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1313. (1891) Esquisses contemporaines

À propos de « Civilisation et Croyance » Il faudrait remonter bien haut dans l’histoire, aller peut-être jusqu’aux temps de la décadence romaine, pour rencontrer une situation analogue à celle de nos civilisations occidentales. […] En plaçant à la source de leur foi une autorité étrangère par sa nature à l’objet et à l’essence de cette foi, ils rentraient d’une façon détournée dans la méthode catholique romaine, de laquelle ils avaient cru s’affranchir. […] Par un travail analogue à celui de Luther s’affranchissant de la tradition romaine pour fonder la Réforme, il s’affranchit, au sein même de la Réforme, de la tradition théopneustique, et, comme Luther, place dans l’identité persistante de la foi les bases d’une nouvelle conception théologique.

1314. (1884) Propos d’un entrepreneur de démolitions pp. -294

Face glabre, au nez vitellien, légèrement empourpré et picoté de petites engrêlures qui tiennent le milieu entre le bourgeon de la fleur du pêcher et les bubelettes vermillonnes d’un pleurnichage chronique, assez noblement posé, d’ailleurs, au-dessus d’une fine bouche d’aruspice narquois et dubitatif, — comme un simulacre romain de la Victoire ailée et tranquille, au bord d’une route tumultueuse de la haute Asie, encombrée du trafic suspect de Babel ou de Chanaan. […] Qu’on se représente un Carthaginois du bon temps des Mercenaires, devenu citoyen romain après les massacres et convoitant le patriciat pour banqueter avec le vertueux Caton. […] Il vient, en l’entendant, quelque chose comme l’idée bizarre d’un pauvre cœur débordant de larmes impossibles à répandre et porté çà et là par des mains tremblantes… Un jour, un ami frappé de cet accent religieux de la musique de Rollinat lui suggéra de s’essayer sur une des belles hymnes du Bréviaire romain et lui désigna très particulièrement le Quot undis lacrymarum que l’Église chante le jour de la fête de Notre-Dame des Sept Douleurs.

1315. (1907) Jean-Jacques Rousseau pp. 1-357

Et voici la contre-épreuve « Opposons à ces tableaux celui des mœurs du petit nombre des peuples qui, préservés de cette contagion des vaines connaissances, ont par leurs vertus fait leur propre bonheur et l’exemple des autres nations. » Tels furent les premiers Perses, tels furent les premiers Romains. […] « Je sens deux hommes en moi », dit Saint-Paul dans son Épitre aux Romains. […] Il y faut joindre un passage tout à fait odieux, — dont on retrouverait peut-être l’origine chez quelque écrivain protestant, — un passage où tout l’antipapisme de sa première éducation lui revient (avec le désir peut-être de flatter ses coreligionnaires de Genève) ; où il refuse aux « chrétiens romains » la possibilité d’être de bons citoyens parce que le chef de leur religion ne réside pas dans leur patrie ; où enfin, après avoir explicitement banni les athées de sa république, il en bannit implicitement les catholiques.

1316. (1854) Nouveaux portraits littéraires. Tome I pp. 1-402

Aux yeux des poètes de cour, Molière n’est-il pas ce qu’était pour le sénat romain le paysan du Danube ? […] Nous savons pourtant qu’il a d’abord rêvé la gloire épique, nous connaissons même le sujet qu’il se proposait de traiter : Béranger voulait écrire pour nous une épopée nationale, et raconter l’établissement des Francsd dans la Gaule romaine ; l’Achille de cette nouvelle Iliade se fût appelé Clovis. […] Régina est abandonnée comme Graziella ; la fille du pêcheur et la princesse romaine sont traitées avec la même cruauté : dans le cœur de Saluce comme chez l’auteur des Confidences, l’égoïsme a parlé plus haut que l’amour. […] Les membres de l’aréopage, du sénat romain et de la constituante, auraient payé au poids de l’or la possession de cette idée. […] La pièce à Virgile débute avec simplicité ; malheureusement, après quelques vers dans le goût antique, l’auteur se laisse aller à son amour pour la réalité flamboyante, et il abandonne les lignes chastes et sévères du poète romain pour dessiner confusément les allées mystérieuses et les grottes discrètes qu’il aime à visiter avec une personne chérie.

1317. (1910) Propos de théâtre. Cinquième série

La maternité de la fille sur le père : sujet profond, maternité vénérable entre toutes ; si admirablement traduite par la légende de cette Romaine, nourrice, au fond de son cachot, de son père vieillard. […] N’est-il pas plus naturel qu’une reine, qui est très amoureuse, mais aussi très vraiment dévouée et qui sait ce que c’est que les Romains, finisse par dire, sans tant de suicides en perspective, et très sensée, tout en étant très passionnée : « Non, je vous aime beaucoup ; mais je ne suis pas une Draga (c’est surtout Draga qu’a eue devant les yeux Corneille, avec un sens historique — et prophétique — très juste ; mais précisément pour ne pas faire de Bérénice une Draga). […] Que sont devenus ces Romains, ces brutes impériales, aux fronts têtus, aux mâchoires carrées, aux biceps noueux, plus laids encore quand ils se couronnaient de roses pour leurs joies grossières que quand ils baissaient le pouce pour demander qu’on achevât l’esclave blessé ? » Je ferai remarquer d’abord que dans leurs Polyeuctes, dans les Polyeuctes du dix-septième siècle, les vieux Grecs sceptiques et les vieux Romains brutes ne pouvaient rien devenir du tout, les Grecs ni les Romains n’ayant jamais traité le sujet de Polyeucte, et du reste, Polyeucte étant un Arménien.

1318. (1913) Les idées et les hommes. Première série pp. -368

L’Énéide fut d’abord le poème de la grandeur romaine ; et les adolescents de Rome y découvrirent les motifs de leur juste orgueil. […] Grâce d’Italie, à la douceur de qui va cet homme du Nord, ainsi que vont à la tiédeur romaine, à la beauté sereine, durant les siècles de l’histoire, les garçons d’Allemagne, de Flandre et de Scandinavie, Grazia aimante n’a pas l’air d’aimer, tant elle est calme. […] Moyennant un peu de blé, de lard et de vin, il enseigne à des écoliers le catéchisme catholique et romain. […] Et même ils désiraient plutôt que leur récit ne fût aucunement pittoresque, suivant le conseil du plus intelligent historien romain, Salluste, qui raconte les aventures de Jugurtha ou de Catilina quo minus mirandum sit , de telle sorte que la lecture en soit aussi peu déconcertante que possible. […] À Syracuse, Géla, Ségeste et Sélinonte, ruines illustres ; à Palerme, près des vagues où meurent les sirènes ; à Catane, au jardin Bellini, parmi les lauriers-roses ; dans le silence chaud d’Agrigente ; dans la campagne romaine, que hante le souvenir de Cecilia Metella ; dans les villes et dans les îles parfumées de la Lombardie ; à Vérone de Juliette ; à Venise de Desdémone ; sur les rives romanesques des lacs ; on néglige la pensée pire et la plus déconcertante, la pensée de soi et de son moment.

1319. (1905) Études et portraits. Portraits d’écrivains‌ et notes d’esthétique‌. Tome I.

L’un et l’autre poète, le romain et le français, ont réalisé ce rêve, qui fut celui du plus subtil analyste de la Renaissance, Léonard de Vinci : ils ont eu l’aisance parfaite dans le raffinement suprême, et l’apparent naturel dans le plus savant calcul. […] Il est un Latin, et l’héritier malgré lui de l’antique esprit de la civilisation romaine, même en la reniant. […] Ils sont en effet d’un art très sévère, mais très libre, où se trouve pratiquée cette esthétique du vrai total qui se reconnaît dans Aristophane, dans Plaute, dans Lucrèce, dans les dramatistes de la période Elisabethéenne, dans le Gœthe de Faust, des Affinités, des Elégies romaines et de Wilhelm Meister, Ce n’est pas ici le lieu de discuter M. périls de cette esthétique, si tant est que le souci pieux de l’art puisse aller sans une profonde moralité. […] Il n’y aura plus de cloîtres dans les vallées comme aux mauvaises heures de l’agonie romaine, mais beaucoup voudront se construire un cloître idéal, où se réfugier loin de l’odieuse violence des barbares et loin de la tyrannie obsédante des faits. […] Le morceau de Pétrone sur la vie privée des Romains irrite plutôt qu’il ne satisfait notre curiosité… Peut-être pouvais-je arriver à écrire cette histoire oubliée par tant d’historiens. » En second lieu, la société moderne, pareille sur ce point à toutes les sociétés démocratiques, est peu favorable au développement des personnalités très intenses et très vigoureuses.

1320. (1870) Portraits contemporains. Tome IV (4e éd.) « M. THIERS. » pp. 62-124

.), il croit être arrivé à des résultats capables de satisfaire, et, par exemple, il se voit en mesure d’expliquer, de motiver en détail le passage de l’architecture grecque à la romaine, par la nécessité d’agrandir la première en l’adaptant à de certains usages déterminés du peuple-roi, et par le mélange du goût oriental.

1321. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « MADAME DE CHARRIÈRE » pp. 411-457

On choisit le siècle et le pays comme l’on veut ; les unes sont gothiques, les autres grecques, les autres romaines.

1322. (1813) Réflexions sur le suicide

— Shakespeare dit en parlant du Suicide : faisons ce qui est courageux et noble suivant le sublime usage des Romains, et que la Mort soit orgueilleuse de nous prendre 3.

1323. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre deuxième. Les mœurs et les caractères. — Chapitre I. Principe des mœurs sous l’Ancien Régime. »

Au chapitre d’Ottmarsheim en Alsace, « nos huit jours, dit une visiteuse, se passèrent à nous promener, à visiter le tracé des voies romaines, à rire beaucoup, à danser même, car il venait beaucoup de monde à l’abbaye, et surtout à parler de chiffons ».

1324. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre III. L’âge classique. — chapitre VII. Les poëtes. » pp. 172-231

Ils en font un torchon ou ils en habillent des rustres ; la toge romaine et la chlamyde grecque ne vont pas à ces épaules de barbares.

1325. (1863) Cours familier de littérature. XVI « XCVe entretien. Alfred de Vigny (2e partie) » pp. 321-411

Ce discours ressemble aux sifflets de l’insulteur public des Romains, qui perçait à travers les acclamations du triomphe.

1326. (1864) Cours familier de littérature. XVII « Ce entretien. Benvenuto Cellini (2e partie) » pp. 233-311

Le commerce fit de l’Italie ce que la guerre et la religion en avaient fait sous les Romains et sous le christianisme naissant, ce modèle de l’Europe !

1327. (1856) Jonathan Swift, sa vie et ses œuvres pp. 5-62

Attribuant quelque part à l’altération de l’équilibre entre les patriciens et les plébéiens la chute de la république romaine, Swift s’écrie : « Ce n’est pas l’ambition des particuliers qui causa cette grande lutte ; les guerres civiles donnent en effet plus de prise et plus de feu à l’ambition particulière, qui devient l’instrument destiné à trancher ces grandes querelles et qui est assurée de recueillir le butin.

1328. (1886) Revue wagnérienne. Tome I « Paris, 8 avril 1885. »

Dans Art Allemand et Politique allemande (Leipzig, 1868), le Maître établit la nécessité d’imposer au monde une civilisation nouvelle sur les ruines de la civilisation romaine mourante.

1329. (1893) La psychologie des idées-forces « Tome premier — Livre quatrième. Éléments sensitifs et appétitifs des opérations intellectuelles — Chapitre deuxième. Les opérations intellectuelles. — Leur rapport à l’appétition et à la motion. »

Galton a combiné ainsi les traits de six femmes romaines, qui lui ont donné un type d’une beauté singulière et un charmant profil générique.

1330. (1890) Les œuvres et les hommes. Littérature étrangère. XII « Shakespeare »

Pour ne citer qu’un seul exemple du sans-souci habituel de Shakespeare pour le terre à terre et la fidélité de l’Histoire, Coriolan, dans le drame de ce nom, n’est pas le Romain de Tite-Live ; mais, quel qu’il soit, c’est un homme, une colère, une vengeance, une force vivante qui emporte tout dans son tourbillon, puis qui se fond tout à coup dans d’inexprimables tendresses ; et c’est bien autrement beau que si c’était romain, cela !

1331. (1932) Les deux sources de la morale et de la religion « Remarques finales. Mécanique et mystique »

Quand le vainqueur concède aux populations subjuguées une apparence d’indépendance, l’assemblage dure plus longtemps : témoin l’empire romain.

1332. (1882) Études critiques sur l’histoire de la littérature française. Deuxième série pp. 1-334

Griveau, c’est la lutte gallicane qui nous explique l’aigreur et les accusations malveillantes des deux parties : « c’est la dévolution du procès à la cour romaine et rattachement aux maximes professées dans la déclaration du clergé sur la puissance ecclésiastique en 1682, qui ont communiqué à Bossuet et surtout à ses agents une persévérante énergie, jusqu’à paraître dégénérer en animosité personnelle ; qu’on s’en rendît plus ou moins compte, c’est la crainte du retour et du règne des principes romains qui a fait mouvoir tant de ressorts pour éloigner à jamais du pouvoir le précepteur de l’héritier du trône. » Ce n’est pas présentement le temps d’examiner si les termes sont exactement proportionnés à l’importance vraie de la question. […] Un illustre Anglais a loué cette incomparable habileté de la politique romaine à triompher de l’esprit de révolte, je n’ose dire en se l’inoculant, mais du moins en se l’incorporant, pour le faire servir à ses fins.

1333. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre II. La Renaissance. — Chapitre V. La Renaissance chrétienne. » pp. 282-410

Le lecteur n’a qu’à mettre en regard les portraits du temps, ceux d’Italie et ceux d’Allemagne ; il apercevra d’un coup d’œil les deux races et les deux civilisations, la Renaissance et la Réforme : d’un côté, quelque condottiere demi-nu en costume romain, quelque cardinal dans sa simarre, amplement drapé, sur un riche fauteuil sculpté et orné de têtes de lions, de feuillages, de faunes dansants, lui-même ironique et voluptueux, avec le fin et dangereux regard du politique et de l’homme du monde, cauteleusement courbé et en arrêt ; de l’autre côté, quelque brave docteur, un théologien, homme simple, mal peigné, roide comme un pieu dans sa robe unie de bure noire, avec de gros livres de doctrine à fermoirs solides, travailleur convaincu, père de famille exemplaire. […] Plusieurs des prières qu’écrivit Bacon sont entre les plus belles que l’on sache, et le courtisan Raleigh, contant la chute des empires, et comment « une populace de nations barbares avait abattu enfin ce grand et magnifique arbre de la domination romaine », achevait son livre avec les idées et l’accent d’un Bossuet363.

1334. (1896) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Sixième série « Lamartine »

1º C’est d’abord le développement, en quatre ou cinq magnifiques symphonies, de ce délicieux psaume énumératif de François d’Assise, où l’âme légère et si douce de ce saint de plein air invite toutes les créatures à louer Dieu  avec, peut-être, des réminiscences de ces charmantes hymnes du Bréviaire romain, pour Matines, pour Laudes, pour Vêpres, etc., où le rapport de chaque prière avec l’heure du jour est si gracieusement indiqué, et où l’on dirait que pénètre un peu de la nature, comme un rayon de soleil qui vient tomber sur le tabernacle, ou comme une branche de feuillage aperçue par le vitrail entr’ouvert :     Celui qui sait d’où vient le soleil qui se lève Ouvre ses yeux noyés d’allégresse et d’amour. […] Une corruption de mœurs si abominablement raffinée, qu’elle rappelle et dépasse de beaucoup tout ce que nous savons des plaisirs des anciens rois de Perse et des empereurs romains ou byzantins.

1335. (1859) Critique. Portraits et caractères contemporains

Que la tragédie parte du fond du cœur, c’est un grand art et le plus grand de tous ; mais faites-vous une tragédie uniquement pour le petit plaisir de nous montrer des mourants et des morts, alors, et ce sera plus vite fait, menez-nous aux combats de taureaux ou vers l’arène des gladiateurs ; vous étiez Grecs, vous devenez Espagnols ou Romains ; vous étiez au théâtre, vous êtes tombés dans le cirque. […] Les Romains, nos maîtres en toutes choses, avaient établi (tant ils étaient de sages dispensateurs de la vie humaine), entre l’âge mûr et la vieillesse, un intervalle auguste, qu’ils appelaient l’âge de seigneurie, et, dans ce véritable âge d’or de leurs grands hommes de la paix ou de la guerre, ils plaçaient naturellement le conseil, le souvenir, le résumé, la récompense enfin de ces sages esprits, de ces hardis courages, de ces honnêtes consciences, pleines de grâces, de bienfaits, de justice, de prudence, de charité. […] Et, pendant qu’à travers ces chemins remplis de la foule romaine, à l’ombre de ces autels où le prêtre immole ses plus belles victimes, dans ces places publiques où l’on dresse deux mille tables, où l’on boit à longs traits le vin de Falerne ; quand défile au loin cette armée amenant avec elle un monde de captifs et de trésors ; quand l’encens fume sous les pas de César, mêlé à la louange universelle, aux acclamations du peuple et du sénat, dans cette voie Appienne ouverte à la domination de la Rome éternelle ; alors que chaque temple est ouvert et que chaque citoyen porte une toge blanche et tient en main le laurier d’Apollon ou le chêne de Jupiter ; quand l’Imperator, à travers cette longue suite d’arcs triomphaux, du champ de Mars au Velabre, et du grand cirque au forum, et sur ce long chemin du Capitole, où il arrive au bruit des fanfares solennelles, et ce tumulte de trophées où l’on voit, captifs, mais attachés par des chaînes d’or, le Rhin, le Rhône et l’Océan ; quand c’est à peine si l’on a trouvé dans Rome assez de chevaux pour transporter jusqu’aux autels de Jupiter les dépouilles des peuples conquis, dans ce pêle-mêle de sacrificateurs empressés, de magistrats dans la pourpre, de vestales voilées, de rois vaincus dont les mains sont chargées de chaînes et dont la tête porte encore la couronne, au bruit enivrant des poésies et des cantiques à la louange de César, et quand c’est un cri unanime, du ciel à l’abîme ; « Écoutez ! […] Il est clair, il est fécond, il est habile, il est vrai, il est pénétrant, il est adroit avec tant de réserve pour le tremblement de terre, et tant de respect pour le Prométhée enchaîné, sans que pourtant, par respect même, il veuille jamais soutenir, comme ont fait tant d’historiens romains, que les lois aimaient mieux être abolies par César que défendues par Vitellius. […] Les révolutions, les changements, les batailles, les guerres, l’immense absorption que fait Paris, cette pompe aspirante et foulante, de toutes les forces et de toutes les intelligences de la province, le hasard enfin, ce dieu nouveau, ont cruellement dérangé la stabilité de ces générations bourgeoises, qui avaient pour devise ce mot du droit romain : Qui tenet — tenet !

1336. (1899) Musiciens et philosophes pp. 3-371

Quand Michel-Ange, par exemple, étale sur les murs de la chapelle funéraire de Saint-Pierre ces héros indignés, aux formes surhumaines, ces vierges colossales et désespérées qui clament l’inexorable cruauté de la vie, il se met en opposition manifeste, absolue, avec la religion de son temps, avec le dogme romain. […] Mais ce christianisme n’est pas du tout celui des catholiques romains, des uniates, des grecs orthodoxes, des protestants luthériens, des protestants calvinistes. […] Seuls, les Espagnols, dont la musique a subi pendant des siècles l’empreinte de la domination des Maures, et les Russes qui, en raison de leur adhésion au schisme religieux d’Orient, n’ont pas subi l’influence constante et directe du chant ecclésiastique romain, ont conservé dans leur musique une part relativement importante de leur personnalité.

1337. (1930) Les livres du Temps. Troisième série pp. 1-288

Quant à Properce, ses quelques élégies romaines du quatrième livre ne le diminuent pas, sans le grandir extrêmement non plus. […] Il devait y avoir une troisième partie, qui nous eût introduits dans la société romaine, papaline et cosmopolite, que Stendhal connaissait si bien. […] Leur politique intérieure fut tyrannique, mais provisoirement excusée par l’état de crise, comme la dictature sous la République romaine. […] M. Jules Romains qui en a.

1338. (1920) Impressions de théâtre. Onzième série

La jeune fille ne portera pas de bijoux ; elle ne se parfumera pas ; elle n’aura que des robes de simple drap, et tout unies, comme en portait la sainte Vierge… Car les filles de Denys de Syracuse refusèrent les bijoux que leur envoyait leur père ; car la vestale Claudia fit parler d’elle parce qu’elle aimait trop la toilette ; car les Romains, après la seconde guerre punique, défendirent aux femmes de porter des bijoux et des robes de couleur ; car Aristote et Caton l’Ancien…, etc. […] « Bonne matrone ne prendra plaisir à écouter et à ouïr homme étranger, ni à discuter de sa beauté : car pour elle, qu’ils soient beaux ou qu’ils soient laids, tous les hommes se ressemblent, — excepté son mari, qu’elle doit réputer le plus vénuste et le plus beau, comme fait la mère son fils unique. » Voici, à ce propos, une histoire racontée par saint Jérôme : Un prince romain, qui fut un capitaine fameux, avait une femme tout à fait recommandable par sa pudicité. […] Les parents devront être fort réservés devant les enfants. « Nous lisons que Caton, le censeur, déchassa du Sénat, un romain nommé Caïus Manlius pour ce qu’il avait baisé sa femme en présence de sa fille. » Quelques gentillesses encore à l’adresse des femmes : « Bien, est-il vrai que les maris ne blandissent ou s’esbattent familièrement avec les enfans, comme voudraient bien les mères ; cela seroit sot et indécent aux hommes ; plus convient au sexe mulièbre. […] Et si vous saviez combien on en rencontre aujourd’hui, de ces dignes sœurs des Paul Astier, des Lortigue, des « petits féroces » signalés par Alphonse Daudet ; de ces terribles poupées inassouvies, de ces petites bêtes de joie dont l’exaspération et l’affinement du système nerveux a fait des petites bêtes d’ennui et de tristesse et dont peut-être on n’avait point revu de si parfaits exemplaires depuis la décadence romaine et byzantine ; de ces gracieuses mondaines qui n’ont pas d’enfants ou qui les subissent ; idolâtres de leurs corps ; clientes enragées de toutes les bonnes faiseuses, — y compris les faiseuses d’anges ; éprises, dans ces derniers temps, des abominables courses de taureaux, et qui, si vous leur racontez qu’en Espagne c’est bien mieux et qu’on y rebouche le ventre aux chevaux étripés avec un bouchon de paille, vous répondent du ton le plus naturel (j’ai entendu ça) : « Oh !

1339. (1863) Causeries parisiennes. Première série pp. -419

Ce qu’il y a de certain, c’est qu’il a reçu son dernier boulevard avec cette joie tempérée qui accueille, en général, les nouveau-nés dans une famille déjà nombreuse, et que tous ceux qui ont voulu le persuader de son bonheur à force d’histoire romaine y ont perdu leur latin. […] Faut-il voir dans cette inexactitude une réserve en faveur de la question romaine, et M.  […] Était-ce dans la Grèce contemporaine, ou dans la Question romaine ?

1340. (1895) Le mal d’écrire et le roman contemporain

Nos cheveux sont si beaux que les Romaines nous les empruntent pour en ombrager leurs têtes. » N’est-ce pas le lyrisme de Flaubert lorsqu’il écrit : « Mes baisers ont le goût d’un fruit qui se fondrait dans ton cœur. […] Dans la bataille des Francs et des Romains, Chateaubriand dit : « La hache de Mérovée s’enfonce dans le front du Gaulois ; la tête se partage ; sa cervelle se répand des deux côtés ; son corps reste encore un moment debout étendant ses mains convulsives. » De pareilles phrases sont du Flaubert pur ; l’auteur de Salammbô les adoptera ; vous les retrouverez telles quelles ; son réalisme n’ira pas plus loin.

1341. (1920) Essais de psychologie contemporaine. Tome II

Il fallait donc bien que rien n’eût bougé dans son voisinage… » J’indiquerai encore la série de descriptions qui se trouve dans une nouvelle intitulée ; Apparitions, et ce morceau que Mérimée rappelle quelque part, où les étangs de la campagne romaine, entrevus dans un voyage aérien, sont comparés aux fragments d’un miroir brisé, épars sur un parquet Ces exemples, qu’il serait très intéressant entre parenthèses de rapprocher des descriptions de Flaubert36, suffisent pour faire comprendre le procédé habituel à Tourguéniev. […] Faut-il remonter à des causes politiques et considérer que l’esprit latin, legs suprême de la vaste organisation romaine, voit par suite les choses comme organisées, tandis que l’incohérence mouvante et chaotique d’un monde barbare a façonné à sa ressemblance l’esprit des Germains ?

1342. (1895) La comédie littéraire. Notes et impressions de littérature pp. 3-379

Mais, pensant qu’il devait une politesse à Sophocle, il avait daigné se déranger pour venir écouter au théâtre romain d’Orange Œdipe roi. […] Certains de ces chapitres sont imprimés en caractères romains et d’autres en italique. […] … Mais soyez sûr qu’il y a une raison à cela, et une raison très grave, et que M. de Montesquiou a mûrement réfléchi avant d’adopter l’italique ou le romain !

1343. (1882) Autour de la table (nouv. éd.) pp. 1-376

C’est par lui, en effet, bien plus que par Jésus, que l’Église romaine a gouverné les esprits, c’est-à-dire par la personnification du mal absolu, menaçant l’homme d’une éternelle société avec lui et d’une torture éternelle sous ses lois. […] Il eût pu prophétiser que la défaite de la Pologne sera pour la suite des temps un triomphe sur la Russie, et que, comme l’empire romain a subi le triomphe intellectuel de la Grèce terrassée, l’empire russe subira le triomphe intellectuel et moral de la Pologne.

1344. (1854) Causeries littéraires pp. 1-353

Afin d’être tout à fait juste et d’arriver à l’exacte mesure, figurez-vous un homme de goût, ayant lu le matin, le chapitre du Chourineur ou celui de la Goualeuse, ayant eu à subir, la veille, la lourde soirée des Burgraves, et sortant de cette fange et de ces ténèbres pour rencontrer, sous le péristyle d’un temple romain, un jeune poëte arrivant avec les charmes de l’inconnu, et s’appuyant d’une main sur Tite-Live, de l’autre sur André Chénier ; je parierais volontiers qu’on ne trouverait pas, dans tout le dilettantisme parisien, vingt personnes ayant le sens littéraire assez sûr ou assez fin pour résister à une pareille épreuve : nul n’y résista, et Lucrèce fut acceptée comme un chef-d’œuvre. […] un autre épisode de l’histoire romaine ? […] Cette simplicité archaïque, acceptée de temps immémorial dans les sujets grecs ou romains, pouvait-elle être admise entre personnages revêtus de pourpoints et de cottes de mailles ? […] En fait d’art original, le monde romain est au niveau des Daces et des Sarmates ; le cycle chrétien tout entier est barbare. […] À ses yeux, rien n’existe en poésie depuis Homère, Eschyle et Sophocle ; Euripide lui-même est un corrompu et un sceptique ; Virgile, Horace, Ovide, n’ont de tolérable que ce qu’ils ont emprunté à la Grèce en leur qualité de Romains, ils n’ont qu’à répéter ce qu’écrivait le poëte des Tristes : … Barbarus hic ego sum.

1345. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « Mademoiselle Aïssé »

Brue, son frère, en l’envoyant à la Cour, pour passer ensuite en Italie, afin de jeter à Rome les premières dispositions de son dessein de parvenir à la pourpre romaine.

1346. (1859) Cours familier de littérature. VIII « XLIVe entretien. Examen critique de l’Histoire de l’Empire, par M. Thiers » pp. 81-176

Tacite aurait cessé d’être Tacite, il aurait brisé sa plume, puisqu’on lui commandait de briser son cœur, sa conscience, son jugement sur le monde romain qu’il raconte, et, à la place du plus éloquent et du plus coloré des historiens, le monde n’aurait eu qu’un nomenclateur technique, un miroir inerte, qui n’aurait pas même eu le droit de haïr la tyrannie, la démence, la servilité, la boue et le sang qu’il aurait réfléchis dans sa métallique et immorale limpidité d’intelligence.

1347. (1864) Cours familier de littérature. XVII « CIe entretien. Lettre à M. Sainte-Beuve (1re partie) » pp. 313-408

Qu’aussi Victor Hugo, sous un donjon qui croule, Et le Rhin à ses pieds, interroge et déroule Les souvenirs des lieux ; quelle puissante main Posa la tour carrée au plein cintre romain, Ou quel doigt amincit ces longs fuseaux de pierre, Comme fait son fuseau de lin la filandière ; Que du fleuve qui passe il écoute les voix, Et que le grand vieillard lui parle d’autrefois !

1348. (1889) Histoire de la littérature française. Tome III (16e éd.) « Chapitre quatorzième. »

Cette théorie des lois somptuaires, qu’il faut, dit Fénelon dans ce même plan, imiter des Romains, comme si l’expérience de Rome n’en avait pas prouvé l’inefficacité, Mentor en fait l’application la plus étendue au peuple de Salente.

1349. (1879) À propos de « l’Assommoir »

Il se procura divers manuels connus seulement des gens d’église : Cérémonial à l’usage des petites églises de paroisse selon le rit romain, par le R.

1350. (1870) De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés « De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés — Chapitre XIII : Affinités mutuelles des êtres organisés »

J’ai mesuré avec soin les proportions de leur bec et de son ouverture, la longueur des narines et des paupières, la grandeur des pieds et la longueur des pattes ; et j’ai comparé toutes ces mesures chez des individus de souche sauvage, chez des Grosses-Gorges, des Paons, des Romains, des Barbes, des Dragons, des Messagers et des Culbutants.

1351. (1902) Les poètes et leur poète. L’Ermitage pp. 81-146

Nulle corde n’a manqué à la lyre de celui qui, à la veille de mourir, put, devant la France entière, être salué, à l’antique façon romaine, du nom vénérable de Père !

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