il ne s’en rend pas lui-même très-bien compte, il est parti par ennui, par amour, par coup de tête, comme il partira bien des fois dans la suite et dans des situations plus décisives. […] Tout d’un coup je me demandai : Mais qui est donc cette personne ? […] Je vous avouerai que je trouve bien un peu dur que vous ayez passé tout d’un coup du charmant heural à une correspondance ordinaire, et que vous ne commenciez vos lettres qu’en recevant les miennes et pour les faire partir tout de suite. […] Sa santé se délabre, son physique si grêle souffre déjà ; cette taille, qui était tout à coup devenue élégante, reprend aujourd’hui cette courbure que Mlle Moulat188 a si bien saisie. […] L’épigramme s’échappe malgré lui, et il donne un petit coup de griffe à la femme auteur.
Ç’a été un coup de partie bien mené, et qui m’a fait honneur. […] Il en est d’essentielles et qui reproduisent du coup l’objet. […] Tout d’un coup, cette aventure, entre vos mains de poète, s’amplifie, elle se creuse. […] Il semble bien que chez lui le tableau mental se dressait d’un coup et se substituait aux impressions environnantes, jusqu’à les supprimer. […] Du même coup, il a senti que ces forces victorieuses lui étaient inférieures en cela qu’il les pensait.
Sa pensée a une peau qui tient à la chair et point de robe à ramages ; et celle de Pascal non plus : elle est toute nue et parfois suante de fièvre, jaunie par le jeûne, ou tout d’un coup rouge d’un sang qui fuit le cœur et le laisse glacé. […] Albalat nous conseille une aimable lenteur et sa propre méthode, qui est de ne pas prendre de notes, mais de « souligner d’un coup de crayon les passages à retenir ». […] Tout à coup, oubliant Homère, M. […] Sans être du premier coup définitive, la sentence est grave, car elle est sincère. […] A moins qu’après l’Empire premier on ne remonte d’un coup à l’un des Louis, ou au gothique ou à l’antique.
Dupin en le recevant à l’Académie, vous avez commencé. » Ce qu’on aurait pu dire aussi, c’était l’impression vive et incomparable qu’après des années de labeur, de dégoût et de souffrance, il avait tout d’un coup ressentie à la vue des premiers actes et des premiers soleils du Consulat.
Quel autre coup m’est réservé ?
La bonté du cœur, la pitié, la soif de sacrifice peuvent agrandir, élargir brusquement, violemment l’esprit, et en faire jaillir quelque soudaine lumière, comme sortit un cri désespéré de la bouche de ce prince muet qui vit son père menacé d’un coup mortel.
Cet aveu leur enlèvera peut-être de leur solennité, les fera, après coup, plus modestes et familiers… Et puis, que voulez-vous ?
Alphonse de Lamartine À Madame Desbordes-Valmore : ………………………………… Sous une voile dont l’orage En lambeaux déroulait les plis, Je voyais le frêle équipage Disputer son mât qui surnage Aux coups des vents et du roulis.
Catulle Mendès : Elle marchait — avec un lys — dans chaque main… Des prisonniers — cloués au mur — à coups d’épieu… comme ceux de François Coppée : Le lévrier — qui dort en rond — sur le tapis, obéissaient toujours au vieux précepte de Boileau et laissaient subsister la césure au milieu du vers.
De paroles en paroles, ils en viennent aux injures, aux menaces, & ne préviennent les coups, qu’en se quittant brusquement, pour ne se revoir de long-temps.
Tantôt un trépas se faisait prévoir par les tintements d’une cloche qui sonnait d’elle-même, tantôt l’homme qui devait mourir entendait frapper trois coups sur le plancher de sa chambre.
Il était très capable de trouver du premier coup les choses les plus sublimes ; mais, ses ratures nous le démontrent, il en a trouvé d’aussi belles par le procédé, le travail, le métier, les combinaisons de l’exécution.
Ce champ, ils l’ont assez retourné, assez saccagé… Ils n’ignoraient pas ce qu’en France, le pays du bon sens et du fait, on peut toujours tirer de l’histoire, et que faussée, c’est l’arme la plus terrible encore, comme la balle qui, mâchée, fait les coups plus mortels… Trafiquants libres de l’histoire, plus libres que l’homme qui vend la plus chétive denrée et qui pour cela est obligé à prendre patente, ils ne se contentèrent point de cette liberté, et ils versèrent le mépris de l’historien libre sur le fonctionnaire de l’histoire, — sur l’historiographe.
Je suis pourtant revenu (non sans mal) du coup affreux que m’a porté Saint Antoine. […] Quand Louvel a voulu tuer le duc de Berry, il a pris une carafe d’orgeat et il n’a pas manqué son coup. […] La grille tout à coup craqua. […] Le coup, paraît-il, vient du ministre de l’Intérieur. […] Il fallait quelque chose de plus profond et de plus pathétique, un coup de génie divin plus inventif.
» Avec Verlaine ensuite, un singulier compagnonnage que des coups de revolver terminent à Bruxelles. […] Toujours est-il qu’à Bruxelles, un jour, Verlaine tira sur Rimbaud deux coups de revolver. […] Empêcher l’âme de tomber dans cette torpeur, l’entretenir toujours fervente, c’est le rôle de l’Art, et il n’y réussit que par de « minutieux et subtils coups de fouet, le mouvement, le nouveau ». […] À vrai dire, l’Ecole Romane n’est pas une invention subite de Moréas, que l’on voit tout à coup surgir avec le Pèlerin passionné. […] Les cavales, qui traînaient à travers la nuit leurs chariots lourds et tumultueux, tout à coup disparaissent.
À la représentation toute nue de l’instinct il a substitué l’étude de la passion : ç’a été chez lui le coup de génie. […] Elle s’est trouvée tout d’un coup sans appui et sans guide. […] Mais au contraire, ne se souciant que de frapper fort et de redoubler ses coups, M. […] Il s’est révélé soudainement par des coups d’audace qui ont été aussi des coups d’éclat. […] Du coup nous entrons dans la vie, nous sommes dans le plein de la réalité.
Cette épître atteignit du premier coup le diapason du ton auquel furent montées la plupart des critiques venues dans la suite. […] A part ce cri éloquent de pitié qu’elle fit entendre pour la reine, à part une épître en vers au Malheur, son talent observa un religieux silence : on entendait de loin, aussi sourds et pressés qu’un bruit de rames sur le lac, les coups réguliers de la machine sur l’échafaud. […] Dans le volume de morceaux détachés que Mme de Staël publia en 95, on rencontre, outre trois nouvelles qui datent de sa première jeunesse, un charmant Essai sur les Fictions,composé plus récemment, et une Epitre au Malheur ou Adèle et Edouard, petit poëme écrit sous le coup même de la Terreur. […] On en fera connaître quelques fragments, où l’auteur a traité d’une manière neuve les mêmes questions que Mme de Staël. » Ainsi se posait du premier coup l’espèce de rivalité de Mme de Staël et de M. de Chateaubriand, qui furent, à l’origine, divisés surtout par leurs amis. […] Tout d’un coup j’entendis deux voix ; la conversation était animée, secrète, et se rapprochait.
De même Valéry ne conçoit la poésie que comme un cas particulier de la littérature, et la littérature elle-même que comme un cas particulier, une preuve (un coup de dés n’abolissant point le hasard) d’une réalité spirituelle et cosmique qui dépasse la littérature, qui vient de bien plus loin et couvre un champ bien plus vaste. […] Enfin, avec le culte des lettres, une vive répugnance à mener la vie de l’homme de lettres. « Celui qui n’a pas regardé dans la blancheur de son papier une image troublée par le possible, et par le regret de tous les signes qui ne seront pas choisis… celui-là ne connaît pas davantage, quel que soit d’ailleurs son savoir, la richesse, et la ressource de l’étendue spirituelle qu’illumine le fait conscient de construire. » Construire, c’est lancer le coup de dés qui n’abolit pas le hasard, mais dont l’étincelle illumine le hasard, éclaire l’infinité des coups de dés possibles. […] Valéry a donné, dans une lettre que publièrent les Marges, une magnifique glose sur Un coup de Dés jamais n’abolira le hasard. Il montre Mallarmé étudiant « la page, unité visuelle..., l’efficace des distributions de blanc et de noir, l’intensité comparée des types… Il introduit une lecture superficielle, qu’il enchaîne à la lecture linéaire ; c’était enrichir le domaine littéraire d’une deuxième dimension. » Un Coup de Dés, nous dit Mallarmé, avait été conçu « sous l’influence de la musique entendue au concert. » Architecture et musique figurent aux deux extrémités de l’art, extrémité du matériel et du simultané, extrémité de l’immatériel et du successif. […] Rêve, mais rêve tout pénétré de symétrie. » Ce dialogue de l’Ame et la Danse, Valéry l’écrivit comme celui d’Eupalinos, pour se débarrasser d’une promesse, et si le hasard lui a merveilleusement réussi, si le coup de dés est retombé en chance, il ne semble pas qu’il y ait été bien vivement poussé par un démon intérieur.
Tout d’un coup un grand aigle d’or qui plane près du soleil et luit comme une escarboucle descend avec l’élan de la foudre et l’emporte dans ses serres jusqu’au-dessus des étoiles, pour le déposer ensuite devant le palais de la Renommée, palais resplendissant, bâti de béril avec des fenêtres luisantes et des tourelles dressées, et posé au sommet d’une haute roche de glace presque inaccessible. […] Pour Troïlus, il est tout tremblant ; il pâlit quand il voit revenir le messager ; il doute de son bonheur et n’ose croire les assurances qu’on lui en donne. « Tout comme les fleurs par le froid de la nuit — fermées, s’inclinent bas sur leur tige. — Mais le soleil brillant les redresse, — et elles s’ouvrent par rangées sous son doux passage. » Ainsi tout d’un coup son cœur s’épanouit de joie. […] La promeneuse s’étonnait, quand tout d’un coup elle aperçut une belle dame qui venait l’instruire. […] Ici, pour la première fois, paraît la supériorité de l’esprit, qui, au moment de la conception, tout d’un coup s’arrête, s’élève au-dessus de lui-même, se juge et se dit : « Cette phrase dit la même chose que la précédente, ôtons-la ; ces deux idées ne se suivent pas, lions-les ; cette description languit, repensons-la. » Quand on peut se parler ainsi, on a l’idée non pas scolastique et apprise, mais personnelle et pratique, de l’esprit humain, de ses démarches et de ses besoins, comme aussi des choses, de leur structure et de leurs attaches ; on a un style, entendez par là qu’on est capable de faire entendre et voir toute chose à tout esprit humain. […] Vers le quatorzième siècle, sous les coups d’Occam, cette science verbale elle-même se décrépit ; on reconnaît que ses entités ne sont que des mots ; elle se discrédite.
Si son sombre regard, d’une ardeur angélique, se pose tout à coup sur la fine pâte sculptée d’une rose ou sur le visage rayonnant d’une jeune femme, il perçoit, sous ces gracieuses apparences, un sens supérieur ; il les interprète d’une façon neuve, il leur découvre avec le reste du monde une analogie mystérieuse et des correspondances encore cachées. […] Tout à coup les ramures se meuvent et les paysages se développent. […] C’est, tout à coup, la mouvante cellule animale naissant de la pourriture végétale, du sang déliquescent et corrompu, sans doute, de quelque rose préhistorique, C’est la longue genèse, à travers la faune terrestre, après de successives métamorphoses, c’est la longue genèse de l’Ève humaine, de la perfectible et triomphale créature que les religions devaient diviniser plus tard, sous les traits adorables de Vénus et de Marie. […] L’époque du second Empire a, fort à propos, fourni au romancier un cadre naturel, logique et approprié ; et c’est dans l’intervalle qui s’écoule entre le coup d’État et Sedan que nous assistons à cette odyssée moderne d’une famille démocratique, qui croît, se multiplie, se développe au milieu des rouages complexes et tumultueux de la société contemporaine. […] Nous ne sommes pas, nous non plus, assez naïfs, instruits que nous avons été par nos aînés des sanglantes expériences de Mars 1871, pour sacrifier, sans réfléchir et sous le coup d’une indignation subite provoquée par un de vos crimes, l’immense armée prolétarienne qui n’est pas encore suffisamment organisée.
Qu’il eût quelque secret contentement d’orgueil à ne souffrir de grandeur, comme dit Saint-Simon, que par émanation de la sienne, à faire donner du monseigneur à ses ministres, à leur permettre l’habit de qualité au lieu de l’habit noir, à recevoir leurs femmes à sa table et dans ses carrosses, le dernier coup n’en fut pas moins justement porté à tout ce reste de féodalité turbulente, qui avait relevé la tête sous Mazarin ; et l’idée d’égaler, par l’étiquette de cour, les roturiers capables aux hommes simplement nés, fut plutôt une vue supérieure qu’un raffinement de l’égoïsme royal. […] Ajoutez à cet avantage « incomparable et unique » de toute sa figure191, que l’abbé de Choisy, qui va trop loin, appelle un visage solaire, une adresse merveilleuse à tous les exercices du corps, danse, mail, paume, cheval, chasse, voiture ; du courage à la guerre dès sa plus grande jeunesse, lorsqu’aux sièges de Belle-Garde et d’Etampes « on tirait, dit la Porte, force coups de canon sur lui, sans que cela lui donnât de la crainte192 », et plus tard, dans la guerre de Flandre, quand personne ne souhaitait la bataille de meilleur cœur, et ne voulait être plus résolument que lui au premier rang193. […] Cet esprit se montra tout à coup et tout entier dans ses premiers actes. « Son grand sens, dit Mme de Motteville, et ses bonnes intentions firent connaître les semences d’une science universelle qui avaient été cachées à ceux qui ne le voyaient pas dans le particulier ; car il parut tout à coup politique dans les affaires d’Etat, théologien dans celles de l’Eglise, exact en celles de finance195. » On était frappé tout d’abord de la précision de ses paroles, image, dit Bossuet, de la justesse qui régnait dans ses pensées196. […] S’il était quelqu’un parmi nous qui, après avoir « passé sa vie à penser » à une personne illustre, « à s’informer de ses grandes actions », eût tout à coup perdu ses bonnes grâces, je lui demanderais, comme au seul bon juge, si la douleur de Racine a été indigne de lui238.
Se sentant pourtant près de mourir, centenaires, millionnaires et célibataires, voilà qu’un vif regret de la patrie les reprend tout d’un coup après plus d’un siècle, et ils ont l’idée de rappeler quelque arrière-petit-neveu ou arrière-petite-nièce pour rentrer dans la religion réformée et dans l’héritage. […] Elle a rempli tous ses devoirs envers Dieu, envers nous. — Épargnons-nous ce remords de frapper cet esprit pur et divin. » Et après la mort : « (11 septembre 1850)… La volonté du Ciel est terrible, quand elle s’accomplit sur des êtres si faibles et si tendres que nous. » Mais tout à coup, dans ce ciel si lourd, si chargé, si sombre, un éclair inespéré a lui : « (14 janvier 1851)… Ondine se marie ! […] Il ne serait pourtant pas impossible que toute cette histoire touchante, ressaisie après coup par une imagination de poëte dans une mémoire d’enfant de quatre à cinq ans, eût subi dans l’intervalle quelque chose de la transformation propre aux légendes.
Sa mère ne mourut qu’en 1672 : « Je l’en ai vu pleurer, écrit Mme de Sévigné, avec une tendresse qui me le faisoit adorer. » Sa grande douleur, on le sait, fut à ce coup de grêle du passage du Rhin. […] Un jour, peu de temps après la fatale nouvelle, la belle duchesse de Brissac, qui venait en visite, entrant par la porte opposée à celle du portrait, recula tout d’un coup ; puis, après être demeurée un moment comme immobile, elle fit une petite révérence à la compagnie, et sortit sans dire une parole. […] Dans un gouvernement constitutionnel, où il faut tout haut se louer quelque peu soi-même (on en a des exemples) et louer à la fois la majorité des assistants, on voit que M. de La Rochefoucauld n’aurait pu être autre chose que ce qu’il fut de son temps, un moraliste toujours. — J’ajouterai encore cette note écrite après coup, mais qui revient bien à ce qui précède :« Il parlait à ravir devant deux ou trois ou cinq personnes ; mais dès que cela devenait cercle, et à plus forte raison devant un auditoire, il ne le pouvait plus. — Il avait grande peur du ridicule, il le sentait vivement, il le voyait là où d’autres moins délicats ne le voyaient pas.
Fior d’Aliza (suite) Chapitre VI (suite) CLXXXII À ces mots, la jeune Maremmaise poussa son amant à gauche, dans un sentier qui menait à la mer ; quant à elle, elle saisit le tromblon, la poire à poudre, le sac à balles et le chapeau pointu du brigand, et, se jetant à gauche, sous les arbustes moins hauts que sa tête, elle se mit à tirer, de temps en temps, un coup de son arme à feu en l’air, pour que la détonation et la fumée attirassent les sbires tous de son côté, et laissassent à son compagnon le temps de descendre par où on ne l’attendait pas, vers la mer ; elle laissait voir à dessein son chapeau calabrais par-dessus les feuilles, pour faire croire aux gendarmes que c’était le brigand qui s’enfuyait en tirant sur eux. […] CLXXXVI À ces mots, le bargello revint sur ses pas pour sortir de la cour, et je crus que j’allais m’évanouir de contentement, car, s’il m’avait dit : Entre dans cette loge, et que Hyeronimo et moi, nous nous fussions vus ainsi tout à coup, devant le bargello, face à face, sans être d’intelligence avant cette rencontre, un cri de surprise et un élan l’un vers l’autre nous auraient trahis certainement. […] Quand nous eûmes ainsi longtemps parlé bouche à bouche, cœur à cœur, à travers les froides grilles du cachot, trois coups de marteau de l’horloge de la cour, résonnant comme un tremblement de l’air, sous les souterrains, nous apprit que trois heures s’étaient écoulées dans une minute et qu’il était temps de nous arracher l’un à l’autre, si nous ne voulions pas être surpris par le retour du bargello.
Dès lors il vous semble que vous n’avez qu’à dire vos perceptions pour traduire du même coup vos sentiments, que vous n’avez plus besoin de préciser le rapport entre la cause et l’effet, entre le signe et la chose signifiée, puisque les deux se confondent pour vous… Encore une fois, comprenez-vous ? […] Je veux le voir derrière les barreaux d’une geôle, comme François Villon, non pour s’être fait, par amour de la libre vie, complice des voleurs et des malandrins, mais plutôt pour une erreur de sensibilité, pour avoir mal gouverné son corps et, si vous voulez, pour avoir vengé, d’un coup de couteau involontaire et donné comme en songe, un amour réprouvé par les lois et coutumes de l’Occident moderne. […] Verlaine en change tout à coup, sans prévenir.
Dès qu’un Français a pu se donner une culture, non plus seulement classique et nationale, mais européenne, c’est merveille comme il se détache, du même coup, de tout chauvinisme littéraire. […] Dans les Revenants, Mme Alving, dont la vie a été jusque-là une vie de foi et d’immolation chrétienne, bouleversée par l’atroce injustice de la destinée d’un fils condamné à la maladie et à la folie par les vices de son père, secoue subitement le joug de ses anciennes croyances et, du premier coup, va si loin dans cette indépendance retrouvée que, à un moment, elle n’hésite pas à pousser dans les bras du malade une servante qu’elle sait être sa sœur naturelle. […] Sur quoi Hedda, ne pouvant décidément supporter la disproportion qu’il y a entre sa destinée et son âme, se tue d’un coup de revolver.
Sur le fondement de ce sentiment irréductible du devoir, Vigny aurait pu, comme d’autres, se rebâtir après coup toute une métaphysique encourageante. […] Depuis deux ans, je ne suis pas sorti et je ne peux marcher, et j’ai toutes les nuits une insomnie qui me condamne à compter tous les coups de ma pendule… » Et, tandis que des cousines pieuses multiplient autour de lui « les amulettes, les médailles de la Vierge immaculée, et même de saintes amoureuses comme Mme de Chantal », et que « le pauvre archevêque de Paris » vient le voir, et aussi l’évêque d’Orléans, « au milieu des empressements exagérés de tant de monde… de médecins tout neufs qui ont fait des miracles, et de petits abbés qui en ont vu plusieurs dans la semaine », le comte de Vigny, convenable, souriant à ces zèles pieux, respectueux de tous les rites, mourait, sans croire à rien, avec une tranquillité farouche. […] On a vu des prostituées prises tout à coup d’une horreur physique insurmontable pour leurs besognes habituelles.
Il n’y manque pas non plus de ces coups de théâtre que Voltaire veut dans la tragédie. […] Cependant, ce n’est ni l’action ni les coups de théâtre qu’on admire le plus dans Zaïre et dans Mérope : ce sont les caractères. […] Il en a coûté à tels de ses contemporains d’avoir accepté l’invitation, et de ne s’être pas doutés que c’est pour se rendre d’autant plus inviolable, qu’un poète s’offre de lui-même aux coups.
Jalouse de ses droits écrasés, la déesse d’amour se vengea : le philtre d’amour destiné selon les mœurs du temps par la prévoyante mère à l’époux marié par politique, elle le fit par une rusée mégarde présenter au jeune couple ; eux, l’ayant bu, s’enflammèrent tout à coup d’un clair feu, et se durent avouer qu’ils s’appartenaient l’un à l’autre seulement. […] Puis, tout à coup, sa signification se révèle : « Lenzes Gebot, die süsse Noth, die legt es ihm in die Brust. » C’est bien ce qu’éprouve aussi Eva quand, furieuse de l’injustice des maîtres, elle s’écrie que Walther trouvera bon accueil : « Wo warm die Herzen noch erglühen. » C’est ce motif même, haletant, entrecoupé, qui secoue les premières phrases du chant d’Eva quand elle s’élance au devant de Walther. […] Il se montre tout d’abord immédiatement après le coup de trompe du veilleur de nuit, qui porte à son comble l’hallucination où Walther se débat contre les maîtres qui cherchent, grimaçants, à lui arracher Eva.
Mais elle-même ne s’atteste à nous que par les coups dont elle nous frappe. […] On a beau être un artiste redoutable, au point de vue le plus arrêté, à la volonté la plus soutenue, et s’être juré d’être athée comme Shelley, forcené comme Leopardi, impersonnel comme Shakspeare, indifférent à tout, excepté à la beauté, comme Goethe, on va quelque temps ainsi, — misérable et superbe, — comédien à l’aise dans le masque réussi de ses traits grimés ; — mais il arrive que, tout à coup, au bas d’une de ses poésies le plus amèrement calmes ou le plus cruellement sauvages, on se retrouve chrétien dans une demi-teinte inattendue, dans un dernier mot qui détonne, — mais qui détonne pour nous délicieusement dans le cœur : Ah ! […] Baudelaire d’avoir compris ces conditions nouvelles de la poésie, car c’est assurément une preuve de force que de se trouver du premier coup à la hauteur de son temps.
A coup sûr, il a connu Jean Sobieski, qui était mousquetaire à cette époque-là et qui devait, un jour, devenir roi de Pologne et dont il a parlé dans ses œuvres. […] La Fontaine et Molière, qui représentent si bien, si parfaitement l’esprit français et l’esprit de cette époque, ont été, du premier coup en sympathie profonde et ils n’ont pas cessé d’être en sympathie parfaite jusqu’à la fin, qui a été plus rapide pour Molière que pour La Fontaine, comme vous savez. Tout à coup, disgrâce de Fouquet.
Au point de vue raccourci des multitudes, et c’est pour elles qu’on écrit l’histoire, toute faute de roi évoquée par l’histoire, avant de retomber sur la tête du monarque a trouvé plus haut la royauté qui en recevait toujours le premier coup. […] L’Ordre de Jésus, frappé d’une abolition qui fut un coup de foudre contre le principe du catholicisme, n’est pas mort du coup et ne pouvait pas mourir. […] « J’ai fait éclater mon arquebuse, — écrivait deux jours après son succès Florida Blanca, rugissant d’orgueil. — Vous savez de quelle mitraille elle était chargée. » Il avait lieu d’être fier : il avait tué du coup la Compagnie de Jésus et le Pape.
Les deux axiomes précédents sont deux fortes preuves en faveur de notre mythologie historique et en même temps deux coups mortels pertes au préjugé qui attribue aux anciens une sagesse impossible à égaler (innarrivabile). […] Les habitudes originaires, particulièrement celle de l’indépendance naturelle, ne se perdent point tout d’un coup, mais par degrés et à force de temps. […] Au milieu de cette prétendue liberté populaire que l’imagination des historiens nous montre dans Rome, ils pressaient 30 les plébéiens, et les forçaient de les servir à la guerre à leurs propres dépens ; ils les enfonçaient, pour ainsi dire, dans un abîme d’usures ; et lorsque ces malheureux n’y pouvaient satisfaire, ils les tenaient enfermés toute leur vie dans leurs prisons particulières, afin de se payer eux-mêmes par leurs travaux et leurs sueurs ; là, ces tyrans les déchiraient à coups de verges comme les plus vils esclaves.
Elle accoucha de moi en grand vertugadin… » Au temps de ce père altier et sévère, l’habitude était de se faire craindre ; et, si les mœurs avaient de la roideur antique, en revanche, du temps que le prince écrivait ces lignes légères, cette mode avait bien changé ; les mœurs s’étaient détendues tout d’un coup, et du respect on avait subitement passé à l’impertinence. […] Coup d’œil sur Belœil, avait-il intitulé son essai (1781) par un de ces jeux de mots et de ces sortes de calembours qui sont un de ses petits travers.
L’Exposition de la doctrine catholique par l’évêque de Meaux entama sa conversion, et l’Histoire des variations l’acheva : « C’était tomber, dit-il, sous les coups d’un noble adversaire. » Cette conversion solitaire et toute par les livres caractérise bien Gibbon. […] C’est bien le même homme qui, se jugeant plus tard à l’âge de cinquante-quatre ans, presque au terme de sa carrière, disait de lui encore : « Le sol primitif a été considérablement amélioré par la culture ; mais on peut se demander si quelques fleurs d’illusion, quelques agréables erreurs n’ont pas été déracinées avec ces mauvaises herbes qu’on nomme préjugés. » Culture, suite, ordre, méthode, une belle intelligence, froide, fine, toujours exercée et aiguisée, des affections modérées, constantes, d’ailleurs l’étincelle sacrée absente, jamais le coup de tonnerre : c’est sous ces traits que Gibbon s’offre à nous en tout temps et dès sa jeunesse.
Daru qu’un visage immuable, averti par un ami de ce dernier, se mit tout d’un coup à lui parler d’Horace, d’une traduction dont il était curieux et qu’il n’avait pu se procurer encore : ici l’administrateur général ne put s’empêcher de sourire ; il ne s’attendait pas à ce mot sur Horace, qui était la clef du cœur, et il redevint un moment ce qu’il était toujours et si aisément quand l’absolu devoir ne l’enchaînait pas. […] Daru était de ceux qui conseillaient à Picard les vers, estimant que cette forme était la seule qui consacrât tout à fait une renommée au théâtre et qui pût lui imprimer un cachet littéraire durable : mais il ne suffisait pas de mettre en rimes après coup ce qu’on avait d’abord écrit et conçu en prose.
Ont-ils été ajoutés après coup, comme on l’a prétendu ? […] Si votre style est noble, il est encore plus épiscopal (M. de Noyon, pour le coup, était homme à avoir fourni ce trait-là et à l’avoir indiqué de sa main sur le manuscrit).
Par bonheur, par un coup de la Providence, elle y est tombée à la renverse et non la face la première, ce qui a permis de la retirer sans que le feu ait endommagé autre chose que son bonnet et sa coiffure. […] Un jour que Casaubon l’était allé visiter (c’était dans le temps du procès du maréchal de Biron), l’aimable roi se mit d’abord à badiner avec lui en lui disant qu’il le croyait complice de la trahison de Biron ; puis tout d’un coup prenant un visage sérieux ; « Vous voyez, lui dit-il, combien j’ai de peine, moi, afin que vous puissiez étudier en paix. » Un tel mot rachète bien des ignorances82.