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609. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Œuvres de Louis XIV. (6 vol. in-8º. — 1808.) » pp. 313-333

Pendant qu’il parle avec tant de force, une douceur surprenante lui ouvre les cœurs et donne je ne sais comment un nouvel éclat à la majesté qu’elle tempère. […] On a remarqué que ce fut là une apparence plus qu’une réalité, et que bientôt, à défaut de Premier ministre, il eut des premiers commis qui, par art et flatterie, surent lui faire adopter comme de sa propre impulsion ce qu’eux-mêmes ils désiraient. […] Il veut que les princes véritablement habiles sachent se transformer et se renouveler selon les conjonctures. […] En cela Louis XIV ne sut réussir qu’à demi ; il força évidemment dans ses pompes le caractère de la monarchie française, et, en vieillissant, il en vint à n’être plus en accord avec l’esprit public de la nation. […] Je laisse de côté Louis XV et les lâches indignités de son règne : mais on peut dire que le caractère bon, honnête, modéré, des respectables Bourbons qui ont succédé, n’était plus à la hauteur des circonstances ; ils n’ont pas su remplir le vœu et le conseil de leur grand aïeul.

610. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Grimm. — II. (Fin.) » pp. 308-328

Si elle était du petit nombre de ces vérités évidentes sur lesquelles il ne saurait ν avoir deux opinions, il ne pourrait en parler avec plus de confiance. » Rousseau lui paraissait dans le même cas pour son système sur l’état sauvage, ce prétendu âge d’or de félicité et de vertu. […] La rapidité même du style, qui peut être précieuse dans la description d’un combat, dans l’esquisse d’un tableau, ne saurait durer longtemps sans déplaire. […] Rousseau prétend toujours ramener l’homme à je ne sais quel âge d’or primitif auquel il regrette que l’espèce ne se soit point arrêtée : Supposons avec M.  […] Duclos, dont on a su depuis que Grimm avait tant à se plaindre, est jugé nettement, vertement, mais sans passion et sans défaveur. […] Nous savons déjà quelle était sa politique.

611. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Œuvres inédites de P. de Ronsard, recueillies et publiées par M. Prosper Blanchemain, 1 vol. petit in-8°, Paris, Auguste Aubry, 1856. Étude sur Ronsard, considéré comme imitateur d’Homère et de Pindare, par M. Eugène Gandar, ancien membre de l’École française d’Athènes, 1 vol. in-8°, Metz, 1854. — II » pp. 76-92

Le grand Arnauld ne l’avait jamais lu, je pense, et ce qu’il savait de grec, vers la fin de sa vie il l’avait oublié. […] Molière, qui sait son Lucrèce, n’a guère eu le temps ni l’occasion, près de Gassendi, d’aller jusqu’à Homère. […] Je ne saurais toutefois, et bien que j’abonde en général dans son sens, accorder à M.  […] Le seul Racan, par la fusion de l’harmonie et de la couleur, a retrouvé le charme et le je ne sais quoi d’enchanté. […] Avec son savoir, son esprit et son talent, il n’aurait qu’à moins viser, il réussirait à moins de frais, et on serait heureux de l’applaudir alors, de l’approuver.

612. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Correspondance de Buffon, publiée par M. Nadault de Buffon » pp. 320-337

Ce qu’était Buffon dans l’habitude de la vie, dans le train et le ton ordinaire de sa pensée, on le sait à présent, et l’on peut s’en faire une idée exacte, sans exagération, sans caricature. […] Buffon n’ira jamais beaucoup plus à fond, et il négligera le menu ; s’il sait et si, par hasard, il cite un jour une épigramme de Piron contre le petit Poinsinet, c’est que Piron est de Dijon et que l’épigramme sent la moutarde. […] Je sais qu’il faut faire la part de ce qui a été perdu, de ce qui ne s’est point transmis ; mais des hommes célèbres du siècle avec lesquels on le compare d’ordinaire, il en est peu avec qui Buffon paraisse avoir été en commerce habituel de lettres. […] Il y eut à l’origine de la littérature classique une école homérique : tel rhapsode qui, sans Homère, n’aurait jamais rien été ni rien laissé, a fait, grâce à Homère, telle description, je ne sais laquelle, mais qui figure très dignement, je me l’imagine, dans l’œuvre homérique. […] Vous savez qu’il doit remettre quinze cents francs dans ce même temps à feu votre femme.

613. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « M. Biot. Essai sur l’Histoire générale des sciences pendant la Révolution française. »

Je ne sais si M.  […] On assembla la Régie pour savoir ce qu’elle pourrait faire. […]  » Il eût dit la même chose d’Homère, s’il avait su le grec ! […] Un jour qu’il citait de l’Horace à l’homme qui le sait le mieux et qui n’en n’abuse jamais, à M.  […] Cette manie de citer du latin à tout bout de champ, quand on ne le sait pas aussi bien qu’on le voudrait, amène de ces petites mésaventures.

614. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Sainte-Hélène, par M. Thiers »

En tout il savait choisir ses points. […] On sait à quel point de perfection il y réussit. […] La légende ne saurait trouver ici rien qui soit égal à la réalité. […] Qu’on lui sache gré surtout de nous fournir, par l’étendue même et le caractère circonstancié de ses récits, les moyens de le discuter, de le contrôler à notre tour, et parfois de le contredire. […] … Ce sont là des pages élevées, fermes, vigoureuses de ton, philosophiques de fond, irréprochables, à offrir aux amis comme aux ennemis ; je n’en sais pas en français de plus belles.

615. (1870) Nouveaux lundis. Tome XII « Préface »

Et puisque nous sommes en veine de confession et d’une défense qui n’est pas difficile, il y avait plus d’un an, si l’on veut le savoir, que M.  […] Sainte-Beuve avait envie de sortir. — On saura quelle circonstance le fit passer d’emblée de l’ancien Moniteur au Temps. […] il ignore ou sait mal. […] Je sais ce qu’on peut dire juridiquement sur ce traité ; mais à mes yeux il compte ; le traité, à son moment, a été un excellent procédé à mon égard, et il faudrait des circonstances extrêmes pour dégager ma délicatesse. […] On y dissipera la légende de ce dîner, dont on a tant parlé, donné, je crois, chez lui, un vendredi (c’était le 10 avril 1868, puisqu’on tient à savoir exactement le jour), et dont M. 

616. (1886) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Deuxième série « La comtesse Diane »

Quelqu’un qui piocherait la classification de ces erreurs telle que Bacon l’a établie, et qui s’efforcerait de trouver, pour chaque catégorie, quelques cas particuliers, arriverait sans trop de peine à un résultat dont il se saurait beaucoup de gré. […] Et ce qui ferait reconnaître encore (si on ne le savait) qu’il a été écrit par une femme, c’est l’aimable étourderie avec laquelle elle pille souvent, sans le savoir, les classiques du genre et invente de nouveau ce qui a été dit longtemps avant elle. […] » L’intelligence sert à tout, surtout à mettre en œuvre la bonté ; les sots veulent être bons, mais ne savent pas. […] On sait la part immense des dons naturels dans le talent d’un comédien ou, si vous voulez, dans l’effet total qu’il produit. […] À certains moments, ils se précipitent d’un tel train qu’on n’entend plus que leur bruit sans en concevoir le sens ; c’est assurément un défaut que mon parti pris d’extase ne saurait m’empêcher de reconnaître.

617. (1899) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Septième série « Les deux Tartuffe. » pp. 338-363

(La délicatesse de nos Comédiens officiels a supprimé, je ne sais pourquoi, les vers où cette incongruité est rappelée.) […] À ce propos, vous savez qu’on s’est demandé si Tartuffe avait la foi. […] Il sait où se trouvent des femmes plus sociables et plus dociles que celle de son ami… Un homme dévot n’est ni avare, ni violent, ni injuste, ni même intéressé. […] qui sait ?) […] Qui sait si tu n’es pas en effet quelque image De Dieu même, qui perce à travers ce nuage ?

618. (1897) Le monde où l’on imprime « Chapitre VII. Maurice Barrès et Paul Adam » pp. 72-89

Barrès, d’abord, sait voir à merveille. […] Mais d’un paysage vu sans faute, Maurice Barrès sait tirer des inductions personnelles. […] Il dit au mendiant : « Ne sais-tu pas le courage du meurtre ?  […] Elle ne saurait tenter de réaliser que des vertus d’état : l’ordre, l’harmonie, la justice. […] On ne saurait satisfaire que soi.

619. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Deuxième partie. Ce qui peut être objet d’étude scientifique dans une œuvre littéraire — Chapitre IV. Cause immédiate d’une œuvre littéraire. L’auteur. Moyens de le connaître » pp. 57-67

On se borne à préciser et à ordonner ce qu’on sait. […] Il est intéressant, par exemple, de savoir qu’une sensibilité maladive fut une des facultés maîtresses de Rousseau. […] Pourquoi, à force de peser, d’analyser, de disséquer la matière cérébrale ou bien (que sais-je ?) […] Je ne saurais me ranger à cet avis. […] Mais elle suggère toujours à qui sait regarder les faits des conjectures utiles sur leurs causes probables.

620. (1864) De la critique littéraire pp. 1-13

Mais vous savez que personne n’est content de son métier, et qu’on se croit toujours plus propre à celui d’autrui. […] Je risque d’indisposer contre moi presque tout ce qu’il y a de critiques en France ; et Dieu sait si le nombre en est grand ! […] Dessinons donc les traits de cet être fantastique, où personne ne se reconnaissant, on ne saurait m’accuser de manquer à personne. […] Comme je vais rarement à Paris, je ne sais pas encore si la Maison de Penarvan de M.  […] Il y trouvera l’énergie sans déclamation, l’élégance sans recherche, le sublime sans emphase et un art délicat qui sait se borner et dire en toute chose ce qu’il faut, et cela seulement.

621. (1861) Les œuvres et les hommes. Les historiens politiques et littéraires. II. « VIII. M. de Chalambert. Histoire de la Ligue sous le règne de Henri III et de Henri IV, ou Quinze ans de l’histoire de France » pp. 195-211

On le saura plus tard. […] Il faut bien qu’on le sache, le catholicisme était alors la société même, une société armée, vivante et qui, comme toute société vigoureuse, comme tout être vivant et normal ne voulait pas être blessée, et se sentait une vie trop puissante pour se résigner à mourir. […] Chalambert n’a pas su montrer. […] M. de Chalambert ne sait pas plus reconstituer en bloc une personnalité détruite qu’il ne sait déshabiller implacablement ces fausses et factices renommées qu’un poète pourrait appeler les Sirènes de l’histoire, car elles en sont le charme le plus dangereux. […] Pour notre compte, à nous, nous ne savons pas de gloire à meilleur marché que celle de ce capitaine d’aventure, qu’on nous donne pour un grand capitaine parce qu’il allait gaiement au feu avec les autres, et, malgré le vaudeville qui obstrue l’histoire, nous n’en savons pas de moins française.

622. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « IX. L’abbé Mitraud »

… Tous ces haïsseurs de la vieille Église romaine se sont pris de je ne sais quel goût, — ou plutôt d’un goût que je m’explique très bien, — pour un livre qui a la prétention d’être un livre de science sociale en restant du christianisme. […] Mais M. l’abbé Mitraud aurait tout aussi bien pu s’attendre lui-même : car « c’est souvent une force que de savoir s’attendre », — a dit Mme de Staël. […] Il aura mal aux nerfs d’une lecture qui le mène et le courbature pendant quatre cent cinquante pages pour ne lui apprendre que ce qu’il sait et pour le laisser où elle l’a pris. […] Certainement, nous ne croyons pas que M. l’abbé Mitraud puisse méconnaître l’unité de la tradition sociale, plus ou moins violée chez tous les peuples, moins un, qui ont précédé le christianisme, et qu’il ne sache pas tirer la conclusion forcée, inévitable, de ce fait immense, qu’avant J. […] Évidemment il y a pour les philosophes, dans cette théocratie que M. l’abbé Mitraud appelle et qu’il justifie, je ne sais quoi qui n’est pas la théocratie du moyen âge et du cardinal Bellarmin, mais quelque chose qu’ils flairent avec plaisir et qui odore, comme la théocratie de Gioberti, par exemple, de Gioberti, cet autre abbé cher à cette Ogresse d’abbés, la Révolution !

623. (1899) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (troisième série). XVII « Le père Augustin Theiner »

Theiner, il le sait comme nous, le P.  […] Dans sa haletante existence l’homme est, ce semble, encore plus pressé de conclure que de savoir. […] et si on ne le sait pas, qu’on l’apprenne ! […] Theiner ne saurait les nier. […] Theiner ne saurait guères infirmer l’autorité, n’avait qu’à déplier ces dépêches, fortiter et suaviter, et cette seule réponse de foi aurait mieux valu que les plus spirituelles invectives.

624. (1870) Nouveaux lundis. Tome XII « Madame Desbordes-Valmore. »

Je les sais par cœur. […] Il ne faut jamais désespérer de la Providence quand elle nous a marqué au berceau pour un de ses dons les plus signalés, et quand on sait comme vous l’adjurer dans une langue divine. […] Nous sommes tous ainsi faits : les débutants croient en apprendre aux maîtres ; un touriste en sait plus que l’habitant du lieu ; passez-moi cette commune manie : elle fait tant de plaisir !  […] Je ne sais si cette manière d’essayer des stradivarius en les brisant et en les rajustant est tout à fait conforme aux règles du métier ; un luthier en sait là-dessus plus long que moi ; c’est dans tous les cas une belle fable à l’Amphion. […] Raspail supposait que Mme Valmore était Flamande d’au-delà de la frontière, et née en Belgique ; il ne savait pas qu’elle était de Douai.

625. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre XIV. L’auteur de Robert Emmet »

Qu’il suffise aujourd’hui de savoir que c’est une femme, une chausse bleue comme Mme de Blocqueville, dont je vais parler après elle, et qui, elle, s’est nommée à son premier livre, car les femmes ont mis la hardiesse, à la place de la pudeur, dans leur envahissement de la littérature. […] Et par exemple, elle sait Villemain, en particulier, le grammairien Villemain, comme chez les Femmes savantes on savait le grammairien Vaugelas. […] Il est certain que si elle eût moins su, elle aurait moins cité, qu’elle eût été obligée de penser par elle-même, ne tirer un livre de sa propre tête… et, si elle n’avait pu, de se taire. […] Qui sait ? pour pénétrer ou seulement pour entrevoir un être aussi complexe, aussi désordonné, aussi mêlé de poussière et de lueurs d’étoiles que Byron, une autre femme aurait mieux valu que celle-là qui sait si bien toutes les orthographes de la vie.

626. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « XX. M. de Montalembert »

M. de Montalembert a eu l’ambition plus grande ou peut-être l’a-t-il eue plus petite… Qui sait ? […] En effet, je ne sais guère, — pas plus que M. de Montalembert, — ce que deviendra son histoire ici présente, mais je crois savoir ce qu’elle vaut, et je veux même essayer, s’il veut bien me le permettre, de le lui montrer. […] Mais, le fond orthodoxe du livre mis de côté, il reste aux yeux de la Critique littéraire… tout le livre, et le livre ne satisfait ni le critique ni même le chrétien, qui sait ce que peut être la prédication d’un livre bien fait. […] Pitra, un moine de nos jours, un Mabillon moderne aussi savant que le Mabillon ancien, mais avec la poésie en sus ! […] Les plus grands, je le sais, commencent par Démosthène (mais Démosthène, quoi de plus que le bon sens d’une place publique ?)

627. (1896) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Sixième série « Lamartine »

Je crois que « ça se serait su » tôt ou tard. […] Mais je sais particulièrement gré à M.  […] L’univers n’en sait rien. […] Le « doux » Lamartine a su, lui, énergiquement s’en défendre. […] Puis elle s’ouvre une veine, je ne sais trop comment.

628. (1874) Premiers lundis. Tome II « Loève-Veimars. Le Népenthès, contes, nouvelles et critiques »

Je ne sais quel effet la littérature de ce temps-ci fera dans l’avenir à ceux qui la regarderont à distance respectueuse ; il est à croire que moyennant les inclinaisons de la perspective, et un peu, de bonne volonté et d’illusion chez les spectateurs, tout cela prendra une tournure, une configuration générale et appréciable, une sorte de simplicité. […] Loève-Veimars entre autres choses, c’est qu’il sait à merveille la langue, qu’il en observe les tours, le mouvement, le génie ; qu’il l’a étudiée dans ses différentes phases, dans ses sources larges et volontiers secrètes, dans ses curiosités et jusqu’en ses coquetteries légitimes. Il emploie les mots selon leurs acceptions précises et distinctes, il sait être piquant, sans les violenter, sans pincer jusqu’au sang cette pauvre langue, sans la chatouiller à la plante des pieds, comme le héros d’un roman nouveau14 fait à sa maîtresse ; la pauvre langue et la maîtresse expirent de la sorte en des rires et des ébats convulsifs. […] Loève-Veimars l’a rempli avec simplicité et sentiment ; lui aussi il sait peindre ; il nous a peint tour à tour Aloysius Block et l’abbé Joie, portraits à la flamande, et récemment Casimir Périer moribond, en traits historiques qui ont fortement frappé. […] Sur Molière et sur Corneille, je ne saurais qu’adopter tout ce que dit d’admiratif, d’explicatif et de profondément senti, l’excellent critique.

629. (1905) Les ennemis de l’art d’écrire. Réponse aux objections de MM. F. Brunetière, Emile Faguet, Adolphe Brisson, Rémy de Gourmont, Ernest Charles, G. Lanson, G. Pélissier, Octave Uzanne, Léon Blum, A. Mazel, C. Vergniol, etc… « XIV »

Brunetière sait très bien qu’il y en a dans Bossuet d’aussi rigoureuses et qui sont de tout point sublimes. […] C’était la conviction de Malherbe, Boileau, Voiture, Guez de Balzac, La Bruyère, Buffon, Montesquieu, Flaubert et Racine qui déclarait n’avoir sur Pradon qu’une supériorité : celle de savoir écrire. […] Brunetière sait pourtant bien le contraire. […] Il sait que Pascal raturait sans cesse ; il n’ignore pas le prodigieux labeur de Chateaubriand, Bossuet, La Bruyère, Buffon, Malherbe, etc., M.  […] Brunetière sait tout cela, et il a eu le courage de ne pas en dire un mot dans une conférence sur le style !

630. (1889) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Quatrième série « Pronostics pour l’année 1887. »

Car, si je me trompe, on ne le saura que dans douze mois, et personne ne se souviendra alors de ce que j’aurai prédit. […] La seule passion campagnarde étant, comme on sait, l’amour de la terre, vous prévoyez le sujet. […] Il rêve et murmure à mi-voix : Dieu n’était pas : il est tout près d’être… Mais, qui sait si la vérité n’est pas triste ? […] On ne sait pas. […] Mais nos prévisions ne sauraient aller au-delà… Et M. 

631. (1890) L’avenir de la science « VII »

Comment se résigner à ce qu’on sait être le moins parfait ? […] Vivre, ce n’est pas glisser sur une agréable surface, ce n’est pas jouer avec le monde pour y trouver son plaisir ; c’est consommer beaucoup de belles choses, c’est être le compagnon de route des étoiles, c’est savoir, c’est espérer, c’est aimer, c’est admirer, c’est bien faire. […] Il y a, je le sais, dans la curiosité des degrés divers ; il y a loin de cet instinct mesquin de collection, qui diffère à peine de l’attachement de l’enfant pour ses jouets, à cette forme plus élevée, où elle devient amour de savoir, c’est-à-dire instinct légitime de la nature humaine et peut constituer une très noble existence. […] Le livre chrétien par excellence, l’Imitation, après avoir débuté comme le Maître de ceux qui savent par ces mots : « Tout homme désire naturellement savoir », avait toute raison d’ajouter : « Mais qu’importe la science sans l’amour ? […] Tout est vanité, excepté aimer Dieu et le servir. » Cela est indubitable, si la science est conçue comme une simple série de formules, si le parfait amour est possible sans savoir.

632. (1902) Le problème du style. Questions d’art, de littérature et de grammaire

Il passe pour avoir su le grec ; le savait-il assez pour goûter littérairement la poésie homérique ? […] On ne sait plus. […] En somme, tous ceux qui ont besoin de savoir l’orthographe la savent ; à ceux qui ne la savent pas, elle est inutile. […] Il sait l’orthographe et ne sait pas le français. […] On ne sait pourquoi.

633. (1898) Politiques et moralistes du dix-neuvième siècle. Troisième série

et je sais ce que vous voulez dire. […] Il sait voir, il sait observer, il sait analyser. […] Il le savait, et savait le dire très joliment. […] Je n’en sais rien. […] Pour savoir si l’effort est utile, il faut savoir si ce à quoi il s’applique est désiré.

634. (1892) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Cinquième série « Gilbert Augustin-Thierry »

René de Mauréac le sait. […] Gilbert Augustin-Thierry sait nous envelopper de mystère, et, par la notation de détails très simples, mais inquiétants parce qu’on n’en voit pas le pourquoi, créer peu à peu autour de nous comme une atmosphère d’épouvante. J’ai rarement senti avec cette vivacité le désir de savoir ce qui arrivera et le délice d’avoir peur. […] Quoi qu’il fasse, des récits comme la Tresse blonde ne sauraient être que des divertissements d’art d’une horrifique ingéniosité  rien de plus que Lokis ou la Vénus d’Ill, ce qui est déjà beaucoup. […] Et sent-on assez là-dedans l’application d’une loi  Mais nous ne sommes frappés que des cas où cette loi semble appliquée : or il y en a des millions où rien de semblable n’apparaît  Qu’en savez-vous ?

635. (1867) Cours familier de littérature. XXIII « cxxxiiie entretien. Littérature russe. Ivan Tourgueneff »

Et Arcadi Pavlitch entonna je ne sais quelle romance française. […] Mais il est fort possible que le lecteur ne sache point ce que ce terme signifie. […] Je ne savais que lui répondre. — Arina ! […] — Je n’en sais rien ; mais elle sait lire et écrire. […] On ne peut savoir où il s’arrêtera.

636. (1889) Histoire de la littérature française. Tome II (16e éd.) « Chapitre septième »

On sait comment Louis XIV la mérita. […] C’est ce je ne sais quoi de grand, de hardi, de judicieux, de naïf, qui respire dans le théâtre de Molière. […] Singulier flatteur, chez qui l’histoire ne saurait note un vers à l’excuse de ce qu’elle reproche à Louis XIV ! […] C’est comme on sait, le genre d’affaires où il tenait le plus à décider par lui-même. […] Ce morceau égale les meilleurs de La Bruyère, et il respire je ne sais quoi de grand et de royal qui ne sent pas son homme de lettres.

637. (1854) Histoire de la littérature française. Tome I « Livre I — Chapitre troisième »

Il sait trahir et frapper à mort, sans qu’on voie la main d’où partent les coups. […] Notre poëte dit des clercs que le savoir les rend plus nobles que les nobles. […] Quoique le savoir ne soit pas le génie, il y a des temps où le génie est le savoir. […] D’abord Boileau n’est pas coupable, que je sache, de n’avoir pas connu les poésies de Charles d’Orléans. […] Et encore sait-on si Jacques Cœur a eu un tombeau ?

638. (1890) L’avenir de la science « XV » pp. 296-320

Cela est vrai, parfaitement vrai, pourvu qu’on sache l’entendre. […] L’Asie n’a jamais su rire, et c’est pour cela qu’elle est religieuse. […] Tout est à la fois admirable et critiquable, et celui-là seul sait admirer qui sait critiquer. […] Que savez-vous s’ils n’avaient pas un jury sans qu’il en soit fait mention ? […] reprend le dur cartésien, ne savez-vous pas bien que cela ne sent point ? 

639. (1856) Réalisme, numéros 1-2 pp. 1-32

D’abord je ne sais pas ce qu’est l’idéal, le savent-ils eux-mêmes ? […] Je sais qu’il n’y a que le vrai qui plaise et qui touche. […] Que d’hommes savent chanter comme font les poètes ! mais combien savent voir comme les gens de cœur ? […] Cucheval, Balzac a été jaloux du Grec Athénée, on sait le fameux Grec Athénée.

640. (1885) L’Art romantique

Eugène Delacroix aimait tout, savait tout peindre, et savait goûter tous les genres de talents. […] Je ne sais pourquoi je me figure qu’elles puent le protestantisme. […] De ces petitesses, je ne sais absolument rien. […] Qui sut immédiatement britanniser son génie ? […] Quiconque aime la poésie les sait par cœur.

641. (1817) Cours analytique de littérature générale. Tome I pp. 5-537

Ce que d’autres ne savent que délayer, ils le concentrent. […] C’est de là qu’on cesse d’avoir prise sur lui, et qu’on ne saurait plus le juger que d’instinct. […] « Sachez tous son triomphe et mes remords sincères. […] Il sut mesurer les hommes du point éminent où son âme s’était placée. […] On sait qu’il n’en est pas de même de la morale.

642. (1891) Journal des Goncourt. Tome V (1872-1877) « Année 1876 » pp. 252-303

Mais savez-vous le joli de la chose. […] Sait-on comment se passaient ses nuits. […] la bonne petite pluie, qui sait si bien qu’on a besoin d’elle ! […] Que vous dire, c’est un janséniste… il a, ne savez-vous pas cela ? […] On ne sait jamais, même à l’heure qu’il est, le train qu’il prend, pas plus que celui par lequel il arrive.

643. (1898) Politiques et moralistes du dix-neuvième siècle. Deuxième série

Je ne sais pas prévoir les bonheurs de si loin. […] C’est que vous ne savez pas ce que c’est que la liberté. […] — Je le sais, répond Fourier, qui n’a pas accoutumé d’être embarrassé. […] L’humanité souffre à la fois pour expier, pour savoir, pour s’élever. […] Sait-on d’où est né le drame ?

644. (1898) Essai sur Goethe

Le niais qui ne sait pas nager veut s’en prendre à l’eau ! […] Oui : ils savent là-haut ce que nous faisons, ils le savent ! […] Qui sait ce dont il est capable ? […] C’est ce que nous ne savons pas, puisqu’il ne l’a point dit. […] Veux-tu savoir combien cela est dangereux ?

645. (1920) Essais de psychologie contemporaine. Tome II

Appelez-moi, vous qui savez. […] Il sait qu’il y a des belles choses et des choses laides, et il ne sait que cela. […] En la possédant, son amant sait qu’il trompe. […] Seulement, savez-vous le secret de cet homme ? […] Il le sait ou il l’ignore.

646. (1872) Nouveaux lundis. Tome XIII « Œuvres françaises de Joachim Du Bellay. [III] »

Dans cette série enchaînée de sonnets si inférieurs à leur modèle toscan, et qui n’en ont guère que les défauts, je ne sais si on trouverait à en détacher un seul digne en entier d’être cité : c’est docte et dur. […] Je ne sais point de plus beau sonnet en ce genre élégiaque que le seizième des Regrets, et qui paraît adressé à Ronsard. […] Du Bellay savait sa Rome contemporaine, et il nous la traduit au vrai. […] On savait déjà quelque chose de ces tracas nouveaux et opiniâtres qui accueillirent Du Bellay de retour en France : une lettre de lui adressée au cardinal, en manière de défense et d’apologie, n’en laisse plus rien ignorer. […] Ce serait presque un hors-d’œuvre, si bientôt le biographe ne nous montrait qu’il sait également développer les autres parties du tableau.

647. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « François Ier, poëte. Poésies et correspondance recueillies et publiées par M. Aimé Champollion-Figeac, 1 vol. in-4°, Paris, 1847. »

Hors de l’Orient sacré, je ne sais si l’on trouverait un grand exemple de ce double idéal confondu sur un même front, et si, pour se figurer dans sa pleine majesté un roi poëte, il ne faudrait pas remonter au Roi-Prophète ou à son fils. […] Je ne sais plus quelle dame de la Cour d’Henri III disait à Des Portes, en lui demandant de la faire parler en vers, qu’elle envoyait ses pensées au rimeur . On sait positivement que c’était là l’usage de la spirituelle Marguerite, femme d’Henri IV. […] Sachons seulement que ce n’est là qu’une très-agréable paraphrase, mais cette fois une paraphrase évidente de ces vers d’Ovide en ses Amours (liv. […] Les hommes instruits d’alors savaient cela sans qu’on le leur dît, et ils n’en admiraient que plus le traducteur.

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