La tolérance qu’avaient aisément les anciens pour les diverses opinions et croyances religieuses, tolérance que Gibbon s’attache si fort à démontrer, était plus que compensée par le mépris si habituel qu’on avait alors pour la vie des hommes. […] À défaut de ce honneur impossible, Mme Necker essayait quelquefois de lui indiquer d’autres sources de consolation et le souverain remède contre l’isolement du cœur ; elle lui avait fait promettre de lire l’ouvrage de son mari sur L’Importance des opinions religieuses, et elle avait, à l’occasion, sur ce sujet de christianisme et de monde invisible, des paroles amies et délicates, que Gibbon du moins ne repoussait pas. […] Quoique cette manière de raisonner soit très blâmable, il est impossible qu’il n’en reste pas plusieurs impressions désavantageuses : 1º Que les premiers chrétiens étaient animés d’un esprit de fanatisme et d’enthousiasme autant que d’un esprit religieux. 2º Que l’on peut à peine avoir foi aux miracles, parce que l’Église dès lors jusqu’à présent n’a jamais renoncé au pouvoir d’en faire ; que les preuves sont égales pour tous les temps ; que le moment où le don des miracles a réellement cessé n’a fait aucune impression ; qu’enfin les chrétiens, en admettant les miracles du paganisme, détruisent et la foi qu’on aurait aux leurs et le caractère surnaturel des miracles. 3º Que, dès les premiers siècles, parmi les Pères de l’Église et ceux qui nous en ont transmis l’histoire, l’enthousiasme a donné lieu à des fraudes pieuses qui déguisent absolument la vérité. 4º Que les différentes sectes qui divisent le christianisme dès son commencement altérèrent les Écritures en publiant chacune de son côté des Évangiles divers. 5º Que bien des causes temporelles favorisèrent les progrès du christianisme qui furent bien plus lents qu’on ne pense. 6º Qu’il n’y eut réellement aucune persécution générale jusqu’au temps de Dioclétien ; que celle-ci même ne fit pas deux mille martyrs, et que le petit nombre de chrétiens qui avaient été persécutés auparavant l’avaient été pour des causes particulières.
Il établit, dès le début, la meilleure police ecclésiastique dans la capitale, visitant les séminaires, les paroisses, tantôt l’une, tantôt l’autre, à l’improviste, s’inquiétant que les prêtres étrangers ou les religieux en passage à Paris n’y vécussent que convenablement à leur caractère ; sévère et sans quartier pour les moines errants. […] Sa maxime était « de tourner les choses de manière qu’en donnant gain de cause à celui qui avait raison, son adversaire eût cependant lieu, par quelques endroits, de se consoler d’être vaincu. » Aux difficultés qu’il rencontrait en cette tâche ingrate d’arbitre et de pacificateur des couvents, il lui arriva cependant de dire plus d’une fois qu’il était moins aisé de remettre la paix parmi les religieux et les réguliers que de ramener au devoir les prêtres séculiers. […] De religion, de croyance religieuse proprement dite, il n’en faut point parler, il n’en avait pas.
La première différenciation est celle qui s’opère entre le gouvernant et les gouvernés ; elle grandit, l’autorité devient héréditaire, le roi prend un caractère presque divin ; car la religion et le gouvernement sont à cette époque intimement associés ; et pendant des siècles les lois religieuses et les lois civiles se séparent à peine. […] L’écriture (idéographique à l’origine) se rattache à la peinture, et toutes deux avec la sculpture furent d’abord de simples appendices de l’architecture, qui elle-même était l’art hiératique ou religieux ; les palais et temples d’Assyrie, les monuments d’Egypte ou de l’Inde en témoignent. […] En littérature, les œuvres primitives comprennent tout ; l’Écriture contient la théologie, la cosmogonie, l’histoire, la législation, la morale, etc., des Hébreux ; dans l’Iliade, il y a des éléments religieux, militaires, épiques, lyriques, dramatiques ; tout cela forme plus tard autant de genres.
Le sujet est une religieuse qu’on a contrainte dans ses vœux, qui va être punie par l’abbesse pour avoir voulu les violer, et que vient délivrer son amant en uniforme de grenadier de la Garde nationale, avec l’officier en tête et toute la compagnie. […] Le scandale qui eut lieu à Saint-Roch lors du refus de sépulture de la danseuse, Mlle Chameroy, lui fournit l’occasion de remarques politiques relativement à la religion : « Elle aura longtemps encore, dit-il, plus besoin d’être soutenue que contenue. » Il établit très bien la différence qu’il y a entre ces deux supports de l’Ancien Régime, la noblesse qui est véritablement finie, et l’établissement religieux qui doit se transformer et subsister. […] Fiévée s’aperçut qu’il avait travaillé pour d’autres, et que le ministère tombait sous la domination d’une coterie politique et d’une congrégation religieuse, auprès desquelles il avait peu de chances de se faire écouter et compter pour ce qu’il valait.
Enfant, dans les voyages presque annuels qu’il faisait à Boulogne-sur-Mer, j’ai eu plus d’une fois le plaisir d’entendre au dessert son odyssée : et, ce qui me frappait déjà chez un homme qu’on était accoutumé à considérer comme un des chefs du parti royaliste et religieux, c’est qu’il ajoutait que dans sa prison, et se croyant à la veille de périr, il avait fait demander et avait lu, comme livre de consolation, les Essais de Montaigne. […] Bien qu’il se prononce dans un sens plutôt favorable aux croisés et à l’inspiration religieuse qui les a poussés, l’auteur ne dissimule rien des désordres ni des brigandages ; il reste tout philosophique dans son mode d’examen et d’explication. […] Mais, quels que soient les motifs qui m’ont conduit, je n’ai point traversé cette Voie douloureuse sans éprouver une vive émotion et sans m’élever à de religieuses pensées.
Richelieu n’est pas un philosophe ; ce haut esprit, qui est surtout un bon esprit armé d’un grand caractère, paie tribut aux idées et aux préjugés de son temps ; il parle en maint endroit comme croyant aux présages, aux horoscopes et aux sortilèges ; il est superstitieux : mais aussi il est sincèrement religieux, il croit au don de Dieu qui s’étend sur certains hommes destinés à être des instruments publics de salut : si les fautes commises envers les personnes publiques lui paraissent d’un tout autre ordre que celles commises contre des particuliers, les fautes de ces personnes publiques elles-mêmes lui semblent aussi plus graves et de plus de poids, eu égard à la responsabilité et à l’étendue des conséquences. […] Elles sont pourtant la seule moralité supérieure qui serve de garantie dans les personnes publiques, qui les sauve du pur machiavélisme ; et on aime à retrouver le signe de cet esprit religieux sous une forme ou sous une autre, ce sentiment sacré d’une divinité singulière invoquée et reconnue de tous les grands chefs et fondateurs d’États et des conducteurs de peuples. […] Avenel a trouvé un fait piquant, et qui touche à ce coin religieux sincère : c’est un vœu fait par Richelieu.
Mêlant ses idées religieuses si honorables à ses combinaisons de finance, il suppose que Colbert devait à son génie politique d’être plus religieux qu’un autre : « Un grand administrateur s’attache plus fortement qu’un autre à l’idée d’un Dieu. » Dieu, quelque part, est appelé, par un singulier rapprochement de termes, « l’Administrateur éternel ». […] Il écrivit d’abord sur l’administration et sur la politique ; mais bientôt, cherchant dans ses instincts méditatifs une diversion plus haute et plus vaste aux ennuis de l’inaction, il fit son livre De l’importance des idées religieuses et combattit les fausses doctrines répandues autour de lui.
Ces contes, que l’on pourrait appeler aussi contes moraux — car leur didactisme s’inspire généralement d’un prosélytisme moral — sont de deux sortes : les contes de morale idéale (religieuse et musulmane le plus souvent) ou théorique et ceux de morale pratique ou réelle. […] J’ai dit que les contes de morale théorique présentent le plus souvent un caractère religieux. […] Il n’a pas, comme nous, cet atavisme de morale religieuse dont l’influence persiste même chez les « libres-penseurs » les plus dégagés, en apparence, de l’étreinte du passé et qui nous fait nous effaroucher devant le récit d’actes ou d’événements somme toute conformes à la loi de Nature.
Henri Heine est un génie éminemment tendre, nuancé des plus ravissantes et (dans le sens religieux) des plus divines mélancolies, chez qui le sourire et même le rire trempent dans les larmes, et les larmes se rosent de sang… C’est une âme d’une si grande puissance de rêverie et d’un désir si amoureux du bonheur, que l’on peut dire qu’elle est faite pour le Paradis tel que les chrétiens le conçoivent, comme les fleurs sont faites pour habiter l’air et la lumière. […] Et cependant ce tendre génie, ce rêveur épris jusqu’à l’angoisse de toutes les béatitudes, ce poète aussi intimement religieux de tempérament que Klopstock, nous l’avons vu, pendant vingt ans, navrant spectacle ! […] Il y a des philosophies qui sont presque, des poésies sans rhythme, il y a des métaphysiques qui ont un côté idéal, grandiose, religieux, et ce n’est pas pour rien sans doute qu’on parle des ailes d’or de la pensée de Platon.
M. le grand rabbin du Consistoire central de France, dans une lettre que j’ai sous les yeux, répond : « Mes aumôniers et moi, nous avons constaté depuis le début de la guerre chez les soldats israélites une grande recrudescence de foi religieuse s’alliant à l’enthousiasme patriotique ». […] Les documents que je possède sur l’élite morale des israélites ne me font connaître que des consciences qui paraissent vidées de leur tradition religieuse… Là-dessus, un jeune officier israélite, industriel lorrain, qui a été l’objet d’une belle citation à l’ordre de l’armée, m’écrit une lettre intéressante qui commence par ces mots : « Je suis juif, sincèrement croyant et attaché à ma religion… » J’en détache quelques fragments : « Prenons comme exemple, me dit cet officier, un israélite de ce que l’on appelle la bonne bourgeoisie, c’est-à-dire le sous-lieutenant qui vous écrit… J’ai eu une instruction moyenne (études classiques à Carnot, puis commencement de droit). […] Sur le même sujet une lettre signée d’un nom important dans la société parisienne : Je ne voudrais pas vous laisser croire que les consciences des Israélites morts pour la France avec amour « sont vidées de leur tradition religieuse ».
Homme intérieur, dévoué aux théories élevées et prouvées, arraché au christianisme par la logique, il a été égaré par des restes d’inclinations religieuses et par l’habitude de l’abstraction vague. […] Le génie de cette race est passionné et réfléchi ; les hommes concentrés y abondent ; mélancoliques, ardents, sérieux, religieux, solitaires, ils pensent naturellement à Dieu, au devoir, au bonheur, à la vie future, et leurs orages sont intérieurs. […] Il la laissa philosophique, et ne la voulut point religieuse.
Je ne serre pas de trop près, je ne veux pas démêler ce qu’il peut y avoir de vague et d’indécis sous ces phrases si nettes et si fermes de ton ; j’applique à Rousseau le précepte qu’il nous a donné pour le bien lire : « Mes écrits ne peuvent plaire qu’à ceux qui les lisent avec le même cœur qui les a dictés » ; et je dis que Rousseau, dans ces pages où il invoque si vivement le sentiment moral tel que tout honnête homme le trouve en lui-même dans une société civilisée, est moral lui-même et religieux. […] Et cela ressemblerait à une mauvaise plaisanterie que de poser seulement la question : Lequel était le plus religieux de Rousseau ou de lui ?
Mais d’assez récentes tracasseries ecclésiastiques l’ayant ramené à Paris, il y vit de près cette tiédeur et ce relâchement publics qui enhardissent un pouvoir sans morale à tous les envahissements rusés ou grossiers ; il y vit, sous cette couche corrompue d’une société en décadence, une masse jeune et populaire, impétueuse, frémissante, au sang chaud et vierge, mais mal éclairée, mal dirigée, obéissant à des intérêts aussi et à des passions qui, certes, courraient risque de bientôt corrompre la victoire, si un souffle religieux et un esprit fraternel n’y pénétraient d’avance à quelque degré. […] Frappé d’abord de l’indifférence religieuse et de l’inertie froide où croupissaient les premières couches de la société, il a désespéré de toute cette masse, si on n’y faisait descendre l’esprit et la purification par en haut, c’est-à-dire par les gouvernements, et, au delà des gouvernements, par le Saint-Siège.
Sans remonter si haut, si de nos jours le vénérable Goethe, dérogeant une fois à cet esprit de sagesse et d’à-propos qu’il sait porter en toutes choses, s’avisait sur la fin de sa carrière d’un effort malencontreux, qui de nous aurait le courage ou plutôt la lâcheté de relever sans pitié l’illusion du grand poëte, et de rompre par de rudes et inutiles vérités le calme religieux dans lequel il jouit de sa gloire ? […] Mais il a compris la chose en auteur qui veut allonger son livre, et non le composer : c’est pourquoi il a entassé dans son Introduction force anecdotes, bons mots, récits de détails, exposés de doctrines religieuses ou politiques, sarcasmes croisés contre les philosophes et les papistes ; nulle part, il n’a placé ces vues générales qui caractérisent l’historien et révèlent en lui l’intelligence de son sujet.
Ce système ne peut être contraire aux idées religieuses. Les prédicateurs éclairés ont toujours représenté la morale religieuse comme un moyen d’améliorer l’espèce humaine ; j’ai tâché de prouver que les préceptes du christianisme y avaient contribué efficacement.
Moins artiste que le génie italien, il a des tendances pratiques et positives, qui l’orienteront vers la recherche de la vérité scientifique ou morale : il trouvera de ce côté un appui dans les races septentrionales, en Angleterre, en Flandre, en Allemagne surtout, où la Renaissance prend la forme de l’érudition philologique et de la réforme religieuse. […] La morale reparaît comme l’objet supérieur de la Réforme religieuse : Marot, trop protestant pour rester à la cour, est trop peu moral pour vivre à Genève.
J’obéis à un sentiment de religieux amour pour la très belle, très claire et très noble langue de mon pays. […] S’il parcourt les églises pendant le carême, il sait qu’il est convenable d’y porter une âme religieuse, et il l’y porte… Mais comme on sent que tout cela lui est égal !
Mais, en même temps que son scepticisme lequel, bien que confinant au nihilisme, n’excluait point une sensualité délicate et l’art de jouir de la surface brillante des choses croissaient, d’autre part, sa sollicitude et son goût pour les formes de vie et de sentiment qui dérivent des croyances religieuses. […] Un bon nihiliste aime naturellement les saints ; car la foi religieuse implique une part de révolte contre la société terrestre, contre ses injustices et ses atroces ou ridicules conventions, et elle peut agréer par là aux plus audacieux esprits.
D’abord l’art, en toutes ses manifestations, est essentiellement « l’aspect en beauté » des idées religieuses d’une race et d’une époque vivantes. Cela est surtout évident à l’origine de toutes les littératures ; sans remonter jusqu’à l’Iliade et l’Odyssée qui sont des actes de foi, chez nous, durant ce XVIIe siècle dont je vous parlais, tandis que les orateurs sacrés conduisaient à leurs suprêmes conséquences les principes enfermés dans les dogmes, exprimaient des plus abstraites spéculations religieuses une psychologie, une morale et une politique chrétiennes, les poètes, par une rétroaction de rêve, faisaient rayonner la Croix sur les Idoles et christianisaient les fables do l’Antiquité.
Le grand mouvement ombrien du XIIIe siècle, qui est, entre tous les essais de fondation religieuse, celui qui ressemble le plus au mouvement galiléen, se passa tout entier au nom de la pauvreté. […] Méprisant ces misérables aberrations du sentiment religieux, Jésus aimait à dîner chez ceux qui en étaient les victimes 520 ; on voyait à table à côté de lui des personnes que l’on disait de mauvaise vie, peut-être pour cela seul, il est vrai, qu’elles ne partageaient pas les ridicules des faux dévots.
Quelques-uns hésitaient, le selâm étant alors comme aujourd’hui, en Orient, un signe de communion religieuse, qu’on ne hasarde pas avec les personnes d’une foi douteuse. « Ne craignez rien, disait Jésus ; si personne dans la maison n’est digne de votre selâm, il reviendra à vous 831. » Quelquefois, en effet, les apôtres du royaume de Dieu étaient mal reçus, et venaient se plaindre à Jésus, qui cherchait d’ordinaire à les calmer. […] Inutile de faire observer combien l’idée d’un livre religieux, renfermant un code et des articles de foi, était éloignée de la pensée de Jésus.
De même, avant Jésus, la pensée religieuse avait traversé bien des révolutions ; depuis Jésus, elle a fait de grandes conquêtes : on n’est pas sorti, cependant, on ne sortira pas de la notion essentielle que Jésus a créée ; il a fixé pour toujours l’idée du culte pur. […] La dynastie incrédule des Hérodes, d’un autre côté, s’occupait peu des mouvements religieux ; sous les Asmonéens, Jésus eût été probablement arrêté dès ses premiers pas.
Ils se sont d’abord interdit comme trop vile toute poésie à tendances philosophiques, ou religieuses, ou sociales. […] Mais je ne veux faire allusion qu’en passant aux lointaines conséquences de l’humanisme au point de vue philosophique, religieux, politique et moral.
On accuse notre philosophie d’être à la fois froide et timide, de ne donner complètement satisfaction ni à l’esprit religieux ni à l’esprit scientifique. […] Sur le fond de ce débat, voir le dernier chapitre de cet ouvrage : le problème religieux.
Il y a sans doute de la sublimité dans une tête de Jupiter ; il a fallu du génie pour trouver le caractère d’une Euménide, telle que les Anciens nous l’ont laissée ; mais qu’est-ce que ces figures isolées en comparaison de ces scènes où il s’agit de montrer l’aliénation d’esprit ou la fermeté religieuse, l’atrocité de l’intolérance, un autel fumant d’encens devant une idole ; un prêtre aiguisant froidement ses couteaux, un préteur faisant déchirer de sang-froid son semblable à coups de fouet, un fou s’offrant avec joie à tous les tourments qu’on lui montre et défiant ses bourreaux ; un peuple effrayé, des enfants qui détournent la vue et se renversent sur le sein de leurs mères, des licteurs écartant la foule, en un mot, tous les accidents de ces sortes de spectacles ? […] Voilà, ou je me trompe fort, les sources principales de notre sensation à l’aspect du firmament ; c’est en effet moitié physique et moitié religieux.
Mais les philosophes n’étaient pas tout à fait sages, les critiques ne sont pas tout à fait religieux. […] Tu distinguas l’imposteur de l’homme religieux ; tu saurais séparer le faux philosophe du véritable ami de la sagesse ; le novateur factieux, du citoyen qui travaille à d’utiles découvertes ; le charlatan littéraire, de l’écrivain qui dédaigne les succès d’un jour, et qui n’aspire qu’aux suffrages de la postérité.
C’est enfin le catholicisme féminisé qui affirme « que l’humanité perdue par la femme se surlèvera par la femme », le dernier mot d’un catholicisme bas-bleu, qui sera peut-être une formelle hérésie demain ; car le bas-bleuisme, en définitive, n’est que la vanité de la femme en révolte contre l’homme et l’ordre religieux et hiérarchique du monde ! […] Elle s’obstine à vouloir pénétrer le secret des comètes, elle veut s’élancer jusqu’aux comètes, et scrupule religieux très étonnant dans une comète !
Mme André Léo, probablement née avec cet instinct religieux qui fait tendre en haut la créature humaine, y tend encore, dans les idées qu’elle vient d’exprimer ; mais tendance vaine ! […] Pour qui croit que les lois naturelles sont encore à découvrir, il n’y a pas d’institution possible dont on puisse affirmer autre chose qu’une nécessité de fait, sans mortelle inconséquence ; et voilà pourquoi la petite théorie, religieuse et sentimentale de Mme André Léo, s’est brisée en quatre morceaux !
Et c’était là ce que nous disions avant d’ouvrir les deux effroyables volumes de cinq cents pages sur deux colonnes que Firmin-Didot a publiés dans sa vaste collection de l’Univers pittoresque, entreprise, peut-être, pour prouver la supériorité des ordres religieux en matière d’œuvres collectives sur toutes les individualités scientifiques ralliées dans un intérêt commercial. […] Nonobstant cette petite volée de bois vert, comme disait Figaro, appliquée sur l’échine d’un pédant, — car la Chine est bien quelque peu pédantesque, — les uns ont fait du peuple chinois le plus ancien, le plus grand, le plus spirituel, le plus digne, le plus sage de tous les peuples, philosophique et cependant religieux (ce qui, en Chine seulement, n’implique pas contradiction !)
Langue, superstitions, industrie, usages, caractères, institutions, races, chants populaires, tous les détails enfin de la vie, depuis les consécrations religieuses jusqu’aux soins vulgaires de la toilette, rien n’est omis dans ses tableaux. […] Car ce dont il s’agit dans ces livres, c’est de l’âpre, fier et religieux ennemi dont les résistances ont développé dans notre armée non seulement les vieilles qualités traditionnelles qui constituent le génie militaire de la France, mais des qualités entièrement nouvelles et qu’on ne lui connaissait pas.
Crétineau-Joly, l’auteur de l’Histoire de lα Compagnie de Jésus, de la Vendée militaire, de l’Histoire de la Révolution et de l’Église, du Pontificat de Clément XIV, l’éditeur et le dépositaire des Mémoires de Consalvi, ne peut pas sortir et disparaître entièrement de l’histoire religieuse, politique et littéraire du xixe siècle. […] Une biographie de Crétineau-Joly — l’historien religieux et politique — ne peut pas être les Mémoires de l’amitié de Maynard pour Crétineau.
Condamné à Rome alors, mais, comme tous les hérétiques qui commencent, faisant la distinction de l’Église et de la cour de Rome, il affirmait, à ce moment encore, son respect pour l’Église, se vouant seulement à un silence absolu, à un silence de trappiste sur les choses religieuses, comme il le dit dans deux ou trois lettres de la présente collection. […] Comme Chateaubriand, son illustre compatriote, qui, lui aussi, changea d’opinion, mais qui garda sur Lamennais la supériorité de l’unité religieuse, il était de nature un rêveur et même il préserva toujours la naïveté de sa rêverie, quand Chateaubriand travaillait la sienne et coquettait avec elle.
Pour nous, le Tchitchikoff des Âmes mortes n’est qu’un prétexte, un vieux moyen pour faire tourner sous notre regard le panorama social, religieux, politique, administratif, de la Russie tout entière. […] Il voulait faire de son voyage à Jérusalem quelque chose comme un bouclier contre le ressentiment des popes ; car à Saint-Pétersbourg, dans cette société mi-partie de mode et de religiosité mystique, un homme qui revient de Jérusalem a un charme… Le charme n’agit point sur la mort : frais de voyage, de précaution, de coquetterie religieuse, tout fut inutile.
Esprit physiologiquement religieux, tourné de tendance primitive et de tempérament vers les choses de la contemplation intellectuelle, métaphysicien et presque mystique, l’auteur de Terre et Ciel n’était point, par le fait de ses facultés, destiné aux doctrines de la philosophie moderne, mais pour des raisons qu’il connaît mieux que nous, et qu’il retrouverait s’il faisait l’examen de conscience de sa pensée, il n’a pu cependant y échapper. […] Si ce singulier traité de philosophie religieuse, qui essaie de renverser tous nos dogmes sans exception, sous l’idée chimérique des transformations éternelles et successives de l’humanité et sous un panthéisme plus fort que l’auteur, et qui le mène et le malmène, si ce traité brillait au moins par une exposition méthodique, nous aurions pu donner le squelette de ce mastodonte de contradictions et d’erreurs : mais M.
Et lorsque je dis l’un des premiers hommes du dix-huitième siècle, ce n’est pas assez ; c’est le premier qu’il faudrait dire, car dans l’ordre religieux, supérieur à tout, Joseph de Maistre et Bonald doivent être comptés comme étant du dix-neuvième siècle, et dans les sciences naturelles, Cuvier et Geoffroy Saint-Hilaire en sont aussi. […] ces collaborateurs ont un peu troublé les scrupules religieux de M.
venant d’un prêtre, d’un religieux, du P. […] Le sentiment de l’amour religieux de Dieu est un sentiment humain aussi, et c’est là véritablement le plus beau, c’est le premier.
Ou bien il fallait l’aborder comme nous l’aurions abordé, nous chrétiens, pour qui nul mouvement de civilisation n’a dépassé le christianisme ; comme nous qui avons une révélation religieuse, primitive, écrite, inébranlable dans ses textes, une histoire, un enchaînement de faits, des sources nombreuses, toute une exégèse, toute une critique et une autorité souveraine pour empêcher tous ces dévergondages d’examen qui ont fini, en Allemagne, par le suicide de la Critique sur les cadavres… qu’elle n’a pas faits, — ou bien il fallait traiter ce terrible sujet, résolument, en homme qui a pris son point de vue de plus haut ou de plus avant que des textes ; comme un philosophe, carré par la base, qui dit fièrement à l’histoire : Tu mens, quand tu n’es pas trompée ; tu es trompée, quand tu ne mens pas ! […] nous savons trop ce que, dans les préoccupations presque religieuses du penseur, devient ce Génie de la forme, qui vous aime et que l’on n’aime plus !
Du temps d’Anselme également, les Croisades avaient opéré le rapprochement des tendances religieuses de l’Europe et de son premier intérêt terrestre. […] Chassé de son palais épiscopal, dans les troubles religieux et politiques de son pays, saint Anselme ne se consola pas seulement de ce revers.