Comme tous les charlatans de l’art dramatique, les plus grands charlatans littéraires, qui se mettent effrontément, pour les exploiter au point de vue du succès et du bruit, à califourchon sur tous les événements contemporains, Gœthe, qui n’eut jamais une idée à lui, Gœthe, dont on ne peut pas dire : prolem sine matre creatam, car il est le bâtard de tout le monde, trouva d’une habileté et d’un succès sûr de maquignonner le scandale de l’affaire du Collier, et il le maquignonna… Il descendit l’affaire du Collier de sa hauteur historique pour la placer au niveau d’un drame aristocratico-bourgeois. […] Les Entretiens d’Eckermann, publiés en ces derniers temps, nous ont assez divertis, quand ils parurent, par les colossales balourdises sur la littérature française contemporaine qui s’y prélassaient, comme des baleines nageant, sur la mer, au soleil. […] Mais avec sa capacité distraite par toutes les vanités contemporaines, avec la facilité d’un esprit qui glissait sur tout et ses flâneries éternelles dans toutes les voies de l’érudition, eût-il pu être davantage ?
Et tel était le goût des contemporains : quand Dryden écrivit d’après Shakspeare la Tempête et d’après Milton l’État d’innocence, il corrompit encore une fois les idées de ses maîtres ; il changea Ève et Miranda en courtisanes728 ; il abolit partout, sous les convenances et les indécences, la franchise, la sévérité, la finesse et la grâce de l’invention originale. […] Dryden n’y est guère habile, non plus que ses contemporains. […] Si Dryden est un politique expérimenté, un controversiste instruit, bien muni d’arguments, sachant tous les tournants de la discussion, versé dans l’histoire des hommes et des partis, cette habileté de pamphlétaire, toute pratique et anglaise, le retient dans la basse région des combats journaliers et personnels, bien loin de la haute philosophie et de la liberté spéculative, qui impriment au style classique des contemporains français la durée et la grandeur. […] Il faut, comme Horace, être penseur et homme du monde pour écrire de la morale agréable, et Dryden, non plus que ses contemporains, n’est homme du monde ou penseur.
Cette révolution opérée, la langue de l’art trouvée et fixée, — et c’est là incontestablement2 le meilleur titre de l’école romantique, — il s’agissait, pour qu’un monde nouveau fût découvert en littérature, non plus de traduire dans cette langue, par la bouche de héros fantastiques et imaginaires, nos doutes, nos défaillances et nos espérances dans l’avenir, mais de peindre à l’aide de types façonnés à notre image, à nous, les hommes du dix-neuvième siècle, les douleurs et les misères du temps présent, les hontes et les splendeurs de la vie contemporaine. […] Si nous avions pourtant à rattacher cette manifestation de l’esprit littéraire et artistique au mouvement général des idées contemporaines, il nous serait aisé de signaler les points de concordance qui la relient à la philosophie positive. […] Incapable de s’élever comme Balzac à la cime des généralités sociales et de surprendre, de ces hauteurs, les accidents et les péripéties du mouvement humain, il erre à tâtons dans le labyrinthe de la vie contemporaine. […] Le bénéfice d’une grosse méprise de ses contemporains. […] Pénétrés de ccs quelques vérités, qui ont le tort, j’en conviens, d’être fort peu idéalistes, posez-vous sans crainte, si vous avez du talent, avec votre plume ou votre pinceau devant vos contemporains, et soyez sûrs que vous en tirerez des œuvres bien autrement saines pour l’esprit et pour le cœur des jeunes et des vieux, que toutes ces drogues nauséabondes, que toutes ses grandes passions fainéantes, que tous ces ferments de convoitise à l’adresse de la richesse et de la beauté, qui nous font souvent perdre notre jeunesse en rêves idéalistes impossibles, pour nous laisser retomber si lamentablement plus tard sur les longues épines de la réalité.
La révolution américaine, dont nous sommes les contemporains, semble en effet affermie pour jamais. […] C’est par là que les grands hommes de tous les temps et de tous les lieux, deviennent, en quelque sorte, compatriotes et contemporains, ils ne forment qu’une seule famille, dont les exemples se transmettent et se renouvellent de successeurs en successeurs. […] Elle juge avec la plus grande rigueur ses contemporains, dont elle désespère en dépit de leurs progrès philosophiques : elle les enveloppe tous dans ses ressentiments contre ceux qui l’ont méconnue ; et c’est ainsi qu’il règne une contradiction perpétuelle entre les mouvements de son âme et les vues de son esprit. […] Des traités austères, tels que ceux de Nicole et d’Abadie, étaient lus avec empressement par les mêmes hommes qui goûtaient le mieux le génie et les grâces de Racine et de La Fontaine, leurs contemporains. […] Ainsi, le siècle où vécut Corneille put donc avoir quelque influence sur son génie : ce génie fut élevé, fier et mâle, comme les mœurs de ses contemporains ; mais il s’altéra par le mélange des subtilités scolastiques et de l’enflure espagnole.
Malheureusement, parmi les hommes supérieurs, Shakespeare est un de ceux dont la vie, à peine observée par ses contemporains, est demeurée le plus obscure pour les générations suivantes. […] Comment, au milieu des spectacles nouveaux qui l’entouraient, cet esprit si actif, si fécond, dont la rapidité, au dire des acteurs ses contemporains, « suivait celle de la plume », sera-t-il demeuré six ans sans se sentir pressé du besoin de produire ? […] Eschyle, Sophocle, Euripide, entreprirent d’émouvoir le peuple en lui retraçant les graves destinées des héros et des rois ; Cratinus et Aristophane se chargèrent de le divertir par le spectacle des travers de leurs contemporains ou de ses propres folies. […] Aucun reproche grave ne peut, en aucun temps, avoir pesé sur un homme dont ses contemporains n’ont jamais parlé qu’avec une affection pleine d’estime, et que Ben-Johnson déclare « véritablement honnête », sans tirer de cette assertion l’occasion ni le droit de rapporter quelque trait honteux à sa mémoire, quelque tort connu que l’officieux rival n’eût pas manqué de constater en l’excusant. […] Herrick, contemporain de Shakespeare, est connu par un recueil de jolies poésies rurales, publiées sous le titre d’Hespérides.
Et ce cas est encore celui de bien des hommes, personnellement respectables, d’entre nos contemporains, lesquels, si on les laissait faire, nous ramèneraient sur certains points à l’âge d’or de saint Louis. […] Chacun a présents à l’esprit les noms de contemporains vraiment exemplaires, d’honnêtes gens modèles ; mais, pour nous en tenir au passé, quel plus honnête homme, plus modéré, plus sage, plus sobre, plus bienfaisant dans les tous les jours de la vie que d’Alembert ?
D’Aubigné, je le sais, est du xvie siècle par le génie et par le goût : mais, précisément, son originalité et sa caractéristique c’est d’être du xvie siècle en plein xviie , de n’avoir pas marché quand tout était en mouvement, et de rester, entre Richelieu et Corneille, le contemporain de Charles IX et de Garnier. […] Le Tasse, Montemayor sont en leurs pays de grands poètes : D’Urfé ne vaut que par sa prose, fluide, diffuse, aimable, où se reconnaît le contemporain littéraire de François de Sales et de Montchrétien.
Descartes n’exerça donc pas sur son époque cette sorte d’influence qui se manifeste par l’imitation, et qui est comme la livrée qu’un écrivain brillant fait porter à ses contemporains. Ce grand nombre d’imitateurs ne rehausse pas la gloire du modèle ; il prouve tout au plus que ses défauts venaient du mauvais emploi qu’il a fait de grandes qualités, et que ses contemporains ont été médiocres.
Pour nous faire imiter nos contemporains, l’âme sociale peut nous abandonner à nos propres goûts. […] Et les générations successives, comme les individus contemporains ont été reliés par quelques sentiments changeants et très vagues, désignés par le même mot, et d’autant plus honorés que chacun y pouvait voir ce qui lui plaisait.
» De la littérature contemporaine, jamais un mot. […] J’appris avec étonnement qu’il y avait des laïques sérieux et savants ; je vis qu’il existait quelque chose en dehors de l’antiquité et de l’Église, et en particulier qu’il y avait une littérature contemporaine digne de quelque attention.
Jean-Jacques Olier, issu d’une famille qui a donné à l’État un grand nombre de serviteurs capables, fut le contemporain et le coopérateur de Vincent de Paul, de Bérulle, d’Adrien de Bourdoise, du père Eudes, de Charles de Gondren, de ces fondateurs de congrégations ayant pour objet la réforme de l’éducation ecclésiastique, qui ont eu un rôle si considérable dans la préparation du xviie siècle. […] Le bruit qu’il y avait des écrivains dans le siècle arrivait quelquefois jusqu’à nous ; mais nous étions si habitués à croire qu’il ne pouvait plus y en avoir de bons, que nous dédaignions à priori toutes les productions contemporaines.
Je ne connais pas de poète contemporain, si ce n’est Emmanuel Signoret, qui rencontre aussi souvent la forme stricte et définitive d’une pensée poétique. […] Ses Poèmes dans un temps de doutes et de blasphèmes ont la rafraîchissante sérénité de l’âme affranchie du doute et n’est-ce pas assez pour leur accorder un accent unique qui les classe en dehors de toute la poésie contemporaine ?
Ces discours si loués des contemporains et qu’ils s’accoutumaient à personnifier dans le mot du texte toujours heureusement choisi, ce Depositum custodi, prêché devant la reine mère, ce Surrexit Paulus de l’abbé Bossuet, comme on les appelait, nous deviennent présents et distincts, chacun avec sa physionomie particulière.
mais nous sommes, lui et moi, à peu près contemporains).
Scherer, et qui touchent à des contemporains pleins de vie.
Nommé à l’Académie française deux ans après La Bruyère lui-même, qui avait signalé son entrée par un si neuf et si éloquent discours de réception, il en fit un des plus ordinaires ; et, comme Fontenelle, à qui il le montrait en manuscrit, lui faisait remarquer que le style en était plat : « Tant mieux, dit l’abbé, il m’en ressemblera davantage ; et c’est assez pour un honnête homme de donner deux heures de sa vie à un discours pour l’Académie. » Il était homme à répondre comme un de nos contemporains à celui qui critiquait une de ses phrases : « Ah !
[NdA] Au tome iii des Portraits contemporains et divers, édition de 1855, pages 118-155.
Sous l’Empire, M. de Bausset, qui avait débuté par une intéressante et agréable Histoire de Fénelon, continue par une Histoire de Bossuet, utile, agréable encore, mais où la critique proprement dite est un peu vague, où la louange est un peu trop généralement répandue, et où toutes les sources contemporaines ne sont pas consultées d’assez près.
Je voudrais raconter nettement, et sans trop de conjectures, l’histoire de cette intelligence élevée qui tranche avec celle de nos autres contemporains, et qui doit une partie de son caractère et de son originalité à ses origines mêmes.
Gaston Paris, contre les désespoirs ou les fantaisies de la génération précédente ou présente, et à ce propos il nous donne une idée de l’art poétique rajeuni qui est le sien, et dont il voudrait faire la loi de ses jeunes contemporains : A défaut des vieillards, les jeunes le diront, Ils chercheront du moins ; leur fierté répudie Du doute irréfléchi le désespoir aisé.
C’est dire combien, à l’exemple de la majorité de ses contemporains, il était lassé, dégoûté de tant d’avortements et de tant d’épreuves, de tant d’intrigues, de remaniements infructueux et de désordres ; combien, en un mot, il était préparé et mûr pour le Consulat.
(voir les volumes de Portraits contemporains), on peut bien juger en quel sens et dans quelle mesure l’auteur a cru devoir se déclarer, à certains moments, pour le parti de la conservation en littérature et de la résistance.
Un savant anglais a même essayé de retrouver par conjecture la vieille orthographe, les vieilles formes de l’Homère d’avant Aristarque, de l’Homère contemporain de Pisistrate100.
Les contemporains, surtout les plus gens de poids et les plus appliqués, ne laissent pas d’être sujets à ces petites bévues-là.
Voir au tome II des Portraits contemporains.
Si ces considérations générales suffisent pour éclairer sur la juste influence de l’ambition sur le bonheur, les auteurs, les témoins, les contemporains de la révolution de France, doivent trouver au fond de leur cœur de nouveaux motifs d’éloignement pour toutes les passions politiques ?
Quel que soit l’établissement, ecclésiastique ou séculier, quel que soit le clergé, bouddhiste ou chrétien, les contemporains qui l’observent pendant quarante générations ne sont pas de mauvais juges ; ils ne lui livrent leurs volontés et leurs biens qu’à proportion de ses services, et l’excès de leur dévouement peut mesurer l’immensité de son bienfait.
Il pense tout haut, il vit à coeur ouvert devant les contemporains, devant ses lecteurs.
Je crois que ce qu’il y a de sincère en lui, c’est le goût de la grandeur, de la force, de l’héroïsme, et la joie de se sentir « différent » de ses contemporains.
L’éloge d’un homme de génie, n’est-il pas la plus douce récompense d’un autre homme de génie dites c’est mon frere qu’on admire, qu’on loue, qu’on persécute, je dois le consoler, le défendre, puisque les méchans le punissent d’être éclairé & vertueux ; pour jouir de l’estime de mes contemporains, il me faudra un jour passer par les mêmes épreuves.
Née à Padoue en 1562, Isabelle brillait sur le théâtre depuis 1578, se faisait admirer par sa beauté, par ses rares talents, et, ajoutent tous les témoignages contemporains, par sa vertu.
Mais les romanciers, les polygraphes, variés, ceux qui sont rédacteurs à une librairie, comme d’autres le sont à un ministère, combien sensible est leur épiderme littéraire Au vrai, il y a malentendu ; la plupart des écrivains contemporains se font de la critique un concept étrangement faussé.
Essai de psychologie contemporaine, t.
Euclide, par exemple, a élevé un échafaudage savant où ses contemporains ne pouvaient trouver de défaut.
On se passionna pour les figures caractérisées que présente l’histoire, et on fut impitoyable pour ceux des contemporains que l’avenir envisagera avec le même intérêt.
La théorie métaphysique du Verbe, telle qu’on la trouve dans les écrits de son contemporain Philon, dans les Targums chaldéens, et déjà dans le livre de la « Sagesse 719 », ne se laisse entrevoir ni dans les Logia de Matthieu, ni en général dans les synoptiques, interprètes si authentiques des paroles de Jésus.
Sophocle et Euripide coururent après lui la même carrière ; et en moins d’un siècle, la tragédie grecque, qui avait pris forme tout d’un coup entre les mains d’Eschyle, arriva au point où les Grecs nous l’ont laissée : car, quoique les poètes dont je viens de parler, eussent des rivaux d’un très grand mérite, qui même l’emportèrent souvent sur eux dans les jeux publics, les suffrages des contemporains et de la postérité se sont néanmoins réunis en leur faveur.
C’est une question d’édification et d’âme, toute de lui à Dieu, et qui ne regarde en aucune sorte messieurs les journalistes contemporains.