Quoi de moins philosophique que de n’avoir pas su au moins, en vieillissant, reconnaître l’éternelle nécessité en fait, de quelque religion positive dans les sociétés humaines et, au lieu de faire la part de cette nécessité en la conciliant avec la justice, d’avoir voulu entraîner le peuple à écraser l’infâme ? […] Et puis, tenez, une idée philosophique à laquelle je tiens beaucoup, c’est que le génie des peuples modernes n’a pas tant besoin d’être ni excité ni endoctriné par tels ou tels hommes.
On voit enfin par lui les franches repues, les façons grivoises et goguenardes du bon peuple de France. […] Nous ne tirons pas de nous-mêmes la règle de nos moeurs, comme font les peuples germaniques.
Est-ce que nous avons allumé une de ces guerres révolutionnaires qui flattent un moment les passions militaires d’un peuple, mais qui font crier le sang des nations contre leurs auteurs longtemps après que ce sang est tari ? […] Enfin te souviens-tu de ces jours où l’orage À la hauteur du flux fit monter ton courage, Prompt à tout, prêt à tout, à la mort, à l’exil, Quand il fallait conduire un peuple avec un fil, Et que tu traversais la grande Olympiade, Aristippe masqué du front d’Alcibiade ?
Le peuple qui marchait dans l’ombre a vu une grande lumière ; le soleil s’est levé pour ceux qui étaient assis dans les ténèbres. » La renommée de la ville natale de Jésus était particulièrement mauvaise. […] La caste sacerdotale s’était séparée à tel point du sentiment national et de la grande direction religieuse qui entraînait le peuple, que le nom de « sadducéen » (sadoki), qui désigna d’abord simplement un membre de la famille sacerdotale de Sadok, était devenu synonyme de « matérialiste » et d’« épicurien. » Un élément plus mauvais encore était venu, depuis le règne d’Hérode le Grand, corrompre le haut sacerdoce.
Il s’est rencontré, je le crains, des orateurs politiques qui ont dit au peuple ou aux Chambres tout autre chose que ce qu’ils pensaient. […] Ce fut là le germe de cette haine inextinguible qui se développa depuis dans mon cœur contre les vexations qu’éprouve le malheureux peuple et contre ses oppresseurs.
En un mot, on sent que bien des choses ne se sont faites que parce que le peuple de Paris a vu le dimanche, au boulevard, tel drame, et a entendu lire à haute voix dans les ateliers telle histoire. Avec les dispositions d’un pareil peuple, abandonner au hasard la direction des théâtres, ne s’en réserver aucune, ne pas user de ces grands organes, de ces foyers électriques d’action sur l’esprit public, ne pas assurer une existence régulière à trois ou quatre d’entre eux qui, à force de zèle et d’activité, à force de bonnes pièces, de nouveautés entremêlées à la tradition, fassent concurrence aux théâtres plus libres et empêchent qu’on ne puisse dire Paris s’ennuie, ou Paris s’amuse, à faire peur, ce serait méconnaître les habitudes et les exigences de notre nation, le ressort de l’esprit français lui-même.
Et plus loin, comparant le peuple écrasé à l’antique géant étouffé sous l’Etna : « On a cru, s’écria-t-il, anéantir un peuple, on a créé un volcan. » M. de Montalembert a une faculté qui manque à beaucoup d’autres, d’ailleurs éloquents, et qui fait que sa phrase ne résonne pas comme une autre phrase : il a la faculté de l’indignation.
Émile Fabre… et puis, une peinture de mœurs factices, de mœurs irréelles, qui nous valent, de par le monde, la réputation d’un peuple uniquement préoccupe de problèmes sexuels et surtout d’adultère. […] Mais placez à son centre l’âme consciente avec tous ses pouvoirs, faites rayonner à son foyer incandescent la divine Psyché, déployez ses ailes — et le théâtre sera le miroir de la vie meilleure, l’éducateur du peuple, l’initiateur qui conduit l’homme à travers la forêt de la vie et les mirages du rêve au sommet des plus hautes vérités.
Entre les élèves, les enfants de la campagne sont plus robustes que les enfants des villes ; entre les enfants des villes, ceux du peuple et des artisans sont plus vigoureux que ceux des riches bourgeois ; les plus faibles et les moins sains sont les enfants des grands. […] Dans la législation des peuples et dans celle des écoles, on dirait que la vertu n’est rien.
Non, dans une république aristocratique ; non, surtout si vous observez que Platon parle surtout du respect aux lois anciennes, qui ne sont, au moment présent, l’œuvre ni de la foule, ni d’une élite, mais l’œuvre du passé, l’oeuvre lente des siècles ; et vous arrivez à cette conclusion que peut-être Platon est un homme qui veut qu’un peuple soit surtout gouverné par son passé, ce qui est l’essence même de l’aristocratisme. — Vous vous trompez peut-être ; mais vous avez comparé, rapproché, contrôlé une idée par l’autre, limité ou rectifié une idée par l’autre, et vous avez goûté le plaisir qui est celui que l’on doit aller chercher chez un penseur, qui est le plaisir de penser. […] Nous rencontrons dans Montesquieu cette grande idée générale : influence des climats sur les tempéraments, et sur les moeurs, et sur les idées, et sur les institutions des peuples.
— entre le petit doigt et le pouce des peuples, et il dépense de vraies facultés scientifiques — de l’aveu des savants eux-mêmes — à faire la preuve approximative de sa thèse, engendrée d’Helvétius ; car Helvétius plaçait aussi la supériorité de l’homme sur les autres espèces dans la conformation de sa main. […] « Telles ne furent pas, — dit-il, après avoir parlé des mains pointues, — telles ne purent être les mains du peuple roi.
Raillerie à part, d’ailleurs, sainte Térèse, qui n’est guère connue en France, comme nous venons de le dire, que pour deux ou trois mots sublimes, exprime l’amour avec une telle flamme qu’elle a vaincu, avec ces deux ou trois mots, l’ironie du peuple le moins romanesque de la terre, et elle a eu pour lui le charme du romanesque ! […] Alors apparaît et s’annonce cette grande conductrice d’âmes qui devait littéralement gouverner, du fond de son monastère d’Avila, tout un peuple de religieux et de religieuses, et déployer dans cette conduite une prudence, une fermeté, une science des obstacles, et enfin un bon sens (ce bon sens maître des affaires, a dit Bossuet) qu’aucun chef d’État n’eut peut-être au même degré que sainte Térèse, l’Extatique, la Sainte de l’Amour.
Je voudrais seulement démontrer qu’au cours des siècles, le trésor des choses auxquelles nous reconnaissons de la beauté s’enrichit, et que le caractère de beauté qui, à l’origine ou chez les peuples enfants, n’est attribué qu’à quelques spécialités, — une belle femme, une belle arme, un beau bijou, — tend invariablement à s’universaliser, jusqu’à s’appliquer au tout, en d’autres termes, que notre compréhension du monde va s’élargissant. […] La nouvelle Maison du Peuple de Bruxelles, qu’achève en ce moment Horta, sera de nature à montrer ce que l’art moderne peut attendre de lui ; car si son œuvre n’est pas encore considérable par le nombre, combien grande est sa signification pour ceux qui savent voir !
Les vieux peuples, comme les vieilles gens, sont tentés de revenir à leurs patenôtres et de n’en plus sortir.
Les colonnes du vieux style égyptien s’élèvent auprès de la colonne corinthienne ; un morceau d’ordre toscan s’unit à une tour arabe, un monument du peuple pasteur à un monument des Romains.
Son Avis au peuple sur sa santé, publié en 1761., a eu plus de trente éditions.
Les Brigands furent pour Schiller ce que Werther avait été pour Goethe, une débauche d’imagination prise au sérieux par la naïveté du peuple allemand. […] Quand les peuples s’affranchissent d’eux-mêmes, le bien-être ne peut subsister. […] Quand je voyais le peuple se rendre en foule à l’église, quand j’entendais les membres d’une nombreuse communion de croyants confondre leurs voix dans une même prière : Oui, me disais-je, elle est divine cette loi que les meilleurs des hommes professent, qui dompte l’esprit et console le cœur. […] quand on a beaucoup vécu, beaucoup pratiqué les idées, les passions, les rois, les peuples, le dédain superbe et tranquille n’est-il pas la dernière forme de la sagesse humaine ? […] Malheur aux peuples à plusieurs têtes !
…” « Mon père, enthousiasmé des Chinois (peut-être à cause de leur longévité comme peuple), lisait alors les gros livres des jésuites missionnaires qui ont décrit la Chine les premiers ; il annotait aussi de précieuses éditions de la Bible qu’il possédait, livre qui, en tout temps, causa son admiration. […] En 1789, le jour où Mirabeau l’introduisit par sa phrase fameuse à M. de Brézé : « Allez dire à votre maître que nous sommes ici par la volonté du peuple, et que nous n’en sortirons que par la force des baïonnettes », la révolution est faite ; Mirabeau se déshonore et se dépopularise en essayant de la diriger en sens inverse. […] — Un conseil d’État nommé par lui et une armée chez un peuple militaire. […] Qu’on lise mon avant-dernier numéro de mes Conseils au peuple ! […] — Non, Dieu a donné par la nature des choses des règles instinctives aux peuples comme aux individus
Mais il veut dire aussi que les Eglises sont des livres de pierre où les générations d’autrefois écrivaient leur pensée pour l’éternité ; qu’elles ont été des symboles compliqués, où le plan, les sculptures, les plus minces détails exprimaient des idées ; que, parlant ainsi aux initiés un langage mystérieux, elles parlaient en même temps aux yeux de la foule par leurs vitraux, leurs fresques, leur peuple de statues ; qu’elles ont matérialisé durant des siècles le génie poétique et les aspirations populaires ; que les cathédrales gothiques en particulier, par leur élan vers le ciel, par la hardiesse de leurs lignes verticales, ont rendu à merveille les espérances et les envolées mystiques d’un âge de foi tourné presque tout entier vers l’au-delà ; seulement que, l’imprimerie étant inventée, la pensée, au lieu de se pétrifier, devient oiseau, vole d’un bout du monde à l’autre, se rit du temps et de l’espace, sûre qu’elle est de pouvoir se multiplier à l’infini ; que désormais la Bible de marbre et de granit est vaincue et destinée à être remplacée par la Bible de papier, plus claire, plus mobile et, malgré l’apparence, plus durable. […] La mode, comme toute chose au monde, obéit à des lois ; et elle est, à n’en pas douter, pour qui sait l’interpréter, une grande révélatrice de l’esprit d’un peuple à un moment donné. […] A mesure que la démocratie s’affermit et s’organise en un pays, il semble que la littérature s’associe de plus en plus aux fêtes dans lesquelles tout un peuple communie et prend pour quelques heures une seule et même âme. […] Qui sait s’il ne se prépare pas ainsi, par le peuple et pour le peuple, un renouvellement de ces solennités légendaires de la Grèce où la poésie eut toujours sa place marquée parmi tous les arts qui font la joie et l’orgueil de l’humanité ?
Il trouve qu’on s’est trompé sur ces peuples… que leur douceur pour les animaux n’est pas venue de la métempsycose ; bien au contraire, c’est elle, la métempsycose, qui vient de cette douceur : « Ce n’est pas leur foi, dit-il, qui a fait leur cœur, c’est leur cœur qui a fait leur foi ! […] * * * — Sur le registre des massacres de Septembre, on lit : « Jugé par le peuple et mis en liber… » liber est effacé, et à la place en surcharge, est écrit en mort. […] 30 mai Il est bien étrange que ce soit nous, nous entourés de tout le joli du xviiie siècle, qui nous livrions aux plus sévères, aux plus dures, aux plus répugnantes études du peuple, et que ce soit encore nous, chez qui la femme a si peu d’entrée, qui fassions de la femme moderne, la psychologie la plus sérieuse, la plus creusée. […] * * * 16 juin S’il revenait, l’abbé Galiani ne manquerait pas de dire devant notre temps : « Je cherche un homme qui ne fasse pas carrière et profession d’aimer ses semblables, qui ne fonde pas d’hôpitaux, qui ne s’intéresse pas aux classes pauvres, qui ne s’occupe pas de donner des cachets de bain au peuple, qui ne soit pas membre d’une société protectrice de n’importe quoi, des chevaux ou du bagne, un homme qui ne se sacrifie pas aux déshérités, un homme qui ne se dévoue pas au journalisme, à la députation, à la tirade parlée ou écrite en faveur des malheureux, des pauvres, des soufrants, des êtres marqués de misère ou d’infamie, un homme qui ne soit pas bon, un égoïste enfin : — oui, pour l’amour de Dieu, j’en demande un…, je voudrais en voir un, brutal, cynique, sincère. » * * * 18 juin Cette nuit à deux heures du matin, nous sommes dans le LONG ROCHER, traversant des clairières, où la lune danse comme si elle allait à la cour de la reine Mab, marchant comme à travers un raccourci du Chaos, éclairé par une lumière électrique d’Opéra. […] C’est du peuple qui semble avoir appris, tout à l’heure, la victoire d’Austerlitz… Il y a là, le dernier sauvage, sous son diadème de plume, un tapeur de grosse caisse nostalgique, aux paupières lourdes et lassées, exécutant sa musique avec une sorte de suprême indifférence mélancolique.
On ne peut nier pourtant qu’il n’y ait dans la vie des peuples, comme dans celle des individus, des périodes de trouble et de malaise. […] La question de la décadence littéraire se rattache, selon nous, à la biologie et à la sociologie, car cette décadence particulière n’est que le symptôme d’un déclin, momentané ou définitif, dans la vie totale d’un peuple ou d’une race. Et, comme la vie d’un peuple offre les mêmes phases biologiques que la vie d’un grand individu, on doit retrouver avant tout dans une époque de vraie décadence les traits qui caractérisent la vieillesse. […] Le système nerveux des races s’use comme celui des individus ; le fond de sensations et de sentiments communs à un peuple a toujours besoin d’être renouvelé et rafraîchi par l’assimilation d’idées nouvelles. […] En tout cas, cet effet amollissant de l’art a été souvent constaté sur les peuples, qui, à trop exercer leurs facultés de contemplation et d’imagination, perdent parfois leurs facultés d’action.
Il faudrait énumérer le combat de Schœngraben, suivi de la sinistre chevauchée du prince André au milieu de la débâcle des caissons et des voitures chargées de blessés, la bataille d’Austerlitz, l’entrevue de Tilsitt, le passage du Niémen, la description mémorable de la bataille de Borodino, où tandis que pleuvent les boulets, dans le va-et-vient des servants, sur le crépitement de la fusillade et le choc horrible des corps à corps, rayonne paisiblement le beau soleil d’une journée d’automne illuminant l’herbe mouillée de givre et de gouttelettes de sang, quand, tout auprès, au milieu des rangs pressés d’un régiment misérablement décimé à distance par les obus, succombe le prince André déchiré au ventre par un biscaïen et emporté à l’affreux et fade charnier qui est devenu l’ambulance ; d’autres tableaux apparaissent et le récit de cette grandiose rencontre de deux peuples se déroule en aspects tracés avec une si évidente véracité qu’on s’imagine posséder enfin l’exacte représentation de la guerre. […] De même Karataïef, ce soldat cénobitique et affable, qui personnifie l’esprit de bonté du peuple russe, est un homme très nettement différencié, d’un visage distinct, d’un grand sens et dont les actes ne sauraient être prévus sur l’énoncé d’une formule. […] Lévine et sa femme, Karénine, Anna, Wronsky, le prince Oblonsky et la princesse Dolly, la famille Cherbatky, les amis et les amies de tous ces gens, les enfants, les serviteurs et les paysans, font du roman contemporain de Tolstoï, une œuvre enchevêtrée et confuse, comble et embrouillée qui choque déjà toutes les règles d’unité et d’élaguement qui nous sont familières ; mais qu’est cette complication devant celle des trois gros volumes de La Guerre et la Paix où les vies complètes du prince André, du prince Pierre, de Nicolas Rostow, mêlées aux destins des membres de leurs familles, entourés d’une foule véritable de satellites, de connaissances, se poursuivent à travers de grandioses récits de batailles, de négociations, d’entrevues, dans lesquelles figurent tous les personnages célèbres du temps, à travers les scènes populaires, rustiques et sociales qui constituent toute l’histoire politique et intime d’un peuple ? […] Ces êtres sont étudiés non en une aventure particulière, en une manifestation spéciale de l’une ou de l’autre des grandes passions humaines, mais suivis pas à pas dans leur carrière extérieure, leur évolution mentale et corporelle ; c’est le cours même de la vie, le flux des pensées, des forces, de l’existence, du temps en l’homme qu’ils montrent, comme ils mesurent de leur nombre et de leur variété l’épais enchevêtrement d’un peuple. […] Les maisons, les champs, les rues, les jours, les nuits, le train même de la vie, de l’histoire, de la société sont là ; on y trouve des hommes dignes d’amitié ou de haine, des femmes à aimer, des êtres à qui sourire et d’autres qui déplaisent ; les personnages ont le visage familier et humain, il y a des familles cordiales, de cérémonieux salons, des gens du peuple et des soldats ; les discussions s’engagent sur les éternels problèmes et l’on peut ensuite échanger les plus vains propos ; les êtres y aspirent, s’émeuvent et pensent avec l’infinie variété de nos semblables.
La théorie de l’évolution lente chère aux Rosny, devait pourtant plaire aux socialistes, et une sorte de fatalisme dominateur qui se dégage de leurs œuvres, un esprit de discussion trop subtil éloignaient d’eux le peuple. […] Rosny pensent que ce n’est pas par le peuple que peut se faire une évolution progressive, mais par la bourgeoisie. […] Jean Vignaud (Les Amis du Peuple), Jean Viollis (La Récompense), Louis Lumet (La Fièvre, le Chaos), avec un style ardent et clair, des dons de composition et d’évocation très particuliers, Henry de Bruchard (La Fausse Gloire), etc., avec des préoccupations différentes allaient au peuple et nous contaient ses misères, et la vie de ceux qui le dirigent ou espèrent le diriger. […] Nous citons : « Au-delà de la rude clarté des landes rouges, au-delà des peuples d’oliviers, vers les confins de la mer bleue, jaillissait dans la splendeur géante et lourde qui couronnait l’entassement de ses âges, Marseille !
Seule, une chanson surgira, faite par n’importe qui ; ce ne sera pas un poème, ni une musique, ce sera tout le cri de tout un peuple ! […] D’où un long malentendu entre la poésie et le peuple. […] — de les entendre, ces maîtres encouraient une indifférence presque générale ; et d’eux s’écarta le peuple, dont ils ne voulaient point. […] Après la bourgeoisie, non pas le peuple, mais la populace. […] Mais c’est le Génie et le Peuple, élémentaires et énormes, qui auront raison, et qui triompheront.
S’agit-il de mesurer la valeur d’un peuple ? C’est l’idée produite et propagée par ce peuple que l’écrivain choisit comme critérium. […] Les guerres de la Révolution et de l’Empire ont fait terriblement voyager notre peuple, par nature casanier comme il est économe. […] C’est là de quoi faire un peuple de subtils raisonneurs, d’industrieux travailleurs, de politiciens aiguisés. […] — On ne commande à la nature qu’en lui obéissant », appliqué au gouvernement des peuples.
Mais surtout gagnons la voix publique. » Remarquez en passant que Corneille, citant librement l’opinion de Térence, croit pouvoir ajouter au Peuple la Cour. — Molière n’exprimera pas d’autres sentiments, et prêchera aussi que la première de toutes les règles est de plaire au Peuple et à la Cour. […] Cité pour ce meurtre devant le tribunal des Duumvirs, et condamné par eux, il est absous par le Peuple. […] D’autres occasions se présenteront d’étudier ces migrations d’idées entre les divers peuples. […] La reine de Castille, Isabelle, pour contenter les vœux de son peuple, doit se marier. […] Lorsque, pendant la Fronde, le prince de Condé et son frère avaient été arrêtés, le peuple avait fait des feux de joie ; puis, lorsqu’ils furent mis en liberté et rentrèrent dans Paris, ce même peuple les reçut comme eu triomphe et les accompagna de ses acclamations.
Sarrazin nous le dit : au temps de L’Amour tyrannique, le peuple s’étonne, quand les unités manquent dans une pièce. […] Rien de l’esprit des salons, qui est un jeu d’idées ; c’est un jet de sensation, comme l’esprit du peuple. […] Le peuple est attaqué dans sa santé comme dans sa bourse. […] Sorti des couches profondes du peuple, et resté peuple de manières et d’instinct, débraillé, bruyant, brutal, toute sa personne répugne à l’homme de cour, est juste le contre-pied de la fine distinction aristocratique. […] Amalgamant les idées de Diderot et les exemples des Allemands, il répudie l’idéal classique, le style classique, et il conçoit un drame démocratique qui glorifiera la vertu du peuple dans le langage du peuple.
Le principal personnage de l’Astrate, Elise, reine de Tyr, assiégée par le peuple dans son palais, s’empoisonne. […] L’intérêt de l’Etat est de n’avoir qu’un roi, Qui, d’un ordre constant gouvernant ses provinces, Accoutume à ses lois et le peuple et les princes. […] Alexandre imite cet enthousiasme sublime de l’amour heureux dans ces paroles à Cléofile, moins connue que Chimène : Par des faits tout nouveaux je m’en vais vous apprendre Tout ce que peut l’amour dans le cœur d’Alexandre : Maintenant que mon bras, engagé sous vos lois, Doit soutenir mon nom et le vôtre à la fois, J’irai rendre fameux, par l’éclat de la guerre, Des peuples inconnus au reste de la terre, Et vous faire dresser des autels en des lieux Où leurs sauvages mains en refusent aux dieux13. […] Quelle gloire, en effet, d’accabler la faiblesse D’un roi déjà vaincu par sa propre mollesse, D’un peuple sans vigueur et presque inanimé, Qui gémissait sous l’or dont il était armé, Et qui, tombant en foule, au lieu de se défendre, S’opposait que des morts au grand cœur d’Alexandre ? […] Le théâtre, chez un peuple civilisé, n’est pas fait pour donner aux savants le plaisir d’apprécier l’exactitude d’un pastiche de l’antique, mais pour exprimer des sentiments généraux dans la langue et selon le génie de ce peuple.
C’est un art d’hallucination, très propre à plaire aux enfants, aux peuples enfants, ou même, de nos jours, aux imaginations surexcitées. […] La vie auparavant réelle et commune, c’est le rocher d’Aaron, rocher aride, qui fatigue le regard ; il y a pourtant un point où l’on peut, en frappant, faire jaillir une source fraîche, douce à la vue et aux membres, espoir de tout un peuple : il faut frapper à et ce point, non à côté ; il faut sentir le frisson de l’eau vive à travers la pierre dure et ingrate. […] Nous sentons s’enrichir notre cœur quand y pénètrent les souffrances ou les joies naïves, sérieuses pourtant, d’une humanité jusqu’alors inconnue, mais que nous reconnaissons avoir autant de droit que nous-mêmes, après tout, à tenir sa place dans cette sorte de conscience impersonnelle des peuples qui est la littérature. […] Or le peuple hébreu a eu, au point de vue littéraire, ce rôle important de condenser tout le génie oriental. […] Pour comprendre comme Pascal s’était fortement pénétré du style biblique il suffit de lire les traductions qu’il a faites dans les Pensées, de divers passages des prophètes, surtout celles du chapitre cxix d’Isaïe : « Ecoutez, peuples éloignés. » C’est, dit M.
Georges Pioch a voulu célébrer en ces Instants de ville ; ce sont, au contraire, les visions austères et tristes de la ville du peuple de l’ouvrier — et c’est avec des traits ordinairement exacts et souvent profonds que le poète évoque les aspects et les états des milieux ouvriers : tantôt c’est la rue, tandis que Le matin, morne et clair, sonne comme une enclume.
Les grands hommes qui, en ce moment, gouvernent les affaires des peuples (avec quel succès ?
En voyant cet Auteur remonter à la source de tous les systêmes, développer la progression des idées humaines, produire, si l’on peut s’exprimer de la sorte, la généalogie des vérités & des erreurs, on ne peut s’empêcher de convenir que la Philosophie moderne n’a fait que répéter ce qui avoit été dit & redit dans tous les siecles & presque chez tous les peuples.
« Ce Savant connoissoit, dit l’Auteur de son Eloge historique*, tous les Romans & les Théatres de presque tous les peuples, comme si ses lectures n’avoient jamais eu d’autre objet…..
C’est elle qui corrompt les mœurs & les maximes, Ravale des vertus, & couronne des crimes, Selon son intérêt regle les sentimens, Juge des actions par les événemens, Méprise un vertueux que le Ciel abandonne, Révere un scélérat que le bonheur couronne, Aux Peuples inquiets vante les nouveautés, Et leur fait un Héros d’un Chef de Révoltés, &c.
Or, chez les autres peuples idolâtres, qui ont ignoré le système mythologique, cette poésie a plus ou moins été connue : c’est ce que prouvent les poèmes Sanskrits, les contes Arabes, les Edda, les chansons des Nègres et des Sauvages60.
Il s’y joint, en outre, une idée qui console notre petitesse, en voyant que des peuples entiers, des hommes quelquefois si fameux, n’ont pu vivre cependant au-delà du peu de jours assignés à notre obscurité.
Vendredi 22 mai Drôle de peuple que le peuple français ! […] Conçoit-on chez les pauvres filles du peuple, qui ne se sentent pas la force physique nécessaire pour gagner leur vie, les angoisses secrètes, le crucifiement journalier qu’elles éprouvent ? […] Nous allons dîner ensemble, et en dînant, Geffroy me parle d’un livre, qu’il se prépare à faire et qu’il veut me dédier, un livre où il veut suivre et étudier une fillette du peuple, jusqu’à l’âge où j’ai mené ma Chérie. […] Le peuple est imbécile, n’est-ce pas, et la jeunesse aussi ! Et c’est le peuple et la jeunesse qui, à l’encontre des gens éclairés, intelligents, devinent les gouvernements et les grands hommes de l’avenir.
Sous ces conditions naturelles, l’école positive tend, d’un côté, à consolider tous les pouvoirs actuels chez leurs possesseurs quelconques, et, de l’autre, à leur imposer des obligations morales de plus en plus conformes aux vrais besoins des peuples. […] Or, le peuple ne pouvait longtemps s’intéresser directement à de tels conflits, puisque la nature de notre civilisation empêche évidemment les prolétaires d’espérer, et même de désirer, aucune importante participation à la puissance politique proprement dite. […] Le peuple ne peut s’intéresser essentiellement qu’à l’usage effectif du pouvoir, en quelques mains qu’il réside, et non à sa conquête spéciale. […] En un mot, le peuple est naturellement disposé à désirer que la vaine et orageuse discussion des droits se trouve enfin remplacée par une féconde et salutaire appréciation des divers devoirs essentiels, soit généraux, soit spéciaux. […] Plus on méditera sur cette relation naturelle, mieux on reconnaîtra que cette mutation décisive, qui ne pouvait émaner que de l’esprit positif, ne peut aujourd’hui trouver un solide appui que chez le peuple proprement dit, seul disposé à la bien comprendre et à s’y intéresser profondément.
— Le conseil des peuples devient le mépris du chiffonnier qui passe ! […] En vingt ans la France accomplira au besoin toute une révolution, mais qu’est-ce que vingt ans pour savoir ce que deviendra l’art, le goût, la passion, le plaisir, le charme, l’esprit de ce grand peuple de France ? […] Il était l’ami du peuple, a dit Boileau, et tant que le peuple ne lui avait pas battu des mains et ne l’avait pas salué de son gros éclat de rire, Molière n’était ni content, ni tranquille. […] Il sentait que la foule allait obéir aux moindres inspirations de son génie ; il se disait qu’il serait le favori du roi qui régnait à Versailles et du peuple de France ! […] Il faut donc accepter avec joie ces vieilles et franches comédies qui ont été, pour Molière et pour son peuple, une cause si féconde et si vraie de bonne et limpide gaieté.