Ici le cœur s’en mêle ; il y a image ; l’expression s’est colorée au souffle de l’âme. […] Un des peintres les plus favorables à Marie-Antoinette, Senac de Meilhan, a dit d’elle que son esprit n’avait rien de brillant et qu’elle n’annonçait à cet égard aucune prétention ; « Mais il y avait en elle, observe-t-il, quelque chose qui tenait à l’inspiration et qui lui faisait trouver au moment ce qu’il y avait de plus convenable aux circonstances ainsi que les expressions les plus justes : c’était plutôt de l’âme que de l’esprit que partaient alors ses discours et ses réponses. » Ici, elle n’en est pas encore à la représentation ; elle n’est que Dauphine et n’a pas à faire de ces réponses qu’on remarque.
Il ne lui avait jamais été permis de développer et de perfectionner comme il aurait fallu son premier talent, ce don d’expression dramatique qu’elle possédait pourtant à un degré supérieur, mais qui dépendait trop du cadre, des circonstances, et aussi des moyens physiques. […] Bien peu de familles auraient eu, comme vous, cette manière élevée et noble de penser et de sentir, qui met la plus grande gloire d’une personne si chère, dans l’expression la plus intime de la vérité. — Vous et votre excellent fils, vous êtes pour moi, à cet égard, des modèles, et tels que je n’en ai pas rencontré deux fois dans ma carrière de critique littéraire et de biographe.
Cependant, si Béranger est sincère dans les expressions de ses lettres, il n’y aurait rien de cela ; mais je suis maintenant craintive et méfiante, et je n’ose plus faire un pas, même quand le cœur me le dit. […] C’était bien là mon idée, en la montrant et si sage et si folle ; mais votre remarque me prouve que je ne l’ai pas assez expliquée. — Je ferai attention aussi, en corrigeant les épreuves, aux expressions louches et aux mauvaises constructions que vous m’avez signalées.
. — Dans toutes les actions de ma vie, il y a toujours eu quelque chose qui ressortissait de la maternité. » Mademoiselle de Clermont, à Chantilly, ne se fût pas exprimée de la sorte en parlant à M. de Meulan ; mais Mlle de Liron était de sa province, et l’accent qu’elle mettait à ces expressions familières ou inusitées les gravait tellement dans la mémoire, qu’on a jugé apparemment nécessaire le nous les transmettre. […] On ne lit toute cette fin que les yeux noyés de larmes aveuglantes, suivant une belle expression que j’y trouve.
Enfin, quand, huit ou neuf mois après la rencontre de l’église, le masque tombe et qu’elle le juge déjà ou croit le juger, elle écrit : « Tu ne saurais croire combien il m’a paru singulier ; ses traits, quoique les mêmes, n’ont plus la même expression, ne me peignent plus les mêmes choses. […] Et c’est parce que les générations finissantes de ce dix-huitième siècle tant dénigré croyaient fermement à ces principes dont Mme Roland nous offre la plus digne expression en pureté et en constance, c’est parce qu’elles y avaient été plus ou moins nourries et formées, que, dans les tourmentes affreuses qui sont survenues, la nation si ébranlée n’a pas péri90.
Pourtant, dans un récit historique, un peu de Tacite de temps en temps ne ferait pas mal, si l’on entend par là une réflexion forte, concentrée, une expression figurée et profonde qui rassemble toute une situation et qui la juge, un de ces traits qui percent à jour un homme et le qualifient éternellement. […] Dans le style, l’écrivain n’a nulle part flatté le goût du temps pour les effets et pour la couleur, et on pourrait même trouver qu’il en a tenu trop peu de compte quelquefois ; mais c’est une satisfaction bien rare pour les esprits sérieux et judicieux que celle de lire une suite de volumes si aisés et si pleins, sortis tout entiers du sein du sujet et nous le livrant avec abondance, d’une simplicité de ton presque familière, ou jamais ne se rencontre une difficulté dans la pensée, un choc dans l’expression, et où l’on assiste si commodément au spectacle des plus grandes choses.
» Pressé sur ses raisons, il ne fit pas difficulté de les dire, et une longue amitié s’ensuivit, durant laquelle le philosophe modeste n’épargna pas d’utiles conseils, des conseils qui se rapportaient tous à la vérité, au naturel, à la propriété de l’expression. […] Une imagination vive, brillante, tours fins et délicats, expressions nouvelles et toujours heureuses, en font l’ornement.
En causant, elle avait le don du mot propre, le goût de l’expression exacte et choisie ; l’expression vulgaire et triviale lui faisait mal et dégoût : elle en restait tout étonnée, et ne pouvait en revenir.
Bacon, le grand moraliste, est presque un poète par l’expression. On n’en dira pas autant de lord Chesterfield, et cependant il a plus d’imagination dans les saillies et dans l’expression de son esprit qu’on n’en rencontre chez Saint-Évremond et chez nos fins moralistes en général.
C’est alors qu’elle place des maximes sages, des contes piquants, de la morale anecdotique et en action, ordinairement aiguisée par quelque expression ou quelque image bien familière. […] Il n’est pas jusqu’à Thomas, qu’on donne pour emphatique, qui ne soit très agréable et très heureux d’expression au sujet de Mme Geoffrin.
C’est ainsi encore qu’il fera dire à un solliciteur, dans L’Intrigant malencontreux : « Monsieur Mitis, tâchez donc de placer mon fils dans un bureau ; vous me rendrez un grand service : il n’est bon à rien du tout. » Et ceci encore, dans le proverbe de Madame Sorbet, à qui on propose de jouer la comédie : « La comédie, je crois que nous la jouerions fort mal tous les deux ; nous avons trop de franchise, trop de naturel pour faire jamais de bons acteurs. » Marmontel, définissant un genre de finesse analogue à celui-ci, l’appelle une certaine obliquité dans l’expression qui donne à la pensée un air de fausseté au premier abord. […] Il vivra dans la série de nos comiques, comme l’expression fidèle des mœurs et de la société d’un moment ; plus près, je le crois, de Picard que de Carmontelle, et donnant encore mieux l’idée d’un La Bruyère, mais d’un La Bruyère féminin et adouci, lequel, assis dans son fauteuil, se serait amusé, sans tant d’application et de peine, à détendre ses savants portraits, à mettre de côté son chevalet et ses pinceaux, et à laisser courir ses observations faciles en scènes de babil déliées et légères.
Je préparais les esprits à assister à une espèce d’action dramatique plutôt qu’à une séance de législateurs ; je peignais les personnages avant de les mettre aux prises ; je rendais tous leurs sentiments, mais non pas toujours avec les mêmes expressions ; de leurs cris je faisais des mots, de leurs gestes furieux des attitudes, et, lorsque je ne pouvais inspirer de l’estime, je tâchais de donner des émotions. […] On retrouve quelques-unes de ces pensées et de ces expressions tout à fait poignantes dans la brochure qu’il publia à Bruxelles en mars 1793 (Considérations sur la nature de la Révolution de France, et sur les Causes qui en prolongent la durée), et dans laquelle il dit à tous de grandes vérités.
il l’a cependant trouvé », s’écria le digne érudit avec une expression de physionomie singulière qui marquait l’étonnement ; son sourcil gris brillait d’un éclair de malice narquoise et de raillerie ; il y avait, même dans ce mot d’éloge qui lui échappait, le dédain du Provençal pour le Picard. « Il l’a cependant trouvé ! […] Prenez note de l’expression, et ajoutez-la, si vous le voulez, en marge au Traité du sublime de Longin.
Doué d’une taille avantageuse et de qualités physiques auxquelles il mit toujours du prix, il sut, dès ses premiers pas, se faire compter dans le monde par sa tenue, son calme, par une manière d’être qui annonçait déjà un caractère arrêté, par beaucoup d’aperçus dans l’esprit, « d’autant plus originaux que la plupart étaient sans solution » ; il les faisait valoir encore par une tournure d’expression précise et neuve. […] Fiévée est quelquefois subtil et tortillé d’expression, et par là obscur.
Une autre raison enfin, et qui est particulière à cet ordre d’esquisses, c’est qu’en écrivant dans les journaux, on est toujours quelque peu journaliste par un endroit ; on cherche l’à-propos, on attend l’occasion, et, sans s’attacher précisément à ne parler que des ouvrages encore tout chauds de la forge (autre expression de Montesquieu), on désire du moins que quelque circonstance naturelle nous ramène aux ouvrages anciens et y dirige l’attention. […] On a dans ces paroles la mesure de la croyance de Montesquieu et de son noble désir : jusque dans l’expression de ce désir, il se glisse toujours cette supposition que, même quand la chose n’existerait pas, il serait mieux d’y croire.
Il excelle à retremper ainsi les expressions et à leur redonner toute leur force primitive, ce qui permet à son style d’être court, fort, et d’avoir l’air simple. […] Il y atteint dans tout ce volume, et, en restant dans son ordre de considérations, il a, à tout moment, de ces expressions à la Bossuet et à la Corneille.
L’expression logique de la première loi est le principe d’identité, qui préside à tout raisonnement ; l’expression logique de la seconde loi est le principe de raison suffisante.
Il est de la race du grand poète, impie au stoïcisme, qui disait : « Je les attends, les plus enragés stoïques, à leur première chute de cheval. » Ce n’est qu’un épicurien, sentant trop la douleur pour la nier, — mais un épicurien de la Pensée, un voluptueux de l’Idéal et de la Forme, ayant la sensibilité nerveuse de la femme et l’imagination des poètes qui s’ajoute à cette sensibilité terrible… Et, dans les livres où il parle de ses souffrances avec une expression tout à la fois délicieuse et cruelle, il ne songe pas une minute à se poser comme un résistant de force morale et de volonté héroïque… En ces livres, parfumés de douleur, il n’est que ce qu’il a été toute sa vie, dans ses livres de bonheur et de jeunesse, — c’est-à-dire bien moins une créature morale qu’une charmante créature intellectuelle, intellectuelle jusqu’au dernier soupir. […] Mais ses sourires, ce sont des merveilles d’expression et de pensée, qu’on ne lit pas sans attendrissement ou sans cette belle colère de Voltaire, qui disait : « Je donnerais toute une hécatombe de sots, pour épargner un rhume de cerveau à un homme d’esprit. » Et, certes !
Nul ne sait mieux que lui le sens de cette expression cicéronienne : De alieno judicio pendere.
L’expression, avant tout, y est large et abondante, jusqu’à paraître un peu vague et diffuse.
Mais, si toutes les conséquences de l’art nouveau ne sont pas tirées, s’il reste encore des applications possibles au gré des génies inventeurs, si, parmi les idées en jeu dans la société, il en est quelqu’une, noble et féconde, qui attende encore son organe éclatant et son expression éternelle, rien ne s’arrête ; la révolution que les uns ont entamée se consomme par d’autres, et le siècle accomplit jusqu’au bout sa destinée de gloire.
Qui veut comprendre un poète, doit le suivre dans l’ordre d’idées où son instinct le place de préférence : avant de juger son expression, il faut étudier les aspects qu’il a su découvrir, hors des voies battues par la foule.
Son style, au reste, la liberté de ses tours, sa nouveauté et son éclat d’expression, l’acception excellente et parfaitement française des mots qu’il emploie et qu’il découvre presque, au sein de la langue du xviie siècle, ces qualités si rares, et que M.
Le choix des détails significatifs, le naturel et la propriété de l’expression y sont admirables.
Ce primitif avait reçu de la nature le don de l’expression, qu’il perfectionna, auprès de son vieux maître, par une discipline de dix années.
Confessons, nous, les aînés, que ce néo-romantisme des jeunes gens a peut-être bien élargi et attendri en nous le vieil esprit positiviste hérité de la littérature du second Empire et qui eut, voilà quinze ans, son expression suprême dans le naturalisme.
Évidemment, il assigne à la poésie le rôle d’une musique spéciale, et la veut consacrée à l’expression d’états de l’âme spéciaux : de ces larges et troubles coulées d’images, par instants envahissant l’esprit, incapables d’être notées dans une prose, et constituant, pour la psychologie, l’essence même des émotions… La forme musicale de M.
Ç’a toujours été le droit des artistes, parvenus, tard ou tôt, à la plus conforme expression de leur tempérament, de ne point chercher encore une orientation différente.
On aimait en lui l’expression vraie de la façon de sentir d’une classe de la société et le naïf effort du demi-lettré pour créer un instrument à sa pensée.
Cet esprit, malgré l’appareil de réflexion & de dignité qu’il s’efforce de se donner, n’a jamais pu se débarrasser d’un je ne sais quel air de petitesse qui en décrédite les créations ; ces connoissances, pour être annoncées d’une maniere affectée & présomptueuse, tombent inévitablement dans les disgraces attachées â l’ignorance & au pédantisme ; ce talent, pour n’avoir pas été sagement cultivé, pour afficher trop de confiance, décele continuellement sa foiblesse, & révolte plus qu’il n’attache ; en deux mots, on peut, d’après l’expression de son premier Maître, M. de Voltaire, comparer l’esprit de M. de la Harpe, à un four qui ne cuit point.
Jammes a une profondeur, une pureté, une force de mélancolie dont l’expression, tout en m’offensant, m’impressionne ; c’est un poète incomplet.
Les personnes qui veulent bien lire ce qu’il écrit savent depuis longtemps que, s’il admet quelquefois, en de certains cas, le vague et le demi-jour dans la pensée, il les admet plus rarement dans l’expression.
Vavasseur ont fait sentir toute l’indécence de ces expressions.
Il le croyoit plus du ressort des discours académiques, plus fait pour éguiser l’esprit des jeunes gens, pour exercer leur imagination, & leur apprendre à construire leurs phrases avec art, & à symmétriser leurs expressions.
C’est pourtant cet enthousiasme, ces ornemens, cette sublimité de pensées, ce faste d’expression, tous ces ressorts puissans dont Démosthène & Cicéron firent usage, que nos avocats ont cru, pendant plus de quatorze siècles, devoir imiter.
Il en est ainsi pour l’âme et le cerveau : celui-ci pourra être dans un grand nombre de cas, et à juger les choses très grossièrement, la mesure et l’expression de celle-là ; mais il arrivera aussi que les rapports seront renversés, et, que l’on ne trouvera pas dans l’instrument une mesure exacte pour apprécier la valeur de l’artiste intérieur qui lui est uni.
Quiconque, selon l’expression des Pères, n’eut avec son corps que le moins de commerce possible, et descendit vierge au tombeau ; celui-là, délivré de ses craintes et de ses doutes, s’envole au Lieu de vie, où il contemple à jamais ce qui est vrai, toujours le même et au-dessus de l’opinion.
Il en résulte un ébranlement, un froissement incroyable pour l’âme : car lorsque, exalté par la pensée, l’esprit s’élance dans les plus hautes régions, soudain l’expression, au lieu de le soutenir, le laisse tomber du ciel en terre, et le précipite du sein de Dieu dans le limon de cet univers.