Et cependant lorsqu’il apprend que vous vivez, il se réjouit dans son cœur ; chaque jour il espère revoir son fils de retour de Troie.
Et ces bœufs qui se reposent au pied de ces montagnes, ne vivent-ils pas, ne ruminent-ils pas ?
Mais tout cet archaïsme coûte plus qu’il ne vaut même à ceux qui savent y porter des facultés supérieures, et, malgré le succès de ses expériences, on sent la déperdition des forces colossales que le magnétisme du Génie doit employer, comme l’autre magnétisme, pour faire vivre ce qui ne vit plus.
Ils lisent, causent, méditent, rêvent et surtout ils souffrent. « La bête la plus rapide pour nous mener à la perfection, dit l’un d’eux, c’est la douleur. » Jamais aucune armée n’a autant vécu par l’âme.
Que l’on considère le temps où nous vivons et la nature des travers qui menacent le plus la dignité des arts comme celle des caractères. […] Sans doute la poésie avait beaucoup à gagner à vivre plus rapprochée de la peinture, et celle-ci à fréquenter la poésie et la philosophie elle-même. […] Ce n’est, en effet, qu’à des époques relativement modernes que ces deux arts se sont détachés de l’architecture, et ont commencé à vivre d’une vie propre. […] Il faut que son esprit et son cœur aient été profondément saisis et remués ; il faut qu’il ait beaucoup senti, beaucoup agi, beaucoup vécu, pour être en état de révéler dans son œuvre les mystères de la vie. […] N’en déplaise encore sur ce point à la vieille critique, la poésie n’a pas vécu de fictions, mais de réalités.
Un notaire et sa femme, M. et madame Denis, vivent heureux et paisibles dans un petit bourg du Cotentin. […] La tzarine, mère de Démétrius, vivait encore dans le couvent où Boris l’avait enfermée. […] Elle a fait comme ces prodigues qui commencent par dépenser des millions, et qui, au déclin de leur jeunesse, sont forcés d’aller vivre, en quelque obscur faubourg, d’une maigre pension alimentaire. […] Il a grandi, il a vécu, il a senti frissonner en son âme ses premiers accès de poésie, dans l’intimité familière de ces scènes maritimes dont il a saisi sur le fait le sens, la vérité et la vie. […] Plus tard, après la tempête apaisée, on le retrouvera seul, immobile, taciturne ; à qui lui demandera ce qu’il a fait, il répondra : J’ai vécu.
. — Montalembert et lui sont bien de la même volée ; ils représentent l’école romantique catholique, le De Maistre après coup et, s’il est possible, exagéré ; rien qui puisse vivre et, le moins du monde, convaincre ou persuader.
Voici de ce volume une des jolies pièces, une de celles qui se peuvent citer (car toutes à beaucoup près ne sont pas dans ce cas) ; le poëte qui l’a intitulée Fatuité ne fait qu’y exprimer bien sincèrement sa manière d’être le plus habituelle, sa façon de vivre, de porter la tête et de respirer ; on y sent déborder à chaque mot l’orgueil de la vie.
Champfleury Timide dans la vie, Gérard offrait une certaine résistance intérieure, et quoiqu’il vécût en bonne camaraderie avec la bande de Pétrus Borel et qu’il fût admis à l’honneur suprême de fournir une épigraphe au tapageur volume des Rhapsodies, Gérard appartenait à la littérature claire, obtenant les effets plus par le sentiment que par une palette chargée de couleurs.
Et puis, dans l’époque où nous vivons, tout l’homme ne se retrouve-t-il pas là ?
Au siècle où nous vivons, l’horizon de l’art est bien élargi.
Josué, Élie, Isaïe, Jérémie, Daniel, tous ces prophètes enfin qui vivent d’une éternelle vie, ne pourraient-ils pas faire entendre dans un poème leurs sublimes lamentations ?
Taine ne vécut que pour saisir la cause ordonnatrice dans la multitude des faits que nous classons sous les noms de littérature anglaise, civilisation italienne, Révolution française, etc., etc.
« Vous n’avez vécu que pour les choses de l’intelligence ; et, non content de chercher dans l’observation de notre coin de nature et d’humanité, matière à remplir vos études et à satisfaire la curiosité de vos goûts, vous avez élargi l’horizon contemporain, vous avez ressuscité le charme d’un siècle disparu, vous avez rapproché de nous la fantaisie et le mystère des arts lointains. […] C’est lui qui éveille en eux les sentiments engendreurs des idées, dont ils vivent, et qu’ils s’efforcent de fixer en réalités sociales. […] Bousquet, raconte qu’il a été un moment tellement séduit par le Japon, qu’il avait écrit à sa famille de quitter la France, de lui amener une demoiselle dont il était épris, et qu’ils vivraient tous là, comme dans le Paradis. […] Puis elle me décrivait sa maison, au bas de la côte de Grasse, choisie par le général, autrefois ambassadeur à Constantinople, dans un endroit qui lui rappelait la Corne d’Or, une maison à la chambre du général, tendue avec de la toile, et ressemblant à une tente, et à l’écurie renfermant deux carrosses d’apparat, dont la propriétaire avait été obligée de vendre les chevaux, quand elle avait été réduite à vivre de sa pension de veuve : carrosses, que les bonnes sortaient et promenaient, une heure, tous les samedis, sur les pavés de la cour. […] » faisant allusion à l’autorité de la femme, avec laquelle il vivait.
Quesnel en fut au désespoir ; mais, réduit lui-même à vivre d’aumônes, comment eût-il pû fournir au luxe de ses députés ? […] J’ai vécu ; … j’écris de Dieu ; … jeune homme, prends & lis ; … ô homme ! […] Marot vécut très-agréablement à Paris depuis ce temps jusqu’à l’année 1543, qu’il voulut réformer sa muse. […] Déchiré par le regret de n’être plus dans sa patrie, il vécut malheureux à Genève. […] Les deux ordres avoient toujours vécu dans la meilleure intelligence.
Vers la fin de sa vie, l’argent lui manqua ; il était libéral, imprévoyant, et ses poches avaient été toujours trouées, comme sa main toujours ouverte ; quoiqu’il eût écrit immensément, il était obligé d’écrire encore afin de vivre. […] Sa femme et ses enfants étaient morts ; il vivait seul, délaissé, servi par une vieille femme. […] Ils vivent librement, largement, au milieu des choses vivantes ; ils voient les convoitises s’agiter, s’élancer sans pudeur, sans hypocrisie, sans adoucissement, et ils les montrent telles qu’ils les voient, celui-ci aussi hardiment, quelquefois plus hardiment que les autres, étayé comme il l’est sur la vigueur et la rudesse de son tempérament d’athlète, sur l’exactitude et l’abondance extraordinaire de ses observations et de sa science. […] Là vivait Éarine que le fleuve vient d’engloutir, et que son amant en délire ne veut pas cesser de pleurer, « Éarine, qui reçut son être et son nom avec les premières pousses et les boutons du printemps, Éarine, née avec la primevère, avec la violette, avec les premières roses fleuries ; quand Cupidon souriait, quand Vénus amenait les Grâces à leurs danses, et que toutes les fleurs et toutes les herbes parfumées s’élançaient du giron de la nature, promettant de ne durer que tant qu’Éarine vivrait… À présent, aussi chaste que son nom, Éarine est morte vierge, et sa chère âme voltige dans l’air au-dessus de nous171. » Au-dessus du pauvre vieux paralytique, la poésie flotte encore comme un nuage de lumière.
. — Cela ne me surprend pas », dis-je à mon tour : « il y a du grec dans cette intelligence, et de la philosophie dans ce courage. » III Nous nous perdîmes de vue pendant quelque temps ; je m’informai avec anxiété de lui ; j’appris que, retiré dans un petit jardin de légumes au milieu d’un faubourg de la banlieue de Meaux, résidence de Bossuet, Barthélemy Saint-Hilaire, après avoir refusé ce qu’on le conjurait d’accepter comme gage de son silence, vivait à Meaux du travail de ses mains dans une hutte de son jardin, et nourrissait sa vieille tante de quatre-vingt-six ans des carottes et des pommes de terre cultivées par lui. […] « Ce qui prouve bien la nécessité naturelle de l’État et sa supériorité sur l’individu, c’est que, si on ne l’admet pas, l’individu peut alors se suffire à lui-même dans l’isolement du tout, ainsi que du reste des parties ; or, celui qui ne peut vivre en société, et dont l’indépendance n’a pas de besoins, celui-là ne saurait jamais être membre de l’État. […] L’égalité est l’identité d’attributions entre des êtres semblables, et l’État ne saurait vivre contre les lois de l’équité : les factieux que le pays renferme toujours trouveraient de constants appuis dans les sujets mécontents, et les membres du gouvernement ne sauraient jamais être assez nombreux pour résister à tant d’ennemis réunis. […] On accordera de plus à chacun la faculté de vivre comme bon lui semble. […] La révolution n’a souvent pas d’autre motif que cette faculté laissée à chacun de vivre comme il lui convient, faculté dont Socrate attribue l’origine à un excès de liberté.
Depuis que le commerce des pensées est devenu une véritable industrie, depuis que la majeure partie des auteurs mâchent, au jour le jour, sans souci du lendemain, la besogne qui les fait vivre, l’occasion s’est présentée plus d’une fois de montrer à l’œuvre, fabriquant et écoulant leurs produits, toute une catégorie de gens de lettres, particulièrement dédaigneux des scrupules de l’art, et fortement épris des succès monnayés : les Entrepreneurs de romans populaires. […] En sa candide ignorance elle ne savait pas, elle allait mourir sans le savoir, et il est urgent de le lui apprendre, que « l’air qui nous fait vivre est composé de vingt et une parties d’oxygène mêlées de soixante-dix-neuf parties d’azote et que la combustion du charbon, suivant qu’elle est plus ou moins active, donne de l’acide carbonique ou de l’oxyde de carbone ; … elle ignorait également le changement de composition que subit l’air par suite de l’oxygène remplacé dans l’atmosphère par les gaz carboniques » ! […] sans se presser, sentencieusement et péremptoirement, notre personnage considère comme un devoir d’exposer dans toutes les règles à celui qui n’a plus qu’une minute à vivre les convenances du droit civil et les prescriptions juridiques applicables à son cas ! […] Ceux-là vivent d’un maigre salaire et s’efforcent à ne pas en être privés de sitôt. […] Donc, il vivait là-dessus en parfaite tranquillité.
C’est à la lumière de sa conception du pouvoir qu’il en a accepté ou repoussé les titulaires ; car la République de 1848 a vécu, et, quoique dans son règne dévoré d’un moment il y ait eu la place et le temps pour d’immortelles bassesses, Cassagnac ne s’est pas mis, lui, à ses pieds. […] Comme les plus faibles et les plus forts de cette pauvre époque superficielle et infatuée, comme nous tous enfin, à l’exception d’un seul, averti par mieux que du génie, parce qu’il était prédestiné, l’auteur de la Chute de Louis-Philippe et du rétablissement de l’Empire n’avait rien prévu, rien soupçonné des faits sur lesquels nous vivons maintenant, et a reçu, sans s’y attendre et sans même s’en douter, cette décharge de Dieu à bout portant, dans la poitrine. […] Pour ce mâle esprit de réalité pratique qu’était déjà Granier de Cassagnac à cette époque, pour tout homme qui croyait, comme lui, que le salut de la France tenait impérieusement à l’institution monarchique (et il a vécu toute sa vie et il est mort dans cette pensée), il y avait strict devoir de dresser et d’affermir contre la Révolution cette épave d’un trône qu’on lui avait encore une fois arrachée, et ce fut cette idée qui fit journaliste un écrivain de plus haut parage qu’un journal. […] Si, plus tard, nous l’avons vu devenir le féal de la dynastie napoléonienne, c’est qu’il connaissait ce temps révolutionnaire et maudit pendant lequel il avait vécu toujours sur la brèche. […] Il préféra cette cause à tout, et il ne vécut sa longue vie que pour elle.
Ce n’est pas ce groupe digne de Polyclès, noyé dans la lumière et les morbidesses du Corrège, et dont le monde, tant que le sentiment de l’idéal vivra en lui, retiendra dans sa mémoire charmée les trois immortelles attitudes, les trois inoubliables gestes : — le baiser donné par Roméo à Juliette et rendu par Juliette à Roméo avec la fougue naïve de l’amour vrai et l’intrépidité de l’innocence ; — l’adieu au balcon dans l’air auroral, empli des joyeux cris de l’alouette qui ne sont plus les chants du rossignol ; — et enfin l’entrelacement, sur le marbre du même mausolée, de ces deux êtres si vivants, devenus par la mort deux pâles statues ! […] À cela près de trois à quatre expressions qui empâtent l’expression toujours transparente de Shakespeare, il s’est montré ce qu’on est accoutumé de le voir déjà : un traducteur d’une intelligence très sensible aux beautés de tout genre de ce génie si complexe qu’on appelle Shakespeare, lequel a trop vécu sur sa réputation de grand barbare, lui, le plus fin et le plus élégant des civilisés de tous les temps et de tous les pays du monde, — comme, à propos de cette traduction qui nous promet du champ encore, nous le prouverons quelque jour. […] où François Hugo, en poussant un peu plus sa pensée, l’aurait fait vivre à Guernesey ! […] Et si ce n’est pas vrai, si l’Anglais, l’Anglais ineffaçable et indestructible, qui vivait peut-être avec la ténacité de ses préjugés, de ses haines et de sa race, sous la fleur du génie cosmopolite de Shakespeare ; si l’Anglais fit faire à ce génie, contre Jeanne d’Arc, ce que plus tard les plus grands esprits de l’Angleterre firent pendant des années contre l’Empereur Napoléon, bravo ! […] ce n’est point le tranchant de la conversion qui coupe tout, et fait deux parts de l’homme, séparant la moitié qui doit vivre de la moitié qui doit mourir, ce n’est pas le coup foudroyant de cette conversion comme l’entendent les hommes religieux, qu’a voulu exprimer Shakespeare.
Cette formule affirme l’action de la « nature médicatrice » qui veut vivre. […] Tu dis que c’est mourir. — Soit, et c’est plus encore, Mais quand on aime, enfant, c’est vivre que mourir. […] S’il avait vécu plus longtemps, serait-il arrivé à en triompher ? […] Mais Pistoie, mais Lucques, je les ai seulement traversées, au lieu que j’ai vécu des semaines à Pise, à Florence, à Sienne. […] La curiosité l’emporte, et aucun romancier, fût-il Balzac, n’a fait vivre dans notre imagination une personnalité plus profondément burinée.
Tout le monde a l’air de vivre de sa vie ordinaire, et des cafetiers font remettre, avec le plus admirable sang-froid, les glaces cassées par les détonations d’obus. […] Aujourd’hui on n’entend plus vivre Paris. […] Le régime républicain est-il capable de lui rendre cette discipline, sans laquelle les sociétés ne peuvent vivre ? […] Non, c’est avec l’audace des grandes mesures, avec un remaniement d’institutions, que la France, si elle ne doit pas mourir, pourra vivre. […] Il est toujours là, prenant la moitié dans les faits de mon existence imaginative, comme s’il vivait toujours.
Non, sans doute : autant de peintres, autant de tableaux ; autant d’imaginations, autant de miroirs ; mais l’essentiel est qu’au moins il y ait par époque un de ces grands peintres, un de ces immenses miroirs réfléchissants ; car, lui absent, il n’y aura plus de tableaux du tout ; la vie de cette époque, avec le sentiment de la réalité, aura disparu, et vous pourrez ensuite faire et composer à loisir toutes vos belles narrations avec vos pièces dites positives, et même avec vos tableaux d’histoire arrangés après coup et symétriquement, et peignés comme on en voit, ces histoires, si vraies qu’elles soient quant aux résultats politiques, seront artificielles, et on le sentira ; et vous aurez beau faire, vous ne ferez pas qu’on ait vécu dans ce temps que vous racontez. Avec Saint-Simon on a vécu en plein siècle de Louis XIV ; là est sa grande vérité. […] Il lui dut un bonheur domestique constant et vécut avec elle dans une parfaite fidélité. […] Il ne se le fit pas dire deux fois, et dès ce moment il renonça à la Cour, vécut plus habituellement dans ses terres et s’occupa de la rédaction définitive de ses Mémoires.
Cinq grandes collections d’écrits, sans parler d’une foule d’autres données éparses, nous restent sur Jésus et sur le temps où il vécut, ce sont : 1° les évangiles et en général les écrits du Nouveau Testament ; 2° les compositions dites « Apocryphes de l’Ancien Testament » ; 3° les ouvrages de Philon ; 4° ceux de Josèphe ; 5° le Talmud. […] Philon vivait, il est vrai, dans une tout autre province du judaïsme que Jésus ; mais, comme lui, il était très dégagé des petitesses qui régnaient à Jérusalem ; Philon est vraiment le frère aîné de Jésus. […] Grâce à lui, Hérode, Hérodiade, Antipas, Philippe, Anne, Caïphe, Pilate sont des personnages que nous touchons du doigt et que nous voyons vivre devant nous avec une frappante réalité. […] J’eus devant les yeux un cinquième évangile, lacéré, mais lisible encore, et désormais, à travers les récits de Matthieu et de Marc, au lieu d’un être abstrait, qu’on dirait n’avoir jamais existé, je vis une admirable figure humaine vivre, se mouvoir.
Comment vivront-ils si je leur manque ? […] Une fois le sacrifice accompli, tu vivras paisible ici-bas ; je vivrai éternellement dans le ciel, et j’acquerrai dans ce monde la gloire du devoir accompli. […] toi, qui es mon âme même, puisses-tu vivre cent ans !
Il se nourrissait de parfums et vivait dans la région la plus pure de l’air ; et sa brillante existence se terminait sur un bûcher de bois odoriférants, dont le soleil allumait la flamme. […] Ainsi la description du château de Maintenon, malgré l’intérêt qui s’attache à un si noble séjour, méritait d’être supprimée : la plume de M. de Chateaubriand, en ces derniers écrits, n’est plus elle-même. — L’observation faite, il n’en est pas moins vrai que ces deux volumes nous offrent sur une femme qui fut un modèle de beauté et de bonté, et sur le monde qu’elle eut le charme et l’art de grouper jusqu’à la fin autour d’elle, une quantité de pièces intimes, agréables, imprévues, qui permettent aux nouveaux venus, s’ils en sont curieux, de vivre pendant quelques soirées dans une intimité inespérée et des plus choisies.
surtout quand on le suit dans sa correspondance, l’esprit et l’âme de ces générations non moins civiques que guerrières, et il vécut assez peu pour n’avoir jamais à se démentir. […] Joubert représente donc parfaitement l’esprit de cette armée, de ces brigades intrépides et de leurs jeunes officiers, par le brillant de la valeur, par la politesse et l’élégance naturelle des manières, l’habitude et le prestige, de la victoire, et un attachement profond au général en chef qu’il eût suivi sans doute s’il eût vécu.
Il alla vivre à la campagne-et se mit à cultiver une propriété rurale qu’il avait acquise dans l’Oise. […] Ce qui est vraiment beau pour un savant et ce qui mérite d’être envié en effet de tous ceux qui ont connu les plaisirs de l’esprit, c’est qu’il se maintint constamment frais et dispos d’intelligence, et qu’il vécut, presque jusqu’à la dernière heure de la vie de la pensée.
Aucun des talents, jeunes alors, qui ont séjourné et vécu dans l’un de ces groupes, n’y a passé impunément. […] — Quel était son régime, quelle était sa manière journalière de vivre ?
Il proposa à Mme de Senfft d’aller vivre aux bords du lac de Genève « dans une retraite que leur imagination avait souvent rêvée. » Des circonstances de famille les détournèrent alors de cette détermination qu’ils ont bien des fois regretté, dit-il, de ne pas avoir suivie. […] M. de Pradt eût pu atteindre son but avec un peu plus de modération et de prudence dans ses discours, et sous un règne moins contraire aux gens d’Église et moins porté à choisir pour les places les plus élevées des instruments aveuglément soumis. » Nous ne saurions admettre un tel portrait flatté du spirituel et loquace abbé, nous qui vivons depuis assez longtemps pour l’avoir rencontré, à notre tour, et pour l’avoir entendu dans sa vieillesse.
Si l’on excepte les relations officielles, il vivait d’ailleurs dans le courant de société le plus opposé à l’Empire, et dans quelques-uns de ces salons de Paris où le maître de l’Europe ne régna jamais. […] Il suivit de près son maître et se mit en route pour Dresde le 5 février 1810 : « Il quittait, après un séjour de près de quatre ans, nous dit-il, cette France, pays privilégié du Ciel, à tant de titres, où la civilisation, plus ancienne et plus complète qu’ailleurs, a donné aux lois de l’honneur et de la probité cette fixité d’axiomes qui, sans les faire peut-être observer davantage, ne laisse en problème ni en discussion rien de ce qui appartient aux bases des rapports sociaux et du commerce des hommes entre eux ; pays où le langage a une valeur mieux déterminée, où tous les ressorts de la vie sociale ont un jeu lus aisé, ce qui en fait, non comme ailleurs un combat, mais une source de jouissance. » J’aime de temps en temps ces définitions de la France par un étranger ; elles sont un peu solennelles sans doute et ne sont pas assurément celles que nous trouverions nous-mêmes ; nous vivons trop près de nous et trop avec nous pour nous voir sous cet aspect ; le jugement d’un étranger homme d’esprit, qui prend son point de vue du dehors, nous rafraîchit et nous renouvelle à nos propres yeux : cela nous oblige à rentrer en nous-mêmes et nous fait dire après un instant de réflexion : « Sommes-nous donc ainsi ?
Pour n’être plus prédite chaque jour, l’attente d’un Messie n’en est pas moins constante et évidente ; les Juifs vivent sur cette foi : on attend l’accomplissement des dernières prophéties, des derniers oracles que le Saint-Esprit avait laissés. […] Employez toutes vos forces à rappeler dans cette unité tout ce qui s’en est dévoyé… » Et invoquant l’exemple de Louis XIV, il présage et provoque, au milieu de magnifiques éloges au grand roi, la révocation de l’Édit de Nantes qui, en effet, se préparait : « Considérez, dit-il au Dauphin, le temps où vous vivez et de quel père Dieu vous a fait naître.
Il vivait habituellement dans le quartier Saint-Jacques, près le collège de Saint-Jean-de-Beauvais, tout à la prière, à l’étude et aux services à rendre aux amis. […] Il n’y a qu’à l’adorer et à le laisser faire. » Telle était l’atmosphère de religion, d’absolue croyance, au sein de laquelle habitait Racine converti et où vivait comme lui tout ce qui l’approchait et l’entourait.
C’est dans le passé qu’il faut vivre, fût-ce pour en avoir pitié : en nous attendrissant sur nos ancêtres, c’est sur nous-mêmes que nous nous attendrissons. Je jouis de sentir à tout mon être des racines si profondes dans les temps écoulés et d’avoir tant vécu déjà avant de voir la lumière.
Or, nous vivons dans une époque où très peu d’êtres persistent dans cette façon d’envisager. […] C’est un être humain qui ne s’est jamais regardé moralement en face et qui a vécu dans l’étourdissement comme la presque totalité de son espèce.
Cependant, peut-être parce qu’il est pessimiste et par une réaction inconsciente de ce qu’il sent vivre en lui, M. de Régnier prête parfois à ses poèmes l’héroïque splendeur qui faisait défaut aux choses aperçues. […] Non pas qu’il recherche savamment l’équilibre des plans lumineux pour créer ainsi de lointaines et aériennes perspectives ; mais par le sentiment né d’un coloris clair et sain, en ses récits comme à la surface des eaux, la brise passe d’un vol libre ; ils fleurent les parfums des prairies, respirent de l’aurore à l’égal du jour souple des bois et de strophe en strophe s’étendent et s’éjouissent de vivre ainsi qu’un paysage caressé par une bruine de soleil.
Ainsi, la joie de vivre, l’amitié, l’ambition sont des formes de la sympathie que nous éprouvons pour les choses, pour les autres ou pour nous-mêmes. […] Pour peu qu’un auteur ait vécu longtemps, que son œuvre contienne de nombreux volumes, on risque de voir défiler devant soi presque toutes les idées d’un demi-siècle, des idées sur toutes sortes de choses, sur ce qu’on peut connaître et même sur ce qu’on ne peut pas connaître.
. — Je reviens au Raphaël d’aujourd’hui, à celui de M. de Lamartine : S’il eût tenu un pinceau, dit notre auteur, il aurait peint la Vierge de Foligno ; s’il eût manié le ciseau, il aurait sculpté la Psyché de Canova ; s’il eût connu la langue dans laquelle on écrit les sons, il aurait noté les plaintes aériennes du vent de mer dans les fibres des pins d’Italie… S’il eût été poète, il aurait écrit les apostrophes de Job à Jéhovah, les stances d’Herminie du Tasse, la conversation de Roméo et Juliette au clair de lune, de Shakespeare, le portrait d’Haydé de lord Byron… S’il eût vécu dans ces républiques antiques où l’homme se développait tout entier dans la liberté, comme le corps se développe sans ligature dans l’air libre et en plein soleil, il aurait aspiré à tous les sommets comme César, il aurait parlé comme Démosthène, il serait mort comme Caton. […] Si la réalité offrait les mélodies que ces messieurs trouvent partout, on vivrait dans une langueur extatique, et l’on mourrait d’assoupissement.
Mme Récamier, jeune, eut besoin de cet ange à côté d’elle et en elle, car le monde qu’elle traversa et où elle vécut était bien mêlé et bien ardent, et elle ne se ménagea point à le tenter. […] Cette personne unique, et dont la mémoire vivra autant que la société française, a été peinte avec bien de la grâce par Gérard dans sa fraîcheur de jeunesse.