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1383. (1898) L’esprit nouveau dans la vie artistique, sociale et religieuse « II — Se connaître »

Le tressaut d’énergie nécessaire pour déterminer une nouvelle orientation ne surgira, en tous cas, que de la reconnaissance brutale de son état, comparé à celui des autres puissances.

1384. (1915) La philosophie française « I »

D’autre part, il est tout pénétré de la pensée des anciens maîtres : avec Spinoza il croit à l’universelle nécessité ; sur la puissance en quelque sorte magique de l’abstraction, sur les « qualités principales » et les « facultés maîtresses », il a des vues qui le rapprochent d’Aristote et de Platon.

1385. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre XX. De Libanius, et de tous les autres orateurs qui ont fait l’éloge de Julien. Jugement sur ce prince. »

J’ai détesté la puissance arbitraire.

1386. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Première partie. — Chapitre VI. »

Mais les injures violentes, les noms de débauché nocturne, de ventru, de pied-bot, qu’il jeta plus tard au sage Pittacus, furent sans puissance, comme ses armes : « Répète un chant romain, nous dit Horace, ô lyre modulée d’abord par le citoyen de Lesbos, qui, forcené pour la guerre, savait pourtant, soit au milieu des armes, soit quand son navire battu des flots reprenait le rivage, chanter Bacchus et les Muses, Vénus et l’enfant qui la suit toujours62. » Puis ailleurs, lorsque, échappé à un danger de mort, Horace, qui a cru voir de près l’Élysée, y place le belliqueux Alcée, comme Virgile osait y mettre Caton : « De combien peu, dit-il, nous avons failli voir l’empire de la sombre Proserpine, et le tribunal d’Éaque, et les demeures réservées des âmes pieuses, et Sapho sur la lyre éolienne se plaignant des jeunes filles ses compatriotes, et toi aussi, Alcée, redisant plus haut sur ton luth d’or les maux de la tempête, les maux de l’exil, les maux de la guerre !

1387. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Première partie. — Chapitre VIII. »

C’est ainsi que moi-même aujourd’hui je suis transfuge du ciel et voyageur errant. » Cette fiction cependant et bien des vers çà et là conservés par Aristote, sur la puissance des éléments et les passions allégoriques dont Empédocle anime la matière, ne nous permettraient pas de le ranger parmi ceux qu’on a nommés ingénieusement les prophètes de la science.

1388. (1892) Impressions de théâtre. Sixième série

Ce qu’il est pour, la petite Edwige nous montre et nous fait comprendre et mesurer la, naïve puissance d’imagination et la profondeur de sensibilité de cette aimable enfant. […] Et, d’autre part, elles prophétisent que Macbeth sera vainqueur tant que la forêt de Birnam ne se lèvera point pour marcher contre lui, et que nul homme né d’une femme n’aura la puissance de le tuer. […] Jamais, je crois, à aucune époque, écrivain n’eut une telle puissance sur les esprits et sur les cœurs. […] La Mer est une œuvre d’une profonde sincérité et, par endroits, d’une réelle puissance, où il est visible que M.  […] N’avait-il pas assez de puissance sur elle pour la transformer et la pétrir à son gré ?

1389. (1890) La vie littéraire. Deuxième série pp. -366

Les facultés intellectuelles, si riches dans cette nature, se développèrent avec une puissance tyrannique. […] Quelle preuve de la puissance de la volonté ! […] D’ailleurs, qu’est-ce que la volonté, au sens vulgaire du mot, sinon la puissance intérieure par laquelle l’homme se détermine à agir ou à ne pas agir ? […] Je ne dis pas trop en disant qu’il a sa puissance, sa vertu et sa magie : tout ce qu’il touche devient aussitôt tristement vulgaire et ridiculement prétentieux. […] Ils passeront vite, les jours de modération dans la puissance, de simplicité dans la richesse, d’obéissance aux dieux, de paix sereine, au cours de cette vie attique, si riche et si rapide.

1390. (1897) La vie et les livres. Quatrième série pp. 3-401

… Les Grecs ont des rivaux dont Justinien ne pouvait pas prévoir la future puissance. […] Rambaud nous fait voir, au chapitre V de son Histoire de la Russie et au tome V de l’Histoire générale, comment la puissance russe, en son principe, se modela sur les formes de l’empire grec. […] Car la puissance des Russes est en marche contre nous. […] Toutefois, avant d’endosser sa brillante armure, qui le faisait ressembler au saint Georges des vitraux et des icônes, l’empereur consentit à écouter les conseils d’un vieux ministre et à tenter les moyens indiqués par la diplomatie, science décevante, qui ne sert à rien lorsqu’elle n’est pas immédiatement renforcée par la puissance des sabres. […] Son cœur, épanoui d’espérance, défiait la force des choses de vaincre jamais la puissance invincible de son amour… L’exégèse de l’historien, élégante et sobre, vraiment digne d’un tel sujet, suivait, sans la troubler, la musique du divin poème.

1391. (1782) Essai sur les règnes de Claude et de Néron et sur la vie et les écrits de Sénèque pour servir d’introduction à la lecture de ce philosophe (1778-1782) « Essai, sur les règnes, de Claude et de Néron. Livre premier. » pp. 15-203

Que serions-nous, si cette tyrannique puissance avait duré ? […] Poppée est accusée d’adultère avec Valérius, et la puissance de celui-ci rendue suspecte à l’empereur. […] Le fils d’un joueur de flûte égyptien leur paraît-il plus digne de la puissance impériale ? […] Si le tyran ne meurt pas sous le coup, sa puissance et sa férocité s’en accroissent avec son effroi. […] Sénèque, qui connaissait l’esprit de la cour, de la ville et de la canaille, prévoit les calomnies auxquelles sa richesse, sa puissance, la faveur et la munificence de César vont l’exposer ; il ne se les dissimule pas à lui-même, ni à son élève.

1392. (1895) Le mal d’écrire et le roman contemporain

Sa puissance est devenue violence, sa force, brutalité ; sa hardiesse, cynisme ; sa largeur, éparpillement. […] Sainte-Beuve n’a pas compris la puissance d’une pareille tentative. […] Parfois son imagination artiste se détend et sa puissance se concentre sur le principal personnage. […] … Peut-être dans ma puissance d’aimer ai-je compris ce mot incompréhensible. […] Le contraste et l’éloignement semblaient même faciliter cette puissance d’évocation.

1393. (1863) Cours familier de littérature. XVI « XCIVe entretien. Alfred de Vigny (1re partie) » pp. 225-319

la Raison est une puissance froide et lente qui nous lie peu à peu par les idées qu’elle apporte l’une après l’autre, comme les liens subtils, déliés et innombrables de Gulliver ; elle persuade, elle impose quand le cours ordinaire des jours n’est que peu troublé ; mais le Désespoir véritable est une puissance dévorante, irrésistible, hors des raisonnements, et qui commence par tuer la pensée d’un seul coup. […] Puissances du ciel !

1394. (1893) La psychologie des idées-forces « Tome second — Livre septième. Les altérations et transformations de la conscience et de la volonté — Chapitre deuxième. Troubles et désagrégations de la conscience. L’hypnotisme et les idées-forces »

Elles sont des exemples de la puissance des idées non réfrénées, qui deviennent des idées fixes. […] « Ainsi, ajoute-t-il, se vérifie par l’expérimentation une des idées les plus fécondes d’un de nos philosophes, qui a dit (dans la Liberté et le Déterminisme) : — Toute idée est une image, une représentation intérieure de l’acte ; or la représentation d’un acte, c’est-à-dire d’un ensemble de mouvements, en est le premier moment, le début, et est ainsi elle-même l’action commencée, le mouvement à la fois naissant et réprimé ; l’idée d’une action possible est donc une tendance réelle, c’est-à-dire une puissance déjà agissante et non une possibilité purement abstraite. » Toutefois, nous ne saurions admettre entièrement l’explication que M.  […] Delbœuf, cela peut se faire, mais, selon la théorie des idées-forces, cela doit se faire : la sensation douloureuse est, du côté physique, une modification organique en un sens opposé au mouvement de la vie ; la sensation agréable est une modification organique qui relève la puissance vitale.

1395. (1857) Cours familier de littérature. IV « XXIIe entretien. Sur le caractère et les œuvres de Béranger » pp. 253-364

Béranger ne crut pas déroger à sa dignité en acceptant de l’amitié ce qu’il aurait refusé de la puissance. […] Les impôts et les emprunts dont il avait fallu charger la propriété, après les deux invasions dont la Restauration était innocente, puisqu’il fallait payer la rançon du territoire, les fureurs mal contenues de la Chambre de 1815, les massacres de Nîmes et de Toulouse, les listes de proscription dressées à regret par le roi sous le doigt impérieux d’une Chambre vengeresse ; les meurtres incléments et impolitiques des généraux, de Labédoyère, du maréchal Ney, meurtres qui, dans quelques hommes, atteignaient l’armée tout entière ; les procès pour cause de libelles, les prisons pour cause de couplets, les missions plus royalistes que religieuses parcourant le pays, présentant la croix à la pointe des baïonnettes, et répandant sur toute la surface de la France moins des apôtres de religion que des proconsuls d’agitations civiles ; la guerre d’Espagne, guerre qui était en réalité française, mais qui paraissait une guerre intéressée de la maison de Bourbon seule contre la liberté des peuples ; enfin la mort de Louis XVIII, ce modérateur emporté malgré lui par l’emportement de son parti ; l’avènement de Charles X, qu’on supposait le Joas vieilli d’un souverain pontife prêt à lui inféoder le royaume ; les oscillations de son gouvernement, jeté, des mains prudentes de M. de Villèle, aux mains conciliantes de M. de Martignac, pour passer aux mains égarées de M. de Polignac ; l’abolition de la garde nationale de Paris, cette déclaration de guerre entre la bourgeoisie et le trône : toutes ces circonstances, tous ces malheurs, tous ces excès, toutes ces fautes, toutes ces faiblesses, toutes ces violences, toutes ces folies avaient progressivement fait de l’opposition populaire en France une puissance plus forte que le Gouvernement. […] « Tous, attelés au char de la puissance, « Du vrai bonheur vous quittez le chemin.

1396. (1767) Salon de 1767 « Peintures — Vernet » pp. 130-167

Ce qu’il y a d’étonnant, c’est que l’artiste se rappelle ces effets à deux cents lieues de la nature, et qu’il n’a de modèle présent que dans son imagination ; c’est qu’il peint avec une vitesse incroyable ; c’est qu’il dit : que la lumière se fasse, et la lumière est faite ; que la nuit succède au jour et le jour aux ténèbres, et il fait nuit et il fait jour ; c’est que son imagination aussi juste que féconde lui fournit toutes ces vérités ; c’est qu’elles sont telles que celui qui en fut spectateur tranquille et froid au bord de la mer en est émerveillé sur la toile, c’est qu’en effet ses compositions prêchent plus fortement la grandeur, la puissance, la majesté de nature, que la nature même : il est écrit : coeli enarrant gloriam dei, mais ce sont les cieux de Vernet, c’est la gloire de Vernet. […] Les idées de puissance ont aussi leur sublimité, mais la puissance qui menace émeut plus que celle qui protège.

1397. (1845) Simples lettres sur l’art dramatique pp. 3-132

Un sociétaire, frappé des inconvénients attachés à cette inexorable puissance de l’équilibre, a proposé dernièrement d’ajouter un supplément de mille écus aux deux traitements égaux que consomme aujourd’hui le commissaire-régisseur. […] « George Sand, ce talent ni vigoureux, si franc, qui s’est révélé tout entier si vite, et si vite emparé des honneurs d’une position suprême et incontestée ; George Sand, cette parole retentissante et presque souveraine, cette âme enthousiaste et dévouée, mais inconstante, est un auxiliaire que les camps les plus hostiles se disputent, une force dont chacun voudrait faire croire qu’il dispose à son tour… Âme douée d’une sensibilité qu’on peut appeler terrible ; d’une puissance de désir, d’un besoin d’émotions et d’enthousiasme qu’on peut appeler plus terrible encore. […] Douée, comme centre, d’une puissance d’assimilation supérieure à celle de toutes les nations ses voisines, elle pouvait joindre à la raison et à l’esprit, qui sont ses qualités distinctives, qui sont ses dons naturels, la rêverie de Dante, l’humanité de Shakespeare, le pittoresque de Calderon, la fécondité de Lope de Vega, la passion de Schiller, le philosophisme poétique de Goethe.

1398. (1902) Le chemin de velours. Nouvelles dissociations d’idées

Or, il n’est pas douteux que le succès d’une œuvre d’art n’augmente fortement sa puissance émotionnelle sur le commun des hommes. […] Le même phénomène apparaît, quoique d’un ordre plus rassurant, quand la puissance intellectuelle s’exerce en même temps que la puissance génitale. […] Mais elle n’exerce d’influence que sur des intelligences en mouvement ou en puissance de mouvement ; elle ne détermine pas, elle incline. […] Ils connaissent la nature humaine, savent la puissance des préjugés. […] La supériorité d’une race, d’un groupe d’êtres vivants, est en raison directe de sa puissance de mensonge, c’est-à-dire de réaction contre la réalité.

1399. (1890) Les romanciers d’aujourd’hui pp. -357

Après avoir traversé tout le scepticisme de Locke, le matérialisme de Condillac, elle éprouvait pour ces deux philosophes la reconnaissance d’avoir eu, par eux, respiré sur ces purs sommets, pareils aux hauteurs du “Bon-Sens”, où Reid rend à l’homme le sentiment de sa dignité et base la morale et la métaphysique sur la puissance et l’excellence de la vie humaine27. » J’espère qu’on est satisfait. […] Mais il a écrit sous ce titre général : La Décadence latine une série de romans150 qu’il est permis de trouver lourds, confus, prétentieux, mais dont je reconnais ici la trèséclatante puissance. […] Mais ce large sens de la vie, cette puissance créatrice, cette rude et indélébile empreinte que Balzac applique à Rubempré, à Gobseck, à Vautrin, à Ursule Mirouët, au vieux Grandet et qui les fait reconnaître entre tous pour ses fils et filles, je pense qu’il n’en faut point trop parler à M.  […] Ohnet s’est emparé du public et s’il le tient toujours, c’est qu’il a les deux qualités qui décident habituellement de ces sortes de succès : ses livres sont charpentés de main d’ouvrier et il apporte une réelle puissance au développement des lieux communs dramatiques de l’amour. […] Jules Verne est plus qu’en puissance déjà dans Edgar Poë.

1400. (1899) Arabesques pp. 1-223

Jules Nadi : « Ceux qui ont le beau courage de parler avec la voix de demain doivent accepter la lutte inégale contre ces deux puissances formidables : l’autorité du Passé, l’indifférence, l’égoïsme, dieu du Présent. » M.  […] Alors seulement la loi d’amour agirait, on verrait la solidarité humaine qui est, entre les hommes, la forme vivante de l’attraction universelle, prendre toute sa puissance, les rapprocher, les unir en une famille, étroite » (p. 220). […] Alors, il instaura sa doctrine, la basant sur ce qu’il appelle « la volonté de puissance ». […] Mais l’homme n’étant pas isolé, sa volonté dépendant de la volonté universelle, il épandra, aux jours d’exaltation où il se sentira vivre avec plénitude, son âme par le monde, afin qu’elle communie avec la puissance éternelle qu’il perçoit sous le flux changeant des phénomènes. […] Votre volonté dira : Que le Surhomme soit la raison d’être de la terre. » C’est de l’anthropocentrisme à la seconde puissance, une conception d’autant plus spécieuse qu’elle semble s’appuyer sur la doctrine de l’évolution.

1401. (1929) Critique et conférences (Œuvres posthumes III)

La Cour d’assises particulièrement imposante, d’un imposant qui irait jusqu’au lugubre, n’était la majesté de la Loi toujours belle et harmonieuse, là impliquée dans toute sa puissance. […] Chez Shakespeare tout était surabondant ; sa puissance d’aimer en est la preuve, la plus éloquente. […] En tout cas je dormis du sommeil du juste pendant toute la traversée, et n’ouvris les yeux qu’en vue de Newhaven, alors que le bateau, sur la mer enfin calmée, glissait à puissance réduite, si bien que l’apaisement et le silence relatifs me réveillèrent le plus agréablement du monde. […] Et tout ceci ne fit qu’augmenter ma sympathie pour une ville dont j’ai si souvent loué la puissance, la splendeur, le charme infini, sous le beau temps comme sous le mauvais. […] C’est, avec le droit, la puissance De boire, d’aimer, de manger, De travailler, de se loger, De pénétrer dans la science !

1402. (1860) Cours familier de littérature. IX « Le entretien. Les salons littéraires. Souvenirs de madame Récamier (2e partie) » pp. 81-159

Cet extérieur était un des plus séduisants qu’on pût rencontrer dans les salons de l’Europe : une taille svelte, le buste en avant, comme le cœur, attribut des races militaires, un mouvement d’encolure de cheval arabe dans le port de la tête, des cheveux blonds à belles volutes de soie sur les tempes, des yeux grands, bleus et clairs, qui n’auraient pas pu cacher une mauvaise pensée, l’ovale et le teint d’une éternelle jeunesse, un sourire où le cœur nageait sur les lèvres, un geste accueillant, une parole franche, l’âme à fleur de peau ; seulement une certaine légèreté de physionomie, une certaine distraction d’attitude et de discours interrompus qui n’indiquaient pas une profondeur et une puissance de réflexion égale à la grâce de l’homme. […] Ce fut à cette époque (1819) que M. de Chateaubriand, alors dans toute la fièvre de ses triples ambitions de gloire, de puissance et d’amour, commença à jouer un rôle dans la vie de madame Récamier.

1403. (1865) Cours familier de littérature. XX « CXVIe entretien. Le Lépreux de la cité d’Aoste, par M. Xavier de Maistre » pp. 5-79

Quoique la puissance de Dieu soit aussi visible dans la création d’une fourmi que dans celle de l’univers entier, le grand spectacle des montagnes en impose cependant davantage à mes sens : je ne puis voir ces masses énormes, recouvertes de glaces éternelles, sans éprouver un étonnement religieux ; mais, dans ce vaste tableau qui m’entoure, j’ai des sites favoris et que j’aime de préférence ; de ce nombre est l’ermitage que vous voyez là-haut sur la sommité de la montagne de Chaveuse. […] Quoique la puissance de Dieu soit aussi visible dans la création d’une fourmi que dans celle de l’univers entier, le grand spectacle des montagnes impose cependant davantage à nos sens.

1404. (1868) Cours familier de littérature. XXVI « CLIe entretien. Molière et Shakespeare »

Craindras-tu de montrer tes actions et ta puissance égales à ton désir ? […] Dis-moi, puissance inconnue...

1405. (1887) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Troisième série « Edmond et Jules de Goncourt »

« Amoureux de mots, aligneurs d’épithètes », MM. de Goncourt le sont au plus haut point et souvent avec une grande puissance ; et c’est peut-être parce qu’ils étaient « amoureux de mots » qu’ils ont été amoureux de choses concrètes. […] J’ai peine, parfois, à aller au-delà de ce sentiment, et j’ai peur que l’œuvre de MM. de Goncourt, dans ses parties excessives, ne soit une brillante erreur littéraire, une méprise fort distinguée sur les limites nécessaires où doit s’arrêter l’effort des mots, sur la nature et la portée de leur puissance expressive.

1406. (1854) Histoire de la littérature française. Tome I « Livre I — Chapitre deuxième »

Ce n’est pas d’ailleurs la seule liberté que prenne notre langue avec un idiome qui tirait sa puissance de la conquête et de la religion. […] Il ne se préoccupe guère des causes et des suites des événements, et il ne paraît pas se douter que les croisés ne travaillaient qu’à l’accroissement de la puissance maritime de Venise, le seul pays qui profita de cette guerre, et qui garda jusqu’au xviie  siècle quelques restes d’une conquête entreprise au xiie .

1407. (1881) La psychologie anglaise contemporaine « Introduction »

Qu’est-ce que la puissance, et qu’est-ce que l’acte ? […] Dans cette espèce de phraséologie, l’esprit apparaît souvent comme une sorte de champ dans lequel la perception, la mémoire, l’imagination, la raison, la volonté, la conscience, les passions produisent leurs opérations, comme autant de puissances alliées entre elles ou en hostilité.

1408. (1892) Journal des Goncourt. Tome VI (1878-1884) « Année 1882 » pp. 174-231

Et sur la jolie femme, devenue la puissance du moment, il parle curieusement de son échec diplomatique en Russie, et donne de cet échec l’originale raison que voici : elle n’a pas moralement parlant, et selon une expression du pays, la chair froide des princesses Troubetzkoï, et autres femmes de la diplomatie russe. […] Seulement, au milieu de sa phraséologie, où il se peint bourgeoisement au temps de sa puissance, comme « un agriculteur, un sucrier », il y a le terrible accent qu’il donne à des phrases, comme celle-ci : « Oui, quand mon oncle a été brûlé ! 

1409. (1896) Les origines du romantisme : étude critique sur la période révolutionnaire pp. 577-607

L’inactivité surchauffait son tempérament ardent, « il lui semblait que la vie redoublait au fond de son cœur, qu’il aurait la puissance de créer des mondes ». […] « La plupart des hommes, écrivait en 1800 Mme de Staël, épouvantés des vicissitudes effroyables dont les événements politiques nous ont offert l’exemple, ont perdu maintenant tout intérêt au perfectionnement d’eux-mêmes et sont trop frappés de la puissance du hasard pour croire à l’ascendant des facultés intellectuelles6. » Les Renés avaient tremblé pour leur tête ; ils avaient été obligés de simuler les allures des sans-culottes, de « se dégrader, pour n’être pas poursuivis ».

1410. (1914) Boulevard et coulisses

Gagner sa vie en écrivant, on ne s’imagine pas la puissance de cette formule sur une imagination de jeune Français. […] Vous avez compris la puissance de l’union et de l’effort commun.

1411. (1900) Le rire. Essai sur la signification du comique « Chapitre III. Le comique de caractère »

On la verrait attirer à elle, absorber, s’assimiler, en les transformant, les diverses puissances de l’être : sentiments et affections, désirs et aversions, vices et vertus, tout cela deviendrait une matière à laquelle l’avarice communiquerait un nouveau genre de vie. […] La vérité porte donc en elle une puissance de conviction, de conversion même, qui est la marque à laquelle elle se reconnaît.

1412. (1870) La science et la conscience « Chapitre I : La physiologie »

Littré nous dira que « les motifs ont sur la volonté humaine la même puissance que les causes pathologiques sur le corps humain8 ». […] L’homme, n’ayant pas la liberté de ses actes, ne peut plus être qu’un agent bienfaisant ou malfaisant, dont on peut bénir ou maudire les œuvres comme on bénit ou l’on maudit les effets des puissances naturelles.

1413. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « Journal de Dangeau. tomes III, IV et V » pp. 316-332

L’Empire et l’Allemagne, la Hollande, l’Espagne, l’Angleterre, la Savoie tout à l’heure, on a à tenir tête à toutes ces puissances, et on y réussit d’abord sans trop de fatigue et sans presque qu’il y paraisse au-dedans.

1414. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Histoire du Consulat et de l’Empire, par M. Thiers (tome xviie ) » pp. 338-354

En lisant cette belle histoire qui sans doute a ses défauts, ses redites et ses longueurs, mais où rien n’est oublié ; où toutes les sources contemporaines se sont versées dans un plein et vaste courant ; où se déploie, sous air de facilité, une si grande puissance de travail ; où tout est naturel, — naturellement pensé —, naturellement dit ; si magnifique partout de clarté et d’étendue, et qui offre dans le détail des touches de la plus heureuse finesse ; où le style même, auquel ni l’historien ni le lecteur ne songent, a par endroits des veines rapides et comme des venues d’autant plus charmantes ; — en achevant de lire cette histoire, à laquelle il ne manque plus qu’un ou deux volumes de complément et de surcroît, je dirai encore ce que diront à distance tous ceux qui la liront : c’est que, quelque regret qu’ait droit d’avoir l’historien dans l’ordre de ses convictions politiques, la postérité trouvera qu’il n’eût pu employer les années fécondes de son entière maturité à rien de mieux qu’à édifier un tel monument.

1415. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) «  Œuvres et correspondance inédites de M. de Tocqueville — II » pp. 107-121

Molé provoqua une fort belle réponse de cet homme d’État ; je la citerai ici tout entière, parce qu’en y faisant la part d’une certaine vivacité qui tenait aux circonstances et aussi à la délicatesse chatouilleuse des deux personnes, on y trouve une leçon gravement donnée, et d’un ton fort digne ; il y respire un sentiment fort élevé de la puissance publique que M. 

1416. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « Campagnes de la Révolution Française. Dans les Pyrénées-Orientales (1793-1795) »

Le roi d’Espagne, le faible Charles IV, avait eu une pensée de roi et de parent après le 10 août : une note confidentielle où il offrait de reconnaître la République française, et où il proposait sa médiation près des autres puissances, à la condition de sauver Louis XVI, auquel il aurait donné asile dans le midi de la Péninsule, fut remise à la Convention, qui y répondit par des cris de colère et de menace.

1417. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « M. Octave Feuillet »

Les mœurs réglées, en elles-mêmes, sourient peu et n’amusent guère ; les mœurs bourgeoises notamment sont anti-romanesques, anti-dramatiques et anti-poétiques, et depuis longtemps tout ce qui avait talent et puissance avait cherché l’émotion et l’intérêt dans l’irrégularité des situations et dans les orages du cœur : — Mérimée, George Sand, Balzac, Dumas, Musset.

1418. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « Lettres d’Eugénie de Guérin, publiées par M. Trébutien. »

C’est d’une puissance incomparable, c’est d’une ineffable sérénité.

1419. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « Le comte de Clermont et sa cour, par M. Jules Cousin. (Suite.) »

Un beau mouvement toutefois, et digne de Voltaire quand il est éloquent, y salue ces nobles blessés, le comte de Lautrec, le marquis de Ségur, mutilé d’un bras : Anges des cieux, Puissances immortelles Qui présidez à nos jours passagers, Sauvez Lautrec au milieu des dangers ; Mettez Ségur à l’ombre de vos ailes.

1420. (1870) Nouveaux lundis. Tome XII « Essai sur Talleyrand »

Il n’est pas moins vrai que le jeune abbé malgré lui, fier et délicat comme il était, dut ressentir avec amertume l’injustice des siens : quoique d’un rang si distingué, il entrait dans le monde sous l’impression d’un passe-droit cruel dont il eut à dévorer l’affront ; il se dit tout bas qu’il saurait se venger du sort et fixer hautement sa place, armé de cette force qu’il portait en lui-même, et qui déjà devenait à cette heure la première des puissances, — l’esprit si la théologie avait pu être en passant une bonne école de dialectique, il faut convenir encore que cette nécessité où il se vit aussitôt de remplir des fonctions sacrées, sans être plus croyant que l’abbé de Gondi ; que cette longue habitude imposée durant les belles années de la jeunesse d’exercer un ministère révéré et de célébrer les divins mystères avec l’âme la moins ecclésiastique qui fût jamais, était la plus propre à rompre cette âme à l’une ou l’autre de ces deux choses également funestes, l’hypocrisie ou le scandale.

1421. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « M. BRIZEUX (Les Ternaires, livre lyrique.) » pp. 256-275

Le poëte a dû trouver souvent son champ un peu raboteux et pierreux ; il n’en conviendra pas ; on s’aperçoit toutefois que le troupeau de brebis, là-bas, est noir et maigre ; l’aspect se relève par un fond de verdeur et de puissance : O terre de granit, recouverte de chênes !

1422. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « GLANES, PÖESIES PAR MADEMOISELLE LOUISE BERTIN. » pp. 307-327

Chateaubriand donc régnant au fond et apparaissant dans un demi-lointain majestueux comme notre moderne buste d’Homère, on a : 1° Hors ligne (et je ne prétends constater ici qu’une situation), Lamartine, Hugo, Béranger, — par le talent, la puissance, le renom et le bonheur ; 2° Un groupe assez nombreux, artiste et sensible, dont il serait aisé de dire bien des noms, même plusieurs de femmes ; de vrais artistes passionnés, plus ou moins originaux, mais qui n’ont pas complétement réussi, qui n’ont pas été au bout de leurs promesses, et qu’aussi la gloire publique n’a pas consacrés.

1423. (1895) Histoire de la littérature française « Première partie. Le Moyen âge — Livre I. Littérature héroïque et chevaleresque — Chapitre IV. Poésie lyrique »

Tandis que la poésie antique ne connaissait que la passion physique, et, pour rendre raison de la force de l’amour, regardait le désir allumé par Vénus dans la nature entière à la saison nouvelle, la poésie moderne, par une orientation toute contraire, assimilera l’amour humain à l’amour divin et en fondera la puissance sur l’infinie disproportion du mérite au désir Même quand le terme réel de l’amour appartiendra à l’ordre le plus matériel et terrestre, la pensée et la parole s’en détourneront, et c’est à peine si, comme indice de ses antiques et traditionnelles attaches au monde de la sensation physique, il gardera ces descriptions du printemps, saison du réveil de la vie universelle ; encore ces descriptions seront-elles de moins en moins sincères et vivantes, et ne subsisteront-elles chez la plupart des poètes que comme une forme vide de sens, un organe inutile et atrophié.

1424. (1894) Propos de littérature « Chapitre III » pp. 50-68

Il le faut avouer, elle paraît avoir acquis les mouvements sans en ordonner jusqu’ici l’harmonie avec assez de continuité ou de précision, et trop souvent encore les poètes nouveaux ont oublié la puissance inattendue que peut donner à telle page une grande pose immobile.

1425. (1863) Molière et la comédie italienne « Chapitre X. La commedia dell’arte en France pendant la jeunesse de Molière » pp. 160-190

Il lui accorda jusqu’à la fin de ses jours une faveur spéciale, et dans les infortunes conjugales qui marquèrent la vieillesse du bouffon, le roi intervint par toutes sortes de lettres de cachet et prêta complaisamment au mari offensé les secours de sa souveraine puissance.

1426. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre XXIV. Arrestation et procès de Jésus. »

Idéaliste, c’est-à-dire ne distinguant pas l’esprit et la matière, Jésus, la bouche armée de son glaive à deux tranchants, selon l’image de l’Apocalypse, ne rassura jamais complètement les puissances de la terre.

1427. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XXXII » pp. 355-377

C’était dans cette honnêteté, toute morale, que résidait la grande puissance qui devait ramener un roi dissolu à des mœurs décentes ; car la religion n’agit sur Louis XIV qu’après l’ascendant de la morale, aidée par les charmes de l’esprit et de la raison.

1428. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Marie-Antoinette. (Notice du comte de La Marck.) » pp. 330-346

Elle voulait le salut de l’État par son frère l’empereur, par les puissances étrangères, mais point par les émigrés.

1429. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Le cardinal de Retz. (Mémoires, édition Champollion.) » pp. 238-254

La politique de Rome et celle de France s’unirent pour s’opposer à un genre de renonciation qui aurait pu devenir un précédent et, dans l’avenir, un moyen de politique aux mains des puissances.

1430. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Saint Anselme, par M. de Rémusat. » pp. 362-377

Homme d’Église avant tout, et peu fait au spectacle de violence et de désordre que donnait la vie des princes et des guerriers, attendons-nous à le voir soutenir avec fidélité, même avec obstination, mais sans ambition et sans calcul, la cause de la puissance spirituelle, ne sachant transiger ni sur le péché dont il deviendrait complice en le tolérant, ni sur la foi qu’il croit engagée dans les questions d’intérêt ecclésiastique.

1431. (1893) La psychologie des idées-forces « Tome second — Livre cinquième. Principales idées-forces, leur genèse et leur influence — Chapitre troisième. L’idée-force du moi et son influence »

L’être qui se veut et a conscience de se vouloir est supérieur, même sous le rapport de la puissance, à l’être dont la volonté n’est pas ramenée à un centre.

1432. (1886) Quelques écrivains français. Flaubert, Zola, Hugo, Goncourt, Huysmans, etc. « Les romans de M. Edm. de Goncourt » pp. 158-183

Que l’on relise surtout dans La Faustin, après les vues rembranesques des répétitions diurnes à la Comédie-Française, et la sinistré fin de dîner des auteurs dramatiques, les scènes ou apparaît l’honorable Selwyn, puis cet acte cruel du dénouement égal en puissance terrifiante à la Ligeia de Poe  La Faustin imitant devant une glace, par une nuit d’automne, le rictus de son amant moribond.

1433. (1872) Les problèmes du XIXe siècle. La politique, la littérature, la science, la philosophie, la religion « Livre IV : La philosophie — II. L’histoire de la philosophie au xixe  siècle — Chapitre I : Rapports de cette science avec l’histoire »

L’épuisement des grandes conceptions peut avoir jeté les esprits dans l’histoire ; mais ce n’est pas la passion de l’histoire qui appauvrit la puissance de l’invention.

1434. (1899) Psychologie des titres (article de la Revue des Revues) pp. 595-606

Citons cependant ce fait assez peu connu que la pièce de Tolstoï, la Puissance des Ténèbres doit être complétée comme il suit : ou si l’oiseau s’est une fois englué le bout de la griffe, toute la bête y passera.

1435. (1890) Les œuvres et les hommes. Littérature étrangère. XII « Lawrence Sterne »

Sa tête ne manque pas de puissance.

1436. (1911) Lyrisme, épopée, drame. Une loi de l’histoire littéraire expliquée par l’évolution générale « Chapitre III. Contre-épreuve fournie par l’examen de la littérature italienne » pp. 155-182

Rome, déchue du faite de sa puissance, n’en demeura pas moins la Ville sacrée.

1437. (1868) Les philosophes classiques du XIXe siècle en France « Chapitre VI : M. Cousin philosophe »

« Le Dieu de la conscience n’est pas un Dieu abstrait, un roi solitaire, relégué par-delà la création sur le trône désert d’une éternité silencieuse et d’une existence absolue qui ressemble au néant même de l’existence ; c’est un Dieu à la fois vrai et réel, un et plusieurs, éternité et temps, espace et nombre, essence et vie, indivisibilité et totalité, principe, fin et milieu, au sommet de l’Être et à son plus humble degré, infini et fini tout ensemble, triple enfin, c’est-à-dire à la fois Dieu, nature et humanité. » Cours de 1828, p. 123. « L’unité en soi, comme cause absolue, contient la puissance de la variété et de la différence.

1438. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre XXXVIII et dernier. Du genre actuel des éloges parmi nous ; si l’éloquence leur convient, et quel genre d’éloquence. »

qu’elle ait un asile dans vos ouvrages ; que chacun de vous fasse le serment de ne jamais flatter, de ne jamais tromper ; avant de louer un homme, interrogez sa vie ; avant de louer la puissance, interrogez votre cœur ; si vous espérez, si vous craignez, vous serez vils.

1439. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Première partie. — Chapitre XVI. »

Ce progrès en mal d’une génération sur l’autre, cette enchère de perversité dans les âges qui devaient suivre, de César à Auguste et d’Auguste au dernier des Césars, n’était-ce pas l’horoscope de l’empire et la fatalité de cette puissance sans droit et sans barrière ?

1440. (1887) Essais sur l’école romantique

Il y a, pour commencer, dans cette idée toute personnelle de chanter des sujets si en dehors du pays et du mouvement des idées contemporaines, il y a je ne sais quelle puissance d’isolement et d’indépendance, qui sent la force et prouve une haute originalité. […] cet instrument de communication si souple, si populaire, avec lequel il joue si souvent, comme un enfant avec une arme à feu, sans en connaître la puissance. […] Selon notre littérature industrielle, l’écrivain était l’inférieur du marchand et du riche, quand il n’avait sur eux que l’avantage de l’esprit et de la puissance morale ; un simple changement à la définition de l’écrivain a rétabli l’égalité. […] Le type le plus imposant, en France, de cette classe d’écrivains auxquels cette préoccupation passionnée d’eux-mêmes donne quelquefois tant de puissance et d’action sur leurs contemporains, c’est Voltaire. […] C’est que l’imagination, même quand elle marche seule, a pourtant cette singulière puissance qu’elle sait imiter, jusqu’à tromper des yeux grossiers, les autres facultés de l’âme : la sensibilité, la passion, la raison elle-même.

1441. (1868) Curiosités esthétiques « II. Salon de 1846 » pp. 77-198

Alors votre puissance sera complète, et nul ne protestera contre elle. […] Mais il faut que vous soyez aptes à sentir la beauté ; car comme aucun d’entre vous ne peut aujourd’hui se passer de puissance, nul n’a le droit de se passer de poésie. […] S’ils vous avaient nié la puissance de fabriquer des œuvres d’art ou de comprendre les procédés d’après lesquels on les fabrique, ils eussent affirmé une vérité dont vous ne vous seriez pas offensés, parce que les affaires publiques et le commerce absorbent les trois quarts de votre journée. […] Je ne sais quel souvenir des grands artistes me saisit à l’aspect de ce tableau ; je retrouve cette puissance sauvage, ardente, mais naturelle, qui cède sans effort à son propre entraînement ∙ ∙ ∙ ∙ ∙ ∙ ∙ ∙ ∙ ∙ ∙ ∙ ∙ ∙ ∙ ∙ ∙ ∙ ∙ ∙ ∙ ∙ ∙ ∙ ∙ ∙ ∙ ∙ ∙ ∙ ∙ ∙ ∙ ∙ ∙ ∙ ∙ ∙ ∙ ∙ ∙ ∙ ∙ ∙ ∙ ∙ ∙ ∙ ∙ ∙ ∙ ∙ ∙ ∙ ∙ ∙ ∙ ∙ ∙ ∙ ∙ ∙ ∙ ∙ ∙ ∙ ∙ ∙ ∙ ∙ ∙ ∙ ∙ ∙ ∙ ∙ ∙ ∙ ∙ ∙ ∙ ∙ ∙ ∙ ∙ ∙ ∙ ∙ ∙ ∙ ∙ ∙ ∙ ∙ ∙ ∙ ∙ ∙ ∙ ∙ ∙ ∙ ∙ ∙ ∙ ∙ ∙ ∙ ∙ ∙ ∙ ∙ ∙ ∙ ∙ ∙ ∙ ∙ ∙ ∙ ∙ ∙ ∙ ∙ ∙ ∙ ∙ ∙ ∙ ∙ ∙ ∙ ∙ ∙ ∙ ∙  » Je ne crois pas m’y tromper, M. 

1442. (1891) Enquête sur l’évolution littéraire

Le poète doit, me semble-t-il, être passif dans le symbole, et le symbole le plus pur est peut-être celui qui a lieu à son insu et même à l’encontre de ses intentions ; le symbole serait la fleur de la vitalité du poème ; et, à un autre point de vue, la qualité du symbole deviendrait la contre-épreuve de la puissance et de la vitalité du poème. […] Quant à Zola, son rôle dans le naturalisme a été de deuxième ordre ; il n’a pas été un créateur, mais avant tout l’homme politique de la bande, l’homme qui mit en œuvre, non sans habileté, du reste, et non sans puissance, les éléments d’art que Balzac, Flaubert et Goncourt lui ont fournis. […] Je ne parle pas uniquement de la nature morte ; mais, et surtout, de la nature vivante, pensante, agissante et je recherche la puissance artistique dans la synthèse des vérités naturelles, philosophiques et humaines, naturellement, simplement, humainement présentées. […] On connaît le poète exquis, le poète vivant et lyrique, d’une puissance pénétrante et douce, on connaît le romancier subtil, opprimant, le conteur inimitable, le dramaturge puissant et original des Mères Ennemies, des Frères d’armes, de la Femme de Tabarin, du Capitaine Fracasse, de la Reine Fiametta, de Justice, on a entendu le conférencier charmeur, le causeur adorable, on sait peut-être moins généralement sa passion musicale et l’œuvre de vulgarisation wagnérienne qu’il a entreprise des premiers en France.

1443. (1903) Propos de théâtre. Première série

Que lui importent la vie, la puissance, les honneurs, les devoirs même envers le Prince et envers l’État ? […] Sévère s’incline devant ces coups d’une puissance supérieure, que peut-être un jour il connaîtra mieux. […] Au-dessus de tout plane la Grâce, puissance mystérieuse qui descend où elle veut et relève ceux qu’elle touche. […] Molière l’a peint avec force, avec puissance, avec cruauté. […] L’éloquence est la puissance de persuader.

1444. (1888) Impressions de théâtre. Deuxième série

Puis Arlequin, à qui l’esprit est venu tout à fait, feint d’aimer la fée et lui enlève sa baguette, ce qui la met en sa puissance. […] Et d’où lui vient cette puissance ? […] Renan d’une humanité dominée tout entière par une aristocratie intellectuelle se trouvera réalisé, non plus par la terreur ni par la puissance irrésistible des moyens de répression matérielle, mais par l’hypnotisme et la suggestion. […] Celui qui aura trouvé, pour rendre les souples discours de Titus ou d’Ulysse, des intonations expressives et simples et, çà et là, un accent personnel aura des chances de traduire sans banalité, avec puissance et sobriété à la fois, la folie d’Oreste ou de Macbeth. […] Sa grâce et sa puissance, bien qu’elles se plient aux symétries que l’art humain leur impose, n’en éclatent pas moins aux yeux.

1445. (1887) Études critiques sur l’histoire de la littérature française. Troisième série pp. 1-326

Mais, dans une société corrompue, si l’on manque de scrupules en même temps que de naissance, et qu’ainsi l’on se trouve prêt à tout faire indifféremment, — rédiger, comme Gil Blas, un mémoire politique, et pourvoir, comme Gil Blas, aux plaisirs du prince, — le moyen alors est sûr, et le chemin tout droit, tout facile, tout sûr, de la servitude à la puissance. […] Mais s’il est intéressant de les voir agir dans leur rôle de puissances malfaisantes, il est intéressant aussi de savoir comment ils se sont formés, et c’est l’objet propre du roman, ou du moins de ce que jusqu’ici le roman a produit de plus rares chefs-d’œuvre. […] Et n’est-ce pas dire que la diversité, la complexité, l’ampleur et la puissance en sont incomparables à toutes les autres formes dont le roman s’est servi ou se sert ? […] C’est le vrai secret de son acharnement, comme c’est le mot aussi de la puissance de Rousseau. […] Une nouvelle espèce d’hommes apparaissait en scène, et son premier acte de puissance allait être de renverser, dès qu’elle le pourrait, tout ce que Voltaire avait aimé.

1446. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre V. Les contemporains. — Chapitre II. Le Roman (suite). Thackeray. »

On ne lui permet pas de contempler les passions comme des puissances poétiques ; on lui ordonne de les apprécier comme des qualités morales. […] Nous reconnaissons l’art dans cette puissance créatrice, indifférente et universelle comme la nature, plus libre et plus puissante que la nature, reprenant l’œuvre ébauchée ou défigurée de sa rivale pour corriger ses fautes et effectuer ses conceptions. […] On a vu que les mêmes facultés produisent chez lui le beau et le laid, la force et la faiblesse, le succès et la défaite ; que la réflexion morale, après l’avoir muni de toutes les puissances satiriques, le rabaisse dans l’art ; qu’après avoir répandu sur ses romans contemporains une teinte de vulgarité et de fausseté, elle relève son roman historique jusqu’au niveau des plus belles œuvres ; que la même constitution d’esprit lui enseigne le style sarcastique et violent avec le style tempéré et simple, l’acharnement et l’âpreté de la haine avec les effusions et les délicatesses de l’amour.

1447. (1870) De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés « De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés — Chapitre IV : Sélection naturelle »

On a dit que je parlais de la sélection naturelle comme d’une puissance divine ; mais qui trouve mauvais qu’un auteur parle de l’attraction ou de la gravitation comme réglant les mouvements des planètes ? […] Au contraire, quand le croisement s’opère entre des espèces distinctes, l’effet est inverse, parce que le propre pollen d’une plante l’emporte presque toujours en puissance sur un pollen trop étranger. […] Supposons que ces diverses contrées ne subissent aucun changement physique et que l’espèce y déploie librement sa puissance de multiplication ; elle ne peut s’accroître en nombre que si ses descendants se modifient de manière à s’emparer de places actuellement occupées par les représentants d’autres espèces.

1448. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Le maréchal de Saint-Arnaud. Ses lettres publiées par sa famille, et autres lettres inédites » pp. 412-452

La condition naturelle de l’armée d’Afrique, résultant des points de vue et des intérêts qui étaient propres à ses chefs, était donc de vivre dans une espèce d’opposition ministérielle permanente ; de se plaindre du peu d’égard qu’on avait à Paris pour les propositions des généraux en chef et gouverneurs, et de ne pas approuver la politique générale, avant tout conciliante et accommodante, qui présidait aux relations avec les autres puissances : « Quelle marche prend le ministère ! […] La puissance française s’est fait reconnaître et craindre en des contrées jusque-là hors d’atteinte, et où elle semblait ne pouvoir pénétrer.

1449. (1858) Cours familier de littérature. VI « XXXIIe entretien. Vie et œuvres de Pétrarque (2e partie) » pp. 81-155

XXXII Et maintenant, en finissant, rendons-nous compte de la puissance de retentissement et de durée d’une émotion éprouvée par une âme et communiquée par elle à des millions d’autres âmes, pendant des siècles, sur cette terre (et, qui sait ? […] Leur génie, c’est leur sensibilité ; il leur a suffi de sentir profondément, d’aimer divinement pour devenir des puissances de sentiment ; un clin d’œil a fait leur destinée.

1450. (1865) Cours familier de littérature. XIX « CIXe entretien. Mémoires du cardinal Consalvi, ministre du pape Pie VII, par M. Crétineau-Joly (1re partie) » pp. 5-79

Qu’on n’admette pas le mélange sacrilège du spirituel et du temporel, c’est libre à chacun ; mais qu’on ne reconnaisse pas le gouvernement temporel de la papauté parce que le pape exerce comme pape des fonctions ecclésiastiques à Rome ou ailleurs, c’est confondre les deux puissances et passer soi-même d’un ordre d’idées dans un autre. […] Il lui dit donc que, dans cette matinée, les cardinaux avaient prouvé que leur puissance était plus grande que celle du pape.

1451. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre VIII. La littérature et la vie politique » pp. 191-229

Aussi quoique plusieurs causes aient concouru à la stérilité littéraire et philosophique dont elle a été frappée, faut-il, pour une grosse part, en faire remonter la responsabilité à l’action désastreuse d’un despotisme tracassier et trop averti par une expérience récente de la puissance de l’idée pour n’en pas entraver l’expansion. […] La puissance de l’argent, qui permet d’acheter des votes, des journaux, des sièges au Parlement, et les privilèges de l’Église qui a gardé mille moyens de peser sur les consciences, font échec à la liberté des citoyens.

1452. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre XVI. La littérature et l’éducation publique. Les académies, les cénacles. » pp. 407-442

Il s’est formé en elle deux Frances qui se dressent menaçantes en face l’une de l’autre, deux nations différant de principes, de convictions politiques, de préférences littéraires, celle-ci tournée avec regret vers l’ancien régime, favorable aux prétentions de l’Eglise, admiratrice forcenée de Bossuet, du xviie  siècle, de tout ce qui prêche la soumission aux puissances d’autrefois, celle-là répudiant le vieil idéal catholique et monarchique, proclamant que le xviiie  siècle est « le grand siècle » et la Révolution le point de départ d’une ère nouvelle, appelant de tous ses vœux un état social où achèvent de disparaître les privilèges et les entraves du passé. […] Pour un qui, « très en puissance de s’abnégatiser et capable de sortir victorieux de l’ascèse magique, a préféré œuvrer d’art », nous en citerions dix autres qui, tout au rebours, s’abstraient en des travaux mystérieux… » Si les prétentions ontrecuidantes des cénacles, si leur « intrépidité de bonne opinion » ont provoqué et souvent mérité des moqueries de ce genre, est-ce à dire qu’ils n’aient pas leur fonction utile dans l’évolution littéraire ?

1453. (1886) Revue wagnérienne. Tome I « Paris, 8 mai 1885. »

Il y a dix ans on accordait l’originalité des idées, la puissance de l’orchestration ! […] C’est que, dans le même temps où Beethoven élevait à sa plus haute puissance la musique, tombée au simple rôle d’un art agréable, il a ouvert, devant nous, le spectacle de cet Art qui, à toute conscience, révèle l’univers de la vie suprême, aussi nettement, que la plus profonde philosophie le pourrait faire au penseur le plus voyant.

1454. (1893) La psychologie des idées-forces « Tome premier — Livre premier. La sensation, dans son rapport à l’appétit et au mouvement — Chapitre premier. La sensation »

Son impuissance n’est pas la mesure de la puissance des choses. […] Nous sentons immédiatement une puissance exercée sur la nôtre, sans avoir besoin de la comparer ni de l’évaluer.

1455. (1889) L’art au point de vue sociologique « Chapitre neuvième. Les idées philosophiques et sociales dans la poésie (suite). Les successeurs d’Hugo »

Le poète se reconnaît à ce qu’il rend aux mots la vie et la couleur, à ce qu’il les associe de manière à en faire le développement d’un mythe ; le poète est, selon le mot de Platon, μνθλογιχόϛ ; c’est donc à bon droit qu’on a placé au premier rang, parmi les dons du grand poète, la puissance mythologique 236. […] La mort qui vient est, elle aussi, une puissance qui s’empare de vous, doucement : c’est encore une volupté de se sentir aller sans résistance, sans volonté.

1456. (1857) Cours familier de littérature. III « XIVe entretien. Racine. — Athalie (suite) » pp. 81-159

La liberté parlementaire, qui ennoblit l’obéissance, les industries, qui honorent et multiplient le travail, la légalité, les arts, les lettres, la religion, toutes ces puissances morales étaient leur seul moyen de gouvernement. […] La présence du roi et des princes, cette autre maison de Juda pour la France restaurée, et restaurant avec elle la religion et la poésie de Louis XIV, ajoutait à la puissance de l’impression quelque chose de tendre, d’antique, de miraculeux.

1457. (1782) Plan d’une université pour le gouvernement de Russie ou d’une éducation publique dans toutes les sciences « Plan d’une université, pour, le gouvernement de Russie, ou, d’une éducation publique dans toutes les sciences — I. Faculté des arts. Premier cours d’études. » pp. 453-488

Si le Créateur n’a marqué plus fortement nulle part la grandeur de sa puissance que dans l’ordonnance des cieux, l’homme n’a marqué nulle part plus fortement l’étendue de son esprit que dans les progrès de l’astronomie. […] S’il célèbre la puissance de l’harmonie, il s’élève dans les cieux où elle apaisera le courroux des dieux ; il descend sur la terre où elle tempérera les passions des hommes ; il se précipite aux enfers où elle accroîtra le supplice des méchants.

1458. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Le Roman de Renart. Histoire littéraire de la France, t. XXII. (Fin.) » pp. 308-324

Dès lors tout est dit ; Renart, sous un titre ou sous un autre, règne et gouverne, et il n’est personne qui ne reconnaisse sa puissance.

1459. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Le buste de l’abbé Prévost. » pp. 122-139

Toutes les puissances, en ces divers lieux, s’intéressèrent à lui.

1460. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Fénelon. Sa correspondance spirituelle et politique. — I. » pp. 19-35

Toutefois, et malgré les efforts de l’abbé Maury pour porter au rang des chefs-d’œuvre deux des sermons de Fénelon, ce dernier, en raison même de la multiplicité de ses dons, n’avait pas reçu avant tout celui de la puissance oratoire, de cette organisation manifeste, naturellement montée pour être sonore et retentissante, pour être hautement distributive à distance, et qu’il suffit ensuite de nourrir au-dedans de forte doctrine, d’étude et de saines pensées, pour que tout cela tourne en fleuve, en pluie, en tonnerre majestueux, ou en une vaste canalisation fécondante.

1461. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Sénac de Meilhan. — I. » pp. 91-108

une simple idée ne lui vient pas en 1787, c’est que la monarchie sous laquelle il vit n’est pas un édifice indestructible, une voûte éternelle : « De nos jours, dit-il, la puissance des souverains est assise sur des bases inébranlables » ; et il part de là, comme d’un point fixe, dans sa supposition étrange d’une langueur et d’une insipidité sociale croissante.

1462. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Divers écrits de M. H. Taine — II » pp. 268-284

C’est presque s’attribuer la sagacité souveraine et usurper sur la puissance universelle que de dire d’un être semblable à nous : « Il est cela ; et, tel point de départ étant donné, telles circonstances s’y joignant, il devait être cela, ni plus ni moins, il ne pouvait être autre chose. » Notez que je ne parle ainsi que parce que j’ai devant moi une ambition scientifique impérieuse et précise ; car, littérairement, et sans y attacher tant de rigueur, on peut se permettre de ces résumés vifs, de ces termes brefs qui peignent et qui fixent un personnage, de ces aperçus qui animent une analyse et qui ne tirent pas à conséquence.

1463. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Souvenirs de soixante années, par M. Etienne-Jean Delécluze »

Les premières heures que l’élève passe seul dans l’atelier (car Moreau ne venait que tard et rarement) sont occupées à des réflexions sans nombre ; le propre d’Étienne est de réfléchir sur tout et de chercher à se rendre compte de tout par lui-même : « Malgré l’inexpérience du jeune élève, cette journée passée dans l’atelier des Horaces et les réflexions que tant d’objets nouveaux lui firent faire agirent avec puissance sur son esprit.

1464. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « Salammbô par M. Gustave Flaubert. (Suite.) » pp. 52-72

De son côté Salammbô, excitée par son propre désir de revoir Mâtho et cédant aux suggestions du vieux prêtre eunuque à imagination libertine, Schahabarim, qui d’ailleurs, à moitié sceptique, à moitié croyant, n’est pas fâché de mettre à l’épreuve la puissance de sa déesse, se résout à aller jusque dans le camp des Barbares chercher le voile.

1465. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « M. Octave Feuillet »

Mais pourquoi ce don, cette puissance de prosélytisme qui s’attache à elle ?

1466. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « De la poésie en 1865. (suite.) »

Toutes les puissances de la nature et du foyer, ces charmes attrayants et doux qui vivent au cœur du montagnard, l’avaient ressaisi.

1467. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « Les cinq derniers mois de la vie de Racine. (suite et fin.) »

Elle est ici, Monsieur, d’une très-bonne odeur comme les vingt dernières années de sa vie : car c’est depuis tout ce temps-là qu’il avait renoncé si absolument à ce qu’il avait fait pour le théâtre dans sa jeunesse, que nulle puissance de la terre n’avait été capable de l’y faire retourner, quelque pressantes sollicitations qu’on lui en ait faites.

1468. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « Le comte de Gisors (1732-1758) : Étude historique, par M. Camille Rousset. »

Il avait donc atteint à la plus haute fortune, sinon à la puissance ; sa considération en Europe était au moins aussi grande que dans le royaume ; il avait tous les dehors de l’autorité et du crédit, et quelque chose de la réalité.

1469. (1872) Nouveaux lundis. Tome XIII « Le général Jomini. [I] »

« Il était venu, comme l’a remarqué Jomini, un demi-siècle trop tôt ; il avait écrit dans un temps où la vraie tactique de son héros était encore méconnue, où un nouveau César n’y avait pas encore mis le complément. » Deux écrivains militaires du plus grand mérite n’avaient pas attendu toutefois le nouveau César pour entendre et commenter Frédéric : Lloyd, un Anglais qui servit avec distinction chez diverses puissances du continent, et Tempelhof, un général prussien, un savant dans les sciences exactes.

1470. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre deuxième. Les mœurs et les caractères. — Chapitre III. Inconvénients de la vie de salon. »

Devant la mort présente, ils n’ont pas le soubresaut de sang et de colère, le redressement universel et subit de toutes les puissances, l’accès meurtrier, le besoin irrésistible et aveugle de frapper qui les frappe.

1471. (1870) De l’intelligence. Première partie : Les éléments de la connaissance « Livre quatrième. Les conditions physiques des événements moraux — Chapitre II. Rapports des fonctions des centres nerveux et des événements moraux » pp. 317-336

Remplissez-vous les yeux et la mémoire des préparations anatomiques et des planches micrographiques qui nous montrent cet appareil ; supposez la puissance du microscope indéfiniment augmentée et le grossissement poussé jusqu’à un million ou un milliard de diamètres.

1472. (1895) Histoire de la littérature française « Troisième partie. Le seizième siècle — Livre IV. Guerres civiles conflits d’idées et de passions (1562-1594) — Chapitre 2. La littérature militante »

Aux fantaisies historiques d’Hotman sur la royauté élective et la souveraineté des Etats, il opposa la théorie de la monarchie française, héréditaire, absolue, responsable envers Dieu du bonheur public ; avec une nette vue de l’état réel des choses, il vit dans l’Etat la famille agrandie, et dans l’absolutisme royal l’image amplifiée de la puissance paternelle.

1473. (1895) Histoire de la littérature française « Sixième partie. Époque contemporaine — Livre I. La littérature pendant la Révolution et l’Empire — Chapitre III. Madame de Staël »

Il y a quelque chose de très singulier dans la différence d’un peuple à un autre ; le climat, l’aspect de la nature, la langue, le gouvernement, enfin surtout les événements de l’histoire, puissance plus extraordinaire encore que toutes les autres, contribuent à ces diversités ; et nul homme, quelque supérieur qu’il soit, ne peut deviner ce qui se développe naturellement dans l’esprit de celui qui vit sur un autre sol et respire un autre air : on se trouve donc bien en tout pays d’accueillir les pensées étrangères ; car dans ce genre, l’hospitalité fait la fortune de celui qui la reçoit643. » Le conseil était bon et pratique : nous nous en sommes aperçus plus d’une fois en ce siècle, nous autres Français.

1474. (1886) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Deuxième série « Alphonse Daudet  »

Ce charme, quel qu’il soit, est une des puissances de M. 

1475. (1899) Le préjugé de la vie de bohème (article de la Revue des Revues) pp. 459-469

Cette malheureuse corporation des artistes, qui détient l’intelligence authentique et devrait savoir l’adapter à tous les besoins matériels de l’existence, a mis trop longtemps un faux point d’honneur à confondre la puissance de méditation idéologique avec l’inexpérience de la conduite dans la vie.

1476. (1920) La mêlée symboliste. II. 1890-1900 « Oscar Wilde à Paris » pp. 125-145

Il y a bien des variétés de dandysme, mais, au fond de toutes, il y a la haine du frein et un défi jeté à une puissance oppressive.

1477. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre V. Premiers aphorismes de Jésus. — Ses idées d’un Dieu Père et d’une religion pure  Premiers disciples. »

Toute sa puissance d’aimer se porta sur ce qu’il considérait comme sa vocation céleste.

1478. (1881) La psychologie anglaise contemporaine « M. James Mill — Chapitre I : Sensations et idées. »

De même la théorie courante de l’affirmation, considérée à la lumière d’une science de plus en plus profonde de l’organisme du discours, semble attacher une importance exagérée à une puissance d’affirmation, présumée inhérente aux verbes, et particulièrement aux verbes de l’existence.

1479. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « La Religieuse de Toulouse, par M. Jules Janin. (2 vol. in-8º.) » pp. 103-120

Privées de leur supérieure, ses filles, à Toulouse, se montrèrent dignes d’elle, et soutinrent le choc des puissances, comme elles auraient soutenu un siège et un assaut.

1480. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Le maréchal Marmont, duc de Raguse. — III. (Suite et fin.) » pp. 47-63

La puissance de Méhémet Ali en Égypte était alors l’objet de l’attention des politiques et de la curiosité du monde : c’est par cette étude faite de près et sur les lieux, que le duc de Raguse termina ce voyage, et qu’il put dire en se rendant toute justice : Il est dans mon caractère de prendre un vif intérêt à ce qui a de la grandeur et de l’avenir.

1481. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « L’abbé Barthélemy. — II. (Fin.) » pp. 206-223

Et pourtant, à défaut de puissance, il y a dans sa manière un ton soutenu, une douce mesure, une certaine harmonie qui, aux bons endroits, et quand on s’y prête à loisir, n’est pas sans action ni sans charme.

1482. (1903) Zola pp. 3-31

Il était devenu optimiste autant que Renan écrivant l’Avenir de la science ; il croyait au progrès, aux puissances de l’humanité pour devenir meilleure ou plus heureuse. 1848 renaissait en lui et Flaubert n’eût pas reconnu le Zola qu’il avait pratiqué.

1483. (1913) Le bovarysme « Première partie : Pathologie du bovarysme — Chapitre III. Le Bovarysme des individus »

C’est un geste, une coiffure, c’est un port de tête, un mot, une piété en commun pour un nom d’artiste nouveau ou oublié, et ce signe, qui symbolise leur supériorité, reçoit son efficacité et sa puissance de suggestion de l’unanimité de leur accord.

1484. (1824) Ébauches d’une poétique dramatique « Observations générales, sur, l’art dramatique. » pp. 39-63

Voyez avec quel soin l’auteur de Mérope insiste sur les moyens de détruire la puissance de Polifonte !

1485. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre V. Mme George Sand jugée par elle-même »

Elle a cru que cela poussait, quand rien ne pousse plus, la double et très rare puissance qui invente et qui, après avoir inventé, monte plus haut que son invention, plane sur elle, la regarde et la juge !

1486. (1904) Les œuvres et les hommes. Romanciers d’hier et d’avant-hier. XIX « Gustave Droz » pp. 189-211

Mais, justement, Gustave Droz passe tout le temps que dure son livre à se moquer de ce qui pourrait changer sa nature et élever à sa plus haute puissance son sentiment paternel.

1487. (1908) Les œuvres et les hommes XXIV. Voyageurs et romanciers « Hippolyte Babou »

Ses nouvelles n’attestent pas seulement son affection courageuse pour les choses fortement littéraires ; elles en attestent encore la puissance.

1488. (1900) Le lecteur de romans pp. 141-164

Je crois que le livre est une puissance extrêmement féconde, soit pour le bien, soit pour le mal.

1489. (1887) La banqueroute du naturalisme

Car, je consens bien que les amateurs trouvent encore d’assez beaux morceaux dans La Terre, un reste de souffle, et, par endroits, presque de la puissance, dans ces descriptions, par exemple, où M. 

1490. (1868) Les philosophes classiques du XIXe siècle en France « Chapitre IV : M. Cousin écrivain »

Je le demande, quelle puissance a enseigné tout cela à tant de milliers d’hommes dans l’ancien monde, avant la venue de Jésus-Christ, sinon cette lumière naturelle qu’on traite aujourd’hui avec une si étrange ingratitude ?

1491. (1868) Les philosophes classiques du XIXe siècle en France « Chapitre V : M. Cousin historien et biographe »

Mais quand à Mme de Longueville ou à Mlle de La Vallière on ose comparer Mme de Maintenon avec les calculs sans fin de sa prudence mondaine et les scrupules tardifs d’une piété qui vient toujours à l’appui de sa fortune, nous protestons de toute la puissance de notre âme.

1492. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Deuxième partie. — Chapitre XXII. »

Telle est la puissance du vrai beau et de la poésie durable.

1493. (1895) La comédie littéraire. Notes et impressions de littérature pp. 3-379

Auguste Vacquerie n’avait qu’à commander ; toutes les puissances de l’État lui étaient acquises. […] Ce qu’il ne possède à aucun degré c’est cette puissance mystérieuse, par laquelle les vrais poètes, en accouplant certains mots, éveillent en nous une source d’émotions délicieuses et de suaves fraîcheurs. […] Elle exige chez celui qui l’emploie, une formidable puissance de création. […] Tandis que les gens du Nord faisaient leur sabbat, les gens du Midi dormaient… Ô sainte puissance de l’illusion ! […] Cela manque de puissance et d’envergure.

1494. (1814) Cours de littérature dramatique. Tome I

Il le laissa pendant plusieurs années étaler les ornements de la puissance suprême, et ce ne fut qu’après sa mort qu’il consentit à lui succéder dans la charge de souverain pontife : il aima mieux paraître recevoir un honneur que ravir une dépouille. […] Parce qu’ils étaient les plus fervents adorateurs de Dieu, qui leur ordonnait d’obéir aux puissances. […] Lorsque Homère recommande aux peuples l’honorer leurs chefs, il a toujours soin de les avertir que c’est le fils de Saturne, le grand Jupiter, qui a mis dans la main des rois le sceptre et la puissance. […] Lorsque ce Témugin, méprisé, revient en conquérant sous le nom de Gengiskan, Idamé, sans être éblouie de sa gloire et de sa puissance, reste fidèle à son époux ; elle aime mieux mourir avec lui que de régner avec Gengiskan. […] Le théâtre d’Athènes offrait au peuple des infortunes royales, des trônes renversés, d’illustres familles réduites à l’esclavage, des traits effrayants de la puissance et de la colère des dieux, de grands exemples des vicissitudes du sort et des maux de l’humanité.

1495. (1894) La bataille littéraire. Cinquième série (1889-1890) pp. 1-349

Cette puissance d’observation de l’être, de sa forme, de son mouvement, l’art de traduire, M. de Maupassant le possède aussi dans l’ordre psychologique, et cela sans s’armer de mots soi-disant nouveaux, uniquement par l’usage intelligent, rationnel, de notre belle langue. […] Malgré ses étrangetés, ses âpretés surtout, il faut reconnaître une puissance d’impressions transmises dans l’Honneur. […] Ajoutons que ce drame fut écrit, improvisé pour dire plus juste, en 1838, juste un an avant Ruy Blas et un an après les Burgraves, c’est-à-dire au moment où le poète était dans toute la puissance de son génie. […] Des superbes pages consacrées au charnier de Saint-Michel, je prends quelques extraits où éclate toute la puissance de vision, de souvenir et d’éloquence de Victor Hugo. […] Dans le chapitre où se développe le règne d’Élisabeth, fille de Pierre le Grand, nous voyons l’Impératrice conclure cette alliance franco-russe, si désirée par son père et qui a pour résultat de retarder de plus d’un siècle la puissance militaire naissante de la Prusse.

1496. (1893) Études critiques sur l’histoire de la littérature française. Cinquième série

C’est comme la question de savoir en quoi la nature ou les fonctions propres « des Séraphins, des Chérubins, et des Trônes », diffèrent de celles « des Puissances, des Vertus, et des Dominations ». […] De même donc que les rois sont rois pour faire régner entre les hommes, par des moyens dont le choix et l’application n’appartiennent qu’à eux, la justice, la paix, et la prospérité ; de même, Dieu, par des voies qui nous sont cachées, conduit le monde à des fins également dignes de sa justice, de sa puissance, et de sa bonté. […] In eo vivimus, movemur et sumus  : il faut que Dieu soit partout ou qu’il ne soit nulle part ; que « son bras ne soit pas moins fort quand il se cache que quand il se déchire » ; et qu’il ne montre quelquefois des effets sensibles de sa puissance, « que pour nous convaincre de ce qu’il fait en toute occasion plus secrètement ». […] Il eût encore pu, s’il l’eût voulu, les insérer au commencement de sa seconde partie, à l’endroit où il dit, un peu avant d’arriver à Moïse, que « le monde que Dieu avait fait pour manifester sa puissance, était devenu un temple d’idoles ». […] Déjà, selon le mot de La Bruyère, on se sentait « contraint dans la satire » ; et, en attendant de pouvoir s’exercer dans « les grands sujets », un vague besoin de liberté s’échappait en mauvaise humeur, en épigrammes, en pamphlets contre les puissances.

1497. (1896) La vie et les livres. Troisième série pp. 1-336

La naissance du soupçon dans une âme simple et confiante, l’éclaircissement lent d’un mystère entrevu, la certitude affreuse, l’aveu arraché, l’irrésistible mouvement de colère, l’ivresse de vengeance, le cri plaintif et doux de la condamnée, l’imploration d’une femme qui, malgré tout (ces combinaisons de sentiments ne sont pas rares), aime son mari, la prière qui désarme, enfin le contrat tacite qui, soudain, ligue ces deux malheureux contre l’homme méprisable et méchant d’où vient le mal, tout cela est peint avec une sûreté d’observation, une vigueur logique, une gradation d’intensité, une puissance dramatique, une angoisse croissante dont le lecteur, comme l’auteur, a le cœur serré. […] Il brouillait les puissances, comme un jeu de cartes, et les réconciliait en un tour de main. […] On regarde ce visage fin, allongé cavalièrement par une moustache en crocs et par une barbe en pointe, ce large front, plein de pensées, ces yeux qui semblent s’emparer de ce qu’ils voient, bref, toute la figure extérieure de « ce souple et gracieux lutteur qui, par la force de la volonté et la puissance de la séduction, s’ouvrit le chemin du pouvoir ».

1498. (1924) Souvenirs de la vie littéraire. Nouvelle édition augmentée d’une préface-réponse

La puissance descriptive de Zola séduisait alors la jeunesse. […] Il a deviné la fortune mobilière, la puissance de l’Association, les chemins de fer, l’artillerie. […] Heredia ne plaçait personne au-dessus de Balzac, qu’il considérait comme le père du roman français, une puissance devant laquelle il fallait s’incliner. […] La poésie absorbait toutes les puissances de son être. […] Maupassant fut un écrivain de puissance et d’audace, un de ceux qui, à l’exemple de Zola, poussèrent jusqu’à la brutalité la copie de la vie réelle.

1499. (1924) Critiques et romanciers

Il est magnifique « de force, de puissance, de volonté, d’implacable héroïsme ». […] J’ai cru du moins à la relativité des choses et à la succession des phénomènes… » Merveilleuse puissance des mots, et leur magie ou leur malignité ! […] Si vous craignez la perfide justesse de l’ironie et sa puissance persuasive, Mirbeau est moins périlleux. […] … Multiplions les batteries, les transports automobiles, les chemins de fer stratégiques, la flotte et les dirigeables jusqu’à ce que notre puissance visible inspire à l’adversaire le renoncement. […] Elle est cependant leur loi et l’est à un tel point que les âmes les plus solitaires sont les plus parfaites et atteignent, dans les moments de leur solitude absolue, leur plus haut degré de puissance.

1500. (1874) Portraits contemporains : littérateurs, peintres, sculpteurs, artistes dramatiques

Cette puissance s’appliquait également aux actes les plus insaisissables de l’entendement. […] Selon lui, la chasteté réelle développait au plus haut degré les puissances de l’esprit, et donnait à ceux qui la pratiquaient des facultés inconnues. […] Ce diable d’homme avait une telle puissance de vision qu’il nous décrivait à chacun, dans les plus menus détails, la vie splendide et glorieuse que l’association nous procurerait. […] Quel air important et mystérieux nous avions, en coudoyant les autres hommes, pauvres bourgeois qui ne se doutaient nullement de notre puissance ! […] Quelle puissance d’imitation !

1501. (1894) Critique de combat

— et des dénigrements peu intelligents qui réduisent le génie du poète à la puissance verbale, qui font de lui un simple arrangeur de mots et de rimes. […] Mais elle connaît trop bien la puissance du contraste pour s’en tenir à ce réalisme brutal qui prend les gens à la gorge. […] Vous en avez fièrement revendiqué les droits, célébré et démontré la puissance. […] Contre ces redoutables adversaires, à quelles puissances faire appel ? […] Un personnage qu’il met en scène et qui lui ressemble fort s’écrie : « Moi, je ne suis sûr de rien ; je crois qu’il y a un être intelligent, une puissance formatrice, un Dieu.

1502. (1925) Portraits et souvenirs

Ce sont elles qui le font avoir des femmes, qui le font les perdre même, quelquefois par vengeance, quelquefois par intérêt, quelquefois par caprice, toujours pour donner de lui une idée de puissance, de danger, une idée qui le distingue du commun. […] Senlis, où il fut élevé, et les doux sites du Valois eurent peut-être plus de puissance sur son esprit que ne semble le croire M.  […] C’est dans cette puissance de transmutation que réside le génie du poète. […] Il représentait la puissance tyrannique, et alors détestée, des Fermes Générales. […] La nature utilisée et conduite doit inspirer à l’homme le sentiment de sa supériorité volontaire, de sa puissance ordonnatrice.

1503. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « M. Littré. »

« Il semble que la puissance qui s’exerça alors jouissait d’une activité immense, qui est réduite aujourd’hui à des effets obscurs et à d’insignifiantes ébauches. […] Il appartient enfin, pour le définir par un dernier mot, à cette élite, à cette école consciencieuse et méritante, toujours rare, mais insensiblement plus nombreuse, de naturalistes philosophes qui tendent à introduire et à faire prévaloir en tout les procédés et les résultats de la science, et qui, affranchis eux-mêmes, s’efforcent peu à peu, et plus peut-être qu’il n’est possible, d’affranchir l’humanité des illusions, des vagues disputes, des solutions vaines, des idoles et des puissances trompeuses.

1504. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « Théocrite »

Et ceux qu’elles regardent d’un œil de joie, ceux-là n’ont rien à craindre des breuvages funestes de Circé. » Il semble indiquer par là que c’est un de ces breuvages de passion insensée qui l’a un moment égaré dans l’intervalle, mais qui n’a pas eu puissance de le perdre, parce qu’il possédait le préservatif souverain des Muses. […] Ce même sentiment qui est celui de la puissance et du triomphe définitif du talent, je le retrouve chez quelques modernes qui sont de la grande famille aussi.

1505. (1875) Premiers lundis. Tome III « Du point de départ et des origines de la langue et de la littérature française »

Dans les grandes villes, dans les centres et aux environs, dans le rayon de la puissance administrative et dans le cercle de la haute société gallo-romaine, on parlait latin ; dans les cantons écartés et hors des grandes voies romaines, les idiomes du pays, qu’on sait être si tenaces, devaient persister. […] Deux siècles plus tard, les Arabes ayant conquis la Septimanie, et Narbonne étant devenu le siège de leur puissance, il s’y introduisit encore une langue nouvelle.

1506. (1870) De l’intelligence. Deuxième partie : Les diverses sortes de connaissances « Livre deuxième. La connaissance des corps — Chapitre premier. La perception extérieure et les idées dont se compose l’idée de corps » pp. 69-122

Partant, nos idées de cause, de puissance, d’activité, ne s’attachent pas dans notre esprit à nos sensations considérées comme actuelles, sauf dans les quelques cas physiologiques où les sensations figurent par elles-mêmes comme antécédents dans quelque couple régulier. Nos idées de cause, de puissance, d’activité, au lieu de s’attacher à des sensations, s’attachent à des groupes de possibilités de sensation.

1507. (1858) Cours familier de littérature. V « XXXe entretien. La musique de Mozart (2e partie) » pp. 361-440

« Tel est ce morceau incroyable qui, par la multiplicité des épisodes, par la variété des caractères, par l’infinie délicatesse des détails, par la grandeur du plan et la puissance des effets, ne peut être comparé qu’au Jugement dernier de Michel-Ange. […] Le conflit de la nature humaine avec les puissances inconnues qui la circonviennent pour la détruire, s’offrit clairement à mon esprit ; enfin, la tempête s’apaisa, et le rideau fut levé.

1508. (1864) Cours familier de littérature. XVIII « CVIe entretien. Balzac et ses œuvres (1re partie) » pp. 273-352

Une jeune et aimable étrangère, une de ces femmes dont l’imagination est une puissance, conçut pour lui une ardente passion. […] Quant à lui, il était aisé de voir qu’il était de race et de sang légitimistes, c’est-à-dire qu’il croyait à la puissance de la tradition et des mœurs avant tout ; le commandement et l’obéissance par l’habitude, c’était pour lui tout le gouvernement.

1509. (1865) Cours familier de littérature. XX « CXVIIIe entretien. Littérature américaine. Une page unique d’histoire naturelle, par Audubon (2e partie) » pp. 161-239

La puissance de son élan, la hauteur et la rapidité de son essor, sa vigueur, son audace, la froideur de son courage justifient ce choix que l’assentiment de tous les peuples consacre. […] Tant de puissance, d’adresse, d’activité, de prudence ont achevé la conquête.

1510. (1922) Enquête : Le XIXe siècle est-il un grand siècle ? (Les Marges)

Tout n’est pas à conserver, certes, mais le xxe  siècle, même lorsqu’il formulera des réserves sur les résultats atteints, devra respecter la formidable puissance créatrice qui anima nos aînés. […] Toutefois nous avons déjà conscience de sa prodigieuse floraison intellectuelle dont l’épanouissement exalta notre admiration ; nous conservons le sentiment de la rare puissance de son action humanitaire et civilisatrice et il nous apparaît dérisoire qu’un temps si fertile en miracle puisse être, à cette heure, insulté, méprisé, dénigré par des esprits impuissants à créer et uniquement préoccupés, pour se grandir, de rabaisser tout ce qui les domine.

1511. (1889) Histoire de la littérature française. Tome IV (16e éd.) « Chapitre septième »

Elle est vraie de lui, cette parole du Christ à ses disciples : « Je demeure en vous, et vous demeurez en moi. » Dieu, le Christ, la Vierge, les saints, c’était là sa compagnie durant ces longues années de retraite où il vécut abîmé dans les Ecritures et les Pères, s’en rendant tous les personnages présents par la puissance de l’imagination et de la foi. […] Sa vraie puissance est dans son éloquence passionnée : sa victoire, c’est de nous accabler de l’insuffisance de nos lumières.

1512. (1890) L’avenir de la science « XVII » p. 357

Il faut partir de ce principe que l’homme ne naît pas actuellement bon, mais avec la puissance de devenir bon, pas plus qu’il ne naît savant, mais avec la puissance de devenir savant, qu’il ne s’agit que de développer les germes de vertu qui sont en lui, que l’homme ne se porte pas au mal par son propre choix, mais par besoin, par de fatales circonstances, et surtout faute de culture morale.

1513. (1888) Revue wagnérienne. Tome III « VII »

. — Les accents de timbre sont les moins variés ; cependant ils jouent un grand rôle par le caractère mystérieux, à la fois vivant et impassible qu’ils donnent à toute la phrase : les accents coïncident avec eux de hauteur et d’intensité, ce qui contribue à donner à la mélodie la puissance et la grandeur de sa plasticité. — Dans les notes faiblement accentuées, les bois et les cordes produisent une sonorité diffuse et assez peu définie, tandis que dans les parties accentuées, à la 3e et à la 4e mesure, il y a une coïncidence de sonorités pures qui leur donne un éclat comparable à celui d’une lumière pleine et forte. […] Dujardin a donné la traduction littérale suivante : « Seul qui de l’Amour renonce la puissance, seul qui de l’Amour répudie la délice… » (Revue Wagnérienne, I, 267).

1514. (1888) Revue wagnérienne. Tome III « VIII »

Mais c’est ici que se révèle la puissance supérieure de l’art créé par Wagner. […] Car la musique, autrefois un jeu, est aujourd’hui devenue une langue. « Seulement, ne l’oublions jamais, et ne tâchons jamais de lui dérober la plus précieuse de ses qualités en voulant la préciser par des conventions : c’est une langue « qu’on ne saurait interpréter à l’aide des lois de la logique et qui contient en elle-même une puissance de conviction immédiate bien supérieure à celle de ces lois ».

1515. (1880) Les deux masques. Première série. I, Les antiques. Eschyle : tragédie-comédie. « Chapitre VII, seconde guerre médique. »

La morsure faite à sa puissance par ce petit peuple exaspérait son orgueil. […] La délivrance était accomplie : désormais c’en est fait de la puissance perse ; sa force est tranchée et son prestige est détruit.

1516. (1926) L’esprit contre la raison

Mais enfin commencent à être jugées à leur prix les raisons que donnèrent pour vanter leurs taudis les gardiens de ce bric-à-brac et, déjà, nous pouvons affirmer que la crise de l’esprit ne suit point les oscillations d’une plus ou moins grande prospérité matérielle, ne désigne point l’état d’une intelligence révoltée contre le bluff d’un monde arbitrairement raisonnable mais au contraire mérite de qualifier les minutes, les années, les siècles où l’esprit croit à sa puissance parce qu’il se traîne à l’aide des béquilles réalistes. […] Le poète d’Anabase est encore présent dans un texte où Crevel rend hommage à Paul Klee (publié à Berlin en 1928) : « Et le sommeil n’est pas nommé, / mais sa puissance est parmi nous. » La coquille sur « sommeil » (au lieu de « soleil ») ne pouvait que conforter la lecture de Crevel.

1517. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Le prince de Ligne. — II. (Fin.) » pp. 254-272

Il ne tarde pas cependant à être plus circonspect, moins pressé en pronostics : les puissances coalisées n’ont pas fait ce qu’il souhaitait ; elles ont laissé à la France le temps de s’aguerrir.

1518. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Gabrielle d’Estrées. Portraits des personnages français les plus illustres du XVIe siècle, recueil publié avec notices par M. Niel. » pp. 394-412

Un historien du temps a très bien rendu ce caractère conciliant, adroit et facile, qui était une des puissances de Gabrielle, et c’est un correctif nécessaire à l’impression que laisserait, sans cela, le récit un peu aigre de Sully : Le plaisir, dit l’historien Matthieu en parlant de cet amour de Henri IV, n’était pas le principal objet de ses affections, il en tirait du service au démêlement de plusieurs brouilleries dont la Cour n’est que trop féconde.

1519. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Massillon. — I. » pp. 1-19

Massillon avait dans le talent une puissance d’onction plus forte, si je puis dire, que son caractère.

1520. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Le marquis de Lassay, ou Un figurant du Grand Siècle. — I. » pp. 162-179

Lassay, qui ne revint point avec eux, aurait bien voulu désarmer pour son compte le mécontentement du roi, qui à son égard datait de plus loin47 : dans une lettre sérieuse, assez politique, et où il mêle des vues sur les armées, sur les finances et l’administration des États de la maison d’Autriche, il loue délicatement Louis XIV et son gouvernement : « Comme on ne juge bien des choses que par comparaison, écrit-il, en vérité il faut sortir de France pour connaître parfaitement la puissance du roi. » On voit, par le désordre qu’il décrit, que l’Autriche n’avait pas eu alors ses Louvois et ses Colbert.

1521. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « M. Daru. Histoire de la république de Venise. — III. (Suite et fin.) » pp. 454-472

Douce puissance de l’étude qui ne permet de connaître ni le poids du temps, ni le vide de l’âme, ni les regrets d’une ambition vulgaire, et qui montre à l’homme une source plus pure, où il ne tient qu’à lui de puiser tout ce qui lui appartient de bonheur et de dignité !

1522. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Fénelon. Sa correspondance spirituelle et politique. — II. (Fin.) » pp. 36-54

Habert, à faire un extrait de la vraie doctrine de saint Augustin, le Fénelon qui déclare « que les libertés de l’Église gallicane sont de véritables servitudes », qui craint la puissance laïque bien plus que la spirituelle et l’ultramontaine, et qui redoute le danger d’un schisme tout autant que l’invasion de la France, ce Fénelon n’est pas celui que les philosophes de l’âge suivant ont façonné et remanié à leur gré.

1523. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Bossuet. Lettres sur Bossuet à un homme d’État, par M. Poujoulat, 1854. — Portrait de Bossuet, par M. de Lamartine, dans Le Civilisateur, 1854. — II. (Fin.) » pp. 198-216

Une puissance surnaturelle qui se plaît de relever ce que les superbes méprisent s’est répandue et mêlée dans l’auguste simplicité de ses paroles.

1524. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « Montluc — II » pp. 71-89

J’oserais dire que si nous avions tous un bras lié, il ne serait encore en la puissance de l’armée ennemie de nous tuer de tout un jour sans perte de la plus grand’part de leurs gens et des meilleurs hommes : pensez donc, quand nous aurons les deux bras libres et le fer en la main, s’il sera aisé et facile de nous battre !

1525. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « Charron — II » pp. 254-269

Charron n’entre en rien dans cette intelligence et cette explication vraiment philosophique de l’humanité, qui, pour la mieux comprendre, en suivrait d’abord les directions générales et en reconnaîtrait les vastes courants : il prend l’homme au rebours et dans ses écarts ; il l’observe malade, infirme, le voit toujours en faute, dans une sottise continuelle, dans une malveillance presque constante : « La plupart des hommes avec lesquels il nous faut vivre dans le monde, dit-il quelque part, ne prennent plaisir qu’à mal faire, ne mesurent leur puissance que par le dédain et injure d’autrui. » De ce qu’il y a certains cas où les sens se trompent et ont besoin d’être redressés, il en conclut que ce qui nous arrive par leur canal n’est qu’une longue et absolue incertitude.

1526. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « Préface pour les Maximes de La Rochefoucauld, (Édition elzévirienne de P. Jannet) 1853. » pp. 404-421

Nous mettons un genou en terre devant celles qui n’ont jamais failli ; mais quand à Mlle de La Vallière ou à Mme de Longueville on ose comparer Mme de Maintenon, avec les calculs sans fin de sa prudence mondaine et les scrupules tardifs d’une piété qui vient toujours à l’appui de sa fortune, nous protestons de toute la puissance de notre âme.

1527. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Œuvres inédites de P. de Ronsard, recueillies et publiées par M. Prosper Blanchemain, 1 vol. petit in-8°, Paris, Auguste Aubry, 1856. Étude sur Ronsard, considéré comme imitateur d’Homère et de Pindare, par M. Eugène Gandar, ancien membre de l’École française d’Athènes, 1 vol. in-8°, Metz, 1854. — I » pp. 57-75

Il a exprimé cela admirablement dans une épître à son ami Jean Galland, principal du collège de Boncourt ; il lui dit : Comme on voit en septembre aux tonneaux angevins Bouillir en écumant la jeunesse des vins, Qui, chaude en son berceau, à toute force gronde Et voudroit tout d’un coup sortir hors de sa bonde, Ardente, impatiente, et n’a point de repos De s’enfler, d’écumer, de jaillir à gros flots, Tant que le froid hiver lui ait dompté sa force6, Rembarrant sa puissance aux berceaux d’une écorce : Ainsi la poésie, en la jeune saison, Bouillonne dans nos cœurs… Mais quand vient l’âge de trente-cinq ou quarante ans (c’est la limite qu’il assigne), le sang se refroidit ; adieu la muse et les belles chansons : Nos lauriers sont séchés, et le train de nos vers Se présente à nos yeux boileux et de travers : Toujours quelque malheur en marchant les retards, Et comme par dépit la muse les regarde.

1528. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Le duc de Rohan — I » pp. 298-315

» Car, de même, continue Plutarque, que la poésie d’Antimaque et les peintures de Denys, ces deux enfants de Colophon, avec tout le nerf et la vigueur qu’elles possèdent, donnent l’idée de quelque chose de forcé et de peiné, tandis qu’aux tableaux de Nicomaque et aux vers d’Homère, sans parler des autres mérites de puissance et de grâce, il y a, en outre, je ne sais quel air d’avoir été faits aisément et coulamment : c’est ainsi qu’auprès de la carrière militaire d’Épaminondas et celle d’Agésilas, qui furent pleines de labeur et de luttes ardues, celle de Timoléon, si on la met en regard, ayant, indépendamment du beau, bien du facile, paraît à ceux qui en jugent sainement l’œuvre non pas de la fortune, mais de la vertu heureuse.

1529. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « La princesse des Ursins. Ses Lettres inédites, recueillies et publiées par M. A Geffrot ; Essai sur sa vie et son caractère politique, par M. François Combes » pp. 260-278

Mme des Ursins, en recevant les ordres du roi par Torcy, ne se sent pas de joie ; Mme de Noailles en a la première effusion et le rejaillissement : « Au reste, madame, je suis transportée de joie, et depuis le matin jusqu’au soir je ne suis occupée qu’à penser combien vous êtes aimable. » Il est curieux de voir comme d’abord elle diminue la portée et la visée de sa mission : elle est choisie pour accompagner Mme la princesse de Savoie jusqu’à Madrid ; voilà tout ; rien au-delà ; qu’elle mette le pied en Espagne, cela lui suffit ; elle ne restera que juste autant qu’il le faudra pour ses affaires et autant que le roi le lui commandera : elle n’est qu’un instrument docile, obéissant et presque inerte dans la main des puissances de Versailles.

1530. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Journal d’Olivier Lefèvre d’Ormesson, publié par M. Chéruel » pp. 35-52

On se raconte des horreurs sur ce cardinal-tyran : « Il en était venu à tel point, lorsqu’il mourut, qu’il ne voulait plus voir le roi que le plus fort, et avait dans sa maison trois caves capables de tenir près de trois mille hommes. » M. le prince de Condé, toujours si plat envers celui qui règne et de qui il espère, lui qui avait un jour imploré à genoux comme un honneur l’alliance du cardinal vivant, s’élève maintenant tout haut, en plein Parlement, contre ce qui s’est fait « sous une puissance qui allait jusques à la tyrannie ».

1531. (1863) Nouveaux lundis. Tome I « Correspondance de Lammenais » pp. 22-43

La forme un peu déclamatoire, un peu apocalyptique, de cet éloquent pamphlet m’avait caché d’abord ce qu’il y avait là dedans de flamme communicative et de puissance d’éruption, — de ce qui faisait dire plus tard à l’auteur : « C’est égal !

1532. (1863) Nouveaux lundis. Tome I « Des prochaines élections de l’Académie. »

Chaix-d’Est-Ange n’y est plus, puisque nous avons et possédons au sein de l’Académie ces deux puissances et ces deux gloires de l’Ordre, M. 

1533. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « Le Poëme des champs par M. Calemard de Lafayette. »

Souviens-toi seulement des accents passionnés que je te fis entendre, et quand tu aimeras un jour un beau jeune homme, demande-toi s’il te parle comme je te parlais et si sa puissance d’aimer approcha jamais de la mienne.

1534. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Le Mystère du Siège d’Orléans ou Jeanne d’Arc, et à ce propos de l’ancien théâtre français »

Satan, vous aura en sa puissance ; il n’est homme qui vous vienne en aide, par qui vous soyez secourus, si, moi, je ne prends pitié de vous ! 

1535. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « Salammbô par M. Gustave Flaubert. Suite et fin. » pp. 73-95

Son entreprise avait du grandiose ; l’exécution a prouvé de la puissance.

1536. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « Histoire de la Restauration par M. Louis de Viel-Castel. Tomes IV et V. »

S’ils manquèrent de la politique du moment, ce fut positivement parce que cette politique instantanée ne leur avait jusqu’alors inspiré que du mépris ; mais les affaires les auraient formés, parce qu’elles ont seules la puissance de courber les esprits forts jusqu’aux considérations honteuses qu’exigent l’état et les intérêts d’une société presque en dissolution.

1537. (1867) Nouveaux lundis. Tome VII « Histoire de Louvois et de son administration politique et militaire, par M. Camille Rousset. »

Il s’ouvrit brusquement, un jour, aux envoyés de cette puissance à Paris ; il les surprit l’un après l’autre par cette offre soudaine d’une alliance étroite avec la France.

1538. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Histoire de la littérature anglaise par M. Taine. »

Taine, s’il a trop l’air de la négliger, conteste et nie absolument cette puissance : il la limite, et, en la limitant, il nous permet en maint cas de la mieux définir qu’on ne faisait.

1539. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « Maurice comte de Saxe et Marie-Josèphe de Saxe, dauphine de France. (Suite) »

» Une réflexion cependant se présente, et je la glisse en passant : c’est que, dans le désir qu’il avait de faire sauter les deux d’Argenson, et surtout le second, le maréchal ne réussit que pour le marquis, c’est-à-dire celui qui était déjà condamné : preuve qu’il n’avait nullement cette toute puissance qu’on lui attribue.

1540. (1870) Nouveaux lundis. Tome XII « Essai sur Talleyrand (suite.) »

Il ne se pouvait devant l’Europe de ministre plus digne, et quand il disparut, ce fut aussitôt, dans les rapports de la France avec les autres puissances, un changement des plus sensibles pour la mesure et le ton : avec les deux honnêtes gens laborieux, mais eux-mêmes de valeur décroissante, qui succédèrent, l’échelle de la considération baissa de plus en plus.

1541. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « DIX ANS APRÈS EN LITTÉRATURE. » pp. 472-494

Jocelyn d’une part, de l’autre les Paroles d’un Croyant et les Affaires de Rome, sont, à ne voir que l’écrivain même, d’admirables et riches preuves de puissance et de fertilité.

1542. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « M. PROSPER MÉRIMÉE (Essai sur la Guerre sociale. — Colomba.) » pp. 470-492

Et puis Rome rougissait-de cette plaie au sein qui lui fut faite au plus fort de sa puissance, et ses historiens ont l’air de s’être entendus pour l’embrouiller et pour la couvrir.

1543. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « La Fontaine »

Aussi ces admirables Mémoires, qui jusqu’ici ont été envisagés surtout comme ruinant le prestige glorieux et la grandeur factice de Louis XIV, nous semblent-ils bien plutôt restituer à cette mémorable époque un caractère de grandeur et de puissance qu’on ne soupçonnait pas, et devoir la réhabiliter hautement dans l’opinion, par les endroits mêmes qui détruisent les préjugés d’une admiration superficielle.

1544. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « Mathurin Regnier et André Chénier »

Comme la douleur alors percera avant dans son âme et en armera toutes les puissances !

1545. (1895) Histoire de la littérature française « Cinquième partie. Le dix-huitième siècle — Livre IV. Les tempéraments et les idées (suite) — Chapitre VI, « Le Mariage de Figaro » »

Diffusion de l’esprit philosophique La diffusion des doctrines philosophiques à travers la société française se fait avec une prodigieuse puissance.

1546. (1887) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Troisième série « Jean Richepin »

Grand poète, en somme ; dans ses meilleurs moments, un Villon de moins d’entrailles et de plus de puissance, qui aurait passé par le romantisme ; ailleurs, un superbe insurgé en vers latins.

1547. (1889) Histoire de la littérature française. Tome IV (16e éd.) « Chapitre dixième »

La théorie de l’homme intérieur double que se partagent les deux puissances souveraines de la nature humaine, le principe ou sens spirituel et le sens intérieur matériel, est de la mauvaise psychologie.

1548. (1920) La mêlée symboliste. II. 1890-1900 « La génération symboliste » pp. 34-56

Tandis que l’autorité impériale signe cet arrêt de mort de la bourgeoisie capitaliste et s’effondre, l’activité de Bismarck échafaudé la puissance formidable de l’Allemagne dont il crée l’Unité.

1549. (1920) La mêlée symboliste. II. 1890-1900 « Stéphane Mallarmé » pp. 146-168

Il y retrouvait le même chaos de ratures et de surcharges, la même création de néant et il ne put se retenir de penser que Mallarmé « avait essayé d’élever enfin une page à la puissance du ciel étoilé ».

1550. (1889) Le théâtre contemporain. Émile Augier, Alexandre Dumas fils « Alexandre Dumas fils — Chapitre XIII »

Mais l’ensorcellement brutal du prince Georges excède outrageusement sa puissance.

1551. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Mémoires de Philippe de Commynes, nouvelle édition publiée par Mlle Dupont. (3 vol. in-8º.) » pp. 241-259

De même, les actes de Tibère, datés de là, cette grande lettre écrite au Sénat par laquelle il consomme la ruine de Séjan, l’appareil des ruses, et jusqu’aux oisivetés et aux débauches, tout est d’une autre portée et sent sa puissance romaine.

1552. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Des lectures publiques du soir, de ce qu’elles sont et de ce qu’elles pourraient être. » pp. 275-293

Les personnes qui ont le mieux connu Napoléon ont remarqué que, dans cette éducation littéraire rapide qu’il dut s’improviser à lui-même quand il eut pris possession de la puissance, il commença par préférer hautement Corneille ; il n’en vint que plus tard à goûter Racine, mais il y vint.

1553. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Pline le Naturaliste. Histoire naturelle, traduite par M. E. Littré. » pp. 44-62

Les récompenses n’étaient pas autrefois plus grandes, car la puissance souveraine était partagée entre plus de mains ; et pourtant beaucoup ont fouillé ces secrets de la nature, sans autre rémunération que la satisfaction d’être utiles à la postérité.

1554. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Lettres inédites de la duchesse de Bourgogne, précédées d’une notice sur sa vie. (1850.) » pp. 85-102

Il y a je ne sais quelle force cachée, a dit Lucrèce (ce que d’autres avec Bossuet nommeront Providence), qui semble se plaire à briser les choses humaines, à faire manquer d’un coup l’appareil établi de la puissance, et à déjouer la pièce, juste au moment où elle promettait de mieux aller.

1555. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Le Palais Mazarin, par M. le comte de Laborde, de l’Institut. » pp. 247-265

La mort servit donc l’heureux Mazarin à souhait en l’enlevant au comble de la prospérité et dans la maturité de la puissance humaine.

1556. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Monsieur Droz. » pp. 165-184

Droz s’accuse plus fermement ici qu’elle n’avait accoutumé de faire jusqu’alors ; elle atteint parfois à l’énergie : « On croyait, dit-il de Mme de Pompadour, que cette femme, en perdant ses charmes, perdrait aussi la puissance ; mais Mme de Pompadour vieillie était encore nécessaire à Louis XV : elle le dispensait de régner. » Le chancelier Maupeou est peint dans un portrait vigoureux et spirituel.

1557. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Patru. Éloge d’Olivier Patru, par M. P. Péronne, avocat. (1851.) » pp. 275-293

Mézeray, qui faisait l’office de secrétaire, lut le mot Jeu ; mais le hasard est souvent malin ; parmi les façons de dire proverbiales qui étaient citées, il y avait : Jeux de prince, qui ne plaisent qu’à ceux qui les font, « pour signifier une malignité ou une violence, faite par quelqu’un qui est en puissance ».

1558. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Portalis. Discours et rapports sur le Code civil, — sur le Concordat de 1801, — publiés par son petit-fils — II. » pp. 460-478

Il échappa aux discussions pénibles qui suivirent bientôt et qui mirent si fatalement aux prises, dans un duel scandaleux, ce pouvoir impérial et cette puissance ecclésiastique qu’il avait tout fait pour concilier.

1559. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « La reine Marguerite. Ses mémoires et ses lettres. » pp. 182-200

envoie celui que tu dois envoyer. » Toutefois elle se sentit, à ces paroles, éveiller un courage nouveau et des puissances jusque-là inconnues, et elle consentit à tout, entrant avec zèle dans les desseins de son frère.

1560. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Franklin. — III. Franklin à Passy. (Fin.) » pp. 167-185

Ce Franklin de 1767, ainsi frisé, poudré et accommodé à la française, et qui s’étonnait d’avoir quitté pour un instant sa perruque plus grave, différait tout à fait du Franklin pur Américain qui reparaissait en 1776, et qui venait demander l’appui de la Cour dans un costume tout républicain, avec un bonnet de fourrure de martre qu’il gardait volontiers sur la tête ; car c’est ainsi qu’il se montra d’abord dans les salons du beau monde, chez Mme Du Deffand, à côté de Mmes de Luxembourg et de Boufflers, et autres puissances : Figurez-vous, écrit-il à une amie, un homme aussi gai qu’autrefois, aussi fort et aussi vigoureux, seulement avec quelques années de plus ; mis très simplement, portant les cheveux gris clairsemés tout plats, qui sortent un peu de dessous ma seule coiffure, un beau bonnet de fourrure qui descend sur mon front presque jusqu’à mes lunettes.

1561. (1864) William Shakespeare « Deuxième partie — Livre III. Zoïle aussi éternel qu’Homère »

L’extrême puissance a le grand amour.

1562. (1867) Le cerveau et la pensée « Chapitre V. Le génie et la folie »

Or, ce qui constitue précisément le génie, c’est la puissance d’attention.

1563. (1872) Les problèmes du XIXe siècle. La politique, la littérature, la science, la philosophie, la religion « Livre I : La politique — Chapitre II : Philosophie politique de Tocqueville »

Pour s’assurer d’ailleurs qu’un auteur a quelque originalité et quelque puissance, il faut examiner si ses idées se sont répandues en ont conquis une certaine faveur.

1564. (1885) Les œuvres et les hommes. Les critiques, ou les juges jugés. VI. « Philarète Chasles » pp. 111-136

L’humble religieuse lui aurait pour toujours engravé dans l’âme ce Christianisme fécondant sans lequel il n’y a dans la vie intellectuelle ni consistance, ni force réelle, ni grandeur, ni même gravité, et il aurait plus tard retrouvé, à coup sûr, toutes ces puissances-là, à l’heure où se déclara son ardente vocation littéraire.

1565. (1895) Les œuvres et les hommes. Journalistes et polémistes, chroniqueurs et pamphlétaires. XV « Fervaques et Bachaumont(1) » pp. 219-245

C’est fiévreux et hâté, peint debout et presque en marchant, mais avec une désinvolture et une verve qui attestent, en définitive, une puissance.

1566. (1899) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (troisième série). XVII « Michelet »

mais abaissé à sa plus basse puissance ; c’est surtout la Révolution dans les mœurs, comme Michelet l’a déjà mise dans l’histoire.

1567. (1898) L’esprit nouveau dans la vie artistique, sociale et religieuse « I — La banqueroute du préraphaélisme »

Le portrait de femme par Burne-Jones, exposé au salon du Champ-de-Mars en 1896, celui auquel nous faisions allusion au début de cette étude, et qui présente tous les défauts de l’artiste poussés à leur plus haute puissance, fut l’objet, de la part d’un critique parisien37, d’un jugement cruel mais juste, que je prends plaisir a mentionner ici, en l’opposant aux louanges enthousiastes qui ont accablé l’artiste au cours de sa carrière : Hélas !

1568. (1898) L’esprit nouveau dans la vie artistique, sociale et religieuse « III — Un symbole »

Un vieillard, autrefois tout-puissant, git au fond de son palais, gémissant de l’éloignement des hommes qui l’ont déshérité d’une partie de sa puissance et demeurent insensibles à sa voix.

1569. (1868) Les philosophes classiques du XIXe siècle en France « Chapitre IX : M. Jouffroy écrivain »

Il n’en reste pas moins parmi les maîtres : et lorsqu’on considère sa puissance d’investigation et de raisonnement, l’étendue et la liaison de ses idées, la prudence et la hardiesse de ses tentatives, et surtout l’originalité de ses vues, on juge que parmi les maîtres son rang n’est pas le dernier.

1570. (1868) Les philosophes classiques du XIXe siècle en France « Chapitre XIV : De la méthode (Suite) »

Présente dans toutes les actions, elle les règle toutes, multiplie et accroît les unes, diminue et subordonne les autres, produit la faiblesse et la force, les vertus et les vices, la puissance et la ruine, et explique tout, parce qu’elle fait tout.

1571. (1868) Rapport sur le progrès des lettres pp. 1-184

Ces idées sont développées par le poëte avec une rare puissance de style et une grandeur tranquille, vraiment digne de l’antiquité. […] Sa maigreur ne répondait pas à l’idée que Mlle Raucourt, Mlle Georges et Mme Paradol avaient laissée de la personne tragique ; seulement elle en avait l’autorité dans son regard et la puissance dans sa voix. […] C’est par elle que Ponsard atteste le mieux sa puissance. […] Toucher de si près aux temps qu’ont vus nos pères, à des hommes dont la mémoire ne s’est pas encore dégagée de ces limbes où les morts attendent la résurrection de l’histoire, hâter cette résurrection, la faire avant les années, voir le vrai dans sa netteté, dans sa grandeur, dans son horreur et dans sa simplicité familière, être à la fois la postérité et le témoin, cela demande une rare vigueur d’intelligence et une sûreté de main égale à la puissance de la vision. […] Ainsi fait Vernouillet, et Vernouillet devient une puissance.

1572. (1894) La bataille littéraire. Septième série (1893) pp. -307

Hier, nous étions de feu pour les drames d’Ibsen, où je sens bien de la puissance, mais qui, de bonne foi, sont tout de même informes et obscurs. […] Il a eu sa part de puissance, il a joui de grands honneurs, de grandes dignités, d’une grande fortune ; mais plutôt que d’entrer, comme lui, dans l’histoire par la porte des hontes et de l’abjection, il vaudrait mieux n’avoir été qu’un garde-chasse avec six cents francs de gages et le droit au bois-mort. […] que les Égyptiens, faute de ressort, sont nécessairement soumis à des étrangers, la Turquie est la seule puissance musulmane qui soit, malgré sa faiblesse, en mesure de profiter des circonstances ; les relations religieuses seront alors d’un grand poids. […] En voilà plus qu’il ne faut pour prouver que des sympathies anciennes existent de la Russie à l’égard de la France ; en dépit des puissances hostiles, cette sympathie s’était hautement manifestée lors des fêtes de Cronstadt, dont il faut lire le récit authentique pour voir que les nôtres n’avaient rien d’exagéré. […] Le signe de la puissance y était.

1573. (1891) Études critiques sur l’histoire de la littérature française. Quatrième série

Entre autres principes, ils professaient « qu’il n’y a point d’autre divinité ni puissance souveraine au monde que la NATURE — c’est Garasse qui imprime le mot en capitales, — laquelle il faut contenter en toutes choses, sans rien refuser à notre corps ou à nos sens de ce qu’ils désirent de nous ». […] Or, en ce temps-là même, Descartes venait de rentrer en France, après avoir promené, six ou huit ans durant, de Hollande en Allemagne et d’Allemagne en Italie, sa curiosité presque universelle, son besoin de remuement, et cette imagination inquiète, ardente, et chimérique dont il semble que ses biographes, s’ils n’en ont pas ignoré la puissance, ont méconnu du moins la singularité. […] On le voit donc : l’une après l’autre, dans la littérature ou dans la philosophie du xviiie  siècle, les idées essentielles du cartésianisme renaissent, et, c’est même alors seulement, qu’en perdant la conscience de leur propre origine, elles prennent celle de leur puissance et de leur fécondité. […] On ne dira donc pas à l’homme d’essayer de s’en distinguer, mais au contraire de s’y conformer, d’en user avec elle comme les membres avec l’estomac, de se bien souvenir qu’étant en elle il ne vit que par elle, et de ne jamais enfin la traiter en puissance ennemie. […] Dans une monarchie, s’il ne dépend que de nous de pratiquer les vertus républicaines, quelles sont en effet ces connexions que l’on veut établir, et à quoi bon tant d’esprit pour démontrer que tout doit nécessairement différer dans l’État, selon que la puissance publique est aux mains de plusieurs ou d’un seul ?

1574. (1870) Nouveaux lundis. Tome XII « Camille Jordan, et Madame de Staël »

Vous, simples citoyens, ne cessez de réclamer ces assemblées primaires qu’aucune puissance n’a droit à vous ravir… Dites-vous bien que telle est en France l’immense majorité des amis de l’ordre, que, même après qu’elle est décimée, il en reste partout assez pour comprimer la horde impure qui a juré le pillage de vos fortunes et l’assassinat de vos personnes. […] Degérando en particulier n’était plus l’homme du 18 fructidor, celui qui se risquait généreusement pour un ami ; le bon était resté bon, mais il était devenu timide à l’égard des puissances, et Mme de Staël, en raison précisément de leur liaison étroite, avait pu lui en vouloir plus qu’à un autre et le lui reprocher. […] Les vanités du rang et de la puissance rappellent le grand monde de Paris, mais sont bien plus ridicules parce qu’elles s’agitent dans un plus petit cercle et ne se lient à aucun intérêt politique. — Je ne crois pas qu’il y ait de pays où l’on tienne plus à la représentation ; les maisons sont des palais, et l’on y conserve l’ancien luxe d’avoir un grand nombre de domestiques ; mais quand on arrive sans être attendu, on est tout surpris, après avoir traversé des antichambres, des salons, des galeries, de trouver la maîtresse de la maison dans un cabinet écarté, éclairé par une seule chandelle. — En tout, il me paraît d’usage ici de se donner le superflu aux dépens du nécessaire. — Le prince mène la vie la plus retirée, excepté les heures de représentation.

1575. (1898) Manuel de l’histoire de la littérature française « Livre II. L’Âge classique (1498-1801) — Chapitre premier. La Formation de l’Idéal classique (1498-1610) » pp. 40-106

Non seulement le Moyen Âge n’avait pas eu le sentiment de la forme ; mais il s’était constamment défié de la nature comme d’une maîtresse d’erreur ou d’une puissance ennemie de l’homme ; et l’esprit de sa politique n’avait tendu qu’à emprisonner l’individu dans les liens de sa corporation, de sa classe, ou de sa caste. […] On ne croit plus que l’objet de chacun soit le libre développement des puissances que la nature peut avoir mises en lui ; et on ne croit pas davantage, avec l’auteur des Essais, que, comme des noix dans un sac, ainsi les hommes finissent toujours par « s’appiler » et se tasser dans une espèce d’inertie coutumière qui ressemble à de l’ordre. […] Calays et Zéthès ou Castor et Pollux] ; — Il se meut dans la mythologie comme dans son élément naturel ; — et il y trouve la puissance de créer à son tour ses mythes ; — [Cf. l’Hymne de l’Or ou l’Hymne de l’Équité des vieux Gaulois] ; — Mais la pureté de son dessin n’y égale pas toujours la vigueur de son coloris. — Importance croissante de la description dans les Hymnes ; — et de la rhétorique ; — [Cf. l’Hymne de la Mort ou Le Temple de Messeigneurs le Connétable et des Chatillons]. — Du genre épique le poète évolue vers la prose oratoire.

1576. (1888) La vie littéraire. Première série pp. 1-363

C’est pourquoi il voulut étonner ; il en eut longtemps la puissance. […] Le malheur est qu’il a perdu sa puissance magique. […] Mais, quand Balzac me ferait un peu peur, et si même je trouvais qu’il a parfois la pensée lourde et le style épais, il faudrait bien encore reconnaître sa puissance. […] Ce petit homme, grisé par la capiteuse nouveauté de la vie, demandait au monde le plaisir avant la puissance. […] Ces hommes laborieux, qui s’élevèrent par le travail à la puissance, employaient le verbe callere pour dire être habile.

1577. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Sully, ses Économies royales ou Mémoires. — III. (Fin.) » pp. 175-194

Rosny, qui sent sa puissance et sa capacité de travail, et de qui l’ambition n’est jamais pressée de dire : « C’est trop !

1578. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Duclos. — I. » pp. 204-223

En parlant des gens de lettres, il est à la fois orgueilleux et modeste ; il a le sentiment de la puissance croissante de son ordre : « Cependant de tous les empires, celui des gens d’esprit, dit-il, sans être visible, est le plus étendu.

1579. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Bourdaloue. — II. (Fin.) » pp. 281-300

C’étaient toutes ces circonstances bien connues qui, jointes au courant principal de cette éloquence et à la puissance du fond, excitaient un intérêt dont nous n’avons plus l’idée aujourd’hui.

1580. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Le marquis de la Fare, ou un paresseux. » pp. 389-408

C’est pour toi que le fils de Jupiter, Hercule, et les enfants de Léda ont supporté toutes leurs épreuves, proclamant par leurs actions ta puissance ; c’est par amour pour toi qu’Achille et Ajax sont descendus dans la demeure de Pluton.

1581. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « William Cowper, ou de la poésie domestique (I, II et III) — II » pp. 159-177

Cette rare personne était douée des plus heureux dons ; elle n’était plus très jeune ni dans la fleur de beauté ; elle avait, ce qui est mieux, une puissance d’attraction et d’enchantement qui tenait à la transparence de l’âme, une faculté de reconnaissance, de sensibilité émue jusqu’aux larmes pour toute marque de bienveillance dont elle était l’objet.

1582. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Œuvres de Vauvenargues tant anciennes qu’inédites avec notes et commentaires, par M. Gilbert. — III — Toujours Vauvenargues et Mirabeau — De l’ambition. — De la rigidité » pp. 38-55

Certes je ne méprise point Saint-Just, ni son talent remarquable, ni cette puissance de fanatisme qui suppose un caractère énergiquement trempé; mais on s’est trop accoutumé de nos jours, sur la foi d’historiens qui énervent et romantisent l’histoire, à traiter ces hommes de terreur et de haine, comme des semblables, comme des humains, à les faire rentrer dans le cercle des comparaisons ordinaires, presque familières, et je repousse pour Vauvenargues tout rapprochement avec le jeune et beau monstre.

1583. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Correspondance inédite de Mme du Deffand, précédée d’une notice, par M. le marquis de Sainte-Aulaire. » pp. 218-237

M. de Choiseul le sent bien, et pour moi, il faut vous l’avouer, j’en ai la tête tournée… Ainsi la voyons-nous s’exalter héroïquement pour son seigneur et maître ; tous ses intérêts sont les siens ; elle les embrasse sans calcul, sans réserve ; elle s’exagère sa gloire ; elle la voit pure et sans tache : si on hésite, si on n’accorde pas tout, si on a l’air de transiger avec les puissances ennemies, elle se courrouce dans son âme généreuse, elle est comme un lion. — Elle est femme surtout et avant tout, redevenue honnêtement coquette, tendre, empressée, se montrant éprise, comme au premier jour, de l’homme qui jusque-là ne l’avait pas gâtée, et à qui plus que jamais elle se consacre : (Chanteloup, janvier 1771.

1584. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Maurice et Eugénie de Guérin. Frère et sœur »

Est-ce, qu’il alla supposer un homme, tel qu’il est aujourd’hui, avec, les pensées, et les sentiments actuels, et doublé, seulement, d’une force de cheval pour galoper, et conquérir son gré d’espace, un cavalier bien monté, toujours en selle et à la suprême puissance, ayant sous lui à demeure un cheval parfait, correct et classique comme celui de Virgile ?

1585. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « Le père Lacordaire. Les quatre moments religieux au XIXe siècle, (suite et fin.) »

Le fait est que, le contrat une fois dressé et signé dans les termes de 1801, il en devait sortir, à cause du rapprochement et de l’enchevêtrement des ‘deux puissances, une lutte sourde et tôt ou tard déclarée.

1586. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « Oeuvres inédites de la Rochefoucauld publiées d’après les manuscrits et précédées de l’histoire de sa vie, par M. Édouard de Barthélémy. »

c’est que vous n’avez que désirs médiocres, médiocre puissance.

1587. (1867) Nouveaux lundis. Tome VII « Histoire de Louvois par M. Camille Rousset. Victor-Amédée, duc de Savoie. (suite et fin.) »

Jamais puissance de la volonté ne se marqua mieux que dans toute la conduite et le manège divers de Victor-Amédée.

1588. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Histoire de la littérature anglaise, par M. Taine, (suite) »

Les fabliaux, les malins tours de Renart, l’art de duper le seigneur Ysengrin, de lui prendre sa femme, de lui escroquer son dîner, de le faire rosser sans danger pour soi et par autrui, bref le triomphe de la pauvreté jointe à l’esprit, sur la puissance jointe à ta sottise ; le héros populaire est déjà le plébéien rusé, gouailleur et gai, qui s’achèvera plus tard dans Panurge et Figaro… » Au lieu de cela, au lieu de ces tours d’écoliers qui remontent si haut, de ces friponneries de Villon et de Patelin, qui font tant rire chez nous le vilain et le populaire, qu’est-ce qui réjouit le peuple anglais et le distrait de tout, même du sermon ?

1589. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Histoire de la littérature anglaise, par M. Taine, (suite et fin.) »

Il me semble qu’il y a lieu de tout maintenir, de ne rien sacrifier, et en rendant plein hommage et entière révérence aux grandes forces humaines qui, semblables aux puissances naturelles, éclatent comme elles avec quelque étrangeté et quelque rudesse, de ne cesser d’honorer ces autres forces plus contenues qui, dans leur expression moins semblable à une explosion, se revêtent d’élégance et de douceur.

1590. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Mémoires de madame Roland »

Je trouve, en effet, dans le Voyage en Angleterre de Mme Roland, voyage instructif et très consciencieux qu’elle fit en 1784 avec son mari, un passage sur la différence des moyens de fondation en France et en Angleterre, la puissance de l’association suffisant là-bas à de magnifiques établissements qui ne se font chez nous que par voie d’autorité : « Nous avons, dit-elle, de belles choses en France, mais toutes faites par le prince aux dépens de ses sujets arbitrairement imposés et pleurant au fond des provinces le bien auquel ils ne participent que par leurs sueurs et leurs souffrances. » Voilà précisément la note dont M. 

1591. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « Exploration du Sahara. Les Touareg du Nord, par M. Henri Duveyrier. »

« Mais quelle que soit la puissance de l’imagination de l’homme, elle ne peut pas plus se figurer l’émouvant spectacle du chaos des dunes que celui des mers de glace à leur dégel.

1592. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « HISTOIRE de SAINTE ÉLISABETH DE HONGRIE par m. de montalembert  » pp. 423-443

Dans l’histoire de cette sainte, morte à vingt-quatre ans, fille de rois, mariée enfant au jeune landgrave de Thuringe et de Hesse qu’elle appelle jusqu’au bout du nom de frère, et qui la nomme sœur, bientôt veuve par la mort de l’époux parti à la croisade, persécutée, chassée par ses beaux-frères, puis retirée à Marbourg au sein de l’oraison, de l’aumône, et mourant sous l’habit de saint François ; dans cette histoire si fidèlement rassemblée et réédifiée, ce qui brille, comme l’a remarqué l’auteur, c’est surtout la pureté matinale, la virginité de sentiment, la pudeur dans le mariage, toutes les puissances de la foi et de la charité dans la frêle jeunesse.

1593. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « DISCOURS DE RÉCEPTION A L’ACADÉMIE FRANÇAISE, Prononcé le 27 février 1845, en venant prendre séance à la place de M. Casimir Delavigne. » pp. 169-192

Hommage solennel et attendrissant, quand il est pur des intérêts de parti ou des prestiges de la puissance, quand il s’adresse au simple particulier, et qui atteste sincèrement alors que l’homme de talent qu’on pleure eut en effet avec la foule, avec la majorité des autres hommes, des qualités communes affectueuses, de bons et généreux sentiments, des sympathies patriotiques et humaines !

1594. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « CHRISTEL » pp. 515-533

Chaque génération de jeunesse recommence comme dans Éden, et t’invente avec le charme et la puissance des premiers dons.

1595. (1892) Boileau « Chapitre VI. La critique de Boileau (Fin). La querelle des anciens et des modernes » pp. 156-181

Elle en implique ou en explique à la fois les lacunes et les défauts, la puissance et la beauté.

1596. (1886) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Deuxième série « Le père Monsabré »

Enfin, comme c’est par l’accroissement de leur propre puissance qu’ils cherchent le bien spirituel des âmes, il leur arrive, à leur insu, de s’attacher au moyen plus qu’à la fin et de ne pas paraître entièrement désintéressés.

1597. (1887) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Troisième série « Henry Rabusson »

La première fois, il fait sa déclaration et ajoute qu’il ne peut se marier parce qu’il est à peu près ruiné ; la seconde fois, il inquiète Edmée en lui montrant l’hypocrisie et le néant de la morale mondaine ; la troisième fois, il lui fait entendre qu’ils pourraient se marier chacun de son côté, et lui fait presque accepter l’adultère dans l’avenir ; la quatrième fois, comme elle se révolte, il la prend dans ses bras, connaissant la puissance de l’étreinte ; puis il se remet à la pervertir par des conversations hardies, « en lui mettant sous les yeux, au moyen d’exemples impressionnants pris autour de lui, la dépravation du monde, découlant, hélas !

1598. (1889) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Quatrième série « Alphonse Daudet, l’Immortel. »

Je l’aurais cru moins insensible, je ne dis pas à, l’argent, mais aux titres, aux marques extérieures de la puissance : je m’étais trompé.

1599. (1913) Les antinomies entre l’individu et la société « Chapitre XI. L’antinomie sociologique » pp. 223-252

. —  Encore ne faudrait-il pas s’exagérer la puissance et l’efficacité de cette tactique.

1600. (1889) Le théâtre contemporain. Émile Augier, Alexandre Dumas fils « Émile Augier — Chapitre V »

Ô grande puissance de l’orviétan !

1601. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « M. de Féletz, et de la critique littéraire sous l’Empire. » pp. 371-391

L’abbé Maury et l’abbé Geoffroy, chacun dans son genre et toute proportion gardée, sont deux exemples de natures très grossières, mais qui avaient puissance et talent.

1602. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Étienne Pasquier. (L’Interprétation des Institutes de Justinien, ouvrage inédit, 1847. — Œuvres choisies, 1849.) » pp. 249-269

La royauté française, en cela aimable et débonnaire entre les royautés, avait, de bon gré, voulu réduire sa puissance absolue sous la civilité de la Loi.

1603. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Histoire du chancelier d’Aguesseau, par M. Boullée. (1848.) » pp. 407-427

Dès l’origine, on le voit attentif à ne donner dans aucun extrême ; il s’oppose aux excès du jansénisme, mais il ne s’opposait pas moins énergiquement alors à ce qu’il croyait dangereux du côté de la puissance ultramontaine.

1604. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Madame de Maintenon. » pp. 369-388

Elle a raison, en un sens, de se comparer à un Louvois, à de grands ministres, aux grands ambitieux : je ne crois pas qu’on ait jamais poussé plus loin qu’elle l’esprit de suite, le culte de la considération et la puissance de se contraindre.

1605. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « La Harpe. » pp. 103-122

Il eut ses jours d’émeute, même avant d’être une puissance.

1606. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Charles Perrault. (Les Contes des fées, édition illustrée.) » pp. 255-274

Colbert, et l’Académie, qui, en ce temps-là, était très docile aux puissances, s’empressa de modifier son usage et d’établir la publicité pour la cérémonie de réception44.

1607. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « De la poésie et des poètes en 1852. » pp. 380-400

Le jour où il plaira à Dieu et à la nature de produire un talent complet doué de cette puissance d’action et de sympathie, il trouvera pour ses créations un rythme, des images, un style propre aux tons les plus divers, en un mot des éléments tout préparés.

1608. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Le duc d’Antin ou le parfait courtisan. » pp. 479-498

Louis XIV mourait, et le duc d’Orléans devenait la puissance du jour.

1609. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Beaumarchais. — III. (Suite et fin.) » pp. 242-260

» Dans une de ses lettres finales, nous surprenons de lui un espoir ou du moins un désir sur l’immortalité de l’âme : Je n’aime pas, disait-il à un ami, que, dans vos réflexions philosophiques, vous regardiez la dissolution du corps comme l’avenir qui nous est exclusivement destiné ; ce corps-là n’est pas nous ; il doit périr sans doute, mais l’ouvrier d’un si bel assemblage aurait fait un ouvrage indigne de sa puissance s’il ne réservait rien à cette grande faculté à qui il a permis de s’élever jusqu’à sa connaissance !

1610. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Boileau. » pp. 494-513

Le grand sens royal de l’un avait apprécié le bon sens littéraire de l’autre, et il en était résulté un véritable accord de puissances.

1611. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Le cardinal de Richelieu. Ses Lettres, instructions et papiers d’État. Publiés dans la Collection des documents historiques, par M. Avenel. — Premier volume, 1853. — II. (Fin.) » pp. 246-265

On a un tableau ironique comme en aurait pu tracer un Philippe de Commynes, et il le termine par ces considérations si dignes de lui, de l’homme resté, en tout temps, royal : Je reconnus en cette occasion que tout parti composé de plusieurs corps qui n’ont aucune liaison que celle que leur donne la légèreté de leurs esprits…, n’a pas grande subsistance ; que ce qui ne se maintient que par une autorité précaire n’est pas de grande durée ; que ceux qui combattent contre une puissance légitime sont à demi défaits par leur imagination ; que les pensées qui leur viennent, qu’ils ne sont pas seulement exposés au hasard de perdre la vie par les armes, mais, qui plus est, par les voies de la justice s’ils sont pris, leur représentant des bourreaux au même temps qu’ils affrontent les ennemis, rendent la partie fort inégale, y ayant peu de courages assez serrés pour passer par-dessus ces considérations avec autant de résolution que s’ils ne les connaissaient pas.

1612. (1892) Journal des Goncourt. Tome VI (1878-1884) « Année 1880 » pp. 100-128

Aujourd’hui il est entré chez moi, en disant : « C’est curieux maintenant, quand une affaire est faite avec un banquier, ce n’est pas fait avec son argent, mais avec l’argent d’un autre, qu’il se met à chercher… » Et le voilà, sauf le temps d’un rapide dîner, jusqu’à onze heures, toujours en marche, parlant de la puissance intelligentielle des gens qui ne savent ni lire ni écrire ; parlant de la virtualité des révolutionnaires espagnols, complètement détruite par les cabinets des restaurants de Paris, et qu’il compare aux sauvages, ne prenant des civilisés que l’eau-de-vie ; parlant du travail idéologiste des socialistes, complètement arrêté en 1848, par la bêtise des radicaux, dont toute la politique est rapetissée à manger du prêtre, etc., etc.

1613. (1897) Préface sur le vers libre (Premiers poèmes) pp. 3-38

À côté de l’emprise exercée par les livres, il existe toujours, en même temps, des puissances orales.

1614. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre VI. Daniel Stern »

Son histoire commencée en 1581, ne va que jusqu’en 1625, après la mort de Barneveldt ; et cette histoire que je viens de lire n’a changé en rien mon opinion sur Mme Stern en particulier, ni sur son sexe en général, à, qui je ne reconnais pas le droit, démontré par la puissance, d’écrire l’histoire.

1615. (1887) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (deuxième série). IX « J. de Maistre » pp. 81-108

Pour moi, je crois bien qu’il n’y a qu’une seule loi qui gouverne ces esprits de premier ordre qu’on appelle des hommes de génie, — et cette loi, évidente dans l’œuf du génie de Joseph de Maistre aussi bien que dans l’œuf du génie de Bossuet, par exemple, n’est peut-être que l’apparition instantanée d’une seule idée qui va se préciser et faire l’unité et la puissance de leur vie intellectuelle, à ces esprits étonnants qui ne changent pas, mais se développent, mobiles dans l’immobilité comme Dieu, dont ils sont bien plus près que nous !

1616. (1906) Les œuvres et les hommes. Poésie et poètes. XXIII « Charles Baudelaire  »

La Puissance qui punit la vie est encore plus impassible que lui !

1617. (1862) Les œuvres et les hommes. Les poètes (première série). III « Brizeux. Œuvres Complètes »

Enfin, si la puissance des choses appuyées ne s’y montre pas, il y a le charme des choses qui s’y glissent, comme les sourires et les larmes.

1618. (1900) La province dans le roman pp. 113-140

Tous les éléments de bien-être qu’on pourrait énumérer ne sont ici que secondaires, et la puissance dont je parle, pour être surtout faite d’illusion et d’oubli, n’en est pas moins profondément humaine.

1619. (1868) Les philosophes classiques du XIXe siècle en France « Chapitre X : M. Jouffroy psychologue »

Supposez qu’un physiologiste chargé de décrire l’estomac s’amuse à raconter les différents états de la puissance digestive et des capacités motrices, sécrétives, innervatrices, au lieu de remarquer que l’organe est une poche en forme de cornemuse, formée par quatre tuniques, munie de trois sortes de glandes, aboutissant d’un côté au cardia et de l’autre au pylore, animée par des rameaux du nerf pneumogastrique et du plexus solaire ; non-seulement il aura fait des barbarismes, mais il n’aura rien dit.

1620. (1890) Journal des Goncourt. Tome IV (1870-1871) « Année 1871 » pp. 180-366

Je constate que les générations contemporaines ne s’insurrectionnent que pour la satisfaction d’intérêts matériels tout bruts, et que la ripaille et la gogaille ont seules, aujourd’hui, la puissance de leur faire donner héroïquement leur sang. […] Oui, la liberté de la Presse, car je n’ai pas plus de respect pour cette puissance sacro-sainte que n’en eurent Balzac et Gavarni. […] Ce matin, un innocent communard disait dans la villa : « À Versailles, ils fusillent tous les gardes nationaux, mais aujourd’hui, on change notre costume, on va nous donner l’uniforme de la troupe, et alors si les Versaillais continuaient, les puissances étrangères interviendraient !  […] Mercredi 26 avril Oui, je persiste à le croire, la Commune périra, pour n’avoir pas donné satisfaction au sentiment qui fait sa puissance incontestable. […] Avec ses niches vides, ses statuettes fracassées ou tronçonnées, son restant d’horloge, ses découpures de hautes fenêtres et de cheminées restées, je ne sais par quelle puissance d’équilibre, debout dans le vide, avec sa déchiqueture effritée sur le ciel bleu, cette ruine est une merveille de pittoresque à garder, si le pays n’était pas condamné sans appel aux restaurations de M. 

1621. (1873) Molière, sa vie et ses œuvres pp. 1-196

Nulle part, dans aucune langue, on ne trouverait en effet tant de puissance unie à tant de bon sens, une pondération telle, une telle mesure jointe à une telle profondeur de pensée, une justesse de ton aussi profonde, une précision, une clarté, une harmonie aussi étonnantes. […] Il prétend instruire, conduire, former et déformer la nation à son gré, modeler de son coup de pouce dévot la cervelle de l’enfance, tenir la femme sous son pouvoir, et par ces deux puissances faites de faiblesses, — la femme et l’enfant,  — guider l’homme à sa fantaisie et faire de la famille ce que bon lui semblera. […] Je tiens d’ailleurs à le répéter en achevant ces rapides études sur un des hommes que notre pays doit le plus admirer : — l’heure est venue où la France, condamnée à répudier pour un moment la force, ou du moins à la chercher dans les triomphes intellectuels, doit puiser dans ces souvenirs de gloire littéraire une nouvelle conscience de sa valeur, de sa puissance morale, de son rôle, et une espérance nouvelle dans son avenir. […] Mais si le véritable génie consiste dans la pondération absolue, dans le bon sens uni à la puissance, dans le rien de trop, qui est en somme le but suprême de l’art, Molière, comme Cervantes, est l’égal de Shakespeare. […] Le xviie  siècle avait donné à cet esprit la noblesse, le xviiie  siècle lui donna la puissance.

1622. (1881) Le naturalisme au théatre

Maintenant, en pratique, je ne crois pas à la puissance de l’argent, lorsqu’il s’agit d’art. […] On voit donc ici la convention tournée, comme masquée par la puissance de la vérité des peintures. […] Mais je m’adresse à lui, parce qu’il a une réelle puissance sur le public. […] Je n’ai pas la folle vanité de croire que c’est moi qui vais déterminer un mouvement de cette puissance irrésistible. […] Cette figure est posée avec beaucoup de puissance.

1623. (1895) Impressions de théâtre. Huitième série

Une puissance cachée, qui n’est autre que la Providence, veille également sur le roi d’Ithaque et sur le comte de Monte-Cristo : ici, sous les traits de l’abbé Faria, et, là, sous les espèces de Pallas-Athènè. […] C’est ainsi : la faculté de traduire les choses dans des représentations plus belles et plus expressives que les choses mêmes, cette faculté, chez celui quien est éminemment doué, abolit presque la vulgaire puissance d’aimer des personnes : Car des emplois de feu demandent toute une âme. […] Le pouvoir de la méchante aïeule, non seulement sur les corps mais sur les consciences, reste plus mystérieux par cet éloignement, et je sais gré à l’auteur de nous avoir en effet présenté cette puissance comme un mystère. […] Rien, évidemment, n’est comparable à la puissance de fascination et de suggestion que ce chapeau, ce profil de médaille et cette redingote grise ont exercée sur les hommes. […] Mais c’est curieux ; mais il y a, en maint endroit, de la puissance ; mais Tibère est vivant ; mais Caligula est vivant ; mais Séjan a l’air de vivre ; mais il suffirait peut-être d’élaguer, de tailler, d’abattre tout au travers à pleins ciseaux pour que, du coup, le drame parût valoir dix fois mieux ; et enfin cela mérite d’être vu.

1624. (1922) Le stupide XIXe siècle, exposé des insanités meurtrières qui se sont abattues sur la France depuis 130 ans, 1789-1919

La puissance de vue d’un Le Play, sa divination, sont remarquables. […] C’est précisément au nom de la force du style et de sa puissance de percussion que nous réclamons pour la justesse et la pertinence des termes employés. […] Pastiche manqué de l’œuvre de Comte (en qui, du moins, demeurent des morceaux d’une rare puissance, malheureusement engangués dans un style limoneux), les principes de Spencer ne valent plus que le poids du papier. […] Il guérira toutes les maladies, en supprimant toutes les infirmités, vraisemblablement aussi en prolongeant la limite d’âge ; ou bien il inventera des machines à tuer, des explosifs d’une puissance telle que la guerre deviendra impraticable. […] C’était un de mes collaborateurs à l’Action française, il avait grande confiance en moi et j’avais eu soin de lui vanter (en m’adressant à son intelligence, qui était vive) la puissance d’action du nouveau remède, alors en pleine vogue.

1625. (1814) Cours de littérature dramatique. Tome II

Le prince qui osa seul opposer une digue au torrent de la puissance romaine, a bien plus de grandeur réelle qu’Agamemnon, Achille, Pyrrhus, Oreste, Thésée ; mais ces rois grecs, qui n’étaient que des brigands, empruntent de la poésie un charme presque magique, et l’on peut dire que la fable a été plus favorable à Racine que l’histoire. […] Je ne leur conseille pas de discuter le droit, puisque de fait elles sont en possession de l’empire : n’importe par quel moyen et sur quel fondement leur puissance soit établie, chacune d’elles peut dire avec Didon : Je règne, il n’est plus temps d’examiner mes droits. […] C’est par ce partage de la souveraineté que les femmes prétendent terminer la dispute ; mais On ne partage point la puissance suprême. […] Les autres n’en demandent pas davantage : il est fâcheux, après avoir dit que notre gloire est entre nos mains, qu’il ne faut songer qu’à se rendre immortel comme les dieux, d’être obligé de reconnaître leur puissance et de leur demander du vent. […] Ô grande puissance de la fable, qui change en un moment une âme insensible et dénaturée en un prodige de piété filiale !

1626. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome III pp. -

Ils plaident pour se faire recevoir, ne veulent rien souffrir, se fâchent quand on ne leur fait pas bonne chère : malheur à quiconque les examine & les éclaire de près ; ils excitent contre lui les puissances temporelles. […] Non contens de cette réfutation des écrits de Guillaume de Saint-Amour, les frères prêcheurs & mineurs voulurent rendre sa personne suspecte à toutes les puissances de l’Europe. […] La plupart des puissances de l’Europe prirent parti dans ce procès. […] Ce ministre reconnut sa sottise, abandonna son projet & vit combien il eût été plus facile de reconcilier les puissances les plus ennemies, que deux corps divisés. […] Il restoit, dans les puissances contractantes, un fond de défiance & de haine.

1627. (1890) Derniers essais de littérature et d’esthétique

Tout le récit est d’une puissance extraordinaire, et il n’y est point fait un abus extravagant du dialecte écossais, ce qui est fort commode pour le lecteur. […] La poésie antique, en particulier, est pénétrée de ce sentiment, et on peut même dire qu’elle lui doit une bonne partie de son charme et de sa puissance poétique. […] Il y a certains vers d’une puissance étrange, et vraiment, en dépit de l’exagération dans l’allitération, peut-être par suite de cela même, toute la pièce est une remarquable œuvre d’art. […] Pourtant, ô Seigneur de puissance mon esprit, dans la lumière, verra encore la lumière. […] Il voit les hommes et les femmes comme des parties de la Nature, passionnées, émues, en un groupement étrange, en rapport avec la grandeur et la beauté du monde naturel, images, ce sont ses propres expressions, d’hommes souffrants parmi des formes et des puissances redoutables. » Certainement le véritable secret de Wordsworth n’a jamais été mieux exprimé.

1628. (1870) Portraits contemporains. Tome IV (4e éd.) « M. THIERS. » pp. 62-124

….Que l’homme est malheureux et méchant, que le génie est un don nuisible et Dieu une puissance malfaisante ? […] La France, au comble de la puissance, était maîtresse de tout le sol qui s’étend du Rhin aux Pyrénées, de la mer aux Alpes.

1629. (1863) Cours familier de littérature. XVI « XCVe entretien. Alfred de Vigny (2e partie) » pp. 321-411

Nécessité d’être fort, prêt à tout, dans une nation méditerranéenne, circonscrite par trois millions de soldats ou de matelots, aux ordres absolus des huit puissances militaires qui nous menacent en Europe, à toute heure : qui peut nier cette évidence ? […] C’est une Religion mâle, sans symbole et sans images, sans dogme et sans cérémonie, dont les lois ne sont écrites nulle part ; — et comment se fait-il que tous les hommes aient le sentiment de sa sérieuse puissance ?

1630. (1864) Cours familier de littérature. XVII « XCIXe entretien. Benvenuto Cellini (1re partie) » pp. 153-232

« Je pensais ensuite à la puissance des étoiles, non qu’elles puissent nous faire du mal ni du bien par elles-mêmes, mais par le hasard de leurs conjonctions auxquelles nous sommes exposés. […] Je considérais avec étonnement quelle est la force de la puissance divine dans les âmes simples et croyantes avec ferveur, auxquelles Dieu accorde de faire tout ce qu’elles s’imaginent ; et j’espérais la même grâce de Dieu, à cause de mon innocence.

1631. (1896) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Sixième série « Figurines »

Il est d’ailleurs certain que l’« idée fixe », l’obsédante représentation de l’objet idolâtré exerce plus pleinement les puissances de l’âme que ne ferait sa présence réelle. […] Ce qui lui déplaît dans la démocratie, c’est que, la force et le pouvoir s’y trouvant dans les mêmes mains, c’est-à-dire dans celles du plus grand nombre, « il n’y a point d’art, point d’équilibre et de beauté politique. » Il veut que la puissance soit séparée de la force matérielle, du nombre, et les tienne en échec.

1632. (1893) Du sens religieux de la poésie pp. -104

Le poète est bien cet être, ce Jésus éternellement ravi d’une vision de ciel, cet éternel enfant à qui, quelque jour, des puissances inconnues sont venues faire le triple don. […] Les systèmes continuent à ne valoir que la valeur individuelle de leurs auteurs : mais ceux-ci ont appris à connaître les bornes de leur puissance, l’imagination a fait d’utiles écoles.

1633. (1856) Jonathan Swift, sa vie et ses œuvres pp. 5-62

La politique était le grand chemin de ces honneurs et de cette puissance ; on n’y arrivait que par la main de l’un des deux partis, qui influaient tour à tour sur les destinées de la nation, et sur la fortune des ambitieux. […] Il est amusant de les voir tous confesser lamentablement qu’ils m’ont maltraité. » Swift ne songeait guère à s’associer à la défaite d’un parti qu’il avait inutilement servi dans sa puissance, La défection fut éclatante.

1634. (1753) Essai sur la société des gens de lettres et des grands

Néanmoins tandis que d’un côté la puissance des rois s’est affermie, de l’autre ce germe de connaissances que François Ier avait contribué à faire éclore, fructifiait insensiblement dans le centre de la nation, sans se répandre beaucoup vers les extrémités ; c’est-à-dire, ni sur le peuple entièrement livré à des travaux nécessaires pour sa subsistance, ni sur les grands seigneurs suffisamment occupés de leur oisiveté et de leurs intrigues. […] Telle est l’utilité vraie ou prétendue que les gens de lettres croient retirer pour leur réputation du commerce des grands : j’entends par ce mot tous ceux qui sont parvenus, soit par leurs ancêtres, soit par eux-mêmes, à jouir dans la société d’une existence considérable ; car la puissance du prince qui dans un État aussi monarchique que le nôtre est proprement le seul grand seigneur, a confondu bien des états ; l’opulence, ce gage de l’indépendance et du crédit, se place volontiers de sa propre autorité à côté de la haute naissance, et je ne sais si on a tort de le souffrir ; il semble même que les états inférieurs qui sont privés de l’un et de l’autre de ces avantages, cherchent à les mettre sur la même ligne, pour diminuer sans doute le nombre des classes d’hommes qui sont au-dessus de la leur, et rapprocher les différentes conditions de cette égalité si naturelle vers laquelle on tend toujours même sans y penser.

1635. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Malherbe et son école. Mémoire sur la vie de Malherbe et sur ses œuvres par M. de Gournay, de l’Académie de Caen (1852.) » pp. 67-87

On aura plus tard d’éclatants retours, et plus d’un jet moderne surpassera en puissance et en largeur la source première : on ne retrouvera plus cette veine charmante et trop peu suivie, qui n’a d’ancien qu’une plus douce couleur, cette veine non plus italienne, ni grecque, ni espagnole, mais purement française de ton et de goût jusque dans ses réminiscences d’Horace.

1636. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Sully, ses Économies royales ou Mémoires. — I. » pp. 134-154

Les Mémoires de L’Estoile, ce bourgeois de Paris et cet écho des autres bourgeois ses compères, nous informent des vers satiriques, pasquinades ou caricatures qui se faisaient contre Sully dans les dernières années de sa puissance.

1637. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « Le président Hénault. Ses Mémoires écrits par lui-même, recueillis et mis en ordre par son arrière-neveu M. le baron de Vigan. » pp. 215-235

Ce qui lui manquait, c’était le travail qui creuse, l’attention qui concentre, c’était la puissance de talent qui réalise : Tout rappelle à notre esprit, disait-il dans la préface de son François II, les objets où il se plaît davantage ; et comme je m’occupe assez volontiers de l’histoire, je n’ai presque vu que cela dans Shakespearei… En voyant la tragédie de Henri VI, j’eus de la curiosité de rapprendre dans cette pièce tout l’historique de la vie de ce prince, mêlée de révolutions si contraires l’une à l’autre et si subites qu’on les confond presque toujours, malgré qu’on en ait… Et tout à coup, oubliant que je lisais une tragédie, et Shakespeare lui-même aidant à mon erreur par l’extrême différence qu’il y a de sa pièce à une tragédie, je me suis cru avec un historien, et je me suis dit : Pourquoi notre histoire n’est-elle pas écrite ainsi ?

1638. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Une petite guerre sur la tombe de Voitture, (pour faire suite à l’article précédent) » pp. 210-230

Son adversaire avait d’abord obtenu du lieutenant civil l’interdiction et la saisie ; car il est à remarquer que Costar se montra fourbe jusqu’au bout, et qu’après avoir entamé à son heure la controverse et s’être donné toute licence de plume, il eut recours aux puissances quand il eut tout dit, pour faire prononcer la clôture et pour fermer la bouche à l’adversaire.

1639. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Le duc de Rohan — II » pp. 316-336

Une paix alors se marchande et se conclut, que Richelieu au début de ses grands desseins ne rend pas trop difficile, que les ambassadeurs d’Angleterre et de Hollande, deux puissances pour lors alliées de la France, conseillent impérieusement aux réformés, et dont Rohan a l’air de triompher plus qu’il ne convient.

1640. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Maine de Biran. Sa vie et ses pensées, publiées par M. Ernest Naville. » pp. 304-323

Trente ans plus tard, il finira par les résoudre dans le sens favorable à l’âme, à sa force active, et encore en supposant cette force aidée et soutenue par une puissance supérieure et un esprit qui lui communique une sorte de grâce.

1641. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Œuvres de Vauvenargues tant anciennes qu’inédites avec notes et commentaires, par M. Gilbert. — II — Vauvenargues et le marquis de Mirabeau » pp. 17-37

Il y a un côté par où M. de Mirabeau tomba dans la secte et fut un dévot au docteur Quesnay ; mais, en laissant ce côté particulier et ce coin de paradoxe économique, que d’idées fines et justes dans ses écrits, que de vues justifiées par l’expérience et que ne désavouerait pas le bon sens politique, soit qu’on le prenne dans son mémoire de début sur L’Utilité des États provinciaux (1750), soit dans maint chapitre de L’Ami des hommes (1756), soit dans la Théorie de l’impôt (1760) qui le fit mettre cinq jours au donjon de Vincennes, par un simulacre de châtiment et une concession faite aux puissances financières du temps !

1642. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Vie de Maupertuis, par La Beaumelle. Ouvrage posthume » pp. 86-106

… » Comme Voltaire l’avait dénoncé d’emblée aux puissances et signalé comme un calomniateur de Louis XIV, de Louis XV et du roi de Prusse, La Beaumelle le rappelait à l’ordre et lui faisait toucher son inconséquence : « Apprenez qu’il est inouï que le même homme ait sans cesse réclamé la liberté de la presse, et sans cesse ait tâché de la ravir à ses confrères15. » Il y a même une lettre assez éloquente, la xiiie , dans laquelle l’auteur suppose un baron allemand de ses amis, qui s’indigne de l’espèce de défi porté par Voltaire, dans son enthousiasme pour le règne de Louis XIV : « Je défie qu’on me montre aucune monarchie sur la terre, dans laquelle les lois, la justice distributive, les droits de l’humanité, aient été moins foulés aux pieds… que pendant les cinquante-cinq années que Louis XIV régna par lui-même. » La réponse est d’un homme qui a souffert dans la personne de ses pères et qui sort d’une race odieusement violentée dans sa conscience, opprimée depuis près de quatre-vingts ans16 et traquée.

1643. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Journal et mémoires du marquis d’Argenson, publiés d’après les manuscrits de la Bibliothèque du Louvre pour la Société de l’histoire de France, par M. Rathery » pp. 238-259

Il aspirait à voir la puissance impériale concentrée à l’Allemagne, et le vœu de Jules II accompli : Chasser de l’Italie les barbares.

1644. (1863) Nouveaux lundis. Tome I « Madame Swetchine. Sa vie et ses œuvres, publiées par M. de Falloux. »

Ballanche, le plus grave et le plus doux d’entre les familiers de l’Abbaye-au-Bois, était le messager ordinaire qu’on dépêchait à la rue Saint-Dominique dans la prima sera, et qui en rapportait des nouvelles ; il était le chargé de bonnes paroles et de petits soins entre les deux puissances.

1645. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « La comtesse d’Albany par M. Saint-René Taillandier (suite et fin.) »

C’est pour cela que je vous ai appelée à Paris, où vous pourrez tout à loisir satisfaire votre goût pour les beaux-arts. » Mme d’Albany était traitée comme une puissance, elle s’en serait bien passée.

1646. (1866) Nouveaux lundis. Tome VI « Sismondi. Fragments de son journal et correspondance »

Elle a consenti à se taire, à attendre, à souffrir pour retourner au milieu de tout ce qui lui est cher ; mais elle a refusé toute action, toute parole qui fût un hommage à la puissance… » Tous les personnages du groupe de Mme de Staël reviennent sans cesse dans ces lettres de Sismondi et y sont présentés avec beaucoup de naturel et de vérité.

1647. (1867) Nouveaux lundis. Tome VII « Corneille. Le Cid(suite et fin.)  »

La France a cette singulière puissance et ce singulier privilège de battre monnaie, même avec l’argent d’autrui.

1648. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « Réminiscences, par M. Coulmann. Ancien Maître des requêtes, ancien Député. »

Lui seul avait la puissance, par un esprit égal au sien, de mettre en jeu tout son esprit, de la faire grandir par la lutte, d’éveiller une éloquence, une profondeur d’âme et de pensée qui ne se sont jamais montrées dans tout leur éclat que vis-à-vis de lui, comme lui aussi n’a jamais été lui-même qu’à Coppet.

1649. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « George Sand — Note »

En un mot, elle a la puissance et le cœur, et plus on la connaîtrait en tous ses orages, plus on lui resterait attaché par cet attrait qui intéresse aux natures singulières en même temps que par ce nœud qui lie aux êtres profondément humains.

1650. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « M. ALFRED DE MUSSET. » pp. 177-201

Les Contes d’Espagne et d’Italie, en mettant hors de ligne la puissance poétique de M. de Musset, posaient donc en même temps une sorte d’énigme sur la nature, les limites et la destinée de ce talent.

1651. (1895) Histoire de la littérature française « Troisième partie. Le seizième siècle — Livre V. Transition vers la littérature classique — Chapitre I. La littérature sous Henri IV »

Il a une singulière netteté de vision, et rend avec une puissance, un relief, une vie extraordinaires les physionomies, les attitudes, les propos des originaux qu’il a rencontrés.

1652. (1899) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Septième série « Victor Duruy » pp. 67-94

La certitude et l’activité ; des croyances morales simples et fortes, héritées de l’antiquité grecque et latine, attendries par le christianisme, élargies par la Renaissance, enrichies de toute la générosité acquise par l’âme humaine à travers trente siècles ; des actes conformes à ces croyances ; des écrits conformes à ces croyances et à ces actes ; le plus ardent patriotisme et le plus humain ; les plus solides vertus privées et publiques ; une sincérité entière ; toutes communications ouvertes, si je puis dire, entre la vie publique, la vie privée et l’œuvre écrite ; des passages aisés et tranquilles de la médiocrité à la puissance, de la chaire du professeur à la tribune et au cabinet du ministre, et de là au foyer domestique et au recueillement de l’étude… bref, c’est une vie singulièrement harmonieuse que celle de M. 

1653. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre XVII. Rapports d’une littérature avec les littératures étrangères et avec son propre passé » pp. 444-461

Par désir de se complaire l’une à l’autre, les deux puissances amies s’envoient des ambassades, s’offrent des fêtes, organisent des rencontres entre les grands personnages qui les représentent ; un rapprochement des deux littératures est la conséquence, quand il n’a pas été le prélude, de ces ententes cordiales.

1654. (1880) Les deux masques. Première série. I, Les antiques. Eschyle : tragédie-comédie. « Chapitre XI, les Suppliantes. »

Or, quoique nous redoutions leur puissance, nous ne voudrions pas trahir un Suppliant, avant de savoir de toi clairement ce que nous devons faire. » — L’Oracle répéta sa première réponse, disant qu’il fallait livrer Pactyas aux Perses.

1655. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Lettres de Mlle de Lespinasse. » pp. 121-142

Dès ce moment, Mlle de Lespinasse vécut à part et devint, par son salon et par son influence sur d’Alembert, une des puissances reconnues du xviiie  siècle.

1656. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Procès de Jeanne d’arc, publiés pour la première fois par M. J. Quicherat. (6 vol. in-8º.) » pp. 399-420

Michelet a bien saisi la pensée même du personnage, qu’il a rendu avec vie, avec entrain et verve, le mouvement de l’ensemble, l’ivresse de la population, ce cri public d’enthousiasme qui, plus vrai que toute réflexion et toute doctrine, plus fort que toute puissance régulière, s’éleva alors en l’honneur de la noble enfant, et qui, nonobstant Chapelain ou Voltaire, n’a pas cessé de l’environner depuis.

1657. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Diderot. (Étude sur Diderot, par M. Bersot, 1851. — Œuvres choisies de Diderot, avec Notice, par M. Génin, 1847.) » pp. 293-313

Son génie, car il en avait, et on ne saurait donner un autre nom à une telle largeur et à une telle puissance de facultés diverses, s’y plia si bien, qu’on ne sait aujourd’hui s’il eût été propre à un autre régime, et qu’on est tenté de croire qu’en se dispersant ainsi et en se versant de toutes parts et à tous venants, il a le mieux rempli sa destinée.

1658. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Saint-Évremond et Ninon. » pp. 170-191

Somaize, dans Le Grand Dictionnaire des précieuses, ne dit pas autre chose : « Pour de la beauté, quoique l’on soit assez instruit qu’elle en a ce qu’il en faut pour donner de l’amour, il faut pourtant avouer que son esprit est plus charmant que son visage, et que beaucoup échapperaient de ses fers s’ils ne faisaient que la voir. » Mais, dès qu’elle parlait, on était pris et ravi : c’était son esprit qui achevait sa beauté et qui lui donnait toute son expression et sa puissance.

1659. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Histoire des travaux et des idées de Buffon, par M. Flourens. (Hachette. — 1850.) » pp. 347-368

Il élève la pensée, il l’agrandit, il la trouble et la confond aussi par cette hardiesse qui consiste à se mettre si résolument dans ce récit, soi, simple mortel, en lieu et place de Dieu, de la Puissance infinie.

1660. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Monsieur de Bonald, (Article Bonald, dans Les Prophètes du passé, par M. Barbey d’Aurevilly, 1851.) » pp. 427-449

Dans un chapitre intitulé « Des gens de lettres », il saisit très finement les qualités distinctives de cette nouvelle espèce, née ou développée seulement au xviiie  siècle ; il dénonce les inconvénients d’un pareil corps vaguement introduit dans l’État et y devenant une puissance ; il essaie de la restreindre et d’assigner les termes dans lesquels il conviendrait, selon lui, de renfermer toute discussion littéraire, soit par rapport à la religion, soit par rapport aux mœurs.

1661. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Madame de Motteville. » pp. 168-188

C’était précisément ce qui déplaisait à Mazarin et ce qui le faisait se plaindre : « Ce reproche, ajoute-t-elle, marquait assez de défiance naturelle, et combien nous étions malheureux de vivre sous la puissance d’un homme qui aimait la friponnerie, et avec qui la probité avait si peu de valeur qu’il en faisait un crime. » À ces reproches du cardinal, qui ne laissaient pas de transpirer, elle tâchait de remédier par quelque bonne parole de la reine, qui en réparât les impressions devant tous ; « car à la Cour, remarque-t-elle, il est aisé d’éblouir les spectateurs, et il ne leur faut jamais donner le plaisir de savoir que nous ne sommes pas si heureux qu’ils se l’imaginent, ou que nous sommes si malheureux qu’ils le souhaitent ».

1662. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Œuvres de Louis XIV. (6 vol. in-8º. — 1808.) » pp. 313-333

Il voudrait que son fils, au lieu de s’arrêter en chemin, et de regarder autour de lui et au-dessous de lui, ceux qui valent moins, reportât ses regards plus haut : Pensez plutôt à ceux qu’on a le plus sujet d’estimer et d’admirer dans les siècles passés, qui d’une fortune particulière ou d’une puissance très médiocre, par la seule force de leur mérite, sont venus à fonder de grands empires, ont passé comme des éclairs d’une partie du monde à l’autre, charmé toute la terre par leurs grandes qualités, et laissé depuis tant de siècles une longue et éternelle mémoire d’eux-mêmes, qui semble, au lieu de se détruire, s’augmenter et se fortifier tous les jours par le temps.

1663. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Monsieur Michaud, de l’Académie française. » pp. 20-40

Il lui a encore été reproché d’avoir, sous l’Empire, payé tribut à la puissance par deux morceaux en vers qu’on peut lire insérés dans le Recueil des poésies impériales et royales en l’honneur du roi de Rome (1812).

1664. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « M. Necker. — I. » pp. 329-349

Il y a des anachronismes frappants : il introduit jusque sous Louis XIV ce règne de l’opinion qui était en France une des puissances nouvelles du xviiie  siècle, et il a l’air de supposer que Louis XIV n’a fait son choix que parce que « ce petit nombre d’hommes qui regardent et qui jugent, et dont l’opinion fait le mouvement public, avaient les yeux fixés sur Colbert ».

1665. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Œuvres de Frédéric le Grand (1846-1853). — I. » pp. 455-475

Henry est allé plus loin, il voudrait y joindre certaines convictions intimes en fait de religion, et, nous présentant le roi par un aspect allemand et tout nouveau, il dit : Frédéric voulait la loi et la religion avec toute la puissance de son génie ; c’était à la surface de son âme seulement qu’il plaisantait sur des sujets qui ne lui paraissaient pas tenir au fond des choses, et dans la pensée que ces plaisanteries n’arriveraient jamais à la connaissance du public.

1666. (1889) L’art au point de vue sociologique « Chapitre quatrième. L’expression de la vie individuelle et sociale dans l’art. »

Par sa puissance à briser les associations banales et communes, qui pour les autres hommes enserrent les phénomènes dans une quantité de moules tout faits, il ressemble à l’enfant qui commence la vie et qui éprouve la stupéfaction vague de l’existence fraîche éclose.

1667. (1872) Les problèmes du XIXe siècle. La politique, la littérature, la science, la philosophie, la religion « Livre IV : La philosophie — II. L’histoire de la philosophie au xixe  siècle — Chapitre II : Rapports de l’histoire de la philosophie avec la philosophie même »

Par exemple, il n’est personne aujourd’hui qui ne reconnaisse que Hegel a trop sacrifié l’expérience, qu’il a trop exagéré la puissance de la méthode a priori.

1668. (1870) De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés « De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés — Chapitre III : Concurrence vitale »

Or, de même que toutes les œuvres de la nature sont infiniment supérieures à celles de l’art, la sélection naturelle est nécessairement prête à agir avec une puissance incommensurablement supérieure aux faibles efforts de l’homme.

1669. (1913) Essai sur la littérature merveilleuse des noirs ; suivi de Contes indigènes de l’Ouest-Africain français « Essai sur la littérature merveilleuse des noirs. — Chapitre I. »

Ce sabir contient en puissance le patois futur de l’A.O.F. dont le français restera — nous y comptons — la langue officielle et littéraire.

1670. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « X. Ernest Renan »

Ainsi, il suppose pour un jour à l’homme la puissance de Dieu, déplaçant le miracle pour ne pas voir le miracle.

1671. (1880) Études critiques sur l’histoire de la littérature française. Première série pp. 1-336

quelle abondance de verve, ou quelle puissance de satire ? […] Il me semble pourtant qu’elle n’était nullement déplacée soit au chapitre des Puissances trompeuses, ou encore de la Misère de l’homme. […] Aussi bien n’avait-il ni cette patience au travail, ni cette puissance de concentration, ni cette faculté d’éloquence familière et soutenue qui sont les premières qualités du grand historien. […] La guerre de Sept ans donnera ce spectacle — peut-être unique dans l’histoire — d’un peuple presque heureux, presque joyeux de sa propre honte, et faisant en quelque manière cause commune avec les ennemis de sa puissance et de sa gloire199. […] Pour les contemporains, dont le grand nombre ne connaît pas le détail des choses ni ne s’en inquiète, il avait reçu là comme une consécration solennelle de son pouvoir ; il s’était émancipé de la condition, alors encore un peu subalterne, d’homme de lettres ; et désormais, avec les princes, les rois, les impératrices, il sembla qu’il eût pris rang et qu’il dût traiter, comme on dit en style diplomatique, sur le pied de la puissance la plus favorisée.

1672. (1896) Hokousaï. L’art japonais au XVIIIe siècle pp. 5-298

L’illustration d’Hokousaï débute par la représentation d’animaux fantastiques et d’animaux réels, mais d’une grandeur, d’une puissance, d’une force qui les fait un rien surnaturels. […] Et Tamétomo terrorise et dompte ces populations sauvages, — représentées par Hokousaï assez semblables aux Aïnos couverts de poils, — par la puissance de son arc, avec lequel il coule un navire, fait sauter un quartier de rocher, et qu’aucun des hommes des contrées qu’il traverse ne peut tendre. […] Un livre composé de quinze planches où Hokousaï donne quinze échantillons divers de son talent multiple, au moment de sa plus grande puissance, dans les légères et délicates colorations des sourimonos : un livre dont les beaux exemplaires complets sont de la plus grande rareté et se vendraient en vente de douze cents à deux mille francs. […] Et la grandeur et la puissance du dessin du maître, conservées dans des riens, comme une tige d’iris. […] Maintenant, pour le ton de l’encre demi-foncée, si on tire trop clair, ça ôte de la puissance à la teinte et c’est le cas de dire à l’ouvrier tireur que la teinte demi-foncée doit avoir une tendance épaisse, un peu semblable à la soupe aux haricots.

1673. (1896) Les Jeunes, études et portraits

L’élasticité, en effet, le préoccupait beaucoup, tellement liée à la vie, à la chair humaine, à la lutte de l’organique et de l’inorganique, bientôt le ramenait au gouffre de l’ontologie… Le télégraphiste eut des curiosités intimes de sa personne, le désir exact de se classer, non plus simplement comme puissance, mais comme forme exacte, idiocrasies caractéristiques. […] J’insiste sur ses mérites : la sincérité, la bonne foi, l’enthousiasme de la conviction, la noblesse et la richesse des idées, le souci de la moralité, une sorte de vigueur et de puissance trouble. […] Pour nous mener au bien nous n’avons que notre volonté ; contre cette volonté toutes sortes de puissances se liguent qui nous induisent au péché. […] Léon Daudet est un art de caricature qui atteint à une véritable puissance. […] Pour un qui « très en puissance de s’abnégatiser et capable de sortir victorieux de l’ascèse magique, a préféré œuvrer d’art », nous en citerions dix autres qui tout au rebours s’abstraient en des travaux mystérieux.

1674. (1915) Les idées et les hommes. Deuxième série pp. -341

Caërdal aime les chants populaires : c’est qu’au triomphe de sa puissance il associe les multitudes. […] L’âme celtique avait, en apparence, perdu sa puissance efficace : elle renaît et nous verrons sa résurrection splendide. […] … » Sa couronne de verveine, symbole de puissance prophétique, elle la jette dans la mer : « Comme je fus aux dieux, je suis à toi ! […] Les garçons qui eurent vingt ans après la chute de l’Empereur, désœuvrés et fervents, conçurent comme leur idéal désespéré ce Don Juan, ce hautain gaspilleur de toutes énergies et puissances. […] Non, si prouver, avec de jolis arguments et avec des phrases qui aient une puissance dialectique et un charme insinuant, si prouver même est un plaisir : et M. 

1675. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [1] Rapport pp. -218

Lorsque, aujourd’hui, on porte la main sur ces antiques puissances qui crouleront tout à l’heure, si nous les sentons vaciller et trembler, c’est surtout parce qu’elles furent ébranlées jadis jusque dans leurs fondements sous la catapulte de son rire. […] Nulle impassibilité intime, je le répète ; mais l’expansion au loin d’un esprit dont, par la compression, justement, de l’existence quotidienne, s’exaspère la puissance en un rayonnement sur toute l’histoire antique, sur tout le pittoresque exotique, sur toute la légende immémoriale. […] Il eut, plus qu’aucun autre, bien plus même que Celui à qui appartenaient tous les enseignements, puisqu’il donnait tous les beaux exemples, la puissance, involontaire sans doute, dissimulée d’ailleurs sous tant d’indulgence, d’obliger les jeunes esprits à l’idéal qu’il avait conçu. […] Mais, de sembler imaginaire, il n’en est pas moins réel, d’une réalité plus vraie peut-être que la vérité même ; par la sincérité et la puissance de sa faculté transfiguratrice, Villiers de l’Isle-Adam impose la foi en ses conceptions à tous ceux que ne déconcerte pas le grandissement de l’homme quelconque jusqu’au héros sublime ou jusqu’à l’énorme bouffon, et de l’anecdote jusqu’à l’épopée. […] Et, en effet, aucun poète contemporain, si l’on excepte Victor Hugo et Théodore de Banville en France, Algernon Charles Swinburne en Angleterre, n’a été, au même degré qu’Armand Silvestre, doué de cette prodigieuse puissance d’expansion de tout soi, qui est le grand, peut-être l’unique devoir des âmes poètes !

1676. (1913) Les idées et les hommes. Première série pp. -368

Et, pour le faire, l’autorité ne lui manquera pas, quand elle aura d’abord affirmé les devoirs traditionnels et nationaux de la littérature, quand elle en aura condamné l’anarchie, organisé les puissances, dégagé l’idéal. […] Il y a, dans la nature, une souveraine puissance de cicatrisation. […] Il y aura un duel d’influence, une rivalité acharnée, entre ces deux puissances : l’aguichant désordre que les Baillard susciteront dans les esprits, dans les cœurs, et l’ordre qu’impose infailliblement l’Église. […] » et n’est-ce pas, aux fins de nier les puissances de la dialectique, la même dialectique ? […] Les deux puissances de l’ordre et du désordre ont l’une et l’autre donné toute leur efficacité.

1677. (1889) Histoire de la littérature française. Tome II (16e éd.) « Chapitre sixième »

Faut-il insister sur ce que devait avoir de puissance, soit pour égarer, soit pour intimider le goût du public, une association de poètes ligués par le danger commun, tenant à tous les grands personnages de la cour, loin d’ailleurs d’être sans mérite, et dont quelques-uns, très médiocres poètes, étaient de fort habiles gens ? Ils avaient la possession, qui est une si grande puissance. […] Il convie les auteurs à l’invention, cet homme qu’on a accusé d’avoir voulu borner la puissance de l’esprit humain121 il leur ouvre tous les trésors et toutes les libertés du style122, ce poète dont on fait un grammairien timide, blâmant en autrui les hardiesses où son esprit ne pouvait s’élever.

1678. (1925) Dissociations

Roger Bacon en éprouva la puissance stupide et passa beaucoup d’années en prison. […] Mais il paraît que les puissances célestes ne s’occupent pas des animaux et qu’il faut leur intervention pour qu’il y ait miracle. […] Je ne sais plus si van Gennep s’en est occupé dans ses Rites de passage, qui concernent surtout la vie humaine et en marquent les étapes, mais l’inauguration est évidemment un acte rituel et qui, dans l’origine, eut pour but de conjurer les puissances naturelles et de leur imposer le respect d’une nouveauté.

1679. (1824) Ébauches d’une poétique dramatique « Conduite de l’action dramatique. » pp. 110-232

Je veux fléchir des dieux la puissance suprême. […] Voltaire paraît être un des poètes qui ont le mieux connu la puissance du sentiment de l’admiration ; mais il l’a toujours combiné avec un intérêt plus théâtral. […] Ses héros sont plus grands que nature ; ce sont des dieux ou des hommes en commerce avec eux, et qui participent de leur puissance : ils franchissent les barrières de l’Olympe ; ils pénètrent les abîmes de l’enfer ; à leur voix la nature s’ébranle, les éléments obéissent, l’univers leur est soumis.

1680. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Le cardinal de Bernis. (Fin.) » pp. 44-66

Aussi, quand il voit le pape retarder et opposer sans cesse des délais aux instances des puissances et à celles de l’Espagne en particulier, Bernis, qui trouve quelquefois ces délais excessifs, fait comprendre pourtant à son gouvernement qu’ils sont naturels, et, jusqu’à un certain point, nécessaires.

1681. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Gui Patin. — I. » pp. 88-109

Il en résulte qu’à toutes les inventions et fondations de Richelieu, faites en vue de centraliser la puissance, il faut ajouter cette naissante invention de la Gazette, le premier et le seul organe alors d’une publicité régulière.

1682. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Duclos. — II. Duclos historien » pp. 224-245

Qui que nous soyons et dans quelque genre que la vocation ou la destinée nous ait poussés, tâchons d’être de ceux-là ; tâchons, un jour ou l’autre, d’arriver à la perfection de ce qu’il nous est donné de faire, à la réunion de toutes nos forces, à la plus haute puissance de nous-mêmes : et, comme cette heure et cet accident de grâce et de lumière n’est pas en notre pouvoir, tenons-nous prêts et montrons-nous-en dignes en y visant constamment.

1683. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Marivaux. — I. » pp. 342-363

Comme l’émotion, la verve, l’inspiration et tout ce qui y ressemble lui étaient choses complètement étrangères, il n’a pas su les voir en autrui ; il n’a rendu les armes de près ni de loin à cette puissance créatrice qui porte au premier rang un petit nombre d’hommes, et on pourrait le définir, au milieu de tous les éloges qu’il mérite pour l’originalité de ses vues, pour la variété et la gentillesse de ses œuvres, « celui qui n’a senti ni Homère ni Molière ».

1684. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Saint-Martin, le Philosophe inconnu. — I. » pp. 235-256

Bien qu’il confessât qu’il n’était qu’un demi-esprit, qu’un demi-élu, et qu’il reconnût ce qui lui manquait en puissance et en véritable magie morale pour combattre des hommes complets en mollesse et en corruption, il se croyait l’émule des plus grands opérateurs apostoliques dans le passé, et il inclinait même à penser tout bas que sur certains points il était allé plus loin qu’aucun d’eux.

1685. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Histoire du règne de Henri IV, par M. Poirson » pp. 210-230

L’Espagne était depuis un siècle dans un accroissement de puissance et d’ascendant qui troublait les conditions d’existence et les rapports naturels des pays voisins, et menaçait tout l’occident de l’Europe ; et en même temps elle apportait dans ses conquêtes politiques un système d’oppression absolue et de machiavélisme pratique qui tendait à pervertir la morale, à nouer tout développement de l’esprit et à déformer l’humanité.

1686. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « François Villon, sa vie et ses œuvres, par M. Antoine Campaux » pp. 279-302

Cette chambrette, aussitôt, sera devenue plus chère à celui qui l’habitait, et pendant quelques jours elle lui aura paru presque un sanctuaire (ô puissance des premières illusions !)

1687. (1863) Nouveaux lundis. Tome I « Benjamin Constant. Son cours de politique constitutionnelle, ou collection de ses divers écrits et brochures avec une introduction et des notes, par M. Laboulaye »

Dans ce livre, j’exprimais mon opinion, et cette opinion est encore la mienne, sur la puissance tantôt dangereuse, tantôt salutaire, des journaux.

1688. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « Œuvres de Louise Labé, la Belle Cordière. »

Dans un sommeil sans fin, ô Puissance éternelle !

1689. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Catinat (suite.) »

« Votre Majesté a donné un témoignage de sa puissance et de sa bonté en me faisant maréchal de France ; c’est une élévation qui ne me fera que mieux connaître qui je suis, et d’où elle m’a tiré.

1690. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « Maurice comte de Saxe et Marie-Josèphe de Saxe, dauphine de France. »

Je suis, avec la soumission la plus profonde, Sire, etc. » Il y revient, la guerre entamée, dans une des lettres suivantes (6 septembre 1741) : « J’ai eu l’honneur d’écrire à Votre Majesté que la France voulait terminer rapidement cette affaire, et je crois qu’elle lui rendra un service agréable de s’emparer de la Bohême, quoique cette puissance ne puisse en convenir, vu les engagements qu’elle a avec l’Électeur de Bavière.

1691. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « Maurice comte de Saxe et Marie-Joséphine de Saxe dauphine de France. (Suite et fin.) »

Le roi cependant aimait sa belle-fille ; il l’aimait « autant et plus peut-être que ses propres enfants » ; il l’appelait familièrement de son petit nom de Pépa ; à ses premières couches, il se montra le père le plus affectueux et le plus tendre : « Le roi lui a constamment tenu la main pendant le travail, et l’on peut dire qu’elle est accouchée entre ses bras ; aussi en suait-il à grosses gouttes. » Mais que de difficultés et d’intrigues dans cette Cour partagée et divisée : la reine, Mesdames, Mme de Pompadour, et alentour, et au-dessous, des tourbillons d’ambitions sans nombre, tous se jalousant, se haïssant, et cherchant à s’emparer de cette puissance nouvelle qui entrait en scène !

1692. (1870) Nouveaux lundis. Tome XII « Madame Desbordes-Valmore. » p. 232

C’était une nature particulière ; une sensibilité poétique, une volonté poétique, plus forte que sa puissance d’exécution et que son talent.

1693. (1872) Nouveaux lundis. Tome XIII « Œuvres françaises de Joachim Du Bellay. [II] »

Villemain quand il poursuivait et démontrait avec éloge dans nos grands auteurs ce qu’il appelle « la puissance de l’imitation ».

1694. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Lamartine — Lamartine »

Plus tard, Diderot et Rousseau, puissances incohérentes, eurent en eux de grandes et belles parties d’inspiration ; ils ouvrent des jours magnifiques sur la nature extérieure et sur l’âme ; mais ils se plaisent aussi à déchaîner les ténèbres.

1695. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Victor Hugo — Victor Hugo en 1831 »

Sa course lyrique, qui est bien loin d’être close, offre pourtant assez d’étendue pour qu’on en saisisse d’un seul regard le cycle harmonieux ; mais il n’est encore qu’au seuil de l’arène dramatique ; il y entre dans toute la maturité de son observation, il s’y pousse de toutes les puissances de son génie : l’avenir jugera.

1696. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « M. ULRIC GUTTINGUER. — Arthur, roman ; 1836. — » pp. 397-422

dis, en ces moments de suave pensée, Lorsqu’au pâle rayon dont elle est caressée L’âme s’épanouit, Comme ces tendres fleurs que le soleil dévore, Que le soir attiédit, et qui n’osent éclore Qu’aux rayons de la nuit ; Quand loin de moi, sans crainte et plus reconnaissante, Tu nourris de soupirs cette amitié naissante Et ce confus amour ; Quand sur un banc de mousse, attendrie et pâlie, Tu tiens encor le livre et que ton œil oublie Qu’il n’est déjà plus jour ; Quand tu vois le passé, tous ces plaisirs factices, Tous ces printemps perdus comparés aux délices Qui germent dans ton cœur ; Combien pour nous aimer nous avons de puissance, Mais que, même aux vrais biens, le mensonge ou l’absence Retranchent le meilleur ; Oh !

1697. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « LE COMTE XAVIER DE MAISTRE. » pp. 33-63

ton aspect de ma douleur Suspend et calme la puissance ; Tu me ramènes l’espérance Prète à s’éteindre dans mon cœur.

1698. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « LOYSON. — POLONIUS. — DE LOY. » pp. 276-306

Ainsi encore, par exemple : Celui qui dès sa naissance Fut soumis à la puissance Du Dieu du sacré vallon, Des combats fuyant la gloire, Aux fastes de la victoire N’ira point graver son nom.

1699. (1870) Portraits contemporains. Tome IV (4e éd.) « M. DE BARANTE. » pp. 31-61

Mais, en revanche, l’éclat du triomphe émancipa hautement la Suisse, la mit hors de page, elle aussi, et au rang des États ; et comme l’a très-bien dit un autre historien de ces contrées : « La bataille de Morat a changé l’Europe ; elle a dégagé la France, relevé l’Autriche, et ouvert à ces deux puissances le chemin de l’Italie, que la maison de Bourgogne était tout au moins en mesure de leur barrer.

1700. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « MADAME DE PONTIVY » pp. 492-514

Pour elle, elle ne songeait qu’à obtenir, à force de démarches, la grâce de son mari, ou du moins le maintien des biens en vue de sa fille ; car elle avait, de la première année de son mariage, une fille qu’elle chérissait avec une passion singulière, telle que M. de Pontivy n’en avait jamais excité en elle, et qui donnait à entrevoir la puissance de tendresse de cette âme encore confuse.

1701. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « Pierre Corneille »

Il a pourtant réussi à exprimer dans Chimène et dans Pauline cette vertueuse puissance de sacrifice, que lui-même avait pratiquée en sa jeunesse.

1702. (1862) Portraits littéraires. Tome II (nouv. éd.) « Le comte de Ségur »

Potemkin n’avait songé, en le combinant, qu’à ses intérêts de favori ; il voulait, à l’aide de cette marche triomphale, enlever sa souveraine à ses rivaux, la fasciner et l’enorgueillir par le spectacle d’une puissance imaginaire, l’enguirlander, c’est bien le mot, je crois.

1703. (1869) Cours familier de littérature. XXVII « CLXIe Entretien. Chateaubriand »

La première supériorité du critique est de reconnaître l’avénement d’une puissance, la venue d’un Génie.

1704. (1869) Cours familier de littérature. XXVIII « CLXVIIIe entretien. Fénelon, (suite) »

De cette solitude sortirent des milliers de pages où respirent le génie littéraire de la plus pure antiquité et le génie moderne du christianisme, qui parlent de la divinité avec une admirable puissance d’esprit et de langage, souvent avec le plus tendre enthousiasme.

1705. (1895) Histoire de la littérature française « Première partie. Le Moyen âge — Livre II. Littérature bourgeoise — Chapitre I. Roman de Renart et Fabliaux »

Rien surtout ne saurait donner du poème une idée plus favorable que le morceau qui se trouve, du reste très illogiquement, l’ouvrir : le Jugement de Renart est vraiment un chef-d’œuvre, à quelques grossièretés près, et telle de ses parties, comme l’arrivée de dame Pinte demandant justice de Renart pour la mort de Copée, donne la sensation de quelque chose d’achevé, d’absolu, d’une œuvre où la puissance, l’idée de l’écrivain se sont réalisées en perfection.

1706. (1895) Histoire de la littérature française « Quatrième partie. Le dix-septième siècle — Livre III. Les grands artistes classiques — Chapitre II. Boileau Despréaux »

Il fut plus cartésien que chrétien, chrétien seulement d’occasion, par respect des puissances, et parce que la méthode, entre les mains de Descartes, avait fait sortir des conclusions qui autorisaient en somme la foi.

1707. (1886) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Deuxième série « Anatole France »

Je ne parle point de la puissance d’invention qu’un caprice de la nature a évidemment accordée avec plus de libéralité à quelques écrivains de notre temps.

1708. (1887) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Troisième série « Octave Feuillet »

Octave Feuillet résume comme il suit : Développer à toute leur puissance les dons physiques et intellectuels qu’il tenait du hasard, faire de lui-même le type accompli d’un civilisé de son temps, charmer les femmes et dominer les hommes, se donner toutes les joies de l’esprit, des sens et du pouvoir, dompter tous les sentiments naturels comme des instincts de servage, dédaigner toutes les croyances vulgaires comme des chimères ou des hypocrisies, ne rien aimer, ne rien craindre et ne rien respecter que l’honneur : tels furent, en résumé, les devoirs qu’il se reconnut et les droits qu’il s’arrogea.

1709. (1887) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Troisième série « La jeunesse du grand Condé d’après M. le duc d’Aumale »

Je m’en sens si profondément incapable que je commence à admirer ceux qui ont cette puissance en eux.

1710. (1863) Molière et la comédie italienne « Chapitre XIII. Retour de Molière à Paris » pp. 225-264

Mais de même que, dans toutes ces diverses situations, Sganarelle conserve quelque trait de son caractère et de sa physionomie, il est probable qu’il gardait toujours dans son costume quelque chose qui rappelait le type originel, tant la tradition avait de puissance dans ce domaine où l’on serait tenté de croire que la fantaisie était souveraine absolue.

1711. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XXXVII et dernier » pp. 442-475

L’amour aurait suffi peut-être pour déterminer le roi à l’épouser ; mais quelle puissance aurait eue, en cette circonstance, la religion sans l’amour142 ?

1712. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Chansons de Béranger. (Édition nouvelle.) » pp. 286-308

L’Amour par eux m’a rendu sa puissance… Par eux, c’est-à-dire par tes attraits : on n’a jamais fait plus difficilement un vers moins facile.

1713. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Biographie de Camille Desmoulins, par M. Éd. Fleury. (1850.) » pp. 98-122

Il sait bien ce qu’il fait ; il a le génie du journal ; il sait quelle est la puissance de l’instrument qu’il emploie, et auquel à la longue, dit-il, rien ne peut résister.

1714. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « La duchesse du Maine. » pp. 206-228

Elle rêvait dans l’avenir gloire, grandeur politique, puissance, et, en attendant, elle voulut vivre le plus à son gré et le plus en souveraine qu’elle pût, rendre le moins possible aux autres et se passer tous ses caprices, avoir sa cour à elle, où ne brillât nul astre rival du sien.

1715. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « L’abbé de Choisy. » pp. 428-450

« Dès que je serais persuadé de la puissance et de la bonté de Dieu, rien ne me serait difficile à croire. » — « Je n’ai donc, lui répondait Théophile, qu’à vous prouver qu’il y a un Dieu et que votre âme est immortelle, et vous êtes capucin. » Et Dangeau disait· encore, en parlant de cette conversion facile et un peu fragile de l’abbé de Choisy, et quand on lui en faisait compliment : « Hélas !

1716. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Mirabeau et Sophie. — II. (Lettres écrites du donjon de Vincennes.) » pp. 29-50

Dans le donjon de Vincennes, il écrivait pour lui seul, dans son cahier de notes et d’extraits, divers passages de Plaute, qu’il lisait beaucoup alors, et il en faisait l’application à sa félicité perdue ; tout ce joli passage du Pseudolus, par exemple, qui fait partie de la lettre d’une maîtresse à son ami : Nunc nostri amores, mores… « Voilà que nos plaisirs, nos désirs, nos entretiens, avec les ris, les jeux, la causerie, le suave baiser… tout est détruit ; plus de voluptés ; on nous sépare, on nous arrache l’un à l’autre, si nous ne trouvons, toi en moi, moi en toi, un appui salutaire. » Mais j’aime mieux cet autre passage, également emprunté de Plaute, où le sentiment domine : « Lorsque j’étais en Hollande , écrit Mirabeau, je pouvais dire : Sibi sua habeant regna reges, etc. », et tout ce qui suit, « Rois, gardez vos royaumes, et vous, riches, vos trésors ; gardez vos honneurs, votre puissance, vos combats, vos exploits.

1717. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « L’abbé Maury. Essai sur l’éloquence de la chaire. (Collection Lefèvre.) » pp. 263-286

Bossuet encore était aisé, ce semble, à saisir et à manifester, à cause des éclairs qui signalent sa marche ; mais Bourdaloue, plus égal et plus modéré, nul ne l’a plus admirablement compris et défini que l’abbé Maury, dans la beauté et la fécondité incomparable de ses desseins et de ses plans, qui lui semblent des conceptions uniques, dans cet art, dans cet empire de gouvernement du discours, où il est sans rival, « dans cette puissance de dialectique, cette marche didactique et ferme, cette force toujours croissante, cette logique exacte et serrée, cette éloquence continue du raisonnement, dans cette sûreté enfin et cette opulence de doctrine ».

1718. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Armand Carrel. — II. (Suite.) Janvier 1830-mars 1831. » pp. 105-127

C’est cette rapidité d’exécution, cette puissance, et pour ainsi dire cette inspiration de mouvement, qui partent de l’instinct supérieur à l’art et presque divin qu’on appelle génie.

1719. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Bernardin de Saint-Pierre. — I. » pp. 414-435

Il excelle déjà à peindre les retraites ombreuses au milieu des rochers, les bords des ravines couverts d’arbres, et, du sein des pierres calcinées, toute cette puissance de végétation magnifique et comme monstrueuse.

1720. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Volney. Étude sur sa vie et sur ses œuvres, par M. Eugène Berger. 1852. — II. (Fin.) » pp. 411-433

« Quand la puissance secrète qui anime l’univers forma le globe que l’homme habite, elle imprima aux êtres qui le composent des propriétés essentielles qui devinrent la règle de leurs mouvements individuels, le lien de leurs rapports réciproques… » C’est ainsi que s’exprime ce Génie, qui n’est pas un de ceux des Mille et Une Nuits.

1721. (1893) La psychologie des idées-forces « Tome second — Livre sixième. La volonté — Chapitre premier. Existence de la volonté »

Pour avoir un levier, il faut avoir une puissance et une résistance ; la constante nécessité de l’une n’empêche pas, mais implique, au contraire, la constante nécessité de l’autre.

1722. (1899) Esthétique de la langue française « Le cliché  »

La sorte de style qui nous occupe serait donc une des formes de l’amnésie verbale élevée à la puissance littéraire.

1723. (1889) Écrivains francisés. Dickens, Heine, Tourguénef, Poe, Dostoïewski, Tolstoï « Henri Heine »

Il sait raconter de jolies histoires de fées, combiner un rapide scénario de ballet, se moquer galamment de ses créanciers, attaquer les puissances politiques et sociales avec le rire d’Aristophane, puis, comme ce dernier, faire chanter les oiseaux et babiller de jolies femmes.

1724. (1864) William Shakespeare « Conclusion — Livre I. Après la mort — Shakespeare — L’Angleterre »

Rien n’égale la puissance de surdité volontaire des fanatismes.

1725. (1872) Les problèmes du XIXe siècle. La politique, la littérature, la science, la philosophie, la religion « Livre III : La science — Chapitre II : De la méthode expérimentale en physiologie »

Les secondes sont celles où le savant passe de l’observation à l’expérience, produit lui-même les phénomènes qu’il veut étudier, en change les conditions, les isole, les combine, les reproduit à volonté, et par là obtient sur la nature une puissance bien plus grande que ne peut en avoir le simple contemplateur.

1726. (1767) Salon de 1767 « Peintures — Vien » pp. 74-89

Seroit-ce que cette tranquilité du dieu, cette facilité à faire de grandes choses en caractériseroient mieux la puissance ?

1727. (1920) Action, n° 4, juillet 1920, Extraits

Nous sommes animés d’une puissance de volonté qui nous permet d’espérer les plus belles destinées pour notre entreprise.

1728. (1895) Les œuvres et les hommes. Journalistes et polémistes, chroniqueurs et pamphlétaires. XV « Philarète Chasles » pp. 147-177

quaker sans être chrétien, sans être le chrétien armé de la croix qui est le seul être ayant le droit de prêcher l’amour aux hommes et la puissance de s’en faire écouter, — Philarète Chasles, qui n’est point saint Paul, qui n’est pas saint Jean, pour nous répéter de nous aimer les uns les autres, mais un professeur de morale indépendante et d’instruction obligatoire attendri, ne voit plus la beauté, — cette entité par elle-même ! 

1729. (1906) Les idées égalitaires. Étude sociologique « Première partie — Chapitre II. Réalité des idées égalitaires »

Et enfin, dans des sociétés comme les nôtres, où les règles essentielles de l’activité, générale, ne manquent plus d’être dûment formulées, où la puissance de l’État se met immédiatement au service des habitudes collectives vraiment indispensables au bien de l’ensemble, la portion de la vie sociale que les lois abandonnent en quelque sorte aux mœurs proprement dites perd chaque jour de son importance.

1730. (1903) Légendes du Moyen Âge pp. -291

La Chanson de Roland évoque pour nous, avec une incomparable puissance, autour du nom de Roncevaux l’image de gorges profondes, de hauts rochers sombres laissant entre eux d’étroits défilés : Hauts sont les monts et les vaux ténébreux, Les roches bises, les détroits merveilleux… Hauts sont les monts et ténébreux et grands, Les vaux profonds où courent les torrents. […] La Sibylle raconte à Guerino qu’elle est bien la Sibylle de Cumes, et qu’elle vivra jusqu’à la fin du monde ; mais elle ne l’éclaire pas sur l’origine et le caractère de sa puissance surnaturelle. […] Spolète a conservé un beau souvenir de son antique puissance dans le grandiose viaduc, — le Ponte… delle… Torri, — jeté sur un ravin sauvage au viie  siècle, par le duc Theudelapius. […] XVI, 28), ou « d’avoir vu la royauté de Dieu » (Luc IX, 27), ou « d’avoir vu la royauté de Dieu venue dans sa puissance » (Marc IX, 1). […] De plus, si tu me lâches, je te donnerai trois164 avis dont chacun équivaudra à une perle de grand prix. » ces mots, le derviche s’empressa d’ouvrir la cage, et tenant l’animal par les pattes, sur sa main, il écouta ce qu’il avait à lui dire : « Le premier de ces avis », dit le moineau, « c’est que bien des gens assurent que, si Dieu voulait, il ferait passer par le trou d’une aiguille une rangée de soixante-douze chameaux 165 ; rien, en effet, n’est en dehors de la puissance de Dieu ; mais il ne faut pas faire grand cas des efforts de l’homme.

1731. (1908) Promenades philosophiques. Deuxième série

Les conditions de la connaissance, les besoins de la civilisation exigent, à un certain moment, un effort dont la race dominante se trouve incapable : alors une race nouvelle surgit, par mutation, capable de maintenir à leur degré originel les puissances intellectuelles de l’humanité, que ne peuvent plus régir les efforts de la race ancienne ; et le même phénomène a lieu dans la suite, chaque fois que les mêmes circonstances se rencontrent. […] Il coïncide très souvent avec des intelligences enfantines : des mathématiciens illustres, qui n’ont pas atteint Inaudi en puissance calculatrice, ne l’ont pas dépassé en valeur intellectuelle. […] Le cours de l’eau qui remue cherche à maintenir son cours selon la puissance de sa cause, et se trouve contraint, par opposition, à finir la longueur du cours commencé par un mouvement circulaire et tors. » Il y a un tel défaut de proportion entre le principe et l’exemple que l’on est porté à douter du sens même que Léonard donnait au principe. […] Le café semble, d’ailleurs, avoir eu, au dix-huitième siècle, une puissance qu’il a depuis longtemps perdue. […] On doute qu’il devienne jamais un agent de civilisation doué, comme les chemins de fer, d’une merveilleuse et féconde puissance sociale.

1732. (1894) Écrivains d’aujourd’hui

Bourget a montré avec plus de précision et plus de netteté qu’on n’avait encore fait ce qu’est l’amour quand on le dépouille de cette puissance d’illusion et de ce mirage qui en sont toute la poésie. […] Et cela suppose une infatigable puissance de travail, une mémoire capable de ne pas succomber sous le poids, mais surtout la plus rare aptitude à s’assimiler toutes connaissances, à les transformer, et à vivifier les matériaux et les faits par les idées. — Après quoi, il est exact de remarquer que M.  […] Faguet écoute avec aussi peu de préventions un drame réaliste ou un vaudeville de la vieille école ; il admire franchement les Revenants d’Ibsen, après avoir, lui seul à peu près, échappé à l’engouement auquel a cédé presque toute la critique pour la Puissance des ténèbres de Tolstoï. […] Pour n’en citer qu’un, il avait pu constater que la jeunesse des universités allemandes est en effet une puissance, qu’elle a une tradition, qu’elle a depuis le commencement du siècle rêvé, pensé, voulu l’unité de l’Allemagne51. […] Des laïques d’une rare puissance d’esprit se sont donné pour mission d’interroger l’âme contemporaine.

1733. (1883) Le roman naturaliste

Il ne leur manquerait, à vrai dire, que ce qui fait la supériorité de Dickens dans ce genre évidemment inférieur1 : — la puissance d’hallucination poétique, si particulièrement caractéristique de l’imagination anglaise ; et encore, et surtout, cet inimitable accent de l’émotion personnelle et de la souffrance vécue qui, du lointain de sa triste enfance, remontait si souvent aux lèvres de David Copperfield. […] La nature ne devient vraiment belle, ou seulement émouvante, qu’à travers l’illusion de nos propres sentiments, que nous transportons en elle, et qui lui communiquent cette puissance d’émotion dont notre cœur demeure la source unique, jamais tarie. […] Sans doute, sur l’étrangeté de l’une et de l’autre tentative, ce n’était qu’un seul cri, mais tout le monde aussi convenait de la rare puissance d’imaginer et de peindre dont elles étaient l’éloquent témoignage. […] En même temps aussi vous y reconnaissez le signe d’une prodigieuse puissance d’observation. […] Cependant cette mort portait en elle « toute la mystérieuse puissance du destin pour plusieurs vies humaines » ; et « les joies ou les tristesses qui devaient être leur partage sur cette terre », ce fut cette mort qui les détermina.

1734. (1890) Le réalisme et le naturalisme dans la littérature et dans l’art pp. -399

Qui n’a rêvé d’avoir une âme à qui sa constance naturelle laissât toujours la même puissance de jouir et même de souffrir, une âme que sa simple et pure essence préservât de tout mélange de sensualité et de tout abaissement vers la matière, une âme enfin qu’une certaine élasticité facile maintînt fort au-dessus des humiliations du terre à terre ? […] Ils sentent bouillonner en eux leurs forces inépuisées, et, possédés par leur génie plus qu’ils ne le possèdent, agités par une surabondance de vie qui veut se répandre, se prodiguant avec une extraordinaire puissance d’expansion, ils s’unissent d’une sympathie étroite avec cette nature qui vient de se révéler de nouveau par une explosion progressive, mais irrésistible, comme celle des bourgeons qui crèvent l’écorce au printemps67. […] Le réalisme positiviste s’y prend autrement pour guérir les maux, il en cherche les causes scientifiquement : « Nous montrons le mécanisme de l’utile et du nuisible, nous dégageons le déterminisme des phénomènes humains et sociaux, pour qu’on puisse un jour dominer et diriger ces phénomènes : en un mot nous travaillons avec tout le siècle à la grande œuvre qui est la conquête de la nature, la puissance de l’homme décuplée. » Pour l’accomplir, le réaliste sincère et zélé surmontera toutes les éprouves et tous les dégoûts. […] Mais plus il se sentait près d’être écrasé par elle, plus s’élevait et se développait dans son âme une puissance de vie indépendante de toute influence extérieure » ; et cette impression est si forte que le héros se livre à l’expansion d’un enthousiasme curieusement mélangé de dédain hautain et sarcastique : “Ah ! […] Le van commande l’âme aussi : il s’empare d’elle, il absorbe toutes ses puissances, dirait-on, il l’assoupit dans la continuité d’une opération matérielle qui lui demande trop de patience et trop peu d’effort.

1735. (1930) Les livres du Temps. Troisième série pp. 1-288

L’intrépide Max Muller regarde le siège de Troie même comme celui de l’Orient, fait tous les jours par les puissances solaires, dépouillées tous les soirs par l’Occident. […] Une signification claire : le pied de nez aux conventions et aux puissances établies. […] quelle puissance constructive ! […] Serions-nous moins étonnés si une puissance supérieure nous tirait soudain d’un cachot cubique et barricadé ? […] Elle ne fait appel à aucune « puissance spirituelle extrahumaine », quoi qu’en dise Maeterlinck, et elle n’est aucunement « mystique », c’est-à-dire qu’elle ne prétend à aucune communication directe avec le divin.

1736. (1863) Causeries parisiennes. Première série pp. -419

On ne saurait trop compter sur la puissance de contrepoison qui réside dans un beau livre ; on ne saurait non plus exagérer l’effet salutaire du dégoût qu’on éprouve en retrouvant pour la centième fois le même ouvrage sous un titre différent. […] Oui, je voudrais que dans la direction des choses humaines on fît la part de la femme, comme on fait la part du feu, et un peu par les mêmes raisons ; car, en voyant sa nullité officielle chercher des compensations dans une influence sans limites définies, je suis effrayé de cette puissance occulte qui équivaudra bientôt, si l’on n’y prend garde, au gouvernement irresponsable du monde. […] Il en résulte que ceux-là, précisément, qui ont le plus de puissance, et dont les écarts ont les conséquences les plus graves, échappent au contrôle direct de l’opinion. […] Que les puissances maritimes de l’Europe y puisent des leçons pour leurs armements futurs, rien de mieux ! […] Les plus soupçonneux n’accuseront pas la Société du Prince Impérial d’être entachée d’individualisme, encore moins d’être une société secrète, et ceux qui redoutaient la puissance occulte de la Société de Saint-Vincent de Paul doivent se sentir bien rassurés en face de l’œuvre nouvelle.

1737. (1891) Essais sur l’histoire de la littérature française pp. -384

Beaumarchais et Marivaux seront sur un autre versant de la poétique montagne que Molière, mais non pas si au-dessous de lui, puisqu’ils n’ont ni moins d’originalité ni moins de puissance ou de charme dans l’expression de ce qui leur est original. […] Mais l’analyse, qui nous rend nos idées plus nettes et qui nous permet de suivre nos passions en leurs plus secrets replis dans le moment même que nous les éprouvons, ajoute à la puissance des premières comme au charme et à l’intensité des secondes. […] Il faut, pour se mettre en situation de les mériter, une grande puissance de conception. […] Les Grands-Jours étaient, comme l’on sait, des assises extraordinaires que le Parlement tenait dans les villes les plus éloignées du ressort ; les commissaires délégués par lui emportaient avec eux, en vertu du principe de son indivisibilité, toute sa puissance, et quelquefois plus que sa puissance ; ils prononçaient des sentences sans appel, réglaient la discipline ecclésiastique, rendaient des ordonnances en matière de procédure obligatoires pour les justices locales ; ceux de Clermont décrétèrent jusqu’à des mesures économiques, et établirent, pour certaines denrées, durant tout leur séjour, une façon de maximum. […] Il prétend reconstituer la puissance politique de la noblesse ; il veut « la mettre dans le ministère, avec la dignité et l’autorité qui lui conviennent, aux dépens de la robe et de la plume ; écarter cette roture de tous les emplois supérieurs et soumettre tout à la noblesse en toute espèce d’administration ».

1738. (1866) Petite comédie de la critique littéraire, ou Molière selon trois écoles philosophiques « Première partie. — L’école dogmatique — Chapitre premier. — Une leçon sur la comédie. Essai d’un élève de William Schlegel » pp. 25-96

Philandre, chevalier errant, Zacorin, son valet, et Lucelle, infante de Trébizonde, sont transportés dans le pays de Cocagne par la puissance de l’enchanteur Alquif. […] Cette puissance illimitée de la gaieté se manifestait par l’impossibilité de prendre rien au sérieux, pas même la forme dramatique.

1739. (1864) Cours familier de littérature. XVII « CIe entretien. Lettre à M. Sainte-Beuve (1re partie) » pp. 313-408

Ce cœur jeune et sévère ignorait la puissance Des ennuis dont soupire et s’émeut l’innocence. […] Si, à l’ouverture du volume nouveau, ces personnes pouvaient croire que j’ai voulu quitter ma première route, je leur ferai observer par avance que tel n’a pas été mon dessein ; qu’ici encore c’est presque toujours de la vie privée, c’est-à-dire, d’un incident domestique, d’une conversation, d’une promenade, d’une lecture, que je pars, et que, si je ne me tiens pas à ces détails comme par le passé, si même je ne me borne pas à en dégager les sentiments moyens de cœur et d’amour humain qu’ils recèlent, et si je passe outre, aspirant d’ordinaire à plus de sublimité dans les conclusions, je ne fais que mener à fin mon procédé sans en changer le moins du monde ; que je ne cesse pas d’agir sur le fond de la réalité la plus vulgaire, et qu’en supposant le but atteint (ce qu’on jugera), j’aurai seulement élevé cette réalité à une plus haute puissance de poésie.

1740. (1889) L’art au point de vue sociologique « Chapitre cinquième. Le réalisme. — Le trivialisme et les moyens d’y échapper. »

La puissance de l’idéalisme même, en littérature, est à cette condition qu’il ne s’appuie pas sur un idéal factice, mais sur quelque aspiration intense et durable de notre nature. […] De même pour Bossuet et Pascal, ces créateurs de notre langue française actuelle, qui ont été les initiateurs du style moderne, caractérisé par une grande familiarité de l’expression unie à la puissance de l’image et de l’idée51.Après la Révolution, quand la foi au sens divin des livres sacrés eut été ébranlée, ce fut le moment où l’on put commencer à comprendre et à commenter leur valeur littéraire.

1741. (1889) L’art au point de vue sociologique « Chapitre sixième. Le roman psychologique et sociologique. »

Balzac abonde en scènes de ce genre, en situations d’une puissance dramatique extraordinaire, et qui pourtant feraient peu d’effet au théâtre, parce que tout ou presque tout s’y passe en dedans : les événements extérieurs sont des symptômes insignifiants, non pas des causes. […] Bourget a remarqué que, quand Salammbô s’empare du zaimph, de ce manteau de la Déesse « tout à la fois bleuâtre comme la nuit, jaune comme l’aurore, pourpre comme le soleil, nombreux, diaphane, étincelant, léger… », elle est surprise, comme Emma entre les bras de Léon, de ne pas éprouver ce bonheur qu’elle imaginait autrefois : « Elle reste mélancolique dans son rêve accompli… » L’ermite saint Antoine, sur la montagne de la Thébaïde, ayant, lui aussi, réalisé sa chimère mystique, comprend que la puissance de sentir lui fait défaut ; il cherche avec angoisse la fontaine d’émotions pieuses qui jadis s’épanchait du ciel dans son cœur : « Elle est tarie maintenant, et pourquoi… ? 

1742. (1870) De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés « De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés — Chapitre XIII : Affinités mutuelles des êtres organisés »

Conséquemment, les groupes aujourd’hui considérables, et qui, en général, comprennent beaucoup d’espèces dominantes, tendent à continuer encore à s’accroître en puissance et en nombre. […] Leur fonction, en cet état, est d’employer leurs sens, si remarquablement développés, et leur puissance de natation rapide à chercher et à atteindre un lieu convenable où elles se fixeront pour y subir leur dernière métamorphose.

1743. (1862) Portraits littéraires. Tome II (nouv. éd.) « Joseph de Maistre »

Cette puissance, cette capacité de mémoire, quand elle ne fait pas obstruction et qu’elle obéit simplement à la volonté, est le propre de toutes les fortes têtes, de tous les grands esprits. […] Sur les choses purement politiques, il avait une conviction qu’on pourrait dire secondaire, un peu de ce mépris ultra-montain à l’endroit des puissances par où a commencé feu l’abbé de La Mennais. […] Et pour que l’on comprenne mieux dans quel sens analogue à celui de M. de Maistre, voici ce qu’après un préambule sur ses principes spiritualistes et sur la liberté morale, Saint-Martin disait à son ami : « Supposant donc… toutes ces bases établies et toutes ces vérités reconnues entre nous deux, je reviens, après cette légère excursion, me réunir à toi, te parler comme à un croyant, te faire, dans ton langage, ma profession de foi sur la Révolution française, et t’exposer pourquoi je pense que la Providence s’en mêle, soit directement, soit indirectement, et par conséquent pourquoi je ne doute pas que cette Révolution n’atteigne à son terme, puisqu’il ne convient pas que la Providence soit déçue et qu’elle recule. » « En considérant la Révolution française dès son origine, et au moment où a commencé son explosion, je ne trouve rien à quoi je puisse mieux la comparer qu’à une image abrégée du Jugement dernier, où les trompettes expriment les sons imposants qu’une voix supérieure leur fait prononcer, où toutes les puissances de la terre et des cieux sont ébranlées, et où les justes et les méchants reçoivent dans un instant leur récompense ; car, indépendamment des crises par lesquelles la nature physique sembla prophétiser d’avance cette Révolution, n’avons-nous pas vu, lorsqu’elle a éclaté, toutes les grandeurs et tous les ordres de l’État fuir rapidement, pressés par la seule terreur, et sans qu’il y eût d’autre force qu’une main invisible qui les poursuivît ?

1744. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre III. L’âge classique. — Chapitre III. La Révolution. »

Il expliquait le mot εὐχαριστεῖν en chaire avec tous les agréments d’un dictionnaire, commentant, traduisant, divisant et subdivisant comme le plus hérissé des scoliastes829, ne se souciant pas plus du public que de lui-même, si bien qu’une fois ayant parlé trois heures et demie devant le lord-maire, il répondit à ceux qui lui demandaient s’il n’était pas fatigué : « Oui, en effet, je commençais à être las d’être debout si longtemps. » Mais le cœur et l’esprit étaient si pleins et si riches que ses défauts se tournaient en puissance. […] Une hauteur d’orgueil qui ne fut surpassée que par celle de son fils, une arrogance qui réduisait ses collègues à l’état de subalternes, un patriotisme romain qui réclamait pour l’Angleterre la tyrannie universelle, une ambition qui prodiguait l’argent et les hommes, communiquait à la nation sa rapacité et sa fougue, et n’apercevait de repos que dans les perspectives lointaines de la gloire éblouissante et de la puissance illimitée, une imagination qui transportait dans le Parlement la véhémence de la déclamation théâtrale, les éclats de l’inspiration saccadée, la témérité des images poétiques, voilà les sources de son éloquence : Hier encore l’Angleterre eût pu se tenir debout contre le monde ; aujourd’hui, « personne si pauvre qui lui rende hommage ! […] À toutes ces puissances d’esprit qui font le systématique, il ajoutait toutes les énergies du cœur qui font l’enthousiaste.

1745. (1714) Discours sur Homère pp. 1-137

La preuve qu’Homere ne regardoit pas ces dispositions avec mépris, c’est qu’il les donne presque à tous ses dieux et à ses héros, à proportion de leur puissance et de leur valeur : l’iliade n’est qu’un tissu d’orguëil, de colere et de vengeance. […] On prétend que cette foule de dieux dans l’iliade, ne blesse pas l’unité d’une puissance supérieure ; qu’ils n’en sont que les différens attributs ; et que si le poëte les a personifiés, ce n’étoit que pour expliquer les opérations divines d’une maniere proportionnée à l’imagination humaine. […] Pour les diverses actions des mêmes figures, diroit-on qu’elles étoient répétées sous différentes formes, en plusieurs tableaux séparés ; mais cela ne feroit qu’augmenter la confusion ; il vaut mieux avouer franchement qu’Homere a abusé de la puissance de Vulcain, et qu’après lui avoir fait faire des trépieds qui marchent seuls aux assemblées des dieux, et des statues d’or qui parlent et qui pensent, il n’a cru que suivre ce systême, en lui faisant faire encore un bouclier mouvant, comme ces tableaux que nous avons vûs en France depuis quelques années.

1746. (1907) L’évolution créatrice « Chapitre I. De l’évolution de la vie. Mécanisme et finalité »

Car c’est sa présence qui nous permet d’affirmer que le noyau est un noyau, que l’intelligence toute pure est un rétrécissement, par condensation, d’une puissance plus vaste. […] On attribue implicitement à la matière organisée une certaine capacité sui generis, la mystérieuse puissance de monter des machines très compliquées pour tirer parti de l’excitation simple dont elle subit l’influence. […] Ainsi, comme nous l’avons montré dans une étude antérieure, la vision est une puissance qui atteindrait, en droit, une infinité de choses inaccessibles à notre regard.

1747. (1925) Feux tournants. Nouveaux portraits contemporains

On m’a montré un lieutenant dont la puissance de sommeil était prodigieuse. […] Ces puissances qui nous touchent : la bonté, la poésie, une juvénile malice, ont fait de lui le lieu de leur activité délicieuse. […] Bernstein tient de son origine s’y exalte avec une puissance que l’âge a modérée ; les conflits d’âmes ont aujourd’hui sa préférence. […] Et dans ces odes, en l’honneur de la puissance des machines, à la gloire du sport, il y gronde, il y trépigne une obscure cohue de mots écrits avec le sang.

1748. (1896) Le IIe livre des masques. Portraits symbolistes, gloses et documents sur les écrivains d’hier et d’aujourd’hui, les masques…

Il eut soin, parmi ses écrits, de nous le certifier lui-même : « Je suis un prophète. » Il pouvait ajouter, il n’y a pas manqué : ― et aussi un pamphlétaire : « Je suis incapable de concevoir le journalisme autrement que sous la forme du pamphlet. » Les deux mots sont des équivalents historiques : le pamphlétaire a remplacé le prophète, le jour où les hommes ont perdu la puissance de croire pour acquérir la puissance de jouir. […] Il se veut un enfant ; il est l’oiseau des légendes qu’un moine écouta pendant plus de cinq cents ans ; et, de même qu’en la légende, lorsqu’on l’a écoutée et qu’on revient à la vie, il y a du nouveau dans les gestes des hommes et dans les yeux des femmes ; les choses signifient des pensées qu’on n’avait plus, et même ce buveur du dimanche, au dimanche ivre d’eau-de-vie, semble songer à une communion avec les puissances invisibles et belles. […] Dirions-nous qu’il a le don du tragique et, en puissance, toutes les vertus d’un grand poète dramatique : peu de têtes se retourneraient et peu sans un mauvais sourire.

1749. (1898) Manuel de l’histoire de la littérature française « Livre II. L’Âge classique (1498-1801) — Chapitre III. La Déformation de l’Idéal classique (1720-1801) » pp. 278-387

Il en traduit encore plus manifestement l’esprit même, si Voltaire n’a conçu son Essai sur les mœurs qu’à dessein de montrer la supériorité de son siècle sur les autres ; et si Montesquieu, de son côté, convaincu que « l’histoire n’a rien à comparer à la puissance de l’Europe de son temps » s’est efforcé d’en trouver la raison dans la supériorité de ses lois ? […] Les voilà maîtres des affaires ; et il faut maintenant les entendre se moquer des jeunes gens « qui se croient en sortant du collège obligés d’apprendre aux puissances à diriger leurs États » ! […] Marmontel, dans ses Mémoires]. — Les coquetteries de Frédéric avec Baculard d’Arnaud le décident. — Son départ pour Berlin [18 juin 1750] ; — et son arrivée à Potsdam [10 juillet 1750]. — Sincérité de son enthousiasme pour Frédéric ; — et, à ce propos, du profit que Voltaire devait tirer de son séjour en Prusse ; — si l’amitié d’un grand homme est un bienfait des Dieux. — Parti de Paris en suspect, — et n’y comptant encore que comme un homme de lettres parmi beaucoup d’autres ; — le séjour de Berlin, — et la familiarité de Frédéric, — en dépit de l’aventure de Francfort, — vont en faire en moins de trois ans un homme unique désormais ; — le confident littéraire des puissances ; — et déjà presque le maître de la littérature européenne. […] Cruppi, L’Avocat Linguet, Paris, 1895 ; et Édouard Herz, Voltaire und die Strafrechtspflege, Stuttgart, 1887] ; — et son Commentaire du traité des délits et des peines [de Beccaria], 1766. — L’occasion lui paraît propice pour attaquer à fond le christianisme ; — et tous les moyens lui deviennent bons ; — encouragé qu’il est à la fois par les instigations de Frédéric, — et l’« avènement » de la Du Barry, 1769. — Son Histoire du Parlement le remet en grâce auprès des puissances. — Publication des Questions sur l’Encyclopédie, 1770-1772. — Son intervention dans les affaires Montbailly, 1770 ; — Morangiès, 1772 ; — Lally, 1773 [procès de réhabilitation] ; — des serfs de Saint-Claude, 1770-1777 ; — et comment l’indécence de ses plaisanteries habituelles gâte l’effet de son dévouement. — Ses relations avec Turgot, 1776. — Les derniers écrits de Voltaire. — Son Commentaire sur l’Esprit des lois, 1777, et sa dernière escarmouche contre Montesquieu. — Ses dernières Remarques sur les Pensées de Pascal, 1777 ; — et de l’intérêt qu’en offre le rapprochement avec les premières ; — qui sont de cinquante ans antérieures. — Les Dialogues d’Évhémère, et le Prix de la justice et de l’humanité, 1777. — Ses démarches pour obtenir qu’on le laisse rentrer à Paris. — Il quitte Ferney le 5 février 1778 ; — et arrive à Paris le 10 du même mois.

1750. (1925) Proses datées

Dans le petit salon de la rue de Rome, à la douce lueur de la lampe familiale, que de fois nous avons écouté Mallarmé tenir tête au wagnérisme et revendiquer pour la Poésie son droit éternel de tenter à son profit le prodige inverse de celui qu’avait réalisé par la puissance de son génie le créateur du Drame musical !     […] De là, la force communicative de ses inventions les plus excentriques, inventions soutenues d’ailleurs et portées à toute leur puissance par une verve irrésistible et par toutes les ressources d’une langue franche et sobre. […] Nul n’a déployé une puissance pareille à la sienne dans la peinture des caractères et dans l’invention des types. […] Son prestige lui venait de la puissance originale de sa personnalité, de sa singularité spirituelle et du sombre rayonnement de sa pensée. […] N’était-il pas jusqu’à ce « Démon de la perversité » dont Poe avait signalé la présence dans le cœur de l’homme et à qui Baudelaire attribuait également une occulte puissance sur les actions humaines.

1751. (1890) Les princes de la jeune critique pp. -299

Cet adorateur de Racine est un de ceux qui ont le mieux compris la puissance de M.  […] Lemaître d’avoir la logique serrée, la profondeur philosophique, les vastes généralisations ou la puissance d’analyse d’un Taine ou d’un Bourget. […] Il est question d’un amoureux à qui la jalousie révèle la puissance du sentiment qui l’a conquis tout entier : « L’amour blessé s’est réveillé ; il s’agite et chacun de ses mouvements le faisant souffrir davantage le fait se mieux connaître. » Ainsi marivaude M.  […] D’abord, tout au contraire des moralistes, il se souciait fort peu de savoir si les forces mystérieuses contenues dans le livre, objet de ses études, étaient bienfaisantes ou malfaisantes ; il lui suffisait d’en constater l’existence, d’en démêler la genèse, d’en mesurer la puissance. […] À coup sûr les dispositions qu’il avait indiquées dans la jeunesse n’étaient point imaginaires ; mais en prenant, grâce à lui. pleine conscience d’elles-mêmes, elles prirent une force nouvelle ; et par suite, au sein de la jeune génération, les uns (ceux qui lisent), acceptant comme paroles d’Évangile des assertions à demi fondées, les autres (ceux qui écrivent), se mettant à son école pour apprendre à faire de l’anatomie morale, rendirent par cette docilité un double et légitime hommage à la puissance de son originalité plus encore qu’à celle de ses facultés d’observation.

1752. (1908) Jean Racine pp. 1-325

S’il s’anéantit devant Dieu, il est fier avec les hommes, et difficile avec les puissances. […] Une autre fois (31 janvier 1662), il lui écrit, à propos de l’abbé Le Vasseur, trop possédé de l’idée d’une certaine mademoiselle Lucrèce : « … J’ai même de la peine à croire que vous ayez assez de puissance pour rompre ce charme, vous qui aviez accoutumé de le charmer lui-même autrefois, aussi bien que beaucoup d’autres. » Je vous donne mademoiselle Vitart pour une femme qui dut être délicieuse, et qui inspira à Jean Racine son premier amour, — oh ! […] À l’opposé des romantiques, Racine est un merveilleux conciliateur de traditions, et cela, mieux peut-être que tout le reste, témoigne de l’étendue de sa sensibilité, de sa puissance d’aimer, de la richesse de son âme. […] Et il le croit, en ce sens qu’il se considère comme élu par les puissances d’en haut. […] Je ne sais de tout temps quelle injuste puissance Laisse le crime en paix et poursuit l’innocence.

1753. (1894) La vie et les livres. Première série pp. -348

On savait, au Caire, à Beyrouth, à Smyrne, que notre puissance matérielle avait été fort ébranlée par une guerre malheureuse contre l’Allemagne ; mais on n’ignorait pas que les armées renaissent, que les finances reprennent peu à peu leur équilibre et que nous avions encore assez de bois, de fer, de charbon et de fonte pour construire des vaisseaux. […] Mais, justement, l’auteur nous montre, avec une puissance d’assimilation vraiment surprenante, comment les spirituelles traductions et les précieux commentaires de M.  […] On cède à la griserie des lourds parfums, tout en désapprouvant la puissance bizarre qui s’amuse à faire des voluptés avec du sang et des larmes. […] Taine a merveilleusement vu et décrit la puissance de ce génie, la force de cette volonté. […] Malheur à ceux qui veulent se mettre en coquetterie avec cette puissance revêche !

1754. (1867) Nouveaux lundis. Tome VII « Corneille. Le Cid, (suite.) »

Là, comme presque partout ailleurs, le démembrement du Califat avait amené l’anarchie, la lutte et l’instabilité ; dans ce morcellement où était tombée la puissance des Arabes, chacun se disputant un débris, il y avait alors à Valence un roi Câdir imposé par les Castillans et détesté de ses sujets ; dans un péril pressant, il s’adressa au roi de Saragosse, lequel s’entendit avec le Cid pour lui prêter un secours intéressé ; tous deux comptaient s’accommoder bientôt de sa dépouille.

1755. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « Appendice. Discours sur les prix de vertu »

Elle ne l’est pas davantage si elle se remarie, car alors elle a prouvé qu’elle n’a plus pour la mémoire de l’époux ce culte exclusif qui est le fondement de la puissance qu’on lui attribue, de la faveur rémunératoire dont elle est l’objet.

1756. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « Nouvelle correspondance inédite de M. de Tocqueville (suite et fin.) »

Je voudrais bien que tu m’aidasses à y voir plus clair… » Les sceptiques pourraient bien avoir raison : cette philosophie des faits, tirée à distance, avec tant d’effort, et qui varie au gré de chaque cerveau, ne prouve guère, après tout, que la force de tête et la puissance de réflexion de celui qui la trouve.

1757. (1870) Nouveaux lundis. Tome XII « Madame Desbordes-Valmore. »

On consacre tous les jours de longues pages aux hommes soi-disant de puissance et d’action qui, bien souvent gouvernés eux-mêmes, passent pour avoir gouverné le monde, à ceux qui ont traité et souvent trafiqué des nations : pourquoi regarderait-on à quelques pages de plus ou de moins, quand il s’agit de ces êtres d’élite qui ont habité et véritablement régné dans la sphère spirituelle, dans le monde du cœur, et qui n’ont cessé toute leur vie de cultiver et de cueillir la fleur des meilleurs sentiments ; êtres innocents et brisés, mais qui parlent par leurs blessures et qui apprennent ou rappellent de douces choses, — ou des choses amères, exprimées avec douceur, — aux hommes leurs semblables ?

1758. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Chateaubriand — Chateaubriand, Vie de Rancé »

Dans l’ordre humain, ce qui fait pour nous la puissance singulière et le charme du frère d’Amélie, de l’Eudore de Velléda, c’est au contraire la composition et le mélange ; lui aussi, il essaye d’entrer dans la haine passionnée de la vie, mais il s’y reprend au même instant ; il la hait et il la ressaisit à la fois ; il a les dégoûts du chrétien et les enchantements du poëte ; il applique sa lèvre à l’éponge trempée d’absinthe, et il nous rend tout à côté les saveurs d’Hybla.

1759. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Béranger — Béranger en 1832 »

La jeunesse pourtant, cette  puissance d’illusion et de tendresse dont elle est douée, cette gaieté naturelle qui en formait alors le plus bel apanage et dont notre poëte avait reçu du ciel une si heureuse mesure, toutes ces ressources intérieures triomphèrent, et la période nécessiteuse qu’il traversait brilla bientôt à ses yeux de mille grâces.

1760. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « M. MIGNET. » pp. 225-256

Honneur et respect du moins, quand l’esprit supérieur et le grand caractère qui ne recule devant rien fait entrer dans ses inspirations un sentiment élevé, un dévouement profond à la puissance publique dont il est investi, quand il se propose un but d’accord avec l’utilité ou la grandeur de l’ensemble.

1761. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « Racine — I »

Un grand art de combinaison, un calcul exact d’agencement, une construction lente et successive, plutôt que cette force de conception, simple et féconde, qui agit simultanément et comme par voie de cristallisation autour de plusieurs centres dans les cerveaux naturellement dramatiques ; de la présence d’esprit dans les moindres détails ; une singulière adresse à ne dévider qu’un seul fil à la fois ; de l’habileté pour élaguer plutôt que la puissance pour étreindre ; une science ingénieuse d’introduire et d’éconduire ses personnages ; parfois la situation capitale éludée, soit par un récit pompeux, soit par l’absence motivée du témoin le plus embarrassant ; et de même dans les caractères, rien de divergent ni d’excentrique ; les parties accessoires, les antécédents peu commodes supprimés ; et pourtant rien de trop nu ni de trop monotone, mais deux ou trois nuances assorties sur un fond simple ; — puis, au milieu de tout cela, une passion qu’on n’a pas vue naître, dont le flot arrive déjà gonflé, mollement écumeux, et qui vous entraîne comme le courant blanchi d’une belle eau : voilà le drame de Racine.

1762. (1895) Histoire de la littérature française « Troisième partie. Le seizième siècle — Livre IV. Guerres civiles conflits d’idées et de passions (1562-1594) — Chapitre III. Montaigne »

Il conseillera la soumission au pouvoir absolu, et il n’estimera rien de plus dans le christianisme que le précepte de respecter toutes les puissances.

1763. (1895) Histoire de la littérature française « Cinquième partie. Le dix-huitième siècle — Livre III. Les tempéraments et les idées — Chapitre II. La jeunesse de Voltaire, (1694-1755) »

Faire éclater l’absence d’une intelligence divine dans le tissu des événements humains, expliquer les faits par des liaisons mécaniques et fatales, mettre en lumière la puissance des petites causes, la souveraineté du hasard, voilà le dessein de Voltaire.

1764. (1920) La mêlée symboliste. II. 1890-1900 « L’expression de l’amour chez les poètes symbolistes » pp. 57-90

À gesticuler à tâtons dans le noir du destin, on risque toujours de blesser quelque puissance occulte et mystérieuse et d’en déchaîner la colère vengeresse.

/ 1999