physionomie parlante. […] Il fait sonner bien haut le mot de parricide, et donne à entendre à M. de Maurepas que s’y prêter comme il le fait, c’est s’en rendre complice. […] À la manière déférente dont il parle de Marmontel, de Thomas, de Raynal et des auteurs secondaires, on sent que, pour leur céder si aisément le haut du pavé en littérature, ce n’est pas là le champ de bataille définitif qu’il s’est choisi.

87. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Volney. Étude sur sa vie et sur ses œuvres, par M. Eugène Berger. 1852. — I. » pp. 389-410

Je voudrais, à mon tour, repasser sur quelques points et marquer, comme je l’entends, les traits de cette sèche, exacte et assez haute figure. […] Dans notre jeunesse, et quand le Moyen Âge était à la mode, je me rappelle avoir entendu regretter, au sujet de Volney, qu’au lieu de ce nom qui siérait aussi bien à un personnage de roman, il n’eût point gardé ce premier nom pittoresque de Chassebœuf, qui rappelait un chevalier et haut baron poursuivant dans la plaine le vilain et piquant les troupeaux de sa lance : mais le commun du monde y voyait naturellement le vilain et le bouvier encore plus que le chevalier. […] On lui voudrait un peu de ce sentiment qu’il simulait lorsqu’à un Arabe qui lui demandait pourquoi il était venu de si loin, il répondait : « Pour voir la terre et admirer les œuvres de Dieu. » Volney monte au sommet du Liban, d’où il jouit du spectacle des hautes montagnes : « Là, de toutes parts, dit-il, s’étend un horizon sans bornes ; là, par un temps clair, la vue s’égare et sur le désert qui confine au golfe Persique, et sur la mer qui baigne l’Europe : l’âme croit embrasser le monde. » Du haut de cette cime témoin de tant de grandes choses, et d’où l’esprit se porte en un clin d’œil d’Antioche à Jérusalem, quelles vont être ses pensées ? […] Je ne veux pas faire tort à Volney ; je ne prétends point lui imposer la poésie : ce n’est point à Lamartine parcourant les mêmes lieux et les revêtant de ses couleurs trop vastes et de son luxe trop asiatique ; ce n’est pas à Chateaubriand, plus sobre et plus déterminé de contours, mais pittoresque avant tout, que je le comparerai : c’est à un savant de son temps, à un observateur et à un physicien du premier ordre, à l’illustre Saussure visitant, le baromètre et le marteau du géologue à la main, les hautes cimes des Alpes qu’il a comme découvertes. […] Après bien des tourbillons affreux et des tempêtes, le ciel tout d’un coup se rassérène ; la seizième et dernière soirée que passent les voyageurs en ce haut lieu est d’une beauté ravissante : « Il semblait que toutes ces hautes sommités voulussent que nous ne les quittassions pas sans regrets. » L’horizon en tout sens se colore, les cimes supérieures se nuancent, ainsi que les neiges qui les séparent : Tout l’horizon de l’Italie paraissait bordé d’une large ceinture, et la pleine lune vint s’élever au-dessus de cette ceinture avec la majesté d’une reine, et teinte du plus beau vermillon.

88. (1889) L’art au point de vue sociologique « Chapitre premier. La solidarité sociale, principe de l’émotion esthétique la plus complexe »

. — Le but le plus haut de l’art est de produire une émotion esthétique d’un caractère social. […] A ce sujet un problème se pose, qui intéresse au plus haut point la morale et l’art. […] Si, des rudiments du beau, nous nous élevons à son plus haut développement, le côté social de la beauté va croissant et finit par tout dominer. […] L’émotion morale la plus haute est, elle aussi, une émotion sociale, mais elle se distingue de l’émotion esthétique par le but qu’elle poursuit et impose à la volonté : réaliser dans l’individu et dans la société les conditions de la vie la plus sociale et la plus universelle. […] Le but le plus haut de l’art est de produire une émotion esthétique d’un caractère social.

89. (1885) Préfaces tirées des Œuvres complètes de Victor Hugo « Préfaces des pièces de théâtre — Préfaces de « Marion de Lorme » (1831-1873) »

C’est ainsi qu’ils placeront haut la dignité de l’art. […] Si cet ouvrage avait une plus haute valeur, on pourrait soumettre cette observation aux personnes qui affirment que la révolution de juillet a été nuisible à l’art. […] Elle est belle, elle est haute. […] Certes, on peut tout attendre de ces générations nouvelles qu’appelle un si magnifique avenir, que vivifie une pensée si haute, que soutient une foi si légitime en elles-mêmes.

90. (1860) Ceci n’est pas un livre « Les arrière-petits-fils. Sotie parisienne — Premier tableau » pp. 180-195

Que veux-tu, ma colombe… il y a des hauts et des bas dans l’existence. […] Finette, vous oubliez que j’ai le cœur trop haut placé pour ne pas mettre l’indépendance au-dessus de tous les biens de cette terre. […] (Haut, avec impassibilité.) […] Haut.)

91. (1929) Amiel ou la part du rêve

Une seule action s’exerce, d’assez loin et d’assez haut (du haut de Genève), dans ces années d’étude, sur le jeune solitaire : c’est celle d’Adolphe Pictet, professeur d’esthétique à l’Académie de Genève depuis 1838. […] Une société où l’on rit haut, que peut-elle avoir de commun avec l’idée de changer un pays ? […] L’observateur historique suivrait ce dialogue de haut, d’un balcon du Jura avec Jouffroy, ou du chalet de M.  […] L’attention est souvent à sa plus haute concentration pendant l’opération mécanique que chacun poursuit. […] Nous avons fait allusion plus haut à un dialogue lémanien des philosophes et des philosophies.

92. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Seconde partie. Poétique du Christianisme. — Livre quatrième. Du Merveilleux, ou de la Poésie dans ses rapports avec les êtres surnaturels. — Chapitre IX. Application des principes établis dans les chapitres précédents. Caractère de Satan. »

Écoutez le prince des ténèbres s’écrier, du haut de la montagne de feu d’où il contemple pour la première fois son empire : « Adieu, champs fortunés, qu’habitent les joies éternelles. […] « Ô toi qui, couronné d’une gloire immense, laisses, du haut de ta domination solitaire, tomber tes regards comme le Dieu de ce nouvel univers ; toi, devant qui les étoiles cachent leurs têtes humiliées, j’élève une voix vers toi, mais non pas une voix amie ; je ne prononce ton nom, ô soleil ! […] Il ne méritait pas un pareil retour, lui qui m’avait fait ce que j’étais dans un rang éminent… Élevé si haut, je dédaignai d’obéir ; je crus qu’un pas de plus me porterait au rang suprême et me déchargerait en un moment de la dette immense d’une reconnaissance éternelle… Oh !

93. (1909) Les œuvres et les hommes. Philosophes et écrivains religieux et politiques. XXV « L’abbé Noirot »

Un jour viendra, nous aimons à l’espérer, où l’abbé Noirot aura groupé autour de lui une véritable école philosophique, et alors il sera obligé de donner aux hommes que les hautes recherches de la philosophie intéressent un exposé agrandi et approfondi de sa doctrine. […] Nous qui le signalons aujourd’hui, nous n’avons encore lu que la partie du cours qui traite de la psychologie, mais nous pouvons assurer que le regard qui tombe là sur les travaux psychologiques de ce temps a l’autorité froide d’un regard de juge qui voit de plus haut que ce qu’il voit. […] Le livre de l’abbé Noirot, ou, pour parler mieux, ses idées peuvent donner l’espérance que philosophiquement notre pays n’a pas perdu tout à fait le sentiment de la vérité métaphysique, c’est-à-dire, en somme, de la plus haute vérité.

94. (1883) Souvenirs d’enfance et de jeunesse « Chapitre I. Le broyeur de lin  (1876) »

Des rues entières étaient formées des longs et hauts murs de ces demeures cloîtrées. […] C’était un manoir comme tant d’autres, une ferme soignée, d’apparence ancienne, entourée d’un long et haut mur, de belle teinte grise. […] Cela donnait une haute idée de la sagacité extraordinaire de la justice, de la promptitude de son coup d’œil, de la sûreté avec laquelle elle saisissait la piste d’un crime. […]  » Il était plongé dans les plus sombres pensées, quand il vit entrer le broyeur de lin, droit en sa haute taille et plus pâle que la mort. […]  » Ses promenades se bornaient à faire quelques pas sous les hauts tilleuls qui abritaient le manoir.

95. (1824) Ébauches d’une poétique dramatique « Division dramatique. » pp. 64-109

En remontant encore plus haut, on peut voir, par l’exposition des Cœphores, comment Eschyle avait conçu la tragédie. […] Mais ce qui fait paraître ces défauts sur le théâtre, c’est quand un autre acteur entend tout ce que dit celui qui parle seul : car alors nous voyons bien qu’il disait tout haut ce qu’il devait seulement penser ; et bien qu’il soit quelquefois arrivé qu’un homme ait parlé tout haut de ce qu’il ne croyait et ne devait se dire qu’à lui-même, nous ne le souffrons pas néanmoins au théâtre, parce que l’on ne doit pas y représenter si grossièrement l’imprudence humaine, en quoi Plaute a souvent péché. En ces rencontres donc, il faut trouver une raison de vraisemblance qui oblige cet acteur à parler tout haut, ce qui est assez difficile ; car l’excès de la douleur ou d’une passion n’est pas, à mon avis, suffisant. […] Où trouverait-on, dans la nature, des hommes raisonnables qui parlassent ainsi tout haut, qui prononçassent distinctement et avec ordre tout ce qui se passe dans leur cœur ? […] Dans la comédie, il faut s’en servir pour produire des jeux de théâtre, comme lorsqu’un acteur fait en deux mots, tout bas, une réflexion plaisante sur ce que l’autre dit tout haut, etc.

96. (1902) Les œuvres et les hommes. Le roman contemporain. XVIII « Émile Zola »

… L’auteur de ce livre de haute graisse, car il est de haute graisse, aurait-il été, il faut bien le dire, charcutier ? […] … Quand on publie des livres si hauts en couleur, on ne doit pas avoir peur de l’effet de sa couleur, son seul crime, à lui, dit M.  […] Zola, qui aurait bien la petite coquetterie d’être une monstruosité, ni inspiration, ni observation indiquant une haute puissance d’artiste, même fourvoyée. […] L’auteur de L’Assommoir n’est ni plus haut, ni plus fort que son siècle, qui l’a emboîté dans ses rails impérieux. […] Je l’ai dit plus haut, l’homme de L’Assommoir est le dernier mot du réalisme, mais ce dernier mot ne se répéterait pas.

97. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « M. Victor Vousin. Cours de l’histoire de la philosophie moderne, 5 vol. ix-18. »

Elle dominait les sciences physiques et s’y appuyait ; elle siégeait aux plus hautes régions de l’astronomie avec Laplace ; elle régnait à l’Institut par les brillants travaux de Cabanis, surtout par les analyses rigoureuses et en apparence définitives de Tracy ; en morale, elle était arrivée à rédiger son Catéchisme avec Saint-Lambert et Volney. […] « Elle ne s’élève pas encore bien haut, a dit M.  […] Aussi, malgré les premiers étonnements et les hauts cris que soulève toute idée nouvelle, l’éclectisme, servi par la belle parole et l’infatigable activité de son promoteur, a fait fortune avec les années, et son nom est devenu celui même de l’école philosophique moderne. […] Quel que soit le jugement à porter sur l’ensemble de cette science et sur les hautes prétentions qu’elle élève, elle n’est pas représentée dans l’idée vulgaire qui s’attache au mot d’éclectisme. […] C’est que le lieu, l’assistance les échauffe, et tire de leur esprit plus qu’ils n’y trouvent sans cette chaleur. » Les professeurs célèbres qui ont porté si haut l’honneur de l’enseignement en France sous la Restauration, ont prouvé qu’ils savaient unir en eux ces deux arts qui peuvent très-bien se séparer.

98. (1886) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Deuxième série « José-Maria de Heredia.. »

Mais enfin, à considérer l’histoire de très haut, nous avons dans les deux cas une poésie neuve, sortie d’un grand mouvement d’idées, qui peu à peu substitue à l’inspiration un art plus conscient et moins spontané. […] C’est lui ; sabres au flanc, l’éventail haut, il va. […] M. de Heredia possède, à un plus haut degré peut-être qu’aucun autre poète, le don de saisir, entre les images, les idées, les sentiments — et le son des mots, la musique des syllabes, de mystérieuses et sûres harmonies. […] En face, la sierra se dressait haute et sombre. […] Alors, formidable, enflammée D’un haut pressentiment, tout entière, l’armée, Brandissant ses drapeaux sur l’occident vermeil, Salua d’un grand cri la chute du Soleil.

99. (1905) Les œuvres et les hommes. De l’histoire. XX. « Le roi René »

Nous avons eu celle de Villeneuve-Bargemont, celle de Quatrebarbes, celle de Vallet de Viriville, toutes insuffisantes, nous dit Lecoy de la Marche, du haut de la sienne et du fond de sa modestie… Quant à moi, je ne connais rien de Lecoy de la Marche. […] C’est un de ces infortunés historiques plus hauts que leur destin, et qui sont malheureux jusque dans la mémoire qu’on en garde. […] Duc de Bar et de Lorraine par héritage, René d’Anjou, qui ne mit jamais qu’un fantôme de couronne sur son casque, fut roi de Sicile et de Jérusalem ; mais, roi de Sicile titulaire, il n’y régna réellement que le temps qu’il y combattit, et ce nom de Jérusalem, qui sonnait encore si haut de son temps, ne fut autour de lui que le vain bruit d’un clairon qui, hélas ! […] Louis XI lui donna la haute main dans sa guerre de Bretagne ; le défiant se confia, et le loyal René le méritait. […] J’ai désigné plus haut les livres publiés sur le roi René, auquel on revient par la pente du bibelot, de la vignette, du manuscrit illustré, de la peinture et des œuvres poétiques, ce qui, du reste, est bien la pente d’un temps d’art prétentieux, de trissotinisme et d’amusettes littéraires comme le nôtre.

100. (1906) Les œuvres et les hommes. Femmes et moralistes. XXII. « Les Femmes d’Amérique » pp. 95-110

Disons-le à l’honneur de tout le monde, de ce côté-ci de l’hémisphère personne, même parmi ceux que l’or qu’ils remuent dans leurs mains puissantes devrait fasciner, n’aurait voulu penser tout haut que l’amour de l’argent et sa production fussent le dernier mot de la moralité humaine, l’idéal enfin de la perfection absolue pour les individus et pour les peuples. […] Une telle théorie de haute impudence manquait au Montfaucon intellectuel du xixe  siècle, où tant de théories pourrissent. […] Mais cette hauteur de raillerie impénétrable et glacée ne tenterait qu’un esprit grandiose, et, il faut bien l’avouer, la vulgarité abaissée de l’expression, le style, enfin, cette voix qui trahit un homme quand il aurait tous les déguisements autour de sa pensée, attestent assez haut que Bellegarrigue est sérieux, qu’il est naïf dans sa dégradante apothéose. […] On le bourre de toutes les connaissances positives qui mettent leur plomb sur les ailes fragiles de l’imagination et de la Rêverie, et c’est ainsi qu’on fait de ces jeunes filles les ravissants monstres d’orgueil et d’égoïsme matériel qui, à dix-huit ans, ne voient plus dans l’homme — dans l’homme, qu’on a la bêtise d’aimer en Europe, — autre chose « qu’un fait monnayé dont la valeur est nulle, s’il ne s’agit pas de la mettre en portefeuille (page 65). » Il est vrai que, pour le penseur vigoureux auquel nous avons affaire aujourd’hui, l’Orgueil est la plus haute des vertus, et l’Égoïsme matériel la plus haute des intelligences.

101. (1887) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (deuxième série). IX « Lacordaire. Conférences de Notre-Dame de Paris » pp. 313-328

Les Conférences qui les composent, et qui contiennent dix années d’enseignement du haut de la chaire sacrée, ont été bien des fois signalées et exaltées dans les journaux ; car, en France, quelle que soit l’opinion religieuse qu’on professe, on résiste peu à l’éloquence. […] Ce Narcisse d’égoïsme lâche s’applaudissait lui-même en retrouvant dans des doctrines plus hautes que lui les traits épars de son image ! […] Or, ces deux caractères universels à la prédication catholique, le père Lacordaire les posséda, pour son compte, au plus haut degré. […] C’est une vaste polémique engagée et soutenue du haut de la chaire, mais qui n’en est ni moins forte, ni moins victorieuse parce qu’elle en est descendue, parce que nous la retrouverons toujours à portée de notre main quand, lassés, nous voudrons nous appuyer, pour reprendre haleine, contre le mur de l’orthodoxie, et revoir de là la défaite de l’ennemi vaincu… Modèles d’apologie et de discussion, elles furent prononcées pour rappeler aux pieds de notre Dieu abandonné les générations actuelles, et elles ont fait leur moisson sans doute, mais le confessionnal le sait seul et ne parle pas, ce tombeau de la pénitence ! […] Souvent, en effet, l’ornementation de l’édifice empêche les esprits qui ne savent pas regarder de haut ou de niveau, de rendre justice à la grandeur des lignes et à la hardiesse des profils.

102. (1865) Cours familier de littérature. XIX « CXIIIe entretien. La Science ou Le Cosmos, par M. de Humboldt (2e partie). Littérature de l’Allemagne. » pp. 289-364

Le premier mot de Job poussait l’esprit de l’homme mille et mille fois plus loin et plus haut que tout le savant verbiage du philosophe prussien : Ubi est Deus ? […] C’est un beau titre de gloire pour Varenius, que sa Géographie générale et comparée ait pu fixer à un haut degré l’attention de Newton. […] Leur nature calcinée les ferait plutôt croire volcaniques : matière élevée dans les airs par la force démesurée de projection, et retombant du haut de l’atmosphère terrestre sur notre hémisphère. […] L’exilé ne vit pas, il est vrai, cette partie des steppes qui, recouvertes dans l’été de plantes vigoureuses hautes de quatre à six pieds, offre, à chaque souffle du vent, la gracieuse image d’une mer de fleurs agitée. […] Les eaux coulent du haut des montagnes dans les vallons, aux lieux qui leur ont été assignés, afin que jamais elles ne passent les bornes prescrites, mais qu’elles abreuvent tous les animaux des champs.

103. (1900) Le rire. Essai sur la signification du comique « Chapitre III. Le comique de caractère »

Mais nous avons suivi en réalité la méthode inverse : c’est du haut vers le bas que nous avons dirigé la lumière. […] Telle est, semble-t-il, la première différence essentielle entre la haute comédie et le drame. […] Et plus profonde est la distraction, plus haute est la comédie. […] Peindre des caractères, c’est-à-dire des types généraux, voilà donc l’objet de la haute comédie. […] Et il réalisera ainsi la plus haute ambition de l’art, qui est ici de nous révéler la nature. — D’autres se replieront plutôt sur eux-mêmes.

104. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Mémoire de Foucault. Intendant sous Louis XIV »

Une Introduction savante, mise en tête, est un morceau de biographie et d’histoire d’un haut et sérieux intérêt. […] Ses travaux les plus importants et les plus suivis se sont depuis longtemps dirigés du côté de l’Orient, et du plus haut Orient ; élève de Burnouf, il a pris le sanscrit pour son domaine ; mais ce n’est point un philologue pur, et il a surtout marqué sa vocation scientifique originale en faisant avancer d’un pas la branche d’études qui tend à montrer que les anciens peuples venus d’Asie en Europe, et qu’on désigne sous le nom d’indo-germaniques, ont eu, à l’origine, un même système de mythes, comme ils ont en une même langue ; les liens primitifs de famille se dénotent chez eux par tous les signes. […] Choisi pour la charge de procureur du roi des requêtes de l’hôtel, reçu haut la main avec honneur et sans subir l’examen, puis six ans après (1671) pourvu de la charge d’avocat général au grand Conseil, reçu également sans subir d’interrogatoire et avec dispense d’âge (il fallait avoir trente ans, et il n’en avait que vingt-huit), on voit que Foucault était ce qu’on appelle un excellent sujet, régulier, exemplaire, et même brillant dans les parties sombres : il s’agit d’un brillant qui n’est que relatif. Nous sommes ici dans des portraits de magistrature un peu noirs et tristes, qui ne se discernent bien qu’au bout de quelques minutes, au fond de ces hauts appartements donnant sur des rues étroites, où le soleil ne pénétrait que rarement. […] Il ne songe à rien dissimuler de sa conduite dans ces odieuses opérations, qu’il lui était difficile d’alléger, sans doute mais qu’il est toujours disposé plutôt à aggraver : « Le 23 juillet 1681, j’ai proposé à M. de Louvois de faire venir de Roussillon deux compagnies de cavalerie dans le haut Rouergue et dans le haut Quercy, pour seconder les missionnaires ecclésiastiques. » Foucault n’a pas inventé les dragonnades, dont le triste honneur reste acquis à Marillac, intendant du Poitou ; mais il a été des premiers, on le voit, à accueillir l’heureuse idée et à vouloir la faire fructifier.

105. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « La civilisation et la démocratie française. Deux conférences par M. Ch. Duveyrier »

Qui n’a pas vu cette taille mince, élevée, restée jeune, ce port ferme et résolu, cette démarche allègre, ce front haut légèrement dépouillé, aux cheveux clairsemés grisonnant à peine, cet œil surtout encadré d’un sourcil noir ardent, cette prunelle élargie et comme avide d’absorber le monde entier dans son orbite, ce regard qui vous perce et qui plonge en vous, ne connaît point l’homme. […] Plusieurs, entre les plus haut arrivés, y travaillent et y donnent les mains80. […] Il faut voir le monde et notre espèce d’un peu moins haut pour s’en éprendre, et cependant les voir en grand et avec largeur. […] Le simple amour de la science et de ses applications salutaires, le spectacle grandissant de l’humanité émancipée, le caritas generis humani dans sa forme la plus haute, ne suffisent-ils pas à faire entreprendre cette sainte ligue, cette croisade dernière que M.  […] Pinson fut inflexible : le nom d’Édon était le titre de noblesse de son restaurant. — Un républicain de nos amis, des plus dévoués à sa cause sous Louis-Philippe, et qui avait épousé une femme de la haute bourgeoisie, encore plus républicaine que lui, avait un beau-frère (mari de sa sœur) peintre en bâtiment, à qui il avait fermé sa porte ; c’était également par égard pour sa femme, que cette parenté désagréable eût embarrassée et choquée. — La vanité humaine, moyennant subterfuge, se retrouve partout.

106. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « Sur la reprise de Bérénice au Théâtre-Français »

Dans l’ordre poétique comme dans l’ordre moral, la grandeur est au prix de l’effort, de la lutte et de la constance ; l’idéal habite les hauts sommets. […] Le prestige dont parle Voltaire avait cessé, et Geoffroy, qui a le langage un peu cru, nous dit : « Il est constant que Bérénice n’a point fait pleurer à cette représentation, mais qu’elle a fait bâiller ; toutes les dissertations littéraires ne sauraient détruire un fait aussi notoire. » Talma pourtant goûtait ce rôle d’Antiochus ou celui de Titus, tel qu’il le concevait, et il en disait, ainsi que de Nicomède, que c’étaient de ces rôles à jouer deux fois par an, donnant à entendre par là que ce ton modéré, et assez loin du haut tragique, détend et repose32. […] Pourquoi l’intelligence critique ne consentirait-elle pas au même effort équitable pour apprécier convenablement des œuvres moins hautes sans doute, plus délicates souvent, sociales au plus haut degré, et qu’il suffit de reculer légèrement dans un passé encore peu lointain, pour y ressaisir toutes les justesses et toutes les grâces ? […] Titus donc exprime en lui le caractère tragique, en ce sens qu’il soutient une lutte généreuse, qu’il sort du penchant tout naturel et vulgaire ; qu’il a le haut sentiment de la dignité souveraine et de ce qu’on doit à ce rang de maître des humains. […] Les chiffres conservés des recettes ne répondent pas tout à fait à cette haute renommée de succès.

107. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Poésies nouvelles de M. Alfred de Musset. (Bibliothèque Charpentier, 1850.) » pp. 294-310

Comment lord Byron eût-il accueilli, je vous prie, une avance du poète Keats, de ce jeune aigle blessé qui tomba sitôt, et qu’il traite partout si cavalièrement, du haut de son dédain ou de sa pitié ? […] Combien de tels raffinements étaient loin d’approcher de ces hautes et saines pensées ! […] Les quatre pièces que M. de Musset a intitulées Nuits, sont de petits poèmes composés et médités, qui marquent la plus haute élévation de son talent lyrique. […] Tout ce qui est beau de Milton est hors de pair ; on y sent l’habitude tranquille des hautes régions et la continuité dans la puissance. […] Ce n’est pas au moment où M. de Musset s’élevait le plus haut que cette vogue mondaine s’est déclarée ; elle n’est venue qu’après, comme il arrive d’ordinaire, mais elle existe.

108. (1782) Plan d’une université pour le gouvernement de Russie ou d’une éducation publique dans toutes les sciences « Plan d’une université, pour, le gouvernement de Russie, ou, d’une éducation publique dans toutes les sciences — Essai, sur, les études en Russie » pp. 419-428

Dans les uns c’est la plus basse qui s’appelle la première, dans les autres c’est la plus haute. Chaque classe a son préfet à demeure et qui ne monte qu’à titre de talent et de capacité à un poste plus haut. […] On reste dans ces classes un an, six mois ; dans les plus basses, moins longtemps que dans les hautes. […] Cette science si utile, et qui a été portée en France à un si haut degré de perfection, n’a pas encore, dans les universités des autres pays, la considération qu’elle mérite. […] A cette époque, le monde était si ancien, que les fils des hommes avaient poussé leurs connaissances au plus haut degré.

109. (1887) Discours et conférences « Discours prononcé aux funérailles de M. Stanislas Guyard, Professeur au Collège de France »

Bientôt des travaux de haute valeur se succédèdèrent. […] Il voyait l’immense avenir d’une science qui nous fournira un jour sur la haute antiquité des lumières inattendues. […] Comme professeur d’abord à l’École des hautes études, puis parmi nous, M. 

110. (1761) Salon de 1761 « Peinture —  Carle Vanloo  » pp. 117-119

Tout ce que l’art porté à un haut point y a pu mettre de perfection y est. […] De trois pieds de large, sur cinq de haut. […] Du même De trois pieds et demi de haut.

111. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « Instruction générale sur l’exécution du plan d’études des lycées, adressée à MM. les recteurs, par M. Fortoul, ministre de l’Instruction publique » pp. 271-288

De longues années de paix avaient produit cet inconvénient au plus haut degré. […] On avait cherché à diminuer le nombre croissant des candidats aux carrières dites libérales, en n’admettant que les seuls d’entre eux vraiment capables ; les épreuves imposées étaient devenues plus sérieuses, plus difficiles : on faisait la barrière plus haute, pour que tous indifféremment ne pussent la franchir. […] L’Université, dirigée par des chefs illustres, peuplée de maîtres habiles, ne laissait rien à désirer pour la solidité et l’éclat des études littéraires classiques ; les hautes sciences trouvaient aussi toute satisfaction en elle. […] Il fallait, pour devenir un homme utile dans les carrières du haut commerce et de l’industrie, être ouvertement un transfuge des écoles de Rome et de la Grèce. […] Mises à leur place, ces notions entrent sans fatigue dans l’esprit des élèves, trouvent plus tard dans la vie leurs applications, et contribuent au plus haut degré à donner à l’enseignement de la chimie son véritable caractère.

112. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « Mémoires de l’abbé Legendre, chanoine de Notre-Dame, secrétaire de M. de Harlay, archevêque de Paris. »

Quoi qu’il en soit, les jours où il devait prêcher, il y avait concours prodigieux et affluence, et du plus beau monde, des personnages de la plus haute qualité, notamment des dames de la Cour : on n’avait de places à ses sermons qu’en les faisant retenir de très bonne heure. […] Il venait de se signaler par tout un Carême prêché aux Minimes de la Place Royale, où de mémoire d’homme, assure-t-on, il ne s’était vu un tel mouvement de dévots et surtout de dévotes de la haute société. […] Celui-ci même loua tout haut l’élégance et la pureté de son latin (car le compliment était en latin) et dit n’avoir rien entendu de mieux tourné en ce genre ni de plus élégant soit en France, soit en Italie. […] La mort du chancelier Séguier, qui survint sur ces entrefaites (1672), excita au plus haut degré son espérance. […] Quant aux vices du brillant prélat, il n’y aurait pas à les dissimuler, ce serait peine inutile : en regrettant de les trouver dans un homme de son rang et de sa condition à l’état d’affiche et de scandale, il n’y aurait pas non plus à les exagérer, et la leçon morale qui sortirait d’elle-même de ce désaccord criant parlerait assez haut.

113. (1886) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Deuxième série « Le père Monsabré »

Le maître-autel semble loin, très loin, et les verreries du fond sont comme une aurore fantastique entrevue au bout d’une haute futaie. […] Ce vaisseau est si vaste, si haut, si solennel, que les froufrous, les chuchotements, les petites mines s’y sentiraient mal à l’aise. […] Enfin, le cardinal, entouré de hauts dignitaires ecclésiastiques et d’un évêque ou deux, prend place sur un siège élevé. […] Je me figurais qu’il y avait d’autres choses à dire sur la confession, des choses plus délicates, plus intimes, plus ingénieuses et plus tendres — mais qui sans doute ne pourraient être dites que de moins haut, dans une enceinte plus étroite. […] Expliquez-moi pourquoi, en vous parlant, je vous aime, vous qui n’êtes pas mon sang, vous que je ne connais, pour la plupart, que pour vous avoir aperçus du haut de cette chaire ?

114. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Discours sur l’histoire de la révolution d’Angleterre, par M. Guizot (1850) » pp. 311-331

Dès le premier jour, il marqua haut sa place du regard, et il s’y prépara avec énergie. […] On ne juge plus que de haut. […] Pour moi, quand j’ai lu quelques-unes de ces hautes leçons si nettes et si tranchées sur l’Histoire de la civilisation, je rouvre bien vite un volume des Mémoires de Retz, pour rentrer dans le vrai de l’intrigue et de la mascarade humaine. […] Quoi qu’il en soit, les deux volumes publiés de cette Histoire de la révolution anglaise sont d’un sérieux intérêt et présentent un récit mâle et grave, une suite d’un tissu ferme et dense, avec de grandes et hautes parties. […] Quant aux autres, aux hommes d’État véritables, aux ambitieux de haute volée, vous croyez qu’ils ne succombent jamais que pour des motifs dignes d’eux, dignes du sacrifice pénible qu’ils s’imposent en nous gouvernant.

115. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Étienne Pasquier. (L’Interprétation des Institutes de Justinien, ouvrage inédit, 1847. — Œuvres choisies, 1849.) » pp. 249-269

Mais, entre les trois, qui donc introduira le parti des honnêtes gens modérés, pacifiques, de la haute bourgeoisie instruite et saine, non fanatique et non corrompue ? […] C’est son instinct, et il en fait sa règle expresse de conduite : « Je me résous, dit-il, prendre un vol à toute la teneur de ma vie, qui ne soit ni trop haut ni trop bas. » Une de ses lettres (la 12e du livre II) nous paraît renfermer toute sa théorie littéraire, l’idéal de la langue telle qu’il la désire, et il s’y dirige d’après le même esprit de droite et moyenne raison. […] Mais bientôt, avec l’âge et le cours des événements, les sujets deviennent plus sérieux : à partir d’un certain moment, toute l’histoire et la politique de son temps y passent, et nous y assistons avec lui, c’est-à-dire par les yeux d’un témoin judicieux, éclairé, placé au meilleur point de vue, ni trop près ni trop loin de la Cour, qui ne se pique point de parler en homme d’État, mais qui apprécie et sent les choses de sa nation avec le cœur et l’intelligence de cette haute bourgeoisie, alors si intègre et si patriotique, et qui se pouvait dire le cœur même de la France. […] D’après cette théorie, la résistance du Parlement aux volontés des rois n’excluait pas la fidélité, et en était bien plutôt au contraire l’expression la plus haute, la plus dévouée. […] Le chef et le héros de cette haute magistrature au xvie  siècle, le premier président Achille de Harlay, dira au duc de Guise qui le venait visiter au lendemain des Barricades, et qui le trouvait se promenant tranquillement dans son jardin : « C’est grand pitié quand le valet chasse le maître ; au reste, mon âme est à Dieu, mon cœur est à mon roi, et mon corps est entre les mains des méchants : qu’on en fasse ce qu’on voudra ! 

116. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Nouveaux documents sur Montaigne, recueillis et publiés par M. le docteur Payen. (1850.) » pp. 76-96

Pendant que le vaisseau de la France va un peu à l’aventure, qu’il gagne les mers inconnues et s’apprête à doubler ce que nos pilotes (si pilote il y a) appellent à l’avance le cap des Tempêtes, pendant que la vigie au haut du mât croit voir se dresser déjà à l’horizon le spectre du géant Adamastor, bien d’honnêtes et paisibles esprits s’obstinent à continuer leurs travaux, leurs études, et suivent jusqu’au bout et tant qu’ils peuvent leur idée favorite. […] Il n’est pas de ceux qu’enivrent et qu’entêtent ces honneurs de municipalité, ces « dignités de quartier », comme il les appelle, et dont tout le bruit « ne se promène que d’un carrefour de rue à l’autre » : s’il était homme à se prendre à la gloire, il la verrait plus en grand et la mettrait plus haut. […] Car, « pour se laisser tomber à plomb et de si haut, il faut que ce soit entre les bras d’une affection solide, vigoureuse et fortunée : elles sont rares, s’il y en a. » À cette manière dont il parle, on voit assez que La Boétie dès longtemps n’était plus. […] En un mot, la consolation que se donne Montaigne, à lui et aux autres, est aussi haute et aussi belle que peut l’être une consolation humaine sans la prière. […] Nul écrivain en français, y compris les poètes proprement dits, n’a eu de la poésie une aussi haute idée que lui.

117. (1872) Nouveaux lundis. Tome XIII « Malherbe »

En s’attachant sans réserve et sans mesure à l’Antiquité classique, latine et surtout grecque, ils le prirent trop haut ; ils ne purent soutenir jusqu’au bout leur gageure, ils se cassèrent la voix en voulant chanter sur un ton trop haut. […] On trouve en lui cette souveraine indifférence qui permet aux chefs d’école de conduire de haut leur art. […] La reine, après l’avoir parcourue des yeux, commanda à la princesse de Conti, qui était présente, de la lire tout haut. […] Il a dressé quelques colonnes de haut style. […] Il a le geste haut et souverain, — ce que j’appelle le coup d’archet.

118. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Troisième partie — Section 15, observations concernant la maniere dont les pieces dramatiques étoient représentées sur le théatre des anciens. De la passion que les grecs et les romains avoient pour le théatre, et de l’étude que les acteurs faisoient de leur art et des récompenses qui leur étoient données » pp. 248-264

Je n’apprétie pas trop haut, ajoute Ciceron, le salaire que Roscius auroit reçu. […] Après avoir joüé ils s’asseoïent, et dans cette posture ils replioient, pour ainsi dire, les organes de leur voix en respirant sur le ton le plus haut où ils fussent montez en déclamant, et en respirant ensuite successivement sur tous les autres tons, jusqu’à ce qu’ils fussent enfin parvenus au ton le plus bas où ils fussent descendus. […] Seneque écrit donc comme une chose rare, en parlant de Porcius Latro, un orateur son compatriote, son ami et son camarade d’étude : que ce Porcius qui avoit été élevé en Espagne, et qui étoit accoutumé à la vie sobre et laborieuse qu’on menoit encore dans les provinces, ne faisoit aucun remede pour conserver sa voix, qu’il n’observoit pas la pratique de la déploïer méthodiquement depuis le ton le plus haut jusques au plus bas et de la replier de même. […] Il les faisoit appeller par ce domestique que les romains tenoient auprès de leurs personnes pour parler pour eux dans les occasions où il falloit parler haut afin de se faire entendre.

119. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Chateaubriand — Chateaubriand, Mémoires »

C’était, comme on le sait, dans un salon réservé, à l’ombre d’une de ces hautes renommées de beauté auxquelles nul n’est insensible, puissance indéfinissable que le temps lui-même consacre et dont il fait une muse. […] On aime à retrouver ce ressort chez des hommes également haut placés, chez M. de La Mennais comme chez M. de Chateaubriand.  […] À côté de cette haute figure, vient la mère de M. de Chateaubriand, fille d’une ancienne élève de Saint-Cyr, et sachant elle-même par cœur tout Cyrus. […] Le chevalier résiste, il se défend, il obtient capitulation ; il reste intact, et son honneur, même d’enfant, peut marcher la tête haute, pur d’affront.  […] Après avoir piloté assez péniblement le lecteur en vue de nos côtes inégales, nous arrivons avec lui à la haute mer, et nous l’y laissons. 

120. (1862) Portraits littéraires. Tome II (nouv. éd.) « Joseph de Maistre »

Aussi, tous ceux qui ont passé après lui dans l’étude de ces temps l’ont-ils pris, même ses adversaires politiques, en haute et singulière estime. […] Dans ce désert habituel, il ne savait pas combien sa voix était haute et perçante, car rien ne lui renvoyait sa voix. […] Chez lui, l’imagination et la couleur au sein d’une haute pensée rendent à jamais présents les éternels problèmes. […] Quel immense sujet, madame, que les considérations politiques dans leurs rapports avec de plus hautes considérations ! […] Toutes les dignités et les plus hautes fonctions l’y attendaient.

121. (1859) Cours familier de littérature. VII « XLIe entretien. Littérature dramatique de l’Allemagne. Troisième partie de Goethe. — Schiller » pp. 313-392

Son âme, comme les choses hautes, était au niveau de tout. […] Les aigles plongent du haut du firmament sur la tête de leurs ennemis et ne les mordent pas au talon. […] « Du haut de sa demeure, d’où le regard s’étend au loin, le père contemple d’un œil joyeux ses propriétés florissantes. […] Elle ne riait pas haut ; c’était plutôt un doux roucoulement sourd, dans lequel la joie et la sérénité s’exprimaient parfaitement. […] On ne monte pas plus haut que certaines pages extatiques de Faust : plus haut, l’air raréfié ne porte plus l’homme ; mais il y a de grandes raisons de penser que, si la nature n’enfante pas souvent une individualité poétique de la force de Goethe, la littérature allemande dans son ensemble retrouvera une période de splendeur égale à la période qui porte le nom de Goethe.

122. (1861) Cours familier de littérature. XI « LXIIe entretien. Cicéron » pp. 81-159

Nous allons essayer de vous faire apprécier ce grand esprit ; si nous y réussissons, vous pourrez dire que vous avez vécu avec la meilleure compagnie de tous les siècles, avec la plus haute personnification de l’homme de lettres. […] Qui donc tomba de plus haut, d’un sort plus assuré en apparence, doué de telles puissances de génie, de sagesse, de faveur publique, d’estime et d’appui d’une telle masse de grands et de bons citoyens ? […] Cicéron montait plus haut, aussi haut que l’invocation humaine peut monter. […] Sa haute intelligence lui montrait des deux côtés des dangers presque égaux pour la patrie : l’anarchie et la faiblesse avec Pompée, la violence et la tyrannie avec César. […] Il ordonna de clouer la tête sanglante de Cicéron, entre ses deux mains coupées, sur la tribune aux harangues, suppliciant ainsi la plus haute éloquence qui fut jamais par les deux organes de la parole humaine, le geste et la voix.

123. (1857) Cours familier de littérature. III « XVIIe entretien. Littérature italienne. Dante. » pp. 329-408

Au sommet de ces collines de vignes hautes et d’amandiers fleuris pyramidaient quelques métairies romaines à l’aspect sombre, caverneux, monumental ; plus haut encore des pins parasols à larges cimes dentelaient l’horizon de leurs dômes noirs. […] J’y planai, dans cet éther, pendant je ne sais combien de temps, avec les ailes libres de mon âme, sans avoir le sentiment du monde d’en bas qui m’environnait, mais que je ne voyais plus de si haut. […] Il sait le secret des cœurs tendres, qu’il ne faut pas dire trop haut, même aux enfers : c’est que l’amour défie tout, excepté la séparation, le seul enfer de ceux qui aiment. […] Le fleuve poétique remonte à sa source pour y retrouver ces eaux qui coulent des hauts lieux. […] Il l’entoura des chœurs des anges, il la fit asseoir sur les degrés les plus hauts du trône de Dieu.

124. (1925) Portraits et souvenirs

M. de Valmont va la tête haute. […] Le front, très haut et large, était surmonté d’une abondante chevelure grise. […] Maintes pages y parlent du haut d’un cothurne et à travers un masque. […] Elle ne pouvait que garder la haute place qu’elle occupait dans l’admiration des lettrés. […] Celle surtout dont ces messieurs se comportent sur le gibet l’intéresse au plus haut point.

125. (1885) Préfaces tirées des Œuvres complètes de Victor Hugo « Préfaces des pièces de théâtre — Préface de « Marie Tudor » (1833) »

Le but du poète dramatique, quel que soit d’ailleurs l’ensemble de ses idées sur l’art, doit donc toujours être, avant tout, de chercher le grand, comme Corneille, ou le vrai, comme Molière ; ou, mieux encore, et c’est ici le plus haut sommet où puisse monter le génie, d’atteindre tout à la fois le grand et le vrai, le grand dans le vrai, le vrai dans le grand, comme Shakspeare. […] Il fait des choses plus hautes que nous qui vivent comme nous. […] S’il y avait un homme aujourd’hui qui pût réaliser le drame comme nous le comprenons, ce drame, ce serait le cœur humain, la tête humaine, la passion humaine, la volonté humaine ; ce serait le passé ressuscité au profit du présent ; ce serait l’histoire que nos pères ont faite confrontée avec l’histoire que nous faisons ; ce serait le mélange sur la scène de tout ce qui est mêlé dans la vie ; ce serait une émeute là et une causerie d’amour ici, et dans la causerie d’amour une leçon pour le peuple, et dans l’émeute un cri pour le cœur ; ce serait le rire ; ce serait les larmes ; ce serait le bien, le mal, le haut, le bas, la fatalité, la providence, le génie, le hasard, la société, le monde, la nature, la vie ; et au-dessus de tout cela on sentirait planer quelque chose de grand !

126. (1870) Portraits contemporains. Tome IV (4e éd.) « M. THIERS. » pp. 62-124

Il y a telle page de Jouffroy où il nous représente aussi le pâtre mélancolique et taciturne au haut de sa montagne ; mais ici, chez M. […] Mignet, par le haut développement grave et moral qui lui concilie tous les respects, a montré assez qu’il ne l’est pas. […] C’est tout simplement un des plus beaux morceaux de haute critique qui se puisse lire en telle matière. […] Guizot), que ce qu’il avait appris de ce matin, il avait l’air de le savoir de toute éternité, tant sa haute réflexion donnait vite à chaque connaissance une teinte profonde et comme reculée. […] Par cette vocation déclarée et par la supériorité aisée qu’il y porte, il élève bien haut son niveau intellectuel.

127. (1866) Petite comédie de la critique littéraire, ou Molière selon trois écoles philosophiques « Première partie. — L’école dogmatique — Chapitre III. — Du drame comique. Méditation d’un philosophe hégélien ou Voyage pittoresque à travers l’Esthétique de Hegel » pp. 111-177

Dans ce fier héros, la loi sévère du devoir, du sang à verser pour laver un affront, parle plus haut que l’amour. […] La sécurité dans l’extravagance, la sérénité dans la sottise, telle est l’essence du haut comique. […] Si j’étais tenu pour imbécile par les gentilshommes, par les gens magnifiques, généreux, de haute naissance, ah ! […] C’est au contraire la haute raison des événements, quoiqu’elle ne se manifeste pas encore comme Providence ayant conscience d’elle. […] Dans la comédie, au contraire, c’est la personnalité ou la subjectivité qui, dans sa sécurité infinie, conserve la haute main.

128. (1889) Histoire de la littérature française. Tome III (16e éd.) « Chapitre neuvième »

La haute comédie. — Le Misanthrope. — Le Tartufe […] Corneille tend plus haut qu’aucun autre poète de son temps. […] Nous rions intérieurement quand le personnage de la pièce est quelqu’un de notre connaissance ; nous rions tout haut de sa caricature. […] De la haute comédie. — Le Misanthrope. — Le Tartufe. — Les Femmes savantes. […] Et pourtant, dans ce chef-d’œuvre du haut comique, il n’y a pas de comédie.

129. (1886) Revue wagnérienne. Tome I « Paris, 8 juillet 1885. »

Je me sentis délivré des liens de la pesanteur, et je retrouvai par le souvenir l’extraordinaire volupté qui circule dans les lieux hauts. […] Ces détails sont insignifiants, et il est préférable de prendre les choses de plus haut. […] Il avait soumis son scénario à un ami, dont il mettait très haut, dit-il, l’esprit et les connaissances. […] Sa musique était à exprimer, pleinement, une action entière, pénétrée de noble émotion et de hautes douleurs. […] Les lettres de Rîchard Wagner, par le soin minutieux, la scrupuleuse exactitude avec laquelle elles ont été réunies, font apprécier, dès maintenant, quelle sera la haute valeur de cet ouvrage.

130. (1886) Quelques écrivains français. Flaubert, Zola, Hugo, Goncourt, Huysmans, etc. « Gustave Flaubert. Étude analytique » pp. 2-68

Et de même, plus haut, les aimables fourberies de M.  […] Sans cesse, dans les plus vulgaires pages, la beauté de l’expression conçue en termes nets, simplement liés, semble proférer une note lyrique plus haute que les choses dites. […] La phrase non plus réduite à une élégante armature dans laquelle s’enchâssent n’importe quels mots bas, ordonne des vocables sonores, colorés et beaux, les rythme en retentissantes cadences, développe de nobles visions, splendides, grandioses ou d’une haute horreur. […] Tantôt sortant du temple, elles supplient, cambrées, au haut de leur palais, les astres qui tressaillent au frémissement de leurs lèvres ; tantôt elles prennent de leur corps anxieux de pureté, des soins inouïs, le macérant de parfums, l’enduisant d’onguents, le frôlant de soies, au point que la jouissance de leur lit promet une joie délictueuse et mortelle. […] Ce résultat négatif n’infirme pas, je crois, la théorie exposée plus haut, et lient surtout au complet oubli qui sépare l’état somnambulique de l’état de veille.

131. (1870) De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés « De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés — Chapitre I : Variations des espèces à l’état domestique »

Blyth, dont la science profonde et variée me fait évaluer l’opinion très haut, pense que toutes nos races volatiles proviennent du Coq d’Inde commun (Gallus bankiva). […] Or, un tel concours de circonstances extraordinaires présente le plus haut degré d’improbabilité. […] Je pourrais citer plusieurs ouvrages d’une haute antiquité qui prouvent qu’on en a très anciennement reconnu l’importance. […] Mais ils n’ont pas encore un nom particulier, et n’étant pas évalués un haut prix, leur histoire est négligée. […] Je crois que les conditions de vie, par leur action sur le système reproducteur, sont des causes de variabilité de la plus haute importance.

132. (1828) Préface des Études françaises et étrangères pp. -

M. de Lamartine a jeté dans ses admirables chants élégiaques toute cette haute métaphysique sans laquelle il n’y a plus de poésie forte ; et ce que l’âme a de plus tendre et de plus douloureux s’y trouve incessamment mêlé avec ce que la pensée a de plus libre et de plus élevé. […] C’est en France surtout, chez ce peuple le plus spirituel et le plus intelligent de l’Europe, que la haute poésie est peut-être le moins goûtée par ce qu’on appelle le monde. […] Et qu’on ne dise pas que dans un siècle comme le nôtre, où les sciences politiques et les études philosophiques sont portées à un si haut degré de perfection, les poètes ne peuvent plus acquérir la prépondérance qu’ils avaient dans les âges moins éclairés ; les hautes renommées de Goethe au milieu de la philosophique Allemagne, et de Byron dans le pays natal de la politique, sont là pour démentir ce préjugé trop répandu. […] Soumet si haut parmi ses rivaux de gloire : ces deux pièces sont encore des sujets refaits ; un seul ouvrage entièrement neuf survivra aux critiques et aux éloges qu’il a reçus ; c’est le Paria de M.  […] Certes, elle est tombée de bien haut : ne nous étonnons pas si elle en meurt.

133. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Chateaubriand — Chateaubriand, Vie de Rancé »

Pendant qu’il se disait ces choses assez haut, une voix intérieure lui parlait plus bas, et cette voix avait un nom pour lui. […] La raison modérée a beau dire et vouloir mitiger, il y a dans les grands cœurs repentants quelque chose qui crie plus haut, une conscience qui veut se punir et ne pas être consolée à si peu de frais. […] Le 14, il se rend à la Trappe, et le voilà franchissant d’un bond le seuil dans cette haute carrière où il n’a plus désormais qu’à courir et à guider. […] Vers 1672, la Trappe était arrivée à sa haute perfection, à sa pleine renommée monastique, et un monument original de plus s’ajoutait dans l’ombre à l’admirable splendeur qui éclaire ce moment de Louis XIV.  […] Aujourd’hui les temps sont changés ; les hautes indications de Bossuet subsistent sans doute, mais il y a autre chose encore.

134. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « M. MIGNET. » pp. 225-256

Mais aucun, peut-être, ne marque davantage en lui cette qualité, qui met le cachet à toutes les autres, que l’homme de mérite et de haut talent duquel notre série73 ne saurait plus longtemps se passer. […] Ce grand orage humain semblait marcher et rouler comme les hautes sphères. […] On eût accordé au seul prêtre parlant du haut de la chaire au nom de la Providence ce droit qu’un historien, procédant dans la froideur et la rectitude philosophique, parut usurper. […] Cette position centrale de haute administration et d’études est celle que l’historien a gardée depuis, et qu’il a même su défendre au besoin contre les tentations politiques dont plus d’une l’est venue chercher. […] Tant de hautes qualités, que nous avons eu à reconnaître dans la manière de l’historien et de l’écrivain, sont achetées au prix de quelques défauts, et notre profonde estime même nous autorisera à les indiquer.

135. (1875) Premiers lundis. Tome III «  À propos, des. Bibliothèques populaires  »

L’empereur, oui, messieurs, l’empereur (car je ne me lasse pas de me couvrir de cette autorité, la plus haute comme la plus libérale de son régime), honore de son estime M.  […] Mais le Rapport frappe de haut : il n’a pas daigné entrer dans ces nuances. […] Ces calomniés de la veille deviennent les honnêtes gens du lendemain et ceux que la société porte le plus haut et préconise. […] Et pourtant, à voir ce qui se passe habituellement dans les hautes sphères, dans la haute société, dans les salons, — et il me semble que nous sommes ici, à bien des titres, dans le plus grave et le plus respecté des salons, — on croirait véritablement qu’il n’y a en politique qu’un centre droit, qu’un côté droit, et que tout ce qui était autrefois la gauche, — la gauche constitutionnelle, — est supprimée. […] « Je ne vous connais, monsieur, que par ce droit que vous vous êtes arrogé publiquement et de haut sur la direction et l’expression de ma pensée.

136. (1899) Le roman populaire pp. 77-112

Dès qu’on s’adresse au peuple, on ne fait plus de haute littérature ou de grand art, et le succès même de pareilles tentatives ne s’achète qu’au prix de la beauté sacrifiée. […] Or une émotion saine, une pensée haute à communiquer, c’est de quoi légitimer tout un art. […] Je leur dirais : « Essayez d’écrire, dans des revues ou dans des journaux populaires, une œuvre de haute et saine émotion. […] Autour de moi, des abricotiers, non pas grêles et difformes comme ceux de nos vergers, mais des arbres de haute venue, aux formes pleines, aux feuilles luisantes et groupées en corbeilles ouvertes, couvraient le sol de leur ombre étoilée. […] Quelques dattiers levaient très haut leur bouquet de plumes, et çà et là, au sommet de la colonne sombre du tronc, les régimes de fruits, énormes, recourbés et pendants, étincelaient comme des parures de fils d’or compliquées et ajourées, emportées dans l’azur, impossibles à atteindre.

137. (1862) Portraits littéraires. Tome II (nouv. éd.) « Aloïsius Bertrand »

Doué de haut caprice plutôt qu’épanché en tendresse, au lieu d’ouvrir sa veine, il distillait de rares stances dont la couleur ensuite l’inquiétait. […] Le maçon Abraham Knupfer chante, la truelle à la main, dans les airs échafaudé, si haut que, lisant les vers gothiques du bourdon, il nivelle de ses pieds et l’église aux trente arcs-boutants et la ville aux trente églises. […] David avait de bonne heure, dès 1828, conçu pour le talent de Bertrand la plus haute, la plus particulière estime, et il était destiné à lui témoigner l’intérêt suprême. […] Son épisode de Jenny introduit et personnifie la chasteté de l’émotion ; la Bible, lue tout haut, renvoie sur toute la scène une lueur religieuse. Puis viennent ces hautes pensées sur la grandeur de la vieille Écosse qui s’appuie à de telles images du foyer : Sic fortis Etruria crevit.

138. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Histoire du Consulat et de l’Empire, par M. Thiers. Tome IXe. » pp. 138-158

C’est ce qui parut à Eylau ; et du haut de ce cimetière ensanglanté, sous ce climat d’airain, Napoléon, pour la première fois averti, put avoir comme une vision de l’avenir. […] Le peuple espagnol, bien qu’en repoussant la royauté de Joseph il repoussât un bon prince et de bonnes institutions, fut peut-être mieux inspiré que les hautes classes. […] Un haut sentiment de moralité militaire anime ces pages ; on sent combien l’historien souffre d’avoir à raconter ce premier désastre ; mais il l’a sondé hardiment, et il s’estime encore heureux de n’avoir à y constater, après tant de calomnies, qu’un immense malheur. […] Le troisième exemplaire, destiné à la Haute Cour impériale (laquelle ne fut jamais organisée), était resté aux mains de M.  […] Napoléon, par des lettres vigoureuses, où il concentre les hautes maximes de sa politique, essaie de remonter cette âme débonnaire et médiocrement royale de son frère, et de lui inoculer ce qui ne s’apprend pas.

139. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Monsieur de Bonald, (Article Bonald, dans Les Prophètes du passé, par M. Barbey d’Aurevilly, 1851.) » pp. 427-449

Je vais droit au défaut capital et radical du talent élevé de M. de Bonald, et que, même dans les hautes et sévères doctrines qu’il professait, il aurait certes pu éviter. […] Ce n’est donc que hors de lui et par la société que l’homme s’instruit et s’élève ; il importe donc que ce fonds premier de vérité sociale ne soit point altéré, ou, s’il l’a été, qu’il soit réintégré et rétabli dans sa pureté primitive, comme il le fut, et même à un plus haut degré de perfection, lors de la venue de Jésus-Christ. […] Ce mélange de moyens étroits, de croyances bornées et de hautes vues, est perpétuel chez lui. […] Unis en 1802, compagnons d’armes dans le même combat, dans la même cause de la renaissance littéraire et religieuse, Chateaubriand salua du premier jour la Législation primitive dans deux articles de haute critique insérés au Mercure ; et on a vu comment Bonald, à cette époque, comparait la vérité glorifiée par Chateaubriand à une reine. […] L’avenir, je le crois, réservera à M. de Bonald une assez haute place : à mesure que les âges s’éloignent et que les institutions s’évanouissent, on sent le besoin d’en résumer de loin l’esprit dans quelques figures et dans quelques noms.

140. (1864) William Shakespeare « Deuxième partie — Livre VI. Le beau serviteur du vrai »

Oui, l’art, c’est l’azur ; mais l’azur du haut duquel tombe le rayon qui gonfle le blé, jaunit le maïs, arrondit la pomme, dore l’orange, sucre le raisin. […] La caravane humaine est, grâce à 1789, parvenue sur un haut plateau, et l’horizon étant plus vaste, l’art a plus à faire. […] Refaisons le plus haut possible la leçon du juste et de l’injuste, du droit et de l’usurpation, du serment et du parjure, du bien et du mal, du fas et nefas ; arrivons avec toutes nos vieilles antithèses, comme ils disent. […] L’écrivain qui a émis cet aphorisme est, à ce qu’on nous assure, un des hauts personnages du jour. […] Parler si haut, cela ne l’empêche point de parler bas.

141. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Nouveaux voyages en zigzag, par Töpffer. (1853.) » pp. 413-430

Ces hautes régions furent en quelque sorte la découverte et la conquête de l’illustre physicien Saussure. […] Là même où il s’élève jusqu’à cette troisième et haute région où tout semble écraser l’homme et où la vie sous toutes ses formes se retire, Töpffer trouve encore un sens correspondant au cœur en ces effrayantes sublimités. […] Il nous semble qu’il manque quelque chose à sa visite de la Grande-Chartreuse ; il est novice encore, son monastère est trop effacé ; il nous peint la haute vallée plutôt que le but même ; il n’a pas l’hymne du chartreux, l’allégresse du cloître, le rayon de Le Sueur et de saint Bruno. […] Après s’en être pénétré et en s’engageant sur les pas de l’excellent initiateur dans ces expéditions de fatigue et de plaisir, plus d’un visiteur des hautes cimes, au tournant d’un roc, au reflet d’un glacier, à l’humble vue d’une clôture, se surprendra à dire comme pour un compagnon absent et pour un ami qui nous a devancés : « Töpffer, où êtes-vous ?  […] [NdA] Byron au reste, dans son séjour en Suisse (1816), a senti et pratiqué les Alpes bien autrement que Chateaubriand qui ne les avait vues d’abord qu’en passant (1805), et qui semble les avoir traitées, et le Mont-Blanc lui-même, du haut de sa grandeur. — Je conseille aux amateurs de lire Les Alpes Suisses, par M. 

142. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Ramond, le peintre des Pyrénées — I. » pp. 446-462

Jean-Jacques Rousseau n’avait fait, dans La Nouvelle Héloïse, que dessiner le Pays de Vaud et le Valais sans dépasser guère les collines ; maintenant on en était à décrire les hautes vallées, les glaciers, à gravir les pics les plus inaccessibles. […] À Lucerne, le général de Pfyffer, à qui l’on doit un magnifique Relief de la Suisse, l’avait honoré de ses conseils, et, connaissant sa manière de voyager, ne l’avait pas jugé indigne d’affronter les hautes Alpes : il lui traça un itinéraire que le jeune homme prit plaisir à suivre et dont le pays de Hasly était la première station. […] C’est ce sentiment, si souvent exprimé depuis, des hautes cimes et de l’allégresse intime, de la sérénité de pensée qu’on y rencontre, c’est cette sublimité naturelle et éthérée que Ramond excelle à rendre dans ces pages comme il y en avait si peu à cette date dans notre langue. Elles sont si peu connues aujourd’hui du grand nombre des lecteurs et elles sont tellement dignes de l’être, elles sont si belles de vérité et si irréprochables de forme, que j’éprouve un extrême embarras de choix dans le désir que j’aurais de les faire lire par amples extraits et de les faire goûter de tous : Arrivé dans cette forêt, dit-il quelque part, et prêt à descendre, j’éprouvais une sorte de tristesse que, depuis ce temps-là, j’ai toujours retrouvée, quand du haut des Alpes je suis descendu dans les plaines. […] Revenant ailleurs sur cette idée d’une transformation qu’éprouvent à de certaines hauteurs les organes du corps et les facultés de l’esprit, il fait appel à tous ceux qui en ont, un jour ou l’autre, ressenti les effets dans l’ascension vers les hauts lieux : Quelque merveilleux que soit ce que j’avance, je ne manquerai point de garants, et je ne trouverai d’incrédules que dans le nombre de ceux qui ne se sont jamais élevés au-dessus de la plaine.

143. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Correspondance diplomatique du comte Joseph de Maistre, recueillie et publiée par M. Albert Blanc » pp. 67-83

J’aime à croire que non, car le fond de mon opinion est le même ; mais j’aime tout ce qui est de l’homme quand l’homme est distingué et supérieur ; je me laisse et me laisserai toujours prendre à la curiosité de la vie, et à ce chef-d’œuvre de la vie, — un grand et puissant esprit ; avant de la juger, je ne pense qu’à la comprendre et qu’à en jouir quand je suis en présence d’une haute et brillante personnalité. […] C’est un instinct de haute nature, qui fait anachronisme de nos jours, qui se prend à de petits faits comme aux plus grands, qui s’expose à recevoir un démenti du jour au lendemain, à bout portant. […] C’est ainsi qu’il pense en tous sens, même en avant, et de droite et de gauche, surtout de haut ; au risque de tirer parfois sur ses propres troupes. […] L’un est de convention et tout en compliments et en grands mots ; il ne parle que de confiance parfaite, de reconnaissance sans bornes, d’augustes amis, de hautes puissances, etc., etc. ; je sais cette langue aussi bien qu’un autre, et je la vénère comme bonne dans l’usage commun et extérieur. […] Des conversions opérées chez des personnes de la haute société firent éclat : de Maistre en avait été, de bonne heure, le confident ; on le soupçonna d’en avoir été l’instrument ou l’auxiliaire.

144. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Don Quichotte (suite.) »

Bouterwek avait commencé, et il attribuait à Cervantes une idée plus haute que celle d’avoir voulu décréditer les mauvais romans de chevalerie, bien qu’il lui reconnût aussi cette dernière intention, mais seulement comme occasionnelle et secondaire ; il la réduisait au point de la subordonner tout à fait à je ne sais quelle vue supérieure : « On ne saurait supposer, disait-il, que Cervantes ait eu l’absurde pensée de vouloir prouver l’influence fâcheuse des romans sur le public, par la folie d’un individu qui aurait pu tout aussi bien perdre la tête en lisant Platon ou Aristote. […] Comme Don Quichotte, ils retrouvent partout l’image des vertus auxquelles ils rendent un culte… Ce dévouement continuel de l’héroïsme, ces illusions de la vertu, sont ce que l’histoire du genre humain nous présente de plus noble et de plus touchant ; c’est le thème de la haute poésie, qui n’est autre chose que le culte des sentiments désintéressés. […] Notre profonde conviction est que l’œuvre de Cervantes est méconnue dans ce qui en fait la haute portée, en ce sens que généralement on ne lui attribue que l’intention de ridiculiser et la chevalerie et les livres de chevalerie. […] La haute admiration de l’avenir n’est qu’à ce prix. […] Si elle a l’air de vous placer plus haut, ô mânes et fantômes des grands esprits, n’en soyez pas plus fiers ; car ce n’est plus vous, c’est elle-même que la postérité salue en vous.

145. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « Appendice. »

Cousin de sa chaire, le plaça à la tête d’une branche de l’Université à laquelle il présida pendant dix-huit ans et lui conféra la haute main sur l’Ecole normale. […] « Il m’est arrivé autrefois de sourire de cet excès de passion rétrospective et de le railler ; mais qu’on sache bien que lorsque la critique s’applique à des talents aussi éminents, à des œuvres aussi distinguées, cette critique présuppose toujours une grande louange et une haute estime. […] Que manquait-il donc à ce brillant esprit, à cet esprit de haut vol, si plein de vues et même d’éclairs de bon sens sur toutes choses, pour être un vrai génie et pour mériter d’être salué de ce nom ? […] — Lui, c’était avec éclat que tout se produisait, avec une sincérité du moment qui ressemblait à de l’enthousiasme, et qui, une fois qu’on était averti et aguerri, admettait une part de comique, mais du comique du plus haut caractère. […] Ses souvenirs remontaient bien haut et jusqu’au règne de Louis XVI.

146. (1912) L’art de lire « Chapitre V. Les poètes »

Ils doivent être lus d’abord tout bas et ensuite tout haut. D’abord tout bas, pour que l’on comprenne leur pensée ; car la plupart d’entre nous, par l’effet de l’habitude, ne comprennent guère qu’à moitié ce qu’ils lisent tout haut ; ensuite à haute voix, pour que l’oreille se rende compte du nombre et de l’harmonie, sans que, cette fois, l’esprit laisse échapper le sens, puisqu’il s’en sera préalablement rempli. […] « Comme un aigle qu’on voit toujours, soit qu’il vole au milieu des airs, soit qu’il se pose sur le haut de quelque rocher, porter de tous côtés ses regards perçants, | et tomber si sûrement sur sa proie qu’on ne peut éviter ses ongles non plus que ses yeux ; | aussi vifs étaient les regards, aussi vite et impétueuse était l’attaque, aussi fortes et inévitables, | étaient les mains du prince du Condé. » Au point de vue de la tenue de l’haleine, il faut scander, je crois, comme j’ai fait ; mais au point de vue de l’harmonie expressive il faut accentuer les mots airs, rocher, perçants, proie, yeux, regards, attaque et inévitables, et alors nous voyons que les choses sont peintes par les mots, et c’est-à-dire, ici, par le rythme général, par les sonorités et par les silences. […] Et si vous me dites qu’à faire ainsi, l’on finit par dénaturer le poète, l’on finit par ne plus chercher en lui que le musicien et par ne plus le trouver poète quand il ne fait plus de la musique ; je vous répondrai que, quand on commence à sentir cela, on doit faire taire l’orchestre comme on éteint une lampe ; qu’on doit cesser de lire tout haut et recommencer à lire tout bas et que, de même que pour saisir l’idée et s’en pénétrer on doit d’abord lire tout bas, de même, après avoir assez longtemps lu tout haut, on doit revenir à la lecture intime pour retrouver devant soi l’homme qui pense.

147. (1818) Essai sur les institutions sociales « Chapitre IV. Des changements survenus dans notre manière d’apprécier et de juger notre littérature nationale » pp. 86-105

Je serais maintenant conduit à parler de cette littérature de mouvement, qu’on a appelée romantique, littérature absolument nouvelle, qui ne remonte pas plus haut que J. […] Pour me servir d’une métaphore déjà employée plus haut, c’est une dynastie qui a fini de régner. […] Il ne faut pas cesser de le répéter, parce qu’il ne faut pas cesser d’entourer de respect ce qui a été : venir en son propre nom, pour employer une expression heureuse de Bacon, suppose une haute vanité, une présomption condamnable, un orgueil qui doit être réprimé. […] Cette économie des desseins de la Providence, dévoilée avec la prévision d’un prophète ; cette pensée divine gouvernant les hommes depuis le commencement jusqu’à la fin ; toutes les annales des peuples, renfermées dans le cadre magnifique d’une imposante unité ; ces royaumes de la terre, qui relèvent de Dieu ; ces trônes des rois, qui ne sont que de la poussière ; et ensuite ces grandes vicissitudes dans les rangs les plus élevés de la société ; ces leçons terribles données aux nations, et aux chefs des nations ; ces royales douleurs ; ces gémissements dans les palais des maîtres du monde ; ces derniers soupirs de héros, plus grands sur le lit de mort du chrétien, qu’au milieu des triomphes du champ de bataille ; enfin l’illustre orateur, interprète de tant d’éclatantes misères, osant parler de ses propres amertumes, osant montrer ses cheveux blancs, signe vénérable d’une longue carrière honorée par de si nobles travaux, et laissant tomber du haut de la chaire de vérité des larmes plus éloquentes encore que ses discours : tel est le Bossuet de nos habitudes classiques, de notre admiration traditionnelle. […] Que serait-ce donc si j’embrassais tous les ouvrages de Bossuet ; si je descendais avec lui dans l’arène de cette haute polémique où il consuma une partie de ses forces ; si j’interrogeais avec lui les oracles des anciens jours, afin de m’initier moi-même et d’initier mon lecteur aux secrets de cette Politique sacrée que l’on croirait appartenir à un autre âge, tant pour les princes que pour les peuples ; si je m’élevais sur ses ailes à la contemplation des mystères du christianisme ; si je creusais avec son analyse lumineuse et pénétrante les profondeurs d’un mysticisme exalté où s’égarèrent quelques âmes tendres ?

148. (1885) Les œuvres et les hommes. Les critiques, ou les juges jugés. VI. « M. de Lacretelle » pp. 341-357

Lamartine a posé sur les siennes son époque tout entière, pour lui faire passer le fleuve de poésie fausse dans laquelle elle pataugeait et se noyait, et, d’une seule haleine, il l’a portée dans l’enivrante et haute atmosphère de la Poésie vraie, — de la Poésie éternelle, qu’en France, lorsqu’il vint, on ne connaissait plus ! […] Et si, dans ses autres poésies, — Les Recueillements, Jocelyn, La Chute d’un ange, où le poète fut l’ange même dans sa chute, le Dernier chant de Child-Harold, dans lequel il lutta avec ce Byron qui avait affecté de ne pas l’entendre, quand il avait parlé de lui en termes dont une fierté si royale et si satanique même qu’elle fût, aurait dû être reconnaissante, La Mort de Socrate, où la beauté du texte de Platon est vaincue et divinisée par une forme inconnue aux Grecs, — si enfin partout, dans tous ses poèmes, Lamartine se sentit au niveau du poète des premières Méditations, jamais il ne monta plus haut que dans les Harmonies. Et, pour ma part, je ne crois pas qu’humainement ou lyriquement il soit possible de plus haut monter ! […] Ainsi, il était né royaliste, comme ses pères, et il laissa là l’opinion de ses pères, lui, l’homme de la race et de la famille, comme si ce n’était pas le commencement d’un parricide moral, pour une âme haute, que de n’avoir plus l’opinion de son père ! […] Il écrira des choses comme celle-ci : « L’intarissable courant de la verve y ciselait, malgré tout, les îlots qu’il répandait et qui s’immobilisaient dans l’admiration, comme des flots de marbre » Un jour Lamartine, au lit, renverse son encrier sur ses draps : « J’aurais voulu — crie M. de Lacretelle du haut de son front — conserver ces effluves du génie ! 

149. (1920) La mêlée symboliste. I. 1870-1890 « Les petites revues » pp. 48-62

Ô crépuscule, dans ta grande somnolence, Un bois à l’horizon s’étage noir et bleu ; Haut, le croissant émerge et s’argente en silence, L’Hippogriffe attendait dans le couchant de feu ; Et la Reine, égarant son regard noir et bleu, Maudit l’heure qui coule ainsi qu’une eau trop lente, Et, sous le dur brocart, sentant sa gorge en feu, Mord son exsangue main de sa bouche sanglante ! […] « La poésie, qui est la plus haute et la plus pure expression de l’Art, doit tenir la tête de la caravane intellectuelle… On a parlé de Déliquescence, d’Évanescence, de Décadence. […] Et par le voile aux plis trop onduleux, ces Femmes Amoureuses du seul semblant d’épithalames Vont irradier loin d’un soleil tentateur : Pour n’avoir pas songé vers de hauts soirs de glaives Que de leurs flancs pouvait naître le Rédempteur Qui doit sortir des Temps inconnus de nos rêves. […] Sous les hauts dômes végétants Tous les sanglots sans ors d’étangs Veillent privés d’orgueils de houle.

150. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « PAUL HUET, Diorama Montesquieu. » pp. 243-248

Colin, celle de la ville de Rouen tout entière prise du haut du Mont-aux-Malades, par M. […] La nature avant tout, la nature en elle-même et avec toutes ses variétés de collines, de pentes, de vallées, de clochers à distance ou de ruines, la nature surmontée d’un ciel haut, profond et chargé d’accidents, voilà le paysage comme l’entend M. […] Rien sur le premier plan, hormis quelques vêtements laissés : une blouse, des instruments de travail, une chèvre couchée auprès ; puis, au premier fond, derrière le monticule du premier plan, une espèce de ravin fourré d’arbres, et, dessous, quelque paysan qui sommeille ; plus haut, la côte du château, blanche, nue, calcaire, avec les ruines sévères qui la couronnent ; mais à droite, cette côte blanche s’amollissant en croupes verdoyantes, souples, mamelonnées, et au sommet de l’une de ces croupes, des génisses qui paissent, et un rayon incertain de soleil qui tombe et qui joue.

151. (1898) XIII Idylles diaboliques pp. 1-243

(Haut.) […] Tiens : lis ; lis tout haut. […] (Haut.) […] Plus haut, je veux monter toujours plus haut sous tes auspices. […] (Haut.)

152. (1867) Cours familier de littérature. XXIII « cxxxviiie entretien. Littérature germanique. Les Nibelungen »

« Ces princes étaient bons et nés d’une haute race. […] Les guerriers à la haute vaillance faisait un bruit formidable. […] « Il songea à ce haut amour, le fils de Sigelint. […] Il convient de les bien recevoir : tel est mon avis, haute dame. […] Il est plus haut placé que Gunther mon frère, le très-noble homme.

153. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Troisième partie — Section 8, des instrumens à vent et à corde dont on se servoit dans les accompagnemens » pp. 127-135

Le passage de Donat explique encore un endroit de Pline où cet historien dit, que pour faire les flutes gauches on emploïoit le bas du même roseau, dont le haut servoit à faire les flutes droites. Le bas du roseau étant plus épais que le haut, il doit rendre un son plus aigu, et le haut du roseau doit par consequent rendre un son plus grave.

154. (1827) Principes de la philosophie de l’histoire (trad. Michelet) « Principes de la philosophie de l’histoire — Livre second. De la sagesse poétique — Chapitre premier. Sujet de ce livre » pp. 101-107

Cette haute estime dont elle a joui jusqu’à nous est l’effet de la vanité des nations, et surtout de celle des savants. De même que Manéthon, le grand prêtre d’Égypte, interpréta l’histoire fabuleuse des Égyptiens par une haute théologie naturelle, les philosophes grecs donnèrent à la leur une interprétation philosophique. […] En troisième lieu, ces fables tant célébrées pour leur sagesse et entourées d’un respect religieux ouvraient mille routes aux recherches des philosophes, et appelaient leurs méditations sur les plus hautes questions de la philosophie.

155. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « M. Jouffroy »

Du haut de ce sommet, et tout obstacle franchi, que découvrirait-on ? […] Dans une génération où chacun presque possède à un haut degré la facilité de saisir et de comprendre ce qui s’offre, son caractère distinctif, à lui par-dessus tous, est encore la compréhension, l’intelligence. […] Sa haute taille, ses manières simples et franches, une sorte de rudesse âpre qu’il n’avait pas dépouillée, tout en lui accusait ce type vierge d’un enfant des montagnes, et qui était fier d’en être ; ses camarades lui donnèrent le sobriquet de Sicambre. […] En montant par un certain versant et par des sentiers bien choisis, on arrive au plus haut sans rien découvrir, et, au dernier pas exactement qui vous porte au plateau du sommet, tout se déclare. […] Il y aurait dès l’abord des pâturages inclinés et de ces tableaux de mœurs antiques que savent les hommes des hautes terres.

156. (1890) L’avenir de la science « I »

La faiblesse de notre âge d’analyse ne permet pas cette haute unité ; la vie devient un métier, une profession ; il faut afficher le titre de poète, d’artiste ou de savant, se créer un petit monde où l’on vit à part, sans comprendre tout le reste et souvent en le niant. […] Mais ce qui pourra devenir possible dans une forme plus avancée de la culture intellectuelle, c’est que le sentiment qui donne la vie à la composition de l’artiste ou du poète, la pénétration du savant et du philosophe, le sens moral du grand caractère, se réunissent pour former une seule âme, sympathique à toutes les choses belles, bonnes et vraies, et pour constituer un type moral de l’humanité complète, un idéal qui, sans se réaliser dans tel ou tel, soit pour l’avenir ce que le Christ a été depuis dix-huit cents ans  un Christ qui ne représenterait plus seulement le côté moral à sa plus haute puissance, mais encore le côté esthétique et scientifique de l’humanité. […] Il y a un grand foyer central où la poésie, la science et la morale sont identiques, où savoir, admirer, aimer sont une même chose, où tombent toutes les oppositions, où la nature humaine retrouve dans l’identité de l’objet la haute harmonie de toutes ses facultés et ce grand acte d’adoration, qui résume la tendance de tout son être vers l’éternel infini. […] D’illustres exemples prouveraient au besoin que cette haute harmonie des puissances de la nature humaine n’est pas une chimère.

157. (1885) Préfaces tirées des Œuvres complètes de Victor Hugo « Préfaces des pièces de théâtre — Préface de « Ruy Blas » (1839) »

En se dissolvant elle se divise, et voici de quelle façon : Le royaume chancelle, la dynastie s’éteint, la loi tombe en ruine ; l’unité politique s’émiette aux tiraillements de l’intrigue ; le haut de la société s’abâtardit et de génère ; un mortel affaiblissement se fait sentir à tous au-dehors comme au-dedans ; les grandes choses de l’état sont tombées, les petites seules sont debout, triste spectacle public ; plus de police, plus d’armée, plus de finances ; chacun devine que la fin arrive. […] Il a d’abord habité le haut de la société, voici maintenant qu’il vient se loger dans le bas, et qu’il s’en accommode ; il se moque de son parent l’ambitieux, qui est riche et qui est puissant ; il devient philosophe, et il compare les voleurs aux courtisans. […] Le peuple, qui a l’avenir et qui n’a pas le présent ; le peuple, orphelin, pauvre, intelligent et fort ; placé très bas, et aspirant très haut ; ayant sur le dos les marques de la servitude et dans le cœur les préméditations du génie ; le peuple, valet des grands seigneurs, et amoureux, dans sa misère et dans son abjection, de la seule figure qui, au milieu de cette société écroulée, représente pour lui, dans un divin rayonnement, l’autorité, la charité et la fécondité. […] Alors don Salluste serait l’égoïsme absolu, le souci sans repos ; don César, son contraire, serait le désintéressement et l’insouciance ; on verrait dans Ruy Blas le génie et la passion comprimés par la société, et s’élançant d’autant plus haut que la compression est plus violente ; la reine enfin, ce serait la vertu minée par l’ennui.

158. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Histoire du règne de Henri IV, par M. Poirson » pp. 210-230

Le Henri IV roi, grand guerrier, grand politique, non plus celui des petits défauts et des peccadilles, mais l’homme des hautes et mémorables qualités, monarque réparateur et chéri, actif bienfaiteur de son peuple et instaurateur d’une diplomatie généreuse, toute d’avenir, c’est celui-là seulement dont on rencontrera l’image. […] Il était porté par le soulèvement du flot populaire aussi haut que possible ; il n’avait qu’un effort à faire pour sauter ouvertement au gouvernail du royaume et pour se saisir hardiment de la couronne. […] Cependant la haute noblesse, et dans le camp de Mayenne et dans le camp de Henri IV, élevait des prétentions exorbitantes et mettait tout accommodement à un prix impossible. […] Les livrées des épousailles n’y étaient point oubliées ; chacune les portait à sa ceinture ou sur le haut de manche. […] Nous autres critiques de profession, nous apprenons, dans ces discussions si nourries, à apprécier tant d’esprits solides, ingénieux et mûrs qui, pour s’être occupés pendant leur vie d’autre chose encore que des lettres, n’y reviennent jamais qu’avec plus de rectitude et de haut bon sens.

159. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « Horace Vernet (suite.) »

Son affectation alors était, dans la conversation courante, de nommer tout haut familièrement et avec un parfait sans-gêne les jeunes illustres ; s’il pouvait, dans un Cours public, pendant la demi-heure d’attente, citer tout haut, et en parlant d’un banc à l’autre, Alphonse, Victor, Alfred, Prosper, Eugène, il était content : cela voulait dire dans sa bouche, Lamartine, Hugo, de Vigny, Mérimée et Delacroix. […] Je t’avoue que le cœur m’a battu en voyant le terme et le but de mon voyage, les plus hautes montagnes du grand Atlas se développant devant le spectateur. […] Tu as entendu parler d’un rocher du haut duquel les femmes, en voulant fuir, se précipitaient ? […] C’est ainsi qu’ils doivent apparaître dans les portraits de haut style, peints de souvenir plutôt que d’après la réalité. » On ne saurait mieux marquer ni définir la prétention du haut style par opposition à la réalité vive.

160. (1872) Nouveaux lundis. Tome XIII « Œuvres françaises de Joachim Du Bellay. [II] »

Du Bellay le sait bien ; il nous exprime la haute idée qu’il se fait du poète, et, à dénombrer toutes les qualités qu’il lui attribue, on sent qu’il doit l’être lui-même : il exige avant tout un je ne sais quoi de divin, et il reprend à sa source et dans son vrai sens naturel, pour le lui appliquer, le mot de génie, genius. […] Ce qu’il veut en présence des hauts modèles, c’est donc qu’on imite avec liberté, chaleur, émulation, non qu’on traduise. […] Il commence par avouer nettement qu’il ne se contente pas de ce qu’on a jusqu’ici, ni de la facilité de Marot, ni de la docte gravité d’Héroët : il estime qu’on peut en français davantage, et que notre poésie est capable d’un plus haut style. […] Il ne sait plus les hautes origines. […] En plaçant très haut la palme et le prix du poème, Du Bellay n’a garde de vouloir décourager et refroidir les talents vrais, mais de portée moindre.

161. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Victor Hugo — Victor Hugo en 1831 »

Longtemps mêlée à ces orages des partis, à ces cris d’enthousiasme ou d’anathème, sa jeunesse n’avait pourtant rien à rayer de son livre ni à désavouer de sa vie ; le témoignage qu’il se rendait dans la pièce citée plus haut, il peut le redire après comme avant ; nul ne lui contestera ce glorieux jugement porté par lui sur lui-même. […] Tous deux, le jeune Victor surtout, avaient rapporté de l’Espagne, outre la connaissance pratique et l’accent guttural de cette belle langue, quelque chose de la tenue castillane, un redoublement de sérieux, une tournure d’esprit haute et arrêtée, un sentiment supérieur et confiant, propice aux grandes choses. […] On sait comment son royalisme lui était venu : quant à la religion, elle lui était entrée dans le cœur par l’imagination et l’intelligence ; il y voyait avant tout la plus haute forme de la pensée humaine, la plus dominante des perspectives poétiques. […] Le parti dit royaliste arrivait aux affaires dès cette époque ; Hugo jeune, non envié encore, caressé de tous, eût pu aisément se laisser porter et parvenir vite et haut. […] Les soirées de cette belle saison des Orientales se passaient innocemment à aller voir coucher le soleil dans la plaine, à contempler du haut des tours de Notre-Dame les reflets sanglants de l’astre sur les eaux du fleuve ; puis, au retour, à se lire les vers qu’on avait composés.

162. (1870) Portraits contemporains. Tome IV (4e éd.) « M. DE BARANTE. » pp. 31-61

Comme nous l’avons déjà observé pour mademoiselle de Meulan et pour d’autres esprits influents sortis du même milieu, nous rencontrons ici un nouvel exemple d’un intéressant berceau placé dans cette haute classe moyenne, au sein de cette haute société administrative qui vivait avec l’aristocratie sans en être, et qui devait, dans la génération prochaine, la remplacer. […] Combien n’en rencontre-t-on pas de tels au sein de cette parole généreuse, de cette nature enthousiaste et douée des hautes clartés ! […] Pas un trait n’altérait la simplicité touchante, qui seule convenait au témoignage des grandes choses et des hautes infortunes dans la bouche de la noble veuve de Lescure. […] Gibbon et Hume avaient su combiner avec des opinions très-marquées, et presque des partis pris, de hautes qualités de science et de clairvoyance auxquelles on a trop cessé de rendre justice. […] Traducteur des œuvres dramatiques de Schiller, il a mis en tête une notice développée, telle que la peut dicter une haute et fine raison.

163. (1900) Poètes d’aujourd’hui et poésie de demain (Mercure de France) pp. 321-350

Vigny la conduisit aux hautes solitudes et la voulut retenir dans sa Maison du Berger, mais elle s’échappa, courut les chemins, fit de mauvaises rencontres. […] Mais montons plus haut. […] Personne, qui l’ait étudiée, ne niera que Mallarmé n’ait été un esprit de haute et suprême culture et qu’il n’ait mis au jour d’importantes vérités poétiques. […] Ce très haut et très difficile désir artistique est tout à leur honneur. […] Sans remonter haut, comme il serait aisé de le faire, disons de suite que le Romantisme et le Parnasse y recoururent.

164. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « La Grande Mademoiselle. » pp. 503-525

Dans un temps où Richelieu dominait et « où la tyrannie régnait si hautement, même sur les personnes royales », elle garda en elle le culte intact et la haute idolâtrie de sa propre race. […] Cette beauté à laquelle elle est la première à rendre une si haute justice était réelle, en effet, à cet âge de première jeunesse. […] Il devenait de la plus haute importance que cette ville d’Orléans tînt bon pour la Fronde, sans quoi toute la ligne de la Loire était coupée, et le prince de Condé, qui arrivait de Guyenne, trouvait l’ennemi maître des positions. […] En un mot, elle fit de la littérature comme elle avait fait de la guerre civile et tranché de l’amazone, à l’aventure, à l’étourdie, haut la main, et non pas sans quelque esprit. […] La rouerie de Lauzun avec elle consista à augmenter, à élever encore ces barrières de respect déjà si hautes, à s’y retrancher, à s’y dérober avec ruse.

165. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Lettres et opuscules inédits du comte Joseph de Maistre. (1851, 2 vol. in-8º.) » pp. 192-216

Ce puissant excitateur de hautes pensées politiques va devenir une de nos connaissances particulières, et, peu s’en faut, l’un de nos amis. […] Sa mère, personne de haute distinction, eut une grande influence sur lui, et elle attendrit ce que cette forme de paternité sénatoriale aurait pu avoir de trop rigide, mais sans rien amollir. […] Il ne la met point hors de là : C’est précisément dans les hautes classes, pense-t-il, que résident les principes conservateurs et les véritables maximes d’État. […] Je ne passerai pas de meilleures soirées que celles que j’ai passées chez elle, les pieds sur les chenets, le coude sur la table, pensant tout haut, excitant sa pensée et rasant mille sujets à tire-d’aile… Elle est partie, et jamais je ne la remplacerai ! […] Parmi les lettres politiques, je ne fais que noter celle qui se rapporte à la mort de Pitt (mars 1806), et celle-où il est, pour la première fois, question de l’insurrection d’Espagne (octobre 1809) ; elles sont d’une haute beauté.

166. (1864) William Shakespeare « Deuxième partie — Livre I. Shakespeare — Son génie »

C’est là, soit dit en passant, une de ces déviations à la loi ordinaire terrestre qui font rêver et réfléchir la haute critique et lui révèlent le côté mystérieux de l’art. […] Ce phénomène de la réflexion double élève à la plus haute puissance chez les génies ce que les rhétoriques appellent l’antithèse, c’est-à-dire la faculté souveraine de voir les deux côtés des choses. […] La haute critique seule, qui a son point de départ dans l’enthousiasme, pénètre et comprend ces lois savantes. […] Comme tous les hauts esprits en pleine orgie d’omnipotence, Shakespeare se verse toute la nature, la boit, et vous la fait boire. […] Il est sauvage comme la forêt vierge ; il est ivre comme la haute mer.

167. (1767) Salon de 1767 « Peintures — Le Prince » pp. 206-220

Tableau de 11 pieds de large, sur autant de haut. […] Tableau ovale de 2 pieds 3 pouces de haut, sur 1 pied 9 pouces de large. à droite, une chaumière assez pittoresque, faite de planches et de gros bois ronds serrés les uns contre les autres avec une espèce de petit balcon vers le haut, en saillie et soutenu en dessous par deux chevrons et deux poutres debout. […] Tableau de 2 pieds 2 pouces de haut, sur 1 pied 10 pouces de large. […] Tableau de 2 pieds 2 pouces de haut, sur un pied 10 pouces de large. […] Pour moi, plus je les regarderais, plus je leur verrais de petites ficelles attachées au haut de leurs têtes.

168. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — B — Boès, Karl (1864-1940) »

Karl Boès sont remarquables d’abord par la quantité de noms propres qu’ils recèlent, et de noms communs promus à de hautes dignités par la toute-puissance de la majuscule… Je n’ose déclarer d’ailleurs que tout cela suffise à constituer un livre, et encore moins de beaux vers. […] Henri Mazel Il a intitulé son livre de vers les Opales… Il affectionne les coupes rares, les strophes régulières, tercets et cinquaines de préférence ; le vers semble pour lui un coursier à chanfrein haut et à galop sonore que le poète dompte et dirige.

169. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre XV. La littérature et les arts » pp. 364-405

Sur les ailes de la mélodie, des paroles parfois médiocres ont volé plus haut et plus loin qu’elles n’auraient pu aller par leurs propres forces. […] Auber, en France, le prenait de haut avec le collaborateur de rencontre qu’il pouvait avoir pour les paroles. […] A la fin du second Empire, Carpeaux, sur la façade de l’Opéra de Paris, figure la danse par un groupe de bacchantes échevelées, et il n’en faut pas davantage pour évoquer l’image de la haute vie parisienne durant les années qui précédèrent la débâcle de 1870. […] Elle laissa le jour entrer par des fenêtres hautes et larges s’ouvrant sur des jardins. […] On a dit d’elle140 : « Tout en elle était sonore : ses amours, ses amitiés, ses haines, ses défauts, ses vertus. » Elle avait le verbe haut, la parole vive, animée.

170. (1888) Journal des Goncourt. Tome III (1866-1870) « Année 1869 » pp. 253-317

Pas de distraction pour nous enlever à notre état malingre, au tourment de notre santé, comme ces hautes élévations de la science, ces hypothèses médicales, ces rêves dans l’inconnu de la vie, et qui nous apportent les oublis et les étourdissements que donnent aux autres les enivrements d’une fête du monde, d’un bal, d’un spectacle. […] Dans l’ivresse on se cogne, on se tape, on se poursuit dans les chambres du haut, et à la fin ça tourne à la chiade de collège… si bien qu’à la note de 400 francs du dîner, vient s’ajouter 75 centimes d’arnica pour la Wurtembergoise, qui en se sauvant s’est fait, au coccyx, un noir contre une porte. […] Il gronde, il grogne, il argutie, avec cet agacement de nerfs, que tous ceux qui le connaissent, lui ont toujours vu pour une œuvre un peu haute, l’espèce de petite colère qui le congestionne dans la discussion, et encore avec la mauvaise foi féminine qui le caractérise. […] * * * — Parfois, dans la poussière de la grande route, sous les hauts châtaigniers, nous écoutons la douce et triste cantilène d’un paysan d’Auvergne, berçant, assise sur son bras relevé, une petite montagnarde fiévreuse et pâlotte, dont il paraît charmer le mal. […] Voilà de la critique ; de la haute critique faite par un homme qui n’est pas critique, et que n’a jamais trouvée Sainte-Beuve.

171. (1862) Portraits littéraires. Tome II (nouv. éd.) « Molière »

Son grand-père maternel pourtant, qui aimait fort la comédie, le menait quelquefois à l’hôtel de Bourgogne, où jouait Bellerose dans le haut comique, Gautier-Garguille, Gros-Guillaume et Turlupin dans la farce. […] Une ligne plus haut et le comique cesse, et on a un personnage purement généreux, presque héroïque et tragique. […] Brossette, peut tenir lieu d’un traité complet de peinture, et l’auteur y a fait entrer toutes les règles de cet art admirable (et Despréaux citait les mêmes vers que nous avons donnés plus haut). […] Non-seulement il plaisoit dans les rôles de Mascarille, de Sganarelle, d’Hali, etc., etc. ; il excelloit encore dans les rôles de haut comique, tels que ceux d’Arnolphe, d’Orgon, d’Harpagon. […] Il est difficile de croire, par exemple, que Shakspeare et Molière, les deux plus hauts types de cette classe d’esprits, n’aient pas senti avec une passion profonde et parfois amère les choses de la vie.

172. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Lamartine — Lamartine, Recueillements poétiques (1839) »

… Que les hommes ne jugent pas avec trop de confiance, comme celui qui compte sur les blés aux champs avant qu’ils soient mûrs ; car j’ai vu le buisson, à demi mort et tout glacé pendant l’hiver, se couronner de roses au printemps ; et j’ai vu le vaisseau, qui avait traversé rapidement la mer durant tout le voyage, périr à la fin, juste à l’entrée du port… Celui-là peut se relever, celui-ci peut tomber. » À regarder d’un coup d’œil général le talent et l’œuvre de M. de Lamartine, il semble que le plus haut point de son développement lyrique se trouve dans ses Harmonies. […] Nous nous trompons fort, ou cette manière de traiter son talent, quand on est surtout grand par là, cette facilité de faire bon marché de sa renommée quand elle est si haute et si légitime, est peu propre à prévenir les hommes politiques spéciaux, parmi lesquels il aurait à prendre rang. […] Adolphe Dumas ressemble à Horace ; il a de l’élévation, du mysticisme, du socialisme, des portions hautes et rudes de talent ; comparez-le à Dante le théologien, si vous le voulez absolument, ou à l’Eschyle du Prométhée encore, ou, au pis, à Claudien,… mais à Horace ! […] et quelle est, je vous le demande, la vraie charité, ou celle qui  jetterait du haut de son char une poignée de louis au nez du pauvre, ou celle qui s’approche de lui, passe et repasse deux fois, le considère et lui met dans le fond de la main un louis, un seul louis d’or, qu’elle y renferme avec étreinte, le laissant immobile et pénétré ? […] J’ai dit que ce volume n’était pas dépourvu de hautes beautés.

173. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « Mathurin Regnier et André Chénier »

Il est vrai que du milieu du paysage, tout en s’y promenant ou couché à la renverse sur le gazon, on jouit du ciel et de ses merveilleuses beautés, tandis que l’œil humain, du haut des nuages, l’œil d’Élie sur son char, ne verrait en bas la terre que comme une masse un peu confuse. […] Toute femme m’agrée… Ennemi déclaré de ce qu’il appelle l’honneur, c’est-à-dire de la délicatesse, préférant comme d’Aubigné l’estre au parestre, il se contente d’un amour facile et de peu de défense : Aymer en trop haut lieu une dame hautaine, C’est aymer en souci le travail et la peine, C’est nourrir son amour de respect et de soin. […] Dans ce chef-d’œuvre, une ironie amère, une vertueuse indignation, les plus hautes qualités de poésie, ressortent du cadre étroit et des circonstances les plus minutieusement décrites de la vie réelle. […] Ce sont des Phrynés sans doute, du moins pour la plupart, mais galantes et de haut ton ; non plus des Alizons ou des Jeannes vulgaires en de fétides réduits. […] La fierté délicate d’André Chénier était telle que, durant ce séjour à Londres, comme les fonctions d’attaché n’avaient rien de bien actif et que le premier secrétaire faisait tout, il s’abstint d’abord de toucher ses appointements, et qu’il fallut qu’un jour M. de La Luzerne trouvât cela mauvais et le dît un peu haut pour l’y décider.

174. (1870) De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés « De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés — Chapitre II : Variations des espèces à l’état de nature »

Or, ces différences individuelles sont de la plus haute importance pour nous, car elles sont le plus souvent transmissibles, ainsi que chacun ne peut manquer de le savoir. […] Parmi les animaux qui s’accouplent pour chaque parturition et qui jouissent au plus haut degré de la faculté de locomotion, les formes douteuses, mises au rang d’espèces par un zoologiste et de variétés par un autre, se trouvent rarement dans la même contrée, mais sont nombreuses en des stations séparées. […] Cependant un auteur allemand fait plus d’une douzaine d’espèces d’autant de formes presque universellement considérées comme des variétés, et l’on pourrait s’appuyer tour à tour sur les plus hautes autorités botaniques ou sur les praticiens les plus expérimentés de l’Angleterre pour établir que le Chêne à fleurs pédonculées et le Chêne sessiliflore sont deux espèces bien distinctes selon les uns, deux simples variétés selon les autres. […] C’est pourquoi j’estime que les différences individuelles, bien que de peu d’intérêt pour le classificateur, sont de la plus haute importance pour nous, en ce qu’elles sont le premier écart vers ces variétés légères qu’on trouve à peine dignes d’être mentionnées dans les ouvrages d’histoire naturelle. […] On aurait pu le préjuger, par cette raison qu’elles sont exposées à des conditions physiques diverses et qu’elles entrent en concurrence avec différentes séries d’êtres organisés, ce qui est de la plus haute importance, ainsi que nous le verrons plus loin.

175. (1903) Légendes du Moyen Âge pp. -291

Il est si haut qu’on croit, quand on est au sommet, qu’on va pouvoir toucher le ciel. […] Elle a beaucoup d’autres monuments dignes d’être vus, de l’époque romaine, du haut Moyen Âge et de la Renaissance. […] Tout au bout de cette vaste plaine se dresse le rocher, en forme de sabot renversé, dont Castelluccio occupe le haut. […] Plus haut, il a simplement dit, comme ici : « à la cime des monts », ce qui est vague. […] Et aussi dans le conte persan cité plus haut, page 232, n° 1.

176. (1868) Rapport sur le progrès des lettres pp. 1-184

Je ne sais rien qui mette en si haute lumière l’excellence de l’histoire en fait d’art. […] De ce monde surgissent chaque année de hautes et fières intelligences. […] Mmes de Gasparin et Daniel Stern visent et touchent plus haut encore. […] La chanson est telle qu’un pâtre la pourrait chanter en surveillant ses chèvres du haut d’une roche. […] Poëtes et musiciens à peine sortis de l’ombre, vous êtes attendus plus haut.

177. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre premier. Impossibilité de s’en tenir à l’étude de quelques grandes œuvres » pp. 108-111

Mais qu’un homme, un grand écrivain, si l’on veut, vienne préciser ce qui était nuageux, condenser ce qui était éparpillé, mettre en pleine lumière ce qui était encore enveloppé d’ombre, exposer brillamment ces besoins que beaucoup sentaient sans en avoir la conscience bien nette, alors on lui sait gré d’avoir « dit le secret de tout le monde », d’avoir exprimé tout haut ce que tant d’autres pensaient tout bas, d’avoir donné une voix à des aspirations jusque-là presque muettes. […] S’il est vrai que chaque époque se forge de la sorte des dieux mortels à son image et maltraite ou ignore des hommes de valeur réservés à l’admiration des générations suivantes, il est nécessaire de réduire le rôle excessif attribué trop fréquemment à ces fortes individualités qui dominent du haut de leur gloire le siècle où elles ont vécu. […] De là, pour l’historien, une double obligation : mettre en relief ces sommets dont la base plonge aux mêmes profondeurs que celle des cimes moins hautes ; construire le massif montagneux d’où se détachent et montent en plein ciel les pics les plus élevés.

178. (1885) Préfaces tirées des Œuvres complètes de Victor Hugo « Préfaces des pièces de théâtre — Préface d’« Hernani » (1830) »

Ce n’est pas que ce drame puisse en rien mériter le beau nom d’art nouveau, de poésie nouvelle, loin de là, mais c’est que le principe de la liberté, en littérature, vient de faire un pas ; c’est qu’un progrès vient de s’accomplir, non dans l’art, ce drame est trop peu de chose, mais dans le public ; c’est que, sous ce rapport du moins, une partie des pronostics hasardés plus haut viennent de se réaliser. […] Cette voix haute et puissante du peuple qui ressemble à celle de Dieu, veut désormais que la poésie ait la même devise que la politique : tolérance et liberté. […] C’est pour elle surtout qu’il travaille, parce que ce serait une gloire bien haute que l’applaudissement de cette élite de jeunes hommes, intelligente, logique, conséquente, vraiment libérale en littérature comme en politique, noble génération qui ne se refuse pas à ouvrir les deux yeux à la vérité et à recevoir la lumière des deux côtés.

179. (1870) De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés « De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés — Introduction »

Il est pourtant de la plus haute importance d’arriver à une conception claire des moyens de modification et d’adaptation employés par la nature. […] Je suis donc profondément convaincu que de telles études sont de la plus haute valeur, quoiqu’elles aient été très communément négligées par les naturalistes. […] Cependant, ces rapports sont de la plus haute importance, car ils déterminent l’état présent, et, je crois, le sort futur et les modifications de chaque habitant de ce monde.

180. (1886) Quelques écrivains français. Flaubert, Zola, Hugo, Goncourt, Huysmans, etc. « Préface » p. 

Emile Hennequin, qui avait à un haut degré le respect de son talent et le respect du livre, n’aurait certainement pas consenti à former un volume d’études plus ou moins hétérogènes, qu’il n’y a pas de raison péremptoire pour réunir sous un même titre, et qui ne constituent pas un ensemble comme les Ecrivains francisés. Soucieux de conserver tout ce qu’a produit ce rare esprit, nous n’avons pas cru devoir nous laisser arrêter par les considérations qui l’auraient arrêté lui-même, et il nous a semblé que, prise isolément, chacune des études que nous présentons aujourd’hui offrait un assez haut intérêt pour honorer encore la mémoire d’Émile Hennequin et pour entretenir les regrets de ceux qui ont vu disparaître avec lui une des plus belles intelligences et l’un des plus purs talents de la jeune génération.

181. (1888) Revue wagnérienne. Tome III « III »

Lohengrin a donc une première origine, très haute, quasi religieuse, qui lui est donnée par la tradition du Gral. […] Au moment de la cérémonie, un crépuscule envahit la salle, un rayon tombe du haut de la coupole, sur Amfortas et le saint Gral qu’il élève : cette apparition empourprée devient alors le point de convergence de tous les regards. […] Elle porte une robe troussée très haut pour pouvoir courir ; sa chevelure noire voltige, dénouée ; une ceinture, faite de peaux de serpents, entoure sa taille. […] On a vu plus haut quels principes de mimique Wagner avait établis dans ses œuvres théoriques ; l’étude du drame vient de nous les montrer appliqués. […] Sa musique transubstantie l’esprit, le conduit, l’élève si haut qu’il en résulte presque un phénomène physique… M. 

182. (1878) La poésie scientifique au XIXe siècle. Revue des deux mondes pp. 511-537

Être l’Homère d’un âge scientifique, quelle plus haute ambition peut tenter un poète ? […] À supposer que le jeune auteur n’ait pas réussi du premier coup dans son effort, c’est au moins là une œuvre de haut vol qui s’élève au-dessus de la plupart des productions contemporaines. […] On voit que le poète s’est mis tout entier dans son œuvre avec son goût pour les grands problèmes, sa haute culture scientifique, avec tout son talent et aussi son entière sincérité. […] au lieu d’adopter le grand vers de haut vol et de libre allure, seul capable de suivre dans son essor l’idée philosophique, comme s’il était amoureux de l’obstacle, il a adopté, dans la plus grande partie de son poème, la forme du sonnet. […] employer cette forme artificielle à l’expression des plus hautes idées, quelle fantaisie regrettable !

183. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « M. Ernest Renan »

Jeune homme, vous vous contenterez de ce raisonnement, de cette démonstration, vous parût-elle insuffisante ; vous irez jusqu’ici en ces hautes matières, mais vous n’irez pas plus loin. […] Partout où il avait passé, les choses paraissaient autres après qu’auparavant ; il vous apprenait à voir le pays comme du haut d’une colline. […] On s’écria, on dénonça : lui, il resta calme, il se déroba à la polémique comme à un exercice inférieur, et il remonta d’un degré plus haut dans son point de vue, jusqu’à ne pas craindre même de rencontrer un léger nuage, — le nuage d’or de la poésie. […] Car que peut désirer de plus beau une grande âme, une haute intelligence, si par malheur la vie et la conscience individuelle ne persistent pas à tout jamais et s’évanouissent après cette vie mortelle ? […] Renan porte un bien grand respect et une bien haute révérence à sa majesté l’esprit humain, Mais dans un pays comme la France, il importe qu’il vienne de temps en temps des intelligences élevées et sérieuses qui fassent contrepoids à l’esprit malin, moqueur, sceptique, incrédule, du fonds de la race ; et M. 

184. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre VIII. Jésus à Capharnahum. »

Avoir un fauteuil d’honneur au premier rang était la récompense d’une haute piété, ou le privilège de la richesse qu’on enviait le plus 394. […] C’est un délicieux bosquet de haute verdure, sillonné par d’abondantes eaux qui sortent en partie d’un grand bassin rond, de construction antique (Aïn-Medawara). […] Les eaux, d’un azur céleste, profondément encaissées entre des roches brûlantes, semblent, quand on les regarde du haut des montagnes de Safed, occuper le fond d’une coupe d’or. Au nord, les ravins neigeux de l’Hermon se découpent en lignes blanches sur le ciel ; à l’ouest, les hauts plateaux ondulés de la Gaulonitide et de la Pérée, absolument arides et revêtus par le soleil d’une sorte d’atmosphère veloutée, forment une montagne compacte, ou pour mieux dire une longue terrasse très élevée, qui, depuis Césarée de Philippe, court indéfiniment vers le sud. […] La grande importance que prit le judaïsme dans la haute Galilée après la guerre des Romains permet de croire que plusieurs de ces édifices ne remontent qu’au IIIe siècle, époque où Tibériade devint une sorte de capitale du judaïsme.

185. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre II. La Renaissance. — Chapitre III. Ben Jonson. » pp. 98-162

Et de son cerveau… (Mosca crie plus haut. […] » Mosca étale le testament sur une table, et fait tout haut l’inventaire. « Neuf tapis de Turquie. […] À peine mariée, Épicœne parle, gronde, raisonne aussi haut et aussi longtemps qu’une douzaine de femmes […] » Elle commande aux valets de parler haut ; elle fait ouvrir les portes toutes grandes à ses amis. […] Catilina, acte II, une très-belle scène, non moins franche et non moins vivante, sur la haute bohême de Rome.

186. (1894) La bataille littéraire. Cinquième série (1889-1890) pp. 1-349

De hautes et puissantes organisations vivent de nos jours. […] Venez donc, patron Garrec, recevoir cette haute distinction que vous avez si bien conquise ! […] Quand du haut de sa chaire il laissait tomber cette phrase : « Vous me ferez cent lignes, vous, le petit sucré là-bas !  […] J’ai dit plus haut que le héros de M.  […] J’ai dit plus haut que le voyage de Victor Hugo s’arrêtait à l’île d’Oléron.

187. (1862) Cours familier de littérature. XIV « LXXIXe entretien. Œuvres diverses de M. de Marcellus (2e partie) » pp. 5-63

Je ne parle pas ici par ressentiment d’auteur, car je suis le seul poète du temps et le seul homme politique de son époque qui soit, comme poète, placé par lui dans la compagnie immortelle d’Homère, de Virgile, de Racine, et, comme homme de tribune et de hautes affaires, au rang des hommes de bon sens. […] XX Mais, à mesure que M. de Marcellus avançait en âge, il s’élevait plus haut que ses travaux pittoresques sur la Grèce moderne et populaire. […] Il vivait hors du monde des événements ; et se plongeait de plus en plus dans les études et dans les spéculations de la haute philosophie de l’ancienne Grèce. […] Un jour de septembre, du haut de ma fenêtre, dans le pavillon de bois où flottait à Thérapia le pavillon de France, je considérais les brouillards qui s’élevaient insensiblement de la surface du Bosphore. […] Je ne vous ferai pas néanmoins remonter plus haut que l’arrière-grand-père de notre héros.

188. (1911) La morale de l’ironie « Chapitre IV. L’ironie comme attitude morale » pp. 135-174

Et nous retrouvons ici, par un autre côté, le problème de la vertu, examiné plus haut sous un angle différent. […] Que toutes nos impressions et tous nos jugements ne soient pas en cela d’une logique très haute, je n’y contredirai pas. […] Mais elle nous apprend aussi à aimer ou à estimer dans les valeurs inférieures ou négatives ce que nous admirons dans les plus hautes. […] Et si l’ironie peut s’élever assez haut, elle nous fera comprendre même la valeur des plus petites choses. […] L’homme n’est à peu près jamais capable de poursuivre, ni de reconnaître clairement les fins très hautes et très éloignées.

189. (1888) La critique scientifique « La critique scientifique — La synthèse »

Barbey d’Aurevilly, les études des de Goncourt et de Théodore de Banville, les descriptions de tableaux du Voyage en Italie de Taine, certains récits d’auditions par Baudelaire seraient ce que nous réclamons, s’ils étaient basés, cependant, sur l’enquête analytique préalable sans laquelle ces pages de haute littérature demeurent la constatation insuffisante d’une émotion morale inexpliquée. […] — Ce sera de même, en recourant à îles procédés usités déjà, mais dont l’insuffisance, s’ils demeurent isolés, a été montrée plus haut, que l’on résumera des analyses psychologiques, l’image îles êtres vivants qui y auront été disséqués Le critique concevra que le mécanisme mental exsangue et incolore, qu’il aura lentement et pièce par pièce déduit des données esthétiques, n’est point une entité idéale, une force flottante et sans point d’application, mais qu’animé, existant, nourri d’un sang pourpre, concentré en des cellules sans cesse vibrantes et rénovées, il se situe en un encéphale particulier, un système nerveux, un corps, un être humain, qui fut debout, marchant et agissant dans notre air, sur notre terre. […] L’on aura atteint au bout de ces travaux le résultat le plus haut auquel tend tout l’embranchement des sciences organiques : la connaissance d’un homme analyse et reconstitué, de ses fibres intérieures, des délicates agrégations de cellules cérébrales traversées par le jeu infiniment mouvant et complexe des ondes récurrentes, de ce centre de la trame intime de vibrations qui, phénomène physiologique pour l’observateur idéal placé au dehors et percevant son envers, est, pour ces cellules mêmes, immatérielles ou s’ignorant matière, de la pensée, des émotions, des douleurs, des joies, des souvenirs d’êtres et de choses, — jusqu’à l’aboutissement même des nerfs infiniment déliés, infiniment ramifiés, qui par des voies encore inconnues, à travers l’encéphale, le cervelet, la moelle allongée et la moelle épinière, recevant les répercussions actives de tout ce travail intérieur, conduiront aux muscles, à l’épiderme, à cette surface de l’homme colorée et conformée, — jusqu’aux êtres qui forment les antécédents de ce corps, — jusqu’à ceux qui le touchèrent ou dont les actes, par des manifestations proches ou lointaines, l’affectèrent, le réjouirent ou le contristèrent, — jusqu’aux cieux qui se reflétèrent dans ses yeux, — jusqu’au sol qu’il foula de sa marche, — jusqu’aux cités ou aux campagnes dont la terre souilla ses pieds et résorba sa chairec. […] L’on aura désigné ainsi par le dehors et le dedans, ta sorte d’Athénien, par exemple, qui s’attachait à Aristophane, et celle qui se sentait exprimée par Euripide ; le citadin de la renaissance italienne dont les goûts allaient aux peintures sévères de l’école florentine, et l’habitant de Venise qui, charmé d’abord par le colorisme des Titien et des Tintoret, versa dans les luxurieuses mythologies de leurs successeurs ; de l’habitué des concerts du dimanche à Paris qui, penché toute la semaine sur quelque besogne pratique, retrouve une fois par semaine une âme enthousiaste et grave, digne de s’émouvoir aux hautes passions d’un Beethoven, au religieux naturalisme de Wagner, au trouble de Berlioz.

190. (1885) Les œuvres et les hommes. Les critiques, ou les juges jugés. VI. « Prévost-Paradol » pp. 155-167

Il n’avait pas quitté le frac bleu de l’École normale, — ce bas bleu des hommes, seulement porté plus haut que la jarretière, — qu’il était célèbre. […] et non pas un homme d’État comme Montesquieu, penseur insuffisant pour une âme si haute, mais un homme d’État comme Pitt ! […] Je n’ai de haute main sur les ridicules de personne. […] Il fait, tour à tour, le Caton, le Thraséas et le Sénèque, mais les hautes dissertations auxquelles il se livre contre nous n’ont pas plus d’action sur le lecteur que n’en auraient ses discours officiels de professeur à la distribution des prix d’un collège, s’il était possible de les relire après les avoir entendus.

191. (1885) Les œuvres et les hommes. Les critiques, ou les juges jugés. VI. « M. Jules Girard » pp. 327-340

c’est la vérité que cette ressemblance, ou plutôt cette identité qu’il signale entre l’esprit grec et le génie de Thucydide, qui est, je le veux bien, l’expression la plus haute de l’esprit grec dans l’histoire. […] Si Thucydide est le génie grec dans son expression la plus pure, la plus haute, la plus complète (style d’école normale), abordant l’histoire, il l’aborde nécessairement avec toutes les idées et tous les procédés familiers au génie grec. […] C’est cette raison qui, dans l’art littéraire des Grecs comme dans les autres arts, retranche, combine, mesure, équilibre, sacrifie le détail vigoureux à ce qu’elle appelle un peu vaguement l’harmonie de l’ensemble, dispute enfin, dispute avec la forme, comme, en philosophie, elle dispute avec le fond, chez ce peuple disputeur par excellence, pour qui la harangue même, dont nous parlions plus haut, n’était qu’une des formes de la dispute éternelle. […] Comment est-il possible de juger un homme, si on ne se sépare pas de lui dans une atmosphère quelconque, — si on ne se place pas plus haut que lui pour l’embrasser mieux et le voir tout entier ?

192. (1905) Les œuvres et les hommes. De l’histoire. XX. « La révocation de l’Édit de Nantes »

À une autre époque que la nôtre, dans un temps où l’on n’eût pas interverti l’ordre de tous les problèmes sociaux, on ne se fût peut-être pas tant préoccupé des conséquences d’une mesure plus haute que des intérêts matériels, et on eût souri du chirurgien, non de la dernière heure, mais de l’heure passée, qui aurait pris avec tant de soins les dimensions qu’il n’a pas à guérir, mais qu’il veut montrer. […] Mais, pour eux, il y avait une question plus haute que la question de ce dommage : c’était la question posée et reposée depuis des siècles, cette question de l’unité dans l’État, qui n’a perdu de son importance que depuis que les gouvernements se sont affaiblis. […] Sans daigner répondre à ces reproches d’immoralité et de tyrannie, faits par les hautes moralités du xviiie  siècle à une mesure qui eut l’assentiment d’hommes comme Le Tellier, Bossuet et Grotius, le plus vénéré des protestants, il eût examiné seulement, la tête dans le xviie  siècle, si la mesure de Louis XIV avait cette convenance du moment et cette prévoyance de l’avenir qui donnent à tout pouvoir, eût-il échoué, un bill d’amnistie devant l’Histoire. […] Obligé, par le sujet même de son livre, de parler d’hommes qui n’eurent jamais nulle part, à l’exception de quatre ou cinq d’entre eux peut-être, ce haut pavé historique qui agit tant et tout d’abord sur l’imagination du lecteur, il n’a pas, selon nous, assez contenu son récit entre ces quelques hommes vraiment dignes du regard de l’histoire, et il est tombé dans les infiniment petits d’une longue suite de biographies.

193. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « XXVI. Médecine Tessier »

Il faut dire cela et le dire bien haut ! […] Les honnêtes gens ont eu horreur et dégoût, mais l’horreur n’a pas monté plus haut que le cœur. […] Sans le chrétien Napoléon, qui se mit tout à coup à faire les affaires de Dieu, et quelques esprits du plus haut parage, comme le vicomte de Bonald, qui, par parenthèse, traita Cabanis dans ses Recherches philosophiques comme plus tard M. de Maistre traita Bacon, le Matérialisme passait presque à l’état d’institution politique. […] M. le docteur Tessier n’est pas uniquement préoccupé de spiritualiser l’instruction et de tenir compte de la magnifique duplicité humaine, même dans l’intérêt de l’observation physiologique ; il va plus loin et plus haut… « Le rationalisme dogmatique, dit-il, ne saurait coordonner les phénomènes physiologiques, et comprendre les rapports de la physiologie et de la médecine, mais, sur le terrain de la pathologie, ce rationalisme devient la négation de TOUTE vérité. » Ainsi, comme on le voit, l’enseignement n’est pas seulement matérialiste ; il est de plus arbitraire et antimédical, et l’habile écrivain le prouve avec une rigueur dont, certes, il n’avait pas besoin aux yeux de ceux qui savent jusqu’où peut porter une idée.

194. (1887) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (deuxième série). IX « M. Caro. Le Pessimisme au XIXe siècle » pp. 297-311

Et l’inquiétude qu’il éprouve n’est pas seulement pour ses propres raisonnements ou pour la destinée d’un livre qui peut paraître la plus mauvaise des plaisanteries à ceux qui prennent les choses par le côté plaisant, mais c’est une inquiétude plus haute, plus nette et plus fondée… La pudeur du philosophe qui rougit de ces vésanies d’une ignominieuse extravagance, ne l’empêche pas de jeter sur le temps où ces vésanies courent le monde et ambitionnent de le dominer le regard inquiet de l’homme pénétrant que le philosophe ne peut abuser… C’est ici le côté profond de cette Étude sur le Pessimisme au xixe  siècle. […] On assure que la secte publie des brochures mystérieuses, pleines d’informations et d’instructions du plus haut intérêt au point de vue de la pathologie morale, mais de l’effet le plus bizarre sur les lecteurs qui ne sont pas initiés. […] , et il s’y propage, par une contagion subtile, dans un certain nombre d’esprits qu’elle trouble ; c’est une sorte de maladie, mais de maladie privilégiée, concentrée jusqu’à ce jour dans les sphères de la haute culture intellectuelle… » Que de tortillements pour nous dire que c’est M.  […] La question d’ici est plus haute que la littérature.

195. (1889) Les œuvres et les hommes. Les poètes (deuxième série). XI « Lamartine »

Ils ne sont guères qu’un mince rayon tombé de la plume de Lamartine sur la source cachée d’où devait jaillir plus tard, dans son immensité d’éclat, la plus haute poésie qui ait traversé le xixe  siècle. […] Jamais le Lyrisme n’est monté plus haut dans des vers plus beaux, et qui eussent ravi, en l’étonnant, Virgile lui-même, s’il les avait entendus ! […] » C’était trop haut pour ceux-là qui étaient dessous. […] Il avait cela de La Fontaine… de La Fontaine dont il méprisait l’idéal, du haut du sien.

196. (1902) Les œuvres et les hommes. Le roman contemporain. XVIII « Catulle Mendès »

Esprit emphatique (dans le bon sens du mot), il tend, et c’est son mérite, au grandiose, même quand il le manque ; et quand il le manque, ce n’est pas qu’il ait tiré trop bas, mais c’est qu’il a tiré trop haut ! […] Catulle Mendès descend de plus haut que ses contemporains. […] … III Il l’obtient, comme Hugo, qu’il rappelle partout et sans cesse, au prix de l’invraisemblable, du faux, de l’impossible, de tout ce qui n’est plus la vie, même la vie intense, la vie passionnée, la vie montée à sa plus haute puissance, soit dans le mal, soit dans le bien ! […] Son livre, ce roman de La Vie et la mort d’un clown, très frappant, mais trop frappé, aura-t-il le succès qu’obtiennent tout à l’heure des œuvres de moindre effort et de tendance moins haute ?

197. (1861) Questions d’art et de morale pp. 1-449

Étranger à l’homme en quelque sorte, il vient d’ailleurs et de plus haut. […] La plus haute et en même temps la plus populaire expression de la philosophie ancienne, c’est la doctrine de Platon. […] La révélation seule pouvait élever l’homme plus haut que ne l’a fait la sagesse athénienne. […] Quelles avalanches de mépris n’ont pas été déversées, du haut des flèches gothiques, sur l’humble fronton grec ! […] Le plus haut degré de puissance qui soit accordé à l’homme, c’est précisément de matérialiser la pensée, de lui donner un corps.

198. (1912) Réflexions sur quelques poètes pp. 6-302

Il la reconnaît vite, car il lui avait érigé autrefois, dans ses vers, un palais plein de magnificence au plus haut sommet de l’Atlas. […] … Nous avons mieux pour confirmer l’anecdote citée plus haut. […] Cela regarde les moindres choses, comme les plus hautes. […] Il fut, aussi, passionné et tragique et il sut tirer de la lyre les sons les plus hauts. […] Je crois aussi que la prose n’est pas bonne pour faire vivre sur la scène une tragédie ou une haute comédie versifiées dans l’original.

199. (1856) Cours familier de littérature. II « VIIIe entretien » pp. 87-159

En diction poétique, après lui on peut descendre, mais on ne peut plus remonter, à moins de monter plus haut que nature. […] Ce trône, pour le prêtre de génie, est plus haut que celui des rois : c’est de là qu’il règne sur le monde des consciences. De toutes les places où un mortel peut monter sur la terre, la plus haute pour un homme de génie est incontestablement une chaire sacrée. […] C’est ce qui eut lieu en France pour l’éloquence de la chaire, cette haute littérature sacerdotale. […] Ni Socrate, ni Platon, ni Confucius, ni Cicéron, ni Démosthène, ne parlaient de si haut au peuple assemblé.

200. (1861) Les œuvres et les hommes. Les historiens politiques et littéraires. II. « III. M. Michelet » pp. 47-96

Car, il faut bien le dire et très haut à ceux qui la vantent ou aux intéressés qui s’en servent, la Nouvelle histoire de la Révolution française, par M.  […] Michelet de haut mal. […] Michelet ne doit pas manquer de générosité courageuse, quand il est de sens rassis, et il n’aura pas peur de se relever dans l’estime des hommes, car, lorsqu’on s’y relève, on monte toujours plus haut que la place d’où l’on était tombé ! […] Ventura ne sont pas le travail d’histoire que nous avions espéré et que nous désirons encore… C’est tout simplement un substantiel recueil d’homélies, prononcées par le célèbre prédicateur du haut de cette chaire française qu’il illustre de son talent étranger. […] Ventura ne pourrait être examiné que dans un travail spécial de la plus haute gravité et par une plume plus compétente que la nôtre.

201. (1888) Poètes et romanciers

L’orgueil de l’esprit, de la science, est la plus haute volupté de l’homme. […] Aucun écrivain ne porte et ne soutient plus haut sa pensée et son cœur. […] À coup sûr, l’émotion n’a pu monter si haut. […] Il faut arrêter, à sa source la plus haute, cette épidémie de divinité. […] Il aime à nous donner une haute idée de sa force, à se montrer formidable.

202. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — L — Loyson, Charles (1791-1819) »

Il est poète de sens, de sentiment et d’esprit, plutôt que de haute imagination. […] Le vol du poète de Château-Gontier est plus soutenu et plus haut.

203. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « MADAME DE RÉMUSAT » pp. 458-491

Mais surtout elle avait mieux encore qu’à répondre, quand Bonaparte pensait tout haut, comme il s’y échappait souvent : elle savait écouter, elle savait comprendre et suivre ; il était très-sensible à ce genre d’intelligence et en savait un gré infini, particulièrement à une femme. […] Le goût remontait à ses hautes sources ; la religion, servie par M. de Chateaubriand, représentait ses grands modèles. […] La société cependant y gagne en intérêt, en noble emploi des loisirs ; et, en effet, quand elle n’est pas pour les personnes un accident, un lieu de passage et quelquefois de contrainte, mais un séjour habituel et nécessaire, il faut bien en tirer tout le parti possible, même y penser et y réfléchir tout haut, sans quoi on courrait risque de ne pas trouver le temps de réfléchir. Or penser tout haut, devant tous, opérer sur les idées devant témoins, est un exercice brillant, un jeu plein de charme, et qui finit par envahir. […] On ne pense pas seulement tout haut, on étudie tout haut ; la manière s’y aiguise en clarté, en rapidité, en intérêt ; elle marque moins en originalité et en profondeur.

204. (1875) Premiers lundis. Tome III « Les poètes français »

J’ai dû me forcer un peu pour remonter plus haut et m’enfoncer dans des régions d’apparence inculte et âpre. […] Toute cette histoire suprême de Bégon, partant de son château, sur la marche de Gascogne, où lui, homme du Nord, il s’ennuie, et s’arrachant de sa belle et riante famille pour s’en aller mourir dans une forêt, près de Valenciennes, au pied d’un tremble, de la main d’un misérable archer, est d’une haute fierté et d’un effet des plus dramatiques. […] Ce noble Lorrain, à la haute taille, au visage balafré et resté beau, au geste dominant, à la parole courtoise, est bien un ancêtre des illustres Guises, de celui qui à la veille d’être massacré, répondait aux donneurs d’avis : « On n’oserait !  […] La littérature et la poésie française avait perdu la voie haute et directe du moyen âge ; elle avait donné à gauche dans un labyrinthe et un fouillis scolastique ; il fallait une grande machine un peu artificielle pour la remettre dans une large voie classique régulière, pour la reporter en masse dans une carrière pleine et ouverte, qui pût avoir une bonne issue. […] Ce ne sont pas seulement les plus grands qui ont excellé dans quelques-unes de tes parties les plus hautes et les plus heureusement renouvelées, ce sont des poètes moindres, mais poètes encore par le cœur, par la fantaisie, par l’art, par une vocation sincère !

205. (1863) Cours familier de littérature. XVI « XCIe entretien. Vie du Tasse (1re partie) » pp. 5-63

Après avoir suivi une longue rue presque déserte sur laquelle s’ouvraient seulement les hautes fenêtres grillées de fer d’un hôpital des pauvres, je passai sous des voûtes de haillons séchant au soleil, que des blanchisseuses suspendent à des cordes tendues d’un côté de la rue à l’autre, et qui flottent au vent comme des voiles déchirées pendent aux vergues après la tempête. […] À droite, de hautes murailles grises, percées de meurtrières, dominaient la rampe ; à gauche, un parapet en pierre soutenait le chemin et laissait voir par-dessus ses dalles l’océan immobile et brumeux des rues, des débris, des clochers, des ruines de Rome, qui s’étendait sans bornes sous le regard et qui se confondait avec l’horizon des montagnes de la Sabine. […] Les Tassi, race noble et militaire, déjà connus au douzième siècle, avaient leur château dans les environs de Bergame, non loin de Mantoue, terre féconde, qui ne paraît pas, au premier aspect, favorable à l’imagination, mais qui voit d’en bas les Alpes d’un côté, les Apennins de l’autre, et à qui ces deux hauts horizons noyés dans un ciel limpide inspirent on ne sait quelle grandeur et quelle élévation sereines, qu’on retrouve dans Virgile, dans le Tasse, dans Pétrarque, tous poètes de la basse Italie. […] aucune… Avec une haute intelligence, avec autant de prudence que de vertus et de charmes, elle était restée par suite de mon bannissement dans une sorte de veuvage sans parents ou avec des parents pires que des étrangers ; sans amis pour l’aider de leurs conseils dans l’adversité, en sorte qu’elle vivait dans un continuel état de crainte ou d’anxiété ; elle était jeune, elle était belle ; elle était si jalouse de son honneur que depuis mon exil elle avait souvent désiré d’être vieille et disgraciée de figure ! […] Ces deux liaisons du Tasse avec Marguerite et le duc de Guise lui faisaient blâmer trop haut la longanimité du cardinal d’Este envers les hérétiques.

206. (1830) Cours de philosophie positive : première et deuxième leçons « Première leçon »

(6) Le système théologique est parvenu à la plus haute perfection dont il soit susceptible quand il a substitué l’action providentielle d’un être unique au jeu varié des nombreuses divinités indépendantes qui avaient été imaginées primitivement. […] Tel est, indépendamment des hautes considérations sociales qui s’y rattachent et que je ne dois pas même indiquer en ce moment, le motif fondamental qui démontre la nécessité logique du caractère purement théologique de la philosophie primitive. […] C’est à cette fin qu’avant de procéder à l’étude des phénomènes sociaux, je considérerai successivement, dans l’ordre encyclopédique annoncé plus haut, les différentes sciences positives déjà formées. […] Pour expliquer convenablement ma pensée à cet égard, je dois d’abord rappeler une conception philosophique de la plus haute importance, exposée par de Blainville dans la belle introduction de ses Principes généraux d’anatomie comparée. […] Car la spécialité exclusive, l’isolement trop prononce, qui caractérisent encore notre manière de concevoir et de cultiver les sciences, influent nécessairement à un haut degré sur la manière de les exposer dans l’enseignement.

207. (1818) Essai sur les institutions sociales « Chapitre IX. Première partie. De la parole et de la société » pp. 194-242

Le verbe est à la fois la plus haute abstraction, la plus forte empreinte de la conscience de soi et de la croyance à ce qui n’est pas soi, l’expression la plus ferme, la plus déliée, la plus flexible et la plus certaine. […] Or l’histoire du genre humain nous prouve que l’homme n’a jamais été un instant orphelin ; elle nous prouve que l’organisation des premières sociétés fut très forte ; elle nous prouve que les langues ont toujours été douées des mêmes formes, et qui sont la preuve du plus haut déploiement possible de l’intelligence humaine. […] Mais je ne sais pas si, en remontant plus haut, on ne pourrait pas tout concilier. […] A-t-on assez réfléchi, enfin, à cette force des racines primitives qui naît en même temps, par une merveilleuse fécondité, et du son émis et du signe figuré, et dont l’étude seule est la source des plus hautes méditations ? […] Ces langues sacrées n’ont été livrées à la multitude que lorsqu’elles ont été parfaites : encore les inventeurs se sont-ils réservé la connaissance intime de leurs hautes théories.

208. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « Oeuvres inédites de la Rochefoucauld publiées d’après les manuscrits et précédées de l’histoire de sa vie, par M. Édouard de Barthélémy. »

Décidément, à ses yeux, « La Rochefoucauld, depuis la découverte du Mémoire de 1649, prend place avant Pascal dans l’histoire de la langue. » On avait dit, à propos du livre des Maximes publié en 1665, que l’auteur avait « cette netteté et cette concision de tour que Pascal seul, dans ce siècle, avait eues avant lui. » M. de Barthélémy s’empare de cet éloge : « C’est donc au duc à qui en revient désormais tout l’honneur, dit-il ; la date du Mémoire ne peut le lui laisser contester. » Mais la difficulté n’est pas dans la date ; le Mémoire de 1649, si on le lit de sang-froid et sans se monter la tête, n’offre pas précisément cette netteté et cette concision de tour, ou du moins ne l’offre pas à un haut degré : il a d’autres qualités, mais pas celles-là éminemment. […] Chacun, quoi qu’il fasse, y porte son intérêt le plus fin, je veux dire son idéal secret, composé du moi subtilisé, quintessencié, poussé au plus haut degré et au sublime. […] Pour l’un, c’est la littérature morale et haute, sévère et abstraite, ce qu’il appelle l’esprit pur, qui lui fait illusion ; pour l’autre, c’est la littérature négligente, aimable et facile, la seule joyeuse et vraiment heureuse ; pour un autre, c’est la marotte d’une noble cause dont il se figure être la personnification vivante et le représentant tout chevaleresque. […] L’historien de Port-Royal, qui élève fort haut la valeur de tous les habitants de l’abbaye, me paraît en cette circonstance peu « logique, car il dément constamment le jugement porté par les pieuses amies de Mme de Sablé, et qui doivent cependant ici éclairer l’opinion et la former. […] Je n’ai point, pour parler son langage, élevé fort haut la valeur de tous les habitants de l’abbaye.

209. (1889) Le théâtre contemporain. Émile Augier, Alexandre Dumas fils « Émile Augier — Chapitre V »

Charrier, un gros banquier d’il y a vingt ans, florissant, épanoui, superbe, « le visage plein et les joues pendantes, l’œil fixe et assuré, les épaules larges, l’estomac haut, la démarche ferme et délibérée ». […] Qu’il paye d’audace ses débiteurs, qu’il aille, le front haut et la main ouverte, au-devant des mains fermées et des chapeaux cloués sur le front. […] Charrier pour associé, et pour valet de ses hautes œuvres un vieux bohème cynique et sceptique qu’il a déterré d’un estaminet. […] Et c’est par la haute banque qu’il fait patronner la misérable industrie qui consiste à ramasser des ordures pour faire du papier ! […] Des coups portés de si bas ne frappent pas si haut.

210. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Campagnes d’Égypte et de Syrie, mémoires dictés par Napoléon. (2 vol. in-8º avec Atlas. — 1847.) » pp. 179-198

Montesquieu lui-même est éclipsé ; c’est le cri de Colomb du haut d’un mât, saluant la terre, c’est l’élan du génie qui découvre son monde. […] Deux années s’écoulèrent avant que Napoléon, qui venait de découvrir son Italie du haut du col de Tende, la pût revoir comme général en chef et s’y lancer cette fois en vainqueur. […] » En exposant de la sorte les incertitudes, il semble que Napoléon lui-même, au plus haut de son rêve, se complaise à les laisser planer, et que, dans son dessein préconçu de commencer par une de ces choses, il les embrasse toutes dans le lointain à la fois. […] C’est une haute leçon de politique ; il est seulement curieux que ce soit celui qui l’a pratiquée à ce degré, qui nous la divulgue avec cette sorte d’indiscrétion ou de franchise. […] On saisit à nu, dans ce chapitre, l’œuvre d’une vieille société en reconstruction sous une main puissante, une vieille civilisation avec ses pièces essentielles, hardiment remise, comme un vaisseau de haut bord, sur le chantier.

211. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Le père Lacordaire orateur. » pp. 221-240

Sa parole, semblable à ces oiseaux de haut vol qui ne sont à l’aise que dans l’espace et l’étendue, avait trouvé sa région. […] Des hommes de haut talent, M. de Chateaubriand, M. de Maistre, M. de Lamennais (je ne les prends que par les ressemblances les plus générales), l’un à travers l’encens de la poésie, les autres par l’éclatante hardiesse des interprétations, avaient ressuscité pour les générations du siècle le christianisme, et l’avaient offert sous des aspects qui ne sont point assurément ceux auxquels nous avaient accoutumés les Fleury, les Massillon, les Bourdaloue. […] On sent si bien une puissance qui, du haut de cette chaire, est dans la sincérité de sa direction et dans la plénitude de sa nature, une parole qui a cru entendre son mot d’ordre d’en haut : « N’interrogez pas le cours des fleuves ni la direction des montagnes, allez tout droit devant vous ; allez comme va la foudre de Celui qui vous envoie, comme allait la parole créatrice qui porta la vie dans le chaos, comme vont les aigles et les anges. » Il va donc et nous emporte mainte fois sur les crêtes et sur les cimes ; on frémit, mais il ne tombe pas. […] Dans cette haute ambition morale qu’il avoue et qui est celle de conquérir le plus d’esprits et le plus de cœurs à ce qu’il croit la vérité, il s’était dit : « Ma parole est utile ; pourquoi ne serait-elle pas perpétuelle ? […] On ne peut lire tout haut cette oraison funèbre sans qu’une larme, pour ainsi dire perpétuelle, ne vienne mouiller la paupière et entrecouper la voix.

212. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Vauvenargues. (Collection Lefèvre.) » pp. 123-143

Vauvenargues avait sur la noblesse de sang, non pas des préjugés, mais de hautes idées qui la lui faisaient envisager comme une institution qui consacrait le mérite et la vertu des ancêtres et en imposait l’héritage à leurs descendants. […] Marmontel, très jeune, qui le vit beaucoup dans cette année, nous a montré au naturel avec sa bonté affable, sa riche simplicité, sa douceur à souffrir, sa sérénité inaltérable et sa haute raison sans amertume. […] En l’écrivant, Vauvenargues ne songeait certes pas à faire son portrait ; mais il se retraçait et se proposait son plein idéal à lui-même : Quand je trouve dans un ouvrage une grande imagination avec une grande sagesse, un jugement net et profond, des passions très hautes, mais vraies, nul effort pour paraître grand, une extrême sincérité, beaucoup d’éloquence, et point d’art que celui qui vient du génie, alors je respecte l’auteur : je l’estime autant que les sages ou que les héros qu’il a peints. […] Vauvenargues avait intérêt à ce que le milieu de l’humanité fût le plus haut possible, certain qu’il était d’y atteindre. Il ne mettait cependant point ce milieu trop haut.

213. (1891) Journal des Goncourt. Tome V (1872-1877) « Année 1873 » pp. 74-101

Daudet est très amusant et touche au plus haut comique, quand il portraiture le littérateur, le fabricateur d’opérettes. […] Là, Hugo a un morceau de la plus haute éloquence, qu’il termine par ces mots : « Oui, je le sais, le défaut c’est l’élection par les membres en faisant partie… Il y a dans l’homme une tendance à choisir son inférieur… Pour que l’institution fût complète, il faudrait que l’élection fût faite sur une liste présentée par l’Institut, débattue par le journalisme, nommée par le suffrage universel. » Sur cette thèse, qui semble un de ses habituels morceaux de bravoure, il est, je le répète, très éloquent, plein d’aperçus, de hautes paroles, d’éclairs. […] J’ai fait construire, au haut de ma maison, une cage en cristal, une espèce de serre, qui m’a bien coûté 6 000 francs. […] C’était une scène de comédie du plus haut comique. […] Ce n’est plus l’hostilité haute ou ironique d’un homme de pensée, sa parole a quelque chose de l’impitoyabilité féroce de la parole d’un ouvrier manuel.

214. (1911) Jugements de valeur et jugements de réalité

Il en va tout autrement quand je dis : cet homme a une haute valeur morale ; ce tableau a une grande valeur esthétique ; ce bijou vaut tant. […] Spencer a pu démontrer que la philanthropie est souvent contraire à l’intérêt bien entendu de la société ; sa démonstration n’empêchera pas les hommes de mettre très haut dans leur estime la vertu qu’il condamne. […] A ces moments, il est vrai, cette vie plus haute est vécue avec une telle intensité et d’une manière tellement exclusive qu’elle tient presque toute la place dans les consciences, qu’elle en chasse plus ou moins complètement les préoccupations égoïstes et vulgaires. […] Car les concepts sont également des constructions de l’esprit, partant, des idéaux ; et il ne serait pas difficile de montrer que ce sont même des idéaux collectifs, puisqu’ils ne peuvent se constituer que dans et par le langage, qui est, au plus haut point, une chose collective. […] En un mot, elle est la nature, mais parvenue au plus haut point de son développement et concentrant toutes ses énergies pour se dépasser en quelque sorte elle-même.

215. (1887) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (deuxième série). IX « Saint-Bonnet » pp. 1-28

Blanc Saint-Bonnet a passé sa vie dans les plus hautes études. […] Joseph de Maistre, qui était avant tout historien, malgré les plus hautes aptitudes à la métaphysique, est entré nettement dans cette question de l’Infaillibilité par la porte des faits et de l’histoire, conduit par un sens pratique de premier ordre, et écartant volontiers tous les arguments qui n’étaient pas historiques avec ce grand geste d’homme d’État qu’il avait, tandis que Saint-Bonnet, au contraire, bien plus métaphysicien que politique, a pénétré dans la même question par l’étude de l’essence même et des principes, allant dans l’essence jusqu’au point où elle est vraiment impénétrable. […] C’est, comme on le voit, toute une métaphysique, introduite, par un esprit d’une intuition supérieure, dans les données éternelles de la théologie chrétienne ; et quoique le livre, fourmillant d’aperçus, contienne bien autre chose que cette métaphysique, elle n’en est pas moins là son mérite le plus éclatant, et qui le classera le plus haut. […] J’ai dit plus haut que cet ouvrage devait faire comprendre la douleur et l’accepter, mais ce n’était pas assez dire. […] Ainsi, on a du talent et plus que du talent ; on écrit un livre de la plus haute et de la plus rare éloquence ; on sème dans ce livre les aperçus et les axiomes ; à chaque mot, c’est, pour le lecteur, une décharge électrique d’idées neuves dans la tête et dans la poitrine ; — et tout cela est inutile !

216. (1894) La bataille littéraire. Septième série (1893) pp. -307

Je ne crois pas que l’analyse passionnelle puisse être poussée à un plus haut point ; jamais, en tout cas, elle n’a atteint cette intensité maladive et troublante. […] Il ne serait pas plus déraisonnable d’exiger d’un élève des écoles primaires la solution d’un problème de hautes mathématiques. […] Dieu te récompensera selon tes œuvres. » « Tes hautes œuvres » eût été plus juste. […] Larroumet y attachait un triple intérêt et par les hautes fonctions qu’il a occupées, et par son titre d’académicien, et par l’ouvrage qui lui a servi de textes. […] Suit un morceau de haut intérêt littéraire, « ce que La Fontaine doit aux autres et notamment au prince duc de Bourgogne ».

217. (1896) Les idées en marche pp. 1-385

C’est leur haute originalité. […] Elle est réservée, contenue, accessible aux seules âmes hautes. […] La chair parle haut dans ces livres. […] Maeterlinck et toutes ses qualités s’y trouvent au plus haut point. […] Le premier laisse parler très haut l’instinct sexuel.

218. (1876) Chroniques parisiennes (1843-1845) « XXXIII » pp. 133-140

Il est de plus en plus rare que cela arrive dans des familles nobles, dans celles où se recrutait autrefois le haut clergé. Les hautes dignités elles-mêmes du clergé ne paraîtraient plus aujourd’hui aux enfants de ces familles nobles, d’ordinaire encore très-religieuses, une considération sociale suffisante et une compensation pour ce qu’ils perdraient. […] Le beau monde, la haute société ont beau se vanter de remplir les églises, les confessionnaux, tant qu’ils ne rempliront pas les cadres de la milice sacerdotale, ils n’ont rien fait, et ils n’y paraissent pas disposés.

219. (1860) Ceci n’est pas un livre « Les arrière-petits-fils. Sotie parisienne — Deuxième tableau » pp. 196-209

(Haut.) […] (Haut.) […] (Haut.)

220. (1898) Essai sur Goethe

Un « état d’âme » qui n’est point aussi exceptionnel ni aussi haut que quelques-uns le croient. […] Je veux te suivre : ma forme blanche, comme un esprit, regardera vers toi du haut de ces murailles. […] Nous vois-tu du haut des cieux, sainte femme qui m’as donné ce trésor à garder ? […] Il dirigeait de haut l’éducation du prince héritier. […] Encore à ce moment-là, les lettres de Schiller à Kœrner ne donnent-elles pas une haute idée de la troupe.

221. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre cinquième. Le peuple. — Chapitre IV »

Nulle part cette inégalité, contre laquelle l’opinion publique se révolte, n’éclate en traits si forts : d’un côté, pour le petit nombre, l’autorité, les honneurs, l’argent, le loisir, la bonne chère, les plaisirs du monde, les comédies de société ; de l’autre, pour le grand nombre, l’assujettissement, l’abjection, la fatigue, l’enrôlement par contrainte ou surprise, nul espoir d’avancement, six sous par jour781, un lit étroit pour deux, du pain de chien, et, depuis quelques années, des coups comme à un chien782 ; d’un côté est la plus haute noblesse, de l’autre est la dernière populace. […] Dans un festin donné par un prince du sang789, la table de cent couverts, dressée sous une tente immense, était servie par les grenadiers, et l’odeur qu’ils répandaient offusqua la délicatesse du prince. « Ces braves gens, dit-il un peu trop haut, sentent diablement le chausson. » Un grenadier répondit brusquement : « C’est parce que nous n’en avons pas », et « un profond silence suivit cette réponse » […] L’ouvrier tailleur est aigri contre le maître tailleur qui l’empêche d’aller en journée chez les bourgeois, les garçons perruquiers contre le maître perruquier qui ne leur permet pas de coiffer en ville, le pâtissier contre le boulanger qui l’empêche de cuire les pâtés des ménagères, le villageois fileur contre les filateurs de la ville qui voudraient briser son métier, les vignerons de campagne contre le bourgeois qui, dans un rayon de sept lieues, voudrait faire arracher leurs vignes792, le village contre le village voisin dont le dégrèvement l’a grevé, le paysan haut taxé contre le paysan taxé bas, la moitié de la paroisse contre ses collecteurs, qui à son détriment ont favorisé l’autre moitié. « La nation, disait tristement Turgot793, est une société composée de différents ordres mal unis, et d’un peuple dont les membres n’ont entre eux que très peu de liens, et où, par conséquent, personne n’est occupé que de son intérêt particulier. […] L’autre, qui suggère et dirige, enveloppe le tout dans les Droits de l’Homme et dans la circulaire de Siéyès. « Depuis deux mois, écrit un commandant du Midi797, les juges inférieurs, les avocats dont toutes les villes et campagnes fourmillent, en vue de se faire élire aux États Généraux, se sont mis après les gens du Tiers-état, sous prétexte de les soutenir et d’éclairer leur ignorance… Ils se sont efforcés de leur persuader qu’aux États Généraux ils seraient les maîtres à eux seuls de régler toutes les affaires du royaume, que le Tiers, en choisissant ses députés parmi les gens de robe, aurait le droit et la force de primer, d’abolir la noblesse, de détruire tous ses droits et privilèges, qu’elle ne serait plus héréditaire, que tous les citoyens, en la méritant, auraient le droit d’y prétendre ; que, si le peuple les députait, ils feraient accorder au Tiers-état tout ce qu’il voudrait, parce que les curés, gens du Tiers, étant convenus de se détacher du haut clergé et de s’unir à eux, la noblesse et le clergé, unis ensemble, ne feraient qu’une voix contre deux du Tiers… Si le Tiers avait choisi de sages bourgeois ou négociants, ils se seraient unis sans difficulté aux deux autres ordres.

222. (1906) Les œuvres et les hommes. À côté de la grande histoire. XXI. « Louis XVI et sa cour »

Il est là, ni plus haut, ni plus bas, ni plus loin. […] II Il ne fallait pas, en effet, chercher plus haut que la personne de ce faible roi le secret du malheur de la monarchie. […] On riait de lui tout haut dans le cercle intime de la reine, et c’était pour cette Vénus le compliment ordinaire que d’appeler le roi son Vulcain. […] Tous ces portraits, les uns éclatants, les autres profonds, dans le détail desquels nous entrerons peut-être un jour, classeront désormais fort à part et fort haut parmi les portraitistes historiques le continuateur de Sismondi.

223. (1909) Les œuvres et les hommes. Critiques diverses. XXVI. « Chamfort »

En attendant les Bâtards célèbres, qu’un ancien journaliste, dit-on, va publier, il est un bâtard qu’on réédite avec beaucoup de soin, c’est Chamfort14, Chamfort, le plus spirituel et le plus malheureux peut-être de tous ces malheureux qui veulent porter aussi haut le vice de leur naissance que si c’était une vertu, et qui ne savent pas s’en faire une ! […] Ceux qui disent le plus haut, avec la soif de la justice ou la sympathie pour l’infortune, que les fautes sont personnelles, ont-ils jamais pénétré dans la conscience de l’homme que les sociétés ont nommé partout du nom expiatoire de bâtard ? […] Reçu par les hautes classes de son temps, comme elles recevaient, ces folles, à la veille de périr, tous ces hommes qui allaient devenir leurs bourreaux, il dut porter jusque parmi elles ces rages de déclassé vexé qu’on retrouve encore dans son livre. […] La tendance à se diviniser — cette tendance d’aujourd’hui — devait éclater en ces lettres d’autant plus haut qu’on eût dû y parler plus bas.

224. (1899) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (troisième série). XVII « Ernest Hello »

il écrit Ève et Marie, le Gâteau des Rois, la Recherche, etc… Je parlais plus haut d’arabesques ; mais Ernest Hello est lui-même une arabesque ! […] … Il a aussi cette dernière beauté… la beauté de la chute… Fait d’inégalités, il va haut et il tombe, — et parfois il se démantibule en tombant, mais il reste un démantibulé sublime. […] Malheureusement (je l’ai dit déjà et c’est la seule critique qu’il y ait à faire dans ces Contes), tout n’y est pas de la même puissance, et j’y retrouve l’inégalité que j’avais indiquée déjà dans les premiers ouvrages de Hello, cette inégalité qui est dans la nature des hommes qui vont très haut, et qui retombent d’autant plus raide et plus bas qu’ils se sont élevés davantage. […] … On ne connaît le néant de certaines femmes que quand on en a pressé beaucoup dans ses bras… Ernest Hello, le religieux, presque le théologique Ernest Hello, devrait avoir, avec son talent, parmi les hommes de son opinion religieuse, une position haute et crénelée, et il n’en a pas, et il s’agite désespérément au milieu des égoïsmes et des platitudes de son parti.

225. (1853) Histoire de la littérature française sous la Restauration. Tome I

Le comte de Maistre ne s’y trompe pas, et Robespierre ne lui impose pas du haut de tant d’échafauds. […] Fiévée avait été sacrifié dans le journalisme ; M. de Fontanes fut sacrifié dans une sphère plus haute et pour la même raison. […] Cette haute vérité est l’âme même de sa doctrine. […] Si nous étions capables de remonter plus haut, nous verrions les choses en elles-mêmes, nous saurions tout. […] Loin d’avoir prêché le cagotisme, il a enseigné les vérités les plus hautes auxquelles puisse s’élever l’intelligence humaine.

226. (1896) Études et portraits littéraires

Entendez par là des abondants, des véhéments, des emportés, des hauts en couleur et aussi des hauts en graisse. […] Les hautes sollicitudes le gagnaient. […] Descotes ajoute peu à ce que nous savons de sa haute distinction morale. […] La pensée est le signe d’une vie plus haute. […] Quelques pas plus loin, un haut personnage russe énumère ses titres sur un granit monumental.

227. (1854) Histoire de la littérature française. Tome I « Livre I — Chapitre deuxième »

D’autres traits de ses mœurs lui sont communs avec les hauts seigneurs de son temps. […] Il vit « plus de deux cents hauts princes », qui presque tous avaient figuré dans les guerres du xive  siècle, ou qui en savaient par ouï-dire des faits d’armes merveilleux. […] Christine de Pisan voulut aller plus haut que Froissart, et n’eut pas la force de s’élever jusqu’à Comines ; elle n’eut donc que de l’ambition. […] Ils perdirent le secret des charmants récits de Froissart, et n’eurent pas la haute raison de Comines. […] On ne peut trop admirer avec quelle haute convenance et quelle force de raison il parle de Charles le Téméraire et des causes de la ruine de la maison de Bourgogne.

228. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Introduction, où l’on traite principalement des sources de cette histoire. »

Il avait soixante-deux ans quand le prophète de Nazareth était au plus haut degré de son activité, et il lui survécut au moins dix années. […] Ajoutons qu’avant la Mischna de Juda le Saint, qui a fait oublier toutes les autres, il y eut des essais de rédaction, dont les commencements remontent peut-être plus haut qu’on ne le suppose communément. […] L’un d’eux mettrait Wagram avant Marengo ; l’autre écrirait sans hésiter que Napoléon chassa des Tuileries le gouvernement de Robespierre ; un troisième omettrait des expéditions de la plus haute importance. Mais une chose résulterait certainement avec un haut degré de vérité de ces naïfs récits, c’est le caractère du héros, l’impression qu’il faisait autour de lui. […] Dans un tel effort pour faire revivre les hautes âmes du passé, une part de divination et de conjecture doit être permise.

229. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « Souvenirs d’un diplomate. La Pologne (1811-1813), par le baron Bignon. (Suite et fin.) »

La fermentation est au plus haut degré, les plus folles espérances sont entretenues et caressées avec enthousiasme ; on se propose l’exemple de l’Espagne, et si la guerre vient à éclater, toutes les contrées situées entre le Rhin et l’Oder seront le foyer d’une vaste et active insurrection… » Il faut lire toute cette lettre dans les Mémoires mêmes où elle est produite39. — M.  […] Bignon, en se tenant à des points de vue moins élevés que M. de Senfft, trébuche de moins haut, ne tergiverse pas et garde sur lui, en ce qui est des jugements personnels posthumes, la supériorité du moins de la modération et du ton. […] On s’étonne, quand on a vu l’abbé de Pradt dans son entier développement, et à travers ses frasques diverses, comment il put être choisi pour une telle mission de haute confiance et d’entière latitude, dans l’esprit de laquelle il n’entra jamais40. […] La main de l’ambassadeur ne devait pas se laisser apercevoir dans ce mouvement national, « mais il devait tout voir, tout savoir, tout diriger, tout animer. » Un archevêque, un haut dignitaire de l’Église avait paru plus fait qu’un autre pour assister et pousser à cette œuvre militante dans un pays catholique, et comme devant aussi, par son caractère, moins prêter qu’un autre à tout conflit. […] Je le vois encore avec sa petite taille, sa tête portée en arrière, son geste pétulant, cette figure dont on a dit « qu’elle ressemblait à celle du péché mortel vieilli. » J’eus beau faire, je n’avais encore rien rabattu en moi, à cette époque, des hauts dégoûts et des dédains superbes de la jeunesse ; on l’entourait, on faisait cercle, on l’appelait Monseigneur à tour de bras : pour moi, je ne pus parvenir à rattacher à la figure du personnage rien qui ressemblât à de la considération et à du respect.

230. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « Mémoires du comte Beugnot »

Tous ces récits étaient fort bien rendus et mimés, d’une voix quelque peu forte et robuste, par un homme de haute stature et en qui un filet de l’ironie paternelle se faisait encore sentir ; mais cette ironie n’était plus la source même et ne venait que par une sorte de transmission et d’habitude : elle était de souvenir plus que d’inspiration et de jet. […] N’oublions jamais, en lisant ces Mémoires, que l’auteur a intérêt à ne pas avoir une trop haute idée de l’humanité. […] Si l’auteur, sous le coup d’un mandat d’arrêt, va se promener au Jardin des Plantes, et s’il monte au labyrinthe, il jette de là un regard sur Paris, « cette magnifique cité que la tyrannie couvrait de son crêpe. » Il nous décrit du haut de ce belvédère toutes ses pensées, ses réflexions mélancoliques, et il prolonge jusqu’au soir « le rêve du sentiment. […] Beugnot dans l’intimité, quand l’homme officiel et le haut administrateur disparaissait, qu’il s’abandonnait à son humeur plaisante, moqueuse, imitatrice, et que, pour mieux peindre les autres, il se plaisait à les copier et à les mettre en action. […] Beugnot, à ce propos, a tracé le plus fin portrait de cet agent d’intrigue et qui était dès longtemps suspect à Napoléon2 ; mais il a beau faire et essayer de nous amuser au détail, il a beau donner un tour plaisant au récit de son voyage à travers la Picardie après qu’il s’est enfui et comme évadé de sa préfecture, il ne réussit pas à pallier le fond : l’acte est là qui parle assez haut : il y a quelque chose dans la conscience qui se refuse à admettre que le ministre d’hier à Düsseldorf, le préfet de Lille, d’une ville frontière, soit passé dès le premier jour, et pendant que Napoléon luttait encore, dans le Gouvernement intermédiaire qui le détrônait.

231. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Pensées de Pascal. Édition nouvelle avec notes et commentaires, par M. E. Havet. » pp. 523-539

Le premier il a introduit dans la défense de la religion cette ardeur, cette angoisse et cette haute mélancolie que d’autres ont portée plus tard dans le scepticisme. […] Bossuet prend la plume, et il expose avec une haute tranquillité les points de doctrine, la double nature de l’homme ; la noble origine, l’excellence et l’immortalité du principe spirituel qui est en lui, et son lien direct avec Dieu. […] Dans son magnifique langage, Bossuet aime à associer, à unir les plus grands noms, et à tisser en quelque sorte la chaîne d’or par laquelle l’entendement humain atteint au plus haut sommet. […] C’est déjà un honneur pour l’homme que d’avoir de tels désespoirs placés en de si hauts objets. […] De tels réservoirs de hautes pensées sont nécessaires pour que l’habitude ne s’en perde point absolument, et que la pratique n’use pas tout l’homme.

232. (1888) Portraits de maîtres

Puissè-je avoir fait aimer en lui le promoteur des plus hautes entreprises, l’avant-coureur immortel, le grand aïeul. […] La haute société fut très favorable aux Méditations. […] L’œuvre à laquelle président de si hautes destinées est à la fois morale et humaine. […] Pour le grand public elles n’ont fait que porter plus haut Sainte-Beuve. […] Elle lui communiqua le goût précoce de la tolérance et le sens du divin dans la plus haute acception de ce mot.

233. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « De la tradition en littérature et dans quel sens il la faut entendre. Leçon d’ouverture à l’École normale » pp. 356-382

Il y eut un jour où la grandeur biblique et la beauté hellénique se rencontrèrent, se fondirent et se mêlèrent d’esprit et de forme dans une haute simplicité ; et quand nous parlons aujourd’hui de la tradition et de ce qui ferait faute, si elle avait manqué, de ce qui serait absent dans les fonds les plus suaves, dans les plus nobles fresques de la mémoire humaine, nous avons le droit de dire, à des titres également incontestables : Quoi ? […] Non, la tradition nous le dit, et la conscience de notre propre nature civilisée nous le dit encore plus haut, la raison toujours doit présider et préside en définitive, même entre ces favoris et ces élus de l’imagination ; ou si elle ne préside pas constamment et si elle laisse par accès courir la verve, elle n’est jamais loin, elle est à côté qui sourit, attendant l’heure prochaine et l’instant de revenir. […] Mais il revient, mais il s’assoit, mais il sait le point de vue d’où l’univers contemplé apparaît dans son plus beau jour ; et lui-même, toutes les fois que nous voulons nous représenter l’esprit critique à son plus haut degré d’intelligence et de compréhension réfléchie, nous nous le figurons spectateur attentif et vigilant, curieux au loin, à l’affût de toute découverte, de tout ce qui se passe, de toute voile à l’horizon, mais du haut d’un Sunium. […] Voilà les avantages, voilà le bien ; mais les inconvénients aussi de ces nouveaux procédés, à une époque où il y a trop peu de haute critique surveillante et judicieuse, n’ont pas tardé à se produire, et, si je ne m’abuse, ils nous crèvent de toutes parts les yeux. […] Et, en cela, je suis averti d’être circonspect, quand je me rappelle combien les plus grands des esprits, les plus fermes et les plus hautes intelligences dans les différents ordres (Laplace, Lagrange, Napoléon), sont sobres d’éloges, mais aussi comme ils les font tomber juste sur la partie principale d’un mérite ou d’un talent ; et alors, il suffit d’un mot pour le marquer à jamais.

234. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Lamennais — L'abbé de Lamennais en 1832 »

de vastes et hautes intelligences se souiller : l’amour des places, de l’or, de la table, des sens, les saisit ou se prolonge en elles. […] Au dehors ce fut surtout de l’étonnement ; on n’admettait pas qu’un prêtre parlât sur ce ton aux puissances et qu’il se posât plus haut qu’elles avec cette audace d’aveu. […] Plus enfant, m’a-t-on dit, à Saint-Malo, dans sa petite chambre haute (contraste charmant de goûts qui le peint d’avance), il avait aimé à faire de la dentelle. […] L’auteur s’y place sans concessions, et aussi haut que possible, au point de vue unique de l’autorité et de la foi : c’était en effet par où il fallait ouvrir la restauration catholique. […] D’autres le feront ; l’Orient pour cela, l’époque pélasgique et le haut paganisme sont à mieux connaître.

235. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « M. VINET. » pp. 1-32

Jusqu’au milieu du xviiie  siècle, la connaissance, le goût, l’imitation des chefs-d’œuvre et du style des grands écrivains classiques furent d’extrême mode dans la haute société de Lausanne. […] Léonard n’est pas le Racan du dix-huitième siècle ; la belle pièce de la Retraite maintient à une haute distance la mémoire de Racan. […] S’il fallait chercher quelque représentant de la poésie du pays de Vaud, de cette poésie que Rousseau a vue dans les lieux, et qu’il a contestée aux habitants ; que quelques-uns, que plusieurs nourrissent pourtant avec culte ; il faudrait se tourner à côté, vers cette jeunesse de Lausanne qui s’essaye encore, feuilleter ce recueil des Deux Voix dans lequel je puis désigner la pièce du Sapin, entre autres, comme franche impression des hautes cimes ; s’adresser à la conversation de quelques hommes, comme M. le pasteur Manuel, qui se sont plus dirigés à l’étude qu’à la production, et qui, pieux et modérés, savent et sentent, en face de leur lac et de leurs montagnes, toute vraie poésie depuis les chœurs de Sophocle jusqu’aux pages de Mme de Staël23. […] Vinet, dans la littérature française, émane surtout de Pascal, sa haute admiration, son grand modèle. […] Il a publié en 1841 un volume de Nouveaux Discours religieux ; ses nombreux articles littéraires dans le Semeur ont appris à nos écrivains célèbres qu’ils avaient là-bas un juge de haute pensée, le plus attentif, le plus bienveillant, mais dont l’indulgence elle-même trouve, quand il le faut, ses limites.

236. (1911) La valeur de la science « Première partie : Les sciences mathématiques — Chapitre IV. L’espace et ses trois dimensions. »

On peut rejeter l’hypothèse simple que j’avais faite plus haut et admettre que ces deux impressions, qualitativement différentes, me sont transmises par deux fibres nerveuses différentes quoique contiguës. […] J’ai envisagé plus haut deux séries de sensations musculaires S et S′ et j’ai dit qu’il arrive quelquefois qu’on est conduit à envisager deux pareilles séries S et S′ comme inverses l’une de l’autre parce que nous avons souvent observé que quand ces deux séries se succèdent nos impressions primitives sont rétablies. […] Convenons, comme je l’ai fait, de ne pas considérer comme distinctes les deux séries Σ et Σ + S + S′ lorsque les deux séries S et S′ seront inverses l’une de l’autre au sens donné plus haut à ce mot ; malgré cette convention, l’ensemble des séries Σ distinctes formera encore un continu physique et le nombre des dimensions sera moindre mais encore très grand. […] J’ai dit plus haut qu’il arrive souvent que les séries σ n’altèrent pas les impressions tactiles éprouvées par notre premier doigt ; j’ai dit souvent, je n’ai pas dit toujours ; c’est ce que nous exprimons dans notre langage habituel en disant que l’impression tactile ne serait pas altérée si le doigt n’a pas bougé, à la condition que l’objet A qui était au contact de ce doigt n’ait pas bougé non plus. […] Quand donc, plus haut, nous parlions de la série S ou de la série Σ, nous aurions dû dire, non que c’étaient des séries de sensations musculaires seulement, mais que c’étaient des séries à la fois de sensations musculaires et de sensations dues aux canaux semi-circulaires.

237. (1890) L’avenir de la science « XXII » pp. 441-461

C’est une manière de prendre sa revanche, et aussi de faire croire qu’il est initié aux hauts secrets. […] Mais la plaisanterie, en matière scientifique, est toujours fausse ; car elle est l’exclusion de la haute critique. […] Soit, par exemple, le XVIIIe siècle ; qui a tenu la haute main de l’humanité durant ce grand siècle ? […] La plus haute question de la politique est celle-ci : Qui sera ministre ? […] Banni des hautes régions de la pensée, déshérité de l’idéal, il passe sa vie à des labeurs ingrats et sans fruit, soucis d’administration, complications bureaucratiques, mines et contre-mines d’intrigues.

238. (1889) Le théâtre contemporain. Émile Augier, Alexandre Dumas fils « Émile Augier — Chapitre Premier »

La haute Antiquité connaissait déjà ces étranges maladies de l’âme. Elles apparaissent, dès les premiers âges, dans le haut Orient, et, littéralement, elles y règnent, car ce sont des rois qui en sont atteints. […] Sa plaisanterie est de haute graisse, son impudence est haute en couleur, il rend en lazzi plaisants le vin qu’il avale. […] Elle a épousé un gentilhomme riche et de haute naissance, elle est une grande dame par le nom qu’elle a conquis, les portes du monde se sont ouvertes à deux battants devant elle. […] Ce poignard de fer blanc, levé sur une tête si haute, luit faux et n’effraye pas.

239. (1917) Les diverses familles spirituelles de la France « Chapitre vi »

Le capitaine Robert Gauthiot était dans le civil directeur d’études adjoint à l’École des hautes études. Germanisant de haute valeur, il avait beaucoup élargi son champ d’études, jusqu’à devenir un des meilleurs linguistes de l’école de Meillet, et, au moment de la déclaration de guerre, il se trouvait au Pamir, occupé à déchiffrer des textes sogdiens, pareils à ceux que M.  […] Alfred Sala-belle pensait pour un grand nombre d’eux, quand il disait le mot que nous citions plus haut : « Nous sommes à une période où l’on peut s’instruire. » ‌ Eh bien ! […] Elles ont été suffisantes, avec ce qui nous restait de haute culture et de foi religieuse, pour suppléer, dans ces heures de grande crise, à la discipline qui nous faisait défaut.‌ […] Voudrons-nous nous imposer les efforts nécessaires pour conserver et accroître les trésors spirituels et moraux amassés pendant des siècles, éviter toute surprise et marcher avec sécurité vers nos hautes destinées ?‌

240. (1864) Cours familier de littérature. XVIII « CVe entretien. Aristote. Traduction complète par M. Barthélemy Saint-Hilaire (3e partie) » pp. 193-271

La Physique en deux volumes, souvent mêlée de métaphysique transcendante, tient plus à la haute philosophie. […] La métaphysique, loin d’être le bégayement de l’intelligence humaine, en est au contraire la parole la plus nette et la plus haute. […] Aristote, en effet, est un esprit juste (mérite immense) ; mais ce n’est pas un esprit haut. […] Aspirer à monter toujours plus haut, et enfin jusqu’à Dieu, c’est la loi la plus pieuse de notre nature. […] Elle va plus haut ; et la raison se manquerait à elle-même, si elle s’arrêtait à moitié chemin.

241. (1887) Journal des Goncourt. Tome II (1862-1865) « Année 1864 » pp. 173-235

Ce monde va à un jeune efflanqué, que trois femmes en haillons tiennent et battent avec des gifles qui cassent, sur sa tête, son chapeau de haute forme. […] De légères boucles de cheveux blonds, semées sur le haut du front, des yeux aux ombres profondes, au blanc bleuâtre, à la prunelle veloutée ; des yeux enfoncés et doucement lumineux entre la paupière du haut, vaguement éclairée comme d’une lueur de veilleuse, d’un reflet d’alcôve, et le dessous de l’œil tout enveloppé de nuit : des yeux qui semblent les yeux du Soir. […] Il y a dans ce moment-ci un curieux type de filles de la haute volée, se faisant une clientèle de petits hommes, encore au collège, se préparant ainsi, chez les enfants de parents riches, de futurs entreteneurs. […] Elle porte rebroussés et relevés très haut, des cheveux bouffants et pommadés qu’on sent gros, et qui lui donnent l’air de ces femmes coloriées dans de petits cadres peints couleur d’or, et qu’on gagne aux macarons. […] C’est Mlle D… la fille du peintre… Toutes les têtes de femmes sont à demi masquées par un petit voile de dentelle noire, étroit comme un loup, et finissant au sourire qu’il semble chatouiller, en laissant le haut du visage dans une pénombre mystérieuse.

242. (1889) Écrivains francisés. Dickens, Heine, Tourguénef, Poe, Dostoïewski, Tolstoï « Le Comte Léon Tolstoï »

Il décrit l’influence du séjour d’un beau cavalier dans le château des Bolkonsky sur la sœur recluse, laide et pure du prince André, ou l’émoi profond dans lequel la présence de cet homme à bonnes fortunes jette Natacha fiancée, mais délaissée et tendue à se briser dans l’impuissant désir de son fiancé absent ; le romancier marque la bizarre jouissance de Nicolas Rostow, ruiné au jeu, rentrant dans le salon de sa famille et entendant sa sœur chanter une note particulièrement claire ; toujours est révélée la merveilleuse faculté de l’âme humaine à se prêter aux formes que lui imposent les variations de son ambiance ; en de plus hautes conjonctures, c’est le prince André, dangereusement blessé à Austerlitz, et qui, tombant, distingue de son regard distrait des férocités humaines la profondeur de l’inaltérable ciel bleu, développant sa silencieuse voûte au-dessus du fracas fumeux de la canonnade dans la haute paix de l’infini ; c’est le prince Pierre résolu à assassiner. […] Si haut qu’il dresse ses figures, que leur conduite soit significative et enseignante, que l’on considère même le prince Pierre Lévine, le soldat Karataïef, dans lesquels se marque le mieux le biais moralisateur de l’écrivain, toujours les personnages restent des personnes ayant en eux une essence constante irréductible à autrui, composite et originale. […] Frustes de masse, lâchées à tout le développement d’une exorbitante faculté créatrice, ces pages sans affabulation ont le plus haut sujet qui soit, la condensation, la présentation, l’illustration d’un large ensemble de ces faits de vie sur lesquels en définitive se concentrent les espoirs, les amours, les craintes et les haines. […] Les œuvres de Tolstoï tendent à représenter une société entière ; ils en embrassent et le contenu moyen et les extrêmes de conditions, d’événements, de caractères, de scènes, d’âge ; ils la reproduisent non de haut, de loin, vaguement, par synthèses et abstractions, mais de près, par des descriptions où le lecteur se sent comme mis face à face avec la réalité, par des personnages étrangement vivants et individuels. […] L’accomplissement de cette tâche est un grand fait et l’effort qu’il suppose suscite peu à peu, chez le lecteur admis à suivre cette haute entreprise, le sentiment de tension spirituelle, les élans et les arrêts, les joies et les défaillances que l’auteur put éprouver.

243. (1925) Proses datées

Assis au coin de la cheminée, dans un fauteuil à haut dossier, il était là. […] De haute naissance, de haute mine et de haute culture, il y avait en lui du dandy et du roué, de l’excentrique et du mystificateur, du raffiné et du dilettante. […] Sur ce cou reposait une tète solide, au front haut, aux yeux d’aigle. […] En voici un qui se prélasse entre deux fleurs d’or plus hautes que lui. […] A voix haute, l’iman lisait dans un livre.

244. (1864) Corneille, Shakespeare et Goethe : étude sur l’influence anglo-germanique en France au XIXe siècle pp. -311

Le caractère de Néron dans Britannicus est une création supérieurement comprise et d’une haute portée historique. […] De là des hauts et des bas continuels, des alternatives de beau temps et d’orage qui transportent ou abattent l’âme humaine. […] Ceux-ci au lieu de chercher leur voie dans la route moyenne avaient une plus haute ambition. […] Du haut de son autel il le regardait tournoyer dans l’abîme et se contentait de prier pour lui. […] Réaliste dès le début, au milieu des plus hauts élancements lyriques, V. 

245. (1891) La bataille littéraire. Quatrième série (1887-1888) pp. 1-398

  Je disais plus haut qu’il fallait soumettre les pièces de conviction aux yeux du public. […] Il vit la silhouette noire de Dallas flageolant sur ses hautes jambes. […] Mais il n’eut pas le temps de s’en attrister, pris par la bousculade à deux mouvements qui agitait l’église vers le haut et vers la sortie. […] Le dîner touche à sa fin, sans une fleur froissée aux bordures odorantes des surtouts et des couverts, sans une parole plus haute, un geste plus animé. […] Pour étonner sa portière, il s’amusait, paraît-il, à l’appeler du haut de l’escalier et se cachait sous son lit, afin d’être cherché.

246. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre III. L’âge classique. — Chapitre III. La Révolution. »

La haute société valait un peu moins que la basse. […] À Everton, dit un témoin oculaire, « quelques-uns gémissaient, d’autres hurlaient tout haut. […] La haute spéculation, qui seule peut en tenir lieu, s’est montrée ou déclarée impuissante. […] En somme, il s’interdit les hautes questions et se trouve fort porté à nous les interdire. […] milords, ces énormités crient et appellent tout haut réparation et punition !

247. (1923) Critique et conférences (Œuvres posthumes II)

Rimbaud eut le tort incontestable de protester d’abord entre haut et bas contre la prolongation d’à la fin abusives récitations. […] — les douze vers rapportés plus haut : « Chose étonnante, et bien honorable, du reste, pour le talent, qu’il ait eu cette fois le sort heureux de l’insignifiance, si chère aux quarante immortels ?  […] Sur Victor Hugo, je l’ai dit plus haut, il était intarissable. […] Certes la Maison du bonheur, rêve de perfection bien doux et bien haut, une entrevue à Solesme, bien douce et bien haute encore anecdote catholique, et les Amants de Tolède ou le sublime auteur d’Akédysseril se concentre si bien ! […] Les six vers cités plus haut sont de Baudelaire, faut-il le rappeler aux lecteurs de cette revue ?

248. (1860) Cours familier de littérature. X « LIXe entretien. La littérature diplomatique. Le prince de Talleyrand. — État actuel de l’Europe » pp. 289-399

Ce vice de conformation l’avait seul empêché d’entrer dans la carrière des armes, à laquelle sa haute naissance l’appelait. […] Né d’une race qui avait été souveraine d’une province de France avant l’unité du royaume, et qui maintenant décorait la royauté, M. de Talleyrand avait été jeté dans l’Église, comme un rebut indigne de la cour, pour y attendre les plus hautes dignités de l’épiscopat et du cardinalat. […] Lié avec tous les philosophes, ami de Mirabeau, pressentant de près une révolution dont les premières secousses feraient écrouler la religion dont il était le prélat, il étudiait la politique, qui allait appeler toutes les hautes intelligences à détruire et à réédifier les empires. […] Il avait brûlé ses vaisseaux en passant de l’ancien au nouveau régime ; mais il voulait faire apprécier bien haut ses services seulement par le parti législatif de la révolution. […] J’assistai, par respect pour la haute intelligence humaine, à sa sépulture.

249. (1886) Revue wagnérienne. Tome I « Paris, 8 octobre 1885. »

Peut-on recourir à une autorité plus haute ? […] Combien plus hautes et sérieuses, et utiles, les recommandations morales, dans le moins coûteux de nos Manuels Civiques ! […] Il dit : pour détruire en vous toute douleur, renoncez la foi en l’existence individuelle, mettez plus haut le bonheur. […] Le haut est empli par une eau agitée qui, incessamment, de droite à gauche, coule. […] … Il demeure en une muette fureur ; lorsque, soudain, son regard est attiré vers le haut.

250. (1828) Introduction à l’histoire de la philosophie

C’est une victoire sur la vie vulgaire plus haute encore que celle de l’industrie, de l’État et de l’art. […] Parvenue là, sans doute l’humanité est arrivée bien haut : mais a-t-elle atteint sa borne infranchissable ? […] et ces idées générales, est-il impossible de les élever à un plus haut degré de généralité encore ? […] Incontestablement la plus haute antiquité est là. […] Je ne veux pas oublier parmi les mérites de Herder celui d’avoir accordé la plus haute importance au théâtre de l’histoire.

251. (1861) Cours familier de littérature. XII « LXXIIe entretien. Critique de l’Histoire des Girondins (3e partie) » pp. 369-430

L’aristocratie et le clergé détruits, ce parti ne répugnait pas au trône ; il avait à un haut degré l’instinct de l’unité du pouvoir. […] Il ne montait à la tribune que pour les voir de plus haut ; plus tard il ne vit qu’elles du haut de l’échafaud, et il s’élança dans l’avenir, jeune, beau, immortel dans la mémoire de la France, avec tout son enthousiasme et quelques taches déjà lavées dans son généreux sang. […] Chaque cause y était personnifiée par ce qu’un parti avait de plus haut ou de plus tranché. […] Quand on est placé si haut, on craint tout ébranlement, car on n’a qu’à perdre ou qu’à tomber. […] « Demander à un roi de détruire l’empire d’une religion qui le sacre, de dépouiller de ses richesses un clergé qui les possède au même titre divin auquel lui-même possède le royaume, d’abaisser une aristocratie qui est le degré élevé de son trône, de bouleverser des hiérarchies sociales dont il est le couronnement, de saper des lois dont il est la plus haute, ce serait demander aux voûtes d’un édifice d’en saper le fondement.

252. (1866) Cours familier de littérature. XXII « CXXVIIe entretien. Fior d’Aliza (suite) » pp. 5-64

— Je vous le disais bien, reprit-elle, en se retournant avec un air de contentement vers son fiancé et vers ses vieux et jeunes parents qui regardaient tout émus du haut du char. […] — Monte, mon garçon, dit le fiancé en me soulevant dans ses bras forts et en me tendant à son père, qui m’attira du haut du timon et qui me fit passer par-dessus les ridelles. […] C’était bientôt vu, monsieur ; en cinq pas, on faisait le tour de cette chambre haute, il n’y avait qu’une voûte de pierre blanchie à la chaux comme les murailles, un lit bien propre, une cruche de cuivre pleine d’eau claire et une chaise de bois, où le porte-clefs jetait sa veste et son trousseau de clefs, en se couchant. […] Et qu’est-ce que c’était donc que ce bruit sinistre, me direz-vous, qui montait si haut jusqu’à ton oreille à travers la lucarne de la tour ? […] ma tante, de quoi me servait-il d’avoir découvert où il était et de lui avoir envoyé, du haut d’une tour, une voix de famille de notre montagne, si je n’avais aucun moyen de l’approcher, de le consoler, de le justifier, de le sauver des sbires ses ennemis, sans doute acharnés à sa mort ?

253. (1889) Le théâtre contemporain. Émile Augier, Alexandre Dumas fils « Émile Augier — CHAPITRE VI »

Elle le trompe, de son consentement, pour les besoins de la caisse, avec un certain Cantenac, habitué de hautes maisons de banque, qui lui prédit les cours de la Bourse. […] Si la marquise aimait d’Estrigaud, on concevrait qu’il lui jouât cette scène de haute comédie : l’amour voit trouble et ne raisonne pas. […] Elle peut en sortir le front haut et le voile levé. […] Un si haut talent repousse, comme une injure, la louange banale et l’approbation non sincère. […] Toute cette scène, indignée et fière, fait un bruit de soufflets tombant de haut sur des faces courbées.

254. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « Ernest Feydeau » pp. 106-143

Fille de l’individualisme, qui a tout envahi, et de ces mauvaises mœurs, que la Comédie corrige en riant, disent les niais qui aiment le spectacle, la littérature de ce temps, — et il ne faut pas biaiser avec une chose si grave, — a fait une haute position à l’adultère dans l’imagination publique. […] c’est cette haute position de l’adultère dans l’imagination publique que M.  […] Ces gens-là ne tombent pas de haut ! […] Ils sont les exécuteurs des hautes œuvres de l’autorité légitime et méconnue. […] Son haut protecteur, M. 

255. (1917) Les diverses familles spirituelles de la France « Chapitre vii »

Le général du corps d’armée, voyant du haut de Notre-Dame-de-Lorette le coup de main réussir si pleinement, pleura, m’a raconté son officier d’ordonnance, qui vint m’apporter l’assurance que j’étais chevalier de la Légion d’honneur. […] Je m’en voudrais de m’en faire orgueil et je me contente de porter cette croix la tête haute, sachant qu’elle n’est pas un fruit d’injustice. […] Il multiplia ses visites à tous les lieux chers de son enfance. « La veille du départ, un dîner d’adieu fut donné sur son désir dans la campagne du Haut de Chaumont, et il voulut s’asseoir sous la charmille en terrasse qu’il aimait, de manière à voir la ville. […] C’est d’abord une première lettre où il expose la haute idée qu’il se fait de sa vocation d’écrivain :‌ La seule pensée qui m’encourage dans mon labeur solitaire et souvent découragé, c’est l’espérance de servir. […] Ils avaient souffert, à leur insu peut-être, d’aspirer si haut, d’obéir à des impulsions si nobles, et de passer leurs années d’adolescence en des luttes avec la police.

256. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Sully, ses Économies royales ou Mémoires. — I. » pp. 134-154

Et au moment de la chute ou de la retraite contrainte, il dit encore : « La disgrâce de cet homme était plainte de peu de personnes à cause de sa gloire (de son orgueil). » Chose singulière, l’homme le plus éloigné à tous égards de L’Estoile, le cardinal de Richelieu, en ses Mémoires, parlant de Sully et de sa chute qui fut toute personnelle, dit à peu près la même chose : On a vu peu de grands hommes déchoir du haut degré de la fortune sans tirer après eux beaucoup de gens ; mais, la chute de ce colosse n’ayant été suivie d’aucune autre, je ne puis que je ne remarque la différence qu’il y a entre ceux qui possèdent les cœurs des hommes par un procédé obligeant et leur mérite, et ceux qui les contraignent par leur autorité. J’aime à croire que si Richelieu avait poursuivi ses Mémoires jusqu’à l’année de la mort de Sully, laquelle ne précéda que de peu la sienne, il aurait trouvé d’autres paroles pour rendre justice à un si méritant prédécesseur, et que la pensée morale et humaine exprimée par lui, et qui redouble de valeur sous sa plume, n’aurait pas étouffé les autres considérations d’équitable et haute louange que le nom de Sully rappelle. […] Le père du jeune Rosny l’appela un jour qu’il avait onze ans dans la chambre de la haute tour, et là, en présence du seul La Durandière, son précepteur, il lui dit : Maximilian, puisque la coutume ne me permet pas de vous faire le principal héritier de mes biens, je veux en récompense essayer de vous enrichir de vertus, et par le moyen d’icelles, comme l’on m’a prédit, j’espère que vous serez un jour quelque chose. […] Il a entendu parler d’une autre personne plus convenable tant pour sa beauté modeste que pour sa vertu et haute extraction ; c’est Anne de Courtenay, fille de M. de Bontin : c’est cette dernière que la raison désigne à Rosny, et, même en telle matière qui a pour fin le mariage, il se rappelle cette maxime : « que celui qui veut acquérir de la gloire et de l’honneur, doit tâcher à dominer ses plaisirs et ne souffrir jamais qu’ils le dominent ». […] Quand on ouvre, au Cabinet des estampes, le cahier où sont les portraits de Sully et de sa femme, on y voit le Sully tel qu’il nous a été transmis par la gravure et qu’il est fixé dans la mémoire, c’est-à-dire vieux, le front haut et chauve, la figure sillonnée et rude, l’air fâché, avec barbe longue et moustache grise, le tout encadré dans cette fraise bien roide que nous savons, et son écharpe sur l’armure.

257. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « William Cowper, ou de la poésie domestique (I, II et III) — III » pp. 178-197

Cowper, au sortir de la rase campagne, entre donc dans ces hautes avenues et y trouve la fraîcheur et l’ombre : Où donc est maintenant le soleil dévorant ? […] Ces hautes avenues, ces grands ormes, et l’atome de loin qui luit dans le soleil ! […] Collins a une ode pleine d’imagination et de haute fantaisie adressée Au soir : Cowper, dans le passage suivant, rappelle Collins avec moins de lyrisme et quelque chose de plus arrangé, de plus familier, mais avec une touche d’imagination non moins vive : Viens encore une fois, ô Soir, saison de paix, reviens, doux Soir et continue longtemps. […] Combien touchante est la musique de ces cloches de village qui, par intervalles, vient frapper l’oreille en douces cadences, tantôt mourant au loin, tantôt reprenant avec force et toujours plus haut, claire et sonore, selon que le vent arrive ! […] Il y a un autre endroit où Cowper, sans le nommer, me paraît avoir évidemment pensé à Rousseau : c’est dans La Tâche, au chant cinquième, lorsqu’il s’agit de combattre les raisonnements de l’épicurien endurci qui s’abandonne ouvertement aux appétits naturels, aux liens de la chair, et qui jouit tout haut de son sommeil de mort : Hâte toi maintenant, philosophe, et délivre-le, si tu le peux, de sa chaîne.

258. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Catinat (suite.). Guerre des Barbets. — Horreurs. — Iniquités. — Impuissance. »

Trente ans auparavant, d’atroces exécutions, des massacres connus sous le nom de Pâques piémontaises (1655) n’avaient amené d’autre résultat qu’une vaste effusion de sang, un cri d’horreur dans toute l’Europe protestante, des réclamations énergiques, et la haute intervention de Cromwell, dont le bras protecteur s’étendit jusqu’à ceux qu’on immolait. […] Le signal se donna le lundi de Pâques 29 avril, par trois coups de canon tirés au petit point du jour du haut de la colline de Briqueras. […] On envoya à la découverte trois hommes dévoués, déguisés en marchands, pour explorer le pays, les hautes crêtes et les cols des Alpes, et savoir ce qui était possible. […] Bref, le résultat désiré fut obtenu et le miraculeux retour s’accomplit ; après une marche des plus aventurées et des plus périlleuses le long des hautes frontières, le petit troupeau Vaudois conduit par Arnaud était rentré et avait repris pied dans ses vallées dès le 1er septembre. […] La haute bourgeoisie était fière du général sorti de son sein.

259. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « QUELQUES VÉRITÉS SUR LA SITUATION EN LITTÉRATURE. » pp. 415-441

Ce ne peut pas être, ce semble, pour un tel avortement, pour un tel jeu d’actions et de réactions sans cause suffisante, pour de tels engouements successifs et contraires, que tant d’efforts, tant d’essais distingués, tant d’idées enfin ont été dépensées depuis plus de cinquante ans, et que, sans remonter plus haut, les hommes consciencieux et laborieux ont semé une foule de germes aux saisons dernières de la Restauration, en ces années de combat et de culture. […] Boileau ne put être tout Boileau que du jour où Louis XIV dit tout haut en plein Versailles : « M. […] L’habileté, d’abord, et la haute prudence ont dû être employées aux choses urgentes ; quand on travaille à la pompe durant l’orage, on songe peu à ce qui semble uniquement le jeu des passagers. […] Il faut une main, un œil vigilant et haut placé. […] La solitude, la réflexion, le silence, et un juge clairvoyant et bienveillant dans une haute sphère, un de ces juges investis par la société ou la naissance, qui aident un peu par avance à la lettre de la postérité, et, qui au lieu d’attendre l’écho de l’opinion courante, la préviennent et y donnent le ton, ce sont là de ces bonheurs qui sont accordés à peu d’époques, et dont aucune (sans qu’on puisse trop en faire reproche à personne) n’a été, il faut en convenir, plus déshéritée que celle-ci.

260. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Deuxième partie. Ce qui peut être objet d’étude scientifique dans une œuvre littéraire — Chapitre VIII. La question de gout ce qui reste en dehors de la science » pp. 84-103

Il lui suffit de savoir distinguer, dans le champ de blé qui ondule sous ses regards, les épis les plus pleins, les plus dorés, les plus hauts. […] Nous avons montré plus haut qu’il ne peut leur accorder une foi absolue ; mais cette moitié de vérité réclame une contre-partie. […] Nous revenons à la double analyse dont nous avons parlé plus haut, l’analyse interne et l’analyse externe. […] Nous pouvons dire déjà que toute œuvre qui a réussi à atteindre un haut degré dans l’un ou l’autre de ces cinq ordres de beauté mérite par cela seul de ne pas rester confondue dans la foule. […] De même qu’il y a des sentiments plus ou moins nobles, des pensées plus ou moins hautes, etc., de même aussi les cinq ordres de beauté, si on les range comme je l’ai fait, me paraissent figurer une échelle ascendante.

261. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Montesquieu. — II. (Fin.) » pp. 63-82

Montesquieu s’avance d’un pied ferme, par une suite de réflexions serrées et vives, et dont l’ensemble a l’air grand ; il a le trait prompt, court, et qui porte haut. […] Le public voit les choses plus dans leur ensemble, et quand il y a un souffle supérieur et une haute empreinte dans une œuvre, il suppose à l’auteur de la raison sur tous les points, et il se prête à l’impulsion qu’il en reçoit. […] J’ai dit le défaut radical que je crois à la politique de Montesquieu : il met la moyenne de l’humanité, considérée dans ses données naturelles, un peu plus haut qu’elle n’est. […] L’Esprit des lois est un livre qui n’a plus guère d’autre usage que ce noble usage perpétuel de porter l’esprit dans la haute sphère historique et de faire naître une foule de belles discussions. […] Il disait un jour à Suard jeune et à d’autres qui l’écoutaient : « Je suis fini, moi ; j’ai brûlé toutes mes cartouches ; toutes mes bougies sont éteintes. » — Il écrivait vers le même temps cette pensée d’une mélancolie haute et sereine : J’avais conçu le dessein de donner plus d’étendue et de profondeur à quelques endroits de mon Esprit, j’en suis devenu incapable ; mes lectures m’ont affaibli les yeux, et il me semble que ce qui me reste encore de lumière n’est que l’aurore du jour où ils se fermeront pour jamais.

262. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre VII. Mme de Gasparin »

Vous y trouvez bien quelques Sapho qui y jettent un ou deux cris qu’on entend toujours, quelques âmes divines comme sainte Thérèse, qui a fait, elle, son saut de Leucade dans le ciel, mais le talent littéraire, dans son expression la plus haute, est bien plus que des émotions éloquentes, que de sublimes palpitations. […] La pensée de l’écrivain et son inspiration sont plus haut qu’elles. […] Et ce sujet-là est très haut. Plus haut que jamais à cette heure où nous vivons bas, les mains, le cœur, le front, occupés et plongés dans les plus viles poussières. […] Mais, je le dis bien plus haut après la lecture de ces Horizons célestes où l’amour déborde et submerge tout, la femme, la religieuse femme qui a écrit ceci, qu’a-t-elle qui la sépare de nous ?

263. (1885) Les œuvres et les hommes. Les critiques, ou les juges jugés. VI. « Rivarol » pp. 245-272

Il avait les facultés les plus hautes, les plus profondes et les plus variées. […] À l’éloquence de Rousseau, devenue patricienne sous sa plume, de bourgeoise de Genève qu’elle est sous la plume de Rousseau, il joint une faculté de métaphysique qui, s’il l’eût prise à partie et développée l’eût mis bien autrement haut que Condillac. […] Il avait le même mal que cette autre ennuyée, la marquise du Deffand, de cette femme, charmante aussi, que le monde fais ait mourir d’ennui pour sa peine de l’avoir aimé, de l’avoir diverti, et d’avoir mis à son service un esprit fait pour monter plus haut ! […] Jamais impersonnalité plus détachée et plus haute, jamais sang-froid plus saisissant et plus tuant ne sont tombés d’une plume, depuis Tacite ! […] En ce temps-là, les séminaires versaient dans la plus haute société française une corne d’abondance d’esprits distingués et supérieurs.

264. (1887) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (deuxième série). IX « Ernest Hello » pp. 207-235

Mais il l’est pourtant des hommes attentifs aux événements intellectuels et qui ont l’œil à tout… Pour eux, peut-être il devait planer un jour dans ces hautes sphères de vérité où il pénètre quelquefois, mais par percées ; car l’esprit de Hello procédait comme certains oiseaux qui percent la nue et la traversent, comme s’ils voulaient monter plus haut et percer le ciel. […] De cela seul qu’il est plus chrétien qu’eux, l’auteur de l’Homme est, d’emblée, et par le fond même des choses, supérieur à ces trois moralistes au cœur sec, qui regardent la société du haut de leur moi, et qui n’en ont guères peint que les surfaces. […] … Je ne dis pas les raisonnables. — Et, parmi les critiques de fonction, qui, moi excepté, s’occupera de ce livre d’histoire religieuse, trop haut, diront-ils, du côté des chimères, pour que personne prenne la peine de s’élever jusque-là ? […] Je disais plus haut qu’il était resté dans ce livre sur ses bases humaines. […] Hello s’est élevé parce que son sujet le portait plus haut, comme l’aile gonflée d’un cygne s’enlève plus aisément dans un éther plus pur… Les Saints étant au-dessus de l’homme, Hello a été au-dessus de ce qu’il est dans l’Homme, avec les mêmes qualités, et, disons-le, les mêmes défauts.

265. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre XXVIII. Caractère essentiel de l’œuvre de Jésus. »

Son parfait idéalisme est la plus haute règle de la vie détachée et vertueuse. […] Plaçons donc au plus haut sommet de la grandeur humaine la personne de Jésus. […] Personne plus que moi n’est disposé à placer haut ce peuple unique, dont le don particulier semble avoir été de contenir dans son sein les extrêmes du bien et du mal. […] Jésus est la plus haute de ces colonnes qui montrent à l’homme d’où il vient et où il doit tendre.

266. (1902) L’humanisme. Figaro

Ils ont eu une très haute idée de la poésie ; ils ont suscité une utile réaction contre les arrière-romantiques, trop exclamatifs, et les sous-parnassiens, trop prosaïques. […] Vous y ferez l’impossible, vous les catéchiserez et elles se croiront convaincues ; seulement, lorsqu’elles se seront jetées, se mentant à elles-mêmes, dans votre réalisme, dans votre humanisme, comme un désespéré se jette du haut d’un pont dans le flot noir qui tourbillonne à ses pieds, l’instinct de la conservation, le besoin de survie reprendra le dessus et vous verrez vos néophytes nager vigoureusement vers ces rives inconnues que vous prétendiez leur interdire. […] L’administration des affaires humaines, quand on l’exerce de très haut et qu’on y apporte un esprit dégagé de toute routine égoïste, est apparemment une excellente préparation à la philosophie humaniste et à l’étude rationnelle des mœurs contemporaines. Longtemps associé, par de hautes fonctions, au protectorat de la Tunisie, adjoint ensuite au gouvernement général de Madagascar, M. 

267. (1889) L’art au point de vue sociologique « Chapitre troisième. De la sympathie et de la sociabilité dans la critique. »

Parfois on voit mieux une belle statue, un beau tableau, une scène d’art en fermant les yeux et en fixant l’image intérieure, et c’est à la puissance de susciter en nous cette vue intérieure qu’on peut le mieux juger les œuvres d’art les plus hautes. […] Un philosophe contemporain a affirmé que la plus haute tâche de l’historien, en philosophie, était de concilier et non de réfuter ; que la critique des erreurs était la besogne la plus ingrate, la moins utile et devait être réduite au nécessaire ; que pour tout penseur sincère et conséquent le philosophe doit éprouver une universelle sympathie, bien opposée d’ailleurs à l’indifférence sceptique ; que dans l’appréciation des systèmes le philosophe doit apporter « ces deux grandes vertus morales : justice et fraternité40 ». […] Le livre écrit, si imparfait qu’il soit, est encore une des expressions les plus hautes de « l’éternel vouloir-vivre », et à ce titre il est toujours respectable. […] C’est un but beaucoup plus élevé ; on peut sans doute tomber plus lourdement encore en cherchant à y atteindre, mais on ne peut pas donner cette raison de ne pas poursuivre un but, qu’il est trop haut.

268. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre premier. Mme de Staël »

Pas de doute, pourtant, que cette femme, aux relations immenses, et plus Européenne encore que Française, qui touchait aux plus hautes sociétés de son temps et dont l’esprit, tout le temps qu’elle vécut, ressembla à l’urne penchée et bouillonnante d’un fleuve, n’ait laissé derrière elle d’autres lettres que celles qui ont donné sa goutte de vie à ce maigre livre de Weymar et Coppet, mort-né, sans ces lettres ! […] mais en métaphysique et dans la critique littéraire, elle manque de principes arrêtés, du haut desquels on regarde les choses ; elle ne sait juger définitivement ni les œuvres, ni les systèmes. […] Ce n’est pas Mme Sand qui nous aurait fait accepter, avec ce talent qui est une magie, tous les écrivains de l’Allemagne sur le pied des plus hautes puissances intellectuelles, et nous les eût fait avaler, à nous autres railleurs français, pomme des hosties consacrées, alors que la plupart d’entre eux n’étaient guère que des pains à cacheter ! […] Le sien, à Mme Sand, est plus épais, plus bourgeois, plus prosaïque, et si la passion l’a soulevé parfois, ce n’a été ni bien haut ni bien longtemps… ni surtout bien droit !

269. (1906) Les œuvres et les hommes. À côté de la grande histoire. XXI. « L’ancien Régime et la Révolution »

Et quand nous citons ces noms célèbres, nous les prenons au poids circulant de leur gloire, car pour nous ils ne valent, ni comme publicistes ni comme historiens, le haut prix de leur renommée. […] Pas une seule fois dans ce volume, maigre de raisons et enflé, ou plutôt soufflé de phrases, l’auteur de l’ancien Régime et la Révolution n’a su porter un ferme regard plus haut que le plain-pied des questions dernières. Car c’est toujours de haut que les révolutions descendent, et les gouvernements se trahissent longtemps eux-mêmes avant d’être trahis par les peuples. […] Quand on lit ce livre, qui ne monte pas plus haut que le dépit et que l’aigreur, l’hostilité est évidente.

270. (1885) Les œuvres et les hommes. Les critiques, ou les juges jugés. VI. « M. Ernest Hello » pp. 389-403

Et leur successeur à distance, par l’inspiration et par l’enthousiasme ; cet Ernest Hello qui me fait l’effet d’un Saint Siméon Stylite au xixe  siècle, par l’isolement et par la hauteur, a beau le savoir, il ne prend pas, lui, si haut qu’il soit, son parti de cette accablante destinée. […] La faim et la soif sont les symboles du Désir, et le Désir est le précurseur de la Justice… Quiconque a le Désir en lui, a la Justice devant lui, comme le pain de sa faim et le vin de sa soif. » Et, quelques lignes plus bas, il ajoute encore : « J’ai voulu élever la Critique assez haut pour qu’elle pût cesser d’être une irritation. » Tels l’esprit, l’essence, l’unité organique (comme dit M.  […] cela seul, cette visée, fût-elle chimérique, d’élever la Critique assez haut pour qu’elle cesse d’être une irritation et, comme dit encore le mystique écrivain dans sa langue mystique, pour que l’œuvre du Désir et de la Justice conduise à la Paix, cette visée inattendue établit d’emblée une différence des plus tranchées, — une différence absolue entre l’auteur des Plateaux de la balance et les autres critiques et moralistes connus. […] Il est plus métaphysicien, plus théologien, plus creusé, plus à fond, d’idées générales plus hautes, plus arrêtées et plus fermes que le brillant auteur des Caractères.

271. (1880) Goethe et Diderot « Note : entretiens de Goethe et d’Eckermann Traduits par M. J.-N. Charles »

Mais j’admettais très largement qu’il avait de hautes facultés critiques et qu’il savait pénétrer profondément dans la pensée, la vie et les hommes. […] Du haut de cette immobilité empyréenne, il se jugeait, lui, ses ouvrages, le monde de l’art, de la science, de la politique ; il jugeait tout : il était critique. […] Gœthe prétendait à l’encyclopédisme, et il avait certainement une grande abondance de notions avec sa double aptitude scientifique et littéraire ; mais il n’avait — il faut bien le dire, malgré les préjugés contemporains, — ni l’originalité réelle, ni la profondeur, ni même l’acuité qui surprend par ce qu’elle a vu… J’ai fait mes citations plus haut. […] Il n’y a pas jusqu’à sa radicale indifférence à tout ce qui n’était pas son moi de dieu qu’on n’ait prise pour du stoïcisme recouvrant les plus hautes douleurs.

272. (1893) Les œuvres et les hommes. Littérature épistolaire. XIII « Alexandre de Humboldt »

Les deux à trois jugements plus ou moins durs et comme tout le monde en prononce dans sa vie, les deux à trois jugements qu’on trouve en ces lettres intimes, n’ont fait les blessures qui ont crié que parce qu’ils venaient de Humboldt ; que parce qu’ils tombaient de très haut ! Il n’y a guère plus haut, en effet, dans l’opinion actuelle du monde, et quand j’écris « actuelle », je sais ce que j’écris : je ne veux pas engager l’avenir. […] « Le but véritable de mon livre — ajoute encore Humboldt — est de voir de haut l’ensemble de la science contemporaine », c’est-à-dire que ce n’est pas une idée ou un système d’idées, mais simplement un tableau. Seulement, en supposant que l’ensemble, pour être bien vu, n’y soit pas regardé de trop haut et par cela même y devienne vague, en supposant qu’on puisse être tout à la fois exact et poétique, la grandeur et la beauté de l’exactitude ne sont pas un si étonnant tour de force quand il s’agit de la Nature, qui a cela de particulièrement tout-puissant que ceux qui disent faux en en parlant sont encore poétiques, et qu’elle communique de sa grandeur jusqu’à ceux-là qui mentent sur elle !

273. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « XXIV. Alexandre de Humboldt »

Les deux à trois jugements plus ou moins durs et comme tout le monde en prononce dans sa vie, les deux à trois jugements qu’on trouve en ces lettres intimes n’ont fait les blessures qui ont crié, que parce qu’ils venaient de Humboldt ; que parce qu’ils tombaient de très haut ! Il n’y a guère plus haut, en effet, dans l’opinion actuelle du monde, et quand j’écris « actuelle » je sais ce que j’écris, je ne veux pas engager l’avenir. […] « Le but véritable de mon livre, ajoute encore Humboldt, est de voir de haut l’ensemble de la science contemporaine », c’est-à-dire que ce n’est pas une idée ou un système d’idées, mais simplement un tableau. Seulement, en supposant que l’ensemble, pour être bien vu, n’y soit pas regardé de trop haut, et par cela même y devienne vague, en supposant qu’on puisse être tout à la fois exact et poétique, la grandeur et la beauté de l’exactitude ne sont pas un si étonnant tour de force, quand il s’agit de la Nature, qui a cela de particulièrement tout-puissant, que ceux qui disent faux, en en parlant, sont encore poétiques, et qu’elle communique de sa grandeur jusqu’à ceux-là qui mentent sur elle !

274. (1899) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (troisième série). XVII « E. Caro »

Caro est un exercice éblouissant de révérences qui m’impatienterait, si je ne savais pas que son auteur est bien assez spirituel pour imaginer cette amusante manière de rendre ridicule un homme, qui consiste à le saluer trop… Sans cela, sans cette petite intention de politesse meurtrière, j’oserais dire que l’urbanité — l’urbanité à outrance — est le vice de ce livre, si brillant de clarté, où des hospitalités de roi sont faites à des faquins d’idées, et où l’auteur, l’ironique auteur, coiffe ces sots de bonnets d’âne, hauts de dix pieds, qui ressemblent à des mitres à longues oreilles, enrichies de diamants pour qu’on les voie mieux. […] Son volume n’est que le premier d’un ouvrage qui en aura deux et qui a l’ambition d’être l’Idée de Dieu conçue et exprimée par l’auteur à son tour, quand il aura achevé le balaiement des sottises et des absurdités de haute venue qui, de présent, encombrent la place. […] Excepté Vera, seul hégélien franc du collier que je connaisse, qui prend bravement Hegel et son système et qui avale le tout, — ce qui n’est pas facile, — les autres philosophes du temps ont de l’Hegel plus ou moins dans l’estomac ou dans la veine ; ils l’éructent ou le suent plus ou moins ; mais ils ne sont jamais du pur Hegel, et même ils ne voudraient pas l’être, l’orgueil anarchique des esprits étant monté si haut que personne bientôt ne voudra plus être le disciple de personne, et qu’un homme à qui vous direz qu’il est d’une École se regardera comme insulté. […] Avec cette charité et cette politesse qui drapent de si haut les coups… que l’on porte si bas, nous sommes plus libres, nous, les brutaux, de jeter à la porte, à notre manière, les réputations et les idées qui n’avaient pas le droit d’entrer !

275. (1889) Les œuvres et les hommes. Les poètes (deuxième série). XI « Agrippa d’Aubigné »

Ces Tragiques n’avaient même été révélés au public auparavant que par des vers pris çà et là dans ces vigoureuses satires, et l’effet n’en remonte guères plus haut qu’à ce fameux portrait de Henri III, maintenant cité partout, et que M.  […] Assurément, il n’est pas douteux qu’il y a ici, comme nous venons de le dire très haut, un fort poète, de facultés considérables, — mais d’une puissance qui n’est allée cependant nulle part jusqu’à ce quelque chose de pur et d’absolu qu’on appelle en poésie un chef-d’œuvre. […] Agrippa d’Aubigné est un Corneille de la première heure, un Corneille incorrect, fougueux et confus, mais enfin il a l’honneur d’avoir fondé ce haut lignage. […] Que ton esprit, ô mon Dieu, Esprit d’union m’unisse, Et tout entier me ravisse De si bas en si haut lieu.

276. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « Honoré de Balzac » pp. 1-15

Ajoutez à cela les mille angoisses que connut Balzac, le plomb des exigences de librairie, les tyrannies des marchands érigés en Mécènes, les Fourches Caudines sous lesquelles sont obligés de passer les plus fiers écrivains, l’inspiration que l’on chasse et la commande que l’on fait, les instincts bas dont les colporteurs de littérature risquent le plaidoyer, l’argent à la main, pour tenter la faim qui doit prêter l’oreille, malgré le proverbe, enfin la levée de boucliers des esprits sans lumière et sans vie contre les réfractaires qui s’obstinent à vouloir être ce qu’ils sont, et dites-vous si le massacre n’est pas organisé, — de haute lice et de nécessité, — et s’il n’est pas besoin d’une force intellectuelle redoutable pour ne pas périr au moins dans quelques parties de son âme et de son talent ? […] Poitou dépense-t-il tout son temps et tout son effort à chicaner stérilement les détails qui se heurtent, à ce qu’il semble, quand on les voit pièce à pièce, et qui se fondent et s’harmonisent, quand on les regarde de loin et de haut. […] Voilà le critique, exécuteur de ses hautes œuvres littéraires, qu’elle a chargé de décapiter, à froid et après la mort, un grand homme d’esprit qu’elle n’aurait pas touché vivant. […] Pour ce qui est de la haute moralité que la Revue des Deux-Mondes invoque dans l’écrit de M. 

277. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Troisième partie. Beaux-arts et littérature. — Livre quatrième. Éloquence. — Chapitre V. Que l’incrédulité est la principale cause de la décadence du goût et du génie. »

Car, il n’est plus temps de le dissimuler, les écrivains de notre âge ont été en général placés trop haut. […] Pour garder aussi bien les convenances, pour n’être jamais ni trop haut ni trop bas, il faut avoir soi-même beaucoup de mesure dans l’esprit et dans la conduite. […] De petits hommes inconnus se promènent comme des pygmées sous les hauts portiques des monuments d’un autre âge.

278. (1900) Taine et Renan. Pages perdues recueillies et commentées par Victor Giraud « Renan — III »

D’un jeune provincial infiniment estimable et aimable par sa gravité et son sens de la haute moralité, mais, ces qualités-là, il devait les témoigner peu après, avec une force lyrique et une exaltation tout à fait supérieures, dans un volumineux essai sur l’Avenir de la Science, qui dispense des préliminaires qu’on nous communique aujourd’hui.‌ […] Dès qu’il vit combien cette haute indépendance serait difficile à constituer, il chercha sa solution par ailleurs. […] Examinez d’un peu haut ces deux façons de comprendre la vie !

279. (1859) Cours familier de littérature. VIII « XLIVe entretien. Examen critique de l’Histoire de l’Empire, par M. Thiers » pp. 81-176

Personne, selon nous, ne les possède de notre temps à un plus haut degré que M.  […] Il y a là des scènes de haut comique qui donnent au lecteur la comédie de l’ambition sur une scène encore trempée de sang. […] Thiers le défaut contraire à celui que nous lui reprochions plus haut, c’est-à-dire de rapetisser les impressions. […] Malheureusement Desaix était absent ; il achevait la conquête de la haute Égypte, où il livrait de beaux combats et administrait avec une grande sagesse. […] Pitt les posséda au plus haut degré.

280. (1861) Cours familier de littérature. XII « LXXe entretien. Critique de l’Histoire des Girondins » pp. 185-304

Malgré mon respect pour son rang et malgré mon appréciation très haute de son esprit politique, cette attitude ambidextre m’inspirait plus d’éloignement que d’attrait pour ce prince. […] Je consultai l’oracle des hautes pensées et des hautes convenances, M.  […] Ces coalisés faisaient leurs conditions tout haut à la tribune. […] Molé, homme rompu aux crises de gouvernement, avait par son nom, par sa fortune, par sa haute élégance personnelle, plus de décorum monarchique que de dévouement aux trois monarchies qu’il avait servies dans sa jeunesse. […] « Agréez, Monsieur, pour vous et pour elle, l’expression de ma reconnaissance et celle de ma haute considération.

281. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — C — Chênedollé, Charles-Julien Lioult de (1769-1833) »

Vos vers sont hauts comme les cèdres du Liban. […] Chênedollé est, en général, très correct ; il est toujours harmonieux et s’élève fort souvent aux plus hautes formes poétiques ; c’en est assez pour faire concevoir que c’est un poème didactique recommandable (Le Génie de l’homme) ; il faut avouer aussi qu’il participe au malheur de presque tous les poèmes didactiques modernes : il est extrêmement pénible à lire de suite.

282. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — G — Ghéon, Henri (1875-1944) »

L’ambition est haute et périlleuse. […] Sully Prudhomme échoua, malgré la haute noblesse de son esprit, dans une tentative semblable.

283. (1761) Salon de 1761 « Peinture —  Dumont le Romain  » pp. 115-116

Dumont le Romain 14 pieds de large, sur 10 de haut. […] comme elle est, libre de la tête, des bras et de tout le haut de son corps, si elle s’avisait de se secouer avec violence, elle renverserait le monarque, et mettrait les dieux, les échevins et le peuple en désordre.

284. (1761) Salon de 1761 « Peinture —  Roslin  » pp. 149-150

Il est de 14 pieds de large sur 10 de haut. […] Il faut voir la platitude de nos petits pourpoints, de nos hautes chausses qui prennent la cuisse de juste, de nos sachets à cheveux, de nos manches et de nos boutonnières et le ridicule de ces énormes perruques magistrales, et l’ignoble de ces larges faces bourgeoises.

285. (1863) Cours familier de littérature. XVI « XCIVe entretien. Alfred de Vigny (1re partie) » pp. 225-319

Il voit, sur les Hébreux étend sa grande main, Puis vers le haut du mont il reprend son chemin. […] Le temps présent lui importait peu ; il visait longtemps et très haut. […] Et du plus haut des monts un grand rocher roula. […] franc capitaine de haut bord, vous dormiez la nuit, vous, et le jour vous vous battiez ! […] Le Quaker, du haut de l’escalier.

286. (1899) Préfaces. — Les poètes contemporains. — Discours sur Victor Hugo pp. 215-309

Il voit du premier coup d’œil plus loin, plus haut, plus profondément que tous, parce qu’il contemple l’idéal à travers la beauté visible, et qu’il le concentre et l’enchâsse dans l’expression propre, précise, unique. […] Mes réserves, d’ailleurs, n’exerceront point d’influence sur les nombreux admirateurs de ces inspirations incomplètes, mais presque toujours hautes et pures. […] Le succès moins retentissant des Harmonies explique leur plus haute valeur d’art. […] Que de vers superbes, spacieux, animés d’un mâle sentiment de nature et se ruant à l’assaut des hautes périodes ! […] Jamais Victor Hugo n’avait fait entendre sur la scène de plus majestueuses et de plus hautes paroles.

287. (1856) Cours familier de littérature. II « Xe entretien » pp. 217-327

Mes trois amis à peu près également chers étaient alors trois jeunes adolescents de la plus délicate race d’esprit et de la plus haute nature d’âme. […] Le mien, à moi, c’était Tacite, la haute politique et la haute morale dans la haute poésie de l’action et du style. […] De ce Rubens de style je n’ai jamais moi-même estimé très haut que la palette. […] Cette seconde image d’une des plus hautes personnifications de l’esprit humain sous la forme d’une femme m’inspira un second respect pour la fécondité de mon siècle. […] » m’écriai-je tout haut, sans songer aux paysans qui se collaient au rocher à côté de moi.

288. (1888) Épidémie naturaliste ; suivi de : Émile Zola et la science : discours prononcé au profit d’une société pour l’enseignement en 1880 pp. 4-93

Dans les hautes sphères, on cria à l’immoralité. […] Sur ce chapitre, plus encore que sur tous les autres, l’auteur le prend de haut comme un cosmographe embrassant l’univers d’un œil d’aigle. […] A notre époque, la science tient le haut du pavé et c’est justice. […] Zola l’a pris de haut. […] Elle veut l’extension de la vie dans les manifestations les plus hautes.

289. (1889) Derniers essais de critique et d’histoire

La fortune leur a été prodigue, et leur cœur était aussi haut que leur fortune. […] Un à un, accrochés aux rocs, ils lèvent haut dans l’azur leur panache de verdure pôle. […] Les plus hautes figures poétiques, comme les plus hautes formes vivantes, n’arrivent à la lumière que par grâce, et, pour ainsi dire, par accident. […] Avec tant d’acquis et des facultés si belles, il eût pu prendre dans l’histoire et dans l’art une place à la fois très grande et très haute ; il n’a pris qu’une place moyenne dans l’histoire, et une place haute, mais étroite, dans l’art. […] Sur un col long et délicat, un ovale qui va s’élargissant vers le haut, une lèvre supérieure très haute, une arcade sourcilière encore plus haute, un vaste front bombé, vaguement bosselé, et comme comblé de pensées mystiques ; les yeux regardent sans voir.

290. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — L — Leygues, Georges (1857-1933) »

Pareils à des oiseaux délivrés, vos beaux vers, Emporteront, au vol de leurs rythmes ouverts, Plus haut, toujours plus haut, la chanson du poète ! 

291. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — D. — article » pp. 179-181

« Une taille trop haute est, dit-il, une difformité dans un Orateur. […] Selon ses judicieuses remarques, le front haut marque la paresse ; le petit, la légéreté ; le rond, la colere.

292. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Seconde partie. Poétique du Christianisme. — Livre quatrième. Du Merveilleux, ou de la Poésie dans ses rapports avec les êtres surnaturels. — Chapitre VIII. Des Anges. »

Non seulement les messagers du Très Haut portent ses décrets d’un bout de l’univers à l’autre ; non seulement ils sont les invisibles gardiens des hommes, ou prennent, pour se manifester à eux, les formes les plus aimables ; mais encore la religion nous permet d’attacher des anges protecteurs à la belle nature, ainsi qu’aux sentiments vertueux. […] Chez les Grecs, le ciel finissait au sommet de l’Olympe, et leurs dieux ne s’élevaient pas plus haut que les vapeurs de la terre.

293. (1761) Salon de 1761 « Peinture —  Challe  » pp. 141-142

Le Socrate est de 8 pieds de large, sur 6 pieds, 6 pouces de haut. […] De 5 pieds 10 pouces de haut, sur 5 pieds de largeur.

294. (1864) Cours familier de littérature. XVIII « CVIIe entretien. Balzac et ses œuvres (2e partie) » pp. 353-431

Les imbéciles se plaignent de cette minutie apparente de descriptions, les hommes de haute et profonde intelligence l’admirent. […] Ces principes de mélancolie existent dans la physionomie d’un logis situé à Saumur, au bout de la rue montueuse qui mène au château, par le haut de la ville. […] La grande Nanon, ainsi nommée à cause de sa taille haute de cinq pieds huit pouces, appartenait à Grandet depuis trente-cinq ans. […] Enfin les huit marches qui régnaient au fond de la cour et menaient à la porte du jardin étaient disjointes et ensevelies sous de hautes plantes comme le tombeau d’un chevalier enterré par sa veuve au temps des croisades. […] On ne peut pas le louer plus haut, ce mot suffirait pour sa gloire.

295. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « L’abbé de Marolles ou le curieux — I » pp. 107-125

En ces années, il nous tient très au courant de ses sorties et de tout ce qu’il y voit : carrousels, festins, comédies, ballets ; il a, au plus haut degré, la mémoire des yeux. […] On aurait tort de se faire de la philosophie de Marolles une trop haute idée. […] Marolles, à quelques moments, eut des velléités d’ambition plus haute, et il fut question pour lui de quitter son abbaye, peu de temps après l’avoir obtenue, et de « traiter » (c’est le terme qu’il emploie) soit pour l’archevêché d’Aix, soit pour l’évêché de Luçon. […] Une conversation qu’il eut, en 1632, avec l’abbé de Saint-Cyran, ce chrétien austère, ne contribua pas peu à le remettre à la raison : sous air de l’exhorter à aller en avant dans la carrière ecclésiastique, M. de Saint-Cyran lui fit une telle description du péril où se jettent ceux qui recherchent une si haute élévation sans connaître les perfections et les grands devoirs que Dieu leur impose, qu’il le consterna et le guérit, comme on guérit un malade avec une douche froide : « Au lieu d’accroître mon souci pour cela, il aida merveilleusement à me faire perdre le peu de désir qui m’en pouvait rester, dont je lui aurai une éternelle obligation. » Marolles se contenta désormais d’être le plus paisible et le plus oiseusement occupé des abbés de France, dont il sera le doyen un jour. […] Aimer d’un haut amour platonique comme Dante et Michel-Ange n’appartient qu’à une âme forte ; aimer comme Pétrarque sa Laure est d’une âme encore adorable et charmante.

296. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « Halévy, secrétaire perpétuel. »

Je comprends que la place qu’il occupe, si belle qu’elle soit, aurait pu être plus haute encore si les choses s’y étaient prêtées, si les grands cadres s’étaient ouverts pour lui plus souvent. […] Il traite son sujet et ne l’élude pas ; il introduit la discussion dans le récit : le sentiment du haut style est toujours présent comme une image du dieu d’Olympie. […] si l’on est d’un art particulier, tout en restant le confrère et l’ami des artistes, savoir s’élever cependant peu à peu jusqu’à devenir un juge ; si l’on a commencé, au contraire, par être un théoricien pur, un critique, un esthéticien, comme ils disent là-bas, de l’autre côté du Rhin, et si l’on n’est l’homme d’aucun art en particulier, arriver pourtant à comprendre tous les arts dont on est devenu l’organe, non-seulement dans leur lien et leur ensemble, mais de près, un à un, les toucher, les manier jusque dans leurs procédés et leurs moyens, les pratiquer même, en amateur du moins, tellement qu’on semble ensuite par l’intelligence et la sympathie un vrai confrère ; en un mot, conquérir l’autorité sur ses égaux, si l’on a commencé par être confrère et camarade ; ou bien justifier cette autorité, si l’on vient de loin, en montrant bientôt dans le juge un connaisseur initié et familier ; — tout en restant l’homme de la tradition et des grands principes posés dans les œuvres premières des maîtres immortels, tenir compte des changements de mœurs et d’habitudes sociales qui influent profondément sur les formes de l’art lui-même ; unir l’élévation et la souplesse ; avoir en soi la haute mesure et le type toujours présent du grand et du beau, sans prétendre l’immobiliser ; graduer la bienveillance dans l’éloge ; ne pas surfaire, ne jamais laisser indécise la portée vraie et la juste limite des talents ; ne pas seulement écouter et suivre son Académie, la devancer quelquefois (ceci est plus délicat, mais les artistes arrivés aux honneurs académiques et au sommet de leurs vœux, tout occupés qu’ils sont d’ailleurs, et penchés tout le long du jour sur leur toile ou autour de leur marbre, ont besoin parfois d’être avertis) ; être donc l’un des premiers à sentir venir l’air du dehors ; deviner l’innovation féconde, celle qui sera demain le fait avoué et’reconnu ; ne pas chercher à lui complaire avant le temps et avant l’épreuve, mais se bien garder, du haut du pupitre, de lui lancer annuellement l’anathème ; ne pas adorer l’antique jusqu’à repousser le moderne ; admettre ce dernier dans toutes ses variétés, si elles ont leur raison d’être et leur motif légitime ; se tenir dans un rapport continuel avec le vivant, qui monte, s’agite et se renouvelle sans cesse en regard des augustes, mais un peu froides images ; et sans faire fléchir le haut style ni abaisser les colonnes du temple, savoir reconnaître, goûter, nommer au besoin en public tout ce qui est dans le vestibule ou sur les degrés, les genres même et les hommes que l’Académie n’adoptera peut-être jamais pour siens, mais qu’elle n’a pas le droit d’ignorer et qu’elle peut même encourager utilement ou surveiller au dehors ; enfin, si l’on part invariablement des grands dieux, de Phidias et d’Apelle et de Beethoven, ne jamais s’arrêter et s’enchaîner à ce qui y ressemble le moins, qui est le faux noble et le convenu, et savoir atteindre, s’il le faut, sans croire descendre, jusqu’aux genres et aux talents les plus légers et les plus contemporains, pourvu qu’ils soient vrais et qu’un souffle sincère les anime.

297. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « La comtesse d’Albany par M. Saint-René Taillandier. »

Il nous faut, pour la bien connaître, remonter assez haut dans le XVIIIe siècle. […] Sa haute taille et son air un peu Don Quichotte devaient en faire une caricature. […] La comtesse descend avec Mme Orlandini, et, prenant les devants, elles furent bientôt au haut de l’escalier, firent vite ouvrir la porte et la refermèrent avant que le comte pût être monté. […] Voilà la lèvre vermeille, l’œil noir, le sein qui triomphe du lis, les règles chéries de toutes mes hautes pensées. […] Certes, cet homme de haut talent et, jusqu’à un certain point, de génie, de noble aspect et « d’une figure avantageuse » (ainsi en parlent ceux qui l’ont vu et qui ne songeaient point à faire, comme aujourd’hui, des caricatures à tout propos) ; cet homme à l’âme ardente, élevée, d’un esprit libre, d’un caractère indépendant et fier, qui n’avait pu se plier à la vie de Turin, et qui n’hésita pas, en renonçant à son pays, à sacrifier les deux tiers de sa fortune pour se mieux dévouer à l’objet de son culte ; le poète qui, dans la Dédicace de Myrrha, s’étonnant d’avoir tant tardé à nommer publiquement celle qui l’inspire, lui disait : « Ma vie ne compte que depuis le jour qu’elle s’est enlacée à ta vie » ; un pareil homme méritait que la comtesse d’Albany, déçue et frappée dans sa destinée, crût elle-même s’honorer par un tel choix, et ne pas perdre, même aux yeux du monde, en échangeant royauté contre royauté.

298. (1872) Nouveaux lundis. Tome XIII « Le général Jomini. [I] »

Le bon sens et l’humanité parlent trop haut et par trop de bouches pour ne pas être entendus. […] La raison, après tout, en est simple : la haute critique, en quelque genre que ce soit, ne précède pas les chefs-d’œuvre de l’art ; elle les suit. […] Pendant ces travaux où il faisait preuve d’habileté pratique et de connaissance des détails, il avait l’œil aux grands événements qui se déroulaient et qu’il considérait de haut et d’ensemble comme d’un belvédère, ou mieux encore comme du centre d’une fournaise ; car la Suisse, en ces années d’occupation et de déchirement, devenue un champ de bataille dans toute sa partie orientale, offrait «  l’aspect d’une mer enflammée. » Jomini y suivit de près les fluctuations de la lutte, les habiles manœuvres de Masséna pendant les sept mois d’activité de cette campagne couronnée par la victoire de Zurich, les efforts combinés de ses dignes compagnons d’armes, les Dessolle, les Soult, les Loison, les Lecourbe : ce dernier surtout « qui avait porté l’art de la guerre de montagne à un degré de perfection qu’on n’avait point atteint avant lui. » Mais, s’il estimait à leur valeur les opérations militaires, il ne jugeait pas moins les fautes politiques, et ce qu’il y avait de souverainement malhabile et coupable au Directoire à avoir voulu forcer la nature des choses, à avoir prétendu imposer par décret une unité factice à treize républiques fédérées, à s’être aliéné une nation amie, à avoir fait d’un pays neutre, et voué par sa configuration à la neutralité, une place d’armes, une base d’opérations agressives, une grande route ouverte aux invasions. […] Thiers qui, dans son premier ouvrage, a marché sur ses traces, et qui a plus d’une fois parlé de lui, dans son Histoire de l’Empire, avec considération et haute estime. […] Il y était démontré qu’en général les plans primitifs de Frédéric pour l’entrée en campagne étaient infiniment inférieurs aux plans accidentels qui lui étaient inspirés dans le cours même de la campagne par la tournure des événements ; qu’il était plutôt l’homme des expédients et des ressources que de la conception grandiose première, plutôt le héros de la nécessité et du bon sens que celui de l’imagination hardie et du haut calcul.

299. (1920) La mêlée symboliste. II. 1890-1900 « Oscar Wilde à Paris » pp. 125-145

On y rencontrait encore cet extraordinaire Meyerson, polyglotte et omniscient, dernière incarnation de Pic de la Mirandole, toujours prêt à discuter de toutes choses connues et quibusdam aliis et aussi ce pauvre et malchanceux Frédéric Corbier, mathématicien et philologue, qui se grisait de bruit et de paroles en société, mais qui retombait, dès qu’il était seul, à un découragement si noir qu’il finira, une nuit d’hiver, par se jeter du haut du pont d’Arcole, dans la Seine charrieuse de glaçons. […] N’oublions pas le musicien Dubreuilh qui préconisait une restauration de la musique française dont la Dame blanche était, à son avis, l’un des plus hauts points d’expression. […] C’était Catulle Mendès., Il parlait haut, d’un verbe cathédrant. […] Oscar Wilde, encore qu’il se défendît d’obéir aux préjugés, subissait à son insu cette hostilité héréditaire et s’il avait retrouvé, à Londres, cette même rigueur puritaine, cette même obstination hypocrite du cant (on sait que les Irlandais se font gloire d’un haut renom de chasteté) dont sa libre et sensuelle nature avait à souffrir, il se sentait doublement incité à s’en affranchir par instinct et par désir de faire pièce à une race détestée. […] Sans doute, cette préoccupation de Brummel qui lui était dictée par les circonstances, s’était déjà manifestée antérieurement chez de hauts esprits, aux mêmes heures troubles, car les mêmes causes produisent les mêmes effets.

300. (1904) Les œuvres et les hommes. Romanciers d’hier et d’avant-hier. XIX « Gustave Droz » pp. 189-211

Il faut que la Critique se tienne ferme ici… Parce que l’auteur, à la plume leste, de Monsieur et de Madame, devient père et qu’il se purifie au seul souffle de son enfant, il ne change pas de nature pour cela, et, je l’ai dit plus haut, sa nature est épicurienne. […] Mais, justement, Gustave Droz passe tout le temps que dure son livre à se moquer de ce qui pourrait changer sa nature et élever à sa plus haute puissance son sentiment paternel. […] J’ai dit déjà plus haut que le prêtre dont il a fait la figure capitale et centrale de son roman avait cette originalité de rester prêtre, au milieu des turbulences et des craquements de l’homme que la passion secoue. […] Très élégante, très spirituelle, mais très extravagante, ayant déjà les taches de la corruption parisienne sur l’esprit au moins, si elle ne les a pas sur le cœur, possédant au plus haut degré le génie de l’ironie et de la plaisanterie parisiennes, aveugle sur son père qu’elle admire d’enfance et de confiance, parce qu’il a toujours été heureux dans ses plans et qu’il est fou d’elle, madame de Manteigney est la femme amoureuse de son mari, maigre, mièvre, mal fait, chétif, jaunâtre, roussâtre, un crevé du temps, qui lui mange sa dot et ses diamants avec des filles. […] Exemple encore : toutes les figures secondaires de cette œuvre, où la Comédie, malgré le Drame, est en dominance, et entre autres cette excellente tête du baron Claudius, cette figure si moderne, qui fait de la haute politique en s’occupant d’assiettes cassées et parle de transformations sociales en cherchant de vieux pots… C’est vraiment parfait ; nous l’avons tous rencontré, ce fantoche.

301. (1890) Journal des Goncourt. Tome IV (1870-1871) « Année 1870 » pp. 3-176

» et au haut du fronton, un homme enlève au drapeau tricolore son bleu et son blanc, et ne laisse flotter que le rouge. […] ……………………………………………………………………………………………………… Je repasse cette nuit le long des Tuileries, et je retrouve le spectacle de la journée, baigné de la laiteuse clarté d’une lune, levée au haut de la rue de Rivoli, et qu’écorne la haute cheminée du pavillon de Flore. […] Elle est en cheveux, les cheveux tignonnés en couronne ou plutôt en moule de pâtisserie, au haut de la tête. […] Un garde national lance, du haut de son cheval, aux groupes : « Une demi-lieue en avant de Chennevières, et à la baïonnette maintenant !  […] Des hauts, et des bas d’espérance qui vous tuent.

302. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [1] Rapport pp. -218

Combien d’âmes hautes, bonnes, saines, quelques-unes tristes hélas ! […] Celle-ci est le fait des esprits vraiment hauts. […] les purs, les vastes, les hauts, les lumineux poèmes ! […] — une œuvre haute, forte, belle et rayonnante, qui ne s’éteindra jamais. […] Vous me direz que je ne l’entends pas parce qu’il est trop haut.

303. (1767) Salon de 1767 « Peintures — Bellengé » p. 204

11 pieds et demi de haut, sur 3 pieds 8 pouces de large. […] Il y a du même artiste sur un buffet de marbre à droite un vase de bronze beau, élégant et bien peint ; autour de ce case, de gros raisins noirs et blancs, et d’autres fruits ; le sep auquel ces raisins sont encore attachés descend du haut d’un vase de terre cuite à large panse ; il y a autour de ce second vase des pêches et des fruits.

304. (1827) Principes de la philosophie de l’histoire (trad. Michelet) « Principes de la philosophie de l’histoire — Livre quatrième. Du cours que suit l’histoire des nations — Chapitre II. Trois espèces de langues et de caractères » pp. 296-298

Lorsque l’esprit humain s’habitua à abstraire les formes et les propriétés des sujets, ces universaux poétiques, ces genres créés par l’imagination (generi fantastici), firent place à ceux que la raison créa (generi intelligibili), c’est alors que vinrent les philosophes ; et plus tard encore, les auteurs de la nouvelle comédie, dont l’époque est pour la Grèce celle de la plus haute civilisation, prirent des philosophes l’idée de ces derniers genres et les personnifièrent dans leurs comédies. […] Ainsi comme nous l’avons dit plus haut, la phrase héroïque, le sang me bout dans le cœur, fut résumée dans la langue vulgaire par ce mot abstrait et général, je suis en colère.

305. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre IV. L’âge moderne. — Chapitre I. Les idées et les œuvres. » pp. 234-333

Nulle race n’a l’esprit si compréhensif ; nulle n’est si bien douée pour la haute spéculation. […] Criez haut, comme quelques-uns que nous connaissons1161 !  […] À trois ans, il criait si haut la ballade de Hardyknute qu’il empêchait le ministre du village, homme doué d’une très-belle voix, d’être entendu et même de s’entendre. […] On n’a guère vu d’esprit dont la pensée planât plus haut et plus loin des choses réelles. […] Puis les gentianes bigarrées et les hautes tulipes, —  et les narcisses, les plus belles d’entre toutes les fleurs, —  qui contemplent leurs yeux dans les enfoncements du fleuve, —  jusqu’à ce qu’ils meurent de leur propre beauté trop aimée.

306. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Histoire de la querelle des anciens et des modernes par M. Hippolyte Rigault — II » pp. 150-171

La cause de M. de La Motte n’est assurément pas moins victorieuse que celle de Descartes ; le préjugé ne parle pas plus haut en faveur de l’un qu’il ne parla autrefois en faveur de l’autre. […] Est-il bien vrai que la langue française ne suffise pas à rendre parfaitement les grandes idées, les hauts sentiments, les passions héroïques, les vivacités galantes, les saillies satiriques, les naïvetés fines ? […] Il opposait l’impression fâcheuse qu’il avait reçue de la traduction de L’Iliade à celle que lui avait faite en sens contraire une traduction en prose de la tragédie de Caton, d’Addison : Cette traduction, disait-il, quoique inélégante, m’a donné une très haute idée de l’original, Je vois dans le poète anglais la grande partie qui caractérise notre Corneille. […] Gacon, qui se présentait en homme droit et éclairé, remettait le couple imparfait à la raison : Messieurs, que l’ignorant vulgaire Met plus haut qu’Ésope et qu’Homère, Vous n’approchez de ces héros Que par les yeux et par le dos. […] Lorsque Homère nous montre les vieillards causeurs assis sur les murailles de Troie, au haut des portes Scées, au moment où ils vont louer la beauté d’Hélène, il les compare à des cigales harmonieuses qui chantent posées sur un arbre dans un bois, et exhalent leur voix de lis.

307. (1872) Nouveaux lundis. Tome XIII « Œuvres françaises de Joachim Du Bellay. [I] »

En ce qui est du moyen âge, on peut dire qu’on a véritablement exhumé et découvert cette poésie, du moins dans sa branche la plus haute, la plus vigoureuse et la plus féconde, la Chanson de geste, l’Épopée. […] Mais, bien que portant le même nom, remontant à la souche commune (un chambellan de Charles VII), et issu même de la branche aînée, il n’était qu’un cousin assez éloigné de ces hauts personnages. […] Dans cette même dédicace, énumérant toutes les grandes et hautes qualités du cardinal négociateur, et faisant, presque à chaque ligne, allusion à quelque irait de l’Antiquité, il dira par exemple : « D’une si grande chose (le mérite du cardinal), il vaut trop mieux, comme de Carthage disoit Tite-Live, se taire du tout que d’en dire peu… » Il y a ici une inadvertance, et M.  […] Pour moi, quand je relis aujourd’hui ce petit livre de l’Illustration de Du Bellay, qui nous fait assister à un moment décisif et critique pour la langue et la littérature françaises, je sens le besoin de me bien représenter les circonstances parfaitement claires et définies où il parut et que notre érudition bien récente sur les anciennes sources françaises, sur les regrettables épopées du haut moyen âge, ne saurait, du jour au lendemain, changer et retourner. […] Malgré l’épuration sensible qui s’était faite dans notre poésie depuis Marot et l’aisance aimable qu’il y avait introduite, on n’était point décidément sorti de la fausse voie qui avait ramené notre langue poétique à une sorte d’enfance et qui semblait confiner notre invention dans un cercle de puérilités pédantesques : pour remettre les choses de l’esprit en digne et haute posture, il était besoin d’une entreprise, d’un coup de main vaillant dont Marot et ses amis n’étaient pas capables, de ce que j’appelle un coup de collier vigoureux ; car c’est ainsi que j’envisage cette poétique de Du Bellay et de Ronsard, poétique toute de circonstance, mais qui fut d’une extrême utilité.

308. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « M. J. J. AMPÈRE. » pp. 358-386

Ampère en vint à s’établir définitivement au cœur de l’histoire littéraire comme en son domaine propre, il se trouva y apporter précisément cette faculté d’enchaînement, ce besoin instinctif des rapports et des lois, cette sagacité investigatrice des origines et des causes, dont son noble père avait fourni de si hautes preuves dans un autre ordre de vérités. […] Il est bon d’avoir ainsi deux qualités opposées, et comme deux points de départ distants ; cela fait l’entredeux qu’exige Pascal, et donne une base certaine pour prendre la haute mesure des choses. […] Il ajoute dans l’explication de ces doctrines quelque chose aux simples et hautes traductions philosophiques qu’en avait posées ce grand devancier. […] D’ordinaire, en effet, il se pose le christianisme comme une limite absolue, comme un horizon au delà duquel il ne remonte pas, pénétré surtout qu’il est, avec raison, de sa haute grandeur, de son caractère sans pareil dans l’ensemble, de son opposition essentielle au paganisme enfin, plutôt que de quelques rapports secondaires. […] Ampère, n’est pourtant pas restée cachée ; on a lu de lui son mâle récit en vers des aventures du héros Sigour, sa haute et grave contemplation dédiée à son père, et intitulée Uranie.

309. (1920) La mêlée symboliste. I. 1870-1890 « Les poètes décadents » pp. 63-99

Ce mot suppose au contraire des pensées raffinées d’extrême civilisation, une haute culture littéraire, une âme capable d’intensives voluptés. […] D’abord ouvrier piqueur de meules (ses mains en portaient le stigmate), il avait conquis de haute lutte (au prix de quels efforts surhumains !) […] Maurice du Plessys et Ernest Raynaud, dont la haute compétence n’a jamais subi l’irrévérence du doute. […] “romantiques”, comme, mais mieux que « naturalistes » — signifiait en nous désignant, mes trois Maudits et moi, et ceux d’entre les jeunes gens dont il a été parlé plus haut, qui avaient déjà publié des vers — amateurs de l’obscur, propagateurs de théories abstruses, absconses et tout ce qu’on voudra dans ce goût-là, et, par quelle étrange association d’idées ? […] Et les diatribes de Jean-Baptiste Rousseau et celles de Gilbert l’encontre de leurs confrères, et, plus haut encore, les traits de Virgile à l’endroit de Bavies et de Mœvius ; mais il faudrait reprendre toute l’histoire littéraire.

310. (1880) Les deux masques. Première série. I, Les antiques. Eschyle : tragédie-comédie. « Chapitre IV, Eschyle. »

Le génie scandalise volontiers les foules, sa haute religion offusque les superstitions inférieures. […] Des hautes régions du lyrisme, son dialogue descend d’un coup d’aile sur le terrain du combat. […] On croirait qu’il a fait partie des migrations primitives descendues des plateaux de la haute Asie sur les rives de la mer Égée. […] » Ce large et libre esprit se concilie dans Eschyle, avec la piété la plus haute et la plus fervente. […] Il doit être l’interprète du goût attique, lorsque, faisant lutter Eschyle avec Euripide, il décrit « les mots ampoulés que sa bouche ouverte à deux battants lance, drus et serrés, sans frein ni mesure » ; « ses périodes empanachées, hautes comme des montagnes », « ses mots équestres à l’ondoyante aigrette », et « ses vers liés comme les poutres de la charpente d’un navire ».

311. (1818) Essai sur les institutions sociales « Chapitre X. Première partie. Théorie de la parole » pp. 268-299

Dire que l’homme a pu inventer la parole et créer les langues est une haute folie, si ce n’est une impiété. […] Le poète domine de haut l’époque où il vit, et l’inonde de lumière : l’avenir est aussi dans sa pensée ; il embrasse, dans un seul point de vue, toutes les générations humaines, et la cause intime des événements dans les secrets de la Providence. […] Si Boileau se fût élevé à cette haute considération, il aurait connu les ressources de l’épopée chrétienne ; son esprit réservé et sévère n’aurait pas été effrayé d’une profanation qui était impossible pour le véritable poète ; et il n’aurait pas continué à perpétuer parmi nous le règne caduc des divinités de la Grèce. […] Ainsi donc, si le cycle épique de la haute antiquité nous fût parvenu entier, et qu’il eût été continué par les poètes des âges postérieurs ; si les modernes eussent conçu l’épopée dans toute son étendue, et eussent fait un cycle épique, éclairé par la révélation, nous aurions la vraie histoire du genre humain. […] V Dans la haute antiquité, la musique est l’ensemble des lettres humaines et des institutions sociales.

312. (1862) Les œuvres et les hommes. Les poètes (première série). III « M. Pommier. L’Enfer, — Colifichets. Jeux de rimes. »

Il y avait les plus hautes relations et les plus magnifiques analogies à tirer de la fonction du juge suprême exercée par Celui qui a parcouru tous les rangs de l’humanité, depuis le fils de roi jusqu’à l’esclave qui lave les pieds et le condamné mis en croix, et qui, pendant dix-huit ans de sa vie mortelle, fut charpentier comme Noé et comme Salomon, ces préparateurs figuratifs de l’arche de salut. […] À l’élan des strophes et à la puissance de leur facture, on reconnaît tout d’abord un poète de la plus haute volée, tout à la fois ample et contenu, fougueux et correct. […] La grande échéance est venue ; Les vastes cieux se sont ouverts ; L’Agneau tient, du haut de la nue, Les assises de l’univers. […] Pour nous, ce que nous avons voulu chercher et indiquer sous ces poésies éclatantes, solides, toutes semblables à de la sculpture dans un métal incandescent, c’est le poète plus haut que la matière qu’il touche d’une main si puissante ; le poète, avant tout, spirituel ! […] Amédée Pommier vient d’élever à sa plus haute puissance, il ne l’a point inventée.

313. (1866) Nouveaux lundis. Tome VI « Appendice. — Post-scriptum sur Alfred de Vigny. (Se rapporte à l’article précédent, pages 398-451.) »

J’ai besoin de le répéter, parce que je viens de le relire : vous avez vraiment créé une critique haute qui vous appartient en propre, et votre manière de passer de l’homme à l’œuvre et de chercher dans ses entrailles le germe de ses productions est une source intarissable d’aperçus nouveaux et de vues profondes. » On peut rabattre tout ce qu’on voudra de l’éloge, mais M. de Vigny admettait évidemment cette méthode critique en 1829. […] Le reproche m’en a été fait, et, même pour ce dernier article de 1864, le bon sens de Buloz me l’a dit : « Vous le placez trop haut comme poète, et vous ne lui accordez pas assez comme romancier. » J’écris en ce moment comme on cause. […] Cette légère réserve faite, je ne sais rien de mieux raconté. » M. le comte de Circourt enfin, cet homme de haute conscience et de forte littérature, dans une lettre qu’il m’écrivait le 24 avril 1864, reconnaissait la vérité du Portrait et s’exprimait en ces termes par lesquels je terminerai et qui me couvrent suffisamment : « Les grands côtés du talent de M. de Vigny sont mis par vous en relief d’une manière tout à la fois large et fine ; et malgré la sévérité de quelques-unes de vos appréciations, je n’ai rien à souhaiter de mieux pour la mémoire de M. de Vigny, si ce n’est que la postérité s’en tienne sur lui à votre jugement, ce que j’espère ; j’apprends que ses vrais (et par conséquent rares) amis sont tout à fait de ce sentiment. » 79.

314. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « AUGUSTE BARBIER, Il Pianto, poëme, 2e édition » pp. 235-242

Nous recommandons plus particulièrement à ceux que la pensée politique préoccupe, et qui aiment à voir le talent des artistes s’en faire l’auxiliaire et l’organe, cette troisième partie où sous le nom de Salvator, le génie mécontent, sinistre et découragé, est repris, remontré par l’homme du peuple en ces termes magnanimes : Du peuple il faut toujours, poëte, qu’on espère, Car le peuple, après tout, c’est de la bonne terre, La terre de haut prix, la terre de labour ; C’est ce sillon doré qui fume au point du jour, Et qui, empli do séve et fort de toute chose, Enfante incessamment et jamais ne repose. C’est lui qui pousse aux cieux les chênes les plus hauts ; C’est lui qui fait toujours les hommes les plus beaux. […] Il prête à qui l’embrasse une force immortelle ; De tout haut monument c’est la base éternelle ; C’est le genou de Dieu, c’est le divin appui ; Aussi malheur !

315. (1890) Les œuvres et les hommes. Littérature étrangère. XII « Hebel »

Pendant que la prude Angleterre n’osait faire qu’un baronnet de Walter Scott et chicanait le titre de Lord à ce magnifique génie, qui ne chicanait pas, lui, à l’Angleterre, la gloire qu’il versait sur son écusson, Hebel, commandeur du Lion de Zœhringen, était revêtu de la dignité de prélat, la plus éminente dans la hiérarchie protestante, et pouvait siéger dans la Chambre haute du grand-duché. […] « Un doux éclat de soleil couchant — nous dit-il plus loin, avec ce sentiment de poète qui sent la poésie dans les autres, — rayonne de l’âme de Hebel, pure et tranquille, et teint de rose toutes les hauteurs qu’il fait surgir. » Et Jean-Paul ajoute cette phrase mélodique et enchantée du ranz des vaches que son imagination pastorale jouait toujours : « Hebel embouche d’une main la trompe alpestre des aspirations et des joies juvéniles, tout en montrant, de l’autre, les reflets du couchant sur les hauts glaciers, et commence à prier quand la cloche du soir se met à sonner sur les montagnes. » De son côté, Goethe, ce grand critique, ce grand esprit lymphatique, ce Talleyrand littéraire qui fait illusion par la majesté de l’attitude sur la force de sa pensée, cet homme que l’on a cru un marbré parce qu’il en a la froideur, Goethe, ce blank dead, comme l’appelleraient les Anglais, ce système sans émotion et dont le talent fut à froid une combinaison perpétuelle, disait de cette voix glacée qui impose : « L’auteur des poésies allemaniques est en train de se conquérir une place sur le Parnasse allemand. […] Maximilien Buchon de ces poésies de Hebel, qui répugnent même à passer dans le haut allemand, tant elles sont d’une localité et d’une originalité profondes, atteste beaucoup de talent et un sentiment très animé des beautés sincères qu’elle s’efforce de reproduire.

316. (1900) Taine et Renan. Pages perdues recueillies et commentées par Victor Giraud « Taine — II »

Il m’a parlé de plusieurs personnes favorisées par la fortune, par la beauté, par une grande situation sociale, et qui pourtant mènent une vie morale digne de la plus haute estime. […] Et la haute situation d’académicien ne suffit pas à m’autoriser, devant l’opinion, à traiter librement de la période révolutionnaire, ni d’aucun sujet délicat.‌ […] Mes livres, qui sont écrits pour une minorité, n’enseignent rien que le déterminisme scientifique et la soumission d’un Marc-Aurèle ou d’un Spinoza ; mes obsèques religieuses, qui sont un argument mieux saisissable par la foule, contribueront à approcher mes contemporains de cette haute moralité.

317. (1827) Principes de la philosophie de l’histoire (trad. Michelet) « Principes de la philosophie de l’histoire — Livre second. De la sagesse poétique — Chapitre VII. De la physique poétique » pp. 221-230

Les héros, récemment sortis des géants, étaient au plus haut degré grossiers et farouches, d’un entendement très borné, d’une vaste imagination, agités des passions les plus violentes ; ils étaient nécessairement barbares, orgueilleux, difficiles, obstinés dans leurs résolutions, et en même temps très mobiles, selon les nouveaux objets qui se présentaient. […] la pensée n’atteint pas ici le plus haut degré du sublime, parce que l’amant ne la particularise point en la restreignant à lui-même ; c’est au contraire ce que fait Térence, lorsqu’il dit : Vitam deorum adepti sumus, Nous avons atteint la félicité des dieux. […] Mais le même poète dans une autre comédie porte le sentiment au plus haut degré de sublimité en le singularisant et l’appropriant à celui qui l’éprouve, Deus factus sum, je ne suis plus un homme, mais un Dieu.

318. (1872) Nouveaux lundis. Tome XIII « Œuvres françaises de Joachim Du Bellay. [III] »

Dès l’abord, avouons-le, si, au sortir de la lecture de l’Illustration, nous ouvrons le petit volume de Poésies qu’il se hâta de publier dans le même temps, nous tombons de haut. […] Et, en ce qui est de Du Bellay en particulier, dans ce Recueil de l’Olive, on y sent parfois, on y entend à l’avance comme un son et un accent précurseur de cette haute et pure poésie qui ne s’est pleinement révélée que si tard dans les Méditations ; on y ressaisit un écho distinct et non douteux, qui va de Pétrarque à Lamartine. […] Là est le bien que tout esprit désire, Là le repos où tout le monde aspire, Là est l’amour, là le plaisir encore Là, ô mon Âme, au plus haut ciel guidée, Tu y pourras reconnaître l’Idée De ta beauté qu’en ce monde j’adore. […] Il déclare dans son découragement ne plus avoir souci de la gloire ni de la postérité ; il croit avoir renoncé aux chastes Muses ; mécontent de sa condition et assujetti à la fortune, il gémit de ne plus poursuivre, dans une belle ardeur, le sourire de la docte et gracieuse Marguerite, cette patronne des poètes, et la haute faveur du Prince ou de la Cour ; et c’est précisément alors qu’il se retrouve le plus sûrement lui-même, et qu’en puisant ses vers à la source intime d’où une ambition plus haute le détournait, il nous les offre plus vrais et encore vivants après trois siècles. […] Il a laissé une belle réputation, moins haute et par là même plus à l’abri des revers et des chutes que celle de Ronsard.

319. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « DES MÉMOIRES DE MIRABEAU ET DE L’ÉTUDE DE M. VICTOR HUGO a ce sujet. » pp. 273-306

La forte séve qui, plus haut, s’en va mûrir et se transformer merveilleusement sous un soleil dont les rayons ne viennent pas également à chacun, on la voit sortir et monter de cette terre qui est notre commune mère à tous. […] Qu’on ait marqué d’abord, qu’on ait été puissant et glorieux à tout prix en son passage, et l’on n’aura en aucun temps été plus absous ; on vous trouvera, à défaut de vertu personnelle, une vertu plus haute, une utilité et moralité providentielle qui est l’ovation suprême aujourd’hui. […] Le poëte, sans songer à mal, insulte au hasard, en passant, du haut de son char de feu. […] Ajoutez à ces traits une tournure d’humeur et de gaieté française, des saillies et des brusqueries plaisantes, non pas à la façon de Roquelaure ou de Rabelais, mais d’une haute dignité et grandeur comique, ainsi qu’il convenait à un Alceste demeuré féodal et antique baron. […] Lerminier ce talent de personnification enflammée et d’apothéose, il nous a semblé dur, sans assez de proportion, contre certaines renommées secondaires qui gênaient le piédestal des hautes statues.

320. (1854) Histoire de la littérature française. Tome I « Livre II — Chapitre cinquième »

Boileau continue à tracer ainsi la suite de l’histoire de la poésie : Ce poëte orgueilleux112, trébuché de si haut Rendit plus retenus Desportes et Bertaut. […] Ronsard avait donné des exemples dans la haute poésie et dans la menue poésie, en faveur à la cour. […] Plus tard, il revint aux exemples de haute poésie donnés par Ronsard, et bien lui en prit : car c’est dans la haute poésie seulement que Bertaut a laissé des vers dignes d’être épargnés par Malherbe, dans le temps même qu’il biffait Ronsard et Desportes. […] Le premier poëme qu’il publia, les Larmes de saint Pierre, est imité du Tansille, poëte italien ; toutefois, quelques passages d’un goût vigoureux des expressions fortes et précises, du nombre, je ne sais quel grand air que n’avait pas encore eu la poésie jusque-là, annonçait l’auteur de ces belles odes, les premiers modèles de la haute poésie. […] Malherbe marqua le caractère et assura l’avenir de la haute poésie en France, le jour où il substitua au mécanisme qui permettait à Ronsard de faire deux cents vers à jeun, et autant après dîner122, un ensemble de difficultés ou plutôt un corps de lois qui devait interdire l’art aux vaines vocations, et ne le rendre accessible qu’aux poëtes vraiment inspirés.

321. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Sieyès. Étude sur Sieyès, par M. Edmond de Beauverger. 1851. » pp. 189-216

Je m’attacherai avant tout à montrer l’homme et à bien dessiner cette forme d’esprit, l’une des plus hautes et des plus absolues qui soient sorties des mains de la nature. […] On croit entendre dans ces passages le poète romain Lucrèce ou quelque austère épicurien de l’ancienne Rome, déplorant mélancoliquement, du haut de sa morne sagesse, les erreurs des humains égarés hors de la voie31. […] Et, Sieyès lui-même, ce puissant cerveau, doué au plus haut degré de l’intensité de la conception, accorderait-il ainsi à l’idée pure le premier rôle, s’il était également en possession de cette langue dorée et de ces chaînes électriques dont l’éloquence se plaît à jeter le réseau autour d’elle32. […] Ses hautes facultés, appréciées de tous ceux qui l’avaient vu dès l’enfance, le firent attacher en qualité de chanoine (1775) à l’évêque de Tréguier, et il le suivit dans son diocèse. […] Cet esprit altier, puissant, profond, ingénieux et fin, un peu bizarre, mais toujours original, en tombant du haut de cette idée de réforme première et radicale qu’il méditait dans toutes les branches de la connaissance, de la condition et, comme il disait, de la socialité humaine, en était venu (étrange extrémité !)

322. (1887) Journal des Goncourt. Tome I (1851-1861) « Année 1856 » pp. 121-159

En effet, pas de commandes, pas de travail, pas de pain : pour toute nourriture, les quelques légumes d’un petit jardin, au haut du faubourg Saint-Jacques. […] * * * — Rue Bonaparte, en achetant notre bacchanale enfantine d’Angelo Rossi, on nous montra une terre cuite de Clodion, un bas-relief, haut comme les deux mains, représentant une femme sortant du bain, des parties de corps saillantes en ronde bosse dans le relief d’une médaille. […] La chambre est noire ou à peu près, avec un jour venant du haut de la fenêtre et traversant des vitraux de couleur, un jour étrange, prismatique, tombant et dansant dans cette pénombre fourmillante de choses que l’œil tâtonne et ne peut saisir, et parmi lesquelles il distingue cependant vaguement un hibou blanc. […] Il dit cela, remuant un paquet de cartes hautes d’un pied où sur chacune est une représentation d’une femme, d’un épisode de l’existence : toutes ces allégories dessinées par une main ignare du dessin, mais burlesquement fantastiques, mais bourgeoisement monstrueuses, et peinturlurées brutalement de noir et de vilain rouge, et mettant à ces images de la vie réelle, je ne sais quoi du sauvage et du macabre des figurations d’idoles des peuples primitifs et anthropophages. […] Un antre noir, bondé de débris de voitures, de harnais pourris, de poêles de fonte, de faïences égueulées, de détritus d’uniformes, au milieu desquels va et vient le ferrailleur, un tout petit bossu, au gros nez sensuel, aux yeux coquins, et perpétuellement souriant dans sa blouse bleue, sous son chapeau noir à haute forme.

323. (1861) Les œuvres et les hommes. Les historiens politiques et littéraires. II. « II. M. Capefigue » pp. 9-45

Vertu, vice, religion, politique, art, industrie, les plus hautes sphères de l’activité humaine ne sont pour elle que des sujets, plus ou moins heureux, de trumeaux à badigeonner. […] Il aime mieux dire plutôt avec une incroyable sincérité, en parlant de ces mœurs dont les hautes classes en délire donnaient le spectacle à tout un peuple, qui les regardait à travers la grille de Trianon : Certes, non ! […] Nous n’avions qu’à le caractériser, et nous l’avons fait dans un but placé plus haut qu’un livre isolé. […] Capefigue, — quelles que fussent d’ailleurs les opinions politiques de l’homme privé et la portée de l’écrivain, — était resté un historien qui voyait plus haut que l’intérêt des partis et même des dynasties. […] Cette préface, malgré une mise en scène assez rusée et assez joliette, cette préface est, d’un bout à l’autre, le cri d’une conscience inquiète qui croit s’imposer silence à elle-même en se parlant haut.

324. (1899) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (troisième série). XVII « Du docteur Pusey et de son influence en Angleterre »

Plus haut que les autres par les facultés, plus fort par l’âme, il a marché plus vite ; sa conduite a tout le frappant d’un présage. […] Peut-être même trouverait-on que l’origine des prétentions anglo-catholiques remonte plus haut que Charles Ier. […] Non seulement elle passe de bien haut dans l’histoire par-dessus la tête vautrée de Henri VIII et de son Établissement, mais elle traite, avec une voix dont nous connaissons l’accent, nous, catholiques et romains, toute intervention de l’État dans l’Église, d’usurpation et de violation de droit. […] Il joua même bientôt sa position officielle contre celle-là plus haute et plus obligatoire, et il sut la perdre avec grandeur. […] … Après l’intérêt sacré de la conscience, — le plus haut intérêt pour les peuples comme pour les individus, — on peut parler de l’intérêt politique à une nation qui entend la puissance et qui n’a pas dit le dernier mot de ses destinées.

325. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Première partie. — Chapitre XIII. »

Dans ce faubourg de Bruchium, où, loin du bruit des deux ports de la cité marchande, s’étendaient les galeries du Muséum, dans ce quartier paisible que surmontait sous un ciel si pur la haute tour de l’Observatoire, entre ces philosophes antiquaires ou mystiques, ces grammairiens, ces critiques occupés de recherches sur toutes les formes de l’imagination et de la poésie grecque, il devait se produire, selon l’esprit du temps, un effort nouveau de la veine poétique et s’ouvrir une mine inexplorée. […] Aussi toi-même tu leur as départi ta puissance : tu leur as donné la garde des fortes villes ; et tu résides toi-même sur les hautes citadelles, attentif à ceux qui gouvernent le peuple par d’iniques décrets ou selon la voie droite ; tu leur donnes à tous, par surcroît, la richesse et la prospérité, mais non dans une mesure égale. […] Le poëte alexandrin assigne au dieu protecteur des rois l’attribut qu’il leur souhaite à eux-mêmes, la domination sur les hautes citadelles. Au lieu de ce sceptre équitable, de ce soin de cueillir la fleur des plus hautes vertus, de cette patience à supporter la plainte, de cet amour de la justice et des arts, dont Pindare félicitait Hiéron, au lieu de ces lois justes et de cette liberté paisible qu’il attendait du roi d’Etna, fils d’Hiéron, ce que Callimaque célèbre dans Ptolémée, c’est la rapidité de la puissance arbitraire, ce sont ces images, empruntées à l’Orient, d’une volonté suprême aussi promptement obéie que connue. […] De ces temples juifs multipliés dans la haute ville, où, dans l’office religieux des jours consacrés, les prières et sans doute les homélies à la foule étaient faites en langue grecque, rien ne dépassait-il l’enceinte du sanctuaire ?

326. (1761) Salon de 1761 « Peinture —  Amédée Van Loo  » pp. 139-140

Il est de 11 pieds, 5 pouces de haut, sur 7 pieds, 4 pouces de large. […] Elles ont chacune 4 pieds, 6 pouces de haut, sur 3 pieds, 6 pouces de large.

327. (1882) Essais de critique et d’histoire (4e éd.)

Dans les hauts appartements, près du lit à baldaquin, le long d’une ruelle précieuse, ils causent. […] Les femmes précipitaient leurs enfants du haut du rempart, et se précipitaient, et les hommes aussi. […] Comme ce platane est haut et touffu ! […] Il a le parler haut et libre ; « il lui échappe d’abondance de cœur des raisonnements et des blâmes ». […] Si les auteurs parlent tout haut de Rome ou de l’Angleterre, c’est pour parler tout bas d’autre chose.

328. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre quatrième. La propagation de la doctrine. — Chapitre I. Succès de cette philosophie en France. — Insuccès de la même philosophie en Angleterre. »

Toutes les hautes têtes du siècle sont ses rejetons, et, parmi celles-ci, quelques-unes sont au nombre des plus hautes qu’ait produites l’espèce humaine  C’est que la nouvelle semence est tombée sur le terrain qui lui convient, je veux dire dans la patrie de l’esprit classique. […] « Madame la maréchale, dit un des personnages de Diderot458, il faudra que je reprenne les choses d’un peu haut  De si haut que vous voudrez, pourvu que je puisse vous entendre  Si vous ne m’entendiez pas, ce serait bien ma faute  Cela est poli, mais il faut que vous sachiez que je n’ai jamais lu que mes Heures. » — Il n’importe, et la jolie femme, bien conduite, va philosopher sans le savoir, trouver sans effort la définition du bien et du mal, comprendre et juger les plus hautes doctrines de la morale et de la religion  Tel est l’art du dix-huitième siècle et l’art d’écrire. […] Il n’y eut jamais d’écrivain qui ait possédé à un si haut degré et en pareille abondance tous les dons du causeur, l’art d’animer et d’égayer la parole, le talent de plaire aux gens du monde. […] Confessions, partie II, livre XI. « Les femmes s’enivrèrent du livre et de l’auteur, au point qu’il y en avait peu, même dans les hauts rangs, dont je n’eusse fait la conquête, si je l’eusse entreprise.

329. (1865) Cours familier de littérature. XIX « CXIIe entretien. La Science ou Le Cosmos, par M. de Humboldt (1re partie). Littérature scientifique » pp. 221-288

Des dattiers et des cocotiers couvrent le rivage ; plus haut, sur la montagne, brillent des dragonniers ; les flancs sont garnis de vignes, qui tapissent les chapelles répandues çà et là, au milieu des orangers, des myrtes et des cyprès ; tous les murs sont chargés de fougères et de mousses, et, tandis que plus haut le volcan est couvert de neige et de glace, il règne, dans ces vallées, un printemps perpétuel. […] Il parcourut, immédiatement après, la région des bruyères arborescentes, puis il rencontra une zone de fougères ; plus haut un bois de genévriers et de sapins ; plus loin encore un plateau couvert de genêts, large de deux lieues et demie, par lequel il arriva enfin sur le sol de pierre ponce du cratère volcanique où le beau Retama, arbuste aux fleurs odorantes, et la chèvre sauvage qui habite le pic, lui souhaitèrent la bienvenue. […] Dieu lui-même aurait pu faire scandale, s’il en eût proféré tout haut le nom. […] Guillaume, promu de grade en grade à de hauts postes diplomatiques, avait laissé sa femme enceinte à Paris, et il vivait à Rome attaché à la légation de Prusse. […] Sa stature était de moyenne taille ; ses pieds et ses mains étaient petits et admirablement faits ; sa tête, au front haut et large, était garnie de cheveux d’un blanc d’argent ; ses yeux bleus étaient vifs, pleins d’expression et de jeunesse.

330. (1866) Cours familier de littérature. XXI « CXXVe entretien. Fior d’Aliza (suite) » pp. 321-384

Fior d’Aliza alla ramasser des herbes le long des sentiers qui n’appartiennent à personne ; Hyeronimo alla ramasser des branches et des fagots de feuilles dans les rejets de châtaigniers, sur les hautes montagnes du couvent, abandonnées aux daims et aux chevreuils. […] « Mais cela ne nous regarde ni vous ni moi, disait-il toujours, en finissant ses entretiens et en reprenant ses besaces sur l’épaule, son rosaire à la main ; le flot des hommes ne montera pas si haut qu’où nous sommes ; il y aura toujours des neuvaines à l’autel des Camaldules et toujours des pifferari qui viendront acheter des zampognes pour prier devant les Madones ou pour faire danser aux noces des Maremmes. […] On dit qu’elle éblouissait tous les pèlerins, qui s’arrêtaient exprès pour lui demander une gorgée d’eau dans sa cruche. « Si les anges habitaient encore les hauts lieux, disaient-ils entre eux, en s’éloignant et en se retournant pour la regarder encore, nous dirions que ce n’est pas une fille de l’homme, mais une créature de lumière. » J’étais tout réjoui quand la mère de Hyeronimo, qui l’aimait comme sa fille, me rapportait ce qu’elle avait entendu ainsi de la bouche des passants. […] CIII Cependant, un matin qu’il était allé dénicher des œufs de faisan dans les bruyères au plus haut des montagnes, derrière l’ermitage des Camaldules, elle eut bien plus que peur, et nous avec elle, hélas ! […] Je m’approchai timidement d’eux, et je leur demandai poliment qu’est-ce donc qu’ils venaient faire si haut et si loin dans une partie des montagnes où jamais la hache des bûcherons n’avait retenti depuis que le monde est monde.

331. (1880) Les deux masques. Première série. I, Les antiques. Eschyle : tragédie-comédie. « Chapitre XVII, l’Orestie. — les Euménides. »

D’une main, elles brandissaient un bâton, insigne menaçant de leurs hautes œuvres : de l’autre elles agitaient un flambeau chargé d’une flamme sulfureuse. […] On y sent l’aristocratie d’un dieu de haute race aux prises avec les démons d’une mythologie inférieure. — « Hors d’ici ! […] Pallas était sa glorieuse marraine et sa jeune aïeule ; pour toute la Grèce, après Zeus, la plus haute des divinités. […] Leur laideur la choque bien un peu, mais sa haute raison contient sa répugnance, elle les apostrophe sans mépris. […] Il y a de la piété filiale dans son parricide ; son père l’excitait du fond du sépulcre, l’Oracle le poussait du haut de l’autel.

332. (1891) Essais sur l’histoire de la littérature française pp. -384

Il se contente de dire, dans le haut style de 49 : « Les stigmates dégoûtants de 48 ». […] Mais sa naissance remonte plus haut. […] Il possède à un haut degré le don de l’expression créée. […] Sur des perches partant du haut des greniers, des écheveaux de coton séchaient à l’air. […] Voilà son vrai domaine ; s’il n’y rencontre point le haut comique, il y prodigue à chaque pas le plaisant.

333. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Victor Hugo — Victor Hugo, Les Chants du crépuscule (1835) »

Cette forme d’expression pour l’imagination et pour le sentiment, lorsqu’on la possède à un haut degré, est tellement supérieure, d’une supériorité absolue, à l’autre forme, à la prose ; elle est si capable d’immortaliser avec simplicité ce qu’elle enferme, de fixer en quelque sorte l’élancement de l’âme dans une attitude éternelle, qu’à chaque retour d’un grand et vrai talent poétique vers cet idiome natal il y a lieu à une attente empressée de toutes les âmes musicales et harmonieuses, à un joyeux éveil de la critique qui sent l’art, et peut-être, disons-le aussi, au petit dépit mal caché des gens d’esprit qui ne sont que cela. […] Le poëte est en voyage : un soir, plus triste que de coutume, plus en proie aux pensées du doute et du mal, il monte au haut d’un de ces beffrois lugubres qu’il aime ; il y voit l’énorme cloche immobile, sommeillante, ou plutôt vibrante encore d’une vibration obscure, murmurante de je ne sais quelle confuse rumeur :  Car même en sommeillant, sans souffle et sans clartés, Toujours le volcan fume et la cloche soupire ; Toujours de cet airain la prière transpire, Et l’on n’endort pas plus la cloche aux sons pieux Que l’eau sur l’Océan ou le vent dans les cieux ! […] Non loin de cette haute et sombre poésie, on rencontre une toute petite pièce de huit vers sur Anacréon, que je ne puis laisser passer sans remarque. […] qui plus haut, nous l’avons vu, lui a fait comparer l’harmonie de l’orgue à l’eau d’une éponge, et parler du sourire fatal de la résignation à propos de Pétrarque, lui a inspiré d’introduire dans la composition de son volume deux couleurs qui se heurtent, deux encens qui se repoussent.

334. (1874) Premiers lundis. Tome II « Mémoires de Casanova de Seingalt. Écrits par lui-même. »

Un certain nombre, qui ne possèdent ces hautes facultés qu’inégalement ou selon une mesure assez moyenne, sont favorisés dans leur honorable ténacité, par le peu de tentation que leur donnent à droite ou à gauche les facultés mobiles et divertissantes, presque nulles chez eux. […] La reine saisit donc le livre à temps, quoique déjà sous la couverture ; elle en lut au hasard quelques lignes qui la firent bien sourire, et, ayant appelé mademoiselle de Sparre, noble et belle fille de sa suite, et sa favorite la plus chère, elle lui marqua du doigt certains passages, qu’elle lui ordonna de lire tout haut, malgré les fréquents arrêts, la rougeur et la honte de cette jeune personne, et aux grands éclats de rire de tous les assistants. — Qui nous raconte cela, s’il vous plaît, sur ce ton de badinage ? […] à ceux qui entendent raillerie de la sorte, qui l’entendent comme Huet, comme Christine, comme Saumaise, Ménage et Lamonnoie, nous croyons pouvoir, sans rien compromettre, parler des Mémoires de Casanova ; nous ajouterons pourtant, de peur que l’anecdote citée tout à l’heure ne fasse équivoque, que mesdemoiselles de Sparre ne doivent en lire aucun passage ni haut ni bas. […] C’est, au reste, la même J…, qu’après diverses rencontres Casanova retrouvait, six ou sept ans plus tard, dans la galerie de Fontainebleau, devant être présentée au roi Louis XV le lendemain ; mais sa majesté étant venue à passer avec M. le maréchal de Richelieu, lorgna la galante étrangère un peu dédaigneusement, et dit au maréchal assez haut pour que J… pût l’entendre : « Nous en avons ici de plus belles. » L’iris fascinateur avait manqué son triomphe, et la présentation n’eut pas lieu.

335. (1895) Histoire de la littérature française « Cinquième partie. Le dix-huitième siècle — Livre V. Indices et germes d’un art nouveau — Chapitre II. Signes de la prochaine transformation »

Et voici le prince de Ligne écrivant à une marquise française : d’un haut promontoire de la Crimée, le soir, il regarde la mer immobile, il reporte sa pensée sur tous les hommes, tous les peuples qui sont venus par cette mer, ont passé sur cette côte, ont vécu dans ces villes dont il vient de fouler les ruines. […] « Je juge le monde et le considère comme les ombres chinoises… Je pense au néant de la gloire… Je pense au néant de l’ambition. » Et la nuit descend, enveloppant le songeur ; les Tartares font rentrer leurs moutons ; une voix tombe du haut minaret : recueillant ses pensées, l’homme s’enfonce dans la nuit sur un cheval tartare611 . […] Voltaire mort et devenu l’intangible idéal, l’abbé Delille représenta la plus haute forme du génie poétique que le public fût capable de concevoir. […] Ducis avait du génie, l’âme haute, l’esprit large : et voilà où le respect du public, l’observance des règles, les scrupules de style l’ont mené.

336. (1911) La valeur de la science « Première partie : Les sciences mathématiques — Chapitre II. La mesure du temps. »

Mais supposer cette vitesse de rotation constante, c’est supposer qu’on sait mesurer le temps. » Notre définition n’est donc pas encore satisfaisante ; ce n’est certainement pas celle qu’adoptent implicitement les astronomes dont je parlais plus haut, quand ils affirment que la rotation terrestre va en se ralentissant. […] Le postulat, en tout cas, conforme au principe de la raison suffisante, a été accepté par tout le monde ; ce que je veux retenir, c’est qu’il nous fournit une règle nouvelle pour la recherche de la simultanéité, entièrement différente de celle que nous avions énoncée plus haut. […] Je n’ai pas à revenir sur les difficultés relatives à ce dernier problème, puisque j’y ai longuement insisté plus haut. […] C’est la règle de la cause et de l’effet analysée plus haut.

337. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre XIII. Premières tentatives sur Jérusalem. »

Le haut sacerdoce de Jérusalem tenait, il est vrai, un rang fort élevé dans la nation ; mais il n’était nullement à la tête du mouvement religieux. […] La caste sacerdotale s’était séparée à tel point du sentiment national et de la grande direction religieuse qui entraînait le peuple, que le nom de « sadducéen » (sadoki), qui désigna d’abord simplement un membre de la famille sacerdotale de Sadok, était devenu synonyme de « matérialiste » et d’« épicurien. » Un élément plus mauvais encore était venu, depuis le règne d’Hérode le Grand, corrompre le haut sacerdoce. […] C’était un esprit libéral et un homme du monde, ouvert aux études profanes, formé à la tolérance par son commerce avec la haute société 624. […] Il est révolutionnaire au plus haut degré ; il appelle tous les hommes à un culte fondé sur leur seule qualité d’enfants de Dieu.

338. (1899) L’esthétique considérée comme science sacrée (La Revue naturiste) pp. 1-15

Soucieux d’accroître la beauté de la race dont nous nous sentons les gardiens, convaincus de l’importance de l’esthétique considérée comme science vivante, ayant pris conscience de nos droits qui sont ceux de tous les hommes, nous nous sommes imposé une grande et haute mission. […] De hautes destinées nous attendent. […] Quand nous aurons constitué un univers de héros, dans les poudroyantes et riches fresques, dans les groupes de marbre taillés pesamment, dans les strophes dialogiques et apologétiques, dans les molles et hautes harmonies, il n’y aura plus qu’à le rendre vivant. […] Et peut-être aurons-nous la joie de voir naître un jour la race de héros dont sans nul doute auparavant, nos statues auront incarné les traits pompeux, dont nos poèmes auront chanté les magnifiques destinées, dont nos tableaux auront contenu les proportions implacables et dont nos hautes symphonies auront développé la vivante rêverie.

339. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Cours de littérature dramatique, par M. Saint-Marc Girardin. (2 vol.) Essais de littérature et de morale, par le même. (2 vol.) » pp. 7-19

Il y avait deux manières de rompre ce silence, l’une en parlant haut et en déclamant, l’autre en venant causer sans apparat et sans prétention. […] Que si l’on passe aux rhéteurs modernes, à ceux des bons et grands siècles, on descend de haut : la critique, en ces belles époques, n’a pas pris tout son développement et son essor, elle se contente souvent de suivre : pourtant, en un ou deux cas, elle dirige, elle guide aussi ; elle semble recouvrer son antique autorité. […] Il a des commencements de chapitres, parfaits de ton, de tenue, de sévérité, d’une haute critique ; puis il descend ou plutôt il s’élance, il saute à des points de vue tout opposés. « Mais ce n’est point ma faute à moi, dira le critique ; je n’invente pas mon sujet, je suis obligé d’en descendre la pente, et de suivre les modernes dans ces recoins du cœur humain où ils se jettent, après que les sentiments simples sont épuisés. » — Pardon, répondrai-je encore ; votre ingénieuse critique, en faisant cela, n’obéit pas seulement à une nécessité, elle se livre à un goût et à un plaisir ; elle s’accommode à merveille de ces recoins qu’elle démasque, et dont elle nous fait sentir, en se jouant, le creux et le faux. […] Voilà comment, avec des parties hautes, sérieuses, éloquentes, M. 

340. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Seconde partie. Poétique du Christianisme. — Livre cinquième. La Bible et Homère. — Chapitre IV. Suite du parallèle de la Bible et d’Homère. — Exemples. »

Le nuage d’or qui ceint le front du fils de Pélée, la flamme qui s’élève sur sa tête, la comparaison de cette flamme à un feu placé la nuit au haut d’une tour assiégée, les trois cris d’Achille, qui trois fois jettent la confusion dans l’armée troyenne : tout cela forme ce sublime homérique qui, comme nous l’avons dit, se compose de la réunion de plusieurs beaux accidents et de la magnificence des mots. Voici un sublime bien différent : c’est le mouvement de l’ode dans son plus haut délire. […] Il les appelle auprès de lui : car s’il a élevé la voix assez haut pour être entendu de toute la maison de Pharaon, lorsqu’il a dit, je suis Joseph, ses frères doivent être maintenant les seuls à entendre l’explication qu’il va ajouter à voix basse : ego sum, Joseph, frater vester, quem vendidistis in Ægyptum  : c’est la délicatesse, la générosité et la simplicité poussées au plus haut degré.

341. (1906) Les œuvres et les hommes. À côté de la grande histoire. XXI. « L’empire russe depuis le congrès de vienne »

Les sources historiques les plus profondes, malgré le limon de la personnalité qui s’y mêle, sont très certainement les Mémoires, et, nous l’avons dit plus haut, les Mémoires n’existent pas en Russie. Malgré la force d’imitation des hautes classes, qui fait ressembler les mœurs russes à la descente de la Courtille d’un carnaval sous Louis XV, elles n’imitent point les Mémoires de cette société qu’elles imitent. […] II Que si nous tenions à prouver en détail ce que nous avons dit plus haut de l’absence complète d’originalité en Russie, voici un ouvrage qui serait un bon argument. […] Les livres russes, comme les hautes classes russes, comme le gouvernement russe, comme tout ce qui tient en Russie au développement quelconque de l’intellectualité, recherchent avec trop d’empressement le joug de l’idée européenne pour avoir la force de le secouer et de le rejeter.

342. (1899) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (troisième série). XVII « Le père Augustin Theiner »

Et en vain nous répéterait-il (ce qu’il nous dit si haut dans son histoire) qu’il n’a eu en vue, quand il l’a entreprise, que la justice et la vérité. […] telle est pour nous la question, — et elle est plus haute à notre sens que tout ce qui, jusqu’à ce moment, s’est dit ou s’est écrit sur elle : — l’abolition de l’Ordre des jésuites est-elle un fait honorable ou dommageable à la gloire de Clément XIV ? […] Placés plus haut pour voir plus loin que les autres hommes, les Pouvoirs humains ne sont pas justifiés par la bêtise de leurs actes. […] En vérité, il faut avouer que s’il n’a pas eu un autre dessein que de relever Clément XIV dans le respect de la catholicité qui l’accuse, il n’aura pas assez réussi pour que, du haut de ses deux immenses volumes, piédestal épais d’une gloire manquée, il fasse répéter à l’histoire le mot d’ordre qu’il vient lui donner !

343. (1906) Les œuvres et les hommes. Poésie et poètes. XXIII « Charles Monselet »

Charles Monselet9 I Il y a en ce moment, dans un coin encore obscur de la littérature contemporaine, un groupe d’esprits d’une haute suffisance, qui se croient, avant tout, des inventeurs, et qui s’inscrivent en faux contre la Critique au nom de leurs œuvres présentes ou futures. […] Mais on n’a pu rien contre le fait de sa haute individualité poétique, et c’est en vertu même de cette haute individualité qu’il a troublé les facultés d’un homme qui a le sentiment très animé de la poésie, mais qui ne l’a pas, ce sentiment, au point de devenir une puissance. […] , et nous sommes persuadé qu’il arrivera à écrire un de ces livres dont la supériorité se chiffre plus haut ou plus bas, selon l’intensité du génie, mais qui, en définitive, sont des œuvres.

344. (1827) Principes de la philosophie de l’histoire (trad. Michelet) « Principes de la philosophie de l’histoire — Livre second. De la sagesse poétique — Chapitre II. De la métaphysique poétique » pp. 108-124

Leurs créations réunirent les trois caractères qui distinguent la haute poésie dans l’invention des fables, la sublimité, la popularité, et la puissance d’émotion qui la rend plus capable d’atteindre le but qu’elle se propose, celui l’enseigner au vulgaire à agir selon la vertu. — De cette faculté originaire de l’esprit humain, il est resté une loi éternelle : les esprits une fois frappés de terreur, fingunt simul credunt que , comme le dit si bien Tacite. […] C’est ainsi qu’il faut entendre dans l’histoire de la civilisation le Jovis omnia plena ; c’est ce Jupiter que Platon prit pour l’éther, qui pénètre et remplit toutes choses ; mais les premiers hommes ne plaçaient pas leur Jupiter plus haut que la cime des montagnes, comme nous le verrons bientôt. […] Aussi, comme on le voit déjà par l’exemple tiré de Jupiter, tous les sens mystiques d’une haute philosophie attribués par les savants aux fables grecques et aux hiéroglyphes égyptiens, paraîtront aussi choquants que le sens historique se trouvera facile et naturel. […] Comment peut-il prouver que les Hébreux ont transmis aux Gentils leur droit naturel, contre l’aveu magnanime de Josèphe, contre la réflexion de Lactance cité plus haut ?

345. (1860) Cours familier de littérature. IX « LIIe entretien. Littérature politique. Machiavel » pp. 241-320

Ses anciens amis sont éloignés, les cours qu’il a fréquentées l’ont oublié ; les Médicis, quoique pleins d’estime pour lui, le regardent avec une certaine déplaisance ; ils craignent même les services d’un citoyen dont le mérite domine de trop haut les autres citoyens. […] Comme on sent, quelques lignes plus loin, l’homme qui a le sentiment de sa supériorité sur ses contemporains, de son égalité de niveau avec les plus hauts caractères et les plus vastes intelligences de l’antiquité ! […] Il était né à Florence d’une haute lignée étrusque et féodale, les Machiavelli. […] Machiavel en sortit comme on sort d’une école de haute intrigue et de crimes habiles (s’il y eut jamais habileté dans le crime). […] Doué d’un grand courage et d’une haute ambition, il ne pouvait se conduire autrement.

346. (1886) Revue wagnérienne. Tome I « Paris, 8 novembre 1885. »

Ils confièrent ces saintes reliques, source des plus hautes vertus chevaleresques, à un pieux chevalier du nom de Titurel. […] Une fois séduits, amollis, ils sont perdus pour le Graal et ses hautes missions. […] Nous sommes au château de perdition, dans l’intérieur d’une tour ouverte par le haut. […] Les cloches byzantines retentissent de nouveau, au haut de la montagne. […] Aux accents d’un chœur mystique, une colombe blanche et lumineuse descend du haut de la coupole et vient planer sur le Saint-Graal.

347. (1855) Préface des Chants modernes pp. 1-39

Quand les hommes forts de notre race ont paru dans la foule, quand Victor Hugo, Lamartine, Auguste Barbier, Alfred de Vigny, Balzac ont parlé, il s’est fait tout à coup un grand silence autour d’eux ; on a recueilli religieusement chacune de leurs paroles, on a battu des mains, et, d’un seul élan, on les a placés si haut que nul encore de nos jours n’a pu les atteindre. […] Un jour, un homme sérieux, un grand poëte, l’écrivain le plus sincèrement probe peut-être de la littérature moderne ; le frère intelligent qui, dans ses romans, dans ses poésies, dans ses drames, dans ses nouvelles, dans ses préfaces, a toujours tenu haut sa bannière, a toujours combattu pour la race sacrée des poëtes à laquelle il appartient autant que qui que ce soit, M.  […] M. de Vigny est toujours aussi haut dans l’estime publique ; ses livres sont restés, restent et resteront ; son nom nous semble destiné à ne point périr. […] Par suite d’un dédain condamnable, mais naturel aux hommes perdus dans les hautes contemplations, les savants semblent avoir fait de grands efforts pour rendre leurs œuvres inabordables ou tout au moins inintelligibles. […] Et, puisque nous venons de faire allusion à M. de Lamartine, qu’il nous soit permis de dire ici que s’il est si cruellement repoussé, outragé, flagellé par ces apostats de toute politique, de toute religion, de toute croyance, de toute vaillance dont j’ai parlé plus haut, c’est qu’il leur a donné en 1848 un exemple terrible de probité, de courage et de talent qu’ils ne lui ont jamais pardonné et qu’ils ne lui pardonneront jamais.

348. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — H — Haraucourt, Edmond (1857-1941) »

Leconte de Lisle L’Âme nue est un recueil de fort beaux poèmes où il a su exprimer de hautes conceptions en une langue noble et correcte, et prouver qu’il possédait, dans une parfaite concordance, un sens philosophique très averti, uni au sentiment de la nature et à celui du grand art. […] Haraucourt les revêt d’une forme très haute et très fière.

349. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre deuxième. Les mœurs et les caractères. — Chapitre II. La vie de salon. »

— « Sire, disait à Louis XVI le maréchal de Richelieu, témoin des trois règnes, sous Louis XIV, on n’osait dire mot ; sous Louis XV, on parlait tout bas ; sous Votre Majesté, on parle tout haut. » — Si l’autorité y perd, la société y gagne ; l’étiquette, insensiblement relâchée, laisse entrer l’aisance et l’agrément. […] Une fillette de six ans est serrée dans un corps de baleine ; son vaste panier soutient une robe couverte de guirlandes ; elle porte sur la tête un savant échafaudage de faux cheveux, de coussins et de nœuds, rattaché par des épingles, couronné par des plumes, et tellement haut que souvent « le menton est à mi-chemin des pieds » ; parfois on lui met du rouge. […] Lorsque Louis XV, ayant exilé le Parlement, fit dire tout haut par Mme du Barry que son parti était pris et qu’il ne changerait jamais : « Ah ! […] Lisez plutôt ce haut fait de Mme de Lauzun à Chanteloup : « Savez-vous, écrit l’abbé, que personne ne possède à un plus haut degré une qualité que vous ne lui connaissez pas, celle de faire les œufs brouillés ? […] Coulomb), passim. — Piron étant inquiété pour son Ode à Priape, le président Bouhier, « homme de haute et fine érudition et le moins gourmé des doctes », fit venir le jeune homme et lui dit : « Vous êtes un imprudent ; si l’on vous presse trop fort pour savoir l’auteur du délit, vous direz que c’est moi ».

350. (1859) Cours familier de littérature. VII « XXXVIIIe entretien. Littérature dramatique de l’Allemagne. Le drame de Faust par Goethe » pp. 81-160

On trouve les premières prédispositions de l’enfant à la rêverie, maladie féconde des grandes imaginations, dans la description de la chambre haute où son père lui faisait étudier ses leçons. […] Les hautes sociétés de Francfort recherchèrent ce beau jeune homme, obscur de près dans leur bourgeoisie, rayonnant au loin sur toute l’Europe. […] La scène représente une chambre haute dans un vieux château gothique des siècles de féodalité. […] Tourne maintenant, du haut de ces sommets, les regards vers la ville ; hors de la sombre porte, toute une foule variée se penche ; chacun veut s’ensoleiller aujourd’hui. […] Ici Goethe s’étend dans ses pensées aussi loin que l’espace et s’élève aussi haut que les étoiles.

351. (1868) Cours familier de littérature. XXV « CXLVIe entretien. Ossian fils de Fingal, (suite) »

Les jeunes gens se précipitent du haut des montagnes, et, marchant d’un air égaré, tremblent pour leur chef. […] « Penchez-vous du haut de vos nuages, disait Crimoïna, ancêtres de Dargo. […] Est-il prouvé que les pasteurs écossais des hautes montagnes, race solitaire et méditative, chantent jusqu’à aujourd’hui des fragments obscurs où se retrouvent des parties du chant d’Ossian et de ses bardes ? […] Ombres chéries, répondez-moi du haut de vos rochers, du haut de vos montagnes ; ne craignez point de m’effrayer. […] Un coup de vent fond tout à coup du haut de la colline sur les flots.

352. (1880) Les deux masques. Première série. I, Les antiques. Eschyle : tragédie-comédie. « Chapitre VII, seconde guerre médique. »

Vois comme elle lance toujours ses traits sur les hautes demeures et sur les grands arbres. […] Il lui apparut sous la forme d’un homme de haute taille, le visage empreint d’une majesté sévère, et lui ordonna de poursuivre l’expédition projetée, sous peine d’être châtié par les dieux. […] On découvrit que l’olivier de Pallas, brûlé jusqu’aux racines par l’incendie de la veille, avait poussé dans la nuit un rejeton haut d’une coudée. […] Une chouette, qui vint s’abattre sur le haut d’un mat, parut à tous la figure ailée de Pallas donnant le signal. […] Mardonios tomba sous le coup d’épée d’un Spartiate, du haut cheval blanc qui le dressait au centre des mille guerriers de sa garde.

353. (1894) Textes critiques

Encore que j’aime plus au théâtre le déroulement du rêve en banderolles mauves ou fils de Vierge que la marche échiquière de thèses dont nulle n’est ni ne peut être neuve, chacune est trop asymptote à sa Réalisation pour que Gerhart Hauptmann ne nous ait pas donné, au lieu de la tabletterie redoutée, une pièce de très haut Idéalisme, touchant plus même que l’Ennemi du Peuple, parce que plus près de nous. […] Peut-être dans le silence attentif, lui qui fit l’éloge au début de la soirée du chant de la Douleur, les eût-ils récités vraiment magiques, avec sa face de Christ longue comme une main de saint, haut et noir sur la scène vide sauf la floraison des pupitres crucifères. […] A coté de Hilde, le personnage épisodiquement nécessaire de Raïa Polsi, âme admirante de maître Solness, mais de Solness quel qu’il soit, sans le piédestal d’une haute tour, — en la grâce de Mlle Bady. […] Ce n’est pourtant pas la terre ni ses pieds que voyait le Christ du haut des clous de la Croix. […] Jésus mort repose sur l’herbe, le haut du corps soutenu par Joseph d’Arimathie ; la Vierge11, stupide de douleur, s’est pris le visage dans les mains et regarde son fils ; la tête du Mauvais Larron, du haut de la croix, semble un soleil noir.

354. (1767) Salon de 1767 « Peintures — La Grenée » pp. 90-121

Ils ont 4 piés de haut sur 2 piés et demi de large. […] La femme le retient par le haut de son vêtement. […] Tableau de 14 pouces de large, sur 11 pouces de haut. […] Tableau de 2 piés 2 pouces de large, sur 1 pié, 9 pouces de haut. […] Tableau ceintré de 9 piés 3 pouces de haut sur 4 piés, 11 pouces de large.

355. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Nouvelles lettres de Madame, mère du Régent, traduites par M. G. Brunet. — II. (Fin.) » pp. 62-79

J’ai une fois joliment repris un de nos ducs ; comme il se mettait à la table du roi, devant le prince de Deux-Ponts, je dis tout haut. : « D’où vient que M. le duc de Saint-Simon presse tant le prince de Deux-Ponts ? […] Un goût plus noble était celui des médailles, que Madame avait à un haut degré ; elle en recueillait de toutes parts, et c’était lui faire le plus délicatement sa cour que de lui en offrir. […] Cette suite d’empereurs du haut et du bas Empire, qu’elle recueillit avec choix, qu’elle arrangea avec soin, lui remettait tout d’un coup sous les yeux ce qu’il y a eu de plus respectable dans les siècles passés. […] — Je ne sais si, en formant son cabinet de médailles, Madame avait une vue si haute et si sévère ; du moins, par ce plus remarquable de ses goûts, elle se montrait bien la mère du Régent, c’est-à-dire du plus brillant et du plus instruit des amateurs. […] Elle remarquait en mère que, si l’on criait bien haut contre Law, on ne criait pas du moins contre le Régent.

356. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Œuvres complètes de Buffon, revues et annotées par M. Flourens. » pp. 55-73

Ajoutant ainsi continuellement à son acquis, à son fonds de comparaisons et d’idées, assouplissant et gouvernant avec une dignité de plus en plus aisée sa noble manière, semblant justifier en lui cette définition, que le génie (une haute intelligence étant supposée comme condition première), c’est la patience, il est arrivé, sur les plus grands sujets qu’il soit donné à l’œil humain d’embrasser, à la plénitude de son talent de peintre et d’écrivain. […] Ainsi parle Linné : et, en regard, il nous faut voir Buffon seul en été à six heures du matin, à Montbard, montant de terrasse en terrasse et en ouvrant les grilles qui fermaient chaque suite de degrés, arrivant ainsi d’un pas seigneurial jusqu’au cabinet d’étude à l’extrémité de ses jardins, et n’en sortant que pour se promener lentement, la tête pleine de conceptions, dans les hautes allées d’alentour, où nul n’oserait le venir troubler. […] tout le monde verrait et jugerait ; peut-être, au grand jour, l’impression serait autre et se réduirait ; peut-être Buffon, qui se réservait aux grandes choses et qui ne montait son imagination et son talent qu’à haute fin, n’est-il coupable que d’avoir écrit des lettres trop ordinaires. […] Isidore Geoffroy-Saint-Hilaire : L’admiration des naturalistes doit tendre plus haut. […] Je considérais l’autre jour, au musée du Louvre, le buste de Buffon, par Augustin Pajou : il y est représenté déjà vieux ; le contour de l’œil, les tempes ridées et un peu amaigries le disent : mais c’est une belle tête, digne, haute, noblement portée.

357. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Œuvres de Voiture. Lettres et poésies, nouvelle édition revue, augmentée et annotée par M. Ubicini. 2 vol. in-18 (Paris, Charpentier). » pp. 192-209

C’était le moment où Balzac, de quatre ans plus âgé que Voiture, atteignait par la publication de ses lettres (1624) à cette haute réputation d’éloquence et de beau style qu’il conserva et maintint pendant toute sa vie. […] Ce que je puis vous dire, mademoiselle, c’est que jamais personne ne fut si haut que moi, et que je ne croyais pas que la Fortune me dût jamais tant élever. À tous coups ils me perdaient de vue et m’envoyaient plus haut que les aigles ne peuvent monter, etc. […] Voiture a-t-il été réellement berné, c’est-à-dire lancé sur une couverture, ce qui serait à la rigueur possible, ces sortes de mystifications et de plaisanteries étant assez fréquentes alors dans cette haute société ? […] Mais vous m’apprîtes qu’il n’y avait rien en votre personne ni à l’entour que vous ne connussiez avec une clarté merveilleuse, et que voyant à deux pas de vous la prison et la mort, et tant d’autres accidents qui vous menaçaient, et, d’autre côté, les honneurs, la gloire et les plus hautes récompenses, vous regardiez tout cela sans agitation et voyiez des raisons de ne pas trop envier les unes et de ne point craindre les autres.

358. (1867) Nouveaux lundis. Tome VII « Anthologie grecque traduite pour la première fois en français, et de la question des anciens et des modernes, (suite et fin.) »

Celui-ci est un vrai philosophe ; il connaît l’Antiquité, et il a puisé à ses plus hautes sources. […] Mais il insista pour que je demeurasse, disant que cela ne servirait en rien à prolonger sa vie que de négliger un devoir. » Et à l’instant, lord Granville se mit à réciter en grec les vers d’Homère, ces mêmes paroles généreuses de Sarpédon à Glaucus, ayant soin d’élever la voix et d’appuyer avec une certaine emphase orgueilleuse sur ce vers qui lui rappelait la haute part qu’il avait prise aux affaires publiques : « Tu ne me verrais point combattre moi-même comme je le fais, au premier rang. […] Louis Ménard17, a de plus hautes visées et une ambition plus originale ; c’est proprement l’adversaire de M.  […] Après avoir parlé de la race née aux confins de la terre des monstres, dans la limoneuse vallée du Nil, et de l’autre race dite sémitique, habitante du désert et de l’antique Arabie, après les avoir définies l’une et l’autre, et les avoir montrées fléchissant de respect et de superstitieuse terreur, ou comme anéanties sous la main souveraine en face d’un ciel d’airain, il ajoute, par un vivant contraste, en leur opposant la race aryenne venue du haut berceau de l’Asie, et de laquelle est sortie à certain jour et s’est détachée la branche hellénique, le rameau d’or : « Une autre race encore s’éveille sur les hauteurs, aux premières lueurs du matin ; les yeux au ciel, elle suit pas à pas la marche de l’aurore, elle s’enivre de ce mobile et merveilleux spectacle du jour naissant ; elle mêle une note humaine à cette immense symphonie, un chant d’admiration, de reconnaissance et d’amour ; c’est la race pure des Aryas ; leur première langue est la poésie ; leurs premiers Dieux, les aspects changeants du jour, les formes multiples de la sainte lumière. […] Par Agathias (Hist.V) nous savons que Paul, « issu de parents haut placés et riche fils de « famille, s’était de bonne heure livré à l’étude et à l’éloquence, et par « son mérite personnel avait accru la renommée qui s’attachait à « son origine. » — Par Paul (Anthologie), nous savons qu’Agathias était légiste ; par Michel Scholasticus (ibid), qu’il cultivait l’éloquence comme son ami.

359. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « Entretiens sur l’histoire, — Antiquité et Moyen Âge — Par M. J. Zeller. (Suite et fin.) »

Du haut plateau de l’Asie sont venues successivement et par essaims des races, des branches de races qui ont fondé dans les plaines et les vallées propices les premiers grands empires, ou qui les ont détruits pour en élever d’autres également passagers et périssables. Cependant, dès la plus haute antiquité, un climat plus fixe, une contrée plus stable et mieux défendue ont permis à un empire plus durable que les autres de s’asseoir et de se perpétuer sans trop de révolutions. […] « Les déserts ou les steppes, les montagnes même qui avoisinent ce beau pays, et surtout le vaste plateau de l’Iran, y amènent l’ennemi plus facilement encore qu’ils ne l’en défendent. » La première et la plus pure des religions de la haute Asie, la religion de Zoroastre, dans sa sincérité primitive et avant sa corruption, est esquissée en traits généraux qui la font respecter et donnent envie de la mieux connaître. […] La position de l’Italie, au centre du bassin de la Méditerranée, sur les bords de laquelle se groupe toute la civilisation antique, lui assure aussi dans les temps anciens une plus haute fortune. » Il y a beau jour que ces fonctions propres et spéciales aux divers pays dans leur originalité première sont épuisées. […] Un jour ou l’autre, de gré ou de force, par composition ou de haute lutte, par la porte ou par la brèche, on entre, on est entré, on prend possession.

360. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « DIX ANS APRÈS EN LITTÉRATURE. » pp. 472-494

Si une conciliation entre toutes les parties généreuses et saines peut sembler possible au sein de la littérature moderne, c’est surtout en contemplant celle qui s’est faite avec les années dans ce haut esprit de plus en plus étendu, attentif et accueillant. […] Ils ont, en un sens, passé toutes les espérances et aussi laissé derrière eux toutes les craintes ; tous les hasards d’idées déchaînées dans les hautes régions ont soufflé en eux à pleines voiles, et les ont fait vibrer sur toutes les cordes selon leur mode particulier de véhémence ou d’harmonie. […] Si la noble, accueillante et expansive nature de M. de Lamartine, et qui semblait tellement faite pour être de celles qui concilient, a manqué jusqu’ici à ce rôle par une trop grande facilité d’ouverture et d’abandon, une autre nature bien haute de talent s’y est refusée par une roideur singulière que rien n’a fléchie. […] Dans ces hautes influences philosophiques qu’il ne se refuse pas, il est, par rapport à tous, une simple précaution à garder : c’est de songer parfois à ceux qui sondent à d’autres points la sphère infinie, ou qui même, lassés, ne la sondent plus, et de se rappeler aussi que l’actuel espoir, l’impétueux désir des fortes âmes n’est pas le but trouvé. […] Est-ce donc se montrer naïf que de s’y adresser tout haut et d’y croire ?

361. (1911) La valeur de la science « Troisième partie : La valeur objective de la science — Chapitre XI. La Science et la Réalité. »

Nous retombons donc toujours sur ce même processus que nous avons analysé plus haut, et si l’humanité venait à découvrir quelque chose dans ce genre, elle ne dirait pas que ce sont les lois qui ont évolué, mais les circonstances qui se sont modifiées. […] Les lois expérimentales ne sont qu’approchées, et si quelques-unes nous apparaissent comme exactes, c’est que nous les avons artificiellement transformées en ce que j’ai appelé plus haut un principe. […] Pour comprendre le sens de cette nouvelle question, il faut se reporter à ce que nous avons dit plus haut sur les conditions de l’objectivité. […] Quant à moi, je crois qu’ils ont raison, et, par exemple, j’ai montré plus haut quelle est la haute valeur des faits astronomiques, non parce qu’ils sont susceptibles d’applications pratiques, mais parce qu’ils sont les plus instructifs de tous.

362. (1864) William Shakespeare « Deuxième partie — Livre III. Zoïle aussi éternel qu’Homère »

Il est fou, il monte trop haut ! […] Rien n’est trop haut pour eux, et rien n’est trop bas. […] Les rhétoriques, inquiètes des contagions et des pestes qui sont dans le génie, recommandent avec une haute raison, que nous avons louée, la tempérance, la modération, le « bon sens », l’art de se borner, les écrivains expurgés, émondés, taillés, réglés, le culte des qualités que les malveillants appellent négatives, la continence, l’abstinence, Joseph, Scipion, les buveurs d’eau ; tout cela est excellent ; seulement il faut prévenir les jeunes élèves qu’à prendre ces sages préceptes trop au pied de la lettre on court risque de glorifier une chasteté d’eunuque. […] Ils ont tout à coup une haute douceur, aussi imprévue que le reste. […] Les hautes montagnes ont sur leur versant tous les climats, et les grands poëtes tous les styles.

363. (1912) Le vers libre pp. 5-41

Il y avait parmi eux des poètes en nombre mais aussi des orientalistes qui faisaient venir le mince fascicule jusqu’en des chancelleries d’Extrême-Orient et des jeunes hommes en le lisant se délassaient de la vue des cartons verts dans les ministères ; les autres vivaient à l’École normale ou s’intéressaient à notre effort entre deux cours des Hautes Études ou de la Sorbonne. […] Je ne veux pas dire non plus que parmi les tenants de la technique parnassienne il n’y avait pas, parmi les poètes encore dans la lutte, de très hauts talents. […] Que dit à propos des novateurs le contemporain s’il est sérieux, vaste, pondéré, décoré, employé dans le régime, ou ce qui revient au même, quelque chose dans la haute opposition ? […] C’est dans un haut dessein qu’il publie son erreur éphémère et le démenti qu’il se donne ; c’est pour que les poètes parnassiens (il ne s’adresse pas à d’autres) qui le liront, sachent qu’il faut obéir aux règles dans leur esprit et non dans leur lettre ; c’est pour leur faire comprendre qu’il n’est point de règles immuables, que demain peut toujours bouleverser hier. Son livre écrit de ce style diapré, qui rend la lecture de Banville si charmante à tout poète garde pour nous en dehors de sa séduction de forme une haute valeur ; pour deux raisons : d’abord pour cette affirmation de liberté, qu’il faut qu’un nouveau poète détruise des barrières que Victor Hugo a laissées debout et par un conseil vrai inclus dans son chapitre l’Inversion et ainsi lapidaire : il n’en faut jamais.

364. (1906) Les œuvres et les hommes. Poésie et poètes. XXIII « Alfred de Vigny »

Quant au livre en lui-même, c’est le premier effort dont nous parlions plus haut, et il n’a guères que le mérite d’un premier effort. […] Depuis Grandeur et servitude militaires, Vigny ne s’est donc pas élevé plus haut dans la prose. […] Il s’agit d’âme, et de la peine la plus haute d’une âme. […] Comme Sapho, du haut de son désespoir (le désespoir de Pascal, quel effrayant promontoire !) […] Maintenant que le Beaumanoir s’est démasqué, après son rude combat contre la vie, on n’a retrouvé au fond du masque que la noirceur du désespoir, et c’est là ce qui fera la physionomie d’Alfred de Vigny supérieure à celle de tous les poètes de son temps, qui n’ont pas souffert d’une blessure si haute et si profonde que lui.

365. (1898) L’esprit nouveau dans la vie artistique, sociale et religieuse « I — La banqueroute du préraphaélisme »

Ruskin avait dit, en 1843, au début de son œuvre : « Ils (les artistes) doivent aller à la nature en toute simplicité du cœur et marcher avec elle, obstinés et fidèles, n’ayant qu’une idée : pénétrer sa signification et rappeler son enseignement sans rien rejeter sans rien mépriser, sans rien choisir. »31‌ Quel enseignement plus haut et plus simple put jamais être donné ? […] Quelques-uns des principes de Ruskin sont d’une incontestable fausseté ; par exemple, celui-ci : « Le meilleur tableau, écrit-il33, est celui qui renferme le plus d’idées et les idées les plus hautes » A quoi il ajoute comme commentaire, que « les plus hautes idées sont celles qui tiennent le moins à la forme qui les revêt, et que la dignité d’une peinture, comme l’honneur dont elle est digne, s’élèvent exactement dans la même mesure où les conceptions qu’elle traduit en images sont indépendantes de la langue des images. […] Le portrait de femme par Burne-Jones, exposé au salon du Champ-de-Mars en 1896, celui auquel nous faisions allusion au début de cette étude, et qui présente tous les défauts de l’artiste poussés à leur plus haute puissance, fut l’objet, de la part d’un critique parisien37, d’un jugement cruel mais juste, que je prends plaisir a mentionner ici, en l’opposant aux louanges enthousiastes qui ont accablé l’artiste au cours de sa carrière : Hélas ! […] Encore une fois la haute idéalité humaine a fait banqueroute devant la simple nature, devant la plus humble feuille éclairée par le jour, devant le plus banal visage de la rue.

366. (1858) Du vrai, du beau et du bien (7e éd.) pp. -492

Il est vrai que nous parlons souvent sans lui et plus haut que lui. […] Corneille se tient toujours dans les régions les plus hautes. […] En général il manque un peu d’éclat et de coloris, mais il est au plus haut degré expressif. […] Sous ces hautes voûtes avaient été quelque temps suspendus les drapeaux espagnols conquis à Rocroy. […] Estimer, mépriser, locutions universelles, phénomènes certains, d’où une impartiale analyse peut tirer les plus hautes notions.

367. (1866) Cours familier de littérature. XXI « CXXIe entretien. Conversations de Goethe, par Eckermann (3e partie) » pp. 5-96

Mais Cicéron était un autre artiste dans sa tribune et dans ses œuvres philosophiques, et sa haute nature avait la gravité de son sujet dans ses admirables correspondances. […] un homme d’esprit railleur devant un génie inventeur, haut et profond comme la nature. […] Avant d’entrer dans la chambre, je l’entendis soupirer et parler tout haut. […] « Ces vers contiennent la clef du salut de Faust : dans Faust a vécu jusqu’à la fin une activité toujours plus haute, plus pure, et l’amour éternel est venu à son aide. […] Shakespeare seul est aussi vaste et aussi dramatique ; mais, bien qu’il s’étende plus large, il est loin de s’élever aussi haut.

368. (1896) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Sixième série « Figurines »

Car toute son œuvre donne, au plus haut point, l’idée d’un grand esprit et, à la fois, d’une âme mélancolique et tendre. […] Relisez les pages sur les deux extrémités du vieil ordre social, le peuple et la cour (« L’on parle d’une région… » etc., et « L’on voit certains animaux farouches… » etc.), et sur la guerre (« Petits hommes, hauts de six pieds… » etc.). […] Il a, au plus haut point, le sentiment de l’histoire. […] Intelligence haute et mélancolique  mélancolique d’être haute, et haute pour les mêmes raisons qui la font mélancolique  il ne paraît pas d’aplomb dans sa vie. […] Avec le talent il a, au plus haut point, le savoir-faire.

369. (1880) Les deux masques. Première série. I, Les antiques. Eschyle : tragédie-comédie. « Chapitre X, Prométhée enchaîné »

Déjà une fois, lorsque je voulais te défendre, il me saisit par un pied, et me lança du haut des demeures divines. […] Alors le Titan eut pitié de cette race maudite, dont il pressentait les hautes destinées. […] Comme d’autres dieux des hautes époques, Océanos avait été lentement abrogé par la désuétude. […] Une fonction plus haute encore, et tirée de son essence même, était dévolue à Hermès. […] Du haut de son rocher scythique, il propose, comme le sphinx de Thèbes, des énigmes que l’esprit humain scrute encore.

370. (1904) Les œuvres et les hommes. Romanciers d’hier et d’avant-hier. XIX « Paul Féval » pp. 107-174

… Demande que la Critique a bien le droit de lui adresser avec sympathie, mais derrière laquelle s’élève une autre question, bien plus générale et bien plus haute que la personnalité littéraire, quelle qu’elle soit, de Féval. […] Au fond, ce n’est qu’un roman d’aventures, enté sur une idée superstitieuse que la haute raison des temps modernes a pu fouler de son pied superbe, mais n’a pas arrachée encore de l’esprit humain, qui impertinemment lui résiste. […] J’ai parlé plus haut de lui, et je n’ai montré que le Brucker intellectuel et la note la plus élevée et la plus grave de sa prodigieuse intellectualité. […] Moi, je ne le connus que longtemps après sa jeunesse passée… Parfois, sa haute taille abandonnée se redressait tout à coup comme celle d’un soldat qui oublie sa blessure, et parfois aussi, du fond de lui, une corrosive odeur d’orgueil s’exhalait, malgré l’humiliation volontaire et sévère de sa vie. […] Même chrétiennement, en effet, l’auteur n’était pas tenu, après avoir constaté l’origine surnaturelle de son histoire, de creuser dans la source en remontant plus haut que cette source.

371. (1925) Les écrivains. Première série (1884-1894)

Il est la plus haute expression de l’amour, et l’amour c’est le rêve, le grand rêve poursuivi de l’humanité. […] Auguste Vitu, et auxquels feu Scribe doit sourire, du haut des cieux, sa demeure dernière. […] Jules Barbey d’Aurevilly était, non seulement un homme de grand talent, mais un homme de haut caractère. […] Quelle chute du haut de mes verbes révélateurs ! […] Autrefois, l’amour était, dans les œuvres dites « d’imagination », l’exclusif privilège des hautes classes.

372. (1885) Préfaces tirées des Œuvres complètes de Victor Hugo « Préfaces des pièces de théâtre — Préface de « Cromwell » (1827) »

L’homme, se repliant sur lui-même en présence de ces hautes vicissitudes, commença à prendre en pitié l’humanité, à méditer sur les amères dérisions de la vie. […] Comme lui, la muse moderne verra les choses d’un coup d’œil plus haut et plus large. […] Tenons-nous-en aux faits rassemblés plus haut : complétons-les d’ailleurs par une observation importante. […] L’histoire n’a jamais caché plus haute leçon sous un drame plus haut. […] Il n’est pas de hautes montagnes sans profonds précipices.

373. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — B — Bonnières, Robert de (1850-1905) »

Voisenon ni Boufflers — et peut-être faudrait-il remonter plus haut — n’auraient pas fait mieux. […] Sage modestie de n’écrire que pour une, louable orgueil de haut choisir sa lectrice.

374. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — B — Bourget, Paul (1852-1935) »

Auguste Dorchain Les Aveux (1882) dominent jusqu’ici de très haut l’œuvre poétique de Paul Bourget. […] Venu après de Musset et le grand Lamartine, traités si haut la main de négligés et d’incorrects par les brosseurs de rimes de ce temps, M. 

375. (1922) Nouvelles pages de critique et de doctrine. Tome I

Il avouait tout haut qu’il avait entendu faire dans ce livre un diagnostic social. […] Il est très haut. […] L’écrivain parle tout haut sa pensée, il prononce le nom d’Inès. […] Un égotiste peut être infiniment sensible, et Rousseau l’a été au plus haut degré. […] si vous aviez vu partir mes pauvres petits, la baïonnette haute, bien en ligne !

376. (1881) La parole intérieure. Essai de psychologie descriptive « Chapitre premier. Aperçu descriptif. — Histoire de la question »

La volonté ne développe et n’assouplit que des facultés naturelles : naturellement nous parlons tout haut, et naturellement aussi nous parlons en silence quand parler tout haut est inutile ou dangereux. […] I, passim ; Dissert., p. 247 ; p. 267, note ; et les passages (cités plus haut) relatifs aux sourds-muets. […] » Mais, d’abord, le fait est faux [voir plus haut, § 4 et 5] ; ensuite l’expérimentation proposée sur le nom de Socrate (« essayez de le penser sans vous figurer les caractères ») est récusable [ch. […] [Pour les références précises du Traité de psychologie rationnelle de Renouvier, voir plus haut note a p. 58. […] Max Müller : voir réf . plus haut de la trad.

377. (1870) Nouveaux lundis. Tome XII « La poésie »

messieurs les prélats, à commencer par le plus haut de tous, mêlons-nous donc chacun de ce qui nous regarde, et faisons chacun notre métier : ne parlons, s’il vous plaît, que de ce que nous savons. […] Villemain (ne l’oublions pas) a donné à son heure un autre grand signal de littérature élevée et tout historique, du haut de cette chaire de la Sorbonne qu’il fondait avec éclat, aujourd’hui, dans un cadre plus modeste, plus humble en apparence, quelque chose d’essentiellement neuf et utile, de particulièrement fécond et fructueux, s’inaugure aussi : le livre de M.  […] Paul Albert est la meilleure réponse à M. de Montpellier, et a plus haut que lui.

378. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — V — Vigny, Alfred de (1797-1863) »

Il se retira « dans sa tour d’ivoire », et là, sur le plus haut degré, l’œil baigné de ciel, il continuait son œuvre ; il écrivait les Destinées, poèmes philosophiques plus graves peut-être encore, plus sévères que les Poèmes antiques et modernes. […] Que l’esprit d’Alfred de Vigny se mesure à une plus haute douleur ! […] Ferdinand Brunetière Son inspiration toujours très haute et très noble — je ne dis pas très pure, ni très chaste — manque d’abondance et de facilité.

379. (1898) Le vers libre (préface de L’Archipel en fleurs) pp. 7-20

Alors, comme tu es beau, les Hautes Dames te jetteront des bonbons et les Hauts Bandits te feront boire une coupe de vin. […] Autour de cette maison, ils plantent un petit jardin, et ils jettent les hauts cris si quelqu’un, y avisant des fleurs qui lui plaisent pour leurs nuances et leur parfum, mais à son goût mal disposées, les loue en peu de termes tout en faisant ses réserves sur le style décoratif du jardin.

380. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre XVI. Mme de Saman »

Il le faut pour une raison plus haute que la personnalité d’une femme qui dénoue sa ceinture aux confidences, — à des confidences scandaleuses que, certes, personne ne lui demandait. […] Car tel il était ce prélat romain, ce froid pédant de haute futaie qui, s’il n’avait pas le respect de sa robe, en avait du moins l’ambition. […] Il est impossible de le présenter mieux au public comme une chose à soi, de mieux raconter cette liaison tout entière avec un homme qui tombe du haut de sa fierté et de son génie dans le plus bête de tous les amours !

381. (1868) Curiosités esthétiques « III. Le musée classique du bazar Bonne-Nouvelle » pp. 199-209

Pour s’élever si haut, nos rapins sont gens trop habiles, et savent trop bien peindre. […] Son admirable talent est toujours plus ou moins culbuté au milieu de ces cohues, où le public, étourdi et fatigué, subit la loi de celui qui crie le plus haut. […] Ne le raillez point de vouloir sortir de sa sphère, et aspirer, l’excellente créature, aux régions hautes.

382. (1870) Nouveaux lundis. Tome XII « Camille Jordan, et Madame de Staël »

… » Mais il n’avait pas mesuré son expression, et une telle parole, tombant du haut de la tribune, prête beaucoup trop à la déclamation des partis. […] Il fut appelé au pouvoir dans des jours de discorde, et il répondit dignement à sa haute mission ; d’une main ferme il contint les factions au-dedans, il vainquit les ennemis au-dehors, il dicta la paix, il commença la justice, il consola le malheur. […] Rien n’est si habile, rien n’est si éclairé qu’une haute conscience et un désintéressement complet de tout intérêt personnel. […] Il s’est fait catholique et me paraît dans la plus haute exaltation religieuse. — J’ai vu aussi M. de Chabot, ami de Matthieu, un jeune homme aimable et bon, passant aussi sa vie dans les églises. […] C’est une chose rare dans les temps actuels que d’avoir traversé tous ces orages sans se faire un ennemi, et d’être suivi dans sa retraite de l’affection de ses amis et de la haute estime des indifférents. — Ce M. de Norvins est certainement un homme d’esprit.

383. (1817) Cours analytique de littérature générale. Tome III pp. 5-336

Ces généralités concernent l’épopée essentiellement héroïque dont le ton est partout noble et grave : le poème héroï-comique, dont le ton se varie, n’exige pas de si hauts sujets. […] Elle doit être grande et noble dans l’épopée héroïque, c’est-à-dire intéresser les nations et toucher les plus hauts sentiments. […] « Son haut panache effraie un enfant qu’il caresse ; « C’est son fils qu’une épouse a remis dans ses bras. […] La petitesse de cette circonstance leur a paru indigne de la haute poésie. […] Cette déesse le transporte sur une haute montagne, qui est l’endroit le plus délicieux de l’île, et de là lui montre tous les royaumes de la terre, et lui prédit les destinées du Portugal.

384. (1896) Psychologie de l’attention (3e éd.)

À son plus haut degré, cet état produit l’immobilité temporaire des muscles. […] Elle ne peut agir sur un esprit borné et ignorant comme sur un esprit très cultivé et de haute volée. […] Toutefois même cette manière d’entendre cesse lorsque le ravissement est à son plus haut degré. […] À son plus haut degré, l’abolition même de la conscience est atteinte par son excès d’unité. […] Les formes les plus hautes, les plus délicates, les plus complexes, disparaissent les premières.

385. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — C — Cros, Charles (1842-1888) »

De la taille des plus hauts entre les écrivains de premier ordre, il a parfois sur eux ce quasi avantage et cette presque infériorité de se voir compris, mal, à la vérité, dans la plupart des cas, et c’est heureux et honorable, par des lecteurs d’ordinaire rebelles à telles œuvres de valeur exceptionnelle en art et en philosophie. […] Bien qu’il soit très soucieux du rythme et qu’il ait réussi à merveille de rares et précieux essais, on ne peut considérer en Cros un virtuose en versification, mais sa langue très ferme, qui dit haut et loin ce qu’elle veut dire, la sobriété de son verbe et de son discours, le choix toujours rare d’épithètes jamais oiseuses, des rimes excellentes sans l’excès odieux, constituent en lui un versificateur irréprochable qui laisse au thème toute sa grâce ingénue ou perverse.

386. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Seconde partie — Section 38, que les remarques des critiques ne font point abandonner la lecture des poëmes, et qu’on ne la quitte que pour lire des poëmes meilleurs » pp. 554-557

Qu’on s’éleve plus haut que Virgile et que ses pareils, non point comme ce roitelet qui se mit sur le dos de l’aigle pour prendre son essort quand l’oiseau de Jupiter seroit las, afin de pouvoir lui reprocher ensuite que ses aîles le portoient plus haut que lui.

387. (1902) Le critique mort jeune

Faguet estime sans doute plus haut les conceptions fortement liées. […] » Pour prouver les propositions que nous avons énoncées plus haut, M.  […] Bourget ait mis de la pitié dans ce cri de haute comédie. […] Grandeur d’âme et haute clairvoyance sont-elles séparables d’ailleurs ? […] Bordeaux estime avec raison la plus haute de toutes.

388. (1928) Quelques témoignages : hommes et idées. Tome II

Mais cette vision trop sommaire de l’humanité répugnait à sa fine et haute culture. […] Dans le haut de celle qui symbolise le Bon Gouvernement, quelles sont ces figures ailées ? […] Ces Français des hautes classes savaient admirablement mourir. […] La haute vie française se reconnaissait dans son œuvre. […] C’était leur défaut, cette démesure, mais elles étaient nobles et hautes.

389. (1904) Le collier des jours. Souvenirs de ma vie

C’était un carré de bois jaune, sans rideaux, dont la partie la plus haute, à jours, était formée de petits balustres. […] Mais, le regardant de haut, je demeurai grave et hostile. […] J’avais remarqué qu’il montait plus haut, et depuis longtemps je voulais savoir où il aboutissait. […] Très flattée d’être appelée à de si hautes fonctions, je m’engageai, sans hésiter, à être très sage. […] Il était à demi-agenouillé dans un fauteuil, du haut duquel il nous considéra quelques instants à travers son monocle.

390. (1884) Les problèmes de l’esthétique contemporaine pp. -257

Mais cette parfaite identité ne se montre pour ainsi dire qu’au plus haut degré de l’échelle. […] Les grandes œuvres d’art s’élèvent les unes à côté des autres, comme de hautes cimes, sans jamais pouvoir écraser et recouvrir celles qui se sont dressées les premières. […] En un mot, la poésie la plus haute a-t-elle besoin de la versification ? […] Lefèvre, etc., etc., ou en remontant plus haut, Sainte-Beuve, Th. […] Sur la couleur dans la poésie, voir plus haut, p. 81.

391. (1894) La bataille littéraire. Sixième série (1891-1892) pp. 1-368

ne lis pas tout haut cette phrase-là, je t’en supplie. […] Est-ce parce qu’ils planent trop haut ou parce qu’ils croupissent trop bas ? […] À gauche et adroite, des tapisseries de haute lice. […] Un historien de haute valeur, M.  […] Il n’y avait ni haut ni bas dans cet état de paix profonde.

392. (1817) Cours analytique de littérature générale. Tome IV pp. 5-

J’invoque votre appui ; car je navigue en haute mer sous des vents ennemis, et si vous ne m’assistez, je crains bien que mon frêle esquif ne soit près de s’engloutir. […] Comme elle témoigne en effet que les sources du suprême génie ne découlent que des hauts degrés de la vertu ! […] Il démontre avec chaleur que le plus remarquable principe des hautes inspirations de Camoëns, fut l’amour brûlant de la patrie et de la vraie gloire. […] Toutes les idées du Télémaque entreraient dans la haute poésie, en recevant ses formes ; mais la moitié des paroles qui les rendent la dégraderaient, en se mêlant à son élégante noblesse. […] Les chefs se bravaient, du haut de leurs chars, en saisissant le javelot ou la lance, et en franchissant l’espace qui les séparait.

393. (1890) L’avenir de la science « A. M. Eugène Burnouf. Membre de l’Institut, professeur au Collège de France. »

En écoutant vos leçons sur la plus belle des langues et des littératures du monde primitif, j’ai rencontré la réalisation de ce qu’auparavant je n’avais fait que rêver : la science devenant la philosophie et les plus hauts résultats sortant de la plus scrupuleuse analyse des détails. […] J’ai l’honneur d’être, Monsieur, avec la plus haute admiration,   Votre élève respectueux,Ernest Renan.

394. (1890) L’avenir de la science « III » pp. 129-135

Ainsi ceux qui pensent que la spéculation métaphysique, la raison pure, peut, sans l’étude pragmatique de ce qui est, donner les hautes vérités, doivent nécessairement mépriser ce qui n’est à leurs yeux qu’un bagage inutile, une surcharge embarrassante pour l’esprit. […] Enfin ceux qui pensent que l’esprit humain ne peut atteindre les hautes vérités et qu’une autorité supérieure s’est chargée de les lui révéler détruisent également la science, en lui enlevant ce qui fait sa vie et sa valeur véritable. […] Mais, si on s’élève plus haut, quel étrange spectacle qu’un homme qui, en possession d’une des plus vastes éruditions des temps modernes, n’est jamais arrivé à une pensée de haute critique ! […] La critique n’a guère été conçue jusqu’ici que comme une épreuve dissolvante, une analyse détruisant la vie ; d’un point de vue plus avancé on comprendra que la haute critique n’est possible qu’à la condition du jeu complet de la nature humaine et que, réciproquement, le haut amour et la grande admiration ne sont possibles qu’à la condition de la critique. […] J’ai souvent songé que ce type (haute fierté intellectuelle, jointe aux faiblesses les plus féminines) pourrait servir de sujet à un roman psychologique.

395. (1887) Journal des Goncourt. Tome I (1851-1861) « Année 1860 » pp. 303-358

Oui, c’est ainsi que le critique parle de ce livre, la meilleure et la plus courageuse action de notre vie, ce livre qui ne fait si bas le bas des lettres que pour en faire le haut, plus haut et plus digne de respect. […] J’y vois l’inauguration du bon sens et de la raison pratique, la fin de toute chevalerie et de toute haute poésie en toutes choses. […] » Et aussitôt celui qui faisait le Garçon s’écriait tout haut, au milieu des passants : « Oui, c’est beau et la Saint-Barthélemy aussi, et les Dragonnades et l’Édit de Nantes, c’est beau aussi ! […] Le cercle pour le haut, le café pour le bas, voilà où aboutiront la société et le peuple… De là une impression de passer là-dedans, ainsi qu’un voyageur. […] Je regarde et je vois un homme de quarante ans, le haut du corps soulevé par des oreillers, un tricot brun mal boutonné sur la poitrine, les bras tendus hors du lit, la tête un peu de côté et renversée en arrière.

396. (1867) Cours familier de littérature. XXIII « cxxxviie entretien. Un intérieur ou les pèlerines de Renève »

Ces trois plateaux élevés qui les séparent, forment trois vallées hautes qui forcent à lever la tête pour les regarder ; on s’imagine voir les flots de la Méditerranée. […] Ces haltes toujours si fréquentes nous menèrent jusqu’au milieu de la soirée, et nous ne voyions toujours rien devant nous qu’une haute chaîne de montagnes, noire de forêts ; mais ni église, ni château, ni village ; cela nous trompa de route, monsieur. […] La première, précédée d’une haute terrasse, et dont les fenêtres s’ouvrant toutes grandes au soleil levant, laissaient entrer l’air dans toute la maison ; on entendait sortir un certain murmure qui est sourd, comme des enfants qui apprennent leurs leçons. […] Elles ne ressemblaient pas à des cours, mais à une forêt d’arbres de haute futaie et à de vieux vergers mal défrichés qui avaient laissé des troncs séculaires sur leurs ruines. […] XXIV Enfin, nous sortîmes sans pouvoir parler tout haut.

397. (1869) Cours familier de littérature. XXVIII « CLXVIe entretien. Biographie de Voltaire »

Son père était un des membres de la haute bourgeoisie de Paris. […] Sa mère, à l’époque de la naissance de ce fils, était liée d’amitié avec un seigneur napolitain de haute naissance qui avait été également lié avec la mère du duc de Richelieu, l’ami futur et inséparable de Voltaire. […] Elle tenait du roman par les aventures, de la conversation par la vivacité, de la critique par la clarté, de la comédie par les caractères, de l’érudition par la science des événements et des textes, de la philosophie par la haute moralité des conclusions et par le mépris pour les sottises humaines. […] Voltaire y trouverait, indépendamment de l’amitié d’un roi philosophe, la liberté de penser, le droit de penser tout haut devant son siècle, les honneurs de la cour auxquels il n’était pas insensible, une place de chambellan, une pension de vingt mille francs, un logement dans les palais du roi et l’intimité d’un homme supérieur à son trône. […] Il ne s’occupait que de ce qu’il appelait les honnêtes gens, l’élite pensant de la société ; sa philosophie, qu’il ne croyait jamais destinée à devenir populaire, était une sorte de maçonnerie du sens commun propre à relier seulement les hautes classes de la société.

398. (1856) Mémoires du duc de Saint-Simon pp. 5-63

L’effet du vin, par haut et bas, fut tel qu’on en fut en peine, et ne la désenivra point, tellement qu’il fallut la ramener en cet état à Versailles. […] De là une échelle immense, le roi au sommet, dans une gloire surhumaine, sorte de dieu foudroyant, si haut placé, et séparé du peuple par une si longue suite de si larges intervalles, qu’il n’y avait plus rien de commun entre lui et les vermisseaux prosternés dans la poussière, au-dessous des pieds de ses derniers valets. […] Un jour ayant vu une phrase injurieuse dans les Mémoires de la Rochefoucauld, « il se jeta sur une plume, et mit à la marge : L’auteur en a menti. » Il alla chez le libraire, et fit de même aux autres exemplaires ; les MM. de la Rochefoucauld crièrent : il parla plus haut qu’eux, et ils burent l’affront. — Aussi roide envers la cour, il était resté fidèle pendant la Fronde, par orgueil, repoussant les récompenses, prédisant que le danger passé on lui refuserait tout, chassant les envoyés d’Espagne avec menace de les jeter dans ses fossés s’ils revenaient, dédaigneusement superbe contre le temps présent, habitant de souvenir sous Louis XIII, « le roi des nobles », que jusqu’à la fin il appelait le roi son maître. […] Il l’a cru ; il se trompait ; ses regards, le pli de ses lèvres, le tremblement de ses mains, tout en lui criait tout haut son amour ou sa haine ; les yeux les moins clairvoyants le perçaient. […] « Harlay aux écoutes tremblait à chaque ordinaire de Bretagne, et respirait jusqu’au suivant. » La phrase file comme un homme qui glisse et vole effaré sur la pointe du pied. — Plus loin le style lyrique monte à ses plus hautes figures pour égaler la force des impressions.

399. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « MADAME DE KRÜDNER » pp. 382-410

Aujourd’hui, en abordant Mme de Krüdner sous son auréole mystique, dans sa blancheur nuageuse, dans la vague et blonde lumière d’où elle nous sourit, notre vue et notre conjecture se reportent d’abord bien au delà de notre siècle et des deux précédents : nous n’hésitons pas à la replacer plus haut. […] La haute noblesse du Nord était alors attirée par un attrait invincible vers Paris, vers cette Athènes des arts et des plaisirs. […] Le succès de Valérie fut prodigieux, en France et en Allemagne, dans la haute société. […] Qui a osé douter qu’il n’y ait là de hautes inspirations, et qui n’a dit avec l’Apôtre : « Les choses vieilles sont passées, voici que toutes choses sont faites nouvelles ?  […] L’espèce de triomphe de Mme de Krüdner au camp de Vertus marqua le plus haut point et, pour ainsi dire, le sommet lumineux de son influence.

400. (1886) Quelques écrivains français. Flaubert, Zola, Hugo, Goncourt, Huysmans, etc. « Victor Hugo » pp. 106-155

Mais dans tous les livres du poète aucun récit ne monte plus haut au sublime et au tragique que celui où Gwynplaine mené dans le caveau de la prison de Southwark aperçoit le spectacle misérable de Hardquannone soumis à la peine forte et dure. […] Victor Hugo sait faire du sublime, son génie atteint de plus hauts sommets encore dans toutes les scènes auxquelles se mêle un élément de mytère. […] Lazarus, dans sa monographie sur l’Esprit et le langage, montrent que nos mots sont abstraits et absolus Le mot « arbre » ne représente aucun arbre particulier, qui pourrait être de telle grandeur et de telle disposition, mais bien un vague ensemble de masse globulaire verte placée au haut d’un grand tronc gris-brun. […] Le mot, s’il ne contient que les attributs les plus généraux, les plus caractéristiques et les plus simples de l’objet qu’il désigne, les porte en lui poussés à leur plus haute puissance. […] Les mots ombre, antre, nuit, pris verbalement et portés à leur plus haute énergie, désignent des lieux ou des temps dans lesquels les sens de l’homme sont forcément inactifs, c’est-à-dire ne nous donnent plus aucun renseignement.

401. (1856) Cours familier de littérature. II « IXe entretien. Suite de l’aperçu préliminaire sur la prétendue décadence de la littérature française » pp. 161-216

On s’est souvent étonné, depuis que nous pensons tout haut dans ce siècle, de notre admiration continue et persévérante pour ce grand écrivain, si peu poète dans la grande acception du terme, et surtout si peu lyrique, si peu éloquent, si peu enthousiaste. […] C’est le style éloquent dans l’acception la plus haute du mot. […] Quand vous voyez une haute marée assiéger les falaises et surmonter les digues de l’Océan aux équinoxes d’automne, soyez sûrs que ce n’est pas la main d’un enfant qui a fait rouler un caillou de l’autre côté de l’Atlantique dans le bassin des mers, mais que c’est un grand vent ou un grand astre qui pèsent de tout leur poids invisible sur l’élément dont vous voyez les convulsions sans les comprendre. […] L’éloquence raisonnée ne va pas plus haut. […] L’assemblée constituante de 1848 n’avait pas reçu du temps et de la Providence les grandes nécessités d’initiation et de promulgation de principes de l’assemblée constituante de 1790, mais elle en avait le courage, le patriotisme, la haute raison, la vertu publique, souvent l’éloquence.

402. (1857) Cours familier de littérature. III « XVe entretien. Épisode » pp. 161-239

Je franchis rapidement la plaine déjà ondulée qui sépare les bords de la Saône de la chaîne des hautes montagnes noires derrière lesquelles se creuse la vallée de Saint-Point. […] Quelques brouillards sortaient, comme des fumées d’un feu de bûcherons, des gorges hautes entre les troncs des sapins ; ils flottaient un moment sur les prés en pente au bord des bois ; puis, aussitôt roulés par le vent en ballots légers de vapeurs, ils s’enlevaient, m’enveloppaient un moment d’une draperie transparente, et s’évaporaient en montant toujours, et en laissant quelques gouttes d’eau sur les crins de mon cheval. […] Dans ce pauvre homme je venais de reconnaître un des plus vieux coquetiers de ces montagnes, qui louait à notre mère des ânesses au printemps pour donner leur lait à ses pauvres femmes malades, qui lui servait de guide, d’écuyer pour promener ses enfants avec elle sur ces solitudes élevées, où elle voyait la nature de plus haut, et où elle adorait Dieu de plus près. […] Je le croyais couché depuis longues années sous une de ces pierres de granit couvertes de mousse, qui parsemaient comme des tombes son petit champ d’orge et de folle avoine autour de son haut chalet. […] Elle courut dire à la vieille servante, qui filait sa quenouille dans une chambre haute, que j’étais arrivé.

403. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Notes et éclaircissements. [Œuvres complètes, tome XIII] »

      C’est Condé qui, dans la carrière,       Entre pour la première fois ; C’est lui dont Bossuet peint la fougue guerrière, Couronnée à vingt ans par les plus hauts exploits. […] Où est maintenant cet éclat des plus hautes dignités ? […] Qui jamais est parvenu à une plus haute élévation ? […] Turenne n’étoit plus ; mais, rival de sa gloire, Villars, sous nos drapeaux, ramenoit la victoire, Et Denain avoit vu du haut de ses remparts L’Anglois épouvanté s’enfuir de toutes parts. […] Il nous a vendu cher ce brillant héritage, Quand, libre en son exil, rassuré par son âge, De son esprit fougueux l’essor indépendant Prit sur l’esprit du siècle un si haut ascendant.

404. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « Nouvelle correspondance inédite de M. de Tocqueville »

J’ai fait autrefois quelques réserves à son sujet, lorsqu’il m’a semblé qu’on voulait le porter un peu trop haut ; j’en ferai peut-être encore quelques-unes ; mais ce sera le plus souvent en me servant de ses paroles mêmes et toujours en rendant hommage à son mérite, à son caractère et à ses vertus. […] Remarquez-vous les résultats d’une haute civilisation ? […] C’est là la question. » On voit le mélange d’ambition et de modestie, la haute visée en même temps qu’une certaine méfiance de ses forces. […] Vous représentez, monsieur, un autre temps que le nôtre, des sentiments plus hauts, des idées, une société plus grandes. […] « Vous êtes bien heureux d’avoir vécu dans un temps où il fût possible de se proposer un but, et surtout un but haut placé.

405. (1894) Propos de littérature « Chapitre V » pp. 111-140

Mais l’instinct parle plus haut en l’auteur des Cygnes, au lieu que les poèmes véritablement spontanés forment l’exception dans l’œuvre de M. de Régnier. […] M. de Régnier est surtout un droit et pur artiste ; son vers a des lignes bien tracées, des couleurs transparentes et rares disposées avec justesse ; il démontre une grande probité d’écriture, un idéal d’art austère, la volonté d’un homme qui garde haute sa conscience. […] Vielé-Griffin alla comme eux vers la poésie du peuple pour les raisons que j’ai énumérées plus haut, et aussi, je l’ai fait pressentir en parlant de la technique, parce que la liberté d’allure de ces rythmes devait attirer sa spontanéité ennemie des règles imposées31. […] C’est un long geste, sans surprise, élevant par guirlandes de riches, somnifères et troublantes corolles bientôt nouées à notre front ; ou bien un doigt haut levé en un signe conduit nos yeux jusqu’à les perdre parmi les fondantes magies de l’horizon qui se déroule. […] Selon le précepte de Flaubert celle-ci se dérobe pour devenir cette « impersonnalité » haute et pure, où le poète laisse parler son œuvre plutôt qu’il ne parle lui-même. — Tandis que M. 

406. (1880) Les deux masques. Première série. I, Les antiques. Eschyle : tragédie-comédie. « Chapitre XIV, l’Orestie. — Agamemnon. »

Dans les batailles, il les dirige comme du haut d’un char, il les préside dans l’agora, comme du haut d’un trône, « Roi des rois », « Prince des peuples », sont les titres dont on le couronne. […] Ménélas, le racontant à Télémaque, dit que le « traître Égisthe » avait placé une sentinelle en vigie, sur un haut rocher, pour guetter le retour durci. […] Les vieillards écoutent ces accusations étouffées, ils entendent crier le sang répandu ; une parole terrible leur échappe : — « Je pressens un grand malheur embusqué dans l’ombre ; les Dieux ont l’œil sur ceux qui ont fait périr beaucoup d’hommes. » — Le Chœur est pourtant un sujet fidèle, il aime son roi et il le vénère ; mais une justice supérieure parle plus haut en lui que son affection. […] Bientôt cette voix fâcheuse importuna la cité ; une tradition rapporte qu’on enferma dans une tour la prophétesse de malheur, et que, du haut de sa prison, elle jetait toujours au vent son chant prophétique. […] Du haut de son malheur, Cassandre jette un regard désespéré sur la vie.

407. (1919) L’énergie spirituelle. Essais et conférences « Chapitre I. La conscience et la vie »

Trop souvent, quand il arrive devant le problème de l’origine, de la nature et de la destinée de l’homme, il passe outre pour se transporter à des questions qu’il juge plus hautes et d’où la solution de celle-là dépendrait . il spécule sur l’existence en général, sur le possible et sur le réel, sur le temps et sur l’espace, sur la spiritualité et sur la matérialité ; puis il descend, de degré en degré, à la conscience et à la vie, dont il voudrait pénétrer l’essence. […] Portés par une expérience de plus en plus vaste à des probabilités de plus en plus hautes, nous tendrions, comme à une limite, vers la certitude définitive. […] Le raisonnement par analogie ne donne jamais, je le veux bien, qu’une probabilité ; mais il y a une foule de cas où cette probabilité est assez haute pour équivaloir pratiquement à la certitude. […] Mais cette nécessité paraît expliquer les arrêts de la vie à telles ou telles formes déterminées, et non pas le mouvement qui porte l’organisation de plus en plus haut. […] pourquoi — si elle n’est pas entraînée par un élan, à travers des risques de plus en plus forts, vers une efficacité de Plus en plus haute ?

408. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Première partie. — Chapitre XI. »

Jamais la hardiesse de la lyre ne s’est élevée plus haut. […] Ce qui nous frappe seulement, d’après un débris conservé dans un reste de traduction latine, c’est que ce dernier Prométhée d’Eschyle présentait au plus haut degré une de ces péripéties, que réclame Aristote. […] Heureusement, vers la même époque, la poésie moderne, un moment si égarée par le dédain ou par la contrefaçon bizarre de l’antique, allait rentrer dans des voies plus hautes. […] Mais, à cette heure, comment quitter encore ce sublime Eschyle, d’une âme si haute, d’une imagination si forte, d’un langage si magnifique, grand jusqu’à l’excès, dit un ancien, et offrant le passage du cantique céleste et de la prophétie à l’entretien des hommes ? […] Mais l’ode était partout ; elle éclatait, à chaque nom célèbre couronné dans les jeux guerriers de la Grèce ; elle allait du continent aux îles, de Corinthe à Rhodes, de Syracuse à Lesbos : et, quand elle était tenue haute par le génie du poëte, en tout lieu retentissante, elle excitait sans cesse cette ardeur des âmes, cet amour de la vertu et de la gloire, cet enthousiasme de l’imagination, que deux fois dans l’année seulement, aux fêtes de Bacchus et de Minerve, le théâtre d’Athènes secouait sur la Grèce.

409. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « William Cowper, ou de la poésie domestique (I, II et III) — II » pp. 159-177

Il parle très haut, et quand nos deux pauvres petits rouges-gorges entendirent ce grand bruit, ils furent pris aussitôt d’une émulation de le surpasser. […] Newton une escapade et une fuite de son lièvre favori qui, un soir, pendant le souper, rompt son treillage, prend sa course à travers la ville, et qu’on ne parvient à rattraper qu’après toute une odyssée aventureuse, on lira une lettre très grave, très élevée, à une de ses nobles cousines qu’il n’avait pas vue depuis des années, qui avait été très belle, et à qui les hautes et sérieuses pensées étaient devenues familières. […] si haut qu’ils peuvent crier. […] À Edmonton, sa femme aimante, qui du haut d’un balcon l’aperçoit, s’étonne, fort de le voir chevaucher de la sorte : « Arrête, Gilpin ; te voilà arrivé ! […] Là, sur la levée, se tient fermement enraciné notre bouquet d’ormes favoris, que notre regard au passage n’oublie jamais, et qui servent de rideau à la cabane solitaire du berger ; tandis que loin, à travers et par-delà le courant qui de ses flots, comme d’un verre fondu, incruste la vallée, le terrain en pente recule jusque vers les nuages, déroulant dans sa variété infinie la grâce de ses nombreuses rangées de baies, la tour carrée, la haute flèche d’où le son joyeux de la cloche vient expirer en ondulant jusqu’à l’oreille qui l’écoute, des bosquets, des bruyères, et des villages fumant dans le lointain. — Ces scènes-là doivent être belles qui, vues chaque jour, plaisent chaque jour, et dont la nouveauté survit à l’habitude et au long examen des années.

410. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « Mlle Eugénie de Guérin et madame de Gasparin, (Suite et fin.) »

Ainsi l’on fait en Angleterre, en Amérique ; tous ceux et toutes celles qui se sentent une idée et qui croient avoir quelque chose à dire le disent tout haut, résolument, effrontément, et à leur manière : toutes les originalités sortent, et les singularités aussi. […] Devant un lever du soleil, devant la majesté des hauts lieux, je comprends Jean-Jacques, je comprends David et le Psalmiste, mais j’ai peine de là à me rabattre à une discussion sur le péché de Marguerite, ce péché irrémissible, celui de la désespérance en Dieu, et tout ce qui s’ensuit. […] Au fond Mme de Gasparin a beau faire, elle n’est pas contrite, elle n’est pas triste ; elle est bonne et compatit aux tristesses ; elle a l’âme noblement ambitieuse, altérée de vie, ayant soif de bonheur, jalouse de le conquérir pour le communiquer, pour le répandre autour d’elle ; c’est une vaillante, une infatigable qui chante son Excelsior en montant toujours le plus haut qu’elle peut sur la montagne. […] Dans le Berry on dit non pas le gros du jour, mais le haut du jour ; ce qui n’est pas moins expressif. […] l’abattement fait trop souvent courber ce front que je porte si haut !

411. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « THÉOPHILE GAUTIER (Les Grotesques.) » pp. 119-143

Est-ce pédantisme de relever de telles fautes lorsqu’elles fourmillent chez ceux qui traitent de si haut les pédants ? […] Sans prétendre nier en rien les rapports du physique avec le moral, il me semble que c’est ici abuser même de la physiologie ; la pensée de l’homme a coutume de siéger plus haut que dans l’abdomen, et Gall, non moins qu’Homère, la fait asseoir vers le milieu du front, au-dessus des sourcils, comme sur un trône. […] Cet épicuréisme, notez-le bien, caché assez souvent sous de grands airs de croyance et de religiosité, a été la plaie secrète de la poésie en ce temps-ci ; il s’étend plus loin qu’on ne croit, il a gagné et corrompu les plus hauts talents, et je n’en prétends exempter personne. […] mais en poésie, c’est la pensée et le sentiment qui restent le principal, qui gardent, pour ainsi dire, la haute main, tandis qu’en peinture la main-d’œuvre, au besoin, prend le dessus. — La quantité de noms célèbres que M. […] Parlant du poëme de la Pucelle, si vanté en son temps et non encore réhabilité du nôtre, Montesquieu disait : « On ne saurait croire jusqu’où est allée dans ce siècle la décadence de l’admiration. » En faisant intervenir ces autorités de haut bord, je crois montrer assez le cas sérieux que je fais du talent de M.

412. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Pensées, essais, maximes, et correspondance de M. Joubert. (2 vol.) » pp. 159-178

Ici ce n’est plus seulement du Platon, c’est du saint Augustin à haute dose et sans la liaison des idées. […] S’il en est ainsi pour nous déjà du style de Louis XIV, que sera-ce de celui de la haute Antiquité, et peut-on espérer d’y revenir ? […] Il sent qu’il n’est pas exempt de quelque subtilité, et il s’en excuse : « Souvent on ne peut-éviter de passer par le subtil pour s’élever et arriver au sublime, comme pour monter aux cieux il faut passer par les nuées. » Il s’élève souvent aux plus hautes idées, mais ce n’est jamais en suivant les grandes routes ; il a des sentiers qui échappent. […] Il avait à un trop haut degré le sentiment du parfait et du fini : Achever sa pensée ! […] Pourtant, si je ne m’abuse, et si je vois clair à de certains symptômes, le moment approche où sa haute renommée aura à supporter une de ces insurrections générales auxquelles n’échappent jamais, en fin de compte, les longues monarchies, les monarchies universelles.

413. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Le Livre des rois, par le poète persan Firdousi, publié et traduit par M. Jules Mohl. (3 vol. in-folio.) » pp. 332-350

C’est un grand signe qu’une civilisation est remise à flot quand aucun ralentissement ne se fait sentir dans ces hautes études, qui sont le luxe et comme la couronne de l’intelligence. […] Cependant, vers le temps où ce Turc, violent d’ailleurs et ambitieux, s’intéressait si fort à ces choses de l’esprit, et avant qu’il fût encore monté sur le trône, un homme, doué de génie par la nature, s’était senti poussé de lui-même à ces hautes pensées par une vocation puissante. […] Ferdousi n’a pas besoin d’avoir lu Horace ni Ovide pour dire les mêmes choses qu’eux, avec la haute conscience de sa force, et dans un sentiment plus poignant. […] Au reste, ce n’est point par un désir égoïste de vengeance qu’il écrit cette satire, c’est dans une pensée plus haute : Voici pourquoi j’écris ces vers puissants : c’est pour que le roi y prenne un conseil, qu’il connaisse dorénavant la puissance de la parole, qu’il réfléchisse sur l’avis que lui donne un vieillard, qu’il n’afflige plus d’autres poètes, et qu’il ait soin de son honneur ; car un poète blessé compose une satire, et elle reste jusqu’au jour de la résurrection. […] Le poète a eu raison de dire, au début de son livre, en le comparant à un haut cyprès : « Celui qui se tient sous un arbre puissant, sera garanti du mal par son ombre. » Ce sentiment de moralité profonde est égayé, chemin faisant, par des parties brillantes et légères, comme il convenait à un poète nourri dans le pays du pêcher et de la rose.

414. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Histoire du chancelier d’Aguesseau, par M. Boullée. (1848.) » pp. 407-427

On disait tout haut de lui à la Cour : « M. le procureur général est un séditieux. » Mandé un jour à Marly avec les autres membres du parquet, il crut que l’orage allait enfin éclater sur sa tête, et qu’il pourrait bien aller coucher le soir à la Bastille. […] M. de Valincour, en discutant avec d’Aguesseau, avait beaucoup de la méthode de Pascal, qui méprisait la raison, la poussait à outrance, et qui lui contestait de pouvoir trouver seule le commencement et l’ébauche des hautes vérités. […] Royer-Collard, celle de M. le duc de Broglie en législation, ou encore ces hautes idées de justice primordiale que l’ancien Portalis léguait à son fils. […] Quelques ordonnances que le chancelier d’Aguesseau a fait rendre dans l’exercice de sa longue magistrature ont été justement célébrées ; on s’accorde en même temps à dire qu’il est loin d’avoir réalisé en législation tout ce qu’il concevait d’utile, et qu’on aurait pu naturellement attendre de sa haute capacité et de ses lumières. […] Il avait, à titre de chancelier, la haute main sur la Librairie, et sur la littérature qui aspirait à se produire régulièrement ; cette direction, dépendante de sa charge, lui demeura jusqu’en novembre 1750, peu de mois avant sa mort.

415. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « De la poésie et des poètes en 1852. » pp. 380-400

M. de Laprade possède au plus haut degré ce qui manque trop à des poètes de ce temps, distingués, mais courts ; il a l’abondance, l’harmonie, le fleuve de l’expression ; il est en vers comme un Ballanche plus clair et sans bégayement, comme un Jouffroy qui aurait reçu le verbe de poésie. […] Jeune, mais déjà mûr, d’un esprit ferme et haut, nourri des études antiques et de la lecture familière des poètes grecs, il a su en combiner l’imitation avec une pensée philosophique plus avancée et avec un sentiment très présent de la nature. Sa Grèce à lui, c’est celle d’Alexandrie, comme pour M. de Laprade ; et M. de Lisle l’élargit encore et la reporte plus haut vers l’Orient. […] Puis, en souvenir d’elle Et de nos jours si doux sous l’aile maternelle, Avant de m’éloigner du jardin, je cueillis Les fleurs de mes amours, — une pervenche, un lis ; Du rosier couronné ployant la haute branche, J’y cueillis une rose, et c’était la plus blanche ; Et quand j’eus fait ainsi le bouquet de ma sœur, Je le baisai trois fois et le mis sur mon cœur. […] [NdA] Dans la Revue des deux mondes du 1er mars 1852, je lis, comme en réponse à mon vœu et à mon désir, une belle et large idylle de M. de Laprade, intitulée Les Deux Muses : l’amour y a sa part, bien que le culte de la nature y garde le dessus : selon moi, c’est son chef-d’œuvre, sa pièce la plus accessible et la plus sentie. — Il n’a guère persisté dans cette voie, il a continué de platoniser, d’évangéliser vaguement en vers, en même temps qu’il est quelque peu devenu (depuis surtout son entrée à l’Académie) un homme de coterie religieuse et politique. — Un critique de beaucoup de finesse, mais dont il faut détacher les mots piquants du milieu de bien des fatuités et des extravagances, Barbey d’Aurevilly, comparant un jour les dernières poésies de M. de Laprade avec celles d’un autre poète également moral et froid, concluait en disant : « Au moins, avec M. de Laprade, l’ennui tombe de plus haut. » C’est plus satirique que juste, mais le mot est lâché : l’écueil est là ; gare aux beaux vers qui sont ennuyeux !

416. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « La princesse des Ursins. Lettres de Mme de Maintenon et de la princesse des Ursins — I. » pp. 401-420

On peut juger des hauts cris. […] Le maréchal de Berwick, qui se tient au-dessus de toutes ces tracasseries odieuses, rend plus de justice à Orry, et tout porte le lecteur impartial à penser que Mme des Ursins était encore plus nette sur ce chapitre, et qu’elle se sentait, comme elle le dit, très dégagée dans sa taille : « Je suis gueuse, il est vrai, écrivait-elle à la maréchale de Noailles en entrant en Espagne, mais je suis encore plus fière. » Racontant plus tard à Mme de Maintenon les indignités de ce genre dont on les chargeait toutes deux, elle en parle avec un ton de haute ironie et de souverain mépris qui semble exclure toute feinte. […] C’est Saint-Simon qui nous le dit, et il lui rend toute justice d’ailleurs pour ses vives et hautes qualités. […] Dans les bals de Marly, elle paraissait haute, aisée, familière, lorgnant un chacun de sa lorgnette ; à l’un de ces bals, elle tenait un petit épagneul sous le bras, comme si elle eût été chez elle, et (ce qui fut encore plus remarqué) le roi caressa le petit chien à plusieurs reprises, quand il se retournait vers elle pour l’entretenir, et il le fit presque tout le soir. […] Puis, après avoir dit tout ce qu’elle a sur le cœur et s’être hardiment prononcée, elle s’efface dans un post-scriptum habile et rentre dans son rôle de femme avec une haute convenance.

417. (1889) Émile Augier (dossier nécrologique du Gaulois) pp. 1-2

D’intelligence forte et saine, ayant au plus haut degré la volonté du bien, il a mis son grand, son très grand talent, son impeccable probité littéraire au service des vertus de la classe moyenne. […] Tout l’œuvre du poète qui vient de mourir est inspiré par cette double pensée : relever, à ses propres yeux, le bourgeois défaillant et décadent par l’exemple des hautes vertus bourgeoises ; flétrir, comme on flétrissait la forfaiture d’un gentilhomme, les défaillances des bourgeois indignes d’être inscrits au livre d’or de la bourgeoisie. […] En dépit de ses révoltes, de ses constatations indignées, des soulèvements de son cœur et de son intelligence, ce bourgeois de haute culture, de grande honnêteté et de grande bonté, ménage encore les mauvais sujets de sa caste. […] Une conversation avec le curé de Croissy Nous avons dit plus haut que si Augier ne redoutait pas la mort, du moins il désirait en éviter les affres cruelles. […] Son caractère était égal à son talent, dont il avait l’énergique droiture et la haute honnêteté !

418. (1895) Les œuvres et les hommes. Journalistes et polémistes, chroniqueurs et pamphlétaires. XV « Xavier Aubryet » pp. 117-145

À l’heure où nous sommes, ces critiques, tout de sensation, tiennent le haut du pavé parmi nous. […] Il n’est donc pas étonnant que, dans un pareil état de choses, nous accueillions comme un bonheur et presque comme un événement dans la critique littéraire l’arrivée d’un jeune homme qui, lui, débute par regarder plus haut que la sensation et le fait, et se préoccupe de l’idée générale qu’exprime tout génie spécial et toute œuvre, quoique ce ne soit là cependant que la première marche de la critique dans la sphère de son intellectualité. […] Pas plus en style qu’en conception plus haute, Xavier Aubryet n’est un païen de ce temps, trop renouvelé des Grecs, et il l’a prouvé dans son Rossini ou le paganisme dans la musique. […] C’est un livre de littérature à côté de ce qu’il souffre et plus haut que sa personnalité. […] J’ai avancé plus haut que Xavier Aubryet avait des qualités, éminentes en critique ; mais il n’en a pas les qualités, qui coûtent tant à employer pour celui qui les a.

419. (1893) Les œuvres et les hommes. Littérature épistolaire. XIII « Prosper Mérimée »

Au milieu de ces truculents, de ces abondants, de ces sanguins, de ces pléthoriques, de ces hauts en graisse et en couleur, de ces tempéraments sulfureux, attaqué plus ou moins, la plupart, de satyriasis littéraire, il apparaît, lui, Mérimée, comme un saisissant contraste. […] car ces Lettres à une inconnue le disent assez haut et le prouvent, c’était par-dessus tout un Trissotin. […] mis très haut, sans contradiction d’aucune sorte. […] Stendhal, qu’il a imité et qu’il n’égala jamais d’aucune manière, Stendhal, qui s’était mêlé aux polémiques du temps et qui venait de publier son étrange chef-d’œuvre de Rouge et Noir, avait eu pour lui les bontés que le génie a pour le talent, mais l’homme qui travailla le plus, dans ce temps-là et depuis, à le faire célèbre, fut, nous l’avons dit plus haut, Gustave Planche, presque oublié maintenant, mais qui tenait alors, à la Revue des Deux-Mondes, le bâton haut d’une critique redoutée.

420. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « MADAME TASTU (Poésies nouvelles.) » pp. 158-176

… Ainsi quand ta voix si connue Revint hier me visiter, Je crus que du haut de la nue L’ancienne joie allait chanter. […] L’autre, en poussant trop haut jusqu’au char du tonnerre, S’est dans l’âme allumé quelque rêve étouffant. […] Sacrifice pénible et méritoire à l’âme, Non pas sur le haut mont, sous le ciel étoilé, D’un Isaac chéri, sans autel et sans flamme Chaque jour immolé ! […] Bien qu’il nous reporte vers un passé plus brillant, bien qu’il s’élève moins haut que la poétique apparition de la jeunesse, il vient dignement après, et honore le talent en même temps que la vie de celle qui peut si fermement se résigner et si délicatement se plaindre.

421. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « LA REVUE EN 1845. » pp. 257-274

Or c’est aussi ce que pardonne le moins la poésie, surtout quand elle se croit des droits de voisinage et de haut ressort. […] L’essentiel, le seul point que nous tenions à constater, et que le public peut-être voudra bien reconnaître avec nous, est celui-ci : Somme toute, et à travers les nombreux incidents d’une course déjà longue, la Revue a fait de constants et d’heureux efforts pour se fortifier, pour s’améliorer, et, depuis bien des années déjà, pour réparer par l’importance des travaux en haute politique, en critique philosophique et littéraire, en relations de voyages, en études et informations sérieuses de toutes sortes, ce qu’elle perdait peu à peu en caprice et en fantaisie, ce qu’elle ne perdait pas seule et ce que les premiers talents eux-mêmes, le plus souvent fatigués en même temps que renchéris, ne produisaient plus qu’assez imparfaitement. […] Qu’il y ait lieu, par instants, en littérature, à une critique d’allure tranchée, plus dogmatique et systématique, plus dirigée d’après une unité profonde de principes, nous ne le nions pas, et simplement, sans exclure de son à propos cette haute critique d’initiative, ce n’est point celle à laquelle la Revue d’ordinaire prétend. […] Ceux même qui parlent ainsi, et qui se plaignent si haut, ont oublié de quelle manière leurs œuvres dernières, celles qui restaient dignes de leur talent et de la scène, ont été examinées dans cette Revue, non point avec l’enthousiasme qu’ils eussent désiré peut-être, du moins avec une bienveillance et une sincérité d’intention incontestable84.

422. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « HOMÈRE. (L’Iliade, traduite par M. Eugène Bareste, et illustrée par M.e Lemud.) —  second article  » pp. 342-358

Qu’il y ait eu des épisodes intercalés, des scènes d’Olympe à tiroir, ménagées çà et là pour faire transition et relier entre elles quelques-unes des rhapsodies, c’est possible, et la sagacité conjecturale peut s’y exercer à plaisir et s’y confondre ; mais, sans prévention, on ne peut méconnaître non plus un grand ensemble et ne pas voir planer dans toute cette durée de l’action la haute figure du premier des héros, de celui qui agitait en songe et suscitait Alexandre. […] On en noterait, quoique ce soit l’exception, par lesquelles Homère a marqué son objet d’un seul trait, presque comme Dante : tantôt c’est un guerrier blessé qui tombe, précipité du haut d’une tour, la tête en avant, pareil à un plongeur ; tantôt c’est un autre qui, frappé au bas-ventre, tombe assis et reste gisant à terre comme un ver. […] Une haute et sérieuse bienséance règne par toute l’Iliade ; il n’y a pas un grain de Rabelais dans Homère. […] L’antiquité proprement dite remplit pour nous cet office excellent, et elle nous est comme le réservoir inaltérable des sources les plus hautes.

423. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « M. Rodolphe Topffer »

Calame, le sévère paysagiste, qui le premier abordait par son pinceau les hautes conquêtes alpestres tant rêvées par son ami, venait dîner les dimanches d’hiver avec lui ; entre ces deux hommes de franche nature, auxquels se joignait quelquefois M.  […] Ce qui redoublait son zèle en réjouissant son âme, c’était de voir que la nouvelle école de paysage, florissante à Genève, marchait hardiment dans cette voie dont il avait été, lui, comme un pionnier infatigable : cette haute couronne alpestre si belle de simplicité, de magnificence et de grandeur, il lui semblait qu’un art généreux, en la reproduisant, allait en doter deux fois sa patrie. […] Toutes les scènes qui se rapportent à la mort de Rosa sont d’une haute beauté morale ; il sera sensible à tout lecteur que celui qui les a si bien conçues et représentées travaillait, lui aussi, en vue du sujet même, c’est-à-dire du suprême instant et qu’il peignait d’après nature. […] En nous permettant, même en ce moment, cette libre critique, nous avons voulu témoigner l’entière sincérité de notre jugement et nous maintenir le droit de dire bien haut, comme nous nous plaisons à le faire, que l’histoire de Rosa et Gertrude est une des lectures les plus douces, les plus attachantes et les plus saines qui se puissent goûter.

424. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — G — Gautier, Théophile (1811-1872) »

Du haut des sombres marches, Du noir pont de l’abîme on entrevoit les arches ; Va ! […] Ton Olympe, tu vas le voir du haut du ciel, Tu vas, du haut du vrai, voir l’humaine chimère, Même celle de Job, même celle d’ […] Homère, Âme, et du haut de Dieu tu vas voir Jéhovah.

425. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre VI. Jean-Baptiste  Voyage de Jésus vers Jean et son séjour au désert de Judée  Il adopte le baptême de Jean. »

La retraite au désert devint ainsi la condition et le prélude des hautes destinées. […] On peut croire, en tout cas, que plusieurs des pratiques extérieures de Jean, des Esséniens 285 et des précepteurs spirituels juifs de ce temps venaient d’une influence récente du haut Orient. […] Nul doute qu’il ne fût possédé au plus haut degré de l’espérance messianique, et que son action principale ne fût en ce sens. « Faites pénitence, disait-il, car le royaume de Dieu approche 302. » Il annonçait une « grande colère », c’est-à-dire de terribles catastrophes qui allaient venir 303, et déclarait que la cognée était déjà à la racine de l’arbre, que l’arbre serait bientôt jeté au feu. […] Comme les anciens prophètes juifs, il était, au plus haut degré, frondeur des puissances établies 319.

426. (1885) Préfaces tirées des Œuvres complètes de Victor Hugo « Préfaces des pièces de théâtre — Préface du « Roi s’amuse » (1832) »

C’est ainsi qu’ils placeront haut la dignité de l’art. […] Nous épargnerons autant que possible à une personne haut placée les conséquences de cette étourderie de courtisans. […] Mais si l’on s’élève plus haut, on verra qu’il ne s’agit pas seulement dans cette affaire d’un drame et d’un poëte, mais, nous l’avons dit en commençant, que la liberté et la propriété sont toutes deux, sont tout entières engagées dans la question. Ce sont la de hauts et sérieux intérêts ; et, quoique l’auteur soit obligé d’entamer cette importante affaire par un simple procès commercial au Théâtre-Français, ne pouvant attaquer directement le ministère, barricadé derrière les fins de non-recevoir du conseil d’état, il espère que sa cause sera aux yeux de tous une grande cause, le jour où il se présentera à la barre du tribunal consulaire, avec la liberté à sa droite et la propriété à sa gauche.

427. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « M. de Sénancour — Oberman, édition nouvelle, 1833 »

Oberman est sourd, immobile, étouffé, replié sur lui, foudroyé sans éclair, profond plutôt que beau ; il ne se guérit pas, il ne finit pas ; il se prolonge et se traîne vers ses dernières années, plus calme, plus résigné, mais sans péripétie ni revanche éclatante ; cherchant quelque repos dans l’abstinence du sage, dans le silence, l’oubli et la haute sérénité des cieux.  […] Cet homme eut l’oppression des montagnes sur le cœur ; il en eut la noble infirmité et le chaos dans les hasards de ses délirants systèmes ; il en eut les contours et la virginité dans le galbe sans soleil de son style blanc et terne. » Mais c’est en entrant dans le Valais seulement que l’on comprend bien certaines descriptions désolées d’Oberman et ces contrées d’un amer abandon : le pays et le livre s’expliquent l’un par l’autre, et je me suis dit tout d’abord à cette vue : Et l’ombre des hauts monts l’a durement frappé ! Les expressions, les réminiscences d’Oberman s’appliquent à chaque pas. — Nous obéissons à une intention du vénérable auteur en rappelant formellement ici qu’il n’en est pas resté au système oppressé d’Oberman ; il s’est appliqué à s’en dégager sans relâche, à perfectionner, à mûrir ses Libres Méditations, et à y considérer la pensée religieuse indépendamment de tout dogme téméraire ; il ne vit depuis des années que dans ce haut espoir.)

428. (1874) Premiers lundis. Tome II « Quinze ans de haute police sous Napoléon. Témoignages historiques, par M. Desmarest, chef de cette partie pendant tout le Consulat et l’Empire »

Quinze ans de haute police sous Napoléon. […] Bonaparte rendit, au reste, justice à Georges, et l’admira ; il lui offrit un régiment de sa garde, dit-on, et de le faire un de ses aides de camp ; mais, au point où il en était venu, le poste d’honneur pour Georges ne pouvait être qu’en Grève, et la tête haute, il y marcha. […] Depuis Moscou, le mécontentement des hauts dignitaires de l’armée augmenta et se précisa même au point de se résoudre, durant la campagne de 1814, en un commencement de complot.

429. (1874) Premiers lundis. Tome II « Loève-Veimars. Le Népenthès, contes, nouvelles et critiques »

La ville où l’on séjourne a beau être embrouillée, inégale, tortueuse, sans ordre et sans plan, pleine de carrefours, de tréteaux de charlatans, de passages et de ruelles, de monuments inachevés dont les pierres encombrent les places, d’arcs de triomphe sans chars ni statues de vainqueurs, de clochers et de coupoles sans croix : quand le soleil est couché, quand, du haut des collines prochaines, le voyageur qui n’est pas entré dans cette ville et qui n’y a pas vécu, l’aperçoit à l’horizon dessinant sa silhouette déjà sombre sur le ciel encore rougi du couchant, il la voit toute différente ; il y distingue des étages naturels, des accidents dominants, des masses imposantes et combinées ; les édifices que la distance et l’obscurité achèvent et idéalisent à ses yeux, lui apparaissent selon des hauteurs bien diverses. […] C’est un peu là l’histoire de notre littérature et de l’effet qu’elle nous produit, à nous citadins et casaniers, et de l’effet, certainement différent, bien qu’impossible à déterminer, qu’elle produira sur nos neveux, voyageurs hâtés qui retourneront un moment vers nous leurs regards du haut de leurs collines. […] Dans un tel état d’incohérence, la critique a beau jeu ; elle s’évertue, elle triomphe ; sous prétexte de mettre le holà à droite ou à gauche, elle augmente souvent elle-même le tumulte ; elle prêche pour son saint, elle décrie, elle exalte ; elle parle bien haut et sans savoir toujours que dire, elle fait comme les avocats ou conseillers au parlement durant la fronde, attroupant le peuple autour d’eux sur le Pont-Neuf et l’embrouillant.

430. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre II. Enfance et jeunesse de Jésus. Ses premières impressions. »

L’horizon de la ville est étroit, mais si l’on monte quelque peu et que l’on atteigne le plateau fouetté d’une brise perpétuelle qui domine les plus hautes maisons, la perspective est splendide. […] Par une dépression entre la montagne de Sulem et le Thabor, s’entrevoient la vallée du Jourdain et les hautes plaines de la Pérée, qui forment du côté de l’est une ligne continue. […] Quant à Jean, il ne sait rien du voyage de Bethléhem ; pour lui, Jésus est simplement « de Nazareth » ou « Galiléen », dans deux circonstances où il eût été de la plus haute importance de rappeler sa naissance à Bethléhem (I, 45-46 ; VII, 41-42).

431. (1767) Salon de 1767 « Peintures — Madame Therbouche » pp. 250-254

Madame Therbouche Un homme, le verre à la main, éclairé d’une bougie. tableau de nuit, morceau de réception, de 3 pieds 6 pouces de haut, sur 3 pieds de large. […] Lorsque la tête fut faite, il était question du cou, et le haut de mon vêtement le cachait, ce qui dépitait un peu l’artiste. […] L’indigne prussienne prétend à présent que j’ai renversé sa fortune en la chassant de Paris au moment où elle touchait à la plus haute considération.

432. (1895) Les œuvres et les hommes. Journalistes et polémistes, chroniqueurs et pamphlétaires. XV « De Cormenin (Timon) » pp. 179-190

une anatomie vivante du pamphlet qui ressemble beaucoup moins à une analyse qu’à un hymne ; mais ce lyrisme en l’honneur du pamphlet, le discours écrit, prouve à quel point cette forme, qui chez lui a le caractère oratoire, mais qui n’est pas nécessairement oratoire, transportait et emportait haut sa pensée. […] C’est (encore par parenthèse) dans cette platée de rhétorique qui commence le Livre des Orateurs, que se trouve la poésie du pamphlet, dont nous parlions plus haut, ou plutôt sur le pamphlet, qui est la chimère, l’idéal, l’hippogriffe à équité de Cormenin. […] À ne le voir que dans les deux volumes qui vous font tomber de si haut, on peut affirmer que son talent ne fut que l’occasion prise, en passant, aux cheveux, et secouée, et que, comme tous ces talents qui ne furent que l’attrapement de l’occasion et le secouement de la circonstance, au bout d’un certain temps on ne devait plus le reconnaître.

433. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « XXIII. P. Enfantin »

Campée audacieusement à la tête d’une théorie comme l’aurait lancée Saint-Simon tout seul, ce gentilhomme impertinent et dépravé, qui se croyait sorti de la cuisse de Charlemagne, dont il descendait peut-être par Eginhart, cette idée dans sa crudité eût probablement révolté jusqu’aux vices d’un temps aussi admirablement couard que le nôtre, sans le travail de haute confusion et d’immense hypocrisie que vient lui faire subir M.  […] Son procédé, s’il est de bonne foi, ce dont il est d’ailleurs permis de douter, pour l’honneur de son intelligence, consiste à renverser la pyramide, mais en élargissant la pointe qui formait le haut et en en diminuant la base. […] … Mais elle ne s’est pas expliquée sur le compte d’un livre qui, selon nous, et pour des raisons plus hautes que le livre et ce qu’il contient, méritait d’être signalé.

434. (1880) Une maladie morale : le mal du siècle pp. 7-419

De quelle haute dignité, de quel comble de bonheur, je suis tombé parmi les hommes ! […] Lenz, cette victime de Werther, dont j’ai rappelé plus haut la fin tragique. […] Encore, cette pièce ne se distingue-t-elle pas par une haute originalité. […] C’est l’amour de soi ou l’égoïsme à son plus haut degré. […] On a vu plus haut que deux pièces de vers de M. 

435. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — C — Courteline, Georges (1858-1929) »

Il y a là un entremêlement de vers et de prose du plus haut comique, un chœur de déménageurs qui réapparaît comme un chœur antique, disant du ton le plus noble les choses qui le sont le moins : LE CŒUR DES DÉMÉNAGEURS Le temps passe, que rien ne saurait prolonger. […] (Haut) :                        Sur nos nuques et sur nos dos, Chargeons, Messieurs, chargeons les lourds fardeaux.

436. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Seconde partie. Poétique du Christianisme. — Livre second. Poésie dans ses rapports avec les hommes. Caractères. — Chapitre VII. Le Fils. — Gusman. »

Enfin Alvarez, commandant à son fils comme père, et lui obéissant comme sujet, est un de ces traits de haute morale, aussi supérieure à la morale des anciens que les Évangiles surpassent les dialogues de Platon, pour l’enseignement des vertus. […] Le poète a voulu faire reparaître ici la nature et le caractère orgueilleux de Gusman : l’intention dramatique est heureuse ; mais prise comme beauté absolue, le sentiment exprimé dans ce vers est bien petit, au milieu des hauts sentiments dont il est environné !

437. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Troisième partie. Beaux-arts et littérature. — Livre second. Philosophie. — Chapitre V. Moralistes. — La Bruyère. »

Il descend de la haute éloquence à la familiarité, et passe de la plaisanterie au raisonnement, sans jamais blesser le goût ni le lecteur. […] Nous croyons le voir s’attendant à trouver à chaque ligne quelque grande découverte de l’esprit humain, quelque haute pensée, peut-être même quelque fait historique auparavant inconnu, qui prouve invinciblement la fausseté du christianisme.

438. (1761) Salon de 1761 « Peinture — Vien » pp. 131-133

Il est de 14 pieds de large, sur 9 pieds, 4 pouces de haut. […] Il est de 9 pouces de haut, sur 2 pieds de large.

439. (1860) Ceci n’est pas un livre « Une conspiration sous Abdul-Théo. Vaudeville turc en trois journées, mêlé d’orientales — Troisième journée. Tout s’explique » pp. 234-240

(Haut.) […] (Haut.)

440. (1881) Études sur la littérature française moderne et contemporaine

On vient d’en lire plus haut un extrait. […] Il semble manquer de ce que l’école contemporaine possède à un si haut degré : l’oreille musicale. […] Penser, c’est parler tout bas ; parler, c’est penser tout haut. […] Voilà de la haute philosophie. […] Ces hauts récits renferment le plus précieux de tous les enseignements.

441. (1912) Pages de critique et de doctrine. Vol I, « I. Notes de rhétorique contemporaine », « II. Notes de critique psychologique »

Elles donnent à ce roman inachevé une haute valeur de document. […] Donnez au mot suicide sa haute signification de renoncement, de vie retirée et mortifiée. […] Le récit, un peu trop pareil aux contes galants du dix-huitième siècle, où elles sont enchâssées, n’en diminue pas la haute valeur. […] Aujourd’hui, un des maîtres de la critique, qui l’est aussi du haut enseignement, M.  […] Une grande portion de la noblesse la plus haute était ainsi.

442. (1892) Les idées morales du temps présent (3e éd.)

Tout cela, on le reconnaîtra sans peine, est très haut — si haut que le vulgaire n’y saurait atteindre. […] C’est là « la haute et sévère philosophie de nos œuvres naturalistes ». […] Il est vrai que, quand il y a du vin dans le haut d’une bouteille, il y en a dans le bas. […] Brunetière trouve réalisée à un haut degré cette unité de la métaphysique et de la morale, dont il a besoin. […] Ces hautes manifestations de la nature humaine auraient dû la réconcilier ave la vie, si elle avait à s’en plaindre.

443. (1864) Le roman contemporain

Duvergier de Hauranne, de Malleville, Desmousseaux de Givré du haut de la tribune. […] Elle est haute et belle ! […] Mes amis, et je m’adressai aussi haut que possible, s’intéressèrent au sort du jeune homme. […] C’est très beau, sans doute, mais c’est bien haut ! […] Montons plus haut encore, si vous le voulez.

444. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « MADAME DE STAEL » pp. 81-164

Artiste à un haut degré par Corinne, Mme de Staël demeure éminente en ses autres développements, à titre de politique, de moraliste, de critique et d’écrivain de mémoires. […] Cette idée saisit tellement mon âme, que je fis tout haut à l’Éternel les plus véhémentes prières. […] Son beau vaisseau battu de la tempête au sortir du port, longtemps lassé en vue du rivage, s’irrita d’attendre, de signaler des débris, et se lança à toutes voiles sur la haute mer. […] Cette fin de non-recevoir élevée contre les talents survenants remonte un peu haut, et jusqu’au sein du pur Louis XIV, comme le remarquait M. […] Rien de grand avec toi que le bon n’entretienne, Et le chemin aimable est près des hauts sommets.

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