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56. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Deuxième partie. — Chapitre XXIV. »

Monti, Pindemonte, Manzoni, combien de noms encore honorèrent les arts dans ce beau pays, sinon reconstitué, du moins relevé par le maître de la France ! […] L’enfant qui devait illustrer le nom d’Heredia était malingre, difforme, à demi paralysé ; mais la vigueur de son esprit surmonta tous les obstacles du corps. […] Sous le nom de Tula, que lui donnaient quelques amis, elle fut aussi célèbre que toutes les espérances de bonheur et de liberté dont se flattait alors l’Espagne. […] Qu’il te suffise de voir dans l’histoire son grand nom uni au tien ! […] Que le ciel, la terre, l’abîme, s’inclinent sitôt que ton nom retentit !

57. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — D. — article » pp. 136-137

Sans la singularité d’un stratagême dont il s’avisa, son nom ne seroit pas plus connu que ses Poésies ; mais on se ressouviendra toujours que pour donner du prix à ses Vers, il les fit paroître sous le nom imaginaire de Mlle Malcrais de la Vigne. […] Desforges avoit été maltraité par les Journalistes sous son vrai nom, & Mlle Malcrais de la Vigne fut célébrée comme une dixieme Muse. […] Cette anecdote prouve combien l’indulgence est naturelle à l’égard des femmes, & combien sont plus prudens les Auteurs qui continuent d’emprunter le nom de quelques-unes pour en parer leurs Ouvrages, sans dévoiler indiscrétement le mystere.

58. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XXV » pp. 259-278

Bussy-Rabutin, historien trop véridique de son siècle, nous a transmis les noms des principales héroïnes de la galanterie qui commençait à fatiguer la cour par ses excès, et qui amena un nouveau genre de dissolution. […] C’est Françoise d’Aubigné, qui fut depuis madame Scarron, et finit sous le nom de marquise de Maintenon. […] Le nom d’Agrippa fut joint à celui de Théodore, non, comme on l’a tant de fois répété, parce que sa mère était morte en lui donnant le jour, et qu’il était ægrè partus, mais par l’analogie de sa condition de posthume et de proscrit avec celle du Romain Marcus Julius Agrippa, surnommé le posthume, lequel fut proscrit par Tibère et tué à l’âge de vingt-six ans : cet Agrippa était petit-fils d’Auguste et le dernier de sa descendance mâle ; le père de d’Aubigné voulut que son nom rappelât à son fils sa propre condition et son serment. […] Petite-fille d’Agrippa d’Aubigné, gentilhomme français, compagnon et familier de Henri IV, mais dénuée de toute fortune, son nom lui ouvrit les meilleures maisons : devenue veuve, sans parents, ce n’était pas assez de son nom pour s’y soutenir au rang que son nom lui marquait ; il fallait y être aimable. […] En 1650, quand elle parut dans le monde, à son retour de la Martinique, âgée de quatorze ans, on la citait sous le nom de la belle Indienne.

59. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Première partie. — Chapitre VI. »

Son nom même consacra un des mètres les plus heureux de la poésie lyrique, dans la langue du peuple nouveau qui domptait et imitait les Grecs. […] Le même prodige de célébrité se renouvelle pour un autre nom que nous a transmis la Grèce. […] Car aucun nom n’était plus mêlé à toutes les œuvres de l’art. […] Son nom vivra, comme l’amour. […] Des listes de ces suicides ou réels ou apparents se conservaient ; et un scoliaste grec nous en offre encore une, où manque précisément le nom de Sapho.

60. (1860) Cours familier de littérature. X « LIXe entretien. La littérature diplomatique. Le prince de Talleyrand. — État actuel de l’Europe » pp. 289-399

Son esprit était la seule arme qu’il lui fût permis d’employer pour faire jour à son nom dans le monde. […] Que sert-on alors sous le nom d’idées ? […] M. de Talleyrand, reflet de Mirabeau, portait précisément dans son nom cette nuance et cette garantie. […] De tels noms sont les conquêtes dont la démocratie est le plus fière. […] C’est de ce moment que son autorité politique se consacra aussi en Europe ; c’est de ces succès multipliés en affaires européennes que le nom de la diplomatie et le nom du grand diplomate ne furent pour ainsi dire qu’un seul nom.

61. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « Le président Hénault. Ses Mémoires écrits par lui-même, recueillis et mis en ordre par son arrière-neveu M. le baron de Vigan. » pp. 215-235

En janvier 1713 le président donnait à la Comédie-Française, sous le nom de Fuselier, une tragédie, Cornélie vestale, qui n’eut que cinq représentations. […] Dès l’abord je remarque que les noms propres sont défigurés étrangement. […] Le président Hénault, qui se répète assez souvent, recommence à un autre endroit cette histoire de M. de Séchelles : à ce second endroit, le nom est bien lu (p. 239), il s’agit bien de M. de Séchelles, mais en revanche le nom de M. de Machault devient sujet à bévue, et M. de Séchelles y est présenté comme ayant succédé à un contrôleur général qu’on appelle M. de Marchand. […] Fermey (en est) l’historiographe. » Tout le monde connaît de nom M.  […] Je laisse les noms propres, et j’en viens à des fautes d’un autre genre dont il est besoin d’être averti.

62. (1870) Nouveaux lundis. Tome XII « Madame Desbordes-Valmore. »

La jeune fille fut recueillie par la femme d’un armateur de Nantes, dont le nom s’est conservé, Mme Guedon. […] Ne recommencent-ils pas quelquefois, sans s’en apercevoir, la même scène sous d’autres noms ? […] Ce nom de Valmore n’est pas celui de la famille. […] Valmore père, mari de Mme Valmore, de son vrai nom de famille, est Lanchantin. […] Valmore, qui devait à tout jamais léguer un nom, que la Poésie a rendu glorieux, à cette respectable famille d’artistes.

63. (1870) Portraits contemporains. Tome IV (4e éd.) « PARNY. » pp. 423-470

On a beaucoup discuté sur le vrai nom d’Éléonore, son nom de baptême était, dit-on, Esther ; quant à son nom de famille, on l’a fait commencer par B, et l’auteur de la notice de l’édition Lefèvre (1827) se borne à dire que la première syllabe de ce nom n’est point BAR, comme on l’avait avancé. […] Selon nous, et d’après des renseignements puisés aux sources, Éléonore était MlleTr…….le174, un nom assez peu poétique vraiment. […] Il n’est peut-être pas un nom de femme, parmi les noms amoureux célébrés en vers, dont on n’ait plus parlé en son temps, dont on se soit plus inquiété, avec une curiosité romanesque. […] Si l’on avait pris sur-le-champ cette détermination, j’aurais sollicité, au nom des Muses, qui n’ont pas le privilége de pouvoir vivre sans pain, un recoin obscur dans votre propre bureau. […] Pourquoi ne pas articuler le nom tout entier ?

64. (1870) Nouveaux lundis. Tome XII « L’Académie française »

Il est à remarquer toutefois que l’Ordonnance du 21 mars 1816, contresignée Vaublanc, qui semblait restaurer dans son principe et dans son intégrité l’Académie française, la mutilait en même temps, éliminant de la liste nouvelle certains noms qu’on bannissait d’autorité, et y inscrivant d’autres noms en faveur et non élus. […] Il les décida à reculer devant le nom de M.  […] La poésie, en effet, paraît fuir depuis longtemps ces concours et s’abstenir des sujets proposés : elle n’y est que de nom. […] Les noms d’Augustin Thierry, d’Henri Martin, illustrent ou honorent la liste des lauréats. […] Le prix a été décerné pour la première fois en 1840 : le nom si estimable du vaillant poète M. 

65. (1870) De l’intelligence. Première partie : Les éléments de la connaissance « Livre deuxième. Les images — Chapitre II. Lois de la renaissance et de l’effacement des images » pp. 129-161

Maury, et je ne savais pour quel motif, trois noms propres accompagnés chacun d’un nom d’une ville de France. […] Mes trois noms inconnus étaient inscrits là, en face des trois villes dont le souvenir s’était associé à eux. […] Une dame, dit Winslow55, après une large hémorragie utérine, « avait oublié où elle demeurait, qui était son mari, combien de temps elle avait été malade, le nom de ses enfants et même son propre nom. […] Elle ne pouvait se faire comprendre qu’en allant dans la maison et en montrant du doigt les divers objets. — Un gentleman avait cessé de comprendre les noms prononcés, mais entendait très bien les noms écrits. […] « Les uns oublient les noms propres.

66. (1919) L’énergie spirituelle. Essais et conférences « Chapitre II. L’âme et le corps »

Ce qu’on étudie d’ordinaire sous ce nom est moins la pensée même qu’une imitation artificielle obtenue en composant ensemble des images et des idées. […] Quand nous avons oublié un nom propre, comment nous y prenons-nous pour le rappeler ? […] En général, les mots disparaissent alors dans un ordre déterminé, comme si la maladie connaissait la grammaire : les noms propres s’éclipsent les premiers, puis les noms communs, ensuite les adjectifs, enfin les verbes. […] Les noms propres, les noms communs, les adjectifs, les verbes, constitueraient autant de couches superposées, pour ainsi dire, et la lésion atteindrait ces couches l’une après l’autre. […] D’abord, si les noms propres disparaissent avant les noms communs, ceux-ci avant les adjectifs, les adjectifs avant les verbes, c’est qu’il est plus difficile de se rappeler un nom propre qu’un nom commun, un nom commun qu’un adjectif, un adjectif qu’un verbe : la fonction de rappel, à laquelle le cerveau prête évidemment son concours, devra donc se limiter à des cas de plus en plus faciles à mesure que la lésion du cerveau s’aggravera.

67. (1890) Conseils sur l’art d’écrire « Principes de composition et de style — Quatrième partie. Élocution — Chapitre VII. De la propriété des termes. — Répétition des mots. — Synonymes. — Du langage noble »

De même, en matière de morale, pour se corriger, il faut dépouiller tout amour-propre, et arracher à ses défauts, à ses vices, les noms spécieux qui les décorent et les déguisent : le péché, nommé de son nom laid et propre de péché, ne tentera plus guère. Cherchez des noms pour nommer, des éloges pour louer les qualités des grands écrivains, d’un Bossuet, d’un Pascal, d’un La Fontaine, d’une Sévigné : vous ne trouverez rien qui soit plus juste, ni plus flatteur, que de dire de chaque tour, de chaque mot, qu’il est ce qu’il devait être, qu’il est nécessaire, qu’il est propre. […] Quand l’équivalent noble n’existait pas, le nom du genre ou de la matière y suppléait, ou bien une périphrase : de là ces termes généraux que recommande Buffon, et ces circonlocutions que Delille fabrique ingénieusement : un mouchoir est un tissu ; le soleil est l’astre du jour ; un glacier, le temple des frimas. […] Ceux de ces mots qui ont survécu n’ont pas été gardés comme nobles, mais comme propres à certains objets : on parle de guerriers germains ou de guerriers indiens, faute d’autre terme et parce que le nom de soldat implique une organisation et une hiérarchie militaires qui ne se rencontrent pas chez les tribus barbares ou sauvages. En somme, on peut, et même on doit appeler les choses par leur nom, précisément comme faisait le vieux Boileau si exécré des romantiques.

68. (1860) Cours familier de littérature. IX « XLIXe entretien. Les salons littéraires. Souvenirs de madame Récamier » pp. 6-80

Son nom de famille était Élisabeth Harvey ; elle était sœur du duc de Bristol, homme d’une grande distinction de naissance et d’esprit. […] Toutes les grandes dames de Paris, tous les poètes, tous les orateurs, tous les étrangers, tous les journalistes sollicitaient ; leurs noms passaient au crible d’un scrutin épuratoire des amis de la maison avant d’être admis. […] Je savais que M. de Chateaubriand avait je ne sais quelle prévention fort injuste, mais fort tenace, contre moi ; mon nom serait, je n’en doutais pas, une dissonance dans les noms des invités qui seraient prononcés à ses oreilles. […] Ces noms et ces personnages imprimaient à ma mère une physionomie de curiosité satisfaite qui donnait une illumination à ses traits. […] J’avais été très fier d’y être admis malgré mon obscurité, et j’y portais un véritable culte à ces prestiges de la beauté, du nom, de la fortune, de la vertu, dans une même famille.

69. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Histoire littéraire de la France. Ouvrage commencé par les Bénédictins et continué par des membres de l’Institut. (Tome XII, 1853.) » pp. 273-290

On a, dans ce recueil de fables et de récits dont le Renard est le héros, un assemblage de bien des types et des personnages qui ont couru depuis sous d’autres noms. […] Faut-il à côté de ces noms littéraires en prononcer un tout moderne et qui n’est qu’ignoble, celui de Robert Macaire ? […] Le nom commun de l’espèce renard était alors Gorpil (Vulpes) ; mais, un poète ayant primitivement baptisé le Gorpil de ce sobriquet de Renart, la chose réussit et courut si bien que le sobriquet devint le nom générique et fit oublier l’appellation première : c’est comme si Tartuffe, à force de succès, s’était substitué dans l’usage au mot hypocrite, qui serait dès lors tombé en désuétude ; c’est comme si, dans La Fontaine, Raminagrobis ou Grippeminaud avait remplacé et fait oublier le nom du chat, et Bertrand le nom du singe. Il fallait donc que le succès de ce premier Renart, qui mit le nom si en honneur, eût été bien grand. […] On ne sait trop d’abord où il en veut venir ; il rappelle certains orateurs cauteleux dont nous tairons les noms ; il a l’art d’irriter les opinions qu’il effleure.

70. (1856) Cours familier de littérature. II « VIIe entretien » pp. 5-85

L’esprit humain veut donner un visage aux idées, un nom, un cœur, une âme, une individualité aux choses. […] À ces trois titres, je croyais devoir un culte à ce nom. […] La tombe la plus ignorée, sous un peu d’herbe, sans pierre et sans nom, est la plus désirable. […] J’écoutais avec recueillement les noms de chaque nouveau visiteur, annoncés par les domestiques. C’étaient quelques noms de la haute aristocratie de Rome, de Naples, de Florence, de Venise, de Bologne, qui m’étaient familiers par l’histoire, et quelques autres noms de poètes, de professeurs, d’écrivains, encore nouveaux et énigmatiques pour moi.

71. (1868) Cours familier de littérature. XXVI « CLIIe entretien. Madame de Staël »

Mais ce n’est pas seulement son nom que la femme célèbre expose à tous les hasards de la renommée, c’est le nom de son mari, de ses enfants, de sa famille. […] Ce nom, abrité sous son obscurité, devient malgré lui l’occupation et souvent le jouet de l’opinion publique. […] Son nom risquera les huées d’un parterre. […] Rien ne sera à vous chez vous, pas même votre nom ; tout sera au public. […] Le nom de M. 

72. (1867) Nouveaux lundis. Tome VII « M. Émile de Girardin. »

Son nom, connu de tous, éveille, dès qu’on le prononce, des passions en bien des sens et mille questions à la fois, des discussions de toutes sortes, politiques, sociales ; la seule question littéraire est absente et fait défaut, à ce qu’il semble. Il paraît difficile de conquérir ce nom à la littérature ; et pourtant c’est ce que je voudrais faire jusqu’à un certain point. […] Rien ne lui paraît plus dans la nature qu’un enfant naturel ; s’il n’a pas de famille, il est mis dans un régiment ; à défaut de mère, il a son colonel, et s’il n’a pas de nom, qu’il s’en lasse un sur le champ de bataille. […] « Il n’y a plus à choisir entre la mort et un nom ; la gloire n’est plus qu’un mot creux : il ne sonne pas l’argent. […] Là où se pesaient des chiffres, il crut devoir jeter son nom et tout aussitôt son épée dans la balance.

73. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Deuxième partie. — Chapitre XXIII. »

Noble soldat de la muse lyrique, poëte de la liberté, de la vertu courageuse et de l’amour, fils du génie grec et de la France, non, les louanges données à ton nom, dans notre âge récent de poésie, n’étaient ni vaines ni forcées ! […] Ils brisent leurs menottes ; et ils portent bientôt le nom de liberté gravé sur une chaîne plus lourde. […] faites retentir ce mot d’allégresse jusqu’au jour, jusqu’au lieu où le peuple le plus lointain aura reçu le nom du Christ. […] Son nom est demeuré célèbre et surtout aimé dans toutes les communions protestantes. […] Puisse, sous un autre ciel et parmi d’autres descendants de ses compatriotes, l’invocation religieuse de son nom adoucir un peu la rudesse de l’extrême démocratie !

74. (1861) Les œuvres et les hommes. Les historiens politiques et littéraires. II. « VI. M. Roselly de Lorgues. Histoire de Christophe Colomb » pp. 140-156

Dans ce sens-là, c’était, s’il est permis d’écrire le mot de réhabilitation dans la splendeur du nom de Colomb, une espèce de réhabilitation historique. Le nom de l’homme, nous le savons bien, était lumineux, mais la lumière ne tombait pas assez à plein sur toute sa vie. […] Mais M. de Humboldt, qui pourrait couvrir beaucoup de sottises de son grand nom, mais qui n’en couvrira pas une injustice, prit sur lui celle-là dans des travaux qui font trembler. […] Il nous ouvre l’âme à secret de ce vulgaire envieux de Colomb qui osait bien le mépriser comme les gens médiocres méprisent le Génie, — au nom des intérêts positifs. […] Doux comme son nom, il ne se vengea pas plus fort que cela de l’ingratitude des rois qu’il avait tant servis !

75. (1893) Des réputations littéraires. Essais de morale et d’histoire. Première série

un nom. […] un nom. […] Ils sont beaucoup plus connus que le nom de leur auteur. […] Quel beau nom, au contraire, à la fois distinctif, caressant et sonore, quel nom prédestiné pour un poète que celui de Millevoye ! […] Notre nom lui-même restera obscur ou totalement ignoré.

76. (1876) Chroniques parisiennes (1843-1845) « XXXIII » pp. 133-140

. — disette de grands noms dans le clergé français. — opinion de joseph de maistre. — l’abbé de cazalès. — m. patin. — les tragiques grecs. — saint-marc girardin. — sa sécheresse d’esprit. — opposé a m. de rémusat. […] Que ce vieux nom de Bonald ne vous abuse pas. Une chose est essentielle aujourd’hui au clergé de France, c’est l’absence de noms. […] M. de Maistre écrivait il y a bien longtemps : « Qu'on me donne la feuille des ordinations en France, et je pourrai prédire de grands événements. » Il voulait dire par là que, s’il avait vu, vers 1817, de grands noms, les enfants d’illustres familles entrer en foule dans le clergé pour réparer les brèches qu’avait faites l’impiété voltairienne de leurs pères, il aurait bien auguré de l’avenir de la religion en France. […] On a cité particulièrement deux ou trois noms en tout.

77. (1904) Les œuvres et les hommes. Romanciers d’hier et d’avant-hier. XIX « Paria Korigan » pp. 341-349

C’est un livre naïf et presque d’une ingénuité de génie… Et c’est l’œuvre d’une femme pourtant, malgré la masculinité du nom sous lequel elle a caché son sexe. Or, voilà le seul reproche que j’aie à faire à ce livre de tant de naturel : c’est de ne pas être signé naturellement du nom de la femme qui a pu l’écrire. Tout au moins, si elle voulait jouer à ce petit mystère du « pseudonyme » qu’on perce toujours, il fallait attacher à cette composition si féminine un nom de femme ; car c’est une femme qui parle toujours dans ces Récits de la Luçotte 34, et monsieur Paria Korigan n’est que le nom d’un personnage auquel la Luçotte adresse ses Récits. En tant que si la femme qui a inventé… ou raconté ces histoires charmantes n’y mettait pas son nom, son véritable nom, elle pouvait oublier d’en mettre un.

78. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Première partie. — Chapitre II. Quelques traditions sur Pindare. »

Dans la réalité, Pindare, né d’un père dont le nom est rapporté diversement, Daïphante ou Scopelinos, fut dès l’enfance formé par lui à l’art de la musique, et plus tard élève de Lasos d’Hermione, le plus renommé de son temps pour la lyre et le chant. Il reçut aussi les leçons ou partagea les études d’une femme célèbre, Myrto ; mais ce nom s’efface devant celui de Corinne, la gloire presque unique d’une ville voisine de Thèbes, Tanagre, que fréquentait Pindare. […] Il avait, de son union avec Mégaclée, un fils du nom de Daïphante, inconnu dans l’histoire, et deux filles, Protomaque et Eumétis. […] On peut y voir seulement la preuve du caractère merveilleux dont l’imagination des Grecs aimait toujours à entourer le nom du grand poëte qui les avait charmés. […] Son nom demeura consacré dans l’admiration de la Grèce, comme celui d’un de ses génies les plus grands et les plus rares, d’autant plus qu’Athènes elle-même, cette Athènes si renommée pour la poésie et l’éloquence, n’avait produit, selon Plutarque34, aucun poëte lyrique, mais seulement un faiseur obscur de dithyrambes, Cinésias, dont il cite le nom avec ironie.

79. (1862) Cours familier de littérature. XIII « LXXVIIIe entretien. Revue littéraire de l’année 1861 en France. M. de Marcellus (1re partie) » pp. 333-411

Le nom de Marcellus venait d’un camp romain établi sur ce coteau. La terre avait été achetée d’Henri IV lui-même, et sa famille y ajouta alors ce nom. […] C’est le nom que donnent les Arabes à la femme extraordinaire que j’allais voir. […] J’ai bien oublié un voyageur plus célèbre, qui porte le même nom, et qui fut l’ami de mon oncle. […] Lady Stanhope s’émut à ce nom.

80. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre IV. Mme Émile de Girardin »

Il y eut donc en elle un bas-bleu, pour lui donner son triste nom. […] II Les Lettres parisiennes sont en effet signées d’un nom d’homme, et franchement, quand on les lit, on se demande pourquoi. […] Mme de Girardin, en signant ces Lettres du nom du vicomte de Launay, a-t-elle cru rendre plus piquante sa pensée, comme certaines femmes croient, en s’habillant en hommes, rendre plus voluptueuse et plus apparente leur beauté ? Toujours est-il qu’elle, la distinction même, après avoir voulu être une femme de lettres, comme tant de femmes de son époque, se serait, comme la plupart de ces femmes qui se croient si plaisamment ce qu’elles ne sont pas, achevée en vulgarité, en prenant un nom d’homme, si elle avait pu parvenir à se faire un masque de ce nom-là. […] Il y avait en effet dans Mme de Girardin beaucoup de vérité, puisqu’elle était poëte ; mais il y avait aussi un peu de cet enthousiasme de flamme fouettée qui lui venait, comme son nom de Delphine, de Mme de Staël.

81. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « François Villon, sa vie et ses œuvres, par M. Antoine Campaux » pp. 279-302

La littérature est le lieu le plus fait pour admettre les circonstances atténuantes. — On a les noms de quelques-uns des garnements, ses compagnons et sujets, qu’il n’a eu garde d’oublier dans l’un ou l’autre de ses testaments. […] On a recherché, d’après les noms d’auteurs que cite le poète, quelle pouvait être sa librairie, sa bibliothèque (si tant est qu’il en ait eu jamais une), celle même qu’il léguait, en un couplet du Grand Testament, à son maître Guillaume de Villon. […] De là les Lays ou legs, comme il les appelle, et qui reçurent de son vivant, mais non de son fait, le nom de Petit Testament. […] Clément, il faudrait que saint Bernard eût terminé sa kyrielle de noms par un vers tel que celui-ci, ou approchant : Ast ubi nix vetus, tam effusibilis ? […] Ne venons pas prononcer, à son sujet, le nom de Bossuet, ni même celui de Byron et des don Juan modernes.

82. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « Œuvres de Louise Labé, la Belle Cordière. »

Quoi qu’il en soit, et en ne portant en ces agréables matières que le degré de sévérité qui est de mise, je vais noter quantité de noms de poètes qui, sans l’enrichir toujours, sont venus augmenter et grossir le catalogue des étoiles déjà en vue. […] On a semé et fait poindre, par-ci par-là, dans ces différents cadres, des noms inconnus ou peu remarqués jusque-là. […] On ne voit d’ailleurs dans ces pièces où il parle de Bon Temps rien de cet esprit ou de cet à-propos de circonstance qui popularise un nom. il y a quelque gaieté et de la facilité, c’est tout. […] Et voilà de ces cris qui font vivre un nom de poète et qui ont leur écho, sans faillir, de génération en génération, tant qu’il y aura recommencement de printemps et de jeunesse ! […] une femme poète de nos jours, et je les trouve dans un tout petit volume de Contes et Poésies imprimés à Nice (1862) et signés du nom d’Ackermann.

83. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Mademoiselle de Scudéry. » pp. 121-143

Ce n’est pas une réhabilitation que je viens tenter, mais il est bon de mettre des idées exactes sous de certains noms qui reviennent souvent. […] Elle s’est à demi peinte dans le personnage de Sapho, au tome Xe du Grand Cyrus, et ce nom de Sapho lui est resté. […] Elle y parut aussitôt avec avantage, y fut accueillie, célébrée dans les meilleures sociétés, et commença à écrire des romans, sans y mettre toutefois son nom et en se dérobant sous celui de son très glorieux frère. […] Il y a toute une leçon de goût dans ce seul rapprochement des noms. […] Le fait est qu’une fois qu’on démasque les personnages persans ou scythes et qu’on rétablit les vrais noms à l’aide des clefs, comme M. 

84. (1863) Molière et la comédie italienne « Chapitre X. La commedia dell’arte en France pendant la jeunesse de Molière » pp. 160-190

Tiberio Fiurelli est un des plus grands noms de la commedia dell’arte. […] Le fils du docteur faisait les seconds amoureux sous le nom de Virginio. […] Ce nom, inventé sans doute pour la scène française, ne resta pas au théâtre, et le souvenir s’en effaça en même temps que disparut l’acteur qui l’avait porté. […] Ces noms sont de ceux qu’on rencontre le plus fréquemment sur la liste des danseurs et des acteurs employés à la cour à cette époque-là. […] Scaramouche se donnait lui-même ces noms burlesques comme on le voit à la scène vii du Ier acte de Colombine avocat pour et contre, pièce représentée en 1685 ; la plupart de ces noms appartiennent à la tradition de la commedia dell’arte.

85. (1866) Cours familier de littérature. XXI « CXXIIe entretien. L’Imitation de Jésus-Christ » pp. 97-176

Il y avait au mont Sainte-Agnès, dans le diocèse de Cologne, un monastère de l’ordre de Windesheim, un religieux du nom de Jean A Kempis. […] Il est à présumer, par son nom féodal et par l’indépendance de sa vie, qu’il appartenait à une famille noble. […] De là vient cette incertitude qui s’attache à son nom, et qui s’accrut au lieu de s’éclaircir à mesure que son œuvre renommée se répandait davantage, chaque monastère donnant à l’Imitation le nom d’un de ses sectaires pour accroître le nom du couvent. […] Seigneur, si c’est pour votre gloire, que la chose se fasse en votre nom ! […] La nature craint la confusion et le mépris ; mais la grâce se réjouit de souffrir des opprobres pour le nom de Dieu.

86. (1827) Principes de la philosophie de l’histoire (trad. Michelet) « Principes de la philosophie de l’histoire — Livre second. De la sagesse poétique — Chapitre VI. De la politique poétique » pp. 186-220

Si cette dénomination avait eu pour origine la convention des Sabins et des Romains, si les seconds eussent tiré leur nom de Cure, capitale des premiers, ce nom eût été Cureti et non Quirites ; et si cette capitale des Sabins se fût appelée Cere, comme le veulent les grammairiens latins, le mot dérivé eût été Cerites, expression qui désignait les citoyens condamnés par les censeurs à porter les charges publiques sans participer aux honneurs. […] J’appelle matériaux les religions, les langues, les terres, les mariages, les noms propres et les armes ou emblèmes, enfin les magistratures et les lois. […] Voilà le héros qu’Homère qualifie toujours du nom d’ irréprochable (ἀμύμων), et qu’il semble proposer aux Grecs pour modèle de la vertu héroïque ? […] Il est à croire qu’au temps de la guerre de Troie, le nom de αχαιοι, achivi, était restreint à une partie du peuple grec, qui fit cette guerre ; mais ce nom s’étant étendu à toute la nation, on dit au temps d’Homère que toute la Grèce s’était liguée contre Troie. Ainsi nous voyons dans Tacite que ce nom de Germanie, étendu depuis à une vaste contrée de l’Europe, n’avait désigné originalement qu’une tribu qui, passant le Rhin, chassa les Gaulois de ses bords ; la gloire de cette conquête fit adopter ce nom par toute la Germanie, comme la gloire du siège de Troie avait fait adopter celui d’achivi par tous les Grecs.

87. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « EUPHORION ou DE L’INJURE DES TEMPS. » pp. 445-455

Les Allemands sont assurément les plus admirables travailleurs classiques que l’on puisse imaginer ; depuis qu’ils se sont mis à défricher le champ de l’antiquité, ils ont laissé bien peu à faire pour le détail et le positif des recherches ; ils ont exploré, commenté, élucidé les grandes œuvres ; ils en sont maintenant aux bribes et aux fragments, et ils portent là-dedans un esprit de précision et d’analyse qu’on serait plutôt tenté de leur refuser lorsqu’ils parlent et pensent en leur propre nom. […] On en est venu, tous les morceaux principaux de l’ancienne littérature ayant déjà trouvé maître, à s’attacher aux moindres miettes, aux moindres noms. […] Dans cette mêlée injurieuse des temps, combien est-il de ces anciens poëtes, Panyasis que les critiques plaçaient très-haut à la suite d’Homère, Varius qu’on ne séparait pas de Virgile, Philétas que Théocrite désespérait jamais d’égaler, Euphorion avec son Gallus, combien, et des meilleurs et des plus charmants, qui ont ainsi succombé sans retour, et n’ont laissé qu’un nom que les érudits seuls remuent encore parfois aujourd’hui ! […] Quelques écrits ont hérité avec bonheur de ceux que la ruine a engloutis ; quelques noms glorieux, plus nettement dessinés, et répétés sans cesse, sont devenus pour nous la représentation et comme le symbole subsistant des autres à jamais perdus en eux. […] Ce Moretum, si l’on s’en souvient, est le nom d’une espèce de sauce ou de brouet à l’ail que faisaient les paysans ; à propos de cette sauce et de sa préparation, la vie pauvre et misérable que menaient les gens de campagne se trouve décrite, dès l’aube du jour, avec un détail et une réalité qui semblerait n’appartenir qu’à la poésie d’aujourd’hui, à celle de Crabbe, par exemple, ou encore à celle de Regnier.

88. (1920) La mêlée symboliste. I. 1870-1890 « Les poètes maudits » pp. 101-114

*** Corbière, Rimbaud, Mallarmé ; ces trois noms ne synthétisent-ils pas trois points culminants de la Poésie contemporaine ? […] Villiers de l’Isle-Adam a, pour le sauver de l’oubli, son nom prestigieux, ses légendes ancestrales. Des chroniques insérées çà et là, dans les feuilles publiques, des pièces représentées dans différents théâtres, ont soulevé autour de son nom une certaine agitation. […] Hugo, Dumas fils, Sardou, Georges Ohnet, autant de noms pour amorcer les lecteurs. […] Il n’en est pas moins vrai qu’il eût fallu un autre nom, celui de Heredia, par exemple, mais c’eût été sortir du cadre des Poètes maudits.

89. (1858) Cours familier de littérature. VI « XXXVe entretien » pp. 317-396

Il y a certains noms qui obligent. Toutes les infortunes sans boussole de la France et même de l’Europe se tournent par instinct vers certains noms, je ne dis pas plus illustres, mais plus notoires que les autres noms, pour solliciter pitié, appui ou secours. […] Avec trois ou quatre cents noms vous écrivez les annales du monde. […] Il écrivit mon nom et ses intentions sur un simple billet. […] Je fis tomber mon choix sur lui ; j’écrivis son nom et mes intentions sur un billet que je plaçai derrière le même tableau où celui qui contenait mon nom avait été placé par mon père.

90. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « L’abbé Gerbet. » pp. 378-396

Comment, diront quelques-uns de nos lecteurs habituels, comment le nom de l’abbé Gerbet signifie-t-il tout cela ? […] Avant tout, et pour rattacher à sa vraie date ce nom modeste et qui s’est bien plus appliqué à s’effacer qu’à se produire, je rappellerai que sous la Restauration, vers 1820, à l’époque où ce régime, si peu assis d’abord, commençait à entrer en pleine possession de lui-même, il se fit de toutes parts, dans tous les jeunes esprits, un mouvement qui les poussait avec ardeur vers les études et vers les idées. […] Mais, vers cette époque de 1820-1822, un seul nom entre ceux du clergé s’offrait avec éclat et retentissement aux gens du monde : M. de Lamennais, dans sa première forme catholique, forçait l’attention de tous par son Essai sur l’indifférence, et remuait mille pensées au sein même du clergé qu’il étonnait. […] Les anciens théologiens, soit formalistes, soit rationalistes, qui étaient réellement attaqués, résistaient et se scandalisaient au nom des traditions non seulement catholiques, mais scolaires et classiques. […] On a beaucoup disputé, tous ces temps derniers, sur la question des études et sur le degré de littérature autorisé par le clergé ; on a mis en avant bien des noms empressés et bruyants : j’ai voulu rappeler un nom aussi distingué que modeste.

91. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Monsieur Bazin. » pp. 464-485

Augustin Thierry, et son nom était encore proclamé par M.  […] 3º Deux volumes d’études de mœurs, intitulés : L’Époque sans nom (1833). […] Une ordonnance royale, en date du 25 avril 1834, l’autorisa à ajouter à son nom celui de M.  […] On l’avait toujours connu, d’ailleurs, sous ce premier nom. […] Ce livre, qui a titre L’Époque sans nom, et qui commence par une lettre adressée à M. 

92. (1864) William Shakespeare « Première partie — Livre I. Shakespeare — Sa vie »

Défense fut faite aux orateurs du sénat et du forum de prononcer le nom de Vipsanius Minator. […] La maison, située dans la ruelle Henley-Street, était humble, la chambre où Shakespeare vint au monde était misérable ; des murs blanchis à la chaux, des solives noires s’entrecoupant en croix, au fond une assez large fenêtre avec de petites vitres où l’on peut lire aujourd’hui, parmi d’autres noms, le nom de Walter Scott. […] Les grands seigneurs et les gentilshommes d’alors attachaient volontiers leurs noms à des fondations de cabarets. […] La postérité peut lire aujourd’hui ceci dans ses vers intimes : « Mon nom est diffamé, ma nature est abaissée ; ayez pitié de moi pendant que, soumis et patient, je bois le vinaigre. » Sonnet 111. — « Votre compassion efface la marque que font à mon nom les reproches du vulgaire. » Sonnet 112. — « Tu ne peux m’honorer d’une faveur publique, de peur de déshonorer ton nom. » Sonnet 36. — « Mes fragilités sont épiées par des censeurs plus fragiles encore que moi. » Sonnet 121. — Shakespeare avait près de lui un envieux en permanence, Ben Jonson, poëte comique médiocre dont il avait aidé les débuts. […] Shakespeare glorifia Élisabeth ; il la qualifia Vierge étoile, astre de l’Occident, et, nom de déesse qui plaisait à la reine, Diane ; mais vainement.

93. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Troisième partie — Section 2, de la musique rithmique » pp. 20-41

Or saint Augustin dit positivement qu’il étoit en usage de son temps, de donner le nom de rithme à tout ce qui regloit la durée dans l’execution des compositions. Rien n’est si commun dans toutes les langues que le nom de l’espece donné au genre et le nom du genre attribué à l’espece en stile ordinaire. […] Cependant ils appelloient la mesure et le mouvement du nom seul de modi, et même ils donnoient encore quelquefois le nom de modulation à toute la composition, et cela sans égard à l’étimologie de modulation. […] Cependant (et c’est ce que nous avons à dire en second lieu) Quintilien appelle souvent toute la composition une modulation, en comprenant sous ce nom le chant, l’harmonie, la mesure et le mouvement. […] La premiere, c’est que Quintilien n’entend point ici parler des professeurs en éloquence, qu’il désigne par d’autres noms dans ses institutions.

94. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Troisième partie — Section 13, de la saltation ou de l’art du geste, appellé par quelques auteurs la musique hypocritique » pp. 211-233

Cet auteur ne fait en cela que donner à l’espece le nom du genre. […] Nous ne ferons en cela que lui donner le même nom que lui donnoient souvent les anciens. […] Nous avons dit que son nom venoit de celui d’hypocrite, qui signifie dans son sens propre un contrefaiseur. Mais c’étoit le nom le plus ordinaire que les grecs donnassent à leurs comédiens. […] C’étoit le nom d’une célebre danseuse, ajoute Aulugelle, qui fait ce récit.

95. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre XX. Mme Gustave Haller »

C’était un nom d’homme que son livre démentait. […] Le nom d’un homme jurait là-dessus…, mais quand on prend du masque, on n’en saurait trop prendre. […] Les noms sont tout, dans cet inepte monde. […] Quand on voit cette Vertu, exposée sur sa couverture, avec le nom de Mme Sand au-dessous, on veut lire. […] Un acte de vertu est un bout d’étoffe, un peu mince et un peu court, pour tailler là-dedans un roman qui ose s’appeler de ce grand nom : Vertu.

96. (1887) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (deuxième série). IX « M. Funck Brentano. Les Sophistes grecs et les Sophistes contemporains » pp. 401-416

Funck Brentano porte un nom qui me frappe, — ce nom de Brentano ! […] … Je ne sais rien de lui, sinon qu’il est professeur, comme il nous l’apprend, du reste, dans le titre même de son livre, et qu’il a, malgré son nom allemand, la précision française du langage, et un mépris très français aussi pour les idées allemandes… Il range, en effet, Kant et Hégel — mais trop en passant, il est vrai, — parmi les sophistes dont il écrit l’histoire. […] — les sophistes grecs, tous ces gens-là qui sont morts dans leur pays mort et qu’ils ont tué, on ne peut pas leur redonner la vie parce qu’on les déterre, momies presque anonymes, tant on a de peine à lire leurs pauvres noms sur leurs bandelettes ! Excepté, en effet, Zénon d’Élée, dont le nom même ne retentirait pas sans le nom de l’autre Zénon, de Zénon le stoïque, qui a gardé la sonorité du bronze de sa philosophie ; excepté Gorgias et Hippias, immortalisés — mais à quel prix ?  […] L’histoire de cette sophistique, toujours la même sous des noms changeants, soit qu’elle s’appelle « l’éristique », dans l’Antiquité, soit « l’antinomistique », dans les temps modernes, et montrée exclusivement dans son essence et dans ses résultats généraux, suffisait.

97. (1899) Esthétique de la langue française « Esthétique de la langue française — Chapitre VIII »

. — Les noms des jeux. — La langue de la marine. […] Ainsi la balle à la crosse nous est revenue sous le nom de cricket ; la paume, sous le nom de tennis ; le ballon 80, sous le nom de foot-ball ; le mail 81, sous le nom de crocket. Il suffirait évidemment de donner un nom anglais aux boules, à la marelle, ou au cerceau pour voir ces jeux innocents faire leur entrée dans le monde82.

98. (1863) Cours familier de littérature. XVI « XCIe entretien. Vie du Tasse (1re partie) » pp. 5-63

J’ai revu bien souvent depuis la Ville éternelle, mais jamais sa physionomie désolée ne me parut convenir davantage qu’alors à la mélancolie de son nom. […] J’ignorais tout de ce site jusqu’au nom, mais il semblait m’attacher à ce banc comme si l’âme du site, genius loci, avait parlé à voix basse à mon âme. […] La cour de Léon X lui-même n’a pas été illustrée, parmi les siècles, par deux noms plus immortels que les noms de l’Arioste et du Tasse, ces deux clients de ces grands Mécènes du seizième siècle à Ferrare. […] Le poète se tut et chanta sous des noms de nymphe ou de bergère le seul et véritable objet de sa passion. […] Sur la foi d’un vers de Boileau, le seul poème épique moderne digne de ce nom passa pendant deux siècles, en France, pour une fausse dorure sur un vil métal.

99. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre VIII. Jésus à Capharnahum. »

Mais on ne l’apostrophait jamais ainsi, sans doute parce que le nom dont il s’agit ne devait pleinement lui convenir qu’au jour de sa future apparition. […] Ce nom avait si peu de notoriété, que Josèphe, à un endroit de ses écrits 376, le prend pour le nom d’une fontaine, la fontaine ayant plus de célébrité que le village situé près d’elle. […] L’affreux village de Medjdel a sans doute conservé le nom et la place de la bourgade qui donna à Jésus sa plus fidèle amie 399. […] L’antique Kinnéreth avait disparu ou changé de nom. […] Le meilleur argument qu’on puisse faire valoir en sa faveur est le nom même de Tell-Hum, Tell entrant dans le nom de beaucoup de villages et ayant pu remplacer Caphar.

100. (1893) Les œuvres et les hommes. Littérature épistolaire. XIII « Madame Récamier »

cette femme d’un nom sans pareil parmi les femmes qui furent célèbres ! […] Sur ce nom seul de Madame Récamier, toute l’Europe courra lire ces deux volumes, si la Critique n’avertit pas… et toute l’Europe sera attrapée. […] Des noms qu’on cite ne sont pas une société. […] Et puis, il y a la magie des noms ! […] De pareils noms doivent agir sur l’imagination d’un éditeur… et qui sait ?

101. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XXVIII » pp. 305-318

Il ne doutait pas que ce ne fut un moyen de plaire au roi et à madame de Montespan : en conséquence, le 11 mars 1672, il remit sur la scène, sous le nom de Femmes savantes, les prudes bourgeoises et beaux esprits qu’il avait si joyeusement travestis en 1669, sous le nom de Précieuses ridicules. […] C’étaient ces femmes-là que le poète voulait attaquer sous le nom de Femmes savantes. […] Dans la clef qu’on a donnée des Caractères de La Bruyère, sur cent noms propres, il s’en trouve quatre-vingts dont l’auteur n’a jamais entendu parler. […] Bret, pour redresser la citation, prétend qu’il faut substituer le nom de madame de Montausier, Julie de Rambouillet, à celui de sa mère ; et il se trouve que madame de Montausier, à l’époque où parurent Les Femmes savantes, 1672, était morte aussi depuis deux ans ou environ ; M.  […] Fausses clefs, ajoute l’auteur, aussi inutiles au lecteur qu’injurieuses aux personnes dont les noms sont déchiffrés, et à l’écrivain.

102. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « M. BALLANCHE. » pp. 1-51

Neuilly, nom symbolique, lui représente ses amis morts durant le siége, et il les invoque comme un seul être. […] Entre l’Essai et l’Homme sans nom, M. […] il y a un fonds effrayant de réalité dans une partie de l’Homme sans nom, un fonds d’autant plus extraordinaire que M. […] Un conventionnel régicide, Lecointe-Puyraveau des Deux-Sèvres, aurait pu raconter la séance du vote exactement comme l’Homme sans nom la raconte. […] Pour nous qui n’approchons qu’avec respect de tous ces noms, et qui ne les quittons qu’à regret, il faut nous arrêter pourtant.

103. (1857) Cours familier de littérature. III « XVIe entretien. Boileau » pp. 241-326

On ne peut le définir, en politique comme en littérature, que par son nom : l’Anglais est un Anglais. […] Dans aucun autre pays du monde un tel homme n’aurait laissé une trace de son nom. […] Il cite à Molière, pour exemple de ces contradictions de la rime et du sens, une foule de circonstances où, cherchant à trouver le nom d’un homme de génie, la rime lui présente au bout du vers le nom d’un plat ou ridicule écrivain. […] Homère, Dante, Pétrarque, Milton, Racine, Byron ont tous donné à leurs poésies des noms de femmes. […] La postérité a tenu toutes les promesses qu’il avait faites d’avance en son nom à ses illustres amis.

104. (1892) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Cinquième série « Donec eris felix… »

Arthur Meyer répudie décidément le boulangisme « au nom des gens du monde ». […] Il constate avec stupeur que, pour la première fois depuis deux ans, le nom de Boulanger, le mot « boulangisme », même le mot « boulange » ne figurent dans aucun journal. […] Tu n’étais qu’un nom, le nom donné par les mécontents à leurs espérances ou à leurs convoitises, à leurs passions bonnes ou mauvaises. […] Je ne puis désormais te donner un autre nom ! 

105. (1890) Conseils sur l’art d’écrire « Principes de composition et de style — Deuxième partie. Invention — Chapitre IX. Du rapport des mots et des choses. — Ses conséquences pour l’invention »

Je puis évoquer l’image d’un individu désigné par un nom propre ; le nom commun, général et abstrait, représente toute une collection d’objets, et seulement les qualités communes à tous ces objets. « Le nom d’arbre, dit M.  […] Faute de sentir cela, on prend les noms abstraits comme répondant à des réalités concrètes.

106. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « LES JOURNAUX CHEZ LES ROMAINS PAR M. JOSEPH-VICTOR LE CLERC. » pp. 442-469

En fait de généalogie, on n’est jamais difficile ; on ne s’est pas trop inquiété de voir à quoi répondait précisément et ce que signifiait en importance ce nom de journaux appliqué à l’ancienne Rome ; on n’a pas assez remarqué que ce n’était là d’ailleurs que la seconde partie et comme l’assaisonnement du savant travail de M. […] Dans l’histoire qu’on a tracée jusqu’à présent de la littérature des deux derniers siècles, on ne s’est pris qu’à des œuvres éminentes, à des monuments en vue, à de plus ou moins grands noms : les intervalles de ces noms, on les a comblés avec des aperçus rapides, spirituels, mais vagues et souvent inexacts. […] Allez aux grands noms, aux pics éclatants ; laissez ces bas-fonds et ces marnières. » Mais il ne s’agirait pas ici de réhabiliter des noms ; les noms en ce genre sont peu ; les hommes y sont médiocrement intéressants d’ordinaire, et même les personnes morales s’y trouvent le plus souvent gâtées et assez viles ; il s’agirait de relever des idées et de prendre les justes mesures des choses autour des œuvres qu’on admire. […] » Ces bonnes pièces, ces bonnes copies, comme on dit dans les classes, c’est une manière plus prosaïque d’exprimer la même chose qu’on a depuis appelée magnifiquement du nom d’épopées. […] Je suis tenté vainement de citer le nom de Tournemine comme se rattachant le plus en tête à la rédaction des Mémoires de Trévoux ; Tournemine a-t-il obtenu ou gardé quelque chose qui ressemble à de la gloire ?

107. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome I « Mémoires pour servir à l’histoire des gens-de-lettres ; et principalement de leurs querelles. Querelles particulières, ou querelles d’auteur à auteur. — Aristophane, et Socrate. » pp. 20-32

Le nom de Socrate est un éloge. […] Les Espagnols manquent de naturel & de régularité : ils ont un Gracioso, manière d’Arlequin, qui ne les fait jamais tant rire que lorsqu’il jure par des saints d’un nom inconnu & bisarre. […] Cette nécessité d’employer des sujets & des noms de pure invention, fut l’époque de la belle comédie, de celle de Ménandre & de Philémon, appellée la nouvelle comédie, par opposition à l’ancienne, dont le stile bouffon & cynique se ressentoit de la charrette de Thespis, & à la moyenne, qui, quoique plus régulière dans son plan, n’en étoit ni plus réservée, ni plus innocente. […] Sans parler des exemples tous récens, & principalement de la comédie des Philosophes & de celle de l’Ecossoise, Moliere a joué l’hôtel de Rambouillet, Ménage & l’abbé Cotin, l’un sous le nom de Vadius, l’autre sous celui de Tricotin, changé depuis en Trissotin. […] De combien de ridicules ne fut-il pas couvert sous le nom de M. de la Rimaille ?

108. (1901) Des réputations littéraires. Essais de morale et d’histoire. Deuxième série

Le déclin du nom, du nom d’un pur critique surtout, suit rapidement le déchet de l’œuvre. […] qui sait même son nom, en dehors des érudits ? […] Ma trouvaille avait nom Debureau. […] Son nom ne figure pas dans les dictionnaires. […] Leur nom même périt.

109. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « BRIZEUX et AUGUSTE BARBIER, Marie. — Iambes. » pp. 222-234

La cadette, je suppose, est restée recueillie en elle-même et discrète ; elle s’est rattachée par un retour pieux au foyer domestique, au bourg natal, aux mœurs, au paysage du lieu, aux amours de sa blonde enfance ; elle a gardé son culte simple ; elle peut retrouver au besoin son accent du pays ; elle se rappelle encore tous les noms, et s’enferme souvent pour chanter ses airs anciens et pleurer plus à l’aise à ses souvenirs. […] Mais chez l’auteur de Marie, tout cela est si habilement fondu, si intimement élaboré au sein d’une mélancolie personnelle et d’une originalité indigène, que la critique la plus pénétrante ne saurait démêler qu’une confuse réminiscence dans ce produit vivant d’un art achevé, et que si elle voulait marquer d’un nom ce fruit nouveau, elle serait contrainte d’y rattacher simplement le nom du poëte ; mais nous qui jugeons combien est sincère la modestie qui nous l’a caché81, nous ne prendrons pas sur nous de lui faire violence ; et pour conclure, nous nous bornerons à citer la plus touchante, à notre gré, des élégies que le nom de Marie décore : Partout des cris de mort et d’alarme ! […] Auguste Barbier sont déjà connus : la Curée, la Popularité, l’Idole, lui ont fait un nom. […] Cette première édition de Marie ne portait pas de nom d’auteur. […] L’auteur ici a rétabli les noms celtiques dans leur pure orthographe, il les a multipliés : an lieu de chanter désormais sa Bretagne du point de vue adouci du Cénacle et du Musée, il semble vouloir la venger au point de vue de sa nationalité propre.

110. (1885) Les œuvres et les hommes. Les critiques, ou les juges jugés. VI. « M. Ch. de Barthélémy » pp. 359-372

une fantaisie de Jules Janin qui, par hasard, avait lu un peu de Fréron, comme La Fontaine avait lu un peu de Baruch, pour que ce nom de Fréron apparût, dans la littérature du xixe  siècle, avec le respect qu’on lui doit. […] Or, c’est cette personnalité du critique contre la personnalité des critiqués que j’aurais voulu trouver aussi dans ce livre des Confessions de Fréron, qui sont plus des extractions que des confessions… parce qu’il n’y a de critique efficace, de critique qui mérite ce nom de critique, qu’à la condition de traverser l’homme par le livre et le livre par l’homme… Je sais que le préjugé contraire court les chemins. […] Il a cité l’ingénieuse Lettre sur Saadi à M. de Voltaire, qui raconte à Voltaire, sous le nom de Saadi, sa propre histoire ; et enfin le jugement sur Voltaire, qui n’a pas bougé depuis qu’il fut écrit, et que les admirateurs de Voltaire lui-même sont obligés d’accepter comme le dernier mot sur un homme qui, à force d’esprit, s’est fait prendre frauduleusement pour un génie. […] Jusque-là, il avait mérité de s’appeler de ce beau nom qu’ils ont en Écosse, il était digne de s’appeler du nom de Marmor ; car, marbre il était, et les marbres, sur lesquels tout tombe sans rayer leur surface polie, n’avaient pas plus que lui de froide impassibilité. […] Marié deux fois, il fut aimé jusque de son fils, qui rendit le grand nom de son père un nom funeste !

111. (1864) Histoire anecdotique de l’ancien théâtre en France. Tome I pp. 3-343

La troupe prit le nom de Confrères de la Passion, nom qui rappelait les sujets des pièces, toutes tirées de l’Ancien, du Nouveau-Testament ou de la Vie des Saints. […] Il la met au théâtre sous le nom de Mélite (nom qui fut donné plus tard à la jeune personne, cause première de la première étincelle du génie du grand Corneille). […] Je m’y qualifierai du nom de prisonnière ; Lui, du nom de mon tout, de ma seule lumière. […] Elle porte ce nom de Suivante. […] Ce grand nom de vainqueur n’est plus ce qu’il souhaite.

112. (1899) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (troisième série). XVII « Vie de la Révérende Mère Térèse de St-Augustin, Madame Louise de France »

Elle n’a pas mis son nom à son livre et elle n’avait pas de nom à y mettre. […] Quant à Jules Soury, qui a vraiment un nom providentiel pour un rat de bibliothèque, — et l’on m’a dit qu’il en était un, — je ne l’aurais pas encore aperçu dans la poussière des endroits où il gîte, si la Revue des Deux Mondes ne lui avait pas jeté sa vieille serpillière saumon sur le dos. […] Elle ne répondit point à un autre nom jusqu’au jour où elle fut la Mère des novices, des maîtresses que Dieu lui avait données, disait-elle, et dont elle était la servante. […] Et voici pour l’esprit borné, voici pour la bête de la Revue des Deux Mondes : Elle avait, comme la grande sainte Thérèse dont elle portait le nom, le discernement de la valeur des âmes, et elle en avait le gouvernement. […] Elle l’a appelée de cet avilissant nom d’intrigante, parce que la Carmélite, qui voyait clair dans ce malheureux monde qui s’en allait, s’occupait des intérêts de la religion — tout pour elle ! 

113. (1868) Rapport sur le progrès des lettres pp. 1-184

Des noms propres éclairciraient tout ceci, je le sens bien. […] Tout se mêlait sous son nom. […] De la tragédie régulière, Charlotte Corday n’en a porté le nom qu’un jour, et quand ce nom semblait utile à sa fortune ; aujourd’hui elle l’a répudié. […] J’ai écrit le nom de Giboyer. […] Heureux et malheureux à la fois, il a un fils qui est son orgueil et auquel il n’a pas donné son nom, de peur que son nom ne fut une tache.

114. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Première partie. — Chapitre XVI. »

Il a même cette fois sur sa liste un poëte lyrique : mais ce poëte n’est pas Titius ; c’est Rufus, nom tout à fait inconnu comme le précédent, et nouvel exemple de l’erreur fréquente des admirations contemporaines. […] Des actes odieux d’Octave, des actes de tyran ou plutôt de bourreau, en souillant ses mains, ne flétrirent pas son nom, et n’empêchèrent pas que, lorsque son ambition assouvie se contenta de l’obéissance, sans prendre les biens et la vie, une acclamation de reconnaissance s’éleva presque dans tout l’empire. […] C’est assez d’avoir pu rallier à ce nom, par un art délicat et charmant, les images de la poésie grecque et jusqu’au souvenir de l’antique vertu romaine. […] De qui la folâtre image de la voix redira-t-elle le nom, sur les hauteurs ombragées d’Hélicon, ou sur le Pinde, ou sur le frais Hémus ?  […] Si vous voulez citer un autre nom, ce sera celui de Cæsius Bassus, que nous avons connu naguère ; mais il est aujourd’hui bien dépassé par des génies encore vivants. » Flatteuse espérance, que les contemporains ne se refusent pas, qui vaut mieux que les détractions de l’envie, mais qui souvent ne trompe pas moins !

115. (1860) Cours familier de littérature. IX « LIIIe entretien. Littérature politique. Machiavel (2e partie) » pp. 321-414

Dès lors le despotisme inquisitorial fut consacré sous le nom de liberté. […] Ce nom de Manin sera à jamais un de ces bas-reliefs retrouvés dans les décombres de l’antique Italie. […] Les rivages et les flots de la Sardaigne, de la Sicile, de Naples, de la Grèce, de la mer Noire, portent leurs noms. […] André Doria rentra, précédé de la terreur de son nom ; sa vengeance implacable, qui ne se ralentit qu’à l’âge de quatre-vingt-quatorze ans, consterna Gênes et assombrit son nom. […] Une telle constitution masquée était mille fois plus pleine d’anarchie que si elle avait dit franchement et courageusement son nom.

116. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « Études de politique et de philosophie religieuse, par M. Adolphe Guéroult. »

Littré, et je ne serai que juste en indiquant aussi, pour une époque bien plus récente et dans une branche prolongée de la même école, le nom d’un savant très-estimé de tous ceux qui le connaissent, M.  […] Quand on parle de liberté, au risque d’étonner et de formaliser un peu ceux qui ne prononcent ce nom qu’avec frémissement, je demande aussitôt laquelle, — de quelle liberté il s’agit. Nous n’en sommes plus au temps où l’on confondait sous ce nom commun de liberté la cause de Thraséas, celle de Brutus et des Gracques, celle du Lacédémonien Agis, celle des patriciens de Venise, celle du Grand-Pensionnaire de Hollande, de Witt, celle de lord Chatham, tous noms des plus respectables et des moins médiocres assurément ; mais nous est-il permis pourtant de distinguer ? […] sommes-nous en présence d’un dogme religieux, et pouvons-nous porter la main au nom révéré sans encourir le reproche de sacrilège ? […] On ne dira pas que je diminue ceux que je viens de définir ; j’en viens hardiment aux autres : ces autres ne sont ni absolutistes ni serviles, je repousse ce nom à mon tour de toute la fierté à laquelle toute sincère conviction a droit ; mais il en est qui pensent que l’humanité de tout temps a beaucoup du à l’esprit et au caractère de quelques-uns ; qu’il y a eu et qu’il y aura toujours ce qu’on appelait autrefois des héros, ce que, sous un nom ou sous un autre, il faut bien reconnaître comme des directeurs, des guides, des hommes supérieurs, lesquels, s’ils sont ou s’ils arrivent au gouvernement, font faire à leurs compatriotes, à leurs contemporains, quelques-uns de ces pas décisifs qui, sans eux, pouvaient tarder et s’ajourner presque indéfiniment.

117. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « DIX ANS APRÈS EN LITTÉRATURE. » pp. 472-494

L’imprévu, l’extraordinaire, depuis dix ans, a surgi à d’autres endroits et a jailli par d’autres noms. […] Il les faut laisser à l’orgueil des générations survenantes, qui ont encore à parcourir en leur propre nom tout le cercle des erreurs. […] Il est des noms éclatants qui font pointe à part et qui s’échappent le plus qu’ils peuvent hors de l’orbite ; mais ils n’entraînent et ne rangent rien autour d’eux. […] Je ne craindrai pas d’éclaircir ma pensée avec trois noms : vers 1829, M. de Carné était au Correspondant, journal catholique, M. […] Le nom de Charles de Bernard se sous-entendait naturellement ici : talent charmant et déjà mûr, trop vite enlevé !

118. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — B — article » pp. 211-219

Il a dédaigné d’y mettre son nom, parce qu’il est moins jaloux de la célébrité, qu’animé du désir de se rendre utile. […] Nous exhortons l’Auteur à remplir la promesse qu’il fait dans sa premiere Lettre, sous le nom du Chevalier qu’il a mis en scene. […] « Mais qui pourroit ici détailler le nom & la forme, & le séjour différent de chacun de ces astres ? […] elle périt, & laisse son nom à la mer cruelle qui l’engloutit. […] Les autres Ouvrages de du Bartas valent encore moins que son Poëme des sept Jours ou de la Semaine, ou de la Création, car il est connu sous ces trois noms.

119. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Première partie — Section 20, de quelques circonstances qu’il faut observer en traitant des sujets tragiques » pp. 147-156

Si nous sçavions l’histoire domestique de Cesar et d’Alexandre avec autant de détail, que nous sçavons celle des grands hommes de notre siecle, les noms du grec et du romain ne nous inspireroient plus la même veneration qu’ils nous inspirent. […] Ainsi j’approuve les auteurs qui, lorsqu’ils ont pris pour sujet quelque évenement arrivé en Europe depuis un siecle, ont masqué leurs personnages sous le nom des anciens romains ou de princes grecs, ausquels personne ne prend plus d’interêt. […] Quand Monsieur Campistron voulut mettre au théatre l’avanture tragique de dom Carlos, le fils aîné de Philippe II roi d’Espagne, il traita ce sujet sous le nom d’Andronic. Mais malgré le changement du nom des personnages, la répresentation de cette tragedie a été défenduë durant long-tems dans les païs-bas espagnols. […] Je n’ajouterai plus qu’un mot à cette observation : c’est qu’à l’exception de Bajazet, et du comte d’Essex, toutes les tragedies écrites depuis soixante ans, dont le sujet étoit pris dans l’histoire des deux derniers siecles, sont tombées, leurs noms mêmes sont oubliez.

120. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Seconde partie. Poétique du Christianisme. — Livre quatrième. Du Merveilleux, ou de la Poésie dans ses rapports avec les êtres surnaturels. — Chapitre II. De l’Allégorie. »

On ne doit jamais personnifier qu’une qualité ou qu’une affection d’un être, et non pas cet être lui-même ; autrement, ce n’est plus une véritable personnification, c’est seulement avoir fait changer de nom à l’objet. Je peux faire prendre la parole à une pierre, mais que gagnerai-je à appeler cette pierre d’un nom allégorique ? […] Ce que le voyageur tremblant adorait en passant dans ces solitudes, était quelque chose d’ignoré, quelque chose dont il ne savait point le nom, et qu’il appelait la Divinité du lieu ; quelquefois il lui donnait le nom de Pan, et Pan était le Dieu universel.

121. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Poésies d’André Chénier »

Fils de parents mêlés au monde, « lié de bonne heure avec tout ce que les arts, les sciences, la politique, avaient de noms éminents, André Chénier fut un homme considéré à son époque, et presque considérable. […] Les noms des amies chantées par André Chénier dans ses Élégies sont maintenant connus, du moins presque tous : il n’était pas de ceux qui se choisissent des « maîtresses poétiques », et qui font des élégies en l’air. […] Quant aux Glycère, Rose, Amélie, elles n’ont pas d’autres noms et ne méritent pas d’être reconnues. […] B. de Fouquières aura l’honneur d’avoir désormais attaché son nom d’une façon inséparable à la destinée d’un jeune dieu. […] Et puis, c’est rarement en son nom qu’il parle : c’est au nom des maîtres, de ces poëtes divins et délicats dont il est plein et dont il nous sert les exquises reliques.

122. (1889) Les œuvres et les hommes. Les poètes (deuxième série). XI « La Fontaine »

— ne laissent dans nos souvenirs que l’impression de leurs chefs-d’œuvre et le nom qu’ils ont immortalisé, mais La Fontaine y a laissé son œuvre même. […] Ce don exquis de la bonhomie dans l’Idéal, où elle n’est pas d’ordinaire, et sans que l’Idéal en soit diminué, est si frappant dans La Fontaine que tout le monde, et non pas seulement la Critique, lui a spontanément donné le nom de bonhomme, qui a remplacé son nom. […] Seulement, lui, c’est le Gaulois par excellence, et comme il est, de tous les écrivains, celui qui a le mieux exprimé poétiquement le génie de cette race que l’Histoire a symbolisée sous le nom de Jacques Bonhomme, on lui a taillé, de reconnaissance, son titre littéraire dans ce nom. Mettez telle épithète que vous voudrez à Virgile, à Shakespeare, à Dante, à Corneille, qu’on appelle aussi parfois le bonhomme, à la condition d’ajouter son nom immédiatement après, vous serez obligé, pour vous faire entendre, d’écrire leur nom à tous derrière leur épithète, tandis qu’en parlant de La Fontaine, vous n’avez qu’à dire : « le bonhomme », et la Gloire ne pourra s’y méprendre ; car toute la terre aura compris.

123. (1913) Essai sur la littérature merveilleuse des noirs ; suivi de Contes indigènes de l’Ouest-Africain français « Contes — XV. Le fils du sérigne »

Enfin, si tu vois encore quelque chose pour la quatrième fois, demandes-en le nom. Et quand le nom t’en aura été donné, alors tu reviendras ici. » Au matin le gourgui166 s’est mis en route. […] » — Et l’autre lui répond : « Mon nom est Adina ». […] répond le savant marabout, celui-ci a dit vrai en se donnant ce nom.

124. (1910) Victor-Marie, comte Hugo pp. 4-265

Remplacer par un autre nom. Mettre un autre vrai nom, forger, feindre un nom fictif. […] C’est un nom d’une personne, un nom de quelqu’un. […] Il n’avait pas choisi un nom bien hébreu, mais il avait forgé un nom bien hébreu. […] Chaque nom y figure deux fois.

125. (1863) Histoire de la vie et des ouvrages de Molière pp. -252

C’était prendre le nom d’un port pour un nom d’ouvrage. […] Il prend le nom de Molière. […] Origine de ce nom. […] Origine prétendue du nom de l’apothicaire Fleurant. […] Elle prit le nom très exigeant de « l’Illustre Théâtre ».

126. (1858) Cours familier de littérature. VI « XXXIe entretien. Vie et œuvres de Pétrarque » pp. 2-79

Cette maison habitait le bourg de Noves, sur les rives de la Durance, à quelque distance d’Avignon ; c’est de cette seigneurie qu’elle tirait son nom. Le père de Laure était Audibert de Noves, sa mère se nommait Ermessende ; on ne connaît pas son autre nom. […] Il avait déposé Jean XXII et fait élire un nouveau pape, du nom de Mathéi. […] Que votre nom seul soit gravé sur le marbre blanc de ma tombe ! […] De leur naissance, de leur nom ?

127. (1866) Cours familier de littérature. XXI « CXXIIIe entretien. Fior d’Aliza » pp. 177-256

L’inattendu est le nom des choses humaines. […] Le comte Gino Capponi, héritier du grand nom et de la grande influence de ses ancêtres, avec qui j’étais lié d’ancienne date à Paris, y venait tous les jours. […] À son arrivée à Missolonghi avec de l’or et des armes, le ciel lui avait refusé l’occasion d’illustrer deux fois son nom de poète en y ajoutant le nom de héros, d’homme d’État et de libérateur de la Grèce. […] Childe Harold, ou lord Byron, que ce nom désigne toujours, est non seulement un personnage très distinct de M. de Lamartine, il en est encore en toute chose l’opposé le plus absolu. […] Ajoutons que ce cinquième chant était même destiné à paraître sous le nom de lord Byron, et comme la traduction d’un fragment posthume de cet illustre écrivain.

128. (1860) Cours familier de littérature. IX « LIIe entretien. Littérature politique. Machiavel » pp. 241-320

Cet homme, j’allais oublier de vous dire son nom, c’est Nicolas Machiavel. […] Le malheur du nom de Machiavel fut d’avoir passé pour complice de ces perfidies et de ces crimes, dont il n’était que le spectateur et le confident diplomatique au nom de sa patrie. […] Le nom de Machiavel devenu proverbe est une calomnie de l’homme qui a porté ce grand nom : il est plus commode de le nommer que de le lire. Malheur aux hommes dont le nom devient synonyme de crime : il faut des siècles pour laver ce nom ! […] Mais enfin voilà l’Italie depuis sa mort, l’Italie posthume, si on veut savoir à cette époque son vrai nom ; voilà l’Italie exhumée et renaissant de ses cendres jusqu’à Machiavel.

129. (1862) Cours familier de littérature. XIII « LXXVIIe entretien. Phidias, par Louis de Ronchaud (2e partie) » pp. 241-331

Mon nom commençait à transpirer dans le monde ; elle avait désiré me connaître ; elle m’avait honoré de la plus gracieuse et de la plus intime familiarité. […] Un faible secours d’argent de ses protecteurs lui avait facilité l’accès et le séjour de Rome ; son nom y avait surgi peu à peu de ses œuvres. Bientôt les mausolées de l’amiral vénitien Emo, et les mausolées plus mémorables de deux papes, avaient élevé ce nom au-dessus des noms rivaux de son siècle. […] Le Parthénon était entièrement construit de marbre blanc, dit marbre pentélique, du nom de la montagne voisine d’où on le tirait. […] Les noms de tous ceux qui ont taillé une pierre ou modelé une statue du Parthénon sont devenus immortels.

130. (1868) Cours familier de littérature. XXV « CXLVIIe entretien. De la monarchie littéraire & artistique ou les Médicis »

Les Toscans, la moelle de l’Italie proprement dite, avaient précédé les Romains de Romulus dans la civilisation de l’Italie, sous le nom mystérieux d’Étrusques. […] Le magnifique palais Pitti, qui ne garda que son nom, ne put être achevé alors et devint plus tard le palais des Médicis. […] L’amour est en effet le sujet auquel il a consacré une grande partie de ses ouvrages : mais il est un peu étrange qu’il n’ait pas cru devoir, dans aucune circonstance, nous apprendre le nom de sa maîtresse ; il n’a pas même voulu lui donner un nom poétique, et satisfaire au moins jusque-là notre curiosité. Pétrarque avait sa Laure, et Dante sa Béatrix ; mais Laurent s’est appliqué avec soin à cacher le nom de la souveraine de ses affections, laissant aux mille descriptions brillantes qu’il a faites de sa rare beauté et de ses perfections le soin de la faire connaître. […] « Après le tableau que nous venons de faire de la passion de Laurent, on peut se permettre sans doute de demander quel était l’objet d’un amour si délicat, quel était le nom de cette femme qu’il adore sans la désigner autrement que d’une manière vague, qu’il célèbre sans la nommer.

131. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Volney. Étude sur sa vie et sur ses œuvres, par M. Eugène Berger. 1852. — I. » pp. 389-410

Le père de Volney, avocat en crédit, à qui ce nom de Chassebœuf ne souriait pas et qui y avait gagné plus d’une raillerie, donna dès l’enfance à son fils, celui de Boisgirais, qui ne fut que provisoire. […] On a lieu de s’excuser pour une telle association de noms, et il est besoin de l’expliquer. […] Ce moment, pour lui solennel, du départ, fut aussi celui où il changea le nom de Boisgirais qu’il avait porté jusque-là en celui de Volney qu’il allait rendre célèbre. […] Volney cite les prophéties sur Tyr, il n’en dit point les auteurs ; il parle d’un écrivain seulement, comme si ces noms des prophètes lui faisaient mal à prononcer. […] Ce livre, qui porte bien son nom, a eu longtemps une réputation exagérée.

132. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Souvenirs de soixante années, par M. Étienne-Jean Delécluze, (suite et fin) »

Il y aurait à faire de lui, sous ce dernier nom, un double portrait à la La Bruyère, ou plutôt un seul et même portrait avec variante : Étienne ou l’homme content de lui, — Étienne ou l’homme qui a eu toujours raison. […] Delécluze pour quantité de personnes et de noms et cette partie de son livre n’a qu’une valeur médiocre et incertaine. […] Il écorche presque tous les noms propres, il écrit l’abbé Gerbot pour Gerbet ; il appelle M.  […] de la plupart des noms propres et de quelques sobriquets sous lesquels il désignait ses amis. […] Andrieux et Baour-Lormian. » Songeons à la date (1823) pour excuser quelque lange et unex æquo dans les noms, et ne voyons que la pensée.

133. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « Exploration du Sahara. Les Touareg du Nord, par M. Henri Duveyrier. »

Et puis, parmi ceux même qui méritent ce dernier nom par l’étendue du cercle qu’ils embrassent, il y a encore voyageurs et voyageurs. […] Ceux qui ont vécu dans les montagnes, au voisinage des glaciers, savent que chaque chose a son nom ; les habitants du pays ou, à leur défaut, les savants, ont tout observé, tout nommé. De même les Arabes du désert, les indigènes, ont donné un nom à chacune des formes, des circonstances ou des particularités de cette mer de sable. […] Leur nom Touareg signifie en arabe les délaissés ou abandonnés ; ils ne l’acceptent pas et se nomment de leur vrai nom les libres et indépendants. […] Voici une Marseillaise qu’ils chantent en les allant combattre :    « Que Dieu maudisse ta mère, Matalla (nom d’un chef arabe), car le diable est en ton corps !

134. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre XXVI. Des oraisons funèbres et des éloges dans les premiers temps de la littérature française, depuis François Ier jusqu’à la fin du règne de Henri IV. »

À l’égard de Henri II, son nom aujourd’hui ne réveille plus l’idée de grandeur. […] On y vante les grandes actions d’un prince de vingt ans, qui n’avait pu encore que prêter son nom aux malheurs de son règne. […] Le nom de ce prince avait de l’éclat en Europe ; et tant qu’il ne régna point, il parut digne de régner. […] Le peuple, courbé sous ses travaux, prononce souvent le nom de Henri IV, et attache à ce nom des idées qui l’intéressent. […] Le texte fut : Nominatus est usque ad extrema  ; son nom a été connu aux extrémités de la terre.

135. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Souvenirs de soixante années, par M. Etienne-Jean Delécluze »

Et d’abord, le nom de M.  […] C’en est déjà une preuve que de s’être avisé de se raconter à la troisième personne et de s’être mis en scène continuellement sous le nom d’Étienne, qui est un de ses prénoms. […] Il aspirait cependant à avoir un maître, et le nom de David étant alors le plus grand, le plus radieux entre ceux des artistes, celui du dictateur suprême, il ambitionnait d’entrer dans son École, de travailler dans son atelier. […] Delécluze, tout plein de ces souvenirs, décrit tout et appelle tout par son nom : voilà de la vérité. […] Un jour donc, un élève, racontant une histoire bouffonne, y mêla à diverses reprises le nom de Jésus-Christ ; je laisse M. 

136. (1908) Les œuvres et les hommes XXIV. Voyageurs et romanciers « Madame Paul de Molènes »

Il y a déjà longtemps que le nom, sign é en toutes lettres à la tête de ce livre, tout le monde le disait et le répétait ; car on n’a pas pour rien à Paris le talent original qui est lui-même une signature. […] II Elle l’a appelé l’Orpheline 55, — et elle aurait pu l’appeler d’un autre nom, et même de plusieurs autres noms ; car toutes les femmes qui apparaissent et qui vivent dans son roman valent en intérêt celle qui est l’héroïne du livre indiquée par son titre. […] Au lieu des cinq actes qui sont le terme des plus longues comédies, celle-ci en a seize, qui sont des chapitres… Malgré l’ancienneté des noms qui forment son titre, monsieur Adam et madame Ève ne sont pas les personnages historiques de ces noms vieux comme l’univers. L’auteur les a laissés très respectueusement dans la Bible, mais il s’est permis de prendre leurs noms pour mieux dire que c’est l’homme et la femme de tous les mariages qui vont lui passer par les mains ! […] Madame Ange Bénigne, dont le nom véritable sera dit un jour (nous l’espérons bien) en plein théâtre et en plein succès, aura-t-elle à la scène la valeur de talent qu’elle a dans ce livre que nous avons le droit d’appeler aussi : Un spectacle dans un fauteuil ?

137. (1886) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Deuxième série « José-Maria de Heredia.. »

Au temps déjà lointain où j’apprenais l’histoire de la littérature française sur les bancs du collège, un nom m’avait frappé parmi ceux des poètes de la Pléiade : Ponthus de Thyard. […] Lorsque je pus lire ses Erreurs amoureuses, ma déception fut grande : pourtant je continuai d’aimer Ponthus pour le noble esprit qui paraît çà et là dans ses méchants vers et surtout pour la sonorité de son nom. […] José-Maria de Heredia l’est sans doute encore aujourd’hui pour la plus grande partie du public : un nom éclatant et mystérieux. […] On verra, quand il nous donnera enfin ses Trophées, que ses vers sont aussi beaux que son nom, et l’on reconnaîtra dans ses sonnets le suprême épanouissement, sous la forme littéraire, d’un sang héroïque et aventureux. Et nous lui dirons tous avec Théophile Gautier : — Heredia, je t’aime parce que tu portes un nom exotique et sonore et parce que tu fais des vers qui se recourbent comme des lambrequins héraldiques.

138. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome I « Mémoires pour servir à l’histoire des gens-de-lettres ; et principalement de leurs querelles. Querelles particulières, ou querelles d’auteur à auteur. — L’abbé d’Aubignac, avec Ménage, Pierre Corneille, Mademoiselle de Scudéri et Richelet. » pp. 217-236

Il prit le nom de celle de d’Aubignac, diocèse de Bourges. […] Il l’a célébrée sous le nom de Laverna. […]         Est-ce Corinne, est-ce Lesbie,         Est-ce Phyllis, est-ce Cynthie,         Dont le nom est par toi chanté ? […] Celle qui se faisoit chez l’abbé d’Aubignac portoit son nom, & l’autre s’appelloit Mercuriale *. […] Persuadée que les romans ne sont au fond que des poëmes épiques en prose, elle imagina d’en composer qui contînssent des histoires véritables sous des noms déguisés.

139. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre XV. Mme la Mise de Blocqueville »

Elle a signé son livre, et le nom qu’elle a signé est un illustre nom. Mme de Blocqueville est une d’Eckmühl, — un nom tenu à la victoire ! […] Est-elle, dans l’ouvrage qu’elle publie, au niveau de son nom ? […] Toujours est-il qu’un pareil nom fraye sa voie au livre. […] car, sans le nom, le livre, inaperçu, passerait.

140. (1906) Les œuvres et les hommes. Femmes et moralistes. XXII. « La Papesse Jeanne » pp. 325-340

Il cache son nom comme la tortue, dont il a la lenteur, cache sa tête sous son écaille… Lorsque, pour ne parler que de ceux-là, François Hugo et Émile Montégut traduisirent Shakespeare, ils ne s’en cachèrent point, et ce fut avec une juste fierté qu’ils signèrent la traduction d’une œuvre qui faisait tomber sur leur nom un rayon de sa glorieuse beauté. Mais le traducteur du livre que voici, et qui a déjà eu tant de traducteurs, n’a pas signé la sienne… et, franchement, ce n’est pas aimable pour son grand homme à lui, — pour Emmanuel Rhoïdis, — un nom mélodieux, par parenthèse, très facile à répéter pour la Gloire, si la Gloire était une mijaurée qui zézéyât comme Alcibiade, et n’avait pas cette bouche d’airain capable de tout prononcer ! […] Malgré son nom qui rappelle les roses, Rhoïdis n’en est point une, placée dans les feuillets des livres et qui les parfume… Il n’est que le cloporte qui les ronge, et qui vit dans la feuille moisie… C’est, du reste, par amour idéal pour la Papesse Jeanne qu’il est devenu le cloporte des bibliothèques. […] On a les noms et les opinions de tous ceux qui ruinèrent ce vieux conte… Et, chose particulièrement remarquable et inattendue ! […] Il n’y a pas apporté, dans la discussion, un seul mot inconnu, un nom vierge de flétrissure parmi ceux qu’il cite, et qui sont tous suspects quand ils ne sont pas déshonorés.

141. (1888) Les œuvres et les hommes. Les Historiens. X. « Michelet » pp. 259-274

Pour l’héroïsme de Mameli, mis à la suite de ces grands noms respectés et indiscutés, je me défie de l’affirmation de Michelet et de son enthousiasme. […] Seulement, leur Dieu avait perdu son nom et son culte. […] Seulement, j’aurais voulu savoir les noms des hommes d’airain figurés aux bas-reliefs. […] La spirale, tout à coup, s’arrête… et tout ce peuple sans nom devient le marchepied d’un seul ! […] Je lis les noms des généraux.

142. (1893) Les œuvres et les hommes. Littérature épistolaire. XIII « Alexandre de Humboldt »

En réalité, je n’affirmerais pas qu’il le fût avec la sécurité que j’ai, par exemple, quand j’affirme que Bonaparte est le premier, lui, dans l’ordre politique et militaire, et Byron dans l’ordre poétique ; mais il ne s’agit pas ici de réalité, il s’agit de l’opinion et de l’empire qu’un nom a sur elle. […] » Ce nom, d’une sonorité d’or, et que la Gloire avait encore cette raison d’harmonie pour aimer, portait peut-être dans plus d’esprits à la fois que ceux de Cuvier, de Geoffroy Saint-Hilaire et d’Ampère, et si on y réfléchit, on le conçoit. […] Telle est la raison, qui n’est pas la seule, du reste, mais qui est certainement la plus honorable pour Alexandre de Humboldt, de la popularité actuelle de son nom et de l’apparente injustice de la gloire pour des noms aussi méritants que le sien, s’ils ne le sont pas davantage. […] Lorsque les savants, qui seuls parlent d’eux avec compétence, auront assez répété à la masse ignorante et superficielle ce que furent Geoffroy Saint-Hilaire, Ampère et Cuvier, ce triumvirat de génie, ces grands hommes, trop enterrés dans leur science même et la technicité de leur langage, ne seront plus cachés par l’éclat de personne et auront sur leur nom autant de rayons qu’on leur en doit. […] Tout cela a été pour beaucoup dans la gloire empressée et généreuse qu’on ne lui a pas mesurée, dans cette corne d’abondance qu’on a renversée sur son nom.

143. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « XXIV. Alexandre de Humboldt »

En réalité, je n’affirmerais pas qu’il le fût avec la sécurité que j’ai, par exemple, quand j’affirme que Bonaparte est le premier, lui, dans l’ordre politique et militaire, et Byron dans l’ordre poétique, mais il ne s’agit pas ici de réalité, il s’agit de l’opinion et de l’empire qu’un nom a sur elle. […] » Ce nom, d’une sonorité d’or, et que la Gloire avait encore cette raison d’harmonie pour aimer, portait peut-être dans plus d’esprits à la fois que ceux de Cuvier, de Geoffroy Saint-Hilaire et d’Ampère, et si on y réfléchit, on le conçoit. […] Telle est la raison, qui n’est pas la seule, du reste, mais qui est certainement la plus honorable pour Alexandre de Humboldt, de la popularité actuelle de son nom et de l’apparente injustice de la gloire pour des noms aussi méritants que le sien, s’ils ne le sont pas davantage. […] Lorsque les savants qui seuls parlent d’eux avec compétence auront assez répété à la masse ignorante et superficielle ce que furent Geoffroy Saint-Hilaire, Ampère et Cuvier, ce triumvirat de génie, ces grands hommes, trop enterrés dans leur science même et la technicité de leur langage, ne seront plus cachés par l’éclat de personne et auront sur leur nom autant de rayons qu’on leur en doit. […] Tout cela a été pour beaucoup dans la gloire empressée et généreuse qu’on ne lui a pas mesurée, dans cette corne d’abondance qu’on a renversée sur son nom.

144. (1887) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (deuxième série). IX « Raymond Brucker. Les Docteurs du jour devant la Famille » pp. 149-165

Et, de fait, de ceux-là même parmi les hommes qui l’ont connu et apprécie, combien maintenant y en a-t-il que le silence qui s’étend sur son nom désespère ? […] Balzac lui-même, le plus grand et le meilleur de tous, qui amis tout le monde de son temps dans l’immense cercle de sa Comédie humaine soit dans les romans, sous des noms supposés, soit sous les vrais noms, dans ses préfaces, n’a pas, que je me rappelle, écrit une seule fois le nom de Brucker. […] moi, d’abord, — le premier en date 2, dans mon livre : Les Œuvres et les Hommes, et, depuis ce livre, partout, toutes les fois que j’ai trouvé l’occasion d’y écrire ce nom de Brucker. […] Il masquait son nom et sa personne avec des chefs-d’œuvre qu’il ne signait pas, et l’Angleterre se mourait de curiosité, de cette curiosité plus piquante et plus enivrante pour l’âme choisie qui l’inspire, que la gloire elle-même et ses bruyantes admirations ! […] L’esprit de Brucker était plus vivant que le livre le plus vivant, Seulement, quels que soient ses livres, qui certainement ne donnent pas la valeur intégrale de l’homme, il y a dans tous — comme dans ces Docteurs du jour qu’on a republiés — des beautés de points de vue, d’idées et d’éloquence qui devraient le défendre contre l’indifférence méprisante de la génération présente, dépravée par l’éducation des œuvres busses, et le tirer de cette insolente obscurité qu’on a fait tomber et qui s’épaissit sur son nom !

145. (1904) Les œuvres et les hommes. Romanciers d’hier et d’avant-hier. XIX « Xavier Aubryet et Albéric Second » pp. 255-270

Le titre de son livre n’est qu’un nom. Il est vrai qu’un nom devient quelquefois une grande chose sous des mains créatrices. Clarisse, La Cousine Bette, sont des noms qui expriment maintenant des familles de femmes et des types, et toujours on dira une Clarisse et une Cousine Bette, de toutes celles qui rappelleront l’héroïne de Balzac ou l’héroïne de Richardson. […] C’est un crime bas, en effet, comme on n’en commet qu’à Paris, que l’inscription sur tous les murs, pour la déshonorer, du nom de la comtesse Alice et de celui de son amant entrelacés et accompagnés de cœurs percés de flèches. […] — les parisiens littéraires, pour défendre leur manie parisienne, invoqueront beaucoup d’exemples et se couvriront de ce grand nom qui vaut tous les noms : du nom de Balzac.

146. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Première partie. — Chapitre IV. »

Ne soyez donc pas étonné que, dans les hymnes placés sous le nom d’Homère et, ce semble, d’une langue contemporaine ou rapprochée de celle de ses deux grands poëmes, le mètre appliqué au mouvement lyrique demeure uniforme et simple : c’est la simplicité même du culte se communiquant à l’art. […] Soit que cette poésie des hymnes homériques célèbre les grands spectacles de la nature, soit qu’elle rappelle les traditions du culte mythologique, jamais rien de subtil, comme dans les hymnes savants de Proclus, ou dans les réminiscences tardives placées sous le nom d’Orphée. […] Parmi ceux qui étendirent ainsi la poésie grecque, après Homère et avant les tragiques, il n’est pas de nom plus célèbre qu’Archiloque. […] » Par là sans doute, et par cette complaisance du peuple artiste de la Grèce pour le génie qui le charmait, Archiloque, malgré la licence de sa vie et de ses vers, eut un nom honoré des hommes et des dieux, selon le langage païen. […] L’anniversaire de sa naissance resta longtemps célébré dans toute la Grèce, comme celui de la naissance d’Homère ; et la critique souvent réunit ces deux noms : c’est que le génie des écrivains, et non le genre des ouvrages, prévaut dans la postérité.

147. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Troisième partie — Section 9, de la difference qui étoit entre la déclamation des tragedies et la déclamation des comedies. Des compositeurs de déclamation, reflexions concernant l’art de l’écrire en notes » pp. 136-153

Dans les titres qui sont à la tête des comedies de Terence, on voit avec le nom de l’auteur du poëme et le nom du chef de la troupe de comediens qui les avoit representées, le nom de celui qui en avoit fait la déclamation, en latin : qui fecerat modos. j’ai deja prevenu le lecteur sur l’usage qu’on faisoit ordinairement de ce terme. C’étoit la coûtume, suivant Donat, que celui qui avoit composé la déclamation d’une piece mit son nom à la tête avec le nom du poëte qui l’avoit écrite, et le nom du principal acteur qui l’avoit jouée.

148. (1892) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Cinquième série « Choses d’autrefois »

Elles ont, par un soupirail, des conversations avec un marmiton d’un hôtel voisin, qui leur joue de la flûte et qui les appelle par leurs noms : « Hé ! […] Ces pensionnaires de la noble abbaye ont des noms illustres, toutes les jouissances de la richesse et de l’orgueil — et notamment le plaisir de se croire pétries d’une autre argile que les « Petites Cordelières », les pensionnaires du couvent bourgeois d’à côté. […] Elles sont les victimes superbes de leur nom. […] Il y a par malheur d’autres sacrifiées : celles qui prennent le voile pour conserver à l’aîné de quoi soutenir l’honneur du nom. […] La noblesse est si bien réduite à n’être qu’un nom et qu’un souvenir, que les derniers représentants de ce néant ne peuvent même plus faire élever leurs filles en filles nobles.

149. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Première partie — Section 46, quelques refléxions sur la musique des italiens, que les italiens n’ont cultivé cet art qu’après les françois et les flamands » pp. 464-478

Ce poëte le cite donc sous le nom d’Orlando Lasso, et il nous dit qu’il fut un des premiers réparateurs de la musique. Mais cet Orlando Lasso, quoiqu’on le trouve dans quelques auteurs mal informez avec ses deux noms terminez à l’italienne, n’en étoit pas plus italien que le Ferdinando Ferdinandi de Scarron, et qui étoit natif de Caën en France. […] Quelqu’un prévenu que tout bon musicien devoit être italien, aura donné à ces deux noms la terminaison italienne, en les traduisant en françois. Roland Lassé étoit françois, ainsi que la plûpart des musiciens citez par Guichardin, à prendre le nom de françois dans sa signification la plus naturelle, qui est de signifier tous les peuples dont la langue maternelle est le françois, sous quelque domination qu’ils soient nez. […] Jamais Iphigenie en Aulide immolée n’a coûté tant de pleurs à la Grece assemblée, que dans l’heureux spectacle à nos yeux étalé, en a fait sous son nom verser la chanmeslé.

150. (1883) Essais sur la littérature anglaise pp. 1-364

Il n’y a de changé que les noms. […] Ces trois noms sont ceux de John Dryden, d’Addison et de Pope. […] Techener, dont le nom dispense de tout éloge. […] nom du diable ! […] — Quel est votre nom ?

151. (1827) Principes de la philosophie de l’histoire (trad. Michelet) « Principes de la philosophie de l’histoire — Livre cinquième. Retour des mêmes révolutions lorsque les sociétés détruites se relèvent de leurs ruines — Chapitre I. Objet de ce livre. — Retour de l’âge divin » pp. 357-361

Dans ce conseil éternel, il ramena les mœurs du premier âge qui méritèrent mieux alors le nom de divines. […] Certaines espèces de jugements divins reparurent sous le nom de purgations canoniques ; les duels furent une espèce de ces jugements, quoique non autorisés par les canons. […] Les anciens héros avaient tenu à honneur d’être appelés brigands ; le nom de corsale fut un titre de seigneurie. […] Aussi dans l’Allemagne, pays qui fut au moyen âge le plus barbare de toute l’Europe, il est resté, pour ainsi dire, plus de souverains ecclésiastiques que de séculiers. — De là le nombre prodigieux de cités et de forteresses qui portent des noms de saints. — Dans des lieux difficiles ou écartés, l’on ouvrait de petites chapelles où se célébrait la messe, et s’accomplissaient les autres devoirs de la religion.

152. (1854) Nouveaux portraits littéraires. Tome I pp. 1-402

Il y a trente-cinq ans que le nom de Béranger fut révélé à la France pour la première fois, et depuis trente-cinq ans ce nom a grandi de jour en jour ; c’est aujourd’hui le nom le plus populaire de la littérature contemporaine. […] Certes, il n’y a rien dans une pareille requête qui mérite le nom de témérité. […] Le nom même qu’ils portent indique le don précieux qu’ils possèdent. […] Hugo ne nous dit pas le nom, et la place sur un banc du parc royal. […] Hugo ne craint pas d’appeler du nom de poème dramatique.

153. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « George Sand — George Sand, Indiana (1832) »

Indiana n’est pas seulement un livre de vogue ; son succès n’est pas en grande partie dû à une surprise longtemps ménagée, à une complaisante duperie du public, à l’appât d’un nom gonflé de faveur, aux amorces habiles d’un titre bizarre ou mystérieux, promené, six mois à l’avance, de l’élégant catalogue en vélin aux couvertures beurre frais des nouveaux chefs-d’œuvre : la veille du jour où Indiana a paru, personne ne s’en inquiétait par le monde ; d’insinuantes annonces n’avaient pas encore prévenu les amateurs de se hâter pour avoir, les premiers, un jugement à mettre en circulation ; la seconde édition n’était probablement pas toute satinée et brochée avant la première ; bref, Indiana a fait son premier pas naïvement, simplement, sous un nom d’auteur peu connu jusqu’ici et suspect même d’en cacher un autre moins connu encore. […] Comme l’auteur de Delphine, l’auteur d’Indiana, assure-t-on, est une femme : ainsi le nom qui se trouve au titre du livre n’y serait que comme le nom de Segrais en tête des romans de Mme de La Fayette, comme le nom de Pont-de-Vesle en tête de ceux de Mme de Tencin. […] Dans le monde, le visage de ces hommes se compose et sourit invariablement par habitude, par artifice : dans la solitude, dans les moments de réflexion, en robe de chambre et en pantoufles, surprenez-les, ils sont sourcilleux, sombres ; ils se font, à la longue, un visage dur, mécontent et mauvais. — J’aurais autant aimé, de plus, qu’en accordant à Raymon de Ramière de grands talents et un rôle politique remarquable, on insistât moins sur son génie et sur l’influence de ses brochures : car, en vérité, comme les hommes de génie ou de talent qui écrivent des brochures en France, qui en écrivaient vers le temps du ministère Martignac ou peu auparavant, dans le cercle sacré de la monarchie selon la Charte, ne sont pas innombrables, je n’en puis voir qu’un seul à qui cette partie du signalement de Raymon convienne à merveille ; le nom de l’honorable écrivain connu vient donc inévitablement à l’esprit, et cette confrontation passagère, qui lui fait injure, ne fait pas moins tort à Raymon : il ne faut jamais supposer aux simples personnages de roman une part d’existence trop publique qui prête flanc à la notoriété et qu’il soit aisé de contrôler au grand jour et de démentir.

154. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre V. Des Grecs, et de leurs éloges funèbres en l’honneur des guerriers morts dans les combats. »

Là, sont gravés les noms de tous ceux qui ont vaincu et péri dans cette journée. […] lis tous ces noms, honore-les, et adore la patrie qui récompense ainsi le courage. » — Arrivés aux Thermopyles, ils se prosternent sur le lieu où trois cents hommes se sont dévoués contre trois cent mille. […] Son nom rappelle encore aujourd’hui de grandes idées, les idées de patrie, de courage et d’éloquence. […] Il prit en eux le courage d’un moment pour de la vertu ; et les précipitant dans une guerre au-dessus de leurs forces, il détruisit le dernier rempart d’Athènes, le respect qu’inspirait un grand nom. […] On ne peut faire un pas dans la Grèce sans trouver de grands noms.

155. (1753) Essai sur la société des gens de lettres et des grands

La postérité eut ignoré jusqu’aux noms de Bavius et de Mævius, si Virgile n’avait eu la faiblesse d’en faire mention dans un de ses vers. […] C’est à ce métier que tant d’écrivains se font une espèce de nom. […] Que le favori d’Auguste serait surpris de voir son nom si souvent profané, et le ton rampant que les gens de lettres prennent avec ceux qui le portent ? […] C’est en faisant un long et heureux usage de cet esprit si commun, que des hommes sans mérite et sans nom peuvent arriver à la plus grande fortune et aux plus brillants emplois. […] Lomellini, mettaient le nom de leurs amis à la tête de leurs ouvrages, parce qu’un ami leur était plus cher qu’un protecteur.

156. (1827) Principes de la philosophie de l’histoire (trad. Michelet) « Discours sur le système et la vie de Vico » pp. -

Voilà pourquoi le nom de Vico est encore si peu connu en-deçà des Alpes. […] L’intelligence de cette langue devint une science, sous les noms de divination, théologie mystique, mythologie, muse. […] La langue héroïque employa pour noms communs des noms propres ou des noms de peuples. […] Les héros s’honoraient du nom de brigands (Voy. […] Pourquoi tant de lieux escarpés ou retirés portent-ils des noms de saints ?

157. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — F. — article » p. 332

On eût pu d’abord être tenté de croire que ce nom, placé à la tête de la premiere Edition de l’Histoire du Siecle de Louis XIV, étoit un de ces noms de guerre dont M. de Voltaire avoit coutume de parer le frontispice de ses Ouvrages ; mais il est très-assuré qu’il est celui d’un Auteur existant. […] Si cet Auteur est mort pour son compte, il vivra du moins à la faveur d’une Production étrangere, & son nom pourra figurer parmi ceux des Editeurs faciles & indulgens à l’égard des Ouvrages qu’ils donnent au Public.

158. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « M. de Stendhal. Ses Œuvres complètes. — I. » pp. 301-321

Dix ans à peine écoulés, voilà toute une génération nouvelle qui se met à s’éprendre de ses œuvres, à le rechercher, à l’étudier en tous sens presque comme un ancien, presque comme un classique ; c’est autour de lui et de son nom comme une renaissance. […] Il existe de cette dédicace deux versions, l’une où se trouve le nom de l’exilé de Sainte-Hélène, l’autre, plus énigmatique et plus obscure, sans le nom ; dans les deux, Napoléon y est traité en monarque toujours présent, et Beyle, en rattachant « au plus grand des souverains existants » (comme il le désigne) la chaîne de ses idées, prouvait que dans l’ordre littéraire et des arts, c’était une marche en avant, non une réaction contre l’Empire, qu’il prétendait tenter. […] Aux sédentaires comme moi (et il y en avait beaucoup alors), il a fait connaître bien des noms, bien des particularités étrangères ; il a donné des désirs de voir et de savoir, et a piqué la curiosité par ses demi-mots. […] Il est probable que Beyle y aura songé en prenant le nom sous lequel il devint un guide de l’art en Italie. […] La Vie de Mozart est réellement tirée d’un ouvrage de Schlichtegroll, auteur très connu en Allemagne, et qu’on a eu le tort, en France, de prendre pour un nom supposé.

159. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « La comtesse de Boufflers. »

Il y eut, en effet, trois femmes du nom de Boufflers fort célèbres et très à la mode dans le grand monde et dans le même temps : la duchesse de Boufflers, celle dont je parlais récemment et qui échangea plus tard son nom contre celui de maréchale-duchesse de Luxembourg. […] Elle est, à propos de cette révérence d’étiquette, qualifiée de marquise dans le Journal du duc de Luynes, et, en effet, elle aurait eu droit dès lors à ce titre autant qu’à celui de comtesse, qu’elle ne garda peut-être que pour éviter une confusion avec l’autre marquise du même nom, et aussi pour ne rien devoir de plus à son mari. […] Cet avant-dernier du nom se montrait bien en tout le digne héritier de sa race. […] Il lui manque un titre, un état régulier, un nom ; mais ce nom de moins, et qu’elle avait ambitionné, était pour elle une blessure secrète, une épine au cœur. […] Elle pouvait toujours se dire cependant, pour s’excuser à ses propres yeux, que si le prince de Conti était veuf, était libre, elle, elle ne l’était pas, et que, si elle l’avait été, leur liaison aurait pris bientôt un autre tour et un nom plus respectable.

160. (1896) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Sixième série « Guy de Maupassant »

Il est extraordinaire qu’on ne soit pas plus gai sur un yacht qui porte le joyeux nom de Bel-Ami ; et M. de Maupassant, schopenhauérisant sur son bateau, « nous en monte un » dirait quelque mauvais plaisant. […] Que tel assemblage de drames porte le nom de Shakspeare et que tel entassement de vers lyriques porte celui de Victor Hugo, qu’importe ? Que leurs œuvres restent étiquetées, par le hasard, de ces syllabes-là plutôt que de celles qui forment les noms de Dupont ou de Durand, qu’est-ce que cela peut faire à ceux qui furent Hugo ou Shakspeare ? Songez qu’Homère n’est peut-être pas le nom de l’auteur de l’Iliade, et dès lors qu’est-ce que la gloire du chantre d’Achille ? […] Et, pareillement, personne ne fut plus vite déclaré classique que cet écrivain dont les contes les plus illustres se passaient dans les couvents de La Fontaine rebaptisés de leur vrai nom.

161. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Mézeray. — I. » pp. 195-212

Né en 1610 au village et à la ferme d’Houay près d’Argentan en Basse-Normandie, il se nommait Eudes de son nom, et appartenait à une famille et à une race originale. […] Mézeray était le second de trois fils ; son plus jeune frère, appelé d’Houay, de la ferme de ce nom, devint habile chirurgien et accoucheur à Argentan ; il y fut nommé échevin et y soutint en cette qualité la prérogative municipale. […] On a voulu voir dans cette libéralité du puissant ministre envers le futur historien une bonne grâce intéressée, une sorte de carte de visite par laquelle il lui recommandait son nom auprès de la postérité et de l’avenir. […] Les siècles passés donnèrent le nom de Sage au roi Charles cinquième pour ce qu’il combattait heureusement les Anglais dans son cabinet : de quel titre donc devons-nous vous honorer, vous qui avez si généreusement vaincu l’Espagnol dans votre lit ? […] Le  Mézeray était le nom qu’il avait adopté dans sa forme première.

162. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Œuvres de Voiture. Lettres et poésies, nouvelle édition revue, augmentée et annotée par M. Ubicini. 2 vol. in-18 (Paris, Charpentier). » pp. 192-209

Une autre fois, jouant sur le nom de lionne qu’on donnait à Mlle Paulet à cause de la couleur de ses cheveux, il écrivait de Ceuta en Afrique (où réellement il était alors), et signait « Léonard, gouverneur des lions du roi de Maroc ». […] Quoiqu’il en soit, il a eu un singulier bonheur, puisqu’en ne songeant qu’à vivre dans le présent il a su enchâsser son nom dans un moment brillant de la société française et dans cette guirlande des noms de Mme de Longueville, de Mme de Rambouillet et de Mme de Sablé, et que par cette lettre sur Corbie il a scellé une de ses pages dans le marbre même de la statue du grand Armand. […] Essayons un peu de quelques-uns de ces divers noms comme de pierres de touche pour éprouver ses qualités et pour achever de nous le définir. […] il faut courir vite sur ce nom quand on parle de Voiture, de peur d’être trop sévère à celui-ci. […] Il devance donc à quelques égards Voltaire, et leurs noms se peuvent rapprocher ; mais ce n’est qu’en un ou deux points qu’est leur rencontre.

163. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Lettres inédites de Jean Racine et de Louis Racine, (précédées de Notices) » pp. 56-75

Ce sont les derniers papiers de famille provenant des deux poètes du nom de Racine, que l’abbé de La Roque, homme instruit et capable de les bien encadrer, publie aujourd’hui. […] Ce n’était pas du tout logique à Racine de garder le cygne et de supprimer le rat puisque, les armes étant parlantes, le cygne, qui figurait la seconde moitié de son nom, ne venait là qu’à la condition que le rat y représentât la première. […] Ce rat qu’Hamlet, dans sa folie feinte, poursuivait derrière la tapisserie, et au nom duquel, espérant atteindre le roi, il perçait Polonius, Racine au fond n’en voulait pas, et vous n’en trouvez aucune trace dans son œuvre. […] Racine, dernier du nom, fils du grand Racine, de l’Académie des Inscriptions et Belles-Lettres, est mort hier d’une fièvre maligne. […] À rester distingué sans doute, mais immobile, mais borné, fermé et tout à fait étranger à la vraie activité intellectuelle toujours renaissante, — à avoir divinisé sa paresse sous le nom de goût.

164. (1868) Les philosophes classiques du XIXe siècle en France « Chapitre XIII : De la méthode »

J’étais comme un voyageur placé sur le haut d’une montagne ; de loin il voit une tache grise et dit : « C’est Paris » ; le nom correspond à un fait ; mais le fait traduit le nom incomplètement. […] Vous étiez dans une grande bibliothèque, sachant le nom de Virgile. Au premier moment, ce nom ne désignait pour vous aucun livre. Au second moment, vous l’avez aperçu sur la couverture d’un volume, et vous avez représenté parce nom le volume. À présent, vous avez ouvert le livre, et vous représentez par ce nom les cinquante pages que vous avez lues.

165. (1859) Cours familier de littérature. VIII « XLVIIe entretien. Littérature latine. Horace (1re partie) » pp. 337-410

On présume que ce second nom d’Horatius était le nom de la famille romaine dont le Samnite Flaccus avait été autrefois l’esclave. […] Le fils de Cicéron, à son école, était devenu un ivrogne qui ne dut plus tard la faveur d’Auguste qu’à son nom. […] C’est précisément parce qu’elle succombe que la vertu n’est pas un nom, mais la plus sainte des choses humaines. […] On lui livrait ces noms obscurs, à la condition sans doute de ne pas toucher aux grands noms du parti d’Octave. […] Ses odes sont pleines de leurs noms ; ses passions ou ses dégoûts, légers comme lui, leur donnaient tour à tour la vogue de son attachement ou l’infamie de ses injures.

166. (1857) Cours familier de littérature. III « XIVe entretien. Racine. — Athalie (suite) » pp. 81-159

Quels applaudissements au milieu desquels Talma s’avançait et proclamait mon nom ! […] Voulez-vous bien me dire votre nom ?  […] Je lui dis mon nom. « Entrez, Monsieur », me dit-elle. […] Athalie, sa mère et sa tutrice, régnait sous son nom. […] J’ai nom Éliacin.

167. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — L — article » p. 163

Les meilleurs Ouvrages qui ont paru sous son nom, seroient précisément ceux qui ne lui appartiendroient pas, à en croire des personnes qui l’ont beaucoup fréquentée. Ainsi, en rendant à l’Abbé Chiron (plus connu sous le nom de Boismorand) les Anecdotes de la Cour de Philippe-Auguste, qu’on lui attribue ; à M. […] Mais il vaut mieux croire, par indulgence pour le Sexe, que cette Demoiselle n’a fait qu’emprunter leur secours, semblable en cela à bien des femmes qui ont voulu se donner un nom dans le Monde littéraire.

168. (1836) Portraits littéraires. Tome II pp. 1-523

Il suffit de prononcer leur nom pour amener le sourire sur les lèvres. […] Elle courtise tour à tour tous les noms que lui désigne le caprice populaire. […] Mais pourquoi ces noms italiens ? […] Casimir Delavigne a baptisé de noms harmonieux les personnages de sa pièce ? […] Pour lui, une tête sur l’échafaud c’était un nom effacé de la liste.

169. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Appendice » pp. 453-463

Sainte-Beuve, de l’Académie française, a lu le rapport, que nous reproduisons plus bas, sur les résultats de ce concours, et a proclamé les noms des lauréats. […] Je dis les poètes, car la pièce s’offre à nous signée par les deux noms unis et fraternels de MM.  […] Le billet décacheté a donné le nom de M. le comte de Légurat. Serait-ce être indiscret de chercher encore sous ce nom et d’y entrevoir un gracieux talent de femme ? […] [NdA] La somme de 20000 francs affectée à ces prix avait été mise à la disposition de la Société par le docteur Véron qui avait tenu à garder l’anonyme, mais dont le nom n’était un secret pour personne.

170. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « GLANES, PÖESIES PAR MADEMOISELLE LOUISE BERTIN. » pp. 307-327

Le titre modeste les a réunies sous le nom de Glanes (j’aimerais mieux Glanures) : c’est dire que la moisson est faite ; mais beaucoup de ces épis, tant ils sont mûrs, auraient pu être des premiers moissonnés. […] Des désirs muselés appartiennent un peu trop à cette langue qui force les choses et les noms, qui dit un cœur fêlé au lieu d’un cœur brisé. […] Dès 1819, l’école nouvelle en poésie éclôt et s’essaye ; de grands noms se dessinent déjà. […] Mais la comédie du temps, chacun le dira, s’il fallait la personnifier dans un auteur, ne se trouverait point porter un nom sorti des rangs nouveaux. […] Paul Ackermann, qui est très-français malgré la tournure germanique de son nom, et qui, à cette distance, s’occupe à fond de l’école et de la question poétique moderne, comme pourrait faire sur une phase accomplie un érudit systématique et ingénieux.

171. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Troisième partie — Section 16, des pantomimes ou des acteurs qui joüoient sans parler » pp. 265-295

Le nom de pantomime, qui signifie imitateur de tout, étoit donné à cette espece de comédiens, apparemment parce qu’ils imitoient et parce qu’ils expliquoient toutes sortes de sujets avec leur geste. […] Il veut ensuite qu’on enseigne à cet acteur la musique, l’histoire, et je ne sçais combien d’autres choses capables de faire mériter le nom d’homme de lettres à celui qui les auroit apprises. […] Les deux premiers instituteurs du nouvel art furent donc Pylade et Batylle, qui ont rendu leurs noms aussi célebres dans l’histoire romaine, que le peut être dans l’histoire moderne le nom du fondateur de quelque établissement que ce soit. […] Seneque, le précepteur de Neron, après s’être plaint que plusieurs de ces écoles qui portoient le nom du philosophe dont on y enseignoit le systême, se fussent anéanties, et que le nom de leur instituteur fut oublié, ajoute. […] Mais on peut faire voir qu’il n’y eut alors que les pantomimes de chassez, et que Tacite par une négligence excusable en un pareil sujet a mis le nom du genre pour le nom d’une de ses especes.

172. (1868) Cours familier de littérature. XXVI « CLIVe entretien. Madame de Staël. Suite »

Tout semblait conspirer alors au triomphe de sa politique, à la gloire de son nom, à la félicité de sa vie. […] Il promettait à madame de Staël un nom dignement continué dans l’avenir. […] Madame de Staël avait donné sa main, mais sans perdre le nom sous lequel elle avait illustré son génie. Semblable à Mirabeau, elle n’avait pas voulu, en changeant de nom, désorienter la gloire. […] Rougir du nom, c’est rougir d’une partie de l’homme qu’on adore ; quand une femme se donne, elle doit donner, sans retenue, ce qui est mille fois moins que son cœur, son nom et sa célébrité.

173. (1909) Les œuvres et les hommes. Philosophes et écrivains religieux et politiques. XXV « L’abbé Cadoret »

Comme on s’obstina bien longtemps dans la comparaison fatale entre la Restauration des Bourbons et la Restauration des Stuarts, et, plus tard, comme on voulut voir de mystérieuses identités entre la Révolution de 1830 et la Révolution de 1688, de même aujourd’hui la fin d’une République, l’ascendant dynastique d’un homme qui semble avoir absorbé si profondément dans sa gloire le nom de César que, quand on le prononce, c’est à Napoléon qu’on pense, aux qualités impériales retrouvées dans le neveu du César moderne de manière à rappeler involontairement le neveu du César ancien, toutes ces diverses circonstances ont introduit dans les esprits la préoccupation de la grande époque romaine et fait regarder beaucoup la nôtre à travers… Le titre du livre de l’abbé Cadoret semble tout d’abord rappeler cette préoccupation contemporaine. […] Pour l’abbé Cadoret, César, c’est le nom donné par Jésus-Christ et par l’Église au pouvoir temporel, sous cette grande forme monarchique qui lui est propre, toute autre forme politique n’étant jamais qu’une dégradation ou un affaiblissement du pouvoir ; et c’est ce pouvoir temporel, dans sa généralité la plus haute et quels que soient ses instruments ou ses manifestations sur la terre, que Cadoret s’est donné la mission de défendre contre ses plus dangereux ennemis. […] Un homme que l’histoire nommera d’un nom que nous épargnerons à sa vieillesse, Lamennais, fut le premier de notre temps qui reprit, dans les Paroles d’un croyant, bien plus avec l’éclat de sa renommée qu’avec l’éclat d’un talent qui pâlissait et qui allait mourir, cette idée révolutionnaire et menteuse de l’hostilité de la religion et du pouvoir. […] La première, intitulée Argument de l’autorité, renferme l’enseignement des Pères depuis Tertullien jusqu’à Saint-Thomas, et la seconde, qui porte le nom de Raison théologique, est l’examen rapide, mais concluant, des opinions qu’on atirées des livres saints contre le pouvoir temporel des rois.

174. (1862) Cours familier de littérature. XIII « LXXIIIe entretien. Critique de l’Histoire des Girondins (4e partie) » pp. 1-63

Alors il peut reprendre la monarchie et lui dire de nouveau : “Règne au nom des idées que je t’ai faites ! […] Est-ce démoraliser le peuple que lui peindre ainsi ses victimes, et que lui arracher des larmes sur les victoires mêmes que ses tribuns remportent en son nom ? […] M. de Malesherbes mourut pour crime de dévouement, M. de  Sèze en reçut la récompense dans l’éternel honneur de son nom. […] Le vice et la vertu changent-ils de nom en changeant de parti ? […] Cette réparation n’est qu’un devoir envers les intéressants héritiers du nom et de la fidélité de Cléry.

175. (1862) Cours familier de littérature. XIII « LXXIVe entretien. Critique de l’Histoire des Girondins (5e partie) » pp. 65-128

Jésus-Christ, répétait-il souvent en s’inclinant avec respect à ce nom, Jésus-Christ est notre maître à tous ! […] Je me dois à moi-même de ne pas laisser à la jeunesse qui nous suit la faible autorité de mon nom sur ces axiomes, dont l’adoption trompe et ruine le peuple. […] Il appela de son nom tous les scandales et toutes les trahisons des cours. […] Mais la haine avait assez de vérités cruelles à verser sur son nom pour s’épargner les calomnies et les rumeurs. […] Il n’y trouva que les ombrages et les injures des chefs populaires, qui ne lui pardonnaient pas son nom.

176. (1856) Cours familier de littérature. I « Digression » pp. 98-160

malgré cette médiocrité d’existence de ces deux femmes, les plus beaux noms de France et d’Europe se pressaient dans cet entresol. […] Beaucoup de ces pages pourraient être signées par les premiers noms de la poésie française. […] Les noms s’y pulvérisent dans le choc des idées ou des systèmes. […] Ceux qui ne la connaissaient que de nom la pleurèrent ; ceux qui l’aimaient ne se consoleront jamais. […] Son nom se confondait avec le nom d’un homme d’idées éminent, souvent bienveillant pour moi, quelquefois hostile à mes amis.

177. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « VIII. Du mysticisme et de Saint-Martin »

Caro a publié sur Saint-Martin, et qu’à la première page nous avons trouvé, à côté du nom de l’auteur, le titre toujours suspect jusqu’à l’inventaire des doctrines de celui qui le porte, « de professeur de philosophie », quand, à la seconde page, nous avons lu une dédicace à MM.  […] Un tel fait, de quelque nom qu’on l’appelle, de quelque explication qu’on l’étaie, méritait d’avoir une plus large place que celle qui lui est accordée dans un livre ayant pour but de descendre au fond de la question du Mysticisme. […] De son vivant, il aimait à s’appeler le Philosophe inconnu, et il a bien manqué de sombrer sous ce nom-là dans la mémoire des hommes, puni justement d’ailleurs, par l’obscurité, de tous ces petits mystères de secte dans lesquels il avait comme entortillé sa pensée. […] On ne le nommait pas partout par son vrai nom ; mais partout, du moins, il se sentait, et les esprits les plus matériels, les plus attachés aux angles des choses positives, portaient ses invisibles influences, comme on porte une température. […] Son nom même, il ne le donna point à la secte qu’il allait créer.

178. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « George Farcy »

Tout ce qui avait déjà un nom s’y est rallié un peu tard ; tout ce qui n’avait pas encore de nom a dû s’en retirer trop tôt. […] Le nom de Farcy est peut-être le seul qui frappe et arrête, et encore combien ce nom sonnait peu haut dans la renommée ! comme il disparaissait timidement dans le bruit et l’éclat de tant de noms contemporains ! […] Le respect nous empêche de la nommer ; mais Béranger l’a chantée, et tous ses amis la reconnaîtront ici sous le nom d’Hortense. […] Que la patrie conserve son nom !

179. (1860) Cours familier de littérature. X « LVIIIe entretien » pp. 223-287

Je n’y avais pas mis mon nom. Avant de l’inscrire, ce nom, il fallait le faire : il n’était pas fait. […] J’ai su le nom de la femme que lui rappelait le crucifix et le chapelet de noyaux d’olives : je ne le dirai pas. […] Je me confiai donc à la fortune ; elle s’appelait pour moi du nom du prince de Talleyrand. […] Le monde l’appelait miss Blake ; je ne sais quel nom lui donnera la poésie, mais elle en aura un.

180. (1861) Cours familier de littérature. XII « LXXIe entretien. Critique de l’Histoire des Girondins (2e partie) » pp. 305-367

Robespierre, qui a eu le fatal honneur de donner son nom à cette sinistre époque, est choisi par ses complices pour couvrir de son nom les holocaustes et les responsabilités de tous. […] Il me répondit avec beaucoup de bonté qu’il était étonné que son nom, depuis si longtemps égaré et enseveli dans le coin de terre où il desservait une humble paroisse, fût parvenu jusqu’à moi ; que, son âge et ses infirmités l’empêchant de se déplacer lui-même, il me recevrait dans son pauvre presbytère et me dirait tout ce que sa mémoire lui rappelait de ces tragiques événements. […] Elle porte un nom respectable qui cache le nom trop mémorable de son premier mari. Elle fut retrouvée par moi ; elle consentit à déchirer en ma faveur le voile de veuve et le linceul de ses jeunes souvenirs ; elle m’envoya son fils d’un second lit, jeune homme d’un nom sans tache, d’un rang élevé, d’un cœur filial, d’une conversation aussi discrète qu’instructive. […] Il y avait échappé lui-même en changeant de nom.

181. (1824) Ébauches d’une poétique dramatique « Sotties. » p. 38

Les poètes de ce temps cachaient le plus souvent leur véritable nom, ou ne l’indiquaient que dans quelque endroit de leurs ouvrages, par des espèces d’acrostiches ; c’est-à-dire, par les lettres initiales d’un certain nombre de vers, lesquelles répondaient à celles dont était formé leur nom, ou un autre que souvent ils adoptaient et qui pouvait les faire connaître. […] Il est donc probable que, d’après le nom que cet auteur avait adopté, on a appliqué la dénomination de sottie aux pièces de théâtre que le ton satirique distinguait des autres, comme on appelle, dans la conversation ordinaire, des pasquinades les plaisanteries épigrammatiques et mordantes, semblables à celles qu’on affiche à Rome sur la statue de Pasquin.

182. (1872) Nouveaux lundis. Tome XIII « Appendice — Mémoires du comte d’Alton-Shée »

Bien des personnes qui n’ont connu son nom que par ce dernier conflit ont conçu l’idée la plus fausse de M. d’Alton-Shée, dont les origines sont en effet assez complexes et dont la formation intellectuelle n’est pas simple. […] Ceux qui ont calomnié M. d’Alton (et il en est qui ont un nom connu, honorable et presque illustre) auraient dû être condamnés pour toute peine à assister à cette conférence166. […] Boulogne-sur-Mer possède sa place d’Alton : elle est ainsi nommée depuis 1801, et les titres d’honneur qui se rattachent à ce nom n’ont certes point diminué depuis. […] C’est seulement dans l’autre partie, signée de son nom, publiée d’abord dans la Revue moderne avant d’être recueillie en volume, qu’il a mis ses opinions plus sérieuses sur les choses et sur les hommes politiques. […] C’est depuis cette époque que le nom de Dation s’est écrit d’Alton.

183. (1909) Les œuvres et les hommes. Critiques diverses. XXVI. « Quitard »

N’étaient-ce pas des esprits comme eux qui les avaient faits, dans un temps où l’imprimerie ne sauvait pas le nom de ceux qui pensaient, en écrivant ou sans écrire ? […] En ces proverbes, naïfs ou sublimes, brillants ou profonds, moqueurs ou tendres, ils reconnaissaient une pensée, parente de la leur mais moins heureuse, car elle était entrée sans signature dans la mémoire des hommes, et en y restant elle n’y laissait aucun nom ! […] Il y a parfois de grands noms qui se dressent tout à coup du pied d’une maxime, comme, par exemple, Salomon dans l’Ecclésiaste, et Pythagore dans les Vers dorés. […] c’est là un nom usurpé en tout temps, si ce n’est pas une ironie, mais ce l’est particulièrement quand les nations sont dans l’enfance, dans cet âge où pour l’homme lui-même, et le plus exceptionnel des hommes, hormis le petit Joas d’Athalie, la sagesse n’existe pas. […] Pour moi, ils sont les produits les plus authentiques et quelquefois les plus éclatants de l’originalité et de la supériorité humaines, — qu’elles aient gardé leurs noms propres ou les aient perdus dans les hasards bêtes de la gloire.

184. (1899) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (troisième série). XVII « L’abbé Brispot »

D’ailleurs, pour un chrétien et pour un prêtre, l’idée de l’éternité rabougrit singulièrement la gloire, et s’il écrit son nom sur son œuvre, c’est plus pour le signaler aux fraternités de la prière que pour le livrer à ces bouffées de vent léger qui lèvent de terre un nom et l’emportent dans la renommée. […] Si l’on nous demandait les noms de quelques-uns de ces grands hommes, nous répondrions avec saint Jean Chrysostôme parlant de ceux qui l’ont précédé, que c’est un Évode, la bonne odeur de l’Église, disciple et imitateur des Apôtres ; que c’est un saint Ignace, qui porte Dieu lui-même dans sa personne ; un saint Denis l’Aréopagite, qui poussait son essor jusque dans le ciel ; un saint Hippolyte-le-Grand, si plein de douceur et de bienveillance ; un saint Basile-le-Grand, presque égal aux apôtres ; un saint Athanase, si riche de vertus ; un saint Grégoire-le-Thaumaturge, soldat invincible de Jésus-Christ ; un autre du même nom et du même génie, un saint Éphrem, dont le cœur semblait être le temple particulier de l’Esprit-Saint ! » Et l’auteur de la Vie de Jésus-Christ ne s’est pas contenté de ces noms anciens et illustres, l’éternel honneur des premiers temps. […] Entre ces noms immenses, l’abbé Brispot a quelquefois glissé le sien.

185. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « M. VINET. » pp. 1-32

Benjamin Constant, le plus illustre nom d’écrivain qui s’y rattache, est un Français de Paris et sans réserve9. […] Ses livres ne sont pas connus chez nous ; son nom modeste l’est à peine. […] A part les fidèles du Semeur, quels lecteurs de journaux savent le nom et les titres de M. […] J’a cru un instant rencontrer une critique à faire à propos de Saint-Évremond, dont le nom venait un peu tard dans la série, après Rollin ; mais à peine avais-je achevé de lire la phrase, que l’adresse de l’auteur l’avait déjà fait rentrer dans le tissu et ma critique était déjouée. […] Elle devrait suffire à faire vivre le nom de Frédéric Monneron, à l’empêcher de tout à fait mourir.

186. (1870) De l’intelligence. Deuxième partie : Les diverses sortes de connaissances « Livre premier. Mécanisme général de la connaissance — Chapitre premier. De l’illusion » pp. 3-31

La vérité est qu’on a trouvé des noms, ce qui est peu de chose. […] J’aperçois vêtu d’une sorte d’uniforme un homme auquel j’adresse la parole en lui demandant son nom. […] Je m’éveille en sursaut avec le nom de G… dans la tête. […] Je l’ignorais, n’ayant aucun souvenir d’un pareil nom. […] Je lui demande si elle se rappelle un individu du nom de G…, et elle me répond aussitôt que c’était un garde du port de la Marne, quand mon père construisait son pont.

187. (1868) Cours familier de littérature. XXV « CXLIXe entretien. De la monarchie littéraire & artistique ou les Médicis (suite) »

La petitesse de sa taille et la gentillesse apparente de son humeur lui avaient valu ce nom familier. […] Cet homme, dont le nom vulgaire attestait la vileté de son métier, se nommait Scoroncocolo. […] Tout fut monarchie à Florence, excepté le nom. […] Le dernier grand-duc, chassé par les Piémontais, était un souverain digne du nom des Médicis. […] Si notre siècle en a produit un autre et un pareil, il peut hardiment, et par l’éclat et par la gloire du nom, lutter avec tout ce que l’antiquité nous a offert.

188. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Première partie. — Chapitre premier. »

Enfin, il oubliait que dans son siècle, même à l’époque du grand goût, Corneille, Bossuet, Pascal, et souvent même Boileau et la Bruyère, avaient à propos nommé les choses par leurs noms, et qu’ils avaient enchâssé les mots les plus simples dans des vers et des lignes énergiques ou sublimes. […] Mais les strophes mesquines et dures, que Lamotte adaptait à la lyre thébaine, en faisaient crier les cordes ; et, au lieu de le louer intrépidement, avec Voltaire, de faire de belles odes, on aurait dû lui dire avec le jeune officier, plus digne que lui de traduire Pindare et d’animer d’une grâce nouvelle les noms mythologiques : Quoi ! […] Le nom de Minyas lui inspirait une petite digression sur les Argonautes. […] Ainsi tous les hommes commencent par les mêmes infirmités : dans le progrès de leur âge, leurs années se poussent les unes les autres, comme les flots ; leur vie roule et descend sans cesse à la mort par sa pesanteur naturelle ; et enfin, après avoir fait comme des fleuves un peu plus de bruit, et traversé un peu plus de pays les uns que les autres, ils vont tous se confondre dans ce gouffre infini du néant, où on ne trouve plus ni rois, ni princes, ni capitaines, ni tous ces noms qui nous séparent les uns des autres, mais la corruption et les vers, la cendre et la pourriture qui nous égalent. » C’est ainsi, c’est avec un semblable regard mélancolique et vaste, que souvent, à l’occasion d’une prouesse vulgaire et d’un nom sans souvenir, le poëte thébain suscite une émotion profonde par quelque leçon sévère sur la faiblesse de l’homme et les jeux accablants du sort. […] C’est elle qui fait violence à la vérité, et sur des noms obscurs jette une gloire corrompue21. » Sa complaisance de cœur semble être pour l’île d’Égine, la conquête et l’auxiliaire d’Athènes, grande dans l’imagination poétique par le nom des Éacides, et mêlant, comme Athènes, la guerre, la marine et les arts.

189. (1869) Cours familier de littérature. XXVII « CLIXe Entretien. L’histoire, ou Hérodote »

Mon nom est Adraste. […] Ce roi eut une fille à laquelle il avait donné le nom de Mandane. […] Elles balbutiaient comme des oiseaux, et de là leur vint le nom de colombes. […] Ils lui donnèrent le nom d’Euristhène ; et à l’autre, qu’il regardaient comme le puîné, celui de Proclès. […] Léonidas et Thémistocle devinrent les deux noms de la Grèce.

190. (1866) Nouveaux lundis. Tome VI « Gavarni. »

J’ai parlé d’observation ; et qui donc, si l’on cherche parmi les noms d’auteurs ceux qui peuvent le plus prétendre en notre temps à ce genre de mérite, qui pourra-t-on citer de préférence à Gavarni ? […] Gavarni n’est qu’un nom de guerre ; il s’appelle de son nom de famille Chevallier (Sulpice-Guillaume), né à Paris, mais, du côté de son père, originaire de Bourgogne ; du village de Saint-Sulpice, aux environs de Joigny. […] Revenu à Paris, il continuait de faire des dessins de diverses sortes et des aquarelles, lorsqu’un jour Susse, qui lui en achetait une, exigea une signature : « Le public, disait l’éditeur, aime des œuvres qui soient signées. » Gavarni, mis en demeure d’écrire un nom, se souvint alors de la vallée de Gavarnie qu’il avait habitée et de la cascade qu’il aimait, et, sur le comptoir de Susse, il signa son dessin de ce nom d’affection qu’il mit seulement au masculin. […] La dignité des genres, comme la noblesse des conditions, n’existe que pour les contemporains, et la postérité ne retient jamais mieux un nom que quand il signifie, à lui seul, quelque chose d’à part et de neuf. Or, Gavarni est devenu le nom d’un genre ; il est arrivé, sans le chercher, à cette solution la plus essentielle dans la destinée de tout artiste et, je dirai, de tout homme, d’avoir fait ce que nul autre à sa place n’eût su faire.

191. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « M. CHARLES MAGNIN (Causeries et Méditations historiques et littéraires.) » pp. 387-414

» Et Racine, à qui tout son courage est revenu et qui va lire demain à la Comédie Britannicus, salue, en finissant, la Champmêlé du nom de Junie. […] Si je pouvais prendre des noms contemporains, l’éclaircissement me serait trop facile. […] Chaque œuvre, chaque écrivain, en définitive, lorsqu’on les a suffisamment approfondis et retournés, peuvent être qualifiés d’un nom ; il faut que ce nom essentiel échappe au critique, ou du moins que le lecteur arrive de lui-même à l’articuler. […] Ce n’est pas au nom de la gloire et de la renommée qu’il convient de s’adresser aux critiques, à ceux qui, vraiment dignes de ce nom, voient les choses littéraires avec sang-froid, étendue, et par tous les sens. […] Bayle est un trop grand nom et qu’on pourrait récuser comme exemple ; pour en prendre un qui n’ait rien d’éblouissant, Le Clerc vit plus que tous les Campistrons.

192. (1870) Portraits contemporains. Tome IV (4e éd.) « HISTOIRE DE LA ROYAUTÉ considérée DANS SES ORIGINES JUSQU’AU XIe SIÈCLE PAR M. LE COMTE A. DE SAINT-PRIEST. 1842. » pp. 1-30

L’élément, l’intérêt démocratique, celui des communes, ou de ce qui devait un jour s’appeler de ce nom, dominait en général ; la monarchie et l’Église avaient un peu le dessous. […] Que de noms en appel contre le hasard y trouveraient place ! […] Le règne des maires du palais, ou de ceux qu’on a qualifiés de ce nom, commence. […] Enfin, et pour ramasser ici les principales contradictions que notre auteur élève contre les autorités célèbres, il ne pense pas qu’on puisse rien conclure de positif des noms plus ou moins romains ou franks par rapport à la race directe des personnages, puisqu’on voit des Gaulois mariés à des Germaines avoir des enfants nommés d’un nom gallo-romain ou germain, à peu près au hasard et très-arbitrairement. […] Il est des noms si illustres à bon droit et si consacrés, que le premier point d’honneur consiste à ambitionner de se mesurer avec eux.

193. (1854) Histoire de la littérature française. Tome I « Livre II — Chapitre premier »

L’époque dite de la Renaissance se caractérise assez par son nom. Ce nom est plus qu’une définition ; il exprime un sentiment. […] Par l’inégalité dernière de ces deux noms, presque aussi retentissants l’un que l’autre à cette époque, mesurez la justice des deux causes. […] Les plus savants se souvinrent aussi de l’origine latine de ce nom, et firent une perle de celle dont les poètes faisaient une fleur. […] Dans les quelques pièces de Marot, d’où l’on a tiré le roman de ses amours avec Marguerite, celle-ci serait désignée sous le nom d’Anne.

194. (1889) Histoire de la littérature française. Tome IV (16e éd.) « Chapitre quatrième »

., images décevantes, à la suite desquelles on est allé jusqu’à l’excès d’ôter le nom de poète à Molière et à La Fontaine. […] Didon, Camille, Mézence, Nisus et Euryale, Énée même, sont-ils de vains noms ou des êtres vivants qui peuplent toutes les imaginations cultivées ? […] La fortune de Louis Racine est bien petite pour son nom. […] Son nom est sous la protection d’un regret, et le regret nous dispose à l’indulgence. […] Au lieu d’une Iris en l’air, le poète célébrait, — je devrais dire prostituait, — une maîtresse en chair et en os et nommée par son nom.

195. (1892) Journal des Goncourt. Tome VI (1878-1884) « Année 1881 » pp. 132-169

J’avais construit, dans mon roman (La Faustin) un homme de bourse, auquel j’avais donné le nom de Jacqmin, un nom pris dans un catalogue de vente du xviiie  siècle, le nom d’un joaillier du roi Louis XV. […] — Mais il n’y a pas que son nom… il y est tout entier… Sa brutalité, sa crânerie dans les affaires, son tempérament haussier… Il se trouvait que j’avais fait le vrai portrait, et avec son nom encore, d’un boursier mort, il y a dix-huit mois. […] On a vérifié les livres, et, on a trouvé les noms des destinataires. Parmi ces noms, il y avait un homme de la société, que sa femme pendant ses absences, astreignait à porter cette ceinture, dont elle emportait la clef. […] Et jusqu’à ce nom du cocher Ravaud, c’est le nom du cocher de mes cousines de Villedeuil, du vieux cocher entrevu à l’enterrement de mon frère, qui se rappelait, au bout de près de quarante ans, l’enfant qu’on faisait asseoir sur son siège, et aux petites mains duquel, parfois, il mettait ses guides.

196. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « AUGUSTE BARBIER, Il Pianto, poëme, 2e édition » pp. 235-242

Son poëme se divise en quatre masses principales ou chants : 1° le Campo Santo à Pise ; c’est le vieil art toscan catholique au Moyen-Age que l’auteur y ranime dans la personne et dans l’œuvre du peintre Orcagna, contemporain de Dante ; 2° le Campo Vaccino, ou le Forum romain ; solitude, dévastation, mort ; la majesté écrasante des ruines encadrant la misère et l’ignominie d’aujourd’hui ; 3° Chiaia, la plage de Naples où pêchait Masaniello : c’est un mâle dialogue entre un pêcheur sans nom, qui sera Masaniello si l’on veut, et Salvator Rosa ; les espérances de liberté n’ont jamais parlé un plus poétique langage ; 4° Bianca, ou Venise, c’est-à-dire cette divine volupté italienne que l’étranger du nord achète et profane comme une esclave. — Telle est la distribution générale du poëme, à laquelle il faut joindre, pour en avoir l’idée complète, un prologue et un épilogue, puis, dans l’intervalle de chaque chant, un triple sonnet sur les grands statuaires, peintres et compositeurs, Michel-Ange, Raphaël, Cimarosa, etc. ; l’ordonnance en un mot ne ressemble pas mal à un palais composé de quatre masses ou carrés (les quatre chants), avec un moindre pavillon à l’extrémité de chaque aile (prologue et épilogue), et avec trois statues (les sonnets) dans chaque intervalle des carrés, en tout neuf statues. […] Nous recommandons plus particulièrement à ceux que la pensée politique préoccupe, et qui aiment à voir le talent des artistes s’en faire l’auxiliaire et l’organe, cette troisième partie où sous le nom de Salvator, le génie mécontent, sinistre et découragé, est repris, remontré par l’homme du peuple en ces termes magnanimes : Du peuple il faut toujours, poëte, qu’on espère, Car le peuple, après tout, c’est de la bonne terre, La terre de haut prix, la terre de labour ; C’est ce sillon doré qui fume au point du jour, Et qui, empli do séve et fort de toute chose, Enfante incessamment et jamais ne repose. […] Il s’est tu, il s’est laissé oublier ; puis, après quelque vingt ans et plus, on a vu paraître sous le nom d’Auguste Barbier, dans la Revue Française et ailleurs, de petits vers hésitants, faiblets, puérils, gentillets, florianesques et tout à fait naïfs : c’était à jurer que ce n’était ni du même poëte ni du même homme. […] — Or, voilà que depuis peu, à trente-cinq ans d’intervalle, ses amis se sont avisés, un matin, de réveiller son nom comme celui d’un poëte candidat naturel à l’Académie : il a certes pour cela les titres suffisants ; c’est un général qui, au début de sa carrière, a remporté une victoire : comme Jourdan devenu bonhomme en vieillissant, il a eu sa journée de Fleurus. Ce qu’il y a de piquant, c’est que la plupart des académiciens, quand on leur parla d’Auguste Barbier, ne l’avaient pas lu et ne distinguaient que confusément son nom de celui de ses homonymes : l’un des quarante, et des plus au fait, M. de Montalembert, soutenait même qu’il était mort.

197. (1874) Premiers lundis. Tome II « Adam Mickiewicz. Le Livre des pèlerins polonais. »

leurs noms sont connus dans le monde. […] Qui connaît les noms des fils de rois des autres pays, et les noms des maréchaux malgré leurs bâtons, et des généraux malgré leurs cordons ? […] Et les autres, on ne les connaît que parce qu’ils sont remarquables par leur grande iniquité ou par leur grande stupidité, comme on connaît dans une petite ville les noms des brigands du voisinage, et les noms de l’escamoteur ou du fou qui flâne dans les rues pour amuser le peuple.

198. (1895) Histoire de la littérature française « Cinquième partie. Le dix-huitième siècle — Livre II. Les formes d’art — Chapitre I. La poésie »

Les odes de La Motte s’appellent le Devoir, le Désir d’immortaliser son nom, la Bienfaisance, l’Émulation : ce sont des dissertations méthodiques, parfois ingénieuses, où la part de la poésie se marque par l’emphase, la dureté, la cacophonie, l’effort sensible pour ne pas parler comme tout le monde. […] Les odes de Jean-Baptiste Rousseau, de Voltaire, de Thomas, de Lefranc de Pompignan, de Lebrun — ce ne sont pas les noms qui manquent — sont des exercices de rhétorique, parfois brillants, jamais sincères : le lieu commun impersonnel en fait le fond. […] La Henriade irait rejoindre Alaric et la Pucelle, si Voltaire n’avait entouré son poème, truqué et fardé, de notes qui sont souvent de curieuses dissertations littéraires et historiques, si le nom de l’auteur aussi ne constituait pas seul un intérêt sensible à l’ouvrage. […] Mais surtout le vice radical de leurs descriptions, c’est qu’ils donnent ou suggèrent les noms des objets naturels : ils n’en procurent jamais la vision. […] En ce genre, il y aurait bien des noms à citer.

199. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Première partie — Section 21, du choix des sujets des comedies, où il en faut mettre la scene, des comedies romaines » pp. 157-170

Les tragedies dont les moeurs et les personnages étoient romains, s’appelloient praetextatae ou praetextae, du nom de l’habit que les personnes de condition portoient à Rome. Quoiqu’il ne nous soit demeuré qu’une tragedie de cette espece, l’ Octavie qui passe sous le nom de Seneque, nous sçavons néanmoins que les romains en avoient un grand nombre. […] Leur nom venoit de taberna qui signifioit proprement un lieu de rendez-vous propre à rassembler les personnes de conditions differentes qui joüoient un rolle dans ces pieces. […] Les grecs donnent le nom de mimes à cette quatriéme espece de comedie. […] favor archimimus, c’est le nom et la profession de l’acteur qui faisoit le rolle de Vespasien, aïant demandé aux directeurs du convoi combien coûtoit sa pompe funebre, il s’écria, lorsqu’il eut appris que la dépense montoit à des millions. épargnons, messieurs, donnez-moi cent mille écus, et jettez mon cadavre dans la riviere.

200. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « DISCOURS DE RÉCEPTION A L’ACADÉMIE FRANÇAISE, Prononcé le 27 février 1845, en venant prendre séance à la place de M. Casimir Delavigne. » pp. 169-192

Il était précédé de deux années par son frère Germain, dont le nom n’est pas séparable du sien, et par cet autre ami non moins inséparable, j’allais dire par cet autre frère, M. […] Il composait en même temps son Épître à Messieurs de l’Académie française sur l’étude, pour ce brillant concours de 1817 d’où sortirent tant de jeunes noms. […] On n’en trouverait aucun représentant plus irrépréhensible et plus pur, en ces jeunes années d’essai, que Casimir Delavigne : en sincérité, en éclat, en expression loyale et populaire, il rappelle un autre cher souvenir, un autre nom sans reproche aussi, et qu’il a chanté : Casimir Delavigne et le général Foy ! […] Je ne veux pas tracer de cette seconde manière un trop long dessin, qui pourrait paraître à quelques-uns comme un portrait de fantaisie, et où s’inscrirait pourtant plus d’un nom : elle est d’autant plus vraie d’ailleurs qu’elle n’est pas précisément une manière, un procédé général, et qu’elle se décrit moins. […] La population parisienne elle-même y prit sa part : elle connaissait par son nom le poëte, par ce nom amical et familier de Casimir qui disait tout pour elle, et qui circulait autour du convoi dans un murmure respectueux.

201. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « UN FACTUM contre ANDRÉ CHÉNIER. » pp. 301-324

Fénelon est un de ces beaux noms dont on use volontiers : bien des gens qui n’ont guère de christianisme sont toujours prêts à dire qu’ils sont de la religion de Fénelon ; dans ce cas-ci, nous laisserons donc M. […] remy qui souligne le mot daignez, et il poursuit durant une demi-page en notant, dans le premier de ces deux vers, un peu de pédanterie, car Philétas, dit-il, n’est plus qu’un nom, et on ne possède aucun de ses ouvrages. […] Depuis La Fontaine, et en laissant de côté les chefs-d’œuvre dramatiques, la poésie lyrique digne de ce nom, la poésie d’odes, d’idylles, d’élégies, où en était-elle, je vous prie, en France ? […] que de noms, alors brillants, qui ne représentent plus rien désormais, et aussi vagues à définir pour nous que les nuances de ces fleurs dont ils empruntaient l’emblème ! […] Philétas, pour l’élégiaque classique, c’est un de ces noms comme Sapho, Linus et Orphée.

202. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre VI. Daniel Stern »

Il n’a pas cette haute position de génie reconnu qui autorise le nom d’homme et fait fondre le nom de la femme dans celui-là… Si nous disons Monsieur Daniel Stern, nous sommes ridicule. […] Mme Daniel Stern avait-elle spéculé sur l’embarras dans lequel ce mot de « madame » devant un nom, même faux, jette nécessairement le critique, ou n’avait-elle voulu que se révéler, en se cachant, et jouir du privilège du masque, sans en avoir l’inconvénient ? […] Ce n’est pas pour rien qu’elle s’est choisi ce nom de Daniel Stern. Daniel est un nom de prophète et Stern veut dire sérieux en anglais. […] Le sujet que devait traiter Mme Stern devait faire au moins six volumes et cela devait naturellement s’appeler : La République des Pays-Bas, mais la femme en domino, sous son nom d’homme, devait avoir peur de six volumes à mettre debout et à lancer !

203. (1887) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (deuxième série). IX « J. de Maistre » pp. 81-108

Je ne sache guères en toutes ses œuvres qu’une page de colère enflammée, et c’est le célèbre portrait de Voltaire, écrit avec la griffe d’un tigre trempée dans du vitriol ; seulement, remarquez que, dans ce portrait, de Maistre ne parle pas en son nom personnel, mais au nom et par la bouche des personnages du dialogue de ses Soirées de Saint-Pétersbourg. […] Malgré la différence des noms qu’elles portent, elles rentrent toutes les unes dans les autres. […] L’éditeur avait bien choisi son moment, le moment historique, pour remettre sous les yeux d’un public, devenu la postérité, le grand nom intellectuel de Joseph de Maistre, l’inoubliable nom de l’homme qui n’a pas fait seulement le livre du Pape, mais qui — autant, du moins, que l’influence des hommes peut faire quelque chose en ces décisions surnaturelles de l’Esprit-Saint, — pourrait bien avoir fait aussi le Concile du Vatican. […] cette correspondance, sortant tout à coup du carton d’une chancellerie, et de laquelle il résultait que l’auteur du Pape se moquait du Pape, que le comte de Maistre, dont le nom s’est élevé jusqu’à la hauteur d’une doctrine, n’était plus de Maistre, et que la vie de ce grand honnête homme avait les contradictions et peut-être les mensonges des petites gens de ce temps-ci. […] Elle avait des pages frappantes et charmantes, signées de leur talent même, et qui disaient le nom de Joseph de Maistre sans le prononcer.

204. (1856) Cours familier de littérature. II « VIIIe entretien » pp. 87-159

Où sont ces noms qui remplissaient l’oreille dans la poésie, dans l’éloquence, à la tribune, dans les conseils des peuples ou des rois ? […] Imitateur dans les sujets, dans la langue il est créateur : la poésie et lui s’incarnent dans le même nom. […] Après avoir imité trente ans, le Phidias de la poésie, Racine se hasarde enfin à tenter son chef-d’œuvre, et, en signant de son nom son premier monument original, il signe en même temps le nom de la France. […] s’il suffit, pour mériter ce nom de poète, d’avoir écrit spirituellement la satire ou la comédie de son siècle en vers ? […] Les noms qui la représentent restent grands ; mais Bossuet, qui les égale par le génie, les dépasse par la portée de sa tribune.

205. (1739) Vie de Molière

On a remarqué que presque tous ceux qui se sont fait un nom dans les beaux-arts, les ont cultivés malgré leurs parents, et que la nature a toujours été en eux plus forte que l’éducation. […] Il prit le nom de Molière, et il ne fit en changeant de nom que suivre l’exemple des comédiens d’Italie, et de ceux de l’hôtel de Bourgogne. […] De même, Arlequin et Scaramouche n’étaient connus que sous ce nom de théâtre. […] C’est une satire cruelle et outrée, Boursault y est nommé par son nom. […] Et ce n’était qu’à la dernière scène qu’on apprenait son véritable nom de Tartuffe, sous lequel ses impostures étaient supposées être connues du roi.

206. (1854) Nouveaux portraits littéraires. Tome II pp. 1-419

Et mon nom serait moins éclatant et moins célèbre. […] Or je ne crois pas que le nom de Giusti garde longtemps sa popularité. […] On dirait qu’il craint d’appeler les hommes et les choses par leur nom. […] Signés d’un autre nom que le sien, ses travaux sur la peinture ne mériteraient pas une heure d’attention ; signés de son nom, ils excitent l’étonnement. […] Est-ce moi qui demande à porter votre nom ?

207. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — C — article » pp. 48-49

On a dit que le nom de son frere étoit un honneur dangereux pour lui : on doit en convenir ; mais, malgré cela, son frere ne pouvoit être mieux remplacé à l’Académie Françoise. D’ailleurs, il est tant d’Auteurs qui n’ont un nom que parce qu’ils n’ont pas de frere, qu’il y auroit de l’injustice à lui refuser la gloire qu’il mérite, parce qu’il en a eu un plus célebre que lui. […] Une vanité mal éclairée a donc pu seule le porter à changer son nom en celui de Delisle, & Moliere a eu raison de tourner en ridicule cette foiblesse.

208. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Guillaume Favre de Genève ou l’étude pour l’étude » pp. 231-248

Mettons d’abord le lecteur au fait de tout ceci, car le nom et l’idée que j’y applique lui sont probablement choses nouvelles. […] Mais il restait une difficulté : Arsinoé avait une épithète ou un nom qui la qualifiait : Obtulit Arsinoës Chloridos ales equus. […] Favre s’attacha à prouver par toutes sortes de raisons qu’il faut lire Chloridos, et que ce nom de Chloris ou de Flora (car c’est encore la même chose) s’adapte tout naturellement à la Vénus Arsinoé. […] Les journaux de Paris vous auront quelquefois rappelé mon nom, en m’érigeant bien gratuitement en hérésiarque littéraire. […] Un Genevois qui porte un nom célèbre, M. 

209. (1870) De l’intelligence. Première partie : Les éléments de la connaissance « Livre quatrième. Les conditions physiques des événements moraux — Chapitre III. La personne humaine et l’individu physiologique » pp. 337-356

Les noms de pouvoir et de force ne désignent donc aucun être mystérieux, aucune essence occulte. […] Et cependant elle n’est rien en soi qu’un caractère, une propriété, une particularité d’un fait, la particularité qu’il a d’être constamment suivi par un autre, particularité détachée de lui par abstraction, posée à part par fiction, maintenue à l’état d’être distinct par un nom substantif distinct, jusqu’à ce que l’esprit, oubliant son origine, la juge indépendante et devienne la dupe de l’illusion dont il est l’ouvrier. […] À tout autre moment, la tranche est analogue ; il n’est donc rien d’autre ni de plus Que maintenant on classe ces divers événements, sensations, images, idées, résolutions ; qu’à chaque classe on impose un nom, sensibilité, imagination, entendement, volonté ; qu’on attribue au moi divers pouvoirs, celui de sentir, celui d’imaginer, celui de penser, celui de vouloir ; cela est permis et utile. […] Aujourd’hui, quand les savants parlent de forces physiologiques, chimiques, physiques ou mécaniques, ils ne voient dans ces noms que des noms. […] Isolée par abstraction et désignée par un nom substantif, elle devient un être permanent, subsistant, c’est-à-dire une substance.

210. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « La Religieuse de Toulouse, par M. Jules Janin. (2 vol. in-8º.) » pp. 103-120

Janin affectionne soit surtout celle de fantaisie et de broderie, elle lui a servi plus d’une fois à recouvrir l’autre, la vraie critique digne de ce nom. […] Janin ait tout son bon sens, il faut (je lui en demande pardon) qu’il se sente libre, qu’il n’ait pas affaire à l’un de ces noms qui, bon gré, mal gré, ne se présentent jamais sous sa plume qu’avec un cortège obligé d’éloges. […] Janin a pris la plupart des noms qui figurent dans son livre ; je dis les noms, car il a donné aux personnages un tout autre caractère, et les a complètement métamorphosés. à partir d’un certain moment, l’institut de l’Enfance étant devenu suspect, la Cour donna ordre de le surveiller étroitement et d’y introduire des espions, ce qu’on appelait dès lors des mouches. […] Il a pris ces noms et ce cadre de l’institut de l’Enfance comme un simple prétexte et un canevas à ses vives études et à ses goûts du moment ; il a voulu tracer, comme il dit, « un capricieux tableau d’histoire ». […] Janin n’est pas et n’a pas voulu être un tableau sévère ; c’est une fraîche et moderne peinture, décorée de noms d’autrefois, animée des couleurs d’aujourd’hui, une trame mobile où se croisent des fils brillants, où se détachent de jeunes figures, où s’est jouée en tout honneur une amoureuse fantaisie.

211. (1897) Le monde où l’on imprime « Chapitre XV. Les jeunes maîtres du roman : Paul Hervieu, Alfred Capus, Jules Renard » pp. 181-195

« Pour l’édification de plusieurs autres », disait Laclos dont le nom s’évoque toujours quand on parle d’un roman par lettres. […] Pourquoi ne nous dit-on pas le petit nom des personnages ? […] Hervieu a-t-il vu une femme appeler son amant d’un nom d’amitié fait avec son nom de famille ? […] Quand j’ai lu Deux plaisanteries, l’un de ses premiers petits livres, le meilleur public n’ignorait déjà plus son nom. […] Pourtant, je m’en voudrais, relisant un jour ces chroniques, de n’y trouver pas assez souvent le nom du meilleur fantaisiste dont elles étaient contemporaines et de ne pas avoir publié le plaisir que je lui avais dû.

212. (1861) Les œuvres et les hommes. Les historiens politiques et littéraires. II. « XVII. Mémoires du duc de Luynes, publiés par MM. Dussieux et Soulier » pp. 355-368

Cette publication, chez un libraire, historique par le nom, porte un autre nom historique. […] Aussi, quand nous, venus longtemps après tous les effacements de la révolution française, nous ne lisons le duc de Luynes, qui n’était pas un écrivain, qu’à cause de son nom qui dit le rang qu’il tint et celui de son petit-fils, qui autorise la publication de ses mémoires, et quand nous ne trouvons à la place des choses qu’il pouvait savoir en raison même de son rang, que les vieilles inanités déjà connues, certes, nous avons le droit de dire que nous sommes, qu’on me passe le mot : attrapés ! […] Dussieux et Soulié, victimes du patronage qui les éclipse, en couvrant d’un nom trop brillant leur obscurité. […] … Je n’ai point l’avantage de connaître M. le duc de Luynes actuel ; mais si, avec son nom, il est royaliste, comment donc n’a-t-il pas senti que c’est un crime en royalisme que de publier des mémoires comme ceux dont il autorise la publication, et où la royauté est montrée périssant dans les vanités d’une étiquette imbécile ! […] … ce que c’était que draper, — que jeter l’eau bénite, — que souper dans les petits appartements, etc., etc., et à mettre péniblement, en faisant d’effroyables efforts de mémoire, des noms propres et des dates à toutes ces pauvres notions.

213. (1895) Les œuvres et les hommes. Journalistes et polémistes, chroniqueurs et pamphlétaires. XV « Armand Carrel » pp. 15-29

Le vent qui a soulevé les feuilles au bas desquelles le nom d’Armand Carrel a brillé quelques jours, les avait bien emportées. […] Mais, hors cela, qui n’implique, après tout, ni la supériorité de l’intelligence, ni même l’éloquence du talent, il n’y a rien dans les trois volumes de Carrel qui ne soit vieilli, passé, mesquin, et qui méritât qu’on s’y arrête si on ne nous forçait pas à les lire à la lumière de son nom. […] Mais son amour pour elle ne fut ni assez désintéressé ni assez sincère pour mériter un si beau nom. […] Elle aurait su son nom. […] Les Œuvres complètes de Carrel diminuent son nom et son souvenir — coup de cymbale retentissant et passager — dans la mémoire des hommes.

214. (1906) Les œuvres et les hommes. Poésie et poètes. XXIII « Alfred de Musset »

… Le nom, ce nom fascinateur d’Alfred de Musset, de ce poète qui fut toutes nos âmes et toutes nos jeunesses, devait nécessairement nous attirer vers le livre qui promettait sa vie et par quelque main qu’il fût écrit. […] Et pour garantie de sa vérité, de la sincérité de son renseignement, de son intimité dévoilée, le nom de Paul de Musset, comme une signature, mis par-dessus le nom d’Alfred de Musset ! […] Talent de teintes spirituelles, tempérament calme, cœur sensible, rempli jusqu’aux bords de son frère, il n’est pas simplement Musset par le nom : il l’est encore par la goutte détiédie du sang d’Alfred qui passe dans son cœur, — pour le faire, il est vrai, moins battre, et qui teint son esprit, quoique ce ne soit pas de la même couleur éclatante. […] Galt, dans son Histoire, ne nous a pas donné un détail que nous ne tenions de lord Byron lui-même, et s’il y a des vides dans ses Mémoires qui embrassent la haute société de l’Angleterre contemporaine du poète, c’est le lâche Moore, épouvanté par les noms propres, c’est le lâche Moore qui les a faits !

215. (1889) Les œuvres et les hommes. Les poètes (deuxième série). XI « Auguste Barbier »

I Il est des noms qui obligent la Critique. […] André n’était que l’éphèbe de cette poésie ; Auguste Barbier devait en être l’homme, dans sa toute-puissante virilité… Quand il lança, de ce bras musclé qui rappelle les bras de Michel-Ange, ces premiers vers-flèches à la tête de la Révolution de 1830, ce que l’imagination avait rêvé sur ces grands noms : Archiloque et Tyrtée, dont on n’avait point les vers, fut réalisé pour elle ! […]                                        pour les âmes humaines On voudrait ne pas rire, car on souffre… On souffre de voir ces radotages, ces décrépitudes avant le temps, dans un livre qui n’est plein que de ces sortes de choses et sur lequel traîne et brille un des plus beaux noms de la poésie contemporaine. […] Mais, pour cela, il faut tout autre chose que du génie… Il faut cette science, cette connaissance, cette expérience, qu’on appellera du nom qu’on voudra, mais, que vulgairement on nomme : du métier. […] Ce sont des demeures à terre et plus bas que terre d’un esprit qui a eu parfois des ailes, comme le condor, de trente-deux pieds d’envergure… Ce qu’on pourrait dire des gaucheries sans nom, des maladresses, et, qu’on me passe le mot !

216. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « M. Armand Pommier » pp. 267-279

Armand Pommier26 I Voici un nom lourd à porter quand on se destine à la littérature, car c’est le nom d’un des premiers poëtes de ce temps. C’est le nom d’un des plus vaillants poètes romantiques, qui n’a pas, lui, rendu son épée a l’Académie française, comme tant d’autres, et qui est toujours l’homme de la première heure, le clairon d’or pur que rien n’a faussé, et qui joue maintenant, dans cette misérable défaite littéraire dont nous sommes les témoins, les airs à outrance du cor de Roland à Roncevaux. […] Amédée Pommier fera obstacle involontairement de sa réputation acquise à tout homme du même nom que lui et qui débutera dans les lettres. […] Tout titre doit faire rayonner l’idée du livre qu’il exprime, à moins que, comme Clarisse et tant d’autres chefs-d’œuvre, qui n’ont pour titre que le nom d’un personnage, il n’introduise dans la grande famille de l’observation humaine des types qu’on invoquera toujours. […] Il n’y prononce pas une seule fois le nom de « vampire. » Il a même des habiletés singulières pour nous voiler le dénoûment de cette histoire dalmate, dont le titre est une distraction et nous avertit trop : mais il n’en est pas moins vrai que La Dame au manteau rouge est une monstruosité à la façon de lord Ruthwen.

217. (1856) Cours familier de littérature. I « VIe entretien. Suite du poème et du drame de Sacountala » pp. 401-474

il ne règne aucune suite dans ses discours ; il confond jusqu’à leurs noms, et rougit ensuite de lui-même lorsqu’il vient à s’apercevoir de son erreur. […] ” Alors, lui passant au doigt cet anneau, sur la pierre duquel est gravé mon nom, je lui répondis : « “Épelle chaque jour une des syllabes qui composent mon nom, et, avant que tu aies fini, tu verras arriver un de mes officiers de confiance, chargé de te ramener à ton époux ! […] Va, chère Sacountala, quoique mon nom se soit égaré dans ce flot de larmes, ton vœu est parfaitement accompli… Oui ! […] Quel nom puis-je invoquer, sans en blesser la sainteté ? […] Et leur nom ?

218. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre IX » pp. 77-82

On vit en 1635, entre les femmes qui se jetèrent dans cette société, mademoiselle de Bourbon-Condé, sœur du grand Condé et du prince de Conti, la même qui fut depuis l’héroïne de la Fronde sous le nom de duchesse de Longueville. […] On ne voit à l’hôtel de Rambouillet, dans cette période, qu’un seul nom qui soit dans la ligne de ce qu’on a pu appeler depuis les précieuses. […] Ce nom répond de la considération des maîtres qui l’habitaient, et émousse bien des épigrammes. […] Son nom a fait longtemps pâlir les courtisans serviles et tressaillir les citoyens.

219. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome I « Mémoires pour servir à l’histoire des gens-de-lettres ; et principalement de leurs querelles. Querelles particulières, ou querelles d’auteur à auteur. — Bossuet, et Fénélon. » pp. 265-289

Son nom étoit Bouvières de la Motte, & sa patrie Montargis. […] Elle se tenoit longtemps à l’église, moins pour invoquer son amour (c’est le nom qu’elle donnoit à Jésus-Christ), que pour être vue de son amant dans le seigneur. […] Fénélon est scandalisé de la proposition ; &, révolté de cet air d’empire, il répond qu’on ne verra jamais son nom au bas d’un libèle . […] Ce monarque, effrayé de voir les princes ses enfans élevés par un hérésiarque, parle à Bossuet, dont il révéroit le nom & les lumières. […] Elle prit alors le nom de Mauléon, & a vêcu très long-temps.

220. (1915) La philosophie française « I »

Disons un mot des théories les plus importantes et citons les principaux noms. […] Il nous suffira de citer les noms de Charcot, de Ribot, de Pierre Janet et de Georges Dumas. […] On ne peut prononcer le nom de Ravaisson sans y associer celui de Lachelier, un penseur dont l’influence fut tout aussi considérable. […] Rappelons les noms de De Bonald (1754-1840), de De Maistre (1753-1821) et de Lamennais (1782-1854). […] Rappelons seulement, pour nous en tenir aux plus récents, les noms d’Ollé-Laprune, de Blondel, de Laberthonnière, de Fonsegrive, de Wilbois, de H. 

221. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre XXXVII. Des éloges en Italie, en Espagne, en Angleterre, en Allemagne, en Russie. »

Dans le seizième siècle surtout, on vit naître une foule d’ouvrages destinés à conserver les noms de tous les Italiens célèbres. […] Poètes, peintres, sculpteurs, philosophes, savants dans les langues anciennes, historiens, politiques, tout a été célébré, tout a eu sa portion d’immortalité dans quelques lignes écrites au bas de leurs noms. […] Quoique avilie et corrompue, c’est l’Angleterre qui t’a vu naître ; elle se glorifie de ton nom ; elle t’offre pour modèle à ses enfants. […] Par un hasard singulier, l’orateur se nommait Platon, et l’on dit que son éloquence ne le rendait pas indigne de porter ce nom célèbre. […] On s’est contenté de graver son nom sur une pierre avec ces mots : « Tu cherches un monument, regarde autour de toi. » Si monumentum quæris, circumspice.

222. (1881) La parole intérieure. Essai de psychologie descriptive « Chapitre VI. La parole intérieure et la pensée. — Second problème leurs différences aux points de vue de l’essence et de l’intensité »

Vraisemblablement, tous les noms aujourd’hui conventionnels sont d’anciennes métaphores, et toutes les métaphores sont d’anciennes onomatopées. […] Par une remarque d’analogie ou de concomitance, l’esprit attache ses idées nouvelles et encore innommées aux idées qui lui sont familières et qui ont un nom consacré, et, par des actes répétés d’attention, il les y maintient attachées ; peu à peu, il conçoit ensemble de plus en plus facilement la première idée, la seconde, et leur nom désormais commun. […] La plupart des individus substantiels ont des noms propres ; mais le phénoméniste considère ces prétendus êtres comme des classes de phénomènes successifs. […] Le nom de chose est cric ; les noms de phénomènes mixtes sont : bâfrer, lapper, bouffer, bouffir, croquer, humer, toper, claque, tic, fanfare ; les noms de phénomènes sonores sont : croasser, miauler, japper, babiller, fredonner, caqueter, chuchoter, marmotter, pouffer, huer, bruire, clapoter, crac et craquer, cancan, hoquet, cliquetis. […] Il est donc historiquement prouvé que le simple son ap, op, up est devenu, par l’intermédiaire d’un nom d’oiseau, le nom d’une touffe de plumes ».

223. (1875) Premiers lundis. Tome III «  Les fils  »

Nous n’avons jamais dit que le fils d’un écrivain, d’un poète célèbre, s’il a lui-même du mérite et du talent, ne pût légitimement hériter et profiler de la part d’honneur et de faveur acquise par un illustre père ; et il est surtout très bien à lui de soutenir le nom en sachant varier le mérite. […] Saint-Marc Girardin, et en recommandant un jeune patricien d’une haute espérance : « C’est un si beau talent dans un si beau nom !  […] Saint-Marc Girardin, que s’il s’agissait de deux hommes de lettres sans nom aristocratique, et à mérite égal, la question même se posât à ses yeux.

224. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — V — Valade, Léon (1841-1884) »

Sainte-Beuve Sous le titre : Avril, Mai, Juin, j’ai reçu, il y a deux ans, un recueil de sonnets ou deux jeunes amis se sent mis à chanter de concert tout un printemps et sans livrer au public leurs noms ; je ne les ai moi-même appris qu’à grand peine (Léon Valade et Albert Mérat). […] Il n’a jamais cherché la renommée ; on pourrait presque dire qu’il l’a fuie ; et peut-être, cependant, tel qui a fait tout d’abord un gros tapage autour de son nom laissera-t-il, après lui, beaucoup moins que ce poète. […] Léon Barracand De cette école poétique qui a pris, dans l’histoire littéraire, le nom de Parnasse, M. 

225. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « Mademoiselle Aïssé »

Quelques noms semés çà et là, donnés d’ordinaire par la tradition et touchés par la poésie, suffisent. […] qu’ajouter à ce que réveille le nom de La Vallière ? […] Nous avons beaucoup interrogé les savants sur l’origine de ce nom. […] Le nom de Grèce se mariait volontiers à celui d’Aïssé dans l’esprit des contemporains. […] Elle s’appelait Charlotte, du nom de l’ambassadeur (Charles), qui fut sans doute son parrain.

226. (1925) La fin de l’art

Mais Taine y avait écrit sous le nom de Thomas Graindorge. […] Comme ils s’étendent nécessairement sur tout un groupe de départements, ils ont adopté soit les noms plus vastes des anciennes provinces, soit les noms de régions. […] Un nom, peut-être, et moins en usage qu’aujourd’hui. […] Mais quel inconvénient à ce que les deux catégories de noms soient conservées ? […] Il faut retenir son nom, c’était un certain Thomas Coryat.

227. (1902) Les poètes et leur poète. L’Ermitage pp. 81-146

Les noms de Lamartine, Vigny, Musset, feront toujours vibrer en moi des fibres filiales. […] Vous aurez peut-être alors réuni les syllabes définitives du nom de « mon Poète ». […] s’il vous faut ce nom du suave et du fort. […] Je ne prétends pas que ce nom à lui seul signifie « toute la poésie » du siècle dernier. […] Remy de Gourmont, ont désigné des noms à titre égal.

228. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « M. LEBRUN (Reprise de Marie Stuart.) » pp. 146-189

De nobles patronages, de hautes amitiés, qui ne sont pas étrangères à ce grand nom des Stuarts, agirent-elles en effet sur elle pour la fixer dans ce choix ? […] ……… Suivez, suivez Napoléon, Mes chants, de rivage en rivage, Et que puisse ainsi d’âge en âge Mon nom accompagner son nom ! […] Saintine eut l’autre prix et où Charles Loyson obtint l’accessit, on distinguait le nom surgissant de Victor Hugo et celui de Casimir Delavigne ; la jeune milice de la Restauration s’essayait. […] Et puisqu’ici ces deux noms amis se rencontrent, notons en passant que, sous la Restauration, M. […] nom plein de douceur !

229. (1868) Cours familier de littérature. XXVI « CLVe entretien. Vie de Michel-Ange (Buonarroti) »

les murailles et les voûtes répondent par le nom de Michel-Ange. […] Elle fut vendue sous son véritable nom au duc de Valentinois, qui en fit présent à la duchesse de Mantoue, où elle est restée depuis, plus admirée qu’une œuvre antique. […] L’Italie et l’Europe furent pleines de son nom. […] Elle tient trop de place dans sa vie, dans ses œuvres, dans sa foi, dans son éternité même pour séparer deux noms qui ne furent si longtemps qu’une âme. […] Son nom était Vittoria Colonna, nom devenu depuis immortel par l’amour, par la poésie et par la vertu.

230. (1919) L’énergie spirituelle. Essais et conférences « Chapitre VI. L’effort intellectuel »

Mais je ne pouvais ni retrouver ce nom, ni me rappeler l’ouvrage où je l’avais d’abord vu cité. J’ai noté les phases du travail par lequel j’essayai d’évoquer le nom récalcitrant. […] Je me dis bien maintenant que le mot prendre, qui était à peu près figuré par les deux premières syllabes du nom cherché, devait entrer pour une large part dans mon impression ; mais je ne sais si cette ressemblance aurait suffi à déterminer une nuance de sentiment aussi précise, et en voyant avec quelle obstination le nom d’« Arbogaste » se présente aujourd’hui à mon esprit quand je pense à « Prendergast », je me demande si je n’avais pas fait fusionner ensemble l’idée générale de prendre et le nom d’Arbogaste : ce dernier nom, qui m’était resté du temps où j’apprenais l’histoire romaine, évoquait dans ma mémoire de vagues images de barbarie. […] Elles se présentaient surtout comme indiquant une certaine direction d’effort à suivre pour arriver à l’articulation du nom cherché. […] Ainsi, quand je veux me remémorer un nom propre, je m’adresse d’abord à l’impression générale que j’en ai gardée ; c’est elle qui jouera le rôle de « schéma dynamique ».

231. (1906) Les œuvres et les hommes. Femmes et moralistes. XXII. « Lettres portugaises » pp. 41-51

On les lut comme on lisait celles de madame de Sévigné, — comme on lut aussi ces autres Petites Lettres de Louis Montalte, ce pseudonyme bientôt mis en pièces par le puissant nom de Pascal, qui passa brusquement à travers ! […] Tout le monde y cherchait son nom, et de plus elles étaient écrites avec toutes les grâces d’un talent qui a la légèreté des dentelles que portaient nos grand’mères, et qui, comme les dentelles, semblent avoir gagné en vieillissant. […] Elle vivait au loin, dans son pays, au fond du cloître qu’elle avait souillé, et à peine si ceux qui lisaient ses lettres en France savaient son nom étranger. […] Dès les premiers mots de cette larmoyante élégie, soupirée lâchement aux pieds d’un homme et où le tonnerre du grand nom du Dieu qu’on outrage ne retentit pas une seule fois, l’imagination est cruellement trompée. […] Nous ne savons pas le nom du menteur, mais qu’importe !

232. (1824) Épître aux muses sur les romantiques

À douze éditions leurs vers sont parvenus, Et leurs noms immortels ne vous sont pas connus ! […] Staël1, Morgan et Schlégel… ne vous effrayez pas, Muses, ce sont des noms fameux dans nos climats, Chefs de la propagande, ardens missionnaires, Parlant le romantique et prêchant ses mystères. Il n’est pas un Anglais, un Suisse, un Allemand, Qui n’éprouve à leurs noms un saint frémissement. […] Je voulus sur un vers essayer ma critique ; Je fus apostrophé du surnom de classique ; Et de cette hérésie atteint et convaincu, Sous ce nom flétrissant je restai confondu. […] Qu’ai-je à faire d’un nom cent ans après ma mort ?

233. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — V. — article » pp. 444-446

Même nom de baptême, nom également substitué à son vrai nom de famille ; il a fait, comme lui, époque* dans notre Littérature ; l’un & l’autre sont nés avec beaucoup d’esprit & de talent ; l’un & l’autre ont ambitionné la Monarchie Littéraire, & la manie de dominer leur a également suscité une foule d’ennemis ; tous deux ont habité successivement l’Angleterre, la Hollande, l’Allemagne & la Suisse ; tous deux ont été fêtés à la Cour des Rois, & tous deux, par la suite des événemens, ont été forcés de vivre loin de leur patrie.

234. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « La Fontaine de Boileau »

Fier de suivre à mon tour des hôtes dont le nom N’a rien qui cède en gloire au nom de Lamoignon, J’ai visité les lieux, et la tour, et l’allée Où des fâcheux ta muse épiait la volée ; Le berceau plus couvert qui recueillait tes pas ; La fontaine surtout, chère au vallon d’en bas, La fontaine en tes vers Polycrène épanchée, Que le vieux villageois nomme aussi la Rachée 12, Mais que plus volontiers, pour ennoblir son eau, Chacun salue encor Fontaine de Boileau. […] Sous ces noms de Cotins que ta malice fronde, J’aime à te voir d’ici parlant de notre monde A quelque Lamoignon qui garde encor ta loi : Qu’auriez-vous dit de nous, Royer-Collard et toi ? […] Et riant, conversant de rien, de toute chose, Retenant la pensée au calme qui repose, On voyait le soleil vers le couchant rougir, Des saules non plantés les ombres s’élargir, Et sous les longs rayons de cette heure plus sûre S’éclairer les vergers en salles de verdure, Jusqu’à ce que, tournant par un dernier coteau, Nous eûmes retrouvé la route du château, Où d’abord, en entrant, la pelouse apparue Nous offrit du plus loin une enfant accourue13, Jeune fille demain en sa tendre saison, Orgueil et cher appui de l’antique maison, Fleur de tout un passé majestueux et grave, Rejeton précieux où plus d’un nom se grave, Qui refait l’espérance et les fraîches couleurs, Qui sait les souvenirs et non pas les douleurs, Et dont, chaque matin, l’heureuse et blonde tête, Après les jours chargés de gloire et de tempête, Porte légèrement tout ce poids des aïeux, Et court sur le gazon, le vent dans ses cheveux. […] Les ormes qui ombrageaient autrefois la fontaine avaient probablement été coupés pour repousser en rachée : de là le nom.

235. (1857) Cours familier de littérature. IV « XXIe Entretien. Le 16 juillet 1857, ou œuvres et caractère de Béranger » pp. 161-252

Qu’on juge, d’après ces dispositions, ce qu’était pour nous, à cette époque, le nom de Béranger. […] Mais la patrie, l’héroïsme, le peuple, éterniseront le nom du poète. […] La gloire mensuelle de ces publications faisait éclore un nom sur une page de ces recueils, comme un rayon de soleil fait éclore le ver à soie sur une feuille de mûrier. […] Il est donc très naturel qu’à mon entrée dans la vie et dans les lettres, j’aie porté et signé le nom qui était légitimement celui de notre famille. […] Fournier dans le même recueil ; elle est datée de 1803 et signée du même nom.

236. (1865) Cours familier de littérature. XIX « CXIVe entretien. La Science ou Le Cosmos, par M. de Humboldt (3e partie) » pp. 365-427

Un enfant de trois ans, qui sait balbutier le nom de l’Infini et de l’Éternel, en sait un million de fois plus. […] toi dont j’ignore le nom, parce qu’aucun être et aucun Cosmos n’est assez vaste pour contenir l’image ou le son du nom de son auteur ; infini ! […] Je sais que je ne dis que des à peu près, des probabilités, des contresens, des ombres ; mais tu me pardonneras comme le père pardonne au murmure confus du nouveau-né qui cherche à prononcer son nom ! […] Sous la forme matière, cette œuvre est très grande et assez belle pour que ses investigateurs lui aient donné à faux le nom de science. […] M. de Humboldt décerne à cette région le nom de forêt vierge dans la plus précise acception du terme.

237. (1889) Histoire de la littérature française. Tome IV (16e éd.) « Conclusion »

M. de Bonald est resté un nom imposant. […] Ceux-ci obéissent plus qu’ils ne commandent, ou ne commandent qu’au nom des choses auxquelles ils obéissent. […] L’art de lire les bons livres serait son vrai nom. […] Cependant quelques noms destinés à durer dominent la foule brillante de nos romanciers. […] Je cherche, dans la bibliothèque immense sortie de son puissant cerveau, le livre qui durera autant que son nom.

238. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « La comtesse de Boufflers (suite et fin.) »

Mais nous avons encore bien des choses à apprendre d’elle et sur elle, bien des noms célèbres à rencontrer dans sa compagnie et à ses côtés. […] Je ne puis mieux la faire connaître qu’en rapportant ici son Portrait, fait par un homme à qui elle avait rendu le service important de le tirer du couvent et de le faire relever de ses vœux ; il lui dédia un ouvrage sans mettre son nom à la tête de l’Épître dédicatoire, parce qu’elle n’avait pas voulu le lui permettre. […] Deux femmes de chambre qui la servaient depuis le temps de sa prospérité, et qu’elle n’avait plus le moyen d’entretenir, ne voulurent jamais la quitter et l’assistèrent jusqu’à la fin. — Elle avait un fils, le comte ou marquis de Boufflers, que tout Paris a connu fort bizarre dans sa vieillesse, trop peu digne de son nom, et qui est mort célibataire en avril 1858. […] Il s’agissait de la traduction d’un ouvrage anglais dont, par malheur, Dutens n‘a pu nous dire le titre ; sans quoi Ion arriverait à savoir le nom de ce moine si digne d’intérêt et si reconnaissant. […] Un brave homme dont le nom mérite d’être conservé à côté du leur, l’abbé Le Chevalier, qui était instituteur du jeune de Boufflers, fils unique de la comtesse Amélie, vendit sa bibliothèque et une petite possession qu’il avait en Normandie, d’abord pour les faire vivre en prison, et puis pour détourner d’elles le coup fatal.

239. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « JULES LEFÈVRE. Confidences, poésies, 1833. » pp. 249-261

Ces sœurs qu’à nos chagrins le génie accorda, Clémentine, Imogen, Clarisse ou Miranda, Ces êtres fabuleux qu’adopte la misère, Et qui, sans exister, peuplent pourtant la terre, Semblaient, tous confondus sous un nom gracieux, Me dicter un roman qui m’approchait des cieux. […] Je trouve encore l’escarre du chagrin, l’anévrisme des larmes, un culte qu’on galvaude, égruger le reste de mes jours ; la ration de fiel dont vous gorges mes jours ; un nom perdu, trahi, trimballé dans la boue ; toutes les limites de la langue, du goût, de l’art, et de la douleur exprimable, sont franchies. […] Jules Lefèvre est mort le 13 décembre 1857 : il avait, dans les dernières années, changé son nom en celui de Lefèvre-Deumier ; Mme Deumier, sa tante, l’ayant fait héritier d’une grande fortune, il ajouta ce nom au sien par reconnaissance, ce qui acheva de dérouter la notoriété qui était déjà en retard avec lui. […] Timide et fier, et même un peu sauvage, il ne laissait pas d’en souffrir. « Dans sa droiture et dans sa fierté, » nous dit quelqu’un qui l’a bien connu, « il avait un tel éloignement de tout ce qui ressemble à l’intrigue, qu’il poussait cette aversion jusqu’à se refuser les plus simples démarches et relations qui pouvaient contribuer à la célébrité de son nom et de ses ouvrages. […] Cet excès de timidité, qui avait sa noblesse, avait aussi ses grands inconvénients, et de là en partie le peu de retentissement qu’ont obtenu son nom et ses livres. » A le voir en ces années avec son beau et large front sillonné de pâleur, sa figure fine, sa réserve silencieuse, et un certain air de malheur répandu sur toute sa personne, on eût pu le croire envieux et malade du succès des autres.

240. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre IX. Les disciples de Jésus. »

L’une d’elles, Marie de Magdala, qui a rendu si célèbre dans le monde le nom de sa pauvre bourgade, paraît avoir été une personne fort exaltée. […] J’admets l’identification de Nathanaël et de l’apôtre qui figure dans les listes sous le nom de Bar-Tholomé. […] Ce second nom est la traduction grecque du premier. […] Il faut supposer, quelque bizarre que cela puisse paraître, que ces deus noms ont été portés par le même personnage. […] Elle est restée célèbre, jusqu’au temps des croisades, sous le nom de Via maris.

241. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre XI. Le royaume de Dieu conçu comme l’événement des pauvres. »

Chacune des pierres, chacune des briques qui les composent est un péché 513. » Le nom de « pauvre » (ébion) était devenu synonyme de « saint », d’« ami de Dieu. » C’était le nom que les disciples galiléens de Jésus aimaient à se donner ; ce fut longtemps le nom des chrétiens judaïsants de la Batanée et du Hauran (Nazaréens, Hébreux), restés fidèles à la langue comme aux enseignements primitifs de Jésus, et qui se vantaient de posséder parmi eux les descendants de sa famille 514. A la fin du IIe siècle, ces bons sectaires, demeurés en dehors du grand courant qui avait emporté les autres églises, sont traités d’hérétiques (Ébionîtes), et on invente pour expliquer leur nom un prétendu hérésiarque Ébion 515. […] Cela s’appelait la « Bonne Nouvelle » ; la doctrine n’avait pas d’autre nom. […] I, 7 ; Eus., De situ et nom. loc. hebr.

242. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre XXIV. Mme Claire de Chandeneux »

J’ignore si ce nom, à tournure romanesque, de Claire de Chandeneux, est son vrai nom, ou si c’est un nom qu’elle s’est donné comme tout bon bas-bleu qui ne veut être que par soi-même. Toujours est-il que dernièrement, dans un journal, je l’ai vu rouler, ce nom qui a la condescendance d’être resté féminin, parmi ceux des hommes forts qu’on appelle : la Société des gens de lettres et franchement il avait bien le droit de se montrer parmi eux ! […] Lui qui pensait tout et qui pensait à tout, il avait dû les faire, sous un autre nom, dans son encyclopédique Comédie humaine, et c’est ce vide énorme laissé par Balzac qu’une femme aujourd’hui a cru pouvoir combler ! […] Nous nous sommes moqués du bas-bleu, même bien avant qu’il eût un nom dans notre pays, et nous nous en moquions encore, il n’y a pas bien longtemps, sous Louis XIV et sous Molière.

243. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « XXI. Philosophie positive »

Le positivisme, voilà déjà le nom qu’on donne maintenant à ce qui fut tout d’abord la religion et la philosophie positives ! […] Le positivisme, voilà le nom barbare de cette chose qui fut une folie parfaitement caractérisée dans le cerveau troublé qui la conçut, et dont aujourd’hui les uns veulent faire une religion encore, et les autres, plus malins, simplement une philosophie ! […] Comte donne à ce que nous, chrétiens, appelons de ce beau nom de charité, tombé du dictionnaire des Anges dans la langue des hommes, le nom grotesque, inventé par lui, d’altruisme. […] Oui, malgré ma résolution de rester grave en ce grave sujet de philosophie, je n’ai pu résister à la mordante envie d’appeler les choses par leur nom, et ce n’est point ma faute à moi si ce nom n’est pas mélancolique.

244. (1898) La cité antique

Consultons encore le langage : les noms des gentes, en Grèce aussi bien qu’à Rome, ont tous la forme qui était usitée dans les deux langues pour les noms patronymiques. […] Le vrai nom, nomen, était Cornélius : or, ce nom était en même temps celui de la gens entière. […] L’unité de naissance et de culte se marqua par l’unité de nom. […] Au moyen âge, jusqu’au douzième siècle, le vrai nom était le nom de baptême ou nom individuel, et les noms patronymiques ne sont venus qu’assez tard comme noms de terre ou comme surnoms. […] C’était même ce refrain sacré qui donnait à la cérémonie son nom.

245. (1859) Critique. Portraits et caractères contemporains

Les noms de ceux qui se sont arrêtés en chemin sont innombrables. […] Qu’il répète deux ou trois fois le nom qu’on lui jette, et ce nom-là est heureux. […] sur la pierre silencieuse de quelques sépulcres sans nom. […] c’est le nom de l’âne aux montagnes du Rouergue. […] Il me semble que je vois briller encore en toutes lettres, au beau milieu d’une immense enseigne, en plein Palais-Royal, ce nom prophétique, ce nom précurseur de toutes les gloires de ce siècle, ce nom qui restera éternellement attaché à tous les chefs-d’œuvre de notre âge !

246. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — P. — article » pp. 502-504

On a aussi publié, après sa mort, l’Histoire de Timur-Bec, connu sous le nom du grand Tamerlan, Empereur des Mogols & Tartares. […] Petis a plus servi à étendre l’honneur du nom François, c’est par une Histoire de Louis XIV, écrite en Arabe, & par la Traduction en Langue Persane, de l’Histoire de ce même Prince par les Médailles. […] On a aussi de lui des Lettres critiques, sur les Mémoires du Chevalier d’Arvieux, publiées sous le nom d’un Secrétaire de Mehemet Effendi, qui prouvent qu’il étoit très-digne de le remplacer ; avantage peu ordinaire aux enfans, qui n’ont pas toujours le bonheur d’hériter des talens de leur pere.

247. (1872) Nouveaux lundis. Tome XIII « Œuvres françaises de Joachim Du Bellay. [III] »

On se demande si les deux amis qu’il associe à ses destinées en étaient dignes par le talent ; je ne connais rien de Panjas : quant à Olivier de Magny, on a, entre autres Recueils, ses Soupirs, en grande partie composés pendant le séjour de Rome et publiés en 1557 ; ils sont comme le pendant des Regrets de Du Bellay, dont le nom revient presque à chaque page. […] Il résulte clairement des dernières indications précises que Du Bellay n’avait aucune chance, s’il avait vécu, d’être promu à l’archevêché de Bordeaux, comme on l’avait dit et cru, un peu à la légère, d’après une confusion de noms. […] Il voulait, aux approches du jour de l’an de 1560, envoyer à ses amis d’ingénieuses étrennes, et, selon le goût du temps, selon le goût aussi des Anciens qui ont souvent joué sur les noms (nomen omen), il composa en distiques latins une suite d’Allusions 115, dans lesquelles, prenant successivement chaque nom propre des contemporains célèbres, il en tirait, bon gré mal gré, un sens plus ou moins analogue au talent et au caractère du personnage : par exemple, Michel de l’Hôpital semblait avoir reçu son nom tout exprès, puisqu’il était l’hospice des Muses, auxquelles sa maison était toujours ouverte. Jacques Amiot, qui avait un français d’un coloris si vif et qui avait mis du rouge à Plutarque (entendez-le à bonne fin), semblait en effet avoir emprunté son nom au mot grec qui signifie vermillon, ἄμμιον. […] La différence est à la vue comme dans les noms. » Le sonnet de Du Bellay est la contrepartie du mot de Courier : il montre que la poésie, à qui sait la cueillir, est partout, et que les lieux les plus humbles, sous la vérité de l’impression, ne le cèdent en rien aux plus beaux, mais gardent d’autant mieux leur physionomie attachante.

248. (1859) Cours familier de littérature. VII « XLIIe entretien. Vie et œuvres du comte de Maistre » pp. 393-472

Lui-même étouffait dans cette bourgade décorée du nom de capitale. […] L’empereur Alexandre et l’aristocratie russe l’accueillirent, non pour son titre, mais pour son nom. Les Considérations sur la France avaient popularisé ce nom jusqu’à la cour de Russie. […] « C’est, dit-il, qu’en qualité d’ambassadeur du roi et de ministre d’État je ne voulais pas inscrire mon nom au-dessous du nom d’un gouverneur de Savoie. […] Il sait très bien aussi donner à la fortune le nom majestueux et divin de Providence.

249. (1889) Histoire de la littérature française. Tome IV (16e éd.) « Chapitre sixième »

Mais, dès la première scène, je vois qu’au lieu de s’appeler de son vrai nom Damis, il s’est donné le sobriquet de M. de l’Empyrée. […] Viennent ensuite les valets, une Lisette, un Frontin, esprits prompts, fines langues, dont on se souviendrait si Gresset, au lieu de les appeler de noms génériques, leur eût donné des noms propres. […] Deux hommes inégalement célèbres entreprirent de lui en donner ; à tout prix, peut-on dire, quand on voit les noms. […] La corruption est son vrai nom. […] Prendre des noms à Molière, oser lire à son tour dans des cœurs où le regard de Molière avait pénétré, retoucher ses portraits et n’y pas échouer, c’est d’un homme qui aurait pu laisser un grand nom dans l’art, si le temps l’eût permis, et si, ardent et nécessiteux, il n’eût pas été jeté dans les hasards de la révolution par cette passion du bien-être par le pouvoir, qui se pare du nom de passion politique.

250. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « Histoire de la Restauration par M. Louis de Viel-Castel. Tomes IV et V. »

Ce qui irritait surtout contre eux, ce qui exaspérait l’opinion bordelaise royaliste d’alors, rien qu’à prononcer leurs noms, c’est que les frères Faucher étaient moins des bonapartistes purs que des girondins, ou même, en remontant plus haut, de ci-devant royalistes considérés comme renégats et apostats, parce que le mouvement des Cent-Jours les avait pris par le côté patriotique et les avait ralliés in extremis à Napoléon ainsi que les Carnot, les Lecourbe. […] On n’a pas assez dit lorsque, parmi ces victimes du fanatisme du Midi, on a énuméré dans un récit d’histoire quelques noms de généraux connus : mais combien d’autres de toute classe, immolés et restés obscurs, et dont il faut aller chercher, réveiller le souvenir aux lieux mêmes où ils ont péri et où l’écho répondra si on l’interroge ! […] La mémoire du peuple a retenu le nom de deux des condamnés, de Jean-Jacques Pau, et surtout d’Avinens, soit que leur attitude fut plus ferme, plus imposante que celle des autres, et qu’ils eussent une beauté virile qui frappait les assistants, soit à cause du cri final républicain que poussa l’un d’eux sur l’échafaud. […] Dès la première séance (7 octobre), après le discours fort sage de Louis XVIII, M. de Vaublanc, faisant l’appel des députés, prit sur lui d’omettre le nom de Fouché, duc d’Otrante, nommé à Melun ; et comme quelques personnes lui témoignaient leur étonnement de cette omission arbitraire, il répondit : « qu’il devait éviter tout ce qui pouvait amener des scènes violentes dans la Chambre ; que le seul nom prononcé aurait produit ces mouvements malgré la présence du roi, et qu’il avait rempli son devoir en ne le prononçant pas. » On put entrevoir les dispositions de la nouvelle Chambre à cette circonstance encore que, pendant l’appel, un député du Midi, M.  […] Ces deux personnages dont on s’accoutuma de bonne heure à unir les noms faisaient leur chemin par les bureaux et conquéraient leur crédit dans le travail des commissions ; ils s’y montrèrent les plus capables et devinrent dès lors les hommes d’affaires du parti.

251. (1897) Le monde où l’on imprime « Chapitre XXIII. Des sympathies anarchistes de quelques littérateurs » pp. 288-290

L’avocat avançait des noms, qui n’étaient sans doute que des noms pour les jurés, même pour le juré vicomte de Bornier. […] (Je prends ces noms sans arrière ni ironique pensée, comme d’esprits d’à peu près même force mais d’orientation différente.)

252. (1870) De l’intelligence. Deuxième partie : Les diverses sortes de connaissances « Livre troisième. La connaissance de l’esprit — Chapitre premier. La connaissance de l’esprit » pp. 199-245

Son vrai nom était Virginie Silly, et elle se disait Eugénie de Sully. […] B… fut prié de dire son nom ; il répondit raisonnablement, sans hésiter. […] Au bout de quelques instants, on lui demanda son nom. […] — Oui, répliqua-t-il. — La même expérience de noms différents tentée à diverses autres reprises eut toujours les mêmes résultats. — Pendant l’état de veille normal, les sujets de l’expérimentation donnaient leur véritable nom aussitôt qu’on le leur demandait. […] Si j’insiste dessus à l’état normal, ce nom évoque en moi, par association, son équivalent, à savoir la série de mes événements actuels et antérieurs, jointe aux nombreuses séries d’événements possibles dont je suis effectivement capable.

253. (1861) Cours familier de littérature. XI « LXIVe entretien. Cicéron (3e partie) » pp. 257-336

Quant au nom, il est moderne ; mais, pour la chose elle-même, nous voyons qu’elle est très ancienne. […] Cette âme donc, lorsqu’on la cultive et qu’on la guérit des illusions capables de l’aveugler, parvient à ce haut degré d’intelligence qui est la raison parfaite, à laquelle nous donnons le nom de vertu. […] L’empereur Yventi, premier du nom, régnait alors ; les annales de Chine nous le représentent comme un prince très sage et très savant. […] Cornélius Scipion, dont le nom seul ranime mes vieux ans ! […] L’envie est l’ombre que les sommités humaines font au reste des hommes ; Cicéron est si grand que l’ombre de son nom nous offusque encore.

254. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « Journal et Mémoires, de Mathieu Marais, publiés, par M. De Lescure »

Le fils a changé de nom et s’appelle Voltaire à présent. […] » L’autre lui dit je ne sais quoi sur le nom de Chabot. […] Ô mes chers confrères (et je comprends sous ce nom toutes les sortes d’adversaires), contredisons-nous, critiquons-nous, raillons-nous même finement si nous le pouvons, mais ne nous bâtonnons jamais. […] J’ai parlé de lui vingt fois en plein consistoire ; nos Quarante n’ont jamais voulu y entendre : la plupart ne le connaissaient pas seulement de nom. […] Marais espère tout bas que ce pourrait bien être lui, lui-même, et il l’espérait d’autant plus que, dans cette huitaine d’intervalle, le président Bouhier avait mis son nom en avant.

255. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « Appendice. Discours sur les prix de vertu »

On affectait de ne voir dans l’estimable fondateur, lorsqu’on sut son nom, qu’un homme de gloriole, un courtisan du public, à l’affût de tous les petits succès. […] Elle n’a jamais pensé à ce qui brille, et elle ne s’attendait certes pas que le nom de Scheffer ferait jamais épisode dans sa vie. […] C’est assez pour cette fois, Messieurs ; les autres noms, avec leurs titres, se liront dans le livret qui sera distribué. — Vertu, beau nom, admirable chose, respectable sous toutes ses formes et dans toutes ses variétés ! […] Tout va plus vite dans la société actuelle ; tout va plus loin en moins de temps : il faut, pour vivre et durer, pour se faire un nom et le garder, recommencer et récidiver sans cesse. […] Je supprime les noms célèbres qui me viennent à la pensée et qui sont présents à la vôtre.

256. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Monsieur de Malesherbes. » pp. 512-538

Chrétien-Guillaume de Lamoignon de Malesherbes, héritier d’un nom si beau, qu’il devait rendre plus beau par sa vie et sacré par sa mort, était né le 6 décembre 1721. […] Dans cette comédie, Voltaire avait traduit sur la scène Fréron sous le nom à peine déguisé de Frélon, et il lui faisait jouer le rôle le plus vil. […] Il caractérise sous des noms légèrement travestis, comme dans la bataille du Lutrin, les principaux chefs de l’armée philosophique, Diderot et son aide de camp Sedaine, Grimm, Marmontel, et les autres à la suite : on les reconnaissait tous alors sous leur masque transparent43. […] Il va, dans son délire d’amour-propre, jusqu’à écrire, par allusion à ce nom vénéré : « Le nom de Fréron est sans doute celui du dernier des hommes, mais celui de son protecteur serait à coup sûr l’avant-dernier. » À l’entendre, M. de Malesherbes « avilit la littérature », il fait entrer dans ses calculs de budget le « produit des infamies de Fréron », il « aime le chamaillis !  […] En tout, on le trouverait de la race des L’Hôpital, des Jérôme Bignon, des Vauban, des Catinat, ou même des Fénelon (c’est plaisir d’appareiller de tels noms au sien), plutôt que de celle des encyclopédistes novateurs.

257. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome II « Querelles générales, ou querelles sur de grands sujets. — Première Partie. Des Langues Françoise et Latine. — L’orthographe, et la prononciation. » pp. 110-124

Parmi ceux dont le nom en a le plus imposé, il faut distinguer Du Marsais, l’abbé de Saint-Pierre, & M. de Voltaire. […] Il décide, par ce moyen, la bonté de bien des rimes, & la terminaison véritable de beaucoup de noms de peuples. […] Ils fondoient leurs exclamations sur la nécessité de conserver l’étymologie des mots ; de faire porter à notre langue, dérivée de celle des anciens Romains, les glorieuses marques de son origine ; sur la difficulté qu’il y auroit à distinguer le singulier & le pluriel, soit des noms, soit des verbes, puisque il aime & ils aiment, s’écriroient il aime, ils aime ; sur la multitude de dialectes qui s’introduiroient dans notre langue, le Normand, le Picard, le Bourguignon, le Provençal, étant autorisés à écrire comme ils parlent ; enfin, sur l’inutilité dont deviendroient nos bibliothèques, & sur l’obligation où l’on seroit d’apprendre à lire de nouveau tous les livres François imprimés auparavant la réforme. […] Quelques professeurs du collège Royal, nouvellement établis, jaloux de se faire un nom dans le monde latin, étoient d’avis contraire. […] Par exemple, est-il dans la règle de ne pas faire sentir, ou de prononcer avec affectation en chaire, au barreau & sur le théâtre, le s final des noms, & le r final des verbes dont l’infinitif est terminé en er ou en ir, sous prétexte que cette pratique donne plus de dignité & d’énergie à la prononciation ?

258. (1861) Cours familier de littérature. XII « LXXe entretien. Critique de l’Histoire des Girondins » pp. 185-304

La France seule en entendait quelques retentissements dans les journaux indépendants, et voyait croître autour de mon nom une lente popularité qui devait lui être utile un jour. […] C’était un sauvetage qu’il fallait organiser sous le nom de république. […] J’ignore comment le prince, très attentif apparemment à ce qui pouvait toucher à son nom dans la presse, en eut communication. […] Pourquoi donc ne l’a-t-il pas même fait entendre dans ce moment suprême, ce nom ? […] Le public apprit à connaître mon nom.

259. (1890) L’avenir de la science « X » pp. 225-238

Pour mon usage particulier, j’y substitue de préférence le nom d’esthétique. […] Que m’importent les syllabes insignifiantes de son nom ? […] L’anonyme est ici bien plus expressif et plus vrai ; le seul nom qui dût désigner l’auteur de ces œuvres spontanées, c’est le nom de la nation chez laquelle elles sont écloses ; et celui-là, au lieu d’être inscrit au titre, l’est à chaque page. […] On croit avoir tout dit en opposant quelques noms propres. […] Les noms de leurs facultés sont intraduisibles pour nous ; tantôt leurs facultés renferment plusieurs des nôtres sous un nom commun, tantôt elles subdivisent les nôtres.

260. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « M. Biot. Mélanges scientifiques et littéraires, (suite et fin.) »

Biot donna cours, dans l’examen qu’il en fit au Journal des Savants (mai 1833), à un sentiment qui, sous sa forme discrète et son expression modérée, ne peut être qualifié au fond que de dénigrant et de malveillant : « Les éditeurs de semblables recueils, disait-il en commençant, lorsqu’ils n’ont que des intentions honorables, ce qui est certainement le cas actuel, doivent bien examiner, avant de les émettre, si la gloire des hommes célèbres qu’ils ramènent ainsi sur la scène s’accroîtra par ces publications qu’eux-mêmes n’avaient point prévues ; ou si l’expression, pour ainsi dire surprise, des idées qu’ils n’avaient pas exposées au grand jour, aura une utilité générale, soit en ajoutant de nouvelles et réelles richesses à la masse des connaissances déjà acquises, soit en détruisant des erreurs que des hommes célèbres auraient accréditées ; soit, enfin, en redressant des injustices qui se seraient propagées sous l’influence de leur nom : car, si aucun de ces résultats ne doit être obtenu, la gloire de ce nom risque d’en être affaiblie plutôt qu’augmentée, ne fût-ce que par l’évanouissement du prestige de perfection qui s’y attachait. » C’est donc au nom d’un prestige que M.  […] Je ne puis que courir sur des sujets où j’ai si peu le droit de parler en mon nom. […] Son testament philosophique, ou ce qu’il appelait moins justement de ce nom, se trouverait dans le Journal des Savants de mars à mai 1852 : c’est une suite d’articles sur Cotes et Newton. […] Bour à… » Le nom en blanc, pour bien marquer l’intention que le legs précieux, ainsi transmis de main en main au plus digne, continuât de l’être encore sans courir la chance d’être divisé et dispersé. […] Il lui exprima son approbation, en ajoutant ces mots qui résument, ce me semble, à merveille le genre d’égards qui restent dus aux anciens noms historiques, dans la juste et stricte mesure des idées de 89 : « On vous doit, monsieur, les occasions de vous distinguer ; mais souvenez-vous bien toute votre vie qu’on ne vous doit que cela. » M. 

261. (1862) Portraits littéraires. Tome II (nouv. éd.) « Léonard »

Il y a là, pour les noms qui survivent, un âge intermédiaire, ingrat, qui ne sollicite plus l’intérêt et appelle plutôt une sévérité injuste et extrême, à peu près comme, pour les vivants, cet espace assez maussade qui s’étend entre la première moitié de la vie et la vieillesse. […] Parmi la foule des noms, aujourd’hui oubliés, qui se firent remarquer par l’élégance et la douceur des imitations, Léonard fut le premier en date et en talent, Berquin le second. […] C’est la gloire propre de Bernardin de Saint-Pierre d’avoir, le premier, reproduit et comme découvert ce nouveau monde éclatant, d’en avoir nommé par leur vrai nom les magnificences, les félicités, les tempêtes, dans sa grande et virginale idylle. […] Pour Léonard, cette île avait un nom ; il y alla, il en revint, il y retourna pour en revenir encore. […] Lorsque tant d’autres assistent et survivent à l’affaiblissement de leur sensibilité, à la déchéance de leur cœur, il resta en proie au sien, et son nom s’ajoute, dans le martyrologe des poëtes, à la liste de ces infortunes fréquentes, mais non pas vulgaires.

262. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XXXII » pp. 355-377

. — Le roi donne, pour la première fois, à madame Scarron, le nom de madame de Maintenon. — Prédications du P.  […] « Il est très vrai », écrit-elle, le 6 février, à madame de Coulanges, « que le roi m’a nommée madame de Maintenon et que j’ai eu l’imbécillité d’en rougir, et tout aussi vrai que jamais de plus grandes complaisances pour lui que de porter le nom d’une terre qu’il m’a donnée. » Ce nom échappé au roi comme un mot dès longtemps usité, cette rougeur de celle qui le reçoit pour la première fois, cette expression d’étonnement et de reconnaissance, qu’aucun autre bienfait antérieur ne paraît avoir excité dans madame de Maintenon, montrent qu’elle sentit à l’instant tout ce que renfermait de bon pour elle cette substitution d’un nom nouveau à celui qu’elle portait. En effet, ce n’était pas une vaine et frivole distinction accordée à la vanité ; c’était un baptême nouveau qui, mettant en oubli un nom sous lequel elle pouvait se plaindre d’avoir souffert des humiliations, pour lui en donner un autre, annonçait le dessein de faire d’elle, ou plutôt que le roi voyait déjà en elle une autre personne sous cet autre nom et marquait l’époque d’une existence plus élevée. […]   L’année 1675 peut se résumer ainsi : Elle commence par la manifestation de la bienveillance royale, exprimée par le changement du nom de Scarron en celui de madame de Maintenon.

263. (1870) Nouveaux lundis. Tome XII « Madame Desbordes-Valmore. » p. 232

Le nom de Mme Dorval revient plus d’une fois entre elles deux. […] Ces noms se rencontrent plus d’une fois, et à des degrés différents, dans la correspondance. […] Auber que ce grand nom, toujours plus cher, m’a fait pleurer comme l’hymne du Sommeil dans la Muette… Je garderai donc cette carte, qui me touche et qui m’honore. […] Je crois qu’excepté lui, aucun des noms célèbres du temps ne manque à sa couronne poétique. […] J’avais songé, par une sorte de compensation bien due, à réunir d’autre part autour d’elle quelques-uns des noms dont elle eut le plus à se louer, bon nombre des êtres bienfaisants et secourables qu’elle avait rencontrés sur sa route, et qui lui avaient été une consolation, une douceur et un réconfort au milieu de ses maux ; — et M. 

264. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Lamartine — Lamartine »

Après les Cent-Jours, Lamartine ne reprit point de service : une passion partagée, dont il a éternisé le céleste objet sous le nom d’Elvire, semble l’avoir occupé tout entier à cette époque. […] Le nom de l’auteur, qui ne se trouvait pas sur la première édition, devint instantanément glorieux : mille fables, mille conjectures empressées s’y mêlèrent. […] Lorsqu’il revint au commencement de 1830 pour sa réception à l’Académie française et pour la publication de ses Harmonies, il fut agréablement étonné de voir le public gagné à son nom et familiarisé avec son œuvre. […] Le roman n’a pas disparu, la nacelle flotte toujours ; mais nous sommes à Ischia, mais ce n’est plus le nom d’Elvire que la brise murmure. […] La Mort de Socrate et surtout le Dernier Chant d’Harold sont d’admirables méditations encore, avec un flot qui toujours monte et s’étend, mais avec l’inconvénient grave d’un cadre historique donné et de personnages d’ailleurs connus : or, Lamartine, le moins dramatique de tous les poëtes, ne sait et ne peut parler qu’en son nom.

265. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Victor Hugo — Victor Hugo en 1831 »

Mais, à part cette velléité d’orgueil national qui se prenait à un nom, ses vœux et ses penchants, d’accord avec tout ce qu’il entendait autour de lui, étaient pour l’ordre nouveau. […] En 1816, après la seconde Restauration, Victor composa, dans ses moments de loisir, une tragédie classique de circonstance sur le retour de Louis XVIII, avec des noms égyptiens : elle avait pour titre Irtamène. […] Il y écrivit une foule de vers politiques et d’articles critiques qui n’ont jamais été reproduits et qu’il est difficile aujourd’hui de reconnaître sous les initiales diverses et les noms empruntés dont les signait l’auteur. […] Je recommanderai encore plusieurs articles sur Walter Scott, un sur Byron, un sur Moore, un sur les premières Méditations poétiques qui avaient paru d’abord sans nom d’auteur. […] Je n’exagère pas ; il y avait des formules de tendresse, des manières adolescentes et pastorales de se nommer ; aux femmes, par exemple, on ne disait madamequ’en vers ; c’étaient des noms galants comme dans Clélie .

266. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « M. J. J. AMPÈRE. » pp. 358-386

Ampère, le gros du public sérieux s’en peut faire une idée aujourd’hui par les excellents volumes qui divulguent, aux yeux de tous, les fruits de sa méthode et de ses recherches ; une entreprise ainsi produite fonde à l’instant ou confirme un nom. […] Le résultat, c’est qu’il n’oublie rien ; il serre si bien son réseau géographique qu’il prend tous les faits et que tout ce qui a nom y passe. […] Ces tristes résidus de l’expérience ironique ne méritent pas même le nom de résultats ; ce sont encore moins des matières à enseignement et des aiguillons. […] Ces religieux estimables ont la critique des textes, celle des dates et des noms ; mais la critique des idées ou du goût, ils ne s’en doutent que peu ou s’en abstiennent. […] Dans un temps où il y aurait encore une Anthologie française, une seule pièce pareille suffirait pour y marquer un nom.

267. (1911) La valeur de la science « Première partie : Les sciences mathématiques — Chapitre III. La notion d’espace. »

Donner aux côtés des premiers le nom de droites, c’est adopter la géométrie euclidienne ; donner aux côtés des derniers le nom de droites, c’est adopter la géométrie non-euclidienne. De sorte que, demander quelle géométrie convient-il d’adopter, c’est demander ; à quelle ligne convient-il de donner le nom de droite ? […] D’un autre côté, je ne puis dire non plus que je n’ai pas le droit de donner le nom de droites aux côtés des triangles non-euclidiens, parce qu’ils ne sont pas conformes à l’idée éternelle de droite que je possède par intuition. […] Pourquoi aurai-je le droit d’appliquer le nom de droite à la première de ces idées et pas à la seconde ? […] L’étude de ces propriétés est l’objet d’une science qui a été cultivée par plusieurs grands géomètres et en particulier par Riemann et Betti et qui a reçu le nom d’Analysis Situs.

268. (1920) La mêlée symboliste. I. 1870-1890 « Les poètes décadents » pp. 63-99

Baju, né dans la Charente, était venu depuis peu à Paris, poussé par l’ambition de s’y faire un nom. […] Tous les noms d’amis, même les plus étrangers à la littérature, y passaient, à leur grand étonnement. […] Comme s’il avait voulu se targuer d’un joug secoué, son nom, sur la couverture jaune, s’étalait en plus gros caractères, mais la France littéraire rendit l’âme après trois ou quatre numéros ! […] Il la taquina si bien, cette oreille, ce nom d’un artiste suprême, de qui j’ai dit, d’ailleurs, qu’il considérait la clarté comme une grâce secondaire, qu’une assez plaisante confusion commença de régner. […] Rien ne ressemblait moins à sa manière, sauf peut-être les deux quatrains du dernier sonnet, mais les falsificateurs avaient beau jeu, puisque, un petit lot de lettrés mis à part, Rimbaud n’était encore connu que de nom.

269. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Œuvres de Condorcet, nouvelle édition, avec l’éloge de Condorcet, par M. Arago. (12 vol. — 1847-1849.) » pp. 336-359

J’ai cru d’abord que c’était une simple faute d’impression ; mais voyant ce nom de d’Arnaud revenir à deux reprises, et reparaître le même dans les différentes éditions de l’Éloge, j’ai été forcé de reconnaître, à ma grande surprise, que celui qu’on appelait, au xviie  siècle, le grand Arnauld, était bien moins connu, au xixe , en pleine Académie des sciences, et que son nom s’y confondait insensiblement, et sans qu’on s’en rendît bien compte, avec celui de d’Arnaud (Baculard). […] Une analyse bien faite des lettres de Condorcet à Voltaire et à Turgot dégagerait de plus en plus cette veine maligne : ses jugements sur Buffon, sur le maréchal du Muy (pour prendre des noms bien opposés), et sur bien d’autres, sont imprégnés d’acrimonie et décèlent une injustice, une prévention profonde. […] André Chénier, témoin des mêmes actes, et jugeant Condorcet dans la mêlée comme un transfuge de sa cause, de la cause des honnêtes gens, s’écriait : C…, homme né pour la gloire et le bien de son pays, s’il avait su respecter ses anciens écrits et su rougir devant sa propre conscience ; homme dont il serait absurde d’écrire le nom parmi cet amas de noms infâmes, si les vices et les bassesses de l’âme ne l’avaient redescendu au niveau ou même au-dessous de ces misérables, puisque ses talents et ses vastes études le rendaient capable de courir une meilleure carrière ; qu’il n’avait pas eu besoin, comme eux, de chercher la célébrité d’Érostrate, et qu’il pouvait, lui, parvenir aux honneurs et à la fortune, dans tous les temps où il n’aurait fallu pour cela renoncer ni à la justice, ni à l’humanité, ni à la pudeur. […] Cette fin malheureuse et les circonstances touchantes qui l’accompagnèrent, le long deuil, le mérite et la beauté de sa noble veuve, cette pitié et cette indulgence mutuelle dont chacun avait besoin après tant d’erreurs et tant d’excès, ont pu recouvrir les torts de ses dernières années et faire remonter peu à peu son nom au rang d’où il n’aurait jamais dû le laisser déchoir. […] Que ces personnes prennent la peine d’ouvrir la Chronique de Paris aux dates indiquées, et elles y verront tous ces articles signés en toutes lettres de son nom.

270. (1864) William Shakespeare « Conclusion — Livre I. Après la mort — Shakespeare — L’Angleterre »

Cette terre, jetée sur un homme, crible son nom, et ne laisse sortir ce nom qu’épuré. […] Rien pour Shakespeare, rien pour Milton, rien pour Newton ; le nom de Byron est obscène. […] Comment vous y prendrez-vous pour faire une tour aussi haute que ce nom : Shakespeare ? […] L’Angleterre commence à épeler ce nom, Shakespeare, sur lequel l’univers lui a mis le doigt. […] cette exclamation de Shallow fut retranchée de l’édition de 1623, conformément au statut qui interdisait de prononcer le nom de la divinité sur la scène.

271. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Première partie — Section 35, de la mécanique de la poësie qui ne regarde les mots que comme de simples sons. Avantages des poetes qui ont composé en latin sur ceux qui composent en françois » pp. 296-339

Mais les latins déclinent leurs mots de maniere que la désinance ou la terminaison seule du nom marque le cas où il est emploïé. […] Ainsi les latins déclinent leurs noms sans le secours des articles le, du, etc. Que nous sommes obligez d’emploïer en déclinant les noms françois, parce que nous n’en changeons pas la desinance suivant le cas. […] Le latin conjugue encore ses verbes comme il décline ses noms. […] Mais suivant notre construction le cas d’un nom ne sçauroit être marqué distinctement dans une phrase, qu’à l’aide de la suite naturelle de la construction, et par le rang que le mot y tient.

272. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — H — Hugo, Victor (1802-1885) »

Hugo ; vienne l’homme qui inscrira son nom sur la colonne de la Révolution après ceux de Mirabeau et de Napoléon ! […] Aussi désirai-je que votre nom glorieux aide à la victoire de cette œuvre que je vous dédie, et qui, selon certaines personnes, serait un acte de courage autant qu’une histoire pleine de vérité. […] Sur une page blanche, son nom : « Victor Hugo ». […] Caro L’hommage le plus digne d’un grand poète n’est-ce pas l’obole offerte aux pauvres en son nom ? […] Ce qu’on peut dire dès à présent, avec assurance, c’est que tous les temps nous envieront l’avènement et le règne, la présence et l’influence vivante d’un tel poète, et que tout un côté de notre siècle portera son nom.

273. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « MADAME DE CHARRIÈRE » pp. 411-457

Elle était Hollandaise ; il faut oser dire tous ses noms. […] quel nom, grand Roi, quel Hector que ce Wurts ! […] Il y a deux ou trois noms que j’entends prononcer sans cesse. […] Il y a un autre nom qui est commun à un maçon, à un tonnelier, à un conseiller d’État. […] Amsterdam, petit in-12 de 119 pages, sans nom d’auteur.

274. (1870) Portraits contemporains. Tome IV (4e éd.) « APPENDICE. — LEOPARDI, page 363. » pp. 472-473

Les poëtes anglais, tels que William Cowper, ou ceux qu’on a compris sous le nom de Lakistes, offrent à chaque page des pièces dans ce genre moral, familier, domestique, que j’aurais voulu voir se naturaliser en France, et que j’ai tout fait à mon heure pour y introduire. Voici une de ces moindres pièces imitée de Southey, et adressée à l’un de ses amis qu’il désigne sous le nom de William, et qui était athée comme le Wolmar de la Nouvelle Héloïse, ce qui m’a fait substituer ce dernier nom.

275. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « MÉLEAGRE. » pp. 407-444

Pour prendre des noms significatifs, elle a dû cheminer, comme entre deux feux, entre les Scaliger et les Fontenelle. […] Pourtant, lorsque je lis ces noms nouveaux de Rufinus, de Paul le Silentiaire, du consul Macédonius et de bien d’autres, je me sens toujours en garde ; malgré le dédain persistant et la prévention bien établie du goût grec contre l’influence romaine, je ne puis m’empêcher de soupçonner le mélange. […] dis, mêle ce doux nom au pur nectar. […] En France, les personnes même instruites (hors du cercle de l’érudition) sont trop accoutumées à ne juger l’antiquité que sur quelques grands noms qui reviennent sans cesse, qu’on cite à tout propos et qu’on croit connaître. […] Cette épigramme ne porte pas le nom d’Héliodora, mais elle est toute pareille à d’autres où cette maîtresse est nommée, et dont elle peut tenir lieu.

276. (1865) Cours familier de littérature. XIX « CXIIe entretien. La Science ou Le Cosmos, par M. de Humboldt (1re partie). Littérature scientifique » pp. 221-288

Le vrai nom de Mme d’Holwede était Mlle de Colomel, du nom d’une famille française de la Bourgogne réfugiée en Allemagne après la révocation de l’édit de Nantes. […] À son retour, il quitta le château de Tégel, pour aller fonder à Hambourg l’institut d’enseignement qui a rendu son nom populaire. […] La pompe des noms relève l’inanité des découvertes : major e longinquo, c’est son seul résultat. […] Dieu lui-même aurait pu faire scandale, s’il en eût proféré tout haut le nom. […] Voici la lettre que ce savant écrivit à l’instant à M. de Humboldt pour écarter de son nom ces suspicions offensantes.

277. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XIV » pp. 126-174

Avant cette époque elle avait fait des romans, mais elle sciait bien gardée de les publier sous son nom. En 1641, elle fait paraître, sous le nom de Georges de Scudéry, son frère, Ibrahim ou L’Illustre Passa. En 1650 encore, elle publia, toujours sous le nom de son frère, Artamène ou Le Grand Cyrus, en 10 vol. Mais quand sa ruelle fut bien accréditée, elle publia sous son nom le roman de Clélie, en 1656, 1658, 1660. […] C’est certainement bien elle qu’il a voulu désigner par le nom propre de Madelon, et par le nom usurpé de Polixène ; mademoiselle de Scudéry se nommait Madeleine, et son nom du Parnasse était Sapho.

278. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « De la poésie de la nature. De la poésie du foyer et de la famille » pp. 121-138

Afin d’éviter les considérations générales et trop vagues, je m’attacherai tout d’abord à des noms connus, et prenant Saint-Lambert, l’auteur des Saisons, je me rendrai compte de son insuffisance autrement encore que par le talent ; puis je toucherai rapidement à Delille, et seulement par ce côté ; choisissant, au contraire, chez nos voisins, le poète qui, non pas le premier, mais avec le plus de suite, de force originale et de continuité, a défriché ce champ poétique de la vie privée, William Cowper, j’aurai occasion, chemin faisant, de rencontrer toutes les remarques essentielles et instructives. […] Roucher, que j’ai nommé, et qui laissera du moins son nom pour être mort le même jour et sur le même échafaud qu’André Chénier, serait plus fait pour sentir cette sorte de douceur et de charme. […] Cette originalité, jointe aux vertus et aux qualités morales les plus fines qui sont l’âme de cette poésie, se rencontre au plus haut degré en un poète anglais bien connu de nom, mais trop peu lu en France, et dont je voudrais présenter une idée précise et vive, par opposition aux divers noms que je viens de passer en revue. […] Vous, Tircis, Alexis (ou quel que soit le nom qui puisse le moins offenser une flamme si belle), bien que les sages conseils de l’ami le plus sincère sonnent rudement à des oreilles si délicates, et qu’un amant soit, de toutes les créatures sauvages ou apprivoisées, celle qui endure le moins un contrôle, même le plus doux ; souffrez cependant qu’un poète (la poésie désarme les animaux les plus féroces par ses charmes magiques), souffrez qu’un poète ose, par ses conseils, troubler votre rêverie, et qu’à son tour il vous courtise et vous conquière pour votre propre bien. […] La farce elle-même, tristement à sec, a recours à l’assistance de la musique ; les romans-nouvelles (témoin les revues de chaque mois) mentent à leur nom et n’offrent plus rien de nouveau.

279. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « Les frères Le Nain, peintres sous Louis XIII, par M. Champfleury »

Mais encore est-il plus sûr de laisser un nom collectif, le simple nom de famille, à leurs tableaux, et, sans qu’ils aient dû être pour cela collaborateurs, de leur appliquer cette belle devise de concorde et d’union, qui se lit au mur d’un ancien château du Midi, bâti par des frères : … Constans fecit concordia fratrum. […] Leur tableau chef-d’œuvre, et qui suffirait à consacrer leur nom, est celui de la Forge qu’on voit au Louvre. […] Un autre de leurs chefs-d’œuvre, s’il était effectivement d’un des Le Nain, ce serait la Procession d’un prélat en grand costume, accompagné de son clergé, dans une espèce de chapelle ou de sanctuaire ; mais la richesse, la chaleur des tons, le magnifique et l’étoffé de l’ensemble, tout ce lustre de premier aspect, ont paru trop forts pour les modestes Le Nain, et l’on a généralement, dans ces dernières années, retiré leur nom à cette toile, sans pouvoir indiquer auquel des peintres flamands ; ou peut-être italiens, on l’attribuerait. […] Su l’ bord du Cher, il v’a-t-une fontaine Où sur un frên’ nos deux noms sont taillés ; L’ temps a détruit nos deux noms sur le frêne… Mais dans nos cœurs il les a conservés. […] Et si, en ressouvenir de toutes ces questions de réalité et de réalisme qui se rattachent à son nom, on voulait absolument de moi une conclusion plus générale et d’une portée plus étendue, je ne me refuserais pas à produire toute ma pensée, et je dirais encore : Réalité, tu es le fond de la vie, et comme telle, même dans tes aspérités, même dans tes rudesses, tu attaches les esprits sérieux, et tu as pour eux un charme.

280. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « Œuvres complètes de Molière »

Molière, on le sait, né probablement la veille, a été baptisé à Saint-Eustache le 15 janvier 1622, sous le nom de Jean ; il précisa depuis ce nom en s’appelant Jean-Baptiste. […]  » Le centre d’un panneau est occupé par un de ces meubles en forme de buffet, si recherchés aujourd’hui, dans lesquels on renfermait les objets les plus précieux et qu’on désignait sous le nom de cabinet ; celui de Marie Cressé est en bois de noyer marbré, à quatre portes ou guichets fermant à clef, et « garni par dedans de satin de Bruges. […] On a les noms de tous ces fils de famille que l’amour du plaisir et la passion de l’art associent dans une entreprise commune, assez brillante au début, mais tournant vite à la ruine. […] Un honnête homme, dont le nom s’est conservé, Léonard Aubry, paveur des bâtiments du roi, se porta caution en sa faveur pour la somme de trois cent vingt livres et hâta l’heure de la délivrance. […] On y mettrait une école de dessin ou une salle d’asile, et les enfants du quartier viendraient y étudier ou y apprendre à lire sous l’invocation de ce nom illustre et trois fois populaire.

281. (1858) Cours familier de littérature. V « XXVe entretien. Littérature grecque. L’Iliade et l’Odyssée d’Homère » pp. 31-64

Il en eut une fille unique, à laquelle il donna le nom de Crithéis ; il perdit bientôt sa femme, et, se sentant lui-même mourir, il légua sa fille, encore enfant, à un de ses amis qui était d’Argos, et qui portait le nom de Cléanax. […] Crithéis, portant dans son sein celui qui couvrait alors son front de honte, et qui devait un jour couvrir son nom de célébrité, reçut asile à Smyrne chez un parent de Cléanax, né en Béotie et transplanté dans la nouvelle colonie grecque ; il se nommait Isménias. […] C’est de ce jour que le ruisseau obscur qui serpente entre les cyprès et les joncs autour du faubourg de Smyrne a pris un nom qui l’égale aux fleuves. […] Ce nom, qu’on donnait familièrement à Homère, veut dire enfant de Mélès, en mémoire des bords du ruisseau où il était né. […] Et maintenant quelle fut l’influence d’Homère sur les mœurs des hommes, et en quoi mérita-t-il le nom de moraliste ?

282. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Florian. (Fables illustrées.) » pp. 229-248

Son nom de famille était Claris ; il naquit en 1755 dans les basses Cévennes, non loin d’Anduze, au château de Florian qu’avait fait bâtir son grand-père. […] Voltaire fut enchanté de sa gentillesse, de ses grands yeux spirituels, de ses reparties vives, de sa gaieté naturelle, et ce grand donneur de sobriquets le baptisa du premier jour Florianet, nom qui était tout un horoscope. […] On n’attend pas que j’entre dans de grands détails sur ce genre fade et faux auquel est attaché le nom de Florian. […] Gessner, le duc de Penthièvre et Voltaire, le nom de Florian trouvait moyen d’associer toutes ces nuances. […] Mais c’est à ses Fables seulement que je veux m’attacher, car c’est par là uniquement, et par son Théâtre, que son nom mérite aujourd’hui de vivre.

283. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Boileau. » pp. 494-513

 » M. le Prince, charmé de ce début, embrassa l’orateur sans le laisser achever ; il demanda son nom, et quand on lui eut dit que c’était le frère de M.  […] Le dessein critique et poétique de Boileau se définirait très bien en ces termes : amener et élever la poésie française qui, sauf deux ou trois noms, allait à l’aventure et était en décadence, l’amener à ce niveau où Les Provinciales avaient fixé la prose, et maintenir pourtant les limites exactes et les distinctions des deux genres. […] — Et dans ces noms qui suivent, et qui ne semblent d’abord qu’une simple énumération, quel choix, quelle gradation sentie, quelle plénitude poétique ! […] Mais dans le nom de Montausier, qui vient le dernier à titre d’espoir et de vœu, la malice avec un coin de grâce reparaît. […] Dans l’intervalle, une seconde place vint à vaquer ; l’Académie y porta Despréaux, et, son nom étant présenté au roi, Louis XIV dit aussitôt « que ce choix lui était très agréable et serait généralement approuvé : Vous pouvez, ajouta-t-il, recevoir incessamment La Fontaine, il a promis d’être sage ».

284. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Histoire de la Restauration, par M. Louis de Viel-Castel » pp. 355-368

La raison en est simple : un hasard, une surprise, une catastrophe imprévue suffit pour reporter sur le trône des princes dont le nom parle encore à bien des imaginations qui se tournent naturellement vers eux dans un jour de crise ; mais, pour s’y maintenir, pour faire une juste part entre les intérêts et les principes dont ils sont les représentants et ceux qui se sont créés sans eux ou contre eux, pour se concilier, pour rassurer la masse de la population qui, s’étant momentanément attachée à un autre drapeau, ne peut les voir revenir qu’avec crainte et défiance, il faut un mélange d’intelligence, de sagacité, de fermeté et d’adresse que bien peu d’hommes ont possédé, comme Henri IV, au degré suffisant69. […] Ferrand, un des membres du ministère, et l’esprit certainement le plus à contretemps, le plus fermé à toute idée saine, venant présenter à la chambre des députés un projet de loi relatif aux biens non vendus des émigrés, s’avisa de partager tous les Français en deux catégories : 1° la portion des sujets du roi désignés par le nom d’émigrés, et 2° ceux qui n’avaient pas émigré et qu’il embrassait sous la dénomination de régnicoles. Il voulait bien, d’ailleurs, ne point parler trop injurieusement de ceux-ci, des 25 millions d’hommes qui formaient la masse de la nation : « Il est bien reconnu, disait-il, que les régnicoles, comme les émigrés, appelaient de tous leurs vœux un heureux changement, lors même qu’ils n’osaient pas encore l’espérer. » Ainsi, Français de 1792 qui couriez à la frontière, vous qui sauviez la patrie menacée, vous qui, à la suite des armées refoulées de la coalition, passiez le Rhin et l’Escaut et les Alpes, qui combattiez à Rivoli, à Zurich, aux pyramides et autres lieux, vous étiez des régnicoles ; il est bon de savoir le nom qu’on a. […] [NdA] Une petite querelle que je veux faire à M. de Viel-Castel, et qui retombe en partie sur son imprimeur, c’est de ne pas soigner les noms propres ; ils sont véritablement trop maltraités et en trop d’endroits de ces deux premiers volumes. […] Bédoch n’a jamais été un nom illustre, mais où apprendra-t-on à bien prononcer ce nom estimable, sinon dans les comptes rendus de la session de 1814 ?

285. (1858) Cours familier de littérature. V « Préambule de l’année 1858. À mes lecteurs » pp. 5-29

Trois sortes de journaux, qui ne paraissaient pas destinés par leur nature à se faire écho l’un à l’autre, se signalent par plus d’acharnement contre ce qui porte mon nom : Un journal d’exagération religieuse, qui donnerait la tentation d’être impie si l’on ne respectait pas la piété jusque dans les aberrations du zèle ; Les revues et les journaux des partis de 1830, qui ne pardonnent pas leurs revers à ceux qui ont préservé la France et eux-mêmes des contrecoups de leur catastrophe ; Enfin un journal de sarcasme spirituel, à qui tout est bon de ce qui fait rire, même ce qui ferait pleurer les anges dans le ciel : la dérision pour ce qui est à terre. […] Vous nous apostrophez en ricanant du nom dérisoire de Sylla d’un jour ! […] Ce que nous trouvons de plus amer dans les disgrâces de la fortune, c’est précisément d’être contraint à laisser retentir le nom quand l’homme a disparu. […] c’est différent ; plût à Dieu que nous en eussions recueilli juste assez pour pouvoir retirer, sans remords, cette partie de nous-même qu’on appelle notre nom de cette dure, quoique honorable servitude, qui nous expose tous les jours à ces fastidieux retentissements et à ces odieuses interprétations de la publicité ! […] Mais la postérité seule appelle les choses par leur vrai nom ; les contemporains les appellent par le nom qui les déshonore.

286. (1892) Boileau « Chapitre III. La critique de Boileau. La polémique des « Satires » » pp. 73-88

Mais d’abord les honnêtes gens ne comprirent pas, d’autant que cette impartiale critique s’annonçait sous le nom de Satire. […] Mais le reste avait nom Charpentier, Saint-Amant, Desmarets, Scudéry, Cotin, Chapelain ; et sauf Charpentier, jeune encore et de moindre renom, c’étaient les maîtres de la littérature d’alors. […] Au reste, les ennemis de Boileau ne perdirent rien à sa modération : sans leur répliquer directement, il ne manqua jamais, quand une épître ou une épigramme ou n’importe quel ouvrage en vers ou en prose semblaient appeler leurs noms ou se prêter à les recevoir, de leur régler leur compte en deux mots, et de façon qu’ils lui en redevaient encore. […] Toujours ce qu’il a loué, quoi que ce fût, était meilleur que ce qu’il censurait, ce qu’il rêvait que ce qu’il rejetait ; et le plus chaleureux avocat de ses victimes, après tout, n’a pu trouver pour désigner leur groupe que ce nom, plus sanglant que toutes les railleries du satirique : les Grotesques. […] Chapelain et Despréaux : ces deux noms semblent jurer d’être rapprochés ; et cependant pour la postérité, qui voit de haut, ces deux irréconciliables ennemis sont les ouvriers de la même œuvre.

287. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — L — Leconte de Lisle, Charles-Marie (1818-1894) »

Leconte de Lisle, destructeur impitoyable de ses propres idoles, semble avoir voulu écrire l’apocalypse du paganisme, aboutissant au vide, aux ténèbres, au chaos, à un je ne sais quoi qui n’a plus de nom dans aucune langue, comme dit Bossuet, un pauvre radoteur indigne de desservir les autels de Zeus, de Kronos, d’Artémis et de Bhagavat ! […] Mais va pour Érinyes : le nom ne fait rien à la chose ; il ne s’agit que de s’entendre. […] Leconte de Lisle, dont le nom est peu répandu dans la bourgeoisie, est fort connu des lettrés pour son volume des Poèmes barbares, pour ses traductions d’ […] Il est le chef avoué d’une pléiade de jeunes poètes, dont plusieurs ont un nom. […] C’est à cette préoccupation qu’il faut attribuer les affectations de noms changées qui ont légèrement surpris le public et qui n’ont pas laissé de faire croire à un accès de charlatanisme.

288. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Cours de littérature dramatique, par M. Saint-Marc Girardin. (2 vol.) Essais de littérature et de morale, par le même. (2 vol.) » pp. 7-19

Il y a bien dix-huit ans qu’il est monté pour la première fois en chaire, si l’on peut appeler de ce nom solennel le lieu d’où il cause si familièrement et si à son aise. […] Même dans la décadence de l’art, des rhéteurs tels que Longin (ou celui qu’on a désigné sous ce nom) ont une justesse sévère et d’admirables développements. […] Le nom d’Aristarque, le maître en ce genre de sagacité grammaticale, est passé en circulation à l’état de type, et signifie l’oracle même du goût. […] Le nom de Quintilien suffit pour exprimer, dans l’ordre critique, le modèle du scrupuleux, du sérieux, de l’attentif, l’idée du jugement même. […] Saint-Marc Girardin m’excusera donc de lui dire, à côté de ces deux beaux noms, que, lui aussi, il est de son temps, et d’en chercher en lui la marque.

289. (1905) Les œuvres et les hommes. De l’histoire. XX. « Léon XIII et le Vatican »

Et quelque nom qu’il porte et à quelque date qu’il soit entré dans la chronologie papale, c’est la Papauté elle-même tout entière, dans sa plénitude souveraine et son action universelle. Pour Louis Teste comme pour nous, Léon XIIl est le pape, sous un nom qui n’est, en ce moment, qu’un nom, — le nom d’un pontife de plus, qui n’a pas encore d’exergue autour de sa médaille, et dont le visage, inconnu hier à la chrétienté, ne laisse passer — ferme et discret — que ce qu’il veut de ses projets et de sa pensée. […] En restant dans l’ordre purement humain de la logique, cette biographie est évidemment une promesse, et qui ne sera suivie d’aucune surprise, car, avant d’être Léon XIII, celui qui porte maintenant ce nom a, toute sa longue vie, montré l’aptitude la plus haute, la plus appliquée et la plus soutenue au gouvernement moral et politique des hommes. […] Je sais bien qu’il y a la lâche rubrique de « l’Église libre dans l’État libre », que les hypocrites, qui n’y croient pas, débitent aux imbéciles qui y croient, mais ce n’est là qu’une pierre d’attente, que le radicalisme, qui, comme son nom le dit, doit en finir avec les racines de tout, saura bien jeter un jour à la tête de la Papauté !

290. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre XXI. De Thémiste, orateur de Constantinople, et des panégyriques qu’il composa en l’honneur de six empereurs. »

Il s’en faut beaucoup que notre Montesquieu, dont le nom est aujourd’hui si cher à l’Europe entière, et qui influe sur la législation, de Londres à Pétersbourg, ait reçu, de son vivant, la vingtième partie de ces honneurs. […] Princes, s’il nous arrive de vous donner le nom de dieu, c’est pour vous faire souvenir de ce que vous devez être. […] Crois-tu, malgré leurs victoires, que leurs noms fussent aussi célèbres, si, terribles aux barbares, ils n’eussent été bienfaisants envers leurs sujets ? […] Un autre s’appela Macédonien, parce qu’il avait fait de la Macédoine un vaste désert ; mais toi, prince, je veux que tu tires ton nom de la nation que tu as sauvée ; ainsi nous nommons les dieux, des pays qu’ils protègent. » Outre l’humanité et la clémence qui sont les premiers devoirs, l’orateur parcourt toutes les autres qualités du prince. […] Prince, s’écrie l’orateur, puisqu’il a rejeté la clémence du tyran, il a droit à la tienne. » Il l’invite à conserver les semences et les restes épars des connaissances et des lettres : « Ce sont elles qui font la gloire d’un siècle et d’un empire ; c’est donc à elles qu’il faut confier le souvenir immortel de ton nom. » Alors il lui fait observer que tant qu’il y aura des hommes sur la terre, il y en aura qui cultiveront la philosophie et les arts ; ce sont eux qui font la renommée : ils se transmettent de siècle en siècle les noms de leurs bienfaiteurs, et ces bienfaiteurs sont immortels comme leur reconnaissance.

291. (1863) Molière et la comédie italienne « Chapitre XV. La commedia dell’arte au temps de Molière et après lui (à partir de 1668) » pp. 293-309

D’abord quelques changements eurent lieu dans le personnel de la troupe : Mario Antonio Romagnesi, fils de Marc Romagnesi et de Brigida Bianchi (Aurelia), débuta dans les seconds rôles d’amoureux sous le nom éclatant de Cintio del Sole. […] Le Livre sans nom, qui parut en 1695 et qui est attribué à Cotolendi, contient le passage suivant : « Si les comédiens italiens n’eussent jamais paru en France, peut-être que Molière ne serait pas devenu ce qu’il a été. […] Il paraît que ce nom rappela aux Italiens leur ancien type, si important sur le théâtre des Gelosi. […] Les deux filles de Dominique, Françoise et Catherine Biancolelli débutèrent en 1683, l’une comme première amoureuse sous le nom d’Isabelle, l’autre comme soubrette sous le nom de Colombine.

292. (1906) Les œuvres et les hommes. À côté de la grande histoire. XXI. « Deux diplomates »

Puis, encore, ç’a été les Mémoires de Metternich, qui ont trompé si misérablement l’espoir de l’intérêt immense qui s’attachait à ce grand nom de Metternich. […] Il devait bien cela à son nom ! […] Aussi est-ce sous la lumière attirante de ce nom de Donoso Cortès qu’on a placé avec intelligence le nom moins lumineux de Raczynski, pour qu’il pût bénéficier de cette lumière et qu’on vit mieux qu’il était digne de la partager. […] C’est cette amitié de Raczynski, de ce petit-fils de tant de Starostes et de Castellans, pour l’homme qui pouvait dédaigner son titre de marquis de Valdegamas, parce que son nom était Cortès, c’est cette amitié qui fait le prix et l’intérêt de ce volume, intitulé : Deux Diplomates 52, mais ce n’est, certes !

293. (1905) Les œuvres et les hommes. De l’histoire. XX. « La Révolution d’Angleterre »

Sous ce modeste titre d’Études biographiques sur la Révolution d’Angleterre 6, Guizot a publié un volume d’histoire qui aurait bien eu le droit, à ce qu’il me semble, quand on pense au nom et au talent de l’auteur, de porter un titre plus orgueilleux. […] Tisserands ignorés qui ont travaillé à la trame de l’histoire de leur pays, sur laquelle ils brodèrent les noms des hommes plus grands qu’eux, Guizot les a étudiés comme les plus grands, tant il est vrai que rien n’est à mépriser dans l’Histoire ! […] Déchiffrer la vérité d’une époque sans se servir des noms écrits dans le dictionnaire de la gloire, c’est lire aussi bien dans l’obscurité que dans la lumière, c’est avoir la vue complète, et, endroit et envers de l’histoire, c’est tenir les deux côtés à la fois. […] Il faut être un philosophe en quête de savoir avec quels atomes imperceptibles se font les plus grandes choses, pour se préoccuper au xixe  siècle de personnages aussi oubliés, malgré l’aristocratie de leur race ou l’éclat momentané de leur nom, que le sont aujourd’hui lord Hollis, sir Philippe Warwick, sir Thomas Herbert, sir John Reresby, Sheffield, duc de Buckingham, Thomas May, John Lilburne, Edmond Ludlow, etc. […] Avec les événements et les préoccupations actuelles, que serait un livre signé du plus grand nom, s’il ne se rattachait pas aux préoccupations qui nous tiennent asservis et aux événements qui nous poussent ?

294. (1909) Les œuvres et les hommes. Philosophes et écrivains religieux et politiques. XXV « Vte Maurice De Bonald »

» qu’ils pourraient appeler sublime, mais qu’ils nommeront d’un autre nom, et l’injure, qui atteignit le grand et glorieux Bonald dans des temps funestes, atteindra, dans des temps pires, son descendant. […] C’est un Bonald, et il ne ment pas à son nom. […] quand on a l’honneur de porter le nom de Bonald, on est trop profondément religieux pour ne pas croire aux mystères et aux réserves de la Providence ; seulement, si, comme l’a dit un historien réputé grand, « ce qui corrompt le plus les partis, c’est leur espérance », Maurice de Bonald a voulu, du moins, épargner au sien cette corruption-là. […] Sa politique, à lui, est de l’histoire, et c’est de l’histoire où elle est, c’est-à-dire dans le passé, qu’il invoque, sous le nom de saint Louis et de la reine Blanche, en face de l’histoire telle qu’on veut la faire aujourd’hui sous le nom du comte de Chambord… Pour prendre Maurice de Bonald sur le pied hardi où il se donne, il faut évidemment être un chrétien comme lui, ayant inébranlablement dans l’esprit la conception de la monarchie comme elle a été réalisée depuis Clovis jusqu’à saint Louis, qui en fut l’idéal le plus pur et le plus élevé… Or, cette monarchie n’existait pas en soi et par elle-même.

295. (1866) Dante et Goethe. Dialogues

… étrange association de noms ! […] Et il n’avait pas hésité à écrire, en tête de la liste des exilés, d’une main impartiale et politique, à côté du nom haï de Corso Donati, le chef des Noirs, le nom de son ami le plus cher, de celui qu’il aimait comme un autre lui-même, le nom de Guido Cavalcanti. […] Qu’est-ce que ce nom de Dité ? […] Dante donne à Jésus le nom de Sommo Jove. […] Le premier, il prononce avec vénération ce nom auguste.

296. (1861) Questions d’art et de morale pp. 1-449

Homère est le nom que porte cette révolution. […] C’est par le nom d’Horace, selon nous, que doit être signalée cette transformation. […] Il ne voulut pas que son nom franchît prématurément plusieurs degrés d’initiation à la gloire ; aussi ce nom n’a-t-il rien à craindre du temps. […] qui lui a donné son nom véritable, si ce n’est la philosophie d’Athènes ? […] Les classiques consternés baissent la tête au seul nom de l’ogive.

297. (1892) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Cinquième série « Une âme en péril »

Il faisait des « portraits » comme La Bruyère, avec des noms tirés du grec. […] En voici de littéraires : « Paul de Kock éclabousse la modestie et la pudeur pour faire rire. » « Tacite est merveilleux dans l’antithèse, lorsqu’il n’y est pas ridicule. » En voici de morales : « Peu aiment beaucoup ; beaucoup aiment peu. » « Un despote n’a pas d’amis. » « L’époux qui frappe sa compagne mérite-t-il le nom d’époux ? Je dis plus : mérite-t-il le nom d’homme ?  […] Je ne pouvais croire à tant de bonheur. » Il écrit couramment : « Le chapitre des Paysans est trop célèbre à mon sens, sinon à mon gré », et il parle du « prodigieux retentissement accumulé autour de son nom ».

298. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Première partie — Section 18, que nos voisins disent que nos poëtes mettent trop d’amour dans leurs tragedies » pp. 132-142

L’auteur anglois qui réprend la parole, prétend que nos poëtes, afin de pouvoir mettre de l’amour par tout, ont pris l’habitude de donner le nom d’amour et de passion à l’inclination generale d’un sexe pour l’autre sexe, determinée en faveur d’une certaine personne par quelques sentimens d’estime et de préference. […] Gardez donc de donner ainsi que dans Clelie l’air et l’esprit françois à l’antique Italie, et sous des noms romains faisant notre portrait, peindre Caton galand et Brutus dameret. […] De là sont nées les extravagances de tant d’amans dont la plûpart n’étoient point amoureux ; les uns se sont fait assommer en écrivant le nom des belles qu’ils pensoient aimer sur les murailles des villes assiegées ; d’autres sont allez de vie à trepas pour avoir voulu rompre dans les portes d’une ville ennemie leur lance enrichie des livrées d’une maîtresse qu’ils n’aimoient point, ou qu’ils n’aimoient gueres. […] Telle est l’églogue de Virgile qui porte le nom de Gallus.

299. (1909) Les œuvres et les hommes. Philosophes et écrivains religieux et politiques. XXV « Auguste Nicolas »

., qui encombrent les catalogues de librairie, ne sont que de grossières spéculations faites sur l’ignorance qui veut se décrasser, et dont les autres… de quel nom les nommer, si ce n’est du leur, pour caractériser leur abjecte médiocrité ? […] Auguste Nicolas, effrayé de l’influence d’un nom imposant, même sur les esprits les plus fermes, s’est cru le devoir de répondre à Guizot, et sa réponse, qui s’est grossie de toutes les alluvions d’une donnée féconde et d’un esprit naturellement fertilisant, a été la démonstration de l’impossibilité radicale, absolue, pour le catholicisme, de cette coalition à laquelle il est invité. […] Il a d’autres noms scandaleux et lamentables. […] Le démon n’est, après tout, qu’un ange tombé, et qui a emporté un peu de sa grâce divine dans la poussière… Mais, puisque le nom de Voltaire s’est trouvé là sous notre plume, qu’on nous permette de citer sur lui un mot de Joubert, que nous oserons modifier pour l’appliquer à Nicolas : « Voltaire — dit Joubert — aime la clarté et se joue dans la lumière, mais c’est pour la briser et en disperser les rayons comme un méchant. » Nicolas, lui aussi, aime la clarté et se joue dans la lumière, mais c’est pour en concentrer les rayons et vous les renvoyer dans le cœur, comme un homme bon.

300. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — F. — article » pp. 264-267

Le Roman de Zaïs, qui parut d’abord sous le nom de Segrais, & fut attribué, après la mort de cet Auteur, à Madame de la Fayette, est aujourd’hui la matiere d’un problême. […] Huet, Evêque d’Avranches, c’est au beau sexe qu’il faut en attribuer l’honneur ; & voici les preuves qu’il en donne : « Madame de la Fayette négligea si fort la gloire qu’elle méritoit, qu’elle laissa sa Zaïde paroître sous le nom de Segrais ; mais lorsque j’eus rapporté cette anecdote, quelques amis de Segrais, qui ne savoient pas la vérité, se plaignirent de ce trait, comme d’un outrage fait à sa mémoire. […] Comment imaginer, après cela, qu’il ait eu la malhonnêteté de se donner pour l’Auteur d’un Ouvrage qu’il n’avoit pas fait, & sur-tout d’un Ouvrage composé par une femme dont le nom avoit paru à la tête d’autres Productions moins estimées & moins estimables, telles que la Princesse de Montpensier, les Mémoires de la Cour de France, & Henriette d’Angleterre ?

301. (1913) Essai sur la littérature merveilleuse des noirs ; suivi de Contes indigènes de l’Ouest-Africain français « Contes — XVI. Le dévouement de yamadou havé »

Le dévouement de yamadou havé (Khassonké) Il y a 400 ans environ, des Peuhl descendant de Diâdié, fondèrent un village du nom de Bambéro, qui tire ce nom d’une montagne voisine. […] Il sera tué dans le combat mais, à ce prix, je vous garantis la victoire. » Chacun alors de s’offrir pour ce mortel honneur mais Malick Sy resta inébranlable jusqu’à ce qu’un jeune homme du nom de Mamadou ou (Yamadou) Hâve se fût proposé.

302. (1860) Cours familier de littérature. IX « LIe entretien. Les salons littéraires. Souvenirs de madame Récamier. — Correspondance de Chateaubriand (3e partie) » pp. 161-240

Je vais préparer votre logement et prendre en votre nom possession des ruines de Rome. […] Ce nom nous rappelle à nous-même un souvenir bien fugitif, mais bien ineffaçable des yeux. […] Taylor peut s’y présenter en mon nom, et, moyennant son reçu, on lui comptera 15 000 francs. […] On remarque aussi avec quelle délectation de plume ce nom de Rome revient constamment dans sa phrase. […] Elle avait la passion du nom de M. de Chateaubriand ; elle le voulait aussi grand dans le siècle qu’il était grand dans son cœur.

303. (1862) Cours familier de littérature. XIV « LXXXe entretien. Œuvres diverses de M. de Marcellus (3e partie) et Adolphe Dumas » pp. 65-144

« Quoi qu’il en soit, le nom d’Orphée a mérité de briller sur ces monuments que vous érigez pour le peuple à la mémoire de ses meilleurs amis. […] XIII Au milieu de la rue qui porte aujourd’hui le nom de rue Lamartine, nom qui s’inscrivit de lui-même le lendemain de la victoire de la République conservatrice, en juin 1848, sur les factions liberticides qui voulaient tuer à la fois l’ordre et la liberté, nom qui me fait penser toutes les fois que je passe, même dans ce quartier de petits trafics, au bon sens et au courage du vrai peuple de Paris, s’ouvre une petite rue annexe, montante, tortueuse, mal bâtie, mal pavée, et à laquelle on a laissé par oubli le vieux nom de rue Neuve-Coquenard. […] Mais quel nom te donner, bel oiseau sans mélange, Pur comme les esprits, ailé comme les anges ? […] Les régions qu’habitait Dumas étaient trop hautes pour que son nom y fît ce bruit que nous autres habitants des collines et des plaines nous appelons gloire. […] Il fut faible, et chercha le salut de sa patrie dans un nom qui représentait la force des soldats, cette raison suprême des peuples à qui la raison manque.

304. (1874) Histoire du romantisme pp. -399

Gérard était son nom de baptême. […] Anvers dit Rubens, Amsterdam Rembrandt, Venise Titien, Paul Véronèse, Tintoret ; Séville Murillo, Madrid Velasquez, Londres Reynolds ou Lawrence ; Paris ne peut répondre que Delacroix, et c’est un nom digne de s’inscrire parmi ces noms illustres. […] Devéria, Boulanger, Delacroix, étaient encore des noms d’égale valeur. […] La postérité saura bien leur trouver des noms, comme pour Ruysdaël ou pour Hobbema. […] L’ombre se fit rapidement sur des noms rayonnants naguère et les yeux se tournèrent vers l’aurore qui se levait.

305. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « LOUISE LABÉ. » pp. 1-38

Cette célèbre Lyonnaise a obtenu un honneur que n’ont pas eu bien des noms littéraires plus fastueux, on n’a pas cessé de la réimprimer : l’édition de ses œuvres publiée en 1824, avec notes, commentaires et glossaire, était la sixième au dire des éditeurs, ou plutôt la septième, comme l’a prouvé M. […] Louise Charlin, Charly ou Charlieu (on trouve toutes ces variantes de noms dans des actes authentiques), dite communément Louise Labé, était fille d’un cordier de Lyon ; elle dut naître vers 1525 ou 1526. […] la Cypris n’est pas seulement Cypris, mais elle est surnommée de tous les noms ; c’est l’Enfer, c’est la violence irrésistible, c’est la rage furieuse, c’est le désir sans mélange, c’est le cri aigu de la douleur ! […] Que si l’on nous pressait trop sur cette théorie des Lyonnaises que nous ne croyons que vraie, il serait possible de citer à l’appui, aujourd’hui encore, celui des noms célèbres de femmes qui résume le mieux la grâce elle-même14. […] Dans le privilége du roi daté de mars 1554, elle n’est désignée que sous le simple nom de Louise Labé, sans le nom du mari.

306. (1902) La métaphysique positiviste. Revue des Deux Mondes

Mais quelles sont les questions qui font l’objet de la Métaphysique, si ce ne sont celles mêmes que le Positivisme ne saurait aborder sans manquer aux promesses de son nom ? […] Il le faut, quel que soit le nom dont on les nomme, et en toute indépendance de la convention verbale qui les désigne par tel ou tel signe et tel ou tel son. […] et, d’abord, de la reconnaissance ou de l’aveu que le positivisme en a dû faire, — dont nous avons même vu, sous le nom d’Agnosticisme, sortir une doctrine entière, — quelles sont les conséquences qui ont suivi ? […] Encore aujourd’hui, pour beaucoup de gens, le positivisme est la négation de l’au-delà, la philosophie de la matière, le faux nom du matérialisme. […] Et la métaphysique cessant ainsi d’être un « système fermé », c’est alors qu’elle deviendra vraiment digne de son nom, et de son rôle, qui est de nous conduire par les voies normales de l’intelligence humaine du connu à l’inconnu et de l’inconnu à l’inconnaissable.

307. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Histoire de la littérature française à l’étranger pendant le xviiie  siècle, par M. A. Sayous » pp. 130-145

Le charmant Hamilton, Grimm et Galiani, sont les principaux noms qui se présentent d’abord quand on cherche des exemples de ces parfaits naturalisés. […] Abauzit pour nous n’était qu’un nom, et un nom fastueux. […] … Vénérable et vertueux vieillard, etc. » C’est ainsi qu’était arrivé à la plupart d’entre nous le nom d’Abauzit, bombardé modeste et vertueux par cette apostrophe de Jean-Jacques. […] Ce n’est pas pour rien qu’Abauzit, en patois languedocien, veut dire avisé : l’homme, si vertueux qu’il fût, ne jurait pas avec le nom. […] Il y a un corps d’hommes choisis entre tous les gens d’esprit, entre les plus fameux écrivains de la nation, et qui en prend même le nom comme par excellence, un corps voué à la pureté du discours et à l’éloquence, et qui, par sa supériorité d’esprit, impose aux autres et les règle.

308. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « La comtesse d’Albany par M. Saint-René Taillandier. »

Charles-Edouard, petit-fils du roi d’Angleterre Jacques II, et connu sous le nom de Prétendant, a laissé une trace brillante dans l’histoire. […] Voilà donc les nouveaux époux et conjoints vivant en Italie, à Rome, sous le nom de comte et de comtesse d’Albany ou Albanie (c’était le nom d’un duché d’Écosse, apanage ordinaire des fils cadets de rois). […] Je la revis à Florence en 1807, sous le nom de comtesse d’Albany. […] mais à sa douce et charmante femme qui n’en pouvait mais, il donnait, quand il était ivre, tous les noms injurieux et humiliants, accompagnés de traitements cruels, de coups et une certaine nuit, à la fête de Saint-André qu’il avait célébrée en buvant encore plus qu’à l’ordinaire, il tenta de l’étouffer et de l’étrangler. […] On y parle français : il y a quelques religieuses d’un mérite très-distingué… Votre nom de comtesse d’Albany vous mettra à l’abri de mille tracasseries… » La translation de la comtesse de Florence à Rome se fit avec toutes sortes de précautions.

309. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « Millevoye »

C’est là le sort de Millevoye ; c’est la pensée que son nom harmonieux suggère. […] Millevoye a laissé au courant du flot sa feuille qui surnage ; son nom se lit dessus, c’en est assez pour ne plus mourir. […] La pauvre feuille avait bien voyagé, et le nom de Millevoye s’était perdu en chemin. […] Le nom de Millevoye, si loin que sa feuille voyage, ne peut véritablement s’en séparer. […] rien qu’un denier d’or marqué à mon nom, et qui s’ajouterait à cette richesse des âges, à ce trésor accumulé qui déjà comble la mesure !

310. (1796) De l’influence des passions sur le bonheur des individus et des nations « Section première. Des passions. — Chapitre premier. De l’amour de la gloire »

Pour mériter le nom de passion, il faut qu’il absorbe toutes les autres affections de l’âme, et ses plaisirs comme ses peines n’appartiennent qu’au développement entier de sa puissance. […] La vertu, j’en conviens, sait jouir d’elle-même ; moi, j’ai besoin de vous pour obtenir le prix qui m’est nécessaire, pour que la gloire de mon nom soit unie au mérite de mes actions. » Quelle franchise, quelle simplicité dans ce contrat ! […] On ne sait pas au-dehors un nom propre du gouvernement de Venise, du gouvernement sage et paternel de la république de Berne, un même esprit dirige depuis plusieurs siècles, des individus différents, et si un homme lui donnait son impulsion particulière, il naîtrait des chocs dans une organisation, dont l’unité fait tout-à-la-fois le repos et la force. […] … Oui, la gloire contemporaine leur est soumise, car c’est l’enthousiasme de la multitude qui la caractérise ; le mérite réel est indépendant de tout, mais la réputation acquise par ce mérite n’obtient le nom de gloire qu’au bruit des acclamations de la foule. […] Alexandre, après la conquête du monde, s’affligeait de ne pouvoir faire parvenir jusqu’aux étoiles l’éclat de son nom.

311. (1824) Ébauches d’une poétique dramatique « Observations générales, sur, l’art dramatique. » pp. 39-63

La tragédie excite la terreur et la pitié ; ce qui est signifié par le nom même de tragédie. […] C’est le nom qu’on donne à la fable d’une tragédie ou d’une comédie, ou à l’action qui y est représentée. […] Par pièce, nous entendons le poème dramatique tout entier ; et nous comprenons les tragédies, les comédies, les opéras, même les opéras comiques, sous le nom générique de pièces de théâtre. […] C’est le nom que l’on donne au tissu d’une pièce de théâtre, dont le plan est jeté sur le papier, distribué en actes divisés par scènes, et dont l’objet est clairement indiqué par l’auteur. […] C’est le nom qu’on donne quelquefois au tissu d’événements qui entrent dans l’action.

312. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « Appendice. »

J’en excepte les noms de monnaie, de mesure et de mois que le sens de la phrase indique. […] Quant aux noms de parfums et de pierreries, j’ai bien été obligé de prendre les noms qui sont dans Théophraste, Pline et Athénée. Pour les plantes, j’ai employé les noms latins, les mots reçus, au lieu des mots arabes ou phéniciens. […] Salammbô, indépendamment de la dame, est dès à présent le nom d’une bataille, de plusieurs batailles. […] J’arrive à des noms connus du public.

313. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « François Ier, poëte. Poésies et correspondance recueillies et publiées par M. Aimé Champollion-Figeac, 1 vol. in-4°, Paris, 1847. »

Mais il y aurait à discuter de près, à démêler le degré d’authenticité de certaines pièces qui ont couru sous leur nom. […] Quand, au lieu de copier, on en vint à traduire, on se sentit encore plus autorisé, et l’on prit de toutes mains, en disant les noms des auteurs ou en les taisant, indifféremment. […] Eh bien, ce qu’il a fait dans son nom, il l’a fait dans ses œuvres ; il a traduit les pièces de théâtre que publiaient à Florence ou ailleurs ses parents les Giunti. […] Les railleries à la Brantôme et les demi-sourires, dont on pouvait jusqu’alors s’accorder la fantaisie en prononçant le nom de l’auteur de l’Heptamèron, ont fait place peu à peu à une appréciation plus sérieuse et plus fondée. […] Champollion, en reproduisant ce nom de Diane, est le premier à faire remarquer que la supposition offre peu de certitude et de vraisemblance.

314. (1861) Cours familier de littérature. XII « LXVIIe entretien. J.-J. Rousseau. Son faux Contrat social et le vrai contrat social (3e partie) » pp. 5-56

Rousseau et de ses émules n’existe pas ; c’est le nom d’une chose qui ne peut pas être, une fiction à l’aide de laquelle on trompe l’ignorance des peuples et on justifie la révolte de l’individu contre l’ensemble social. Le vrai nom de la société, c’est commandement et obéissance. […] Or, entre ces deux noms sacramentels de toute société politique, commandement et obéissance, trouvez-moi place pour le nom de liberté. […] Sayous est là, pour le dire sans l’offenser, un statisticien moral, un fureteur de génie épiant et découvrant le beau et le bon dans tous ces recoins de l’Europe où de petits cénacles littéraires, français de langue et d’esprit, depuis Copenhague, Pétersbourg, Berlin, Dresde, jusqu’à Lausanne, Coppet, Ferney, Genève (il aurait pu y ajouter Turin et Chambéry, colonie des deux frères de Maistre, l’un naturel et arcadien, l’autre emphatique et olympien), devaient bientôt appeler l’attention sur leur nom et sur leurs œuvres. […] Les mémoires du temps rappellent à toutes les pages leur nom à propos de leur familiarité avec les grandes figures de Genève, de Paris, de Berlin, de Londres, de Coppet ; ils étaient chez eux partout par droit de bienvenue, de bon goût, d’intimité avec les célébrités européennes.

315. (1869) Cours familier de littérature. XXVIII « CLXVe entretien. Chateaubriand, (suite) »

L’homme qui a osé les écrire fut plus et moins qu’un homme en les dictant, il fut le martyr du ciel et de la terre ; il faut chercher son nom et ne pas le prononcer, comme celui de la passion ineffable devant l’ineffable feu du désir et les ineffables larmes de l’expiation. […] Mais il n’éleva pas sa pensée si haut et il ne lui imprima pas un vol si saint ; il n’aspira pas à révéler à l’univers une masse de réalités nouvelles et à ramener à Dieu un chaos d’esprits égarés, pour commenter et adorer son nom. […] Moi-même, très-indigne que mon nom soit prononcé après de pareils noms, moi qui n’oserais pas me comparer comme écrivain en prose à M. de Chateaubriand, je lisais, il y a peu de jours, dans un critique célèbre de mon temps, quelques lignes où mes vers avaient l’avantage sur sa prose, et j’en étais non pas convaincu, mais frappé. […] Aussi, voyez comme ce nom remplace tous les autres, même celui de Voltaire, le dictateur de l’intelligence universelle ; à peine s’en souvient-on encore, et il vient seulement de mourir au seuil des temps qu’il a créés. […] L’avenir portera son nom.

316. (1854) Histoire de la littérature française. Tome I « Livre II — Chapitre deuxième »

De ces deux moines, l’un, Pierre Amy, n’a pas laissé de nom dans les lettres. […] Berquin mourait le 17 avril 1530 ; le 6 septembre, Rabelais inscrivait son nom sur les registres de la faculté de médecine de Montpellier. […] Il publia des almanachs, réimprima Pantagruel, et donna, pour la première fois, le Gargantua, dans lequel il ne conservait de la Chronique Gargantuine que les noms et quelques traits principaux. […] Rabelais avait évité même le nom de Sorbonne ; Dolet l’interpolait là même où ce nom devait faire un contre-sens. […] Oui, s’il est vrai qu’il ait eu, dans les lettres, le don du génie, qui est d’exprimer des vérités générales dans un langage définitif ; oui, si l’on ne veut voir dans son ouvrage que ces créations qui sont des vérités générales sous la forme de personnages qui vivent, et qui ont un nom immortel parmi les hommes.

317. (1890) L’avenir de la science « VIII » p. 200

Questions bien inutiles sans doute, puisque, quelque nom qu’on lui donne, il n’en sera pas moins admirable, et que les génies ne travaillent pas dans les catégories exclusives que le langage forme après coup sur leurs œuvres. […] La plupart, interprétant mal l’étymologie de son nom, s’imaginent qu’il ne travaille que sur les mots (quoi, dit-on, de plus frivole ?) […] De quel nom appeler tant d’intelligences d’élite qui, sans dogmatiser abstraitement, ont révélé à la pensée une nouvelle façon de s’exercer dans le monde des faits ? […] Or, à cette science je ne trouve d’autre nom que celui de philologie. […] Les réformateurs du XVIe siècle sont des philologues, Au XVIIIe siècle, l’œuvre s’accomplit surtout au nom des sciences positives.

318. (1885) Les œuvres et les hommes. Les critiques, ou les juges jugés. VI. « Sainte-Beuve » pp. 43-79

Toutes les questions que l’immense nom de Virgile soulève ont été touchées et résolues avec le renseignement et l’art d’un connaisseur habile. […] Encore un écueil au critique pour ceux qui l’en croient un et l’appellent de ce nom. […] Ils font rendre sans pitié au nom qu’ils exploitent tout ce qu’il peut rendre. […] Troubat, qui vend le nom de Sainte-Beuve sous toutes les formes parce qu’il ne peut pas vendre son cadavre (cela viendra peut-être sous la prochaine Commune !) […] Mais des platitudes du nom de Sainte-Beuve, c’est, avec ce benêt de public, de l’écoulement et du placement encore !

319. (1899) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (troisième série). XVII « Du docteur Pusey et de son influence en Angleterre »

Selon nous, ce besoin d’unité si profond, si consenti qu’il a fait son nom dans la langue et que le mot d’unitéisme se rencontre sous toutes les grandes plumes de ce temps, cache l’avenir d’une philosophie qui remonte vers la religion. […] Quant à cette œuvre de perdition qu’on appelle La Réforme de ce nom général et absolu qui embrasse tous les genres de réforme comme la peste embrasse tous les genres de peste, l’Église anglo-catholique nie qu’elle ait jamais été solidaire de son principe et de ses erreurs. […] Il était né en 1800, de l’honorable Philip Bouverie, qui ajouta à son nom celui de Pusey. […] La famille du Dr Pusey, normande, comme le nom de Bouverie l’indique, était établie dans le comté de Berk depuis la conquête. […] Il eut comme peur de son influence, peur de cette éclatante renommée qui se fixait par son nom sur le front de chaque homme qui pensait comme lui.

320. (1875) Premiers lundis. Tome III « Instructions sur les recherches littéraires concernant le Moyen Âge »

., la science s’introduit ; les mathématiques, la physique, sous le nom de météorologie, la médecine, sous le nom de physique, se propagent dans l’Occident : il serait précieux de découvrir quelques-unes des anciennes traductions faites par des chrétiens ou des juifs, qui allaient en Espagne ; on pourrait, parmi ces traductions de l’arabe, retrouver quelques ouvrages inédits que les Arabes eux-mêmes auraient traduits des Grecs. […] Pascal, Fermat, Roberval, Stevin, etc., de tels noms sont bien propres à rehausser la découverte, possible encore, qu’on ferait de quelqu’un de leurs écrits. […] On se garderait de les négliger, non plus que les écrits appartenant à cette philosophie morale moins systématique et plus libre, qui s’honore des noms de Montaigne et de Charron. […] Vous mettrez une égale importance à tous manuscrits étendus en vers, quel qu’en soit le titre ; aux voyages, aux écrits satiriques désignés sous le nom de Bibles ; à ceux qui s’intitulent Bestiaires, Volucraires, Lapidaires, ou qui s’offriraient sous des titres latins ; aux espèces de compilations scientifiques, comme l’Image du monde ; aux grands ouvrages allégoriques du genre du Roman de la Rose ; aux grands apologues, aux branches nouvelles qu’on pourrait retrouver du célèbre Roman de Renart, par exemple.

321. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XXIII » pp. 237-250

Madame de Montespan elle-même, malgré le plaisir qu’elle avait trouvé autrefois dans ces conversations, les tourna après en ridicule pour divertir le roi63. » Il était fort naturel sans doute qu’à la cour, où tant d’intrigues étaient toujours en action, soit pour la galanterie ou pour la fortune, on regardât comme oisifs les gens qui faisaient les plaisir de la conversation, et que le roi et madame de Montespan, dans les ébats d’un double adultère, eussent besoin de donner un nom ridicule aux personnes spirituelles de mœurs régulières et décentes. […] Madame de Sévigné en était l’âme : elle était aussi fréquemment chez le duc de La Rochefoucauld et dans une étroite liaison avec madame de La Fayette, Le comte de Brancas réunissait aussi du monde aimable chez lui, malgré cette infirmité de distractions continuelles dont madame de Sévigné cite des exemples fort divertissants, et dont La Bruyère a rassemblé une étonnante collection sous le nom de Menalgue dans ses Caractères. Aux noms de La Rochefoucauld, du cardinal de Retz, de Francas et des femmes de leur société, je me hâte de dire que Molière et Despréaux, si follement accusés de diriger leurs traits satiriques contre elle, s’empressaient de lire leurs ouvrages. […] Mademoiselle a fait elle-même un autre portrait de la comtesse de Maure sous le nom de reine de Misnie, dans l’histoire allégorique de la Princesse de Paphlagonie. […] C’est sous ce nom que l’infidélité s’est déclarée ; c’est pour cette prostituée de bassette qu’il a quitté cette religieuse adoration.

322. (1906) Les œuvres et les hommes. Femmes et moralistes. XXII. « Vauvenargues » pp. 185-198

. — Si jamais je veux tracer celui du génie le plus naturel, de l’homme du plus grand goût, de l’âme la plus haute et la plus simple, je mettrai votre nom au bas… » Ailleurs, à propos de cette détestable et ridicule déclamation, fausse comme les larmes d’un catafalque, sur la mort d’Hippolyte de Seytres, tué dans la campagne de Bohême, il avait déjà comparé Vauvenargues à… Bossuet ! […] Or, encore, quelques gouttes d’essence, fussent-elles de l’ambre le plus pur, filtrées avec beaucoup de peine et en trop petit nombre pour parfumer autre chose que le mouchoir de poche d’un homme d’esprit, ne suffisent pas pour mériter ce nom glorieux et sévère de moraliste auquel Vauvenargues prétendit et qu’on ne lui a pas assez marchandé. […] Ainsi, au fond de ce griffonneur qui envoyait ses essais à Voltaire, le gentilhomme tenait bon comme le chrétien, et c’est ce fond de Vauvenargues — puisque son nom se prononce encore — qui mérite l’étude et l’intérêt de l’histoire. […] Son nom restera dans l’histoire des lettres, car il est dans la correspondance du diable d’homme qui tient son siècle dans sa main, comme Charlemagne tenait son globe ; mais on s’étonnera des mérites que Voltaire a mis sous ce nom.

323. (1893) Les œuvres et les hommes. Littérature épistolaire. XIII « Mademoiselle de Condé »

Rien de l’art d’écrire, rien du sentiment de l’écrivain n’est dans cette adorable chose pour laquelle on cherche un nom, difficile à trouver… Quoi qu’il en soit, un tel recueil n’en est pas moins bon à opposer aux livres actuels. […] Mademoiselle de Condé se retira en Lithuanie ; mais, avec la permission de ses supérieures, elle rejoignit en Angleterre son père et son frère, après neuf années de séparation… Seulement, toujours religieuse, plus religieuse encore que fille et sœur, elle entra, là, dans un couvent de Bénédictines, qu’elle ne quitta que pour revenir en France, où elle fut nommée Supérieure de l’Ordre du Temple sous le nom de Marie-Joseph de la Miséricorde. Elle méritait un pareil nom. […] Elle aime et elle est heureuse par cet amour, dont elle n’écrit pas même le nom et qu’elle appelle dans toutes ses lettres « de l’amitié ». […] Elle finit même par idéaliser ce nom « d’ami », insupportable de femme à homme, dans l’amour, si la femme n’était pas elle.

324. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « XV. Vauvenargues »

Si jamais je veux tracer celui du génie le plus naturel, de l’homme du plus grand goût, de l’âme la plus haute et la plus simple, je mettrai votre nom au bas… » Ailleurs, à propos de cette détestable et ridicule déclamation, fausse comme les larmes d’un catafalque, sur la mort d’Hippolyte de Seytres, tué dans la campagne de Bohême, il avait déjà comparé Vauvenargues à… Bossuet ! […] Or, encore quelques gouttes d’essence, fussent-elles de l’ambre le plus pur, filtrées avec beaucoup de peine, et en trop petit nombre pour parfumer autre chose que le mouchoir de poche d’un homme d’esprit, ne suffisent pas pour mériter ce nom glorieux et sévère de moraliste auquel Vauvenargues prétendit et qu’on ne lui a pas assez marchandé. […] Ainsi, au fond de ce griffonneur qui envoyait ses essais à Voltaire, le gentilhomme tenait bon comme le chrétien, et c’est ce fond de Vauvenargues, — puisque son nom se prononce encore, — qui mérite l’étude et l’intérêt de l’histoire. […] Son nom restera dans l’histoire des lettres, car il est dans la correspondance du diable d’homme qui tient son siècle dans sa main, comme Charlemagne tenait son globe, mais on s’étonnera des mérites que Voltaire a mis sous ce nom.

325. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre XXVII. Des panégyriques ou éloges adressés à Louis XIII, au cardinal de Richelieu, et au cardinal Mazarin. »

Les éloges commencés par le respect ou par la crainte, continuent par l’habitude, et il se fonde une grande réputation chez la postérité, qui reçoit des siècles précédents l’admiration des noms célèbres, comme elle reçoit son culte et ses lois. […] Quelque jugement qu’on porte sur le caractère moral de ce ministre, le premier de son siècle, et fort supérieur aux Bukingham et aux Olivarès qu’il eut à combattre, son nom, dans tous les temps, sera mis bien loin hors de la foule des noms ordinaires, parce qu’il donna une grande impulsion au-dehors ; qu’il changea la direction des choses au-dedans ; qu’il abattit ce qui paraissait ne pouvoir l’être ; qu’il prépara, par son influence et son génie, un siècle célèbre ; enfin, parce qu’un grand caractère en impose même à la postérité, et que la plupart des hommes ayant une imagination vive et une âme faible, ont besoin d’être étonnés, et veulent, dans la société comme dans une tragédie, du mouvement et des secousses. […] Quillet (c’est le nom du poète), ennemi du cardinal, on ne sait pourquoi, dans la première édition de son ouvrage avait inséré plusieurs morceaux contre lui. […] Parmi les panégyristes de Mazarin, on trouve un nom plus connu et plus grand, c’est celui de Corneille.

326. (1864) Cours familier de littérature. XVII « CIIe entretien. Lettre à M. Sainte-Beuve (2e partie) » pp. 409-488

entouraient le fauteuil, Et je disais les noms de chaque jeune fille. […] Une de vos notes rappelle, avec l’amitié des premiers jours, mon nom à votre pensée. […] Il connut Virgile, il l’apprécia et le protégea ; la reconnaissance du poète a chanté, et le nom de Pollion est devenu immortel et l’un des beaux noms harmonieux qu’on est accoutumé à prononcer comme inséparables du plus poli des siècles littéraires. […] saluons avec Virgile ces noms plus poétiques pour nous que politiques, et ne recherchons pas de trop près quels étaient les hommes mêmes. […] Il était empereur, sans en prendre le nom ; il voulait consacrer sa famille à l’empire, et l’empire à sa famille.

327. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Sully, ses Économies royales ou Mémoires. — I. » pp. 134-154

Voltaire, le premier, était en train d’y aider par La Henriade, lorsqu’ayant eu à se plaindre du descendant de Sully, il effaça dans son poème le nom de l’ancêtre et y substitua celui de Du Plessis-Mornay. […] La Rochefoucauld a dit : « Nos actions sont comme les bouts-rimés, que chacun fait rapporter à ce qui lui plaît. » Ce ne sont pas seulement les actions de chaque jour et les démarches des personnes de la société que chacun interprète à son gré ; ce sont les actions du passé et les noms qui les représentent. Ces grands noms que vont répétant les échos futurs, une fois livrés au tourbillon des âges, ne sont bientôt plus, si l’on n’y prend garde et si l’histoire authentique ne s’y oppose pas, que des espèces de bouts-rimés que chacun tire à soi, remplit à son gré, et sous lesquels on met un sens, des idées, des intentions que le plus souvent le personnage n’a jamais eus. […] Je laisse donc tous ces usages et ces abus qu’on a faits du nom de Sully au xviiie  siècle, tous ces Sully accommodés à la Turgot, à la Necker, à la Bernardin de Saint-Pierre, pour revenir à l’homme tel qu’il se montre à nous dans l’histoire et dans ses Mémoires. […] L’ouvrage était censé se vendre à Amstelredam (Amsterdam), à l’enseigne des trois Vertus couronnées d’amaranthe (Foi, Espérance, Charité), chez deux imprimeurs désignés sous des noms grecs tels qu’aurait pu les forger Du Bartas ; voici ces noms bizarres : Aleithinosgraphe de Cléarétimélée, et Graphexechon de Pistariste ; comme qui dirait : Écrivain-véridique de la ville de Gloire-et-Vertu-Soin, et Secrétaire-émérite de la ville de Haute-Probité.

328. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Œuvres de Vauvenargues tant anciennes qu’inédites avec notes et commentaires, par M. Gilbert. — II — Vauvenargues et le marquis de Mirabeau » pp. 17-37

Dès sa première lettre à Vauvenargues, il en insère une qu’il vient de recevoir d’une ancienne maîtresse avec laquelle il a rompu et qui, en apprenant la mort de son père, le marquis Jean-Antoine, lui a écrit cette charmante et spirituelle épître de condoléance : Je n’ose vous appeler, monsieur, de ces noms tendres qui nous servaient autrefois ; ils ne sont plus faits pour moi ; j’ai fait pour les perdre tout ce que je voudrais faire à présent pour les ravoir. […] Mirabeau toujours préoccupé de l’idée que Vauvenargues n’est pas ambitieux, qu’il est philosophe par tempérament et par choix (il le juge trop sur la mine, et par le dehors), qu’il est porté à l’inaction et au rêve, le presse souvent et dans les termes d’une cordiale amitié de se proposer un plan de vie, un but, de ne plus vivre au jour la journée : « Nous avons besoin de nous joindre, mon cher ami ; vous appuieriez sur la raison, et je vous fournirais des idées. » Vauvenargues décline ce titre de philosophe auquel, dit-il, il n’a pas droit : Vous me faites trop d’honneur en cherchant à me soutenir par le nom de philosophe dont vous couvrez mes singularités ; c’est un nom que je n’ai pas pris ; on me l’a jeté à la tête, je ne le mérite point ; je l’ai reçu sans en prendre les charges ; le poids en est trop fort pour moi. […] Toutefois, sur cette protestation de son peu d’étude et de lecture, Mirabeau n’est pas dupe et n’est crédule qu’à demi : « Vous ne lisez point, me dites-vous, et vous me citez tous les mots remarquables de nos maîtres ; cela me rappelle Montaigne qui soutient partout qu’il craint d’oublier son nom tant il a peu de mémoire, et nous cite dans son livre toutes les sentences des anciens. » — S’il convie son ami à s’ouvrir à lui, il lui donne largement l’exemple et ne se fait pas faute de se déclarer. Il a un frère, le dernier de tous, le chevalier de Mirabeau, qui sert dans le régiment de Vauvenargues, et à qui l’on a fait un passe-droit ; il serait d’avis que ce jeune frère, qui par humeur n’est déjà que trop de la même race, cassât net là-dessus et se retirât « avec la hauteur convenable à son nom et à sa naissance ». […] À lui qui vise à conquérir un nom dans les lettres et à entrer peut-être à l’Académie, il essaye de lui faire peur des gasconismes que peut contracter son style (hélas !

329. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « La comtesse d’Albany par M. Saint-René Taillandier (suite et fin.) »

Un jeune peintre, élève de David, avait été présenté à elle et à Alfieri dans les dernières années : Fabre de Montpellier (c’était son nom), grand prix de Rome, s’était arrêté à Florence et avait fait le portrait des deux amis. […] Mme de Condorcet, veuve illustre, jeune encore et fort belle, nature passionnée, devait-elle abjurer son nom, le nom à jamais respecté d’un martyr philosophe ? devait-elle s’appeler, en se remariant, ou Mme B. ou Mme F. ou de tout autre nom ? […] Et nos maréchales d’Empire, nos veuves de généraux illustres, qu’ont-elles dû faire, privées la plupart de bonne heure du héros dont elles étaient fières de porter le titre et le nom ? […] Il serait indiscret et contraire à la pensée sérieuse qui me dicte cette note d’indiquer le nom de ces divers Fabre que la société parisienne a connus, qu’elle a parfaitement acceptés et honorés.

330. (1892) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Cinquième série « L’exposition Bodinier »

» car celui-là, son nom du moins est encore connu. Mais je vous demanderai, à vous qui comme moi n’avez jamais vu cet estimable artiste : « Qu’est-ce que ce nom vous représente ? et qu’est-ce autre chose qu’un nom ?  […] C’est que leurs noms prononcés évoquent dans la mémoire certains personnages dramatiques, c’est-à-dire, en somme, autre chose qu’eux-mêmes.

331. (1887) Journal des Goncourt. Tome I (1851-1861) « Année 1851 » pp. 1-9

Nom de Dieu, c’est fait ! […] , et apprendre à la France et au monde les noms de deux hommes de lettres de plus : Edmond et Jules de Goncourt. […] Et nous restons sans lire, les yeux charmés, sur ces vilaines lettres de journal, où votre nom semble imprimé en quelque chose qui vous caresse le regard, comme jamais le plus bel objet d’art ne le caressera. […] » Il nous quitte, bat les usuriers, imagine un frontispice où la foudre tombait sur l’Institut, avec les noms de Hugo, de Musset, de Sand dans les zigzags de l’éclair, achète un almanach Bottin, fait des bandes, et, le dernier coup de fusil du 2 décembre parti, le journal L’Éclair paraît.

332. (1909) Les œuvres et les hommes. Philosophes et écrivains religieux et politiques. XXV « Léon Bloy »

Jusque-là, de maigres notices, menteuses ou dérisoires, griffonnées sur Christophe Colomb, avaient montré qu’elles étaient dignes des mains qui avaient raturé son nom pour en mettre un autre à sa place sur sa grandiose découverte… et, pour la première fois, la vie de Christophe Colomb fut écrite. […] Le comte Roselly de Lorgues a écrit son nom à une telle profondeur dans le nom de Christophe Colomb, qu’on ne peut plus lire l’un sans lire l’autre, dans la clarté que l’Église répand sur eux de son flambeau. […] Mais il a pensé sur ce sujet, en son propre et privé nom, avec une profondeur et une énergie nouvelles.

333. (1908) Les œuvres et les hommes XXIV. Voyageurs et romanciers « Madame Sand ; Octave Feuillet »

Aucun jeune nom inconnu, l’espoir de ce qui nous reste de xixe  siècle à vivre, n’a jailli de l’obscurité et brillé, je ne dis pas comme une étoile, — je ne suis pas si ambitieux, — mais simplement comme une de ces bulles de lumière dont le destin est de tout à l’heure s’évanouir ! […] Des œuvres posthumes comme celle de Maurice et d’Eugénie de Guérin, ces esprits enchanteurs dont j’ai appris le premier les noms au public, n’appartiennent pas davantage à la génération actuelle. […] les Nouveaux Lundis de Sainte Beuve, la traduction de Eurêka d’Edgar Poe par Baudelaire, le Dictionnaire de Littré, cet attentat de la philosophie positive sur la langue française, le Capitaine Fracasse 43 de Théophile Gautier, et ces pauvres Mémoires, qui n’auront jamais le succès de ceux de Saint-Simon, du duc de la Rochefoucauld-Doudeauville, qui ne se rappelle pas assez que devant son nom de Doudeauville il y a le nom de La Rochefoucauld, qui oblige à être spirituel, je crois bien que vous êtes au bout du budget littéraire de cette année que je m’obstine à trouver inféconde, même en voyant ce qu’elle a fait !

334. (1827) Principes de la philosophie de l’histoire (trad. Michelet) « Principes de la philosophie de l’histoire — Livre cinquième. Retour des mêmes révolutions lorsque les sociétés détruites se relèvent de leurs ruines — Chapitre II. Comment les nations parcourent de nouveau la carrière qu’elles ont fournie, conformément à la nature éternelle des fiefs. Que l’ancien droit politique des romains se renouvela dans le droit féodal. (Retour de l’âge héroïque.) » pp. 362-370

Ceux qui étaient soumis à cette sorte de vasselage personnel, furent sans doute chez les anciens Romains les premiers vades, nom qui resta à ceux qui étaient obligés de suivre leurs actores devant les tribunaux ; cette obligation s’appelait vadimonium. […] Les plébéiens qui reçurent alors le domaine bonitaire des champs que les nobles leur avaient assignés, et qui furent dès lors sujets à des charges non-seulement personnelles, mais réelles, durent être désignés les premiers par le nom de mancipes, lequel resta ensuite à ceux qui sont obligés sur biens immeubles envers le trésor public. […] Ils étaient amis du peuple romain dans le sens où les Empereurs donnaient le nom d’amis aux nobles qui composaient leur cour. […] On vit reparaître les clientèles des Romains sous le nom de recommandation personnelle. — Les cens seigneuriaux n’étaient pas sans analogie avec le cens institué par Servius Tullius, puisqu’en vertu de cette dernière institution les plébéiens furent longtemps assujettis à servir les nobles dans la guerre à leurs propres dépens, comme dans les temps modernes les vassaux appelés angarii et perangarii. — Les précaires du moyen âge étaient encore renouvelés de l’antiquité.

335. (1864) Cours familier de littérature. XVII « XCVIIIe entretien. Alfieri. Sa vie et ses œuvres (3e partie) » pp. 81-152

Le respect humain la rendit en apparence fidèle au culte de la gloire de ce grand homme convenu, qu’elle avait aimé jeune sous le nom d’Alfieri. […] Elle l’appelait sa chère souveraine, et ce nom, où la familiarité s’unissait au respect, flattait les deux femmes : « Bologne, 22 mars 1805. […] Ils céderont, ils obéiront au grand nom d’Alfieri, parce que vous, en sentant toute la hauteur de son génie, toute la noblesse de son caractère, vous les forcez à le reconnaître. […] Sa folie était de celles que la nôtre n’a que trop longtemps qualifiées du nom de grandeur d’âme. […] Alfieri ne laissa pas une œuvre mais un nom ; Mme d’Albany alla dormir à l’ombre de ce nom dans le mausolée de son amant.

336. (1889) Histoire de la littérature française. Tome II (16e éd.) « Chapitre troisième »

Jusqu’à lui, l’histoire du théâtre n’offre que de vains noms, et pas une pièce. […] Les mœurs du temps en fournissaient les sujets ; les contemporains, sous des noms allégoriques, en étaient les personnages. […] Huit de ces pièces sont signées du nom de Corneille. […] A ce point de vue, il n’y a pas de plus grand nom dans l’histoire de notre littérature que le nom de Pierre Corneille. Mais si l’on considère ses ouvrages en eux-mêmes, et qu’on les compare à l’idéal du poème dramatique, tout en ne mettant aucun nom au-dessus du nom de Corneille, on peut croire qu’il existe des ouvrages plus parfaits que les siens.

337. (1887) Revue wagnérienne. Tome II « Paris, le 8 mai 1886. »

Deux noms sont à la tête, qui ont été les héros de la saison, MM.  […] C’est pour cette raison que hors d’Angleterre les noms de nos meilleurs maîtres ne sont pas même connus. […] Son chant assez long reproduit à un demi-ton plus bas le motif de l’ouverture que nous avons désigné du nom de mélopée. […] Il faut encore mentionner les noms de MM.  […] On s’étonnera peut être de voir ici le nom de Chabrier habituellement lié à des œuvres légères.

338. (1880) Les deux masques. Première série. I, Les antiques. Eschyle : tragédie-comédie. « Chapitre II, grandeur et décadence de Bacchus. »

Il franchit l’Euphrate sur un pont de sarments, il passe sur le dos d’un tigre, à la nage, le fleuve auquel sa monture donnera son nom. […] Bacchus y naît, sous le nom de Zagreus, d’un hymen de Zeus, déguisé en serpent, avec Perséphone. […] Ses Ménades ajouteront plus tard à leurs noms celui de « Servantes de la mort » : Ditis famulae. […] Ils disaient qu’il avait une mère dont il était interdit de prononcer le nom : un hymne orphique le déclarait « né de lits ineffables ». […] Les vieilles femmes le saluaient du nom de Chef, de Conducteur, de Porte-lierre, de Porte-van, et d’autres noms semblables.

339. (1889) Le théâtre contemporain. Émile Augier, Alexandre Dumas fils « Émile Augier — Chapitre III »

De ses grandeurs passées, il n’a gardé que son nom et son blason. […] Poirier, — modeste et nourrissant comme son nom ! […] Olympe est son nom de guerre et d’alcove. […] Elle commence par se redresser et nier, de haut en bas, le nom qu’il lui donne ; mais un petit signe posé sur l’épaule la trahit. […] et voilà un mari furieux et honteux de lui-même, qui se maudit, s’accuse, se frappe la poitrine et confesse à son oncle, avec des larmes de rage, le vrai nom, le nom scandaleux de la femme à laquelle il a livré son honneur.

340. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « UNE RUELLE POÉTIQUE SOUS LOUIS XIV » pp. 358-381

Il est un nom célèbre qui va me suffire à résumer, à développer mon aperçu ; je m’en tiendrai à Mme Des Houlières. […] On s’appelle Iris ou Climène, ou de nos jours de quelque nom à la Médora : la nature retrouve son compte là-dessous. […] Somaise n’a pas manqué de l’enregistrer dans son grand Dictionnaire sous le nom de Dioclée. […] Des noms graves s’y mêlaient, et sous un reflet très-radouci Elle a écrit à Mascaron une épître badine datée des bords mêmes du Lignon. […] La plupart des noms surtout, en s’éloignant, s’évanouirent.

341. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « L’abbé Prévost »

Cela ne nous a jamais semblé plus vrai que lorsqu’on y entre, non avec une curiosité vague ou un labeur trop empressé, mais guidé par une intention particulière d’honorer quelque nom choisi, et par un acte de piété studieuse à accomplir envers une mémoire. […] Or, à part un très-petit nombre de noms grandioses et fortunés qui, par l’à-propos de leur venue, l’étoile constante de leurs destins, et aussi l’immensité des choses humaines et divines qu’ils ont les premiers reproduites glorieusement, conservent ce privilège éternel de ne pas vieillir, ce sort un peu sombre, mais fatal, est commun à tout ce qui porte dans l’ordre des lettres le titre de talent et même celui de génie. […] Ce petit chef-d’œuvre échappé en un jour de bonheur à l’abbé Prévost, et sans plus de peine assurément que les innombrables épisodes, à demi réels, à demi inventés, dont il a semé ses écrits, soutient à jamais son nom au-dessus du flux des années, et le classe de pair, en lieu sûr, à côté de l’élite des écrivains et des inventeurs. […] Ils partent donc pour l’Espagne d’abord, puis visitent le Portugal et l’Angleterre, le vieux marquis sous le nom de M. de Renoncour, le jeune sous le titre de marquis de Rosemont. […] Il ne craint pas même à l’occasion (générosité que l’on aura peine à croire) de citer avantageusement, par leur nom, les journaux ses confrères, le Mercure de France et le Verdun.

342. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre troisième. L’esprit et la doctrine. — Chapitre IV. Construction de la société future »

Prenez des femmes qui ont faim et des hommes qui ont bu ; mettez-en mille ensemble, laissez-les s’échauffer par leurs cris, par l’attente, par la contagion mutuelle de leur émotion croissante ; au bout de quelques heures, vous n’aurez plus qu’une cohue de fous dangereux ; dès 1789 on le saura et de reste  Maintenant, interrogez la psychologie : la plus simple opération mentale, une perception des sens, un souvenir, l’application d’un nom, un jugement ordinaire est le jeu d’une mécanique compliquée, l’œuvre commune et finale437 de plusieurs millions de rouages qui, pareils à ceux d’une horloge, tirent et poussent à l’aveugle, chacun pour soi, chacun entraîné par sa propre force, chacun maintenu dans son office par des compensations et des contrepoids. […]  » — Ainsi « l’acte par lequel un peuple se soumet à des chefs n’est absolument qu’une commission, un emploi dans lequel, simples officiers du souverain, ils exercent en son nom le pouvoir dont il les a fait dépositaires et qu’il peut modifier, limiter, reprendre quand il lui plaît439 ». […] Au lieu de lui opposer des digues nouvelles, ils ont songé à détruire les vieux restes de digues qui le gênaient encore. « Dans un gouvernement, disent Quesnay et ses disciples, le système des contre-forces est une idée funeste… Les spéculations d’après lesquelles on a imaginé le système des contrepoids sont chimériques… Que l’État comprenne bien ses devoirs, et alors qu’on le laisse libre… Il faut que l’État gouverne selon les règles de l’ordre essentiel, et, quand il en est ainsi, il faut qu’il soit tout-puissant. » — Aux approches de la Révolution, la même doctrine reparaît, sauf un nom remplacé par un autre. […] Je n’ai pas le droit d’élever mes enfants chez moi et de la façon qui me semble bonne. « Comme on ne laisse pas la raison445 de chaque homme unique arbitre de ses devoirs, on doit d’autant moins abandonner aux lumières et aux préjugés des pères l’éducation des enfants, qu’elle importe à l’État encore plus qu’aux pères. » — « Si l’autorité publique, en prenant la place des pères et en se chargeant de cette importante fonction, acquiert leurs droits en remplissant leurs devoirs, ils ont d’autant moins de sujet de s’en plaindre qu’à cet égard ils ne font proprement que changer de nom et qu’ils auront en commun, sous le nom de citoyens, la même autorité sur leurs enfants qu’ils exerçaient séparément sous le nom de pères. […] Au nom de la raison que l’État seul représente et interprète, on entreprendra de défaire et de refaire, conformément à la raison et à la seule raison, tous les usages, les fêtes, les cérémonies, les costumes, l’ère, le calendrier, les poids, les mesures, les noms des saisons, des mois, des semaines, des jours, des lieux et des monuments, les noms de famille et de baptême, les titres de politesse, le ton des discours, la manière de saluer, de s’aborder, de parler et d’écrire, de telle façon que le Français, comme jadis le puritain ou le quaker, refondu jusque dans sa substance intime, manifeste par les moindres détails de son action et de ses dehors la domination du tout-puissant principe qui le renouvelle et de la logique inflexible qui le régit.

343. (1921) Enquête sur la critique (Les Marges)

Les noms se pressent sous ma plume : mais je ne veux pas avoir l’air de rédiger un palmarès. […] Mais les Brunetière, les Sarcey et les Mendès d’hier (leur nom est légion) furent ni plus ni moins malsains. […] Mais la presse jette des poignées de noms pêle-mêle et passe : il reste à faire l’indispensable sélection, c’est-à-dire le principal. […] Le tout est de faire parler de soi et de lancer son nom au public. […] Les noms connus étaient là comme des lampions, pour faire briller les autres.

344. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Première partie. — Chapitre III. »

Peut-on l’affirmer absolument, lorsqu’à l’origine et dans les premiers souvenirs des cités grecques on rencontre le nom des Phéniciens et l’influence présumée de leurs arts ? […] Platon même n’a-t-il pas reconnu que les Grecs avaient emprunté des barbares ce qui pour lui désignait tout l’Orient, la plupart des noms ? et n’a-t-il pas en même temps prétendu que cette première imposition des noms venait d’une nature divine et supérieure il l’homme ? […] Jéhovah est son nom. […] De Babylone je détruirai et le nom et les restes, et le germe et la postérité, dit Jéhovah.

345. (1846) Études de littérature ancienne et étrangère

Dès le règne suivant, Patercule ne prononce son nom qu’avec enthousiasme. […] Le nom en resta dans la langue latine, pour exprimer des récits enjoués et libres. […] à ce nom je sens un enfer de douleurs. […] De là vient que mon nom reçoit une marque flétrissante. […] Le nom de l’auteur était défavorable : le sujet qu’il avait choisi attirait peu l’attention.

346. (1796) De l’influence des passions sur le bonheur des individus et des nations « Section première. Des passions. — Chapitre III. De la vanité. »

Il est d’une naissance obscure ; il le sait, il est certain que personne ne l’ignore ; mais au lieu de dédaigner cet avantage par intérêt et par raison, il n’a qu’un but dans l’existence, c’est de vous parler des grands seigneurs avec lesquels il a passé sa vie ; il les protège, de peur d’en être protégé ; il les appelle par leur nom, tandis que leurs égaux y joignent leurs titres, et se fait reconnaître subalterne par l’inquiétude même de le paraître. […] Quand elles ne veulent plaire que pour être aimées ; quand ce doux espoir est le seul motif de leurs actions, elles s’occupent plus de se perfectionner que de se montrer, de former leur esprit pour le bonheur d’un autre que pour l’admiration de tous : mais quand elles aspirent à la célébrité, leurs efforts, comme leurs succès, éloignent le sentiment qui, sous des noms différents, doit toujours faire le destin de leur vie. […] Le plaisir au nom duquel on se rassemble est nul pour elle ; elle ne peut en jouir dans aucun moment ; car il n’en est point qui ne soit absorbé et par sa pensée dominante, et par les efforts qu’elle fait pour la cacher. […] L’envie, qui cherche à s’honorer du nom de défiance, détruit l’émulation, éloigne les lumières, ne peut supporter la réunion du pouvoir et de la vertu, cherche à les diviser pour les opposer l’un à l’autre, et crée la puissance du crime, comme la seule qui dégrade celui qui la possède ; mais quand de longs malheurs ont abattu les passions, quand on a tellement besoin de lois, qu’on ne considère plus les hommes que sous le rapport du pouvoir légal qui leur est confié, il est possible que la vanité, alors qu’elle est l’esprit général d’une nation, serve au maintien des institutions libres. […] Cette espérance est peut-être une chimère, mais je crois vrai que la vanité se soumet aux lois, comme un moyen d’éviter l’éclat personnel des noms propres, et préserve une nation nombreuse et libre, lorsque sa constitution est établie, du danger d’avoir un homme pour usurpateur.

347. (1889) Le théâtre contemporain. Émile Augier, Alexandre Dumas fils « Alexandre Dumas fils — Chapitre XI »

Un notaire, qui est son parrain et l’ami dévoué de sa mère, est bien forcé de lui apprendre qu’il est enfant naturel ; il lui révèle, en même temps, le nom de son père, Jacques court à ce père, qui s’excuse comme il peut de ne l’avoir pas reconnu et lui refuse la main de sa nièce, par toute sorte de raisons tirées des lois du monde. […] Mais Jacques gardera le nom qui absout sa mère et qu’il est en train d’illustrer, et il épouse Hermine, qu’on est très heureux de lui accorder. […] Il est né et il a grandi dans l’incroyable ignorance de son état civil, grâce au nom d’emprunt sous lequel ou l’a déguisé. […] Le grand-oncle de la maison, qui s’est épris de lui à première vue, veut l’investir, en l’adoptant, de son titre de marquis et de son nom d’Orgebac. […] Nous apprenons, à l’acte suivant, que Clara Vignot doit ses cinq cent mille francs, et la terre de Boisceny, dont son fils porte le nom, à ce personnage élégiaque.

348. (1827) Principes de la philosophie de l’histoire (trad. Michelet) « Principes de la philosophie de l’histoire — Livre premier. Des principes — Chapitre premier. Table chronologique, ou préparation des matières. que doit mettre en œuvre la science nouvelle » pp. 5-23

Célébrée comme la mère des sciences, désignée chez les Grecs par le nom de πόλις, la ville par excellence, elle vit son Musée aussi célèbre que l’avaient été à Athènes l’académie, le lycée et le portique. […] Il voyait que toutes les nations avaient leur Jupiter et leur Hercule ; il décida que son Jupiter Ammon était le plus ancien de tous, que tous les Hercule avaient pris leur nom de l’Hercule Égyptien. […] De la tribu chaldéenne, se forma sous Ninus la grande nation des Assyriens, et le nom de la première se perdit dans celui de la seconde. […] Les Égyptiens nous fourniront encore à l’appui de ce principe deux traditions de vanité nationale, savoir, que Jupiter Ammon était le plus ancien de tous les Jupiter, et que les Hercule des autres nations avaient pris leur nom de l’Hercule Égyptien. […] Tite-Live dit aussi que pendant ce règne de Servius Tullius, où l’intérieur de l’Italie était encore barbare, il eût été impossible que le nom même de Pythagore pénétrât de Crotone à Rome à travers tant de peuples différents de langues et de mœurs.

349. (1909) Les œuvres et les hommes. Critiques diverses. XXVI. « Chamfort »

Avec des facultés très fortes, de l’acuité d’observation, de la profondeur dans l’accent, de l’emporter pièce dans l’empreinte, il voulut être un moraliste et n’y réussit pas, quoiqu’il ne se soit survécu à lui-même que sous ce nom, et quoique à cette heure il ne soit lu et compté que comme tel. […] Ceux qui disent le plus haut, avec la soif de la justice ou la sympathie pour l’infortune, que les fautes sont personnelles, ont-ils jamais pénétré dans la conscience de l’homme que les sociétés ont nommé partout du nom expiatoire de bâtard ? […] C’est ainsi que dans les bâtards les trois facultés qui constituent l’homme sont viciées, en leur à priori originel, de cela seul qu’ils sont exclus du nom, de la famille et du patrimoine. […] Dieu, qui connaît les mystères des cœurs mieux que personne, a flétri nos tristes mœurs dans leurs tristes fruits, pour nous les interdire, au nom même de nos entrailles, en nous rendant responsables des calamités que nous amassons sur la tête de nos enfants. […] Le bâtard, en effet, doit se dire, malgré lui, que son père, qui n’en mérita pas le nom, et sa mère, qui déshonora ce titre sublime, ont eu, neuf mois durant, des tentations horribles, en maudissant à part eux, en leur pauvre enfant, le révélateur de leur faute.

350. (1893) Les œuvres et les hommes. Littérature épistolaire. XIII « Madame de Créqui »

Ce sont quatre-vingts lettres à peu près d’une grande dame du siècle dernier, — de cette fameuse marquise de Créqui dont le nom historique est devenu littérairement si célèbre, grâce à des Mémoires qui furent toujours contestés et que Sainte-Beuve traita hardiment d’apocryphes. […] Spirituel et du talent le plus vif quand il écrivait sous le nom des autres, il était plat et sans talent quand il écrivait sous le sien. […] Apocryphes de nom, ils ne sont pas apocryphes de choses. […] En voyant s’éteindre, elles et leur langage, des femmes comme la marquise de Créqui et les sociétés auxquelles ces femmes appartenaient, l’auteur, trop attique lui-même pour définir l’atticisme, s’est demandé si l’atticisme, cette chose ineffable, mais facile à sentir et qui n’a de grec que le nom, mourait et disparaissait avec elles, et il s’est répondu que tout le temps « qu’il y aura partout une femme spirituelle douée de charme, à côté de l’aïeule souriante et qui n’invoque pas à tout propos son expérience, — (pourquoi pas ?)  […] En Grèce même, puisqu’il porte un nom grec, il ne se produisit que sous les Grecs du bon temps ; il fut le résultat de circonstances dont l’ensemble ne dura qu’un instant : archipel magnifique, ciel superbe, liberté de pirates, marbre à tailler pour créer des dieux, costume sobre, hospitalité flamboyante, le poignard à la ceinture, rois de toutes parts qui se recevaient tour à tour au milieu d’un état-major résolu pour vider ensemble la coupe d’Hercule sans broncher !

351. (1899) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (troisième série). XVII « A. P. Floquet »

Écrasé par le sujet auquel il avait osé mettre la main, l’historien n’en avait pas moins écrit son nom à la suite du nom de Bossuet, et les rayons du nom flamboyant se projetaient sur le nom fait pour rester obscur. […] L’enthousiasme ne sait pas trembler, un écrivain qui a voué à Bossuet un culte véritable et qui, pour mieux vivre tête à tête avec lui, s’est retiré intellectuellement de son siècle et n’a plus habité que celui de cet imposant génie, Floquet, a entrepris de nous donner un livre nouveau sur Bossuet, et, quoique sa modestie le cache avec un goût parfait sous ce nom respectueux d’Études, ce livre, d’une érudition vaste et détaillée, n’en est pas moins une biographie.

352. (1862) Les œuvres et les hommes. Les poètes (première série). III « M. Soulary. Sonnets humouristiques. »

C’est un artiste qui voit l’œuvre avant tout, ne pensant qu’après à la gloire, et c’est déjà une fière distinction à une époque où l’on donnerait toutes les beautés du génie pour quelque argent et quelque bruit… C’est déjà assez humouristique, cela, de la part de l’auteur des sonnets qui portent ce nom ! […] On ne le trouve cultivé et florissant qu’aux époques de forte poésie. » Pour nous, le symptôme est différent : le Sonnet si vanté, à cause de la difficulté vaincue, chez un peuple qui a toujours aimé à vaincre la difficulté, n’est que l’amusette des sociétés qui jouent aux petits jeux de la littérature… Ni les grands noms de Shakespeare, de Milton, de Corneille, de Machiavel, de Pétrarque, qui ont splendidifié ce monde de poésie, si écourté et presque puéril, ne me troublent et ne m’imposent. […] IV Le livre des Sonnets humouristiques est divisé en plusieurs livres, composés, à leur tour, d’un nombre déterminé de sonnets, et ces différents livres, dont nous donnerons seulement les noms, parce qu’en donnant ces noms on donne aussi les teintes de l’imagination qui les a écrits, s’appellent : Pastels et Mignardises, — Paysages, — Éphémères, — Les Métaux, — En train express, — L’Hydre aux sept têtes, — Les Papillons noirs, — et déjà, à ne considérer que ces grandes divisions de l’œuvre des Sonnets humouristiques, on entrevoit la forte originalité de l’esprit qui a concentré tant de vigueur dans de si petits espaces et sous un nombre si rare et si choisi de mots. […] De fait, il y perd sa puissance et n’y garde pas même son nom.

353. (1889) Les œuvres et les hommes. Les poètes (deuxième série). XI « Alfred de Vigny »

Le comte de Vigny, — que nous pouvons appeler maintenant simplement : Alfred de Vigny, puisqu’il n’est plus qu’un grand nom littéraire de la France du xixe  siècle et que l’Immortalité ne dit : monsieur à personne, — le comte de Vigny a cela de rare et de merveilleux, qui fermera la bouche aux âmes communes toujours prêtes à jeter la pierre aux poètes, qu’on ne peut trouver une contradiction dans sa vie, et que ce qu’il fut comme poète, il le fut également comme homme. […] Alfred de Vigny, l’auteur des Poèmes philosophiques, peut porter le même nom aujourd’hui. […] ai-je pensé, malgré ce grand nom d’Hommes, Que j’ai honte de nous, débiles que nous sommes ! […] Ils ressemblent aux rubis de Wanda, dans la belle pièce de ce nom : Vos mains, par ces rubis, semblent ensanglantées ? […] Il y a dans ces Poèmes d’Alfred de Vigny, réunis sous ce nom général de : Destinées, des morceaux qui n’ont pas ce double caractère que je tiens surtout à signaler, et qui se rapprochent de la première manière de l’auteur, mais concentrée, mûrie, calmée ; d’une couleur moins vive, mais certainement d’un dessin plus fort : La Jeune Sauvage, La Maison du Berger, et surtout L’Esprit pur, poésie cornélienne, l’exegi monumentum du poète, dans laquelle, se mesurant à ses ancêtres, gens d’épée dont il raconte admirablement la vie de cour et d’armes : Dès qu’ils n’agissaient plus, se hâtant d’oublier : il se trouve plus grand de cela seul qu’il a mis sur son casque de gentilhomme : Une plume de fer qui n’est pas sans beauté !

354. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « M. Jules Sandeau » pp. 77-90

Balzac, dont le nom surgit fatalement quand on parle des romanciers du xixe  siècle, — mesure terrible qui montre combien ils sont petits en comparaison de cette grandeur, — ne fut point de cette Académie, dont la porte, à peine poussée par M.  […] En effet, on eût dit qu’ils avaient fait un mystérieux échange, et qu’elle lui avait laissé la grâce pour le dédommager de lui avoir emporté son nom ! […] « Les lettres de l’alphabet m’appartiennent », disait ce joyeux bandit de Casanova quand on lui demandait pourquoi il s’était donné un faux nom. […] Sandeau sont des couleurs déteintes et mêlées. — Or, elle apprend, par l’une des circonstances du roman, qu’un cousin-germain de son nom, dont le père avait, comme on dit, embrassé les principes de 89, vit non loin d’elle, sur une petite terre qu’il cultive, et qu’il est sur le point d’épouser la fille d’un meunier. […] L’aurait-il renvoyée à celle qui lui a emporté son nom ?

355. (1861) Cours familier de littérature. XI « LXIIe entretien. Cicéron » pp. 81-159

C’est le nom culminant de toute littérature antique ; il résume en lui deux mondes, le monde grec et le monde romain. […] Malgré la nouveauté de son nom, que Cicéron fit le premier éclater dans Rome, cette famille remontait, dit-on, par filiation, jusqu’aux anciens rois déchus du Latium. […] Il apprit de mémoire le nom et les antécédents de tous les citoyens romains, afin de les flatter par ce qui flatte le plus les hommes, l’attention qu’on leur marque le plus dans la foule, et de les saluer tous par leur nom quand ils l’abordaient dans la place publique. […] Mais l’ombre de leur vie passée suit les hommes publics jusque sur la terre étrangère : la mer, qui les sépare de leur patrie, ne les sépare pas de leur nom. […] … Je vous recommande mon frère, ma femme, ma fille, mon fils ; mon fils, à qui je ne laisserai pour héritage qu’un nom flétri et ignominieux !

356. (1864) Cours familier de littérature. XVII « XCVIIe entretien. Alfieri. Sa vie et ses œuvres (2e partie) » pp. 1-80

Psipsio, Psipsia, pourquoi ces noms ? […] Il la reconnut, la légitima, et lui rendit le nom, désormais libre, de duchesse d’Albany. […] Mon mari était roi ; respectez en lui son titre, et en moi son nom ! […] Ils étaient imprimés, mais on y avait effacé le nom du roi. […] Le prince francisait son nom, à peu près comme l’Arioste, dans maintes strophes de l’Orlando furioso, en avait fait un nom italien, il duca d’Albania.

357. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Journal d’Olivier Lefèvre d’Ormesson, publié par M. Chéruel » pp. 35-52

Je ne suis pas de ceux qui, par une estime exagérée, mettent les pièces et les matériaux au-dessus de l’œuvre définitive ; mais comme les monuments historiques vraiment dignes de ce nom sont rares, comme ils se font longtemps attendre, et comme d’ailleurs ils ne sont possibles et durables qu’à la condition de combiner et de fondre dans leur ciment toutes les matières premières, de longue main produites et préparées, il n’est pas mauvais que celles-ci se produisent auparavant et soient mises en pleine lumière ; ceux qui aiment à réfléchir peuvent, en les parcourant, s’y tailler çà et là des chapitres d’histoire provisoire à leur usage ; ce ne sont pas les moins instructifs et les moins vrais. […] Les d’Ormesson avaient pour nom de famille Lefèvre. […] C’est comme un tome second ou, si l’on veut, un tome premier de ces races équitables et intègres qu’on aime à personnifier finalement sous le nom et la figure de d’Aguesseau. […] Il s’est répandu (toute proportion gardée) sur son nom quelque chose de cette lumière clémente qui brille et qu’on salue au front des défenseurs de Louis XVI. […] C’est vers ce temps qu’il acquit une terre d’Ormesson (près de Saint-Denis), qui n’est pas la même que celle du même nom en Brie, plus connue, appartenant également à la famille, et il commença de se faire appeler M. d’Ormesson, le nom de Lefèvre étant trop commun.

358. (1863) Nouveaux lundis. Tome I « Correspondance de Lammenais » pp. 22-43

Je n’y veux pas mettre mon nom. » Je lui répondis que j’allais à l’instant m’occuper de chercher ce libraire, chose bien aisée avec son nom, un peu plus difficile peut-être avec la condition de l’anonyme. […] Mais quand je retournai le lendemain trouver M. de Lamennais, sa pensée avait fait du chemin ; il consentait à mettre son nom au livre. […] Je suis ami du gouvernement, je ne puis mettre mon nom à cette publication ; mais, comme l’affaire est commencée, je ne refuse pas mes presses. On a le temps de chercher un autre nom d’imprimeur. » Je n’étais que passif en tout ceci ; je prévins l’éditeur, M.  […] Aujourd’hui qu’il est couché dans le tombeau et que l’idée entière de l’homme plane et surnage, rendons-lui son nom véritable : c’est le soldat de l’avenir, le soldat démocratique croyant et fervent, sans paix ni trêve, ne connaissant que le cri En avant !

359. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Le Mystère du Siège d’Orléans ou Jeanne d’Arc, et à ce propos de l’ancien théâtre français »

Ces deux formes si inégales ont éprouvé chez nous des destinées bien différentes : la dernière, une des plus nobles formes de l’art, une des créations choisies de l’esprit humain, a fourni d’immortels chefs-d’œuvre et a mis pour jamais en lumière les noms les plus glorieux de notre littérature et de notre poésie ; l’autre forme, au contraire, n’a promu à la célébrité (au moins chez nous) aucun nom d’auteur et de poëte, et n’a laissé, quoi qu’on s’efforce de faire aujourd’hui pour être juste, que des œuvres sans élévation, sans action durable et féconde. […] Comme toutes les facultés humaines y trouvaient à la fois leur compte ; et que l’on conçoit bien que les saint Bernard, les saint Bonaventure et toutes ces âmes mystiques et ardentes qui nous sont personnifiées sous de tels noms, y trouvassent leur fête et leur complet rassasiement ! […] Qu’Adam soit vêtu d’une tunique rouge, mais Ève d’un vêtement de femme blanc, avec un voile de soie blanc, et que tous deux se tiennent debout devant la Figure (la Figure, c’est le nom par lequel Dieu est habituellement désigné dans le courant de la pièce), Adam plus rapproché pourtant, le visage respectueux, Ève la tête un peu plus inclinée. » Tout ceci est pour la mise en scène ; ce qui suit est pour la récitation ; écoutez ! […] Après quoi la Figure Dieu, qui vient de former le premier homme du limon, l’appelle par son nom Adam ; celui-ci répond : Sire ! […] Et ici, ce grand nom de Milton prononcé, laissons-nous reporter, comme contraste, au souvenir de ces premiers chants du Paradis qui assiègent notre pensée, depuis que nous lisons ces balbutiements informes du vieil auteur dramatique inconnu.

360. (1854) Histoire de la littérature française. Tome I « Livre I — Chapitre quatrième »

Nous avons épuisé la liste des écrivains qui, dans cette période de l’histoire de l’esprit français et de notre langue, ont laissé des noms durables. […] Ces noms appartiennent à la philosophie et à la religion. […] J’en rencontre quelquefois le mot, et il y a un grand débat entre les réalistes et les nominaux, pour savoir si l’humanité est une réalité ou un nom, une abstraction réalisée ou une commodité de la parole. […] C’est le Faux-Semblant du Roman de la Rose, qui n’a fait que changer de nom. […] Du Guesclin, Charles V, Jeanne d’Arc, Louis XI, quelle distance de ces noms à ceux de nos chroniqueurs et de nos poètes !

361. (1887) Journal des Goncourt. Tome I (1851-1861) « Année 1853 » pp. 31-55

Nous allâmes d’abord chez notre président L… Il demeurait en haut de la rue de Courcelles, tout près de la place Monceau… Il était sec comme son nom, froid comme un vieux mur, jaune, blême, exsangue, une mine d’inquisiteur dans un appartement qui sentait le moisi du cloître. […] La colère fit trembler nos voix quand on nous demanda nos noms, que nous jetâmes avec un timbre frémissant comme à un tribunal de sang. […] qu’est-ce que c’est, Jacques, encore un manquement de service, f…… Je devrais vous faire fusiller, sacré nom de D… ! Je vous ferai f…… huit jours à la salle de police, nom de D… ! […] Dans le quartier, ce lupanar est plutôt connu sous ce terrible nom : Les Parques.

362. (1858) Cours familier de littérature. VI « XXXIIIe entretien. Poésie lyrique. David (2e partie) » pp. 157-220

que ton nom est resplendissant sur toute la terre, tandis qu’il resplendit si magnifiquement dans le ciel ! […] que ton nom est sublime sur toute la face de la terre !  […] … » Puis, comme s’il était déjà secouru : « Je dirai ton nom à mes frères ; au milieu de l’assemblée du peuple je chanterai ton nom !  […] « Terrible est le nom de Jéhovah ! […] J’aime à me retracer encore aujourd’hui la mémoire des sites et des impressions que j’y recevais des lieux, des noms et des chants sacrés.

363. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « Maurice comte de Saxe et Marie-Joséphine de Saxe dauphine de France. (Suite et fin.) »

Ce qu’il y a de plus fatigant encore, ce sont toutes ces présentations qui ne finissent pas ; et elle veut retenir tous les noms, ce qui est un travail d’esprit terrible ; sans cesse occupée d’ailleurs de plaire et d’attentions. […] Le roi cependant aimait sa belle-fille ; il l’aimait « autant et plus peut-être que ses propres enfants » ; il l’appelait familièrement de son petit nom de Pépa ; à ses premières couches, il se montra le père le plus affectueux et le plus tendre : « Le roi lui a constamment tenu la main pendant le travail, et l’on peut dire qu’elle est accouchée entre ses bras ; aussi en suait-il à grosses gouttes. » Mais que de difficultés et d’intrigues dans cette Cour partagée et divisée : la reine, Mesdames, Mme de Pompadour, et alentour, et au-dessous, des tourbillons d’ambitions sans nombre, tous se jalousant, se haïssant, et cherchant à s’emparer de cette puissance nouvelle qui entrait en scène ! […] Saint-René Taillandier) nous montre en conséquence Mme Favart « se moquant des menaces aussi bien que des promesses, en butte à de lâches intrigues, poursuivie, jetée au fond d’un cachot, gardant purs et intacts la dignité de son art et l’honneur de son nom : rare leçon donnée par une comédienne à une société corrompue !  […] Maurice de Saxe était un nom cher à la France, un nom populaire ; et on le vit bien, car un commencement de légende s’essaya aussitôt sur sa mort. […] J’ai rapproché précédemment (page 85) le nom du maréchal de Saxe de celui de Kléber ; j’ai été heureux de rencontrer depuis, dans la Vie politique et militaire de Napoléon par Jomini (tome I, page 302), une confirmation de cette vue.

364. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « Mémoires de Malouet (suite et fin.) »

Malouet nous rend à merveille l’effet extérieur et les péripéties de cette séance du 31 mai 1791 : « Le président eut à peine prononcé le nom de l’abbé Raynal et le titre de son adresse à l’Assemblée, que la salle retentit d’applaudissements. […] Malouet. reprit la reine, n’oubliez jamais son nom. » — Ce mot mérite de rester attaché au nom de Malouet dans l’histoire. […] Au bout d’une quinzaine, il partit avec un passe-port sous un nom supposé ; il arriva sans accident à Boulogne100, où il s’embarqua pour l’Angleterre. […] M. de  Chauvelin ne veut pas prendre sur lui de lui expédier de passe-port, et Malouet écrit sur le bureau même de l’ambassadeur sa demande à la Convention, laquelle, en la recevant, passa à l’ordre du jour, non sans avoir ordonné que le nom du signataire fût inscrit sur la liste des émigrés. […] M. le baron Malouet, qui n’a épargné aucun soin, aucune recherche, pour rendre la publication des Mémoires digne du nom qu’il porte, a reçu depuis peu, et trop tard pour en profiter, la communication de lettres écrites par son aïeul à Mallet du Pan, depuis le mois de mai 1792 et pendant les années d’exil.

365. (1895) Histoire de la littérature française « Première partie. Le Moyen âge — Livre II. Littérature bourgeoise — Chapitre I. Roman de Renart et Fabliaux »

Ainsi chaque espèce est fortement individualisée ; à l’abstraite et vague idée qu’évoque le nom commun de l’espèce, le nom propre, personnel, substitue l’image précise d’une physionomie et d’un tempérament uniques. […] que leurs noms individualisent, redeviennent des types, et figurent la permanence indéfinie de l’espèce. […] Quand eut-on, et qui eut l’idée géniale, épique, d’ajouter au nom de l’espèce un nom propre qui fit surgir l’individu du type ? […] Aussi voyez les rapports de Renart et d’Ysengrin ou de Primaut (les deux frères, ou plutôt le même type sous deux noms) : avant de se nuire l’un à l’autre, ils s’accordent pour nuire à autrui. […] Bon nombre sont anonymes ; des auteurs qu’on connaît, sauf Rutebeuf, on ne sait rien que le nom, et souvent le pays d’origine ; ils sont Français.

366. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Volney. Étude sur sa vie et sur ses œuvres, par M. Eugène Berger. 1852. — II. (Fin.) » pp. 411-433

Il méconnaît la sainteté, la vénération qui fait partie de l’âme humaine, toute cette race d’hommes pieux qui se personnifie, même en dehors du christianisme, dans les noms des Xénophon et des Numa. […] Se reportant aux jours affreux de la veille et ne prévoyant guère de jours sereins pour le lendemain, il abjure en quelque sorte cette doctrine de perfectibilité dont il s’était fait un moment l’apôtre : Ainsi, dit-il en terminant, ainsi, sous des noms divers, un même fanatisme ravage les nations ; les acteurs changent sur la scène, les passions ne changent pas, et l’histoire n’est que la rotation d’un même cercle de calamités et d’erreurs. […] L’expédition d’Égypte se fit, et, bien qu’il ne fût point au nombre des savants qui s’y joignirent, son nom se trouve inséparablement associé au leur. […] Il y a une certaine éclipse, qui est célèbre sous le nom d’éclipse de Thalès parce qu’elle fut prédite par ce philosophe. […] [NdA] En fait de vision dans laquelle intervient un Génie, et comme correctif des Ruines, je recommande le chapitre du Spectateur d’Addison (nº 159), connu sous le nom de « Vision de Mirza ».

367. (1772) Bibliothèque d’un homme de goût, ou Avis sur le choix des meilleurs livres écrits en notre langue sur tous les genres de sciences et de littérature. Tome II « Bibliotheque d’un homme de goût — Chapitre X. Des Livres nécessaires pour l’étude de la Langue Françoise. » pp. 270-314

Le nom de l’auteur prévint en faveur de l’ouvrage : mais on ne tarda pas à s’appercevoir que l’Abbé Regnier, quoique Secrétaire de l’Académie françoise, n’avoit point suivi le plan qui lui avoir été proposé plusieurs fois par cette Compagnie. […] Sous le nom du Sieur Trigny. […] Il explique la subordination des tropes ou les différentes classes ausquelles on peut les réduite, & les différens noms qu’on leur a donnés. […] L’Académie ne fit aucune réponse en son nom. […] C’est souvent une dissertation fastidieuse sur l’étimologie du nom d’un hameau, tandis que l’on n’y dit rien d’une ville considérable située dans le voisinage.

368. (1782) Plan d’une université pour le gouvernement de Russie ou d’une éducation publique dans toutes les sciences « Plan d’une université, pour, le gouvernement de Russie, ou, d’une éducation publique dans toutes les sciences — Plan, d’une université, pour, le gouvernement de Russie » pp. 433-452

C’est dans les mêmes écoles qu’on étudie encore aujourd’hui, sous le nom de belles-lettres, deux langues mortes qui ne sont utiles qu’à un très-petit nombre de citoyens ; c’est là qu’on les étudie pendant six à sept ans sans les apprendre ; que, sous le nom de rhétorique, on enseigne l’art de parler avant l’art de penser, et celui de bien dire avant que d’avoir des idées ; que, sous le nom de logique, on se remplit la tête des subtilités d’Aristote et de sa très-sublime et très-inutile théorie du syllogisme, et qu’on délaye en cent pages obscures ce qu’on pourrait exposer clairement en quatre ; que, sous le nom de morale, je ne sais ce qu’on dit, mais je sais qu’on ne dit pas un mot ni des qualités de l’esprit, ni de celles du cœur, ni des passions, ni des vices, ni des vertus, ni des devoirs, ni des lois, ni des contrats, et que si l’on demandait à l’élève, au sortir de sa classe, qu’est-ce que la vertu ? il ne saurait que répondre à cette question, qui embarrasserait peut-être le maître ; que, sous le nom de métaphysique, on agite sur la durée, l’espace, l’être en général, la possibilité, l’essence, l’existence, la distinction des deux substances, des thèses aussi frivoles qu’épineuses, les premiers éléments du scepticisme et du fanatisme, le germe de la malheureuse facilité de répondre à tout, et de la confiance plus malheureuse encore qu’on a répondu à des difficultés formidables avec quelques mots indéfinis et indéfinissables sans les trouver vides de sens ; que, sous le nom de physique, on s’épuise en disputes sur les éléments de la matière et les systèmes du monde ; pas un mot d’histoire naturelle, pas un mot de bonne chimie, très-peu de choses sur le mouvement et la chute des corps ; très-peu d’expériences, moins encore d’anatomie, rien de géographie. […] N’est-ce pas un phénomène bien étonnant que des écoles d’éducation publique barbares et gothiques, se soutenant avec tous leurs défauts, au centre d’une nation éclairée, à côté de trois célèbres Académies, après l’expulsion des mauvais maîtres connus sous le nom de jésuites, malgré la réclamation constante de tous les ordres de l’État, au détriment de la nation, à sa honte, au préjudice des premières années de toute la jeunesse d’un royaume et au mépris d’une multitude d’ouvrages excellents, du moins quant à la partie où l’on s’est attaché à démontrer les vices de cette éducation. […] Darcet, connu par l’alliage fusible qui porte son nom, était l’élève et l’ami de Rouelle.

369. (1920) Action, n° 4, juillet 1920, Extraits

Le grand nom de Barbusse, tombant sur cette décomposition estivale où la chaleur et les fraises nous faisaient glisser, nous réveilla en nous enflammant. […] Le livre de Colette, racontant l’éducation sensuelle et sentimentale de Claudine, publié en 1900 par Ollendorf sous le nom de son mari Willy, eut un grand succès. […] Cléo de Mérode (1875-1966), de son vrai nom Cléopâtre Diane de Mérode, danseuse étoile. […] Kœnigsmark est le nom d’un duc du xviie  siècle ayant connu le même sort que le mari d’Aurore. […] Elle est confiée à la mort de sa mère à la famille Morand : elle est de ce fait une amie proche de Giraudoux, ce qui peut sous-tendre l’association des deux noms faite par André Germain.

370. (1818) Essai sur les institutions sociales « Chapitre X. Première partie. Théorie de la parole » pp. 268-299

Dieu apprit donc à l’homme le nom de chaque chose, de chaque être, et de toutes les idées premières. Dieu revêtit d’un nom tous les sentiments de l’homme et le lui enseigna. Dieu se donna à lui-même un nom pour que l’homme connût le nom de Dieu. […] L’homme ne peut nommer que ce qui existe ; et ce n’est pas lui qui impose le nom, c’est la société. […] Le genre qu’on a voulu décorer du nom de poésie française n’est qu’une langue ornée, plus exclusive, qui est loin d’embrasser toute la langue poétique.

371. (1904) Prostitués. Études critiques sur les gens de lettres d’aujourd’hui « Chapitre premier. Prostitués »

N’aurait-on pas changé le nom des esclaves ? […] Et la pensée, qui se nourrit de liberté, mourut comme l’amour : on décora de son nom la flatterie et le sophisme comme le nom de l’autre dieu était porté par les baisers menteurs et par les comédies de caresses. […] J’offre mon amour et ma reconnaissance en échange d’un peu d’or qui me paiera du loisir, du luxe et de la gloire. » J’aperçois de branlantes masures, décorées des noms de romans ou de poèmes, et qui portent de gros numéros.

372. (1885) Préfaces tirées des Œuvres complètes de Victor Hugo « Préfaces des romans — Préfaces de « Han d’Islande » (1823-1833) — Préface d’avril 1823 »

Quelqu’un l’exhortait encore — car il doit tout dire ingénument à ses lecteurs — à placer son nom sur le titre de ce roman, jusqu’ici enfant abandonné d’un père inconnu. Il faut avouer qu’outre l’agrément de voir les sept ou huit caractères romains qui forment ce qu’on appelle son nom, ressortir en belles lettres noires sur de beau papier blanc, il y a bien un certain charme à le faire briller isolément sur le dos de la couverture imprimée, comme si l’ouvrage qu’il revêt, loin d’être le seul monument du génie de l’auteur, n’était que l’une des colonnes du temple imposant où doit s’élever un jour son immortalité, qu’un mince échantillon de son talent caché et de sa gloire inédite. […] Quant à l’observation que plusieurs amateurs d’oreille délicate lui ont soumise touchant la rudesse sauvage de ses noms norvégiens, il la trouve tout à fait fondée ; aussi se propose-t-il, dès qu’il sera nommé membre de la société royale de Stockholm ou de l’académie de Berghen, d’inviter messieurs les norvégiens à changer de langue, attendu que le vilain jargon dont ils ont la bizarrerie de se servir blesse le tympan de nos parisiennes, et que leurs noms biscornus, aussi raboteux que leurs rochers, produisent sur la langue sensible qui les prononce l’effet que ferait sans doute leur huile d’ours et leur pain d’écorce sur les houppes nerveuses et sensitives de notre palais.

373. (1906) Les œuvres et les hommes. Poésie et poètes. XXIII « Belmontet »

Les beaux vers, ces perles du collier des nations jeunes, qu’elles ne mettent plus dans leur vieillesse, les beaux vers deviennent de plus en plus rares ; les âmes tarissent, les imaginations se décolorent, et ce douloureux et magnifique oiseau, au bec lumineux, à la gorge teinte de la pourpre éclatante de son cœur : la Poésie, meurt, étouffé sous le large pouce de ces intérêts matériels dont la main brutalise à cette heure les plus pures et les plus fortes intelligences… Seulement, s’il y avait à faire une exception en faveur des poésies sur lesquelles les reflets d’un enthousiasme sincère se voyaient encore, n’était-ce pas en faveur de celles qui s’étoilent d’un nom glorieux et s’appellent Poésies de l’Empire 57? […] A nos yeux, les seules périodes comparables à celle qu’il anima de son génie sont, ou cette époque de l’histoire d’Espagne qui brille du nom presque fabuleusement beau de son Cid, ou, dans notre histoire, à nous, l’époque immense de Charlemagne. […] Charlemagne et Napoléon sont deux noms qui frappent le même accord dans l’imagination des hommes, soit par la grandeur de leur fortune, soit par le pathétique éclat qui s’est attaché à quelques-uns de leurs revers. […] pas une main sans force qui a écrit : Une Scène de nuit à Schœnbrunn, La Popularité des grands Noms, Les Impérialistes, La Mort de l’Empereur, et la plupart des odes de ce recueil.

374. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre XXV. De Paul Jove, et de ses éloges. »

Paul Jove a fait l’éloge ou le portrait de tous ces hommes, la plupart plus courageux que saints ; mais dans cette foule de noms, on aime à retrouver à Florence, les Médicis ; à Milan, ces fameux Sforces, dont l’un simple paysan, devint un grand homme ; et l’autre, bâtard de ce paysan, devint souverain ; à Rome, les Colonnes, presque tous politiques ou guerriers ; à Venise plusieurs doges et quelques généraux ; à Gênes, ce célèbre André Doria, qui vainquit tour à tour et fit vaincre Charles-Quint, redoutable à François Ier et à Soliman, mais grand surtout pour avoir rendu la liberté à sa patrie, dont il pouvait être le maître. […] À la suite de tous ces noms de guerriers ou de princes rassemblés des trois parties du monde, c’est un spectacle curieux de retrouver les noms du Dante, de Pétrarque, de Boccace, de l’Arioste, du cardinal Bibiéna, auteur de la comédie de la Calandre, jouée au Vatican sous Léon X, et du célèbre Machiavel ; sans compter cette foule innombrable de savants, presque tous Grecs ou Italiens, qui dénués, il est vrai, de ce mérite rare du génie, contribuèrent, cependant, par leurs travaux, au rétablissement des lettres, en faisant revivre les langues qui ne s’étaient conservées que chez les chrétiens de Constantinople, et la philosophie ancienne qui, depuis la chute de l’empire, n’avait été cultivée que par les musulmans arabes. […] Quoique ce prince fût encore vivant, Paul Jove ose l’appeler de son véritable nom, c’est-à-dire, un monstre ; il est vrai que ce monstre était alors détrôné et enfermé dans une cage de fer ; mais beaucoup d’autres auraient craint que la cage ne fût brisée, et que ce monstre, en remontant sur le trône, ce qui est arrivé quelquefois, ne redevînt un très grand prince.

375. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Première partie. — Chapitre IX. »

On sait la célébrité d’Anacréon ; il n’est pas de nom grec plus connu. […] Maintenant ils sont impérissables ; et, si nous n’avons pas l’Anacréon que lisait Horace, le nom du moins et quelque chose du poëte vivront toujours. […] Mais tout cela, renommée vulgaire à part, nous laisse bien loin du charme poétique réveillé par le nom du vieillard de Téos. Un autre poëte lyrique, d’un nom plus grave, tromperait moins notre espérance, si le temps nous avait laissé de son heureux génie quelques parcelles de plus.

376. (1858) Cours familier de littérature. VI « XXXIIe entretien. Vie et œuvres de Pétrarque (2e partie) » pp. 81-155

Évadé de Rome, comme on l’a vu dans notre récit, il s’était fait ermite, sous le faux nom du Père Ange, au mont Maïella, dans le royaume de Naples. […] « En voyant votre nom j’ai connu d’abord le sujet de votre lettre. […] Le nom de Laure se répandit pendant cinq siècles avec les vers ; elle est aussi vivante et aussi immortelle aujourd’hui qu’alors. Jamais nom de femme n’eut pour monument un tel cœur, un tel génie et de tels vers ! […] Il choisit l’italien, pour que le nom de son idole retentisse plus loin dans la foule et donne à ce nom l’immortalité des multitudes, la popularité ; il crée une langue pour la chanter !

377. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre XVI. La littérature et l’éducation publique. Les académies, les cénacles. » pp. 407-442

Au même moment pouvait-on donner le nom d’homme au Christ ? […] Qu’on ne leur parle plus d’accepter docilement, l’autorité d’un roi et le nom de sujets ! […] Le respect de certaines convenances, que d’aucuns appelleront conventions (mais le nom importe peu) leur est imposé par le titre commun qui les lie. […] Et certes, bien des noms glorieux se sont inscrits au livre d’or de la postérité ; mais aussi que d’avortements douloureux ! […] Z. a trouvé la formule du théâtre de demain qui est pour l’appeler par son nom : l’idéo-réalisme.

378. (1925) Comment on devient écrivain

Le nom est lancé, l’œuvre s’impose, le public suit. […] — La « documentation ». — Les noms des personnages.‌ […] On retient son nom ; on oublie le personnage. […] Les noms propres ont leur physionomie et leur beauté. […] Pas un élève de Pierre Loüys n’est parvenu à se faire un nom.‌

379. (1891) Études critiques sur l’histoire de la littérature française. Quatrième série

Cette mauvaise langue de Furetière n’a-t-il pas insinué qu’on payait pour être peint, sous quelque nom grec ou babylonien, dans ces romans célèbres ? […] Ne sont-ce peut-être que des noms ? […] Si la langue ou la phrase de Pascal ont des mérites que celles de Nicole n’aient point, ne tâcherons-nous pas de les nommer par leur nom ? […] Ni Voltaire, ni Diderot non plus n’ont prévu, ni sans doute voulu, tout ce qui s’est fait depuis eux sous l’autorité de leur nom. […] En second lieu, s’il a comme eux écrit quelquefois sous son nom, il a peut-être écrit encore davantage sous des noms supposés ; — et Quérard, qui jadis, dans sa Bibliographie voltairienne, ne relevait pas moins de cent trente-sept pseudonymes du grand homme, en a certainement oublié quelques-uns.

380. (1868) Cours familier de littérature. XXV « CXLVe entretien. Ossian fils de Fingal »

Quels noms plus illustres dans Inisfail que les noms de Caïrbar et de Grudar ; mais, hélas ! […] Les bardes conserveront leurs noms, et les rediront aux siècles à venir. […] Comment pourrais-je redire dans mes chants tant de noms et de morts ? […] Ullin, ancien nom de l’Ulster. […] Nom du royaume de Swaran, en Scandinavie.

381. (1853) Histoire de la littérature dramatique. Tome II « Chapitre VI » pp. 394-434

Ésope était esclave, on n’a jamais su le nom de son maître ! […] Dans le chapitre de La Bruyère, il est parlé de la difficulté de se faire un grand nom ; aujourd’hui, le plus petit nom se fait grand, en vingt-quatre heures ! […] Elle domine, de sa grandeur, les passions environnantes… à peine si demain, le monde saura le nom de cette Muse ! […] Les feuilles nombreuses du chêne et du laurier portaient le nom de tous les rôles créés jusqu’à ce moment, par mademoiselle Mars ; une grande quantité de feuillage attendait les noms qui devaient compléter le couronnement de cette belle vie. […] À ce nom admiré, nos deux aimables bohémiens se lèvent, dans un transport unanime d’admiration et de respect.

382. (1862) Cours familier de littérature. XIV « LXXXIIIe entretien. Considérations sur un chef-d’œuvre, ou Le danger du génie. Les Misérables, par Victor Hugo (1re partie) » pp. 305-364

Le sage et courageux Dupont (de l’Eure), notre président, qui m’avait donné en secret, par écrit, sa survivance pendant les tempêtes du premier et du second jour, parla en notre nom à tous. […] « — Oui, mon bourgeois », me dit-il ; et il enfila des rues parallèles aux boulevards et à la rivière, dont j’ignorais même le nom. […] Comment pourrais-je oublier jamais cette ode de 1825, à Lamartine, qui éleva mon nom plus haut cent fois que la réalité, sur le souffle d’un tourbillon d’amitié, vent d’équinoxe du printemps, qui prend une feuille et qui la porte aussi haut qu’un astre ? […] « Marchons, et confessons le nom de Jéhova !  […] Il faut bien que ton nom dans ses cris retentisse :         Le temps amène la justice : Laisse tomber l’orage et grandir ton laurier !

383. (1889) Le théâtre contemporain. Émile Augier, Alexandre Dumas fils « Émile Augier — CHAPITRE VI »

Il sait que son fils aime madame Lecoutellier, née de Valtaneuse ; il sait aussi que la veuve convoite ardemment le château qui lui permettrait de reprendre ce nom patricien. […] Le dénouement, c’est le châtiment de maître Guérin, jugé, condamné et exécuté par son fils, qui découvre en lui l’usurier abrité sous le nom de Brenu. […] Il arrive d’Espagne, après dix ans d’exil volontaire et de labeur opiniâtre, et il en rapporte la fortune sous la forme d’un projet qui doit en même temps honorer son nom. […] D’Estrigaud recule d’abord devant cette fortune souillée, puis il s’apprivoise à l’idée de la payer de son nom. […] La maîtresse du petit Lucien a trouvé dans sa poche une lettre de femme, signée du nom d’Aline, qui lui fait pousser des cris inhumains.

384. (1884) La légende du Parnasse contemporain

Il serait pourtant bien difficile de faire croire aujourd’hui que ces noms étaient alors des noms d’imbéciles ! […] Sully Prudhomme était un nom que l’on ne connaissait pas. […] Elle a ridé le front de tous les artistes dignes de ce nom. […] Che fais fus tire fotre nom réel. […] Il consentit et reçut, avec une livrée, le nom de Covielle.

385. (1853) Portraits littéraires. Tome II (3e éd.) pp. 59-300

Les noms que M.  […] Il avait besoin, pour obtenir les vaisseaux et l’argent de l’Espagne et de la Hollande, du nom d’un grand seigneur, et il a trouvé un cadet de famille ruiné, le chevalier de Rohan, qui a vendu son nom pour cent mille écus. […] Si Clara consentait à lui céder, il n’écrirait pas à Louvois, il ne lui révélerait pas le nom des conjurés. […] Vitet ; mais restituer n’est pas créer, et le poète qui ne crée pas ne mérite pas le nom de poète. […] Il baptise de noms étranges et hautains l’intime familiarité à laquelle il a dû ses plus douces journées.

386. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « M. Victor Vousin. Cours de l’histoire de la philosophie moderne, 5 vol. ix-18. »

Je regrette presque pour elle qu’elle n’ait pas gardé ce premier nom qui, en la spécifiant d’une manière moins distinctive, la définissait pourtant avec largeur et vérité. […] A vrai dire, quand une philosophie en est arrivée là, quelles qu’aient pu être sa valeur et sa vérité au point de départ, il est temps qu’elle finisse et soit détrônée ; car toute philosophie, digne de ce nom, n’existe qu’à la condition d’être sans cesse en question, sur le qui-vive, et de recommencer toujours. […] Aussi, malgré les premiers étonnements et les hauts cris que soulève toute idée nouvelle, l’éclectisme, servi par la belle parole et l’infatigable activité de son promoteur, a fait fortune avec les années, et son nom est devenu celui même de l’école philosophique moderne. J’ai paru regretter précédemment que ce nom ait prévalu au point d’éclipser celui de spiritualisme qui s’appliquait mieux au fond et à la nature des idées. […] Telles qu’on les peut lire aujourd’hui, sous cette forme de révision sévère, la suite de leçons où figurent successivement tant de noms célèbres dans l’ordre philosophique ou moral, Helvétius, Saint-Lambert, Hutcheson, Smith, est d’un aimable autant que sérieux intérêt.

387. (1863) Molière et la comédie italienne « Chapitre XI. Il Convitato di pietra (le Convié de pierre) » pp. 191-208

On verra plus loin comment Dominique Biancolelli, engagé dans la troupe pour l’emploi de second zanni sous le nom d’Arlequin, doubla Trivelin de 1662 à 1671 et joua ensuite les premiers rôles jusqu’en 1688. […] C’est un long rouleau de parchemin qu’il lance jusqu’au milieu du parterre, il en retient le bout et dit : “Examinez, messieurs, voyez si par hasard vous n’y trouverez pas le nom de votre femme, d’une de vos parentes, les noms de vos bonnes amies.” « Rosalba, désolée, voyant que l’archiviste Arlequin inscrit son nom au bas de la liste, se précipite dans la mer. […] Don Juan dit au fiancé : “Recevez mon compliment, seigneur Cornelio. — Mais ce n’est pas mon nom. — Il le sera bientôt.”

388. (1867) Le cerveau et la pensée « Chapitre VII. Le langage et le cerveau »

Un malade s’appelle Paquet, et il sait écrire son nom ; on lui demande d’écrire le petit nom de sa femme, il écrira « Paquet », le nom du mois « Paquet », etc., comme une mécanique qui, une fois montée, fait toujours le même mouvement. […] Baillarger, une femme qui ne peut nommer aucun des objets les plus usuels ; elle ne peut même dire son propre nom… Elle a conscience de son état et s’en afflige… Cependant elle prononce une foule de mots incohérents, en les accompagnant de gestes très expressifs qui prouvent que derrière cette incohérence il y a des idées bien déterminées qu’elle veut exprimer61. » M.  […] Quelque intéressants que soient par eux-mêmes les faits que nous venons de rapporter, il est difficile d’en tirer une théorie générale, et c’est assez arbitrairement qu’on désigne des phénomènes si différents sous le nom général d’aphasie, à moins qu’on ne convienne que c’est là une étiquette purement arbitraire, qui sert à dénommer tous les troubles, de quelque nature qu’ils soient, qui peuvent affecter les rapports du langage et de la pensée.

389. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre XVIII. Souvenirs d’une Cosaque »

La femme qui l’a écrit… ou qui l’a inspiré est, — dit-on, — une vraie Cosaque, portant un nom cosaque, Madame Olga… je ne sais qui ! Si je ne sais qui s’écrivait Jenesayki, cela aurait assez l’air d’un nom cosaque, mais l’auteur a mieux aimé celui de Robert Franz. […] Robert Franz n’est pas, en pied, le blanchisseur de gros ou de fin de la Maison Lacroix et compagnie, mais simplement une invention, une forme littéraire, un procédé, employé pour faire mousser sans imprudence, ce livre-ci, je trouve, pour ma part, cette invention et ce procédé encore moins cosaques que le nom si tranquillement bourgeois et bon garçon de M.  […] C’est qu’après l’avoir lue, cette femme indisciplinée qui ne relève que d’elle-même, — qui a l’ivresse et la folie du plus satané orgueil que le diable, auquel elle ne croit pas, mais à qui elle fait croire, ait jamais départi à une aimable femme, on n’a plus sous les yeux qu’une personne ou assez modeste, ou assez prudente, ou assez sournoise pour se mettre derrière le nom de M. Franz et faire des X comme un mathématicien, quand il s’agit de nommer les gens par leur nom, car il n’y a pas que son amant qui s’appelle X… dans ses Souvenirs.

390. (1885) Les œuvres et les hommes. Les critiques, ou les juges jugés. VI. « Joubert » pp. 185-199

Un jour, quand il était dans toute sa splendeur, l’heureux Chateaubriand, cet enfant gâté qui a toujours voulu de la lune, et qui a toute sa vie été triste, parce que c’est la seule chose que son époque n’a vraiment pas pu lui donner, l’insupportablement heureux Chateaubriand publia une lettre sur Rome — bon sujet de belles phrases — sur la suscription de laquelle le grand phraseur, ce Narcisse qui était son Écho amoureuse à lui-même, écrivit ce nom modeste et bourgeois (l’un ne veut pas dire l’autre) de Joubert. […] Ce fut la première fois que ce nom de Joubert, écrit pourtant par Chateaubriand, parut, pour disparaître. […] Le nom de Joubert s’en alla encore où s’en étaient allées les feuilles de saule dans le roman de René. […] voyez, examinez si mon muguet, cette fleur d’albâtre, n’est pas une bouture de Platon ; si ce Joubert, au nom bourgeois, n’est pas Platon, mais dans ce milieu plat et non platonique du monde moderne que nous touchons avec la main, car l’éloignement, cette perspective qui crée la poésie, rapetisse les objets comme il les grandit. […] Au nom seul, à l’idée seule de Platon, les miettes de ce beau génie grec qu’il avait dans l’esprit s’agitent, se rejoignent, deviennent sonores et se mettent à vibrer comme des disques d’or sur la peau frémissante d’un tambour qu’on aurait frappé, et l’on entend comme une répercussion de cette harmonie que Platon répand de lui-même comme d’une lyre qui a le son en elle… Comme Platon, Joubert n’a jamais cherché que des formes et des idées, et on peut dire de lui ce qu’il disait de Platon : « Platon a en lui plus de lumière que d’objets, plus de forme que de matière.

391. (1906) Les œuvres et les hommes. Femmes et moralistes. XXII. « Madame de Montmorency » pp. 199-214

… Dans ce fouillis de gloire qu’on appelle les Montmorency, il doit y avoir, si on fait l’histoire de chaque tombe, bien de hautes vertus, de fières et chastes physionomies de femmes, de destinées sublimes de grandeur et de simplicité, qu’on pourrait nommer aussi : Madame de Montmorency, comme l’héroïne de Renée, et qu’on ne distinguerait pas, à la première vue, sous ce nom collectif porté comme un pavois par soixante générations, et qui nous brouille tout de sa splendeur. Assurément, depuis Denise de Montmorency, qui sous Charles VI défendit si vaillamment le château de son mari contre les Anglais, jusqu’à cette vieille abbesse de Montmorency, qui mourut sur l’échafaud en 1794, après avoir béni, comme si elle avait été dans sa stalle de chœur et la crosse à la main, la religieuse qui portait sa croix et qui mourut après elle, on peut ranger bien des Montmorency, de nom ou d’alliance, qui eurent aussi, comme celle d’Amédée Renée, l’éclat dans la vie, la force de l’âme, le malheur, et le cloître pour dôme à tout cela, — le seul dôme qui aille bien à toutes nos poussières. […] Les services qu’il avait rendus, très comptés par l’État, et d’ailleurs récompensés par le rang qu’il tenait dans le royaume, n’auraient pas suffi cependant pour lui valoir ces deux lignes d’histoire qui empêchent un nom de périr. […] Persécutée d’abord à cause du nom qu’elle portait, et des influences qu’on lui savait dans cette province du Languedoc que son mari avait gouvernée, elle ne sortit de prison, quand la persécution se détourna d’elle, que pour se retirer à Moulins, dans le couvent de Sainte-Marie, où elle garda pendant quelque temps sa maison. […] Elle n’avait souhaité que le silence et l’oubli ; son vœu devait être exaucé, car son nom est à peine resté dans la mémoire des hommes.

392. (1893) Les œuvres et les hommes. Littérature épistolaire. XIII « Lamennais »

il n’en restera pas moins l’apostat, et, quels que soient les motifs connus ou inconnus de l’apostasie, on n’effacera pas de l’histoire de Lamennais ce mot effroyable, entré de force dans son nom, ce simple mot qui ennuie beaucoup M.  […] Cet amasseur de tempêtes autour de son nom était un écouteur de vent et un contemplateur de pluie. […] Ce roseau pensant de Pascal, qui n’avait pas besoin que la nature s’armât pour l’écraser quand il remuait, lui, l’univers, et qui, comme tous les roseaux, aimait le bord de l’eau, même la plus humble, ce fortuné de renommée qui s’appelait Félicité, le nom le plus mélancoliquement moqueur qui puisse être donné à un homme, ne fut jamais heureux et n’était rien de plus qu’une âme triste dans un corps malade. […] Le 24 mai 1826, écrivant à la comtesse de Seult, un de ces anges d’amitié comme il en passa plusieurs dans sa vie, il se définissait sans regret, sans amertume et même sans tristesse : « un homme pauvre, sans nom, sans place, sans position, à qui bien prenait de ne rien demander aux hommes et de ne vouloir absolument rien d’eux » ; et excepté le sans nom, car la gloire, à cette heure-là, faisait du sien le plus beau qu’il y eût alors en Europe, tout était vrai dans cette définition qu’il donna de lui-même et qui resta vraie, même quand il eut abandonné Dieu pour les hommes.

393. (1889) Les œuvres et les hommes. Les poètes (deuxième série). XI « André Chénier »

il l’est peut-être trop… On a fait pour les œuvres poétiques d’André Chénier ce que l’on a fait pour le nom du poète. […] Gabriel de Chénier signe son nom, qui a l’honneur d’être noble, comme on le signe dans sa famille et comme il était écrit autrefois dans le Nobiliaire de France. Mais la Gloire a marqué de son pouce lumineux le nom d’André Chénier, et on ne touche pas à ce qu’a fait la Gloire ! André de Chénier étonne la bouche et le regard ; et André Chénier restera toujours André Chénier pour ceux qui prononceront son nom. […] Justement, les faiseurs et les poursuivants de biographie, tous ces gens qui veulent attacher des notices aux talons des poètes, ces rêveurs qui nous font rêver et qui se révèlent par leurs chants, avaient cru reconnaître les femmes que l’ardent élégiaque a aimées dans ses vers et en avaient écrit les noms.

394. (1904) Les œuvres et les hommes. Romanciers d’hier et d’avant-hier. XIX « Stendhal et Balzac » pp. 1-16

précisément parce qu’ils ne jouaient pas en aveugles obstinés à cette stupide et éternelle martingale des mêmes noms et des mêmes œuvres, aimés de la foule, et qu’on use, sous le nombre des éditions, comme on crève les meilleurs chevaux de poste sous les aiguillons et sous le fouet, ils gagnaient davantage, — disons le mot, puisque c’est gagner qui est l’important ! — et ils finissaient par trouver que c’était bien jouer, même au point de vue du comptoir, que d’avoir de l’initiative, que d’oser mettre en avant des noms nouveaux ou ressusciter des noms anciens trop oubliés, que de publier enfin, à ses risques et périls, des livres vierges, ou de refaire sans peur une édition de quelque vieux livre épuisé. […] Stendhal, ou, pour l’appeler par son vrai nom, Henri Beyle, a, comme tous les hommes d’un talent réel, gagné à mourir. […] En vain se cachait-il d’elle pour lui donner l’envie de le découvrir, et croyait-il faire étinceler, en rondes bosses d’or, toutes les lettres de son nom à travers les ternes pseudonymes qu’il écrivait au front de ses œuvres : la Gloire lui répondit en vraie femme qui a le caprice de ne plus faire de contradiction.

395. (1904) Les œuvres et les hommes. Romanciers d’hier et d’avant-hier. XIX « Arsène Houssaye » pp. 271-286

Est-ce à cause de ce nom, de ce terrible nom qu’il lui a donné ? ou ne serait-ce pas plutôt par le contraste qu’elle fait avec cet osé et terrible nom ? […] Et il l’a gravée avec tant de force, que de ce nom de Messaline qu’il a tué, comme nom, — car quelle femme voudrait le porter ?

396. (1908) Les œuvres et les hommes XXIV. Voyageurs et romanciers « Francis Wey »

Mirèio, dont nous avons tant parlé, Mirèio et ses douze chants, ce poème de longueur à l’Énéide, est un poème écrit en provençal ; mais, en français, nul grand travail de poésie, de philosophie et d’histoire n’a révélé des noms nouveaux ou consacré des noms déjà connus. […] C’est là un nom qui dit l’esprit du livre. […] Elle s’appelle du nom idéal d’Éliane de Talavère. […] Éliane est une jeune fille très forte, malgré l’image languissante penchée, pour ainsi parler, dans son nom.

397. (1864) Le roman contemporain

Ce nom frappa celui devant lequel on le prononçait. — « Du Terrail, dit-il, c’est le nom du chevalier sans peur et sans reproche. […] Paul Féval, ce n’est pas à coup sûr en rangeant les noms par ordre de mérite. […] rapprocher ce grand nom des Capétiens du nom infâme de Cartouche. — « Mais, dit M.  […] On ne lui avait jamais connu d’autre nom. […] Point de nom de famille, elle n’avait pas de famille ; point de nom de baptême, l’Église n’était plus là.

398. (1853) Portraits littéraires. Tome I (3e éd.) pp. 1-363

Hugo nous semblent condamnées à un prochain oubli, le nom de M.  […] Hugo que le nom. […] Signées d’un nom qui fût demeuré obscur, elles ne mériteraient aucune attention ; signées du nom de M.  […] Hugo d’appeler doute pourrait très bien s’appeler d’un autre nom. […] Sans les tempêtes qu’il a traversées, le nom de M. 

399. (1900) Le rire. Essai sur la signification du comique « Chapitre III. Le comique de caractère »

Car les mots (à l’exception des noms propres) désignent des genres. […] Nous aurons beau donner à ces sentiments des noms généraux ; dans une autre âme ils ne seront plus la même chose. […] Le Misanthrope, l’Avare, le Joueur, le Distrait, etc., voilà des noms de genres ; et là même où la comédie de caractère a pour titre un nom propre, ce nom propre est bien vite entraîné, par le poids de son contenu, dans le courant des noms communs. […] Rappelons-nous le joueur de Régnard, s’exprimant avec tant d’originalité en termes de jeu, faisant prendre à son valet le nom d’Hector, en attendant qu’il appelle sa fiancée Pallas, du nom connu de la Dame de Pique, ou encore les Femmes savantes, dont le comique consiste, pour une bonne part, en ce qu’elles transposent les idées d’ordre scientifique en termes de sensibilité féminine : « Épicure me plaît… », « J’aime les tourbillons », etc. […] Cette inversion du sens commun porte-t-elle un nom ?

400. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Chateaubriand, jugé par un ami intime en 1803, (suite et fin) » pp. 16-34

Cela est très-délicat et demanderait à être éclairci par des noms propres, par quantité de faits particuliers ; j’en indiquerai quelques-uns. […] Je revêtirai ma pensée de noms illustres. […] En poésie, au théâtre, en tout comme à la guerre, les uns n’ont qu’un jour, une heure brillante, une victoire qui reste attachée à leur nom et à quoi le reste ne répond pas : c’est comme Augereau, qui aurait mieux fait de mourir le soir de Castiglione. […] Tâchons de trouver ce nom caractéristique d’un chacun et qu’il porte gravé moitié au front, moitié au dedans du cœur, mais ne nous hâtons pas de le lui donner. […] Changez les noms, et mettez-en de plus modernes, si vous le voulez : l’épigramme est éternelle.

401. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « La civilisation et la démocratie française. Deux conférences par M. Ch. Duveyrier »

Les villes, les États, les plus grands noms, Montmorency, La Rochefoucauld, nous avons tous fait le sacrifice de nos privilèges sur l’autel de la patrie !” […] On cherche dans le passé les noms des quelques hommes qui ont assez aimé la science et la société en elles-mêmes pour s’y vouer avec cette ardeur. […] Si Lanjuinais n’avait pas exigé le titre, ses gens auraient mis leur vanité à le lui donner. — Lemercier (Népomucène) passe pour un grand caractère, à trempe républicaine ou du moins d’une teinte des plus libérales : sa femme, Édon de son nom, était fille ou nièce du restaurateur bien connu dans la rue de l’Ancienne-Comédie. Or, le successeur d’Édon, Pinson, que Mme Sand a plus d’une fois nommé dans ses livres, avait gardé sur son enseigne le nom du premier patron. […] Lemercier qui, après quelque préambule, venait le sommer de supprimer le nom, attendu que Mme Lemercier ne pouvait passer dans cette rue sans que cela lui fît une impression pénible.

402. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « Le comte de Clermont et sa cour, par M. Jules Cousin. (Suite et fin.) »

Il n’y a rien que de naturel dans cette liaison des noms ; il n’est que juste que ceux qui alimentent la chronique scandaleuse soient cousins de ceux qui l’écrivent. […] Il y a, on le sent, un abîme entre de tels noms de femmes qui font honneur à qui les aime, et Mlle Leduc que le comte de Clermont, même livré à elle et soumis, n’estimait pas. […] Le comte de Clermont s’était si bien acoquiné à Berny qu’il n’allait plus même à Versailles qu’à de très rares occasions, et l’appartement inscrit à son nom était plutôt devenu celui du roi Stanislas ou de tout autre hôte au gré de la reine. […] Des hommes courageux, tels que M. de Morangiès, gouverneur de Minden, laissé sans secours, se rendaient avec le poignard dans le cœur, mais avec une tache à leur nom. […] On peut voir, au chapitre IX du Traité des grandes opérations militaires par Jomini (4e édit., 1851, tome II, pages 1-38), le jugement définitif que la science militaire et l’histoire ont porté sur cette campagne de 1758, qui a immortalisé dans le plus triste sens le nom du comte de Clermont.

403. (1863) Molière et la comédie italienne « Chapitre XIV. La commedia dell’arte au temps de Molière (à partir de 1662) » pp. 265-292

La troupe s’était adjoint Andrea Zanotti, second amoureux sous le nom d’Ottavio, Ursula Corteza, seconde amoureuse sous le nom d’Eularia, et un second zanni, Domenico Biancolelli, né à Bologne, en 1640, jouant sous le nom d’Arlequin ; en tout dix personnages, qui sont le nombre indispensable, dit Angelo Costantini, pour jouer une comédie italienne. […] La rédaction qui en est donnée par Cailhava est, il est vrai, plus moderne ; à défaut d’autre, nous devons nous contenter de la reproduire ; mais il nous sera permis de rétablir les noms de la troupe qui joua à Paris de 1662 à 1671. […] Le nom de Dominique est un des plus célèbres de la commedia dell’arte. […] « L’inimitable Monsieur Dominique, dit son successeur Gherardi, a porté si loin l’excellence du naïf du caractère d’Arlequin, que les Italiens appellent goffagine, que quiconque l’a vu jouer trouvera toujours quelque chose à redire aux plus fameux Arlequins de son temps. » L’inimitable, c’est l’épithète attachée à son nom : « Qui ramènera, dit Palaprat dans la préface de ses œuvres, qui ramènera les merveilles de l’inimitable Domenico, les charmes de la nature jouant elle-même à visage découvert sous le visage de Scaramouche ? 

404. (1890) L’avenir de la science « XII »

XII À mes yeux, le seul moyen de faire l’apologie des sciences philologiques et, en général, de l’érudition est donc de les grouper en un ensemble, auquel on donnerait le nom de sciences de l’humanité, par opposition aux sciences de la nature. […] Et, quand la Bretagne ne sera plus, la France sera ; et, quand la France ne sera plus, l’humanité sera encore, et éternellement l’on dira : « Autrefois, il y eut un noble pays, sympathique à toutes les belles choses, dont la destinée fut de souffrir pour l’humanité et de combattre pour elle. » Ce jour-là, le plus humble paysan, qui n’a eu que deux pas à faire de sa cabane au tombeau, vivra comme nous dans ce grand nom immortel 111 ; il aura fourni sa petite part à cette grande résultante. […] Et pourtant quels noms sont plus acquis à l’immortalité ? […] Le nom seul de l’auteur reste dans les fastes de l’esprit humain comme le nom des politiques et des grands capitaines. […] Nous souhaitons que notre nom reste bien plus que notre livre.

405. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Monsieur Walckenaer. » pp. 165-181

Le biographe ou plutôt le compagnon, l’introducteur assidu de Mme de Sévigné et de La Fontaine, avait participé à la fortune et au bonheur de de ces deux noms, il s’était fait des amis, et ce n’est pas sans un vrai sentiment de regret qu’on a appris que M.  […] Walckenaer était né à Paris le 25 décembre 1771, très Parisien malgré ce nom de physionomie étrangère. […] Il a les noms de tous ceux qui ont visité Mme de Sévigné tel jour et tel soir ; il a les noms aussi de ceux qui sont allés chez les bonnes amies de Mme de Sévigné, chez Mme de La Fayette, chez Mme de Coulanges, ou même chez une simple connaissance, chez Mme Pelissari. […] Les sciences positives qu’il a cultivées et augmentées enregistreront son nom ; la littérature française ne saurait désormais oublier non plus un nom qui se trouve lié d’une manière si inséparable à ceux de Mme de Sévigné et de La Fontaine.

406. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre XXXIII. Des éloges ou panégyriques adressés à Louis XIV. Jugement sur ce prince. »

On n’écrivait, on ne prononçait rien où le nom de Louis XIV ne fût mêlé. […] Il n’y a pas un de leurs discours où, en déplorant les vanités du monde, ils n’aient l’art d’amener adroitement ce nom, et ne célèbrent, en passant, les exploits, les merveilles et la sagesse étonnante de ce prince. […] Dès 1663, panégyrique sur Louis Dieu-donné : c’était le nom de ce prince, dont la naissance fut regardée comme une faveur du ciel. […] Leur nom était le premier de l’Europe.  […] Ainsi, après s’être occupé de ses grands desseins avec ses généraux et ses ministres, il se délassait quelquefois en conversant avec Racine : il ordonnait qu’on représentât devant lui les chefs-d’œuvre du vieux Corneille : il sentait de l’orgueil à se voir servir dans son palais par l’auteur du Misanthrope et du Tartufe, et donnant à Molière son roi pour défenseur, empêchait qu’une cabale d’autant plus terrible, qu’on y mêlait le nom de la vertu, n’opprimât un grand homme.

407. (1885) Le romantisme des classiques (4e éd.)

Ce nom d’Alizon, nom de femme, était sans doute celui d’un de ses rôles. […] Ce nom rend raison de l’agréable variété de ton et de touche qui en fait le caractère romantique. […] Le fils Mon nom est-il Talbot ? […] On attache à son nom un opprobre éternel ! […] Nous en avons, sous son nom, trente-cinq authentiques, et deux autres incertaines : le tout en vingt-deux ans.

408. (1876) Chroniques parisiennes (1843-1845) « XLVIII » pp. 188-192

 — Le spectacle de ces manœuvres parlementaires, de ces luttes qui n’ont aucune grande inspiration et ne méritent pas d’autre nom que celui d’intrigue, donne un à-propos tout particulier au travail que M. de Viel-Castel vient de publier dans la Revue des Deux Mondes du 1er mars sur lord Chatham. […] On se demande de loin comment il se fait qu’un corps éminent comme l’Académie ait le don d’attirer, de susciter des noms si secondaires, en même temps que de plus hautement désignés s’en éloignent et s’en abstiennent. […] Nous ne faisons qu’indiquer la plaie ; elle est profonde et serait trop facile à démontrer par des noms.

409. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — D. — article » pp. 189-194

Je ferois grande injure à mes Vers & à moi, Si, en parlant de l’or, je ne parlois de toi, Qui as le nom doré, mon Dorat ; car cette Hymne, De qui les vers sont d’or, d’un autre homme n’est digne Que toi, dont le nom, la Muse & le parler Semblent l’or que ton fleuve, Orence, fait couler. […] Cet exercice monacal Ne trouve son point vertical Que dans une tête blessée ; Et, sur Parnasse, nous tenons Que tous ces Renverseurs de noms Ont la cervelle renversée.

410. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Troisième partie. Beaux-arts et littérature. — Livre quatrième. Éloquence. — Chapitre III. Massillon. »

Si nous franchissons maintenant plusieurs siècles, nous arriverons à des orateurs dont les seuls noms embarrassent beaucoup certaines gens ; car ils sentent que des sophismes ne suffisent pas pour détruire l’autorité qu’emportent avec eux Bossuet, Fénélon, Massillon, Bourdaloue, Fléchier, Mascaron, l’abbé Poulle. […] si tout meurt avec nous, les soins du nom et de la postérité sont donc frivoles ; l’honneur qu’on rend à la mémoire des hommes illustres, une erreur puérile, puisqu’il est ridicule d’honorer ce qui n’est plus ; la religion des tombeaux, une illusion vulgaire ; les cendres de nos pères et de nos amis, une vile poussière qu’il faut jeter au vent, et qui n’appartient à personne ; les dernières intentions des mourants, si sacrées parmi les peuples les plus barbares, le dernier son d’une machine qui se dissout ; et, pour tout dire en un mot, si tout meurt avec nous, les lois sont donc une servitude insensée ; les rois et les souverains, des fantômes que la faiblesse des peuples a élevés ; la justice, une usurpation sur la liberté des hommes ; la loi des mariages, un vain scrupule ; la pudeur, un préjugé ; l’honneur et la probité, des chimères ; les incestes, les parricides, les perfidies noires, des jeux de la nature, et des noms que la politique des législateurs a inventés.

411. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Seconde partie — Section 11, des ouvrages convenables aux gens de génie et de ceux qui contrefont la maniere des autres » pp. 122-127

Les peintures que ce Chigi fit faire dans cette maison par Raphaël, ont rendu le nom de Chigi aussi célebre dans l’Europe que le pontificat d’Alexandre VII. […] Les faiseurs de pastiches, ce sont ces tableaux peints dans la maniere d’un grand artisan, et qu’on expose sous son nom, bien qu’il ne les ait jamais vûs, les faiseurs de pastiches, dis-je, ne sçauroient contrefaire l’ordonnance, ni le coloris, ni l’expression des grands maîtres. […] Le peintre médiocre qui voudroit contrefaire une grande composition du Dominiquin ou de Rubens, ne sçauroit imposer, non plus que celui qui voudroit faire un pastiche sous le nom du Georgeon ou du Titien.

412. (1867) Nouveaux lundis. Tome VII « Le mariage du duc Pompée : par M. le comte d’Alton-Shée »

Le dernier Lauzun, cet aimable, ce faible et infortuné Biron, avait pour gardienne de son nom et de son honneur la plus pure et la plus chaste des Boufflers. […] C’est un homme d’un tact sur, d’une expérience consommée, et, quoi qu’on en dise, il a prouvé qu’il était exceptionnellement capable de dévouement. » Si j’osais prendre la liberté d’éclairer ces portraits par des noms connus, je dirais que ce comte de Noir-mont est un bon Montrond, un Montrond qui n’a été corrompu qu’à point. […] — Rentrée de Mlle Pompéa… » Qu’est-ce que cette Pompéa, dont le nom sonne si en accord avec celui du duc Pompée ? […] M. de Noirmont se trouve à propos dans le parc pour les recevoir à leur arrivée et pour essuyer le premier choc : elles ignorent tout ce qui s’est passé, et que le duc Pompée est marié, et qu’il a nom désormais le comte Herman, et qu’il est converti à la vie régulière, amoureux de sa femme… Noirmont les informe et les instruit ; un instant, il essaye de décourager Pompéa et de lui ôter l’idée de revoir celui à qui elle doit tout. […] Elle commence comme toute femme digne de ce nom, comme toute amante, par un transport, par un premier mouvement : « Je te retrouve enfin, mon maître 1 mon Pompée !

413. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Histoire de la littérature anglaise, par M. Taine, (suite) »

Taine, parce que je ne l’étudie pas simplement au point de vue de la race, distinguait les diverses époques de la poésie anglaise par quatre noms, quatre fanaux lumineux : Chaucer, Spenser, Milton et Dryden. […] Pope lui-même mériterait de donner le nom à une sixième époque, et la septième, l’époque moderne, proclame Byron le premier entre tant d’autres par l’éclat et par l’essor. Mais ce n’est plus avec des noms et des individus qu’on écrit maintenant l’histoire des poésies et des littératures ; l’individu brillant et de génie n’est que le porte-étendard et le porte-voix, l’assembleur d’une quantité de sentiments et de pensées qui flottaient et circulaient vaguement autour de lui. […] Vingt-sept noms font toute l’histoire des temps avant le Déluge, et tous les noms conservés jusqu’aujourd’hui ne font pas ensemble un seul siècle de vivants… » Pensée mémorable et qu’il faut répéter, même en présence du légitime orgueil de la science, reconquérant par lambeaux le passé, mais par lambeaux seulement. Oui, même en sortant de lire, hier encore, l’intéressant et lumineux rapport de M. de Rougé sur les antiquités égyptiennes et sur ces quelques noms de plus arrachés à l’oubli, je ne pouvais m’empêcher de me redire cette parole.

414. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « Le comte de Clermont et sa cour, par M. Jules Cousin. »

Le comte de Clermont ne se doutait certainement pas que son nom soulèverait dans l’avenir des questions semblables ; sa frivolité débonnaire ne s’agitait que dans le présent. […] Le prince de Clermont avait eu cette permission du pape Clément XII, qui avait jugé que l’état ecclésiastique devait être subordonné à celui de la guerre dans l’arrière-petit-fils du grand Condé. » Ce petit-fils eut là, en ces années, quelques éclairs, dignes de la gloire de son aïeul : par son intrépidité personnelle, il fit en toute rencontre honneur à son nom. […] Cependant les succès réitérés auxquels était mêlé son nom avaient raccommodé dans Paris sa réputation, fort endommagée par les scandales publics des derniers Longchamps. […] Et quant à Mademoiselle de Sens dont le nom reparaît ici et dont il a été déjà question assez gaillardement dans un voyage à Chambord, il me revient à son sujet une anecdote que se plaisait raconter au dessert l’abbé de Feletz dans les agréables dîners qu’il nous donnait du temps de la Bibliothèque Mazarine. […] Les Mémoires de Rochambeau (2 vol. in-8°) ont été publics en 1809 par Luce de Lancival ; mais ce professeur de rhétorique n’a pas mis une seule note à l’édition, n’a éclairci le texte sur aucun point et ne s’est inquiété en rien de le purger des inexactitudes, en ce qui est des noms propres, des titres attribués aux personnes, etc.

415. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « HISTOIRE de SAINTE ÉLISABETH DE HONGRIE par m. de montalembert  » pp. 423-443

Ampère, dans son cours d’ouverture du dernier mois127, reprenant l’histoire des lettres en France à l’époque de Charlemagne, distinguait, avec cette vue lumineuse et ingénieuse qu’on lui connaît, trois renaissances, en quelque sorte graduelles : celle de Charlemagne, celle du xiie  siècle, et celle enfin des xve et xvie , qu’on est habitué à désigner particulièrement sous ce nom. […] Au commencement du siècle, l’art allemand du moyen âge fut en quelque sorte découvert, éclairé, restitué, grâce à de beaux travaux d’archéologie auxquels les frères Boisserée de Cologne attachèrent leur nom. […] Le souvenir d’une sœur de ce nom d’Élisabeth, morte à quinze ans, s’y mêla par une religion touchante. […] L’auteur d’ordinaire termine ses chapitres par quelque vocation élevée, quelque réflexion affectuese, ni sur le don des larmes qu’on avait en ces temps, et qui semble de jour en jour tarir ; sur les mariages chrétiens à la fois si passionnés et si chastes, et dont celui d’Élisabeth et du landgrave est comme un type accompli ; sur ce que le souvenir de Luther, au château même de la Wartbourg a détrôné celui de l’humble Élisabeth, dont le nom toutefois est resté à une fleur des champs. […] Mais qu’importe le nom de son maître ?

416. (1890) Conseils sur l’art d’écrire « Principes de composition et de style — Quatrième partie. Élocution — Chapitre IV. Des figures : métaphores, métonymies, périphrases »

Outre leur sens propre, ils peuvent prendre des sens figurés : c’est à ces emplois qu’on a donné le nom de tropes. […] Mieux vaut appeler la chose par son nom, qui évoquera mieux les idées et les images qui s’y sont associées : à cet égard, le mot mer est plus expressif, traîne un plus riche cortège d’impressions, que le mot Thétis. […] Hugo écrit : Vos régiments, pareils à l’hydre qui serpente, Vos Austerlitz tonnants, vos Lutzen, vos Lépante,           Vos Iena sonnant du clairon, Vos camps pleins de tambours que la mort pâle éveille Passent pendant qu’il (Dieu) songe, et font à son oreille           Le même bruit qu’un moucheron ; l’esprit, n’ayant besoin d’aucun effort pour ramener l’idée du mot propre, les batailles et les victoires, n’ayant même pas à repasser par ce mot propre, s’abandonne tout entier à l’impression de la figure, et l’imagination voit défiler toutes les scènes terribles ou glorieuses que ces grands noms font surgir de la mémoire. […] Se pare qui voudra du nom de ses aïeux ; Moi, je ne veux porter que moi-même en tous lieux. […] Le romantisme, en brisant la hiérarchie des mots qui faisait les uns éternellement nobles et les autres à tout jamais bas, a mis fin à ces périphrases ingénieuses et froides, qui faisaient dévier la poésie de sa véritable voie et l’amusaient à des jeux d’enfants : Je nommai le cochon par son nom : pourquoi pas ?

417. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Le Livre des rois, par le poète persan Firdousi, publié et traduit par M. Jules Mohl. (3 vol. in-folio.) » pp. 332-350

Il s’agit d’un immense poème composé, il y a plus de huit cents ans, par un grand poète, l’Homère de son pays, et dont le nom frappe sans doute ici bien des lecteurs pour la première fois. […] Ce Firdousi ou Ferdousi, par exemple, ce grand poète qui, à première vue, nous étonne, et dont nous ne savons pas même très bien comment prononcer le nom, est populaire dans sa patrie. […] Tout poète, en tout pays, cherche son Auguste et son Mécène ; appelez ce Mécène du nom que vous voudrez : Ferdousi cherchait le sien. […] « Quel est ton nom ? […] Puisque tu es né d’une noble race, fais-moi connaître ton origine ; ne me cache pas ton nom, puisque tu vas me combattre : ne serais-tu pas Roustem ?

418. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Le président de Brosses. Sa vie, par M. Th. Foisset, 1842 ; ses Lettres sur l’Italie, publiées par M. Colomb, 1836. » pp. 85-104

Célèbre et populaire en Bourgogne, ce nom n’a pas pris dans la mémoire de tous en France le rang qui lui est dû. […] Après avoir hésité entre Suétone et Salluste, et avoir quelque temps songé à les mener de front l’un et l’autre, il se fixa au dernier, non pas seulement pour une édition et une traduction, mais pour une restitution complète des parties détruites et manquantes ; il eut même l’idée d’abord de les rédiger en latin, et, dans tous les cas, comme si c’était Salluste qui se retrouvât tout d’un coup et qui se mît à parler en son nom. […] La profusion des mets doit toujours être au triple de ce qu’il en faut pour les convives… Un Italien ne fait rien de tout cela : sa manière de paraître, après avoir amassé par une vie frugale un grand argent comptant, est de le dépenser à la construction de quelque grand édifice public, qui serve à la décoration ou à l’utilité de sa patrie, et qui fasse passer à la postérité d’une manière durable son nom, sa magnificence et son goût. […] De Brosses nous donne, à cette occasion, un signalement piquant de chacun des membres du Sacré Collège, y compris son ami Lambertini, précédemment archevêque de Bologne et qui va être pape sous le nom de Benoît XIV. […] On a cité quelques-uns des noms qui furent les derniers tenants et demeurants de la féodalité déjà détruite : lui, il est le dernier et le plus considérable des grands littérateurs provinciaux qui gardèrent jusque dans les idées nouvelles quelque chose de l’allure des siècles précédents.

419. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Première partie. — Chapitre XV. »

Et toutefois, dans le dégoût que donnent quelques poésies impures conservées sous le nom de Catulle, on ne sera guère tenté de chercher près de lui l’étincelle lyrique, telle du moins qu’elle nous plaît. […] « Sois consacrée, sous quelque nom que tu préfères ; et cette race antique de Romulus, préserve-la, selon ta coutume, par ton salutaire appui !  […] La nuit cache les voleurs, que toi, dans ton retour, tu surprends les mêmes sous un autre nom. […] Ce que les souvenirs mythologiques de la Grèce, les héros fondateurs de ses jeux, les origines fabuleuses de ses cités avaient été pour le grand poëte lyrique de Thèbes, quelques noms glorieux et lointains de l’ancienne Rome le seront pour le chantre du siècle d’Auguste. […] Tel est pourtant le privilège du génie raffiné par le goût, que son nom et ses vers traverseront les siècles et plairont à jamais aux esprits délicats, dans ce monde déjà tant renouvelé et qui change toujours.

420. (1872) Nouveaux lundis. Tome XIII « Malherbe »

Un Malherbe de Saint-Aignan avait vendu la terre de ce nom près de Caen pour pouvoir aller guerroyer en terre sainte ; il le revendiquait pour ancêtre. […] Ces anciens Malherbe, pour se distinguer des autres du même nom qui se trouvent en Normandie, s’appelaient Malherbe aux Roses, à cause qu’ils portaient dans leurs armoiries d’hermines à six roses de gueules. […] Née pour être chantée, si bien que son nom est synonyme de chant, elle n’est plus qu’imprimée. […] Eût-il songé à dire pareille chose, à établir une telle route royale, s’il n’avait eu que des noms de poètes français pour la jalonner ? […] Je suis vieux, et par conséquent contemptiple aux Muses, qui sont femmes ; mais, en son nom, je crois que je ne leur demanderai rien qu’elles ne m’accordent.

421. (1829) Tableau de la littérature du moyen âge pp. 1-332

Ces désinences variées des verbes et des noms étaient oubliés. […] Il n’y a plus de désinences variables dans les noms, et il n’y a pas encore d’articles. […] Les douze pairs de Charlemagne deviennent les arcs-boutants de la chevalerie, et leurs noms inspirent de longs poëmes. […] Une fois advint qu’à la bataille fut un prince, qui avait nom Hugues de Tabarie. […] Plus d’un motif m’autorise à réunir ces deux noms.

422. (1862) Portraits littéraires. Tome II (nouv. éd.) « M. de Fontanes »

Il put obtenir d’être relâché avant qu’on insistât sur son nom. […] Mon nom n’y a pas été rappelé. […] La même distinction le suit partout : son nom y gagne et s’étend. […] Ces noms en disent assez sur l’esprit des choix. […] Son beau nom littéraire le servit mieux, sans trop de pièces à l’appui.

423. (1880) Études critiques sur l’histoire de la littérature française. Première série pp. 1-336

La liberté n’y consiste pas à nommer les choses par leur nom, mais à choisir, entre tous les noms qui peuvent désigner une même chose, le plus bas et le plus digne du vocabulaire des halles. […] d’autres comédiens auraient-ils porté le nom de comédiens du prince de Conti ? […] Changez les noms, c’est une histoire vulgaire, c’est notre histoire à tous. […] Boursault, pour être achevé, que de porter le nom de M.  […] Ne changeons pas les noms des choses.

424. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « M. Denne-Baron. » pp. 380-388

Zéphyre est son doux nom ; sa légère origine, Pure comme l’éther, trompa l’œil de Lucine,         Et n’eut pour témoins que les airs : D’un souffle du Printemps, d’un soupir de l’Aurore, Dans son liquide azur le Ciel le vit éclore         Comme un alcyon sur les mers. […] Ingres marquait quelques-unes de ses toiles du style antique, il avait publié de Properce une traduction en vers vraiment complète, et menée à fin avec une étude passionnée, il aurait mérité de voir attacher son nom à un des noms qui ne peuvent périr, et d’être appelé invariablement le traducteur de Properce, tandis qu’il ne peut être appelé qu’un amateur de Properce. […] Mais ce dont surtout la postérité sait gré et tient compte, c’est de ce que trouve le talent et de ce qui naît sans peine et comme une grâce ; une strophe bien venue sur une fleur, sur un coquillage, sur un zéphyr, s’en va vivre durant des âges, et suffit à porter un nom.

425. (1874) Premiers lundis. Tome I « Ferdinand Denis »

Il a consulté tous les voyageurs et jusqu’aux poêles qui ont parlé des lieux dont il avait à parler lui-même : non pas qu’un étalage pédantesque d’érudition atteste l’étendue de ses recherches ; rien n’est plus modeste que sa manière ; ses citations sont presque toujours des hommages, et ce n’est qu’avec l’accent de la reconnaissance qu’il salue les noms des voyageurs qui l’ont précédé. […] Notre tâche est ici terminée ; mais puisqu’il s’agit du Camoëns, que ce nom soit une occasion de signaler publiquement à la reconnaissance des Portugais et des poètes un nom qui s’est inséparablement associé à ce grand nom.

426. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome II « Mémoires pour servir à l’histoire des gens-de-lettres ; et principalement de leurs querelles. Querelles particulières, ou querelles d’auteur à auteur. — M. de Voltaire, et l’abbé Desfontaines. » pp. 59-72

Rien n’a plus contribué à lui faire un nom que l’espèce de tribunal qu’il osa s’ériger lui-même pour juger tous les ouvrages nouveaux. […] La stérile fécondité de son génie, la variété de ses connoissances, quoique superficielles, l’habitude du travail, cette promptitude avec laquelle il concevoit & exécutoit des plans d’ouvrages, & surtout son intelligence à tirer parti de ceux des autres, à partager le fruit de certaines productions auxquelles il n’avoit fait que présider & prêter quelquefois sa plume & son nom ; tous ces divers moyens l’empêcherent peut-être de sacrifier, comme tant d’autres à la bassesse & d’encenser les ridicules de la grandeur & de l’opulence. […] Aussitôt qu’il se fut acquis un nom dans la république des lettres, il se fit présenter à M. de Voltaire par un ami commun. […] Lorsque la comédie de l’Enfant prodigue parut, tout Paris fut partagé pour deviner le nom de l’auteur, qui ne se déclaroit pas.

427. (1827) Principes de la philosophie de l’histoire (trad. Michelet) « Principes de la philosophie de l’histoire — Livre second. De la sagesse poétique — Chapitre V. Du gouvernement de la famille, ou économie, dans les âges poétiques » pp. 174-185

Les philologues et les philosophes ont pensé communément que dans ce qu’on appelle l’état de nature, les familles n’étaient composées que de fils ; elles le furent aussi de serviteurs ou famuli, d’où elles tirèrent principalement ce nom. […]   Sous le nom seul du père de famille étaient compris tous ses fils, tous ses esclaves et serviteurs. […] Ensuite durent venir les fiefs roturiers réels, pour lesquels les vassaux durent être les premiers prædes ou mancipes obligés sur biens immeubles ; le nom de mancipes resta propre à ceux qui étaient ainsi obligés envers le trésor public. […] Thésée fonde Athènes en élevant l’autel des malheureux, nom bien convenable à ceux qui erraient auparavant, dénués de tous les biens divins et humains que la société avait procurés aux hommes pieux.

428. (1892) Boileau « Chapitre V. La critique de Boileau (Suite). Les théories de l’« Art poétique » (Fin) » pp. 121-155

Gardez donc de donner, ainsi que dans Clélie, L’air ni l’esprit français à l’antique Italie, Et sous des noms romains faisant notre portrait Peindre Caton galant et Brutus dameret. […] Ainsi nous fera-t-il convenir que l’incroyable est arrivé, devait arriver, et que notre conception de possibilités naturelles implique ce qu’en son nom nous voulions d’abord repousser. […] Sans débattre la question s’il y a des poèmes en prose, et semblant même l’admettre, quand il appelle de ce nom les romans, Boileau, en général, regarde le vers comme la forme originale et propre de la poésie. […] Il lui suffit que les noms grecs et latins aient une plus douce harmonie que les noms germaniques, pour condamner l’épopée aux sujets païens et lui interdire le moyen âge. N’en rions pas trop : Chénier et Musset, qui sont des poètes, et que la suave mélodie des noms antiques a jetés plus d’une fois dans des rêves peuplés de visions charmantes, comprendraient ce que dit Boileau des « noms heureux » qui semblent nés pour les vers.

429. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Monsieur de Latouche. » pp. 474-502

Le coquet avait toujours eu soin de cacher son âge : le soi-disant démocrate ne dérobait pas moins soigneusement son nom. […] La publication des Poésies d’André Chénier est le grand titre de M. de Latouche, le grand fait littéraire auquel restera attaché son nom. […] M. de Latouche fut des premiers ; il fit plus, il composa en secret un petit roman qu’il fit paraître sous le titre d’Olivier (1826), sans nom d’auteur, et dans une forme d’impression exactement la même que celle des autres romans de Mme de Duras. […] Il n’a pas évité tout à fait les épisodes romanesques, car on ne saurait donner un autre nom à l’épisode de Jenny, cette jeune protestante qui meurt après s’être prise de passion pour le moine Ganganelli. […] Périgois célèbre M. de Latouche au nom des démocrates de l’Indre : « Il eût pu mettre à profit, dans l’intérêt de sa carrière, la haute position et le crédit de son oncle (M. 

430. (1853) Histoire de la littérature dramatique. Tome II « Chapitre III. Le théâtre est l’Église du diable » pp. 113-135

Même ces pièces diverses portaient les noms des villes et des bourgs où elles avaient été représentées pour la première fois : Atellanæ fabulæ, les atellanes, du nom d’une ville élégante : Atella, située entre Naples et Capoue, au beau milieu des délices romaines. — Poésies fescéniennes, du nom d’une ville de la Toscane savante. […] Des gourmands, des oisifs, des buveurs, des amis de la joie et de la bombance, tel fut le nom des premiers comédiens. […] Récemment encore, le roi venait d’écrire le nom de Molière sur cette glorieuse liste de gens de lettres et de savants, honorés des libéralités de Sa Majesté, et le poète s’était empressé de remercier le roi, à la façon d’un poète comique pour qui tout est sujet de comédie et même un compliment. […] Cette fois les comédiens se représentaient eux-mêmes ; Molière leur avait conservé leurs noms, leurs habits, leurs visages ; ils étaient jeunes et beaux alors ; ils marchaient à la suite de ce grand homme, l’honneur du théâtre. […] Ces comédiens étaient recherchés par les plus grands seigneurs ; ces comédiennes étaient belles et galantes, on les aimait pour leur beauté, pour leur esprit, pour leurs amours ; il y avait de ces femmes qui tenaient pour leur amant, Racine ou M. de Sévigné ; il y en avait une qui portait le nom de Molière !

431. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Deuxième partie. — Chapitre XXI. »

Le poëte continue : « Pour la gloire méritée de ton nom, pour la juste vengeance de ton peuple, pour les gémissements de tant de malheureux, tourne ton bras redoutable contre celui qui s’indigne d’être homme… et, trois et quatre fois, frappe d’un châtiment rigoureux ton ennemi : et que l’injure faite à ton nom soit l’erreur fatale de sa vie ! […] Le Seigneur, qui a montré sa forte main pour la foi de son prince chrétien, et qui, pour la gloire de son saint nom, accorde à son Espagne ce triomphe. […] que tout ce que le vaste ciel enserre confesse ton nom, ô notre Dieu et notre appui ! […] Tels je me figure Troie et son antique rempart : telle aussi toi-même, Rome, à qui ton nom reste à peine, ô patrie des dieux et des rois ! […] Son expression trop vive matérialise le type qu’elle adore ; et, sous les noms d’amour et d’époux, le charme d’un culte tout spirituel, pour une beauté toute céleste, disparaît dans le trouble d’une passion qui semble trop humaine.

432. (1870) Nouveaux lundis. Tome XII « Camille Jordan, et Madame de Staël »

Le nom de Camille Jordan y était devenu l’enseigne d’un parti et le point de mire des risées ou des haines. […] Dans leur double récit, quantité de noms propres se rencontraient, et, à vrai dire, l’Épître était à leur adresse. […] Immortel honneur de son nom ! […] Le nom de Camille Jordan y revient souvent. […] Julie de Magneunin, c’est le nom de famille de Mme Camille Jordan.

433. (1929) Critique et conférences (Œuvres posthumes III)

Nous sommes, nom, tout de même, d’un chien ! […] À une répétition générale où je fus heureux de voir accolés à mon nom et à celui de mes vieux amis Mendès et Mallarmé, des noms de jeunes, il y avait quels décors, mes amis ! […] Mais, nom d’un chien, quel bénéfice ! […] (Il me semble me ressouvenir de ce dernier nom, peut-être bien même un peu de la personne, charmants tous deux, personne et nom.) […] Son nom, son œuvre sont connus et admirés de tous ceux qui lisent.

434. (1875) Premiers lundis. Tome III « De la liberté de l’enseignement »

N’ayant pas été présent à cette séance, j’aurais vivement désiré faire entendre une protestation au nom des catholiques de nos diocèses ; mais, puisque le Sénat paraît d’avis de laisser M.  […] La vérité ou ce qu’on appelle de ce nom en matière de foi, chacun se l’attribue à soi exclusivement et la dénie aux autres : à ce compte il n’y aurait jamais lieu qu’à une orthodoxie maîtresse et absolue comme au moyen âge. […] Comme pourtant les doctrines ne se posent point toutes seules et qu’elles dont dans la bouche de quelqu’un, il a bien fallu en venir à des noms propres pour pouvoir vérifier le plus ou moins d’exactitude des phrases citées et incriminées. […] D’un côté les cléricaux (puisque c’est leur nom) le repoussaient à grands cris. […] ce qui nous frappe et nous choque sous d’autres noms à distance nous paraît tout simple de notre temps et à nous-mêmes sous des noms différents.

435. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Lettres de m. l’Abbé Sabatier de Castres ; relatives aux trois siecles de la littérature françoise.ABCD » pp. -641

Imprimez, disoit derniérement à un Libraire, un des plus zélés serviteurs de la Philosophie, connu dans Paris pour l'espion du Chef de la Secte, imprimez, sous le nom de l'Abbé Sabatier, un Recueil de Poésies les plus libertines, & dont les noms sont inconnus : ce Recueil aura du débit, je vous jure. […] Son nom l'auroit infailliblement suivi dans le tombeau, si mes Ennemis ne s'en étoient servis pour me persécuter. […] Nos Descendans s'imagineront qu'il y a eu plusieurs Hommes de ce nom ; &, graces à lui, le Monde Intellectuel aura son Hercule, comme le Monde Fabuleux. […] On en a publié de toutes les especes & sous toutes sortes de noms : mais comme les Philosophes n’ont, pour décrier leurs adversaires, qu’une somme bornée d’inventions & de mensonges qu'ils répetent sans cesse, en mille manieres différentes, tous ces Libelles renferment les mêmes injures, les mêmes calomnies, les mêmes absurdités. […] Les Additions que l’Editeur y a faites sous mon nom, sont marquées d’un pied de mouche.

436. (1866) Nouveaux lundis. Tome VI « Alfred de Vigny. »

Le nom de Vigny se présente rarement dans les Mémoires historiques du dernier siècle. […] Le début d’Alfred de Vigny en littérature date de 1822 ; son premier recueil poétique parut sans nom d’auteur70. […] Vous avez tous les noms d’arbres les plus harmonieux, les plus doux à l’oreille. […] Ce que le chrétien appelle la Grâce n’est en effet que la fatalité baptisée d’un nouveau nom. […] Si vous voyez cet Alfred, parlez-lui de nous et regardez-le ; il me semble impossible qu’un certain nom ne flatte pas son oreille.

437. (1875) Premiers lundis. Tome III « Du point de départ et des origines de la langue et de la littérature française »

Marc-Aurèle, un sage selon l’ancien modèle (et selon l’ancien modèle approchant aussi près que possible du nouveau), est sur le trône ; il permet, il laisse s’accomplir en son nom cette persécution atroce contre de simples fidèles dont la plus magnanime est une jeune esclave, sainte Blandine. […] « Dans l’Armorique de César, alors nommée Bretagne, on continuait à faire usage du celtique, dès lors, ou bientôt après, désigné par le nom de breton. « Dans les vallées des Pyrénées occidentales, persistait l’ancien idiome aquitain, qui avait pris le nom de basque, aussi bien que le peuple qui le parlait. « Dans tout le reste du pays, les Gallo-Romains parlaient une langue en grande partie dérivée du latin, à laquelle les historiens donnent le nom de langue romaine rustique, ou simplement de langue romaine. […] Néanmoins ses données sont en général fort exactes, et j’en ai souvent profité. « Les règles grammaticales étaient les mêmes pour tous les dialectes de la langue d’oïl : tous, sans exception, étaient régis par la même grammaire. « Après avoir posé cette règle générale, Fallot divise le vieux langage français en trois dialectes principaux, qu’il nomme non point du nom d’une province dans laquelle ils fussent exclusivement parlés, mais du nom de celle dans le langage de laquelle leurs caractères se trouvent le plus saillants, le mieux réunis et le plus complètement en relief : normand, picard, bourguignon.

438. (1858) Cours familier de littérature. VI « XXXIVe entretien. Littérature, philosophie, et politique de la Chine » pp. 221-315

La conscience et la morale ont été de vains noms pour eux dans leurs théories de gouvernement. […] Cette théorie, plus digne selon nous du nom de démence que du nom de science, n’a qu’un nom qui puisse la caractériser, c’est l’athéisme de la loi, ou plutôt c’est le suicide des gouvernements et par conséquent le suicide de l’homme social. […] Ces sophismes ne sont que des tyrannies qui changent de nom sans changer de moyens. […] L’autorité de la force matérielle s’unissait en lui à l’autorité du plus intelligent, le droit du plus fort et le droit du plus capable se confondaient naturellement dans son nom de père. […] Il n’ambitionne pas les honneurs, il ne cherche point à amasser des trésors ; l’acquisition de la sagesse est le seul trésor après lequel il soupire : mériter le nom de sage est le seul honneur auquel il prétend.

439. (1859) Cours familier de littérature. VII « XXXVIIIe entretien. Littérature dramatique de l’Allemagne. Le drame de Faust par Goethe » pp. 81-160

Gretchen, c’était le nom de cette jeune fille, revint en effet au bout de quelques minutes. […] « Elle rougit, sourit, réfléchit un moment, prit la plume, et écrivit sans rien dire son nom au bas des vers. […] Goethe trouva ce caractère satanique tout fait ; il n’eut qu’une voyelle à changer dans le nom de cet infernal personnage. […] je n’ai point de nom pour cela ! Le sentiment est tout ; le nom n’est que bruit et fumée, obscurcissant la céleste flamme.

440. (1859) Cours familier de littérature. VII « XLIe entretien. Littérature dramatique de l’Allemagne. Troisième partie de Goethe. — Schiller » pp. 313-392

Ces deux noms inséparables sont à eux seuls toute une littérature pour leur pays. […] Il se réfugie sous un nom supposé dans un château désert appartenant à la mère d’un de ses amis. […] « Je ne dois pas, dit-il, laisser après moi une femme tendre et fidèle, mère de mon fils, sans nom et sans asile. […] baptisons la cloche, donnons-lui le nom de Concorde. […] Son nom de fille était Bettina Brentano ; sa famille était italienne.

441. (1857) Cours familier de littérature. IV « XXIIIe entretien. I. — Une page de mémoires. Comment je suis devenu poète » pp. 365-444

Cette rivière s’appelle l’Albarine ; elle écumait déjà ainsi du temps des Romains, qui lui ont donné ce nom emprunté à la blancheur de cette écume. […] Il y avait alors en moi des océans de choses vagues dont je ne savais ni la nature ni le nom, et qui étaient déjà poésie. […] tu ne sais donc pas le nom dont il se nomme ? […] Ce nom chante pour moi dans toute la nature, Et mon cœur sans repos le sait même en dormant. […] On a lu avec indulgence une page en prose de mes Confidences sous le nom de Graziella.

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