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1723. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — G — article » pp. 433-434

« Si ce Livre me survit, dit-elle, je défends à toute personne, telle qu’elle soit, d’y ajouter, ni diminuer, ni changer jamais aucune chose, soit aux mots ou en la substance, sous peine à ceux qui l’entreprendront, d’être tenu pour détestables aux yeux des Gens d’honneur, comme violateurs d’un sépulcre innocent….

1724. (1759) Salon de 1759 « Salon de 1759 — Carle Van Loo » pp. 92-93

Il fallait lever au ciel des bras désespérés, avoir la tête renversée en arrière ; les cheveux hérissés ; une bouche ouverte qui poussât de longs cris ; des yeux égarés ; et puis une petite Medée, courte, roide, engoncée, surchargée d’étoffes ; une Medée de coulisse ; pas une goutte de sang qui tombe de la pointe de son poignard ou qui coule sur ses bras ; point de désordre ; point de terreur.

1725. (1767) Salon de 1767 « Peintures — Madame Vien » p. 173

Madame Vien Une poule hupée, veillant sur ses petits. très-beau petit tableau ; bel oiseau, très-bel oiseau ; belle huppe, belle cravate bien hérissée, bec entr’ouvert et menaçant, œil ardent, ouvert et saillant ; caractère inquiet, querelleur et fier.

1726. (1767) Salon de 1767 « Peintures — Amand » p. 279

Plusieurs mauvais dessins dont je ne parlerais pas, sans un de ces traits d’absurdité sur lesquels il faut arrêter les yeux des enfans.

1727. (1828) Introduction à l’histoire de la philosophie

Ainsi voilà l’homme jusque-là négligé et inaperçu, établi comme le point de départ et le centre de toute étude, constitué à ses propres yeux un être d’un prix infini, et le plus digne objet de la pensée. […] L’accord de ces deux méthodes est à nos yeux le flambeau à l’aide duquel seulement on peut s’orienter dans le labyrinthe de l’histoire. […] Il l’est pour les autres parce qu’il l’est à ses propres yeux, et il l’est en effet dans un sens profondément philosophique. […] Aussi, quand deux armées sont en présence, il se passe un bien plus grand spectacle que celui dont la philanthropie détourne les yeux. […] l’Allemagne prend garde à la France ; la France, qui s’était pour ainsi dire isolée du reste de l’Europe, tourne les yeux vers l’Allemagne.

1728. (1924) Critiques et romanciers

Les traits, mesquins ; les yeux, petits ; le front petit. […] Au lieu qu’un sourire, qui me séduit, ne m’inspire pas un mot… et mes yeux, que des yeux ennemis font étinceler, se baissent devant un regard dont ils aiment la lucidité ou la douceur. […] Voilà ce que Mirbeau a vu dans les yeux de Dingo : avec un peu d’imagination neurasthénique ! […] Il avait de petits yeux très vifs et qui vous dévisageaient sans pitié. […] Si je regarde en l’air, le soleil brûle mes yeux.

1729. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — A — Ajalbert, Jean (1863-1947) »

Vous levâtes tout à coup les yeux vers un cadre de bois laqué qui contient un mélancolique et doux pastel signé : J.

1730. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — G — Gide, André (1869-1951) »

Gide est devenu, après maintes œuvres spirituelles, l’un des plus lumineux lévites de l’église, avec autour du front et dans les yeux toutes visibles les flammes de l’intelligence et de la grâce, les temps sont proches où d’audacieux révélateurs inventeront son génie… Il mérite la gloire, si aucun la mérita (la gloire est toujours injuste), puisqu’à l’originalité du talent le maître des esprits a voulu qu’en cet être singulier se joignit l’originalité de l’âme.

1731. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — J — Joncières, Léonce de »

À la vieille terre d’Égypte, toujours mystérieuse au seuil des civilisations, nourricière des races spiritualistes invinciblement, gardienne des religions et des traditions augustes, il a emprunté le décor de ces courts poèmes et aussi la mélancolie qui, des grands yeux de pierre des Sphynx, se répand encore sur l’humanité comme l’ombre du plus beau rêve que l’homme ait conçu.

1732. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — R — Rivoire, André (1872-1930) »

Nous nous sommes aimés des lèvres et des yeux ; J’ai voulu qu’un désir t’accompagne en ta vie.

1733. (1894) Propos de littérature « Introduction » pp. 9-10

Mais, je le répète, tous les deux sont poètes, tous les deux sont artistes et, si dans la suite de cet article les mots défaillaient à ma pensée, je voudrais affirmer encore qu’ils sont égaux à mes yeux.

1734. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — S. — article » pp. 171-172

Il est sans doute dans la regle que la foiblesse & la timidité ne jouissent point, aux yeux du Public, de la gloire d'un Ecrit qui ne peut être que l'effet du zele & du courage ; mais cette timidité va jusqu'à la crainte servile, quand elle s'empresse avec affectation de désavouer ce que tout honnête Littérateur voudroit avoir fait pour l'honneur des Lettres, les intérêts de la justice & de la vérité.

1735. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Première partie — Section 8, des differens genres de la poësie et de leur caractere » pp. 62-63

Elles font encore un plaisir sensible quand elles n’ont plus rien de nouveau pour nous, et quand la memoire devance les yeux dans cette lecture.

1736. (1913) Essai sur la littérature merveilleuse des noirs ; suivi de Contes indigènes de l’Ouest-Africain français « Contes — III. La tête de mort »

La tête de mort (Peuhl) En entrant dans un village, un homme a trouvé une tête décharnée et aux orbites vides de leurs yeux, qui était sur le bord de la route.

1737. (1891) Enquête sur l’évolution littéraire

… J’ouvrais des yeux comme des hublots. […] À contempler ce spectacle, l’œil ébloui de mon hôte paraissait de l’aventurine en fusion. […] Je pense qu’au contraire tout est à faire, que tout recommence pour des yeux neufs. […] Jourdain : Belle Marquise, vos yeux me font mourir d’amour. […] qu’importe si l’œil et l’oreille s’y perdent !

1738. (1858) Du roman et du théâtre contemporains et de leur influence sur les mœurs (2e éd.)

aux yeux des créatures humaines, l’avenir est impénétrable. […] Qu’ils soient forts dans le vice, qu’ils soient audacieux dans le mal, par cela seul à ses yeux ils sont grands et dignes d’admiration. […] On a maintenant les pièces sous les yeux : on peut juger. […] Ouvrez les yeux : interrogez les faits. […] Cette morale, elle a été mise en action sous nos yeux par tous les drames et les romans modernes.

1739. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre III. L’âge classique. — Chapitre III. La Révolution. »

Pour voir les courants distincts où glissait chacune des deux nations, il n’y avait qu’à ouvrir les yeux. […] on est tenté de le lire du pouce et non des yeux. —  Quarante-deuxième sermon ; contre la Médisance. […] Il peint les gens comme s’il les avait sous les yeux. […] ils sont au-dessus d’elle, ou du moins elle est au-dessus d’eux), mais pour le zèle et les jeûnes, et les yeux dévotement levés au ciel, et la sainte rage contre les péchés d’autrui. […] Pour eux, ils sont « les princes de l’espèce humaine. » « Je les vois passer, l’orgueil dans le maintien, le défi dans les yeux, tendus vers de hauts desseins, troupe sérieuse et pensive.

1740. (1870) Portraits contemporains. Tome IV (4e éd.) « M. THIERS. » pp. 62-124

Logé à la cour sans y vivre et placé là comme en observation, on le voit rire amèrement et quelquefois s’indigner d’un spectacle qui se passe sous ses yeux. […] Les chapitres sur Marseille sont à la fois plein d’amour et de réflexion : on n’a jamais mieux rendu, ni d’un trait plus approprié, la beauté de ligne et de lumière de ce golfe de Marseille, cette végétation rare et pâle, si odorante de près, la silhouette et les échancrures des rivages, la Tour Saint-Jean qui les termine, « au couchant, enfin, la Méditerranée qui pousse dans les terres des lames argentées ; la Méditerranée avec les îles de Pomègue et de Ratoneau, avec le château d’If, avec ses flots tantôt calmes ou agités, éclatants ou sombres, et son horizon immense où l’œil revient et erre sans cesse en décrivant des arcs de cercle éternels. » L’histoire civile de Marseille, avec ses vicissitudes et ses revirements, s’y résume très à fond ; son génie s’y révèle à nu, raconté avec feu par le plus avisé de ses enfants. […] On pesait leurs mérites divers ; mais aucun œil encore, si perçant qu’il pût être, ne voyait dans cette génération de héros les malheureux et les coupables ; aucun œil ne voyait celui qui allait expirer à la fleur de l’âge, atteint d’un mal inconnu, celui qui mourrait sous le poignard musulman ou sous le feu ennemi, celui qui opprimerait la liberté, celui qui trahirait sa patrie ; tous paraissaient grands, purs, heureux, pleins d’avenir ! […] Et puis l’idée du grand homme s’ajoute aussitôt à son expression simple, l’imagination du lecteur fait le reste, et l’œil ébloui met le rayon. […] Puis viennent les basiliques, l’art roman, le mélange de l’ogive du nord avec l’art arabe : il a là toute une théorie déduite historiquement, et qu’il croit pleinement justifiable sous le point de vue technique aux yeux des gens du métier.

1741. (1862) Portraits littéraires. Tome II (nouv. éd.) « Gabriel Naudé »

Mais tous ces hôtes passagers qui ne pourraient qu’égayer d’une anecdote un fond si grave, que sont-ils auprès du fondateur même, je veux dire le bibliothécaire de Mazarin et le grand bibliographe d’alors, ce Gabriel Naudé dont le cachet est là partout sous nos yeux, dont l’esprit se représente à chaque instant dans le choix des livres et s’y peint comme dans son œuvre ? […] On les veut nouveaux et flatteurs à l’œil comme à la fantaisie ; on y cherche un peu la même beauté que dans la nature. […] » Naudé n’oubliait jamais cette pensée en lisant l’histoire ; il en faisait surtout l’application aux grands esprits cultivés depuis la renaissance des lettres, et ce qu’il avait en Italie sous les yeux l’y confirmait. […] Ainsi vont les projets humains sous l’œil d’en haut ou sous le je ne sais quoi qui les déjoue. […] Ses livres ont, à mes yeux, déjà la valeur de manuscrits, en ce sens que, selon toute probabilité, ils ne seront jamais réimprimés.

1742. (1861) Cours familier de littérature. XII « LXXIe entretien. Critique de l’Histoire des Girondins (2e partie) » pp. 305-367

Je touche à peine à ma pleine maturité ; j’ai vu de mes yeux d’enfant la première république sans la comprendre et sans me souvenir d’autre chose que des sanglots qu’elle faisait retentir dans les familles décimées par les prisons ou les échafauds ; j’ai vu l’empire sans entendre autre chose que les pas des armées allant se faire mitrailler sur tous les champs de bataille de l’Europe, et les chants de victoire mêlés au deuil de toutes ces familles du peuple qui payaient ces victoires du sang prodigué de leurs enfants ; j’ai vu l’Europe armée venir deux fois, sur les traces de nos armées envahissantes, envahir à son tour notre capitale ; j’ai vu les Bourbons rentrer avec la paix humiliante mais nécessaire à Paris et y retrouver la guerre des partis contre eux au lieu de la guerre étrangère éteinte sous leurs pas ; j’ai vu Louis XVIII tenter la réconciliation générale, dans le contrat de sa charte entre la monarchie et la liberté ; je l’ai vu manœuvrer avec longanimité et sagesse au milieu de ces tempêtes de parlement et d’élection qui ne lui pardonnaient qu’à la condition de mourir ; j’ai vu Charles X, pourchassé par la meute des partis parlementaires, ne trouver de refuge que dans un coup d’État désespéré qui fut à la fois sa faute et sa punition. […] Moitié complices, moitié contraints, les Girondins cèdent, le 20 juin et le 10 août, aux grandes séditions où le trône tombe sous leurs yeux. […] Le livre des Girondins était donc à mes yeux non pas un levier pour soulever et précipiter un trône, mais une pierre d’attente pour remplacer un édifice écroulé dans ces éventualités de gouvernements qui seraient appelés par le hasard à remplacer le gouvernement menaçant et menacé de 1830. […] La moindre justice dans l’historien lui paraît une complicité, la moindre équité est à ses yeux une connivence.

1743. (1863) Cours familier de littérature. XV « XCe entretien. De la littérature de l’âme. Journal intime d’une jeune personne. Mlle de Guérin (3e partie) » pp. 385-448

Tout cela, je l’aime, je m’en savoure l’œil, m’en pénètre jusqu’au cœur, qui tourne aux larmes. […] La diversion fait l’intérêt des yeux et de l’esprit, car nous ne nous plaisons qu’en curiosité. […] J’en fermai les yeux. […] à elle-même ; elle note simplement ses impressions de la journée sans penser qu’un autre œil que le sien sondera jamais ces doux mystères.

1744. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre XIV. La littérature et la science » pp. 336-362

Dans les périodes réalistes, la science, qui constate, accumule et ordonne des faits réels, triomphe et fait invasion sur le territoire de sa voisine ; dans les périodes idéalistes, la littérature, qui ne peut créer la beauté sans avoir devant les yeux un idéal, prend sa revanche et ressaisit une partie du terrain conquis. […] Voyez plutôt la description d’un livre singulier usité chez les habitants de la Lune : « C’est un livre miraculeux…, où pour apprendre les yeux sont inutiles ; on n’a besoin que des oreilles. […] Et plus d’un répète avec mélancolie, après Sully Prudhomme121 : Comment chanter, pendant qu’un obstiné chimiste Souffle le feu, penché sur son œuvre incertain, Et suit d’un œil fiévreux un atôme à la piste, De la cornue au four, du four au serpentin ? […] Le style est coloré, pittoresque ; il parle aux yeux ; il sait décrire la nature, exprimer avec vigueur les sensations.

1745. (1893) La psychologie des idées-forces « Tome second — Livre sixième. La volonté — Chapitre deuxième. Le développement de la volonté »

Dire : deux et deux font quatre, c’est, en abrégé et par parole, prendre deux objets, puis deux, et les réunir en une même représentation qui résume et synthétise les mouvements successifs de la main ou de l’œil. […] Agir avec les yeux de l’intelligence ouverts, c’est être au centre d’une multitude de relations intellectuelles qui disparaîtraient si on agissait les yeux fermés. […] Quelque contraste qu’il y ait pour les yeux entre le départ soudain et l’immobilité apparente de l’instant précédent, l’un n’est, cependant que la continuation de l’autre.

1746. (1886) Quelques écrivains français. Flaubert, Zola, Hugo, Goncourt, Huysmans, etc. « Victor Hugo » pp. 106-155

Il explique le rictus des cadavres par la joie des morts de rentrer dans le grand tout, et la position des yeux des crapauds par leur désir de voir le ciel bleu. […] La marche de Gwynplaine dans le palais somptueux et muet de Lord Clancharlie paraît quelque chose de hagard et d’énorme ; la scène est montrueuse où Josiane, en sa lascive demi-nudité, colle ses lèvres junoniennes à la face tailladée de son hideux amant, et le regarde « fatale », avec ses yeux d’Aldébaran, rayon visuel mixte, ayant on ne sait quoi de louche et de sidéral. […] Les sourdes ténèbres du lieu, les vieilles et puériles lois latines psalmodiées par le greffier, les paroles surhumainement graves, adressées par le juge, une touffe de fleurs à la main, à la misérable guenille d’homme devant lui, écartelé nu entre quatre piliers et oppressé de masses de fer, la bouche râlante, la barbe suante, la peau terreuse, muet et les yeux clos, cela est énorme et admirable. […] Les personnages y sont des héros ou des monstres : de Javert le « mouchard marmoréen » à Gauvain, le général de trente ans qui possède « une encolure d’hercule, l’œil sérieux d’un prophète et le rire d’un enfant… » Fantine, Mme Thénardier « la mijaurée sous l’ogresse » sont au-delà des deux frontières extrêmes de l’humanité, de même que les guerriers de la Légende des Siècles sont plus grands que des statues.

1747. (1885) Les œuvres et les hommes. Les critiques, ou les juges jugés. VI. « Villemain » pp. 1-41

Il se tint fort coi dans cette gloire qui lui avait si peu coûté, écrivant rarement pour qu’elle ne lui coûtât pas davantage, et aussi pour deux raisons, excellentes toutes deux : la première, c’est qu’au fond il était un esprit sec sous une forme péniblement travaillée, et la seconde parce que se faire rare c’est se faire précieux aux yeux des imbéciles, économisant ainsi son talent pour qu’on le crût immense, et prenant la pose, laquelle n’est pas mauvaise, d’un homme qui, malgré sa richesse, ne peut cependant pas détacher tous les matins un diamant de sa cravate pour nous le donner. […] Les œuvres dont elle est ornée ne sont pas d’une telle splendeur qu’elles puissent faire baisser les yeux à toute une génération, suivie de ses petits, car la renommée de Villemain n’a reçu, il faut bien en convenir, aucune atteinte du temps qu’il a vécu. […] Le commencement paraît splendide ; le milieu brille encore des reflets d’une aurore évanouie, de ces reflets qui ne sont plus dans le ciel mais dont on garde longtemps l’impression dans les yeux ; puis vient la fin grise, déteinte, obscure : telle est l’histoire de Villemain. […] À ses yeux, les Prophètes ne sont guère que des hommes parfaitement élevés.

1748. (1922) Durée et simultanéité : à propos de la théorie d’Einstein « Appendices de, la deuxième édition »

Le rapetissement des objets qui s’éloignent est un moyen, pour l’œil, de noter leur éloignement. […] Dès lors, aux yeux du physicien en S, ils auront leurs Temps propres t″, t‴, etc. […] Car le Temps ralenti du système mouvant n’est que du Temps attribué ; ce temps simplement attribué est le temps marqué par l’aiguille de l’horloge mouvante aux yeux d’un physicien simplement représenté ; l’horloge devant laquelle ce physicien est placé n’est alors qu’une horloge fantasmatique, substituée pour toute la durée du voyage à l’horloge réelle : de fantasmatique elle redevient réelle à l’instant où elle est rendue au système immobile. […] Où que vous mettiez le physicien réel, il apportera avec lui l’immobilité ; et tout point du disque où siège le physicien réel est un point d’où l’effet observé ne devra plus s’interpréter en termes d’inertie, mais en termes de gravitation ; celle-ci, en tant que gravitation, ne change rien au rythme du Temps, rien à la marche des horloges ; elle ne le fait que lorsqu’elle se traduit en mouvement aux yeux d’un physicien pour lequel les horloges et le Temps du système, où il ne siège plus 68, sont devenus de simples représentations.

1749. (1870) La science et la conscience « Chapitre II : La psychologie expérimentale »

Tandis que la culture d’esprit et la supériorité de nature révèlent à l’œil ou à l’oreille de l’artiste tant de grands ou charmants spectacles, tant de sublimes ou ravissantes harmonies, n’est-il pas vrai que tout cela est lettre close pour l’œil et l’oreille d’un idiot, d’un rustre, ou même d’un homme simplement vulgaire ? […] 25 » Et c’est parce qu’il applique à l’observation de l’homme l’œil de la conscience, que Maine de Biran, sans renouveler l’hypothèse scolastique des forces occultes, parle constamment, dans ses belles analyses, de force, de cause, d’effort, de tendance, tous mots vides de sens dans la langue de la physique, mais dont sa psychologie peut d’autant moins se passer qu’ils sont les seuls qui puissent exprimer le principe même de sa philosophie de l’esprit humain. […] Les causes, qui restent inaccessibles à la science dans l’ordre des choses physiques, tombent au contraire sous l’œil de la conscience et peuvent être étudiées et soumises à l’analyse par la réflexion s’emparant des données du sentiment.

1750. (1876) Chroniques parisiennes (1843-1845) « III — II » pp. 14-15

Mais encore une fois il a l’œil ainsi fait.

1751. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — F. — article » pp. 337-339

Les Preuves de la Religion, ainsi que l’Examen des faits qui servent de fondement au Christianisme, seront toujours, aux yeux d’un Critique plus impartial, la réfutation de cet absurde badinage.

1752. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — S. — article » pp. 188-189

La seconde n’est, à ses yeux, qu’un esprit d’incertitude, de vertige, de révolte, qui tremble à l’idée d'un Dieu vengeur, qui voudroit se soustraire à son existence pour briser ensuite tous les liens de la Societé, vivre dans l’indépendance de tout devoir, & ne respirer que pour soi dans l’Univers.

1753. (1913) Le bovarysme « Deuxième partie : Le Bovarysme de la vérité — I »

Cette constatation doit justifier désormais à nos yeux toute la suite des phénomènes, depuis les plus généraux jusqu’aux plus particuliers, qui ont été exposés dans la première partie de cette étude et où s’est manifestée en acte, à quelque degré, la faculté de se concevoir autre.

1754. (1913) Essai sur la littérature merveilleuse des noirs ; suivi de Contes indigènes de l’Ouest-Africain français « Contes — XIV. Le procès funèbre de la bouche »

déclarèrent les yeux.

1755. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Malherbe et son école. Mémoire sur la vie de Malherbe et sur ses œuvres par M. de Gournay, de l’Académie de Caen (1852.) » pp. 67-87

Sa pièce n’est, si l’on veut, qu’une paraphrase de l’épode d’Horace : « Beatus ille qui procul negotiis… » Racan, qui ne lisait pas Horace dans l’original, avait sous les yeux une traduction en prose que lui en avait donnée son parent et cousin le chevalier de Bueil. […] Son gentilhomme de campagne, il ne va pas le demander aux anciens ; il l’a sous les yeux, et il le décrit d’après nature : Il laboure le champ que labourait son père : Il ne s’informe point de ce qu’on délibère Dans ces graves Conseils d’affaires accablés ; Il voit sans intérêt la mer grosse d’orages, Et n’observe des vents les sinistres présages Que pour le soin qu’il a du salut de ses blés. […] L’Alter ab undecimo… de Virgile est assez naïvement imité en ces vers : Je n’avais pas douze ans, quand la première flamme Des beaux yeux d’Alcidor s’alluma dans mon âme : Il me passait d’un an, et de ses petits bras Cueillait déjà des fruits dans les branches d’en bas.

1756. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Joinville. — II. (Fin.) » pp. 513-532

Un soir, les Sarrasins lui lancent à plusieurs reprises le feu grégeois, qui avait quelque chose de magique et de diabolique à ses yeux comme aux yeux de tous ceux de l’Occident : Toutes les fois que notre saint roi entendait qu’ils nous jetaient le feu grégeois, il se dressait en son lit et tendait les mains vers Notre Seigneur, et disait en pleurant : « Beau sire Dieu, garde-moi mes gens !  […] Et lors lui tombaient les larmes des yeux, très grosses96 ». […] Il a l’image parfaitement nette et qui joue à l’œil, la comparaison à la fois naturelle et poétique.

1757. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Nouvelles lettres de Madame, mère du Régent, traduites par M. G. Brunet. — I. » pp. 41-61

Quand j’y songe, les larmes me viennent aux yeux, et je suis toute triste. » Elle regrette de voir pourtant des tracasseries ou des persécutions religieuses introduites dans le pays, et de se sentir impuissante à intervenir pour protéger ceux qu’on tourmente. […] Au contraire de la nature des femmes, elle n’a aucune envie de plaire, aucune coquetterie : « Nulle complaisance, dit Saint-Simon, nul tour dans l’esprit, quoiqu’elle ne manquât pas d’esprit. » On lui demandait un jour pourquoi elle ne donnait jamais un coup d’œil au miroir en passant : « C’est, répondit-elle, parce que j’ai trop d’amour-propre pour aimer à me voir laide comme je suis. » Le beau portrait de Rigaud nous la rend d’une parfaite ressemblance dans sa vieillesse, grasse, grosse, à double menton, aux joues colorées, avec la dignité du port toutefois et la fierté du maintien, et une expression de bonté dans les yeux et dans le sourire. […] Or, de toutes les mésalliances, quelle plus grande et plus inexplicable à ses yeux que celle qui plaçait Mme de Maintenon à côté de Louis XIV ?

1758. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « M. de Stendhal. Ses Œuvres complètes. — I. » pp. 301-321

Au fond, quand il s’abandonne à les goûts et à ses instincts dans les arts, Beyle me paraît ressembler fort au président de Brosses : il aime le tendre, le léger, le gracieux, le facile dans le divin, le Cimarosa, le Rossini, ce par quoi Mozart est à ses yeux le La Fontaine de la musique. […] On opposait sans cesse Racine et Shakespeare ; les Shakespeare modernes ne sont pas venus, et Racine, Corneille, reproduits tout d’un coup, un jour, par une grande actrice, ont reparu aux yeux des générations déjà oublieuses avec je ne sais quoi de nouveau et de rajeuni. […] Ainsi, d’après cette vue, Sophocle, Euripide, Corneille et Racine, tous les grands écrivains, en leur temps, auraient été aussi romantiques que Shakespeare l’était à l’heure où il parut : ce n’est que depuis qu’on a prétendu régler sur leur patron les productions dramatiques nouvelles, qu’ils seraient devenus classiques, ou plutôt « ce sont les gens qui les copient au lieu d’ouvrir les yeux et d’imiter la nature, qui sont classiques en réalité ».

1759. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « M. Daru. Histoire de la république de Venise. — I. » pp. 413-433

Il lui conseille, comme antidote à l’impatience de publier trop tôt, de jeter les yeux sur le Petit almanach de nos grands hommes qui venait de paraître et qui raillait toutes ces vaines renommées d’un jour. […] Le début est spirituel ; on y voit le Brutus toujours inquiet, et faisant l’Argus, même quand il est couché sur ce lit où chaque soir, comme lui dit le poète, Vous dormez d’un seul œil, tandis que l’autre veille, Et que votre suspect tranquillement sommeille. […] [NdA] Voici la fin du morceau : Quel contraste de voir sur ce lit fortuné, Au lieu du blond Phœbus, digne amant de Daphné, Un étique Apollon, à l’œil terne, au teint pâle, Étalant deux grands bras sur un linge assez sale, Et coiffé d’un velours aux mites échappé, Que ceint en auréole un vieux galon fripé !

1760. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Une petite guerre sur la tombe de Voitture, (pour faire suite à l’article précédent) » pp. 210-230

Après s’être vus à Paris et s’être fait toutes sortes de bonnes grâces, Balzac fut le premier à attaquer de lettres Voiture : Monsieur, bien que la moitié de la France nous sépare l’un de l’autre, vous êtes aussi présent à mon esprit que les objets qui touchent mes yeux, et vous avez part à toutes mes pensées et à tous mes songes. […] Balzac usa quelquefois de la faveur de Voiture en Cour, et le mit en mouvement pour faire arriver de ses œuvres sous les yeux du cardinal de Richelieu ou du cardinal Mazarin : Voiture, qui savait les difficultés et avait du tact, se prêtait à ces démarches autant qu’il fallait, et rien de plus. […] Aux yeux des lecteurs qui examinent et vont au fond, Costar n’y avait point l’avantage.

1761. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « L’abbé de Marolles ou le curieux — II » pp. 126-147

Lorsqu’on a sous les yeux la magnifique édition in-folio de ce Virgile traduit, qui parut en 1649 entre les deux Frondes, avec figures, tables, remarques et commentaires, le portrait du traducteur en tête de la main de Mellan, on se prend à regretter que tant de dépense ait été en pure perte, et l’on voudrait se persuader que ce travail de Marolles et les autres travaux de lui qui succédèrent n’ont pas été inutiles à leur moment. […] Son Virgile même, dans cette magnifique édition de 1649, si flatteuse à l’œil, et dans la Préface duquel il célébrait « les doctes discours qui découlent comme des fleuves d’or de la bouche de Μ. l’archevêque de Corinthe » (Retz), et faisait des avances louangeuses à tous les grands auteurs du temps, ce Virgile n’eut pas meilleure chance. […] À côté d’une faculté qui dévie et qui divague, il peut, dans le même homme, s’en rencontrer une autre où il excelle et où il mérite d’être considéré ; et tel qui le raille aisément pour des défauts qui sautent aux yeux, aurait tout profit d’aller à son école pour la qualité qu’il a.

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