Dans En méthode nous avons montré, par exemple, comment le principe de « lutte pour l’existence » ne doit point être pris pour Fin de l’énergie, tandis qu’il n’en est qu’un Moyen : d’où la non acceptation des conclusions de Spencer et de Nietsche.
Elle parle en phrases douces, et non comédiennes, du désagrément de se séparer, de l’ennui de ne pas toujours continuer cette vie commune, et elle bâtit bientôt dans le rêve et l’impossible humain, une espèce de phalanstère, où l’on mêlerait ses existences jusqu’à la mort.
Lucrèce, c’est l’être ; Shakespeare, c’est l’existence.
L’éternité me semblait avoir commencé pour nous deux, et quoique mes yeux fussent en larmes, la plénitude de mon amour, désormais éternel comme son repos, était tellement sensible en moi pendant cette demi-journée de prosternation sur une tombe qu’aucune heure de mon existence n’a coulé dans plus d’extase et dans plus de piété.
Le pauvre dérange celui-là et celui-ci, dans leur existence de bonnes fortunes, de bombance et d’aventures. […] Ces questions souveraines de la conscience, ce débat d’une âme qui s’agite entre Dieu et le néant, valent la peine, selon nous, que le rire s’arrête quand elles commencent ; Molière lui-même ne parviendra jamais à nous faire rire de la démonstration de l’existence de Dieu.
Il n’est pas très religieux, en ce sens que la religion n’est pas pour lui ce sentiment qui imprègne l’être tout entier ; mais il tient à l’existence d’un Dieu, qu’il considère comme une sorte de policier céleste, dont la fonction principale est de récompenser dans l’autre vie ceux qui ont été sur cette terre de braves hommes de bourgeois. […] Je me demande seulement si Coppée a toujours très bien vu ce qu’il y a vraiment de poétique dans ces humbles existences.
. — Faire des mots, tel semble être le but de son existence ; c’est à quoi elle passe tous ses jours. […] Dès qu’il a constaté son existence par une première publication, il utilise ce précédent pour se faire comprendre parmi les collaborateurs des feuilles éphémères destinées à mourir du CROUP littéraire à l’âge de deux ou trois numéros. […] — Relativement, elle aura donc vécu bien plus que d’autres grands artistes dont l’existence se sera prolongée plus longtemps que la sienne, mais qui auront dépensé une partie de leur vie dans des luttes pénibles et obscures. — Sans doute, elle aussi, a connu les difficiles chemins ; mais elle n’a pas eu le temps de s’y lasser. — Elle a eu à lutter, comme tant d’autres : qui dit conquêtes dit combats ; mais cette partie de sa biographie reste la plus courte. — Elle commença à régner dès qu’elle fut connue, et jamais peut-être acclamation plus unanime et plus spontanée n’inaugura une nouvelle royauté dans l’art, et ne couronna un plus jeune front.
Il ajoute à ce ménage mademoiselle de Brie, et sa maison recèle cette existence en commun sous le même toit13. […] Je tâcherai de vous les présenter successivement l’un après l’autre ; je ne crois pas à l’existence, chez la plupart des hommes de génie, d’une faculté unique et maîtresse. […] Il n’aime absolument que ceux qui ont des recettes pour prolonger la vie ; à genoux devant un apothicaire, il veut de très bonne foi livrer sa fille à un médecin qui lui donnera de l’élixir de longue existence, absolument comme Orgon veut livrer la sienne à un de ces Directeurs de conscience qui ont des recettes pour le salut.
La conception toute moderne est encore loin, qui considère l’État comme uniquement répresseur des actes qui mettent son existence en danger et, du reste, se désintéressant de la moralité ou de l’immoralité des individus. […] Ils naissent à l’état d’ébauche, ils se munissent peu à peu des organes qui leur sont nécessaires pour arriver à la vie pleine et complète ; ils s’arrêtent quelque temps dans cette plénitude, aisée et vigoureuse, d’existence ; puis ils déclinent, décroissent, s’alanguissent… et ne meurent pas : car les individus meurent, mais les espèces ne meurent point ; elles se transforment, elles se métamorphosent en d’autres espèces qui les remplacent ; de leurs éléments constitutifs, restés puissants ! […] Saisset nous apprend qu’il avait choisi lui-même le terrible sujet des idées de Joseph de Maistre sur l’existence du mal sur la terre : « M. […] Par l’hérédité, chaque individu, chaque génération reçoit de ses prédécesseurs une certaine existence déterminée… Après cette situation toute faite, ainsi reçue de ses prédécesseurs, chaque homme, chaque génération, par sa propre force, modifie, change cette situation, cette existence, se fait soi-même à son tour après avoir été fait par ses prédécesseurs.
Elle a déjà subi l’épreuve du jugement de la postérité ; car la postérité commence pour nous à la génération qui suit celle dont nous sommes, et, quoique mourant presque jeune, Augier a débuté de si bonne heure que l’Aventurière a déjà plus de quarante ans d’existence et tout autant Gabrielle ; et le Gendre de M. […] D’où il faut conclure, je crois, qu’il n’aimait ce métier que parce qu’il comportait les éternels voyages, la vie errante, l’existence vagabonde et inquiète. […] Un marteau, tu l’auras voulu De l’existence me délivre. […] Le prince Grégoire est un de ces princes de l’Europe orientale qui sont détrônés souvent et qui mènent une existence mi-partie de souverains, mi-partie de conspirateurs.
Ce fut, dans cette existence lâchée, une idylle dont le malheureux poète, retourné à ses rechutes, savoura plus tard, aux heures troubles et perverses, l’arrière-goût délicieux. […] Toutes les existences menues qui végètent, trottinent, se résignent et s’étiolent dans l’immense ville sont pour lui des occasions de rêve. […] C’est la plus forte apologie qu’on puisse faire des grandes existences, que de laisser entrevoir le fourmillement des petits événements et des petites difficultés qui les ont embarrassées, sans les détourner. […] Si ce livre donne aux Français qui le liront une nouvelle occasion d’avoir confiance dans les destinées de leur pays, s’il contribue à démontrer aux hommes d’État de la République l’efficacité d’une tradition, s’il rend plus claires, à leurs yeux, les causes qui ont fait, dans le passé, la grandeur de la France et qui l’assureront dans l’avenir, si les meilleurs d’entre eux y trouvent de nouvelles raisons de fondre de plus en plus leur existence dans celle de la nation, ce résultat aura dépassé mes espérances, et je serai récompensé d’avoir consacré à cette œuvre tous les loisirs d’une vie qui n’est pas uniquement réservée à l’étude.
Les choses inanimées ne l’intéressent que par leurs relations avec sa propre existence : son esprit ne s’attache à démêler l’instinct des animaux que par les rapports qu’il trouve en eux avec un instinct plus complet, qu’il nomme sa raison : les images des générations passées ne le touchent qu’en ce qu’elles lui semblent les exemplaires de ses actions présentes, et des actions futures qui les suivront : il cherche dans leurs différences le perfectionnement que le temps lui promet, ou les altérations qu’il lui fait subir : enfin, la nature entière n’est l’objet des spéculations de l’homme que par le besoin qu’il éprouve d’approfondir son être particulier. […] L’hygiène, art de prévenir les maux du corps ; la physiologie, art de raisonner sur le mécanisme de l’existence ; la thérapeutique, ou l’art de guérir, sont les trois grands rameaux de la médecine, qui classifie encore les autres parties de sa science, et chaque ordre de fonctions des organes humains ne se démontre que par les distinctions de plusieurs systèmes. […] ce que l’anatomie physiologique fait sur le corps des animaux : elle démontre ce qui se manifeste de la forme et des conditions des organes ; elle se tait sur les mystères des puissances vitales dont les modifications sont infinies ; elle donne des noms aux parties des systèmes de mouvement et de circulation, pour en reconnaître la topographie et les fonctions résultantes : elle n’en saurait appliquer aux forces incommensurables de l’existence ; il est même de ces liens matériels si fins qu’ils échappent à notre subtilité, et qu’elle n’en peut unir les rapports à ceux que l’étude lui révèle. […] Son existence ne fut qu’un long témoignage de sa sagesse et de son désintéressement.
Il est à déplorer que quelques incartades de conduite, certaines intempérances d’humeur satirique, et surtout la fureur tenace de la Sorbonne, « cette honte du xvie siècle », comme dit Bayle sans trop de sévérité, aient gâté si souvent et peut-être abrégé l’existence d’un poète aimable, léger et inoffensif, souvent accablé, toujours reprenant bon courage, « fâché d’ennuis, consolé d’espérance. » II. […] Rabelais n’a pas fait autre chose en toute son existence qu’étudier sans cesse, et professer un peu, ce qui est une manière de résumer ses études, c’est-à-dire d’étudier encore. […] Elle fut très sérieuse, très belle, prudente sans machiavélisme, point mensongère, laborieuse, généreuse et cordiale, et beaucoup moins accidentée que mainte existence de savant et de lettré de cette époque.
Émilie est une émigrée de seize ans ; elle a perdu ses parents, ses derniers moyens d’existence, et l’espoir d’en retrouver aucun.
La Prusse, subissant la peine de ses triples intrigues dévoilées, se croit menacée dans son existence ; elle arme hors de propos, comme elle avait désarmé hors de l’honneur allemand.
Alors ses ennemis perdirent tout espoir de conserver l’existence.
La vision créatrice de l’auteur projette ces personnages dans l’objectivité absolue d’une existence complète : elle dissèque merveilleusement les motifs véritables du courage, de l’héroïsme, de la peur, et les actes, et les sensations que ces motifs produisent.
On sent dans leur surprise l’indifférence de la nature pour l’humanité, des Êtres immuables qui composent son existence éternelle, pour les fragiles créatures qui passent et disparaissent devant eux.
XXXIV C’est sans doute cet amour, amour qui rend le cœur bien plus prudent, parce qu’il le force à penser à deux, c’est sans doute cet amour qui pressa instinctivement Béranger de songer à se créer par les lettres une existence qui pût suffire à deux vies.
Telle est l’utilité vraie ou prétendue que les gens de lettres croient retirer pour leur réputation du commerce des grands : j’entends par ce mot tous ceux qui sont parvenus, soit par leurs ancêtres, soit par eux-mêmes, à jouir dans la société d’une existence considérable ; car la puissance du prince qui dans un État aussi monarchique que le nôtre est proprement le seul grand seigneur, a confondu bien des états ; l’opulence, ce gage de l’indépendance et du crédit, se place volontiers de sa propre autorité à côté de la haute naissance, et je ne sais si on a tort de le souffrir ; il semble même que les états inférieurs qui sont privés de l’un et de l’autre de ces avantages, cherchent à les mettre sur la même ligne, pour diminuer sans doute le nombre des classes d’hommes qui sont au-dessus de la leur, et rapprocher les différentes conditions de cette égalité si naturelle vers laquelle on tend toujours même sans y penser.
Roméo, a dit encore bien superficiellement Hazlitt, Hazlitt dont Shakespeare semble avoir parfois troublé la vue, Roméo, c’est Hamlet amoureux , comme si ce qui fait cette étincelante et exquise création de Roméo, cette incarnation de toutes les sensations poétiques et heureuses de l’existence, était une affaire de soleil !
Au contraire, nous admettons dans notre école les philosophes politiques, et surtout les platoniciens, parce qu’ils sont d’accord avec tous les législateurs sur nos trois principes fondamentaux : existence d’une Providence divine, nécessité de modérer les passions et d’en faire des vertus humaines, immortalité de l’âme.
Ceux qui ne vivent que dans le moment présent et qui ne s’intéressent point aux œuvres anciennes n’ont guère plus de pensée ni de vie que les insectes éphémères ; mais ceux qui ajoutent à leurs pensées et à leur existence présente la vie des siècles antérieurs, ceux-là s’assimilent la substance des diverses époques de l’humanité, des différents chefs-d’œuvre de toute sorte, et donnent à leur âme plus d’étendue. […] En voici un échantillon : Lygdamon, amant rebuté de Sylvie, ouvre la scène par un monologue où il agite cette question, s’il terminera sa triste existence au moyen l’un licol ou d’une épée, ou s’il se précipitera d’un rocher à terre, ou s’il se jettera à l’eau. […] Au reste, cette préface est, avons-nous dit, de l’année 1634, et l’imitation de Corneille n’arrive qu’en 1642 ; et Alarcon, probablement, ne connaissait même pas l’existence de Corneille.
Chaque individu a son existence à part, & c’est l’œil qui ne sait point voir, ou qui se contente des superficies, qui a avancé cette grosse erreur. […] Ils ont été copistes, parce que cela est beaucoup plus aisé que d’inventer une action ; mais en copiant ils auroient dû tout traduire & ne point franciser des personnages anciens, recommandables du moins par leur caractère & qui avoient déja reçu leur existence.
Ces deux existences fraternelles qui, parties des mêmes confins de l’honnêteté et de la vertu, se déroulent parallèlement dans un milieu social différent, pour aboutir, à travers toutes les fatalités du vice, l’une aux zones sereines de la vie calme et honorée ; la seconde aux hypogées du bagne et à l’échafaud, — ces deux existences, dis-je, se prêtaient aux plus saisissants contrastes et contenaient de singuliers éléments d’émotion et d’intérêt.
La théologie, la cosmogonie et l’histoire forment les trois anneaux d’une chaîne indissoluble ; si bien que le créateur, la création et la créature se neutralisent et n’ont plus d’existence individuelle. […] Il y a des taches qui m’ont désagréablement choqué, et qu’une paire de ciseaux suffirait à enlever, par exemple : une tirade sur le partage des existences humaines, qui pourrait trouver sa place partout, et qui, par conséquent, ne sert à rien ; une tirade lyrique sur Madrid, Cadix, Séville, Barcelone, qui n’est qu’un centon des Orientales ; une tirade sur les Pyrénées, qui, écrite plus simplement, pourrait servir de point d’orgue dans un roman, mais qui impatiente le spectateur ; une tirade sur l’escamotage des révolutions, etc. […] Mais assuré, comme je le suis, que les personnages de Marie Tudor n’ont jamais pu vivre, je n’irai pas m’enquérir si leur existence problématique s’encadre plus volontiers entre les années 1553-1558, que dans toute autre époque.
Remarquons encore que l’art philosophique suppose une absurdité pour légitimer sa raison d’existence, à savoir l’intelligence du peuple relativement aux beaux-arts. […] Philibert Rouvière a eu, comme je le faisais pressentir, une existence laborieuse et pleine de cahots. […] Cette apparente contradiction est évidemment le résultat d’une existence bien réglée et d’une forte constitution spirituelle qui lui permet de travailler en marchant, ou plutôt de ne pouvoir marcher qu’en travaillant. […] Depuis longtemps déjà il avait montré, non pas seulement dans ses livres, mais aussi dans la parure de son existence personnelle, un grand goût pour les monuments du passé, pour les meubles pittoresques, les porcelaines, les gravures, et pour tout le mystérieux et brillant décor de la vie ancienne.
Nous ne saurions donner une plus juste idée de cette grande existence de Mayac dans son mélange d’opulence et de bonhomie antique, qu’en citant la page suivante empruntée à la Notice manuscrite de M. de Saint-Aulaire : « Après la mort du Chevalier, y est-il dit, l’abbé d'Aydie, son frère, continua à résider dans ce château où se réunissait l’élite de la bonne compagnie de la province.
La liberté politique n’est plus pour nous une affaire de goût, mais de calcul… Loin d’exposer aucune existence, elle les tranquillise toutes ; loin d’irriter les passions, elle les pacifie… Encouragée par cette disposition générale des esprits, la pensée individuelle se sent à l’aise et ne craint plus de se livrer à elle-même ; … sur quelque point de l’ordre politique qu’elle se porte, elle trouve presque toujours qu’elle a été prévenue par l’opinion, disons mieux, par l’instinct public, qui d’avance signale les abus, dénonce les besoins, demande les réformes.
Nous devons donc considérer, avant tout, ce qui touche à la stabilité de votre empire ou à la durée de votre existence, et, si nous apercevons quelque danger, ne pas perdre un moment pour vous l’indiquer.
Mais c’est aussi, le plus souvent, un bourgeois riche et « bien pensant » — ce qui ne veut nullement dire un vrai chrétien C’est un avocat, un politique de métier, un jurisconsulte disputeur, plein d’orgueil et de défiance, peu fraternel aux hommes, imprégné du vilain esprit laïque des légistes de l’ancienne monarchie ; — ou bien encore un jeune homme élégant et un peu pédant, membre de la conférence Molé, d’existence luxueuse, et pour qui la foi est si peu le tout de la vie que ses mœurs ne sont pas chrétiennes, bref, quelque chose comme le Henri Mauperin des Goncourt ou enfin quelque prêtre « éclairé » et tolérant, trop soigné dans sa mise, trop attentif à plaire, qui a fini par voir dans l’Église une branche de l’administration et par se considérer lui-même comme un fonctionnaire en soutane.
Quoi qu’il en soit, en faisant une pièce sans amour, il la déroba à ces caprices d’imagination qui, depuis l’existence de notre théâtre, nous ont fait si souvent applaudir l’amour dans la galanterie.
La liberté qui anime les belles pages du traité de l’Existence de Dieu est d’une autre sorte.
Je parle à Carrière de la tristesse des pays, où la vie est chère, où il y a chez tous, chaque jour un débat avec le prix de l’existence.
Le but de son existence était clair maintenant, et l’avenir infaillible259 !
Et quand on songe que Gœthe, cet arrangeur, avait derrière lui, pour s’en inspirer, cette ribambelle et cette ribaudaille de démons : lago, Lovelace, Tartufe, don Juan, Valmont, le Satan de Milton et celui de Byron dans la Vision du Jugement, tous les dandies de la terre, Voltaire dans Candide et Talleyrand pendant quatre-vingts ans d’existence, on est tout étonné que Gœthe, ce tondeur sur tous les œufs pour en rapporter quelque chose, n’ait pas tondu sur ces œufs-là, qui sont des œufs d’autruche, et ne nous ait pas donné mieux que son grand diable, déhanché et maigre, qui ne paraît à l’imagination éveillée, pour peu qu’elle ait une conception juste du diable, qu’un Crispin, — un Crispin de l’Enfer, écrasé par ce nom de Méphistophélès que le polisson ose porter !
Mercredi 12 octobre Par ces jours tragiques, en l’élévation du pouls et la griserie de tête, qu’amène le bruit grondant de la bataille continue, qui vous entoure de tous côtés, on a besoin de sortir de son être réel, de dépouiller l’individu inutile qu’on se sent, de mettre sa vie éveillée dans un rêve, de s’inventer chef de partisans, surprenant des convois, décimant l’ennemi, débloquant Paris, — vivant ainsi de longs moments, transporté dans une existence imaginative par une sorte d’hallucination du cerveau. […] Peut-être va-t-on s’apercevoir que, depuis cette date, notre existence n’a été qu’une suite de hauts et de bas, une suite de raccommodages de l’ordre social, forcé de demander à chaque génération un nouveau sauveur.
. — Mais après cela, comme il est Voltaire, — c’est-à-dire trop perspicace pour ne pas savoir ce que vaut une religion comme « principe réprimant », — il croit à l’existence d’un « Dieu rémunérateur et vengeur », — qui implique la croyance à l’immortalité de l’âme ; — ainsi qu’à la Providence ; — et généralement à tout ce qui constitue la « religion naturelle » ; — y compris la confiance au « Dieu des bonnes gens » ; — avec cette arrière-pensée que, de tous les mortels, ce Dieu n’en regarde aucun avec plus de bienveillance que les amis des lumières ; — quand surtout ils écrivent en vers ; — et qu’ils font des tragédies. […] Le grand homme de l’économisme : Anne-Robert-Jacques Turgot [Paris, 1727 ; † 1781, Paris] ; — ses origines et ses études en Sorbonne ; — sa carrière de magistrat. — Il collabore à l’Encyclopédie [Cf. les articles Étymologie, Existence, Expansibilité, Foires et Marchés, Fondations]. — L’intendance de Limoges, 1761-1774 ; — et le Ministère, 1774-1776.
Il est très vrai que, si Bourdaloue eût mené l’existence de Molière, il eût fait un détestable religieux ; mais, si Molière, en revanche, avait vécu comme Bourdaloue, il eût été un singulier directeur de théâtre. […] Molière a mené une existence accidentée, quelque peu orageuse même ; c’est qu’il était Molière. […] Les grands hommes ne sont pas toujours dans le secret de leurs œuvres, et fort souvent ils touchent des questions qu’ils ne prétendaient pas résoudre, dont ils ne soupçonnaient pas même l’existence.