/ 1472
262. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome I « Mémoires pour servir à l’histoire des gens-de-lettres ; et principalement de leurs querelles. Querelles particulières, ou querelles d’auteur à auteur. — Milton, et Saumaise. » pp. 253-264

Cet écrivain a donné différens ouvrages, dans lesquels il prétend démontrer que Milton a tout puisé dans je ne sçais quelles rapsodies Latines d’un professeur de rhétorique Allemand. […] Beaucoup d’érudition Grecque & Latine, mais une érudition sans choix, très-peu de discernement, une présomption sans bornes, un fonds caché de jalousie d’auteur, un penchant insurmontable à les vouloir tous régenter ; voilà ce qui caractérise le fameux Aristarque de son siècle.

263. (1906) La nouvelle littérature, 1895-1905 « Deuxième partie. L’évolution des genres — Chapitre VI. Conclusions » pp. 232-240

Pour la France, M. de Tourtoulon, Maffre de Baugé et d’autres que nous avons nommés déjà dans une autre partie de cet ouvrage précisèrent la doctrine fédéraliste qui devait présider à l’avènement de la raison latine, victorieuse de l’instinct Révolutionnaire : M.  […] Cette première renaissance latine se voulait essentiellement méridionale, ne l’oublions point.

264. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Seconde partie. Poétique du Christianisme. — Livre cinquième. La Bible et Homère. — Chapitre III. Parallèle de la Bible et d’Homère. — Termes de comparaison. »

L’aquila des Latins vient manifestement de l’hébreu aouik, animal à serres. L’a n’est qu’une terminaison latine ; u doit se prononcer ou.

265. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Troisième partie. Beaux-arts et littérature. — Livre quatrième. Éloquence. — Chapitre II. Des Orateurs. — Les Pères de l’Église. »

Saint Ambroise est le Fénélon des Pères de l’Église latine. […] « Le style de Tertullien est de fer, disait Balzac, mais avouons qu’avec ce fer il a forgé d’excellentes armes. » Selon Lactance, surnommé le Cicéron chrétien, saint Cyprien est le premier Père éloquent de l’Église latine .

266. (1890) Conseils sur l’art d’écrire « Principes de composition et de style — Première partie. Préparation générale — Chapitre V. De la lecture. — Son importance pour le développement général des facultés intellectuelles. — Comment il faut lire »

S’ils ignorent le grec et le latin, qu’ils n’en prennent pas prétexte pour s’endormir dans l’incuriosité et l’ignorance. […] Les Latins nous donneront Lucrèce, et surtout son admirable Cinquième Livre, quelques discours de Cicéron, son Traité des Devoirs et ses Lettres, quelques traités de Sénèque et ses Lettres à Lucilius, Tite-Live, Tacite, Virgile, les beaux épisodes de Lucain, quelques morceaux d’Ovide et de Catulle. […] Je ne voudrais point qu’on négligeât la littérature chrétienne, grecque et latine.

267. (1885) Les œuvres et les hommes. Les critiques, ou les juges jugés. VI. « Jules Janin » pp. 137-154

Les Nymphes latines ne l’y dévorèrent point… de caresses, et après une longue accointance elles nous le renvoyèrent, l’esprit troublé, latinisant toujours, ne voulant pas démordre de ce diable de latin, radotant du latin, comme Panurge, dans ce français qu’il parlait si bien et qui suffisait à sa gloire… C’est là le seul échec de la partie qu’il joua contre la vie, cette horrible joueuse qui nous triche !

268. (1898) L’esprit nouveau dans la vie artistique, sociale et religieuse « II — Se connaître »

Gabriele d’Annunzio faisait un jour cet aveu naïf et typique à un rédacteur du New-York Hérald : « Je suis un pur Latin et chez tout individu de race différente j’aperçois un côté barbare. » Le Français dirait volontiers, lui aussi : « Je suis un pur Français, et tout ce qui n’est pas semblable à moi m’apparaît inférieur. » C’est l’inverse, on le voit, de la parole du personnage de Térence : Homo sum… L’individualisme national exclusif paraît être la plus forte vertu du Français qui, de bonne foi, se croit généralement d’une essence plus pure que les vulgaires humains. […] François Coppée qui s’est toujours fait le champion du sentimentalisme chauvin en notre pays, a exprimé vers la même époque, de non moins étranges sentiments : « En lisant, dans les journaux, le compte-rendu des imposantes cérémonies du Jubilé, à Londres, et surtout la description des formidables forces navales passées en revue par le prince de Galles, à Spithead, mon vieux cœur de Français et de Latin a été comblé de tristesse. […]  » Sa conclusion est également typique : « Pourtant, après ces fêtes où vient de se manifester, avec tant d’éclat, la force nationale de nos voisins, je ne puis m’empêcher de songer bien tristement aux luttes stériles qui nous épuisent aux périls extérieurs qui nous menacent ; et j’ai frissonné, en me demandant avec angoisse si, dans mes veines de Latin, je ne sentais pas couler le poison de la décadence. »‌ Voici enfin mon troisième texte dû à M. 

269. (1898) Introduction aux études historiques pp. 17-281

Des jeunes gens abordent les études d’histoire ancienne en n’ayant de la langue grecque et de la langue latine qu’une teinture superficielle. Combien de gens, sans avoir étudié le français et le latin du moyen âge, s’imaginent les savoir parce qu’ils entendent le latin classique et le français moderne, et se permettent d’interpréter des textes dont le sens littéral leur échappe, ou, quoique très clair, leur paraît obscur ? […] Pour interpréter Grégoire de Tours, ce n’est pas assez de savoir en général le latin ; il faut encore une interprétation historique spéciale pour adapter cette connaissance générale au latin de Grégoire de Tours. […] Vel signifie toujours ou en latin classique, il signifie et à certaines époques du moyen âge ; suffragium, qui veut dire suffrage en latin classique, prend au moyen âge le sens de secours. […] L’élève d’histoire a besoin d’un répertoire de faits historiques comme l’élève de latin d’un répertoire de mots latins ; il lui faut des collections de faits, et les précis scolaires ne sont guère que des collections de mots .

270. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Histoire de la querelle des anciens et des modernes par M. Hippolyte Rigault — II » pp. 150-171

Son verbe ne manque pas de marcher derrière, suivi d’un adverbe, etc. » L’abbé de Pons rend la pareille de cette moquerie au latin et aux phrases à la Cicéron, « à ces périodes immenses dont le sens vaste, mais confus, ne commence à se développer que lorsqu’il plaît au verbe dominant de se montrer, verbe que l’orateur romain s’obstine à faire marcher à la suite de toutes les idées qu’il aurait dû précéder selon l’ordre de nos conceptions ». […] Ce qui n’est pas clair, n’est pas français ; ce qui n’est pas clair est encore anglais, italien, (allemand,) grec ou latin. » L’abbé de Pons n’admet point que les langues soient autre chose que des systèmes de signes arbitraires établis pour le commerce mutuel des pensées. […] L’abbé de Pons concède le latin, « il n’approuverait pas qu’on le laissât ignorer à un galant homme ; mais les premières années de la vie lui paraissent trop précieuses pour devoir être sacrifiées à cet objet ». Ce n’est donc que quand le cours complet d’études tire sur sa fin, et que l’élève a appris ou passé en revue l’histoire, le théâtre et la littérature nationale, certains arts mécaniques, la logique, la physique, même la métaphysique, que le précepteur se dit : Mon disciple parle excellemment sa langue naturelle ; sa mémoire est ornée de tous nos meilleurs ouvrages, soit de prose, soit de poésie : cela est bon, mais cela ne lui suffit pas, nous allons apprendre la langue latine.

271. (1887) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Troisième série « La jeunesse du grand Condé d’après M. le duc d’Aumale »

A sept ans, il jouait au soldat en latin ; à onze ans, il avait terminé sa rhétorique (au collège Sainte-Marie, de Bourges) et « maniait le latin comme sa propre langue ». M. le duc d’Aumale nous donne quelques-unes des lettres latines qu’il écrivait à son père à cette époque. […] Je songe à ce que nous dit M. le duc d’Aumale du recueil de poésies latines que le duc d’Anguien offrait à son père en termes si élégants, et j’ai peur que recueil et dédicace ne soient partis des mêmes mains. « Le Père Pelletier, nous confesse avec esprit M. le duc d’Aumale, eut peut-être plus de part que son élève à la composition du recueil.

272. (1782) Plan d’une université pour le gouvernement de Russie ou d’une éducation publique dans toutes les sciences « Plan d’une université, pour, le gouvernement de Russie, ou, d’une éducation publique dans toutes les sciences — Plan, d’une université, pour, le gouvernement de Russie » pp. 433-452

Charlemagne, né dans un temps où lire, écrire et balbutier de mauvais latin n’était pas un mérite commun, fonda notre pauvre université ; il la fonda gothique, elle est restée gothique telle qu’il l’a fondée ; et malgré ses vices monstrueux, contre lesquels les hommes instruits de ces deux derniers siècles n’ont cessé de réclamer et qui subsistent toujours, on lui doit la naissance de tout ce qui s’est fait de bon depuis son origine jusqu’à présent. […] A ces raisons j’en ajouterai beaucoup d’autres non moins péremptoires pour renvoyer la connaissance du grec et du latin presque à la fin du cours des études d’une université. […] Le grec et le latin. […] Le grec et le latin.

273. (1874) Premiers lundis. Tome I « Tacite »

Qu’on essaie pourtant de traduire, et l’on sentira confusément qu’il y a, malgré la difficulté extrême de les saisir, bien des tours français répondant à ceux de l’historien latin, et que la traduction d’une phrase de Cicéron ou de Tite-Live, si elle est plus facile à commencer, est aussi plus difficile à finir. […] Burnouf, professeur d’éloquence latine au collège de France, tome IV.

274. (1895) Histoire de la littérature française « Troisième partie. Le seizième siècle — Livre II. Distinction des principaux courants (1535-1550) — Chapitre III. Les traducteurs »

Pelletier, Ramus, apporte sa théorie, plus ou moins influencée par l’image toujours présente du grec et du latin : surtout en matière d’orthographe, ils se livrent à leur fantaisie, selon que prédomine en eux le souci d’y exprimer l’étymologie ou la prononciation. […] La reine de Navarre lui fit donner une chaire de latin et de grec à l’université de Bourges ; il l’occupa douze années.

275. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Première partie — Section 21, du choix des sujets des comedies, où il en faut mettre la scene, des comedies romaines » pp. 157-170

Plaute et Terence, qui n’avoient rien dans la langue latine qui pût leur servir de guide, imiterent trop servilement les comedies de Ménandre et d’autres poëtes grecs, et ils jouerent des grecs devant les romains. […] Horace le plus judicieux des poëtes sçait beaucoup de gré à ceux de ses compatriotes qui les premiers introduisirent dans leurs comedies des personnages romains, et qui délivrerent ainsi la scene latine d’une espece de tyrannie que des personnages étrangers y venoient exercer.

276. (1824) Ébauches d’une poétique dramatique « Division dramatique. » pp. 64-109

Les anciens connaissaient peu cet art : au moins les Latins s’embarrassaient-ils peu de tenir ainsi l’esprit des spectateurs dans l’attente. […] J’estime donc que, de nos jours, on a nommé monologues, ce que les anciens appelaient en grec récit d’un seul personnage, par exemple, plusieurs églogues grecques et latines, et plusieurs discours du chœur dans les premières comédies, et que Striblin appelle monodies, mettant de ce nombre le discours d’Électre seule dans Euripide, et un autre encore d’elle-même dans Sophocle, bien qu’elle parle en la présence du chœur. […] Les deux comiques latins que nos modernes ont imités, ont inséré plusieurs monologues dans presque toutes les comédies que nous en avons ; mais comme il y en a quelques-uns qui sont faits à propos, et d’autres contre toute raison, je n’en veux pas faire ici le jugement en détail. […] Cette faute de faire dire ce qui arrivera, par un acteur qui parle seul et qu’on introduit sans raison, était très commune sur les théâtres grecs et latins : ils avaient cet usage, parce qu’il est facile. […] Les Latins se sont moins asservis à cette règle : on trouve dans Plaute des aparté d’une longueur insupportable ; mais Térence les fait beaucoup plus courts.

277. (1898) La cité antique

Les Latins leur donnaient le nom deLares, Mânes44, Génies. […] Le bâtard, l’enfant naturel, celui que les Grecs appelaient νόθος et les Latins spurius, ne pouvait pas remplir le rôle que la religion assignait au fils. […] Nous voulons parler de ce que les Latins appelaient gens et les Grecs γένος. […] Que l’on compare à tous ces mots ceux que nous avons l’habitude de traduire par famille, le latin familia, le grec οἴκος. […] La Grèce n’a jamais réussi à former un seul État ; ni les villes latines, ni les villes étrusques, ni les tribus samnites, n’ont jamais pu former un corps compact.

278. (1772) Bibliothèque d’un homme de goût, ou Avis sur le choix des meilleurs livres écrits en notre langue sur tous les genres de sciences et de littérature. Tome I « Bibliotheque d’un homme de goût. — Chapitre V. Des orateurs anciens et Modernes. » pp. 223-293

L’Abbé d’Olivet, à qui nous devons cette version, avoit un amour de préférence pour Ciceron, qu’il regardoit comme le prince de l’Eloquence latine. […] On sçait que c’est un choix de harangues directes & d’autres discours tirés des quatre principaux Historiens latins, de Salluste, Tite-Live, Tacite, & Quinte-Curce. […] C’est ce qu’on verra encore mieux que je ne saurois le dire dans le recueil cité, qui a été traduit par M. l’Abbé Millot, de l’Académie de Lyon, sous le titre de Harangues choisies des Historiens latins, à Lyon 1764. deux vol. […] Ce Jésuite ayant consacré toute sa jeunesse aux Belles-Lettres, sur-tout aux Latines, ne put pas étudier assez long-tems la Religion pour se faire le fond de connoissance qu’exige la chaire. […] Quoique le ton de ces sortes d’éloges ne doive pas être celui d’un discours oratoire, ils appartiennent cependant à ce genre d’éloquence que les Latins appellent Tempéré.

279. (1782) Plan d’une université pour le gouvernement de Russie ou d’une éducation publique dans toutes les sciences « Plan d’une université, pour, le gouvernement de Russie, ou, d’une éducation publique dans toutes les sciences — Essai, sur, les études en Russie » pp. 419-428

Pas autre chose que le latin et un peu de grec. […] A mesure qu’on monte, on lit les meilleurs auteurs, on compose, on apprend les éléments de la versification latine, on fait de la prose et des vers dans cette langue, tant bien que mal ; on étudie le grec. […] Je me garderai bien de dire à Sa Majesté Impériale s’il faut introduire en Russie l’étude du grec et du latin, ou destiner les écoles illustres, les gymnasia, à d’autres études : elle saura cela mieux que feu M. 

280. (1759) Observations sur l’art de traduire en général, et sur cet essai de traduction en particulier

Croit-on que notre poésie, avec ses rimes, ses hémistiches toujours semblables, l’uniformité de sa marche, et, si on l’ose dire, sa monotonie, puisse représenter la cadence variée de la poésie grecque et latine ? […] Peut-être est-il difficile de décider auquel des deux poètes on doit donner la préférence ; mais il est aisé de voir que les vers français ne sont nullement la traduction des vers latins. […] chacune a ses lois, qu’il n’est pas permis de changer ; parler latin en français, serait plutôt une entreprise bizarre qu’une hardiesse heureuse.

281. (1872) Nouveaux lundis. Tome XIII « Malherbe »

Patin, avant d’être établi et fixé dans la poésie latine, M.  […] En s’attachant sans réserve et sans mesure à l’Antiquité classique, latine et surtout grecque, ils le prirent trop haut ; ils ne purent soutenir jusqu’au bout leur gageure, ils se cassèrent la voix en voulant chanter sur un ton trop haut. […] De Caen il alla un an à Paris, et de là, sous son précepteur, aux universités de Bâle et de Heidelberg ; il y fit d’assez fortes études pour le latin et s’y acquit un fonds solide. […] Chez les Latins, avec Horace, l’Ode n’était déjà plus guère qu’une ode de cabinet, quoique le Carmen sæculare ait été chanté une fois par les jeunes Romains et Romaines. […] Il faut, pour avoir son jugement sérieux, corriger cet endroit badin par les meilleures et belles paroles, souvent citées, de sa lettre latine à Silhon.

282. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Poésies d’André Chénier »

Pour reconnaître, sans en laisser échapper aucune, toutes les imitations d’André Chénier, il a dû commencer par lire tous les poëtes grecs et la plupart des poëtes latins : savez-vous que le chemin vaut bien le but ? […] Il aime à redonner à un mot son sens primitif, qui souvent s’est oublié et perdu de vue dans l’acception figurée, et à lui rendre tous les sens qu’il avait en passant de la langue latine dans la nôtre, et que nos vieux écrivains lui avaient conservés.

283. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — M — Mistral, Frédéric (1830-1914) »

Ces vers sont mâles comme le latin, femelles comme l’italien, transparents pour le français comme des mots de famille qui se reconnaissent à travers quelque différence d’accent. […] Théophile Gautier Chacun a lu Mirèio, ce poème plein d’azur et de soleil, où les paysages et les mœurs du Midi sont peints de couleurs si chaudes et si lumineuses, où l’amour s’exprime avec la candeur passionnée d’une idylle de Théocrite, dans un dialecte qui, pour la douceur, l’harmonie, le nombre et la richesse, ne le cède en rien au grec et au latin.

284. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre II. Recherche des vérités générales » pp. 113-119

Les savants du xvie  siècle calquent le mot latin ; porticum devient portique ; blasphemare donne blasphémer ; ils ajoutent des lettres parasites ; ils écrivent aultre, coulteau, debvoir ; ils compliquent à plaisir l’orthographe. […] Comme le latin en ce temps-là est beaucoup plus écrit que parlé, comme ils consultent leurs yeux plutôt que leurs oreilles, la forme qui se rapproche le plus visiblement de la forme ancienne est celle qui se présente le plus aisément à leur pensée.

285. (1902) Les œuvres et les hommes. Le roman contemporain. XVIII « J.-K. Huysmans »

De choix et de réflexion, il préfère, par exemple, le latin barbare du Moyen Âge au latin du siècle d’Auguste, et met Lucain au-dessus de Virgile, qu’il déshonorerait de sa critique si un génie comme Virgile pouvait être jamais déshonoré.

286. (1904) Propos littéraires. Deuxième série

Prose latine et de la meilleure époque, vers latins et du meilleur coin, voilà ce qu’il faut retrouver, et voilà ce qu’il faut élaborer avec une curiosité diligente pour enchanter et pour fortifier les esprits. […] Qui parlait ou écrivait en latin était entendu de toute l’Europe. […] Discours latins et vers latins étaient des exercices éminemment alexandrins, surtout parce tour ingénieux et bien significatif qui consistait à mettre en discours latin et en vers latins de préférence des choses contemporaines. […] Le Latin amoureux des Grecs est déjà beaucoup plus humaniste. […] Il est très probable que par imitateurs il n’entend que ceux qui, Latins, imitent les Latins.

287. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre II. La Renaissance. — Chapitre III. Ben Jonson. » pp. 98-162

Plus on étudie les races et les littératures latines par contraste avec les races et les littératures germaniques, plus on arrive à se convaincre que le don propre et distinctif des premières est l’art de développer, c’est-à-dire d’aligner les idées en files continues, selon les règles de la rhétorique et l’éloquence, par des transitions ménagées, avec un progrès régulier, sans heurts ni sauts. […] Nous ne rencontrons point sur notre route d’images extraordinaires, soudaines, éclatantes, capables de nous éblouir et de nous arrêter ; nous voyageons éclairés par des métaphores modérées et soutenues ; Jonson a tous les procédés de l’art latin ; même quand il veut, surtout en sujets latins, il a les derniers, les plus savants, la concision brillante de Sénèque et Lucain, les antithèses équarries, équilibrées, limées, les artifices les plus heureux et les plus étudiés de l’architecture oratoire119. […] Il se gouverne et gouverne ses personnages ; il veut et sait tout ce qu’ils font et tout ce qu’il fait. —  Mais par-dessus les habitudes d’ordonnance latine, il possède la grande faculté de son siècle et de sa race, le sentiment du naturel et de la vie, la connaissance exacte du détail précis, la force de manier franchement, audacieusement, les passions franches. […] Là-dessus, on lui dit qu’il est fou, et l’on disserte devant lui sur sa maladie156. « Ce mal s’appelle en grec μανἱα, en latin insania, furor, vel ecstasis melancholica, c’est-à-dire egressio, quand un homme ex melancholico evadit fanaticus. […] » Sir Dauphine choisit deux fripons qu’il déguise, l’un en ecclésiastique, l’autre en légiste, qui se lancent à la tête des termes latins de droit civil et de droit canonique, qui expliquent à Morose les douze cas de nullité, qui font tinter à ses oreilles, coup sur coup, les mots les plus rébarbatifs de leur grimoire, qui se querellent, et qui font à eux deux autant de bruit qu’une paire de cloches dans un clocher.

288. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Seconde partie — Section 13, qu’il est probable que les causes physiques ont aussi leur part aux progrès surprenans des arts et des lettres » pp. 145-236

Au contraire, le plus grand de leurs défauts est de les avoir imitez trop servilement ; c’est d’avoir voulu parler grec et latin avec des mots françois. […] Ausonne et Claudien, qui voulurent ranimer la poësie latine ne rendirent au jour qu’un phantôme qui lui ressembloit. […] Tacite qui écrivoit sous Trajan, est le dernier historien latin. […] Soixante années après Auguste, Quintilien écrivoit déja sur les causes de la décadence de l’éloquence latine. […] Tout le monde sçait dès le college que les plus grands poëtes romains, ou, pour parler plus juste, que tous les grands poëtes latins, à l’exception de deux ou trois, fleurirent dans le siecle d’Auguste.

289. (1857) Cours familier de littérature. III « XIIIe entretien. Racine. — Athalie » pp. 5-80

L’Église, qui maintenait l’usage du latin, l’avait remplie de latinité. […] La pompe du grec, réimportée en Italie par Lascaris sous les premiers Médicis, et réimportée d’Italie en France par Ronsard et ses disciples, lui avait donné l’ampleur, l’image et la grâce refusées par la nature au latin. […] Les premiers vers qu’il composa, à l’imitation des lyriques grecs et latins, sur la solitude des forêts, sur les charmes de la nature, sur la paix religieuse du monastère de Port-Royal ; sur les hymnes traduites du Bréviaire, et enfin son ode sur le mariage du roi, intitulée la Nymphe de la Seine, sont des exercices très ordinaires d’un novice de l’art, et des imitations très pâles des odes de David ou de Pindare. […] La Fontaine, esprit naïf, gracieux, discinctus, pour nous servir de l’expression latine qui rend seule le débraillement de ce caractère, faisait déjà partie, souvent inaperçue, toujours muette, de cette société de grands esprits. […] Nous montrerons ce que ce génie éclectique et appropriateur a emprunté à ses émules de l’antiquité grecque et latine, et en quoi le sublime imitateur a égalé et surpassé ses modèles.

290. (1867) Nouveaux lundis. Tome VII « Corneille. Le Cid, (suite.) »

Rodrigue avait appelé et vaincu un chevalier navarrais en combat singulier : de là ce titre de Campéador ou Campi-doctor, comme on disait dans les chansons latines ; car c’est une chanson latine qui, la première, nous apprend cet exploit. […] Voir les réflexions en tête de la chanson latine sur le Cid, publiée par lui, pages 284 et suiv. du volume intitulé : Poésies populaires latines du Moyen-Age, 1847.

291. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre troisième. L’esprit et la doctrine. — Chapitre II. Deuxième élément, l’esprit classique. »

On exclut du discours la plupart des mots qui servent à l’érudition spéciale et à l’expérience technique, les expressions trop latines ou trop grecques, les termes propres d’école, de science, de métier, de ménage, tout ce qui sent de trop près une occupation ou profession particulière et n’est pas de mise dans la conversation générale. […] Elle est internationale comme autrefois le latin, et il semble qu’elle soit désormais l’organe préféré de la raison. […] Descartes déprime « les simples connaissances qui s’acquièrent sans le secours du raisonnement, telles que les langues, l’histoire, la géographie, et en général tout ce qui ne dépend que de l’expérience… Il n’est pas plus du devoir d’un honnête homme de savoir le grec et le latin que le langage suisse et le bas-breton, ni l’histoire de l’empire romano-germanique que celle du plus petit État qui se trouve en Europe ». […] Vaugelas, Remarques sur la langue française : « C’est la façon de parler de la plus saine partie de la cour conformément à la façon d’écrire de la plus saine partie des auteurs du temps… Il vaut mieux consulter les femmes et ceux qui n’ont point étudié que ceux qui sont bien savants en la langue grecque et en la latine. » 356.

292. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « L’abbé de Marolles ou le curieux — I » pp. 107-125

Il a composé des traductions sans nombre ; il a mis en français, en prose ou en vers, Lucain, Virgile, Ovide, et indistinctement tous les poètes latins, le Nouveau Testament, etc. ; en assemblant toutes les éditions et réimpressions qu’il en a faites, cela irait bien à 60 ou 70 volumes, dont plusieurs imprimés avec luxe. […] Élevé par une mère indulgente et tendre, il apprenait tant bien que mal le latin au logis sous un précepteur ; il aimait surtout à lire d’anciens romans français et les autres livres qui se rencontraient alors dans une bibliothèque de campagne assez bien garnie. […] Parlant quelque part du jeu de tarots, que la princesse Marie aimait beaucoup, dont elle avait renouvelé et diversifié les règles (et elle avait même chargé Marolles de les rédiger et de les faire imprimer), le bon abbé remarque que c’est presque le seul jeu auquel il se soit plu, bien qu’il ne fût heureux ni à celui-là ni à aucun autre : « Mais depuis que l’exaltation de cette princesse, ajoute-t-il, m’a privé du bonheur de la voir, ni je n’ai plus aimé ce jeu, ni je ne me suis plus soucié de voir le grand monde, et je me suis contenté de mes livres et de recevoir quelques visites de peu de mes amis. » À l’arrivée des ambassadeurs polonais envoyés pour demander la princesse en mariage, et dès leur première visite confidentielle à l’hôtel de Nevers, ce fut Marolles qui les alla recevoir au bas du degré et leur fit en latin un compliment, auquel ils répondirent dans la même langue.

293. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Charles-Victor de Bonstetten. Étude biographique et littéraire, par M. Aimé Steinlen. — I » pp. 417-434

J’avais seulement une vingtaine de bons livres que je relisais sans cesse, comme Le Spectacle de la nature (de Pluche), Batteux, quelques poètes allemands, latins et français, surtout les œuvres philosophiques de Cicéron. Né dans une ville où l’on ne savait ni l’allemand ni le français, je ne savais aucune langue ni même le latin, qu’il me fallut apprendre tout seul, quoiqu’une première éducation eût été, comme c’était l’usage, employée à ses tristes et inutiles rudiments. […] Il m’explique en grec et en latin « les doux, résistants et amoureux délais » de notre grand-mère Ève.

294. (1863) Nouveaux lundis. Tome I « Essais de politique et de littérature. Par M. Prevost-Paradol. »

Entré à l’École normale au sortir d’études brillantes et où le tour bien français de son talent se marquait déjà, moins latin d’abord et bien moins grec que d’autres, il en vint sans trop d’effort, au bout d’un an, à être le premier de sa volée, comme on disait autrefois, et l’un des princes, unanimement reconnus, de sa génération de jeunesse. […] Sa thèse latine eut pour objet Swift, sa Vie et ses Œuvres. Il avertit dans la préface qu’il écrivit d’abord en français et la traduisit ensuite en latin « pour répondre aux exigences du doctorat » ; mais c’est sous sa première forme qu’il la donne au public.

295. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « Louis XIV et le duc de Bourg, par M. Michelet. (suite.) »

Il apprit le latin jusqu’à traduire Tacite tout entier. […] On en a le texte ou le corrigé dans les Œuvres de Fénelon ; et on y sent en effet, sous le latin, la phrase svelte et courte, un peu trop courte et pas assez liée pour le latin, de Fénelon même. — L’abbé de Polignac, qui venait de composer son poème de l’Anti-Lucrèce, souhaita que le jeune prince le lût en manuscrit.

296. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « M. EDGAR QUINET.— Napoléon, poëme. — » pp. 307-326

Toutefois, Français de la tradition grecque et latine rajeunie, mais non brisée, ami surtout de la culture polie, studieuse, élaborée et perfectionnée, de la poésie des siècles d’Auguste, et, à leur défaut, des époques de Renaissance, le lendemain matin qui suit le jour de cette lecture, je reprends (tombant dans l’excès contraire sans doute) une ode latine en vers saphiques de Gray à son ami West, une dissertation d’Andrieux sur quelques points de la diction de Corneille, voire même les remarques grammaticales de d’Olivet sur Racine ; et aussi je me mets à goûter à loisir, et à retourner en tous sens, au plus pur rayon de l’aurore. le plus cristallin des sonnets de Pétrarque. […] Antiquaire par son érudition allemande, poëte et philosophe par ses vues profondes et intimes sur l’histoire de l’humanité, familier avec les idées des Niebühr et des Gœrres, épris de l’imagination pittoresque de l’auteur de l’Itinéraire, il aborde la Grèce et l’interroge par tous les points, sur son antiquité, sur ses races, sur la nature de ses ruines, sur les vicissitudes de ses États, sur ses formes de végétation éternelle ; il saisit, il entend, il compose tous ces objets épars ; il les enchaîne et les anime dans un récit vivant, fidèle, expressif, philosophique ou lyrique par moments, selon qu’il s’élève aux plus hautes considérations de l’histoire des peuples, ou selon qu’il retombe sur lui-même et sur ses propres émotions ; c’est une œuvre d’art que ce récit de voyage : le sens historique et le sens des lieux y respirent et s’y aident d’un l’autre ; l’harmonie y règne ; le souffle du dieu Pan y domine ; l’interprétation du passé, depuis les époques cyclopéennes et homériques jusqu’à la féodalité latine, y est d’un merveilleux sentiment, et elle pénètre de toutes parts dans l’âme du lecteur, sinon toujours par voie claire et directe, du moins à la longue par mille sensations réelles et continues, comme il arriverait à la vue des ruines mêmes et sous l’influence du génie des lieux.

297. (1895) Histoire de la littérature française « Troisième partie. Le seizième siècle — Livre III. Poésie érudite et artistique (depuis 1550) — Chapitre II. Les tempéraments »

Nous remarquons ainsi les témérités de Baïf, qui forge des comparatifs et des superlatifs à la manière latine, qui tente des vers métriques sur le patron des vers latins : ainsi le génie propre de la langue, le caractère original de la versification française sont méconnus. […] Les nouvelles générations arrivaient, nourries dans leurs collèges de Virgile et d’Horace, n’ayant parlé, écrit, étudié qu’en latin.

298. (1895) Histoire de la littérature française « Quatrième partie. Le dix-septième siècle — Livre I. La préparations des chefs-d’œuvre — Chapitre III. Trois ouvriers du classicisme »

Il a essayé, selon ses propres paroles, « de civiliser la doctrine en la dépaysant des collèges et la délivrant des mains des Pédants290 » ; à ceux qui n’étaient pas des savants, et ne lisaient latin ni grec, aux femmes, il a offert la substance de l’antiquité. […] Il a une phrase longue, enchevêtrée d’incidentes et de subordonnées, alourdie de relatifs et de conjonctions, qui sent enfin le latin et le collège. […] Voilà pourquoi il écrit en français, non pas en latin : le bon sens n’est pas le privilège des savants qui, au contraire, sont souvent en ces matières plus aveuglés que les autres par un faux respect des anciens.

299. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Légendes françaises. Rabelais par M. Eugène Noël. (1850.) » pp. 1-18

On a d’Étienne Dolet, le même qui fut brûlé vif pour crime d’hérésie, une jolie pièce de vers latins sur Rabelais, médecin et anatomiste. […] Après toutes les folies du début, la naissance de Gargantua par l’oreille gauche, la description mirifique de sa layette, les premiers signes qu’il donne de son intelligence et certaine réponse très coquecigrue qu’il fait à son père et à laquelle celui-ci reconnaît avec admiration le merveilleux entendement de son fils, on lui donne un maître, un sophiste en lettres latines ; et c’est alors que commence la satire la plus ingénieuse et la plus frappante de la mauvaise éducation de ce temps-là. […] Je me suis demandé quelquefois ce qu’aurait pu être Molière érudit, docteur, affublé de grec et de latin, Molière médecin (figurez-vous donc le miracle !)

/ 1472