Ces légions apprennent que celles de Rome et de Germanie vont s’entrechoquer pour décider à qui des deux armées reviendra le bénéfice de donner un maître à l’empire ; elles s’indignent qu’on en dispose ainsi sans leur aveu ; elles méditent de s’en saisir pour un de leurs généraux, pendant qu’on le dispute pour d’autres. […] « Conservez précieusement, sénateurs, conservez un homme de conseil si expéditif, afin que chaque génération se forme à de tels exemples, et que, comme nos vieillards imitent Crispus, nos jeunes gens apprennent à imiter Régulus. […] « Il inclina d’abord vers le poison ; mais, si on le donnait à la table de l’empereur, on ne pouvait éviter de réveiller le souvenir du genre de mort de Britannicus, et il paraissait difficile de corrompre les esclaves d’une femme à qui l’habitude de commettre le crime avait appris à se préserver de telles embûches. […] « Elle ordonne de chercher le testament d’Acéronia et de faire l’inventaire de ses biens, cela seulement sans dissimulation. » XLIII « Cependant, à Néron, qui attendait avec anxiété les messagers chargés de lui annoncer l’exécution de la trame, on apprend qu’Agrippine, atteinte seulement d’une légère blessure, est sauvée, mais avec assez d’indices sinistres pour qu’elle ne pût douter de l’intention et de l’auteur du complot.
Et n’eussent-ils fait que lui apprendre du grec et du latin, il leur serait encore plus redevable qu’à personne : car lui ouvrir l’intelligence des anciens, c’était lui mettre en main la clef de sa future doctrine. Ce fut là sans doute qu’il apprit à ne rien mettre au-dessus de la littérature : en vain son père essaya-t-il de l’engager dans quelque étude pratique et profitable. […] Précieux à l’occasion, s’entendant à aiguiser la pointe précieuse comme à enfler la fade hyperbole, il se vantait surtout d’avoir « l’humeur critique » et d’avoir, dès ses plus jeunes ans, « appris l’art de railler les gens ». […] Quant à la pension, Boileau n’en remercia le roi qu’en 1675 par l’Épître VIII, et les registres des Comptes des bâtimens du roi nous apprennent qu’il ne commença à la toucher qu’en 1677.
Un récit qui nous l’eût expliqué n’eût pas rendu Néron plus aimable ; mais il nous eût appris par quelle dépravation une société, devenue incapable d’une liberté réglée, se rend tout à la fois la complice et la proie d’un de ces despotismes monstrueux auxquels on ose à peine croire, même sur la foi d’un Tacite. […] Il leur apprend, par le détail approfondi et le tableau expressif des fautes qui minaient le gouvernement aristocratique à Rome, qu’il faut ne pas s’entêter ni s’opiniâtrer ; savoir ne garder du passé que ce qui en est vivant, et rompre avec ce qui en est caduc ; apercevoir de loin à l’horizon les intérêts nouveaux, et, le moment venu, leur faire leur juste part ; se convaincre enfin qu’au milieu des idées qui changent, des mœurs qui se renouvellent, des souffrances et des espérances qui travaillent les sociétés humaines, un gouvernement est tenu de ne pas vieillir. […] Appliquée à l’histoire des beaux-arts et au jugement des chefs-d’œuvre, elle a, dans des Études sur l’art à toutes les époques, esquissé l’histoire des grandes écoles et mis en lumière des vérités qui apprennent à bien voir et à bien juger. […] Il est telle tragédie contemporaine, au tour et au vers cornéliens, telle comédie étincelante d’esprit, de caprice et de style, qui témoigne, avec éclat, de la fécondité de la tradition chez des poètes bien doués, qui ont lu les modèles pour s’éclairer sur leur propre fonds, et pour apprendre d’eux à faire bien sans faire comme eux.
Et Trolliet, si vous vous prêtez à ses bavardages ingénieux et puérils, vous apprendra ce que « marque » le rouge de la cocarde et du cocardier, et leur bleu, et leur blanc. […] Assez adroit ouvrier de mots et de nombres, Charles-Brun n’aurait pas grand-chose à apprendre pour devenir un poète. […] Paul Bourget est le plus en vue des disciples vils qui dans les noblesses dites n’entendent que de basses utilités et qui apprennent les philosophies et les littératures dans le même esprit qu’un futur comptable étudie l’arithmétique. […] J’aime mieux louer les progrès du cher enfant qui « commence à comprendre la vérité de ces formules apprises au collège ».
Ainsi fait-il, et cela t’apprendra, honnest Olivier, à vouloir brouiller Othello avec Desdémone ! […] M. de Thonnerins vient d’apprendre les projets de son ancienne maîtresse ; or il est l’ami de la famille de M. de Nanjac, et il menace Suzanne de tout révéler, si elle ne renonce pas, d’elle-même, à cette intrigue scandaleuse. […] Elle se traîne donc à genoux aux pieds de l’amant irrité, perdue dans ses cheveux, noyée dans ses pleurs, et elle avoue, elle se confesse, elle demande grâce, et l’homme de guerre ne résiste pas à cette pantomime de Madeleine apprise au théâtre ; seulement il exige qu’elle renvoie, sur l’heure, à M. de Thonnerins la fortune infamante qu’elle doit à son caprice. […] Un instant après, Olivier apprend que M. de Nanjac est passionnément amoureux de la femme qui vient de lui donner son congé, et c’est alors que son zèle s’allume, que sa conscience se soulève, et qu’il entre résolument en campagne contre l’intrigante.
Ton intrépide cœur, étranger aux alarmes, Vient donc aussi d’apprendre à connoître l’effroi ! […] Et le pauvre apprend ici à juger de son état tout autrement qu’il ne fait, et, loin de se plaindre, à savoir même bon gré à sa pauvreté, qui lui tient lieu d’asile, de port, de citadelle, en le mettant en repos et en sûreté, et le délivrant des craintes et des alarmes dont il voit que les richesses sont la cause et l’origine. » Le but qu’avait saint Chrysostome en tenant tout ce discours, n’était pas seulement d’instruire son peuple, mais de l’attendrir par le récit des maux dont il lui faisait une peinture si vive. […] « Dès que cette mère désolée eut appris cette nouvelle, elle me prit la main, dit saint Chrysostome, me mena dans sa chambre ; et, m’ayant fait asseoir auprès d’elle sur le même lit où elle m’avait mis au monde, elle commença à pleurer, et à me parler en des termes qui me donnèrent encore plus de pitié que ses larmes. […] Mon avis serait de leur donner à gouverner une province qui méritât d’être châtiée ; ils apprendraient par leur expérience, après qu’ils y auraient tout mis sens dessus dessous, qu’ils sont des ignorants, que la critique est aisée, mais l’art difficile ; et surtout qu’on s’expose à dire force sottises, quand on se mêle de parler de ce qu’on n’entend pas.
Le xvie siècle nous a suffisamment appris ce que peut être l’athéisme dans une tête italienne, et le xixe continue de le démontrer. […] Faut-il que ce soit nous qui apprenions l’étymologie au philosophe, au philologue, au savant traducteur de Vico ? […] En ces quatre volumes à peine, — par l’histoire des Révolutions d’Italie s’arrête vers le milieu du quatrième, où l’auteur nous apprend tout à coup que sa tâche est finie parce qu’il touche à l’époque de Charles-Quint, et qu’à cette époque l’ère des révolutions est fermée, — il n’y a pas moins (l’auteur s’en est assez vanté) que sept mille révolutions qu’il a mesurées « à l’équerre et au compas », nous dit-il, avec l’orgueil d’un Képler de l’Histoire, Assurément, sept mille révolutions, poussées, bousculées en quinze cents pages à peu près, font un entassement formidable, et on aurait vraiment le droit de se demander comment elles sont passées sous l’angle d’un compas si peu ouvert, pour peu qu’elles méritent le nom qu’on leur donne et qu’elles soient réellement des révolutions ! […] Ferrari, qui est un autre docteur (mais non de Sorbonne), nous apprend que déjà du temps de Richelieu quatre cent soixante-dix écrivains, de compte fait, avaient planté dans leurs écrits, qu’il ornait très bien, ce mot sans réplique de Raison d’État, qu’un autre cardinal, le cardinal de La Casa, avait un jour prononcé pour la première fois devant Charles-Quint, tout en lui dénonçant la chose.
Que nous apprend-elle en réalité sur l’homme ? […] Sans vouloir les suivre dans le développement de leurs doctrines, voyons comment ils ont été conduits au principe qui domine toutes leurs explications et apprenons à juger cette méthode par ses résultats. […] A l’égard de l’expérience, elle nous apprend, il est vrai, que tel fait est ordinairement accompagné de tel autre ; mais elle ne nous autorise pas à dire : tel fait est l’effet, le fruit de tel autre, et en résultera toujours. […] Stuart Mill l’a dit avec une grande raison : la conscience ne peut pas plus apprendre à un homme à quelle loi son esprit obéit que la contemplation des corps qui tombent ne peut lui donner l’idée des lois de la gravitation21.
Le peuple apprend là une sorte d’histoire fantasmagorique comme celle de Napoléon au cirque de Franconi.
Il nous eût plu de faire avec lui plus intime connaissance et d’apprendre, dès le commencement, par sa bouche, le secret de son éternel sourire.
Il n’anatomise, pour ainsi dire, le cœur de l’homme, qu’afin de nous apprendre à en prévenir ou à en guérir les maladies.
L’Écriture nous apprend notre origine, nous instruit de notre nature ; les mystères chrétiens nous regardent : c’est nous qu’on voit de toutes parts ; c’est pour nous que le Fils de Dieu s’est immolé.
L’on vient de m’apprendre, écrivait Roederer à Mirabeau, que M. de Mirabeau axait dit ce matin à l’Assemblée au sujet des folies de M. d’Éprémesnil, qu’elles avaient découvert le secret de ceux qui ne veulent point d’assignats. […] Elle applique assez pour distraire ; elle n’exige pas assez d’application pour être impossible à un homme dont le malheur n’a pas affaibli la raison. 2º Depuis longtemps je désirais m’exercer à la langue latine que j’ai mal apprise dans ma jeunesse : ce que je comprends de Tacite, de Tite-Live, de Salluste, d’Horace et de Virgile m’a donné une grande curiosité pour le reste. 3º Hobbes m’a paru avoir un mérite éminent comme écrivain politique, etc. […] Jamais il n’abjura le fonds d’idées de 1789 ni la conquête de certains résultats civils, politiques, auxquels sa raison ne pouvait renoncer ; il continua d’être le citoyen résolu d’une société sans privilèges : mais il devint plus méfiant dans sa poursuite du mieux ; sa logique, inflexible apprit à connaître les obstacles, les limites ; il ne fit plus abstraction de la nature et des passions des hommes dans cet art social qui s’applique avant tout aux hommes mêmes, qui opère sur eux et par eux.
Insistant sur l’utilité dont peut être une bonne dialectique pour prémunir contre les faux jugements : « Il est certain, dit-il, que la lecture fréquente des ouvrages de Bayle donne à l’esprit une certaine volubilité sur cette matière, qu’il ne tiendra jamais uniquement des avantages de la nature. » Tout en recommandant particulièrement à son frère quelques écrits de son auteur de prédilection, il ajoute que lui-même est occupé de faire imprimer en ce moment un extrait du Dictionnaire ; il compte que cet abrégé, qui porte principalement sur la partie philosophique de l’ouvrage, se répandra dans le public et pourra être utile : Je suis persuadé que la mauvaise conduite de la plupart des hommes vient moins d’un principe de méchanceté que d’une suite de mauvais raisonnements ; et je crois par conséquent que si on pouvait leur apprendre à raisonner d’une façon plus juste et plus conséquente, leurs actions s’en ressentiraient d’une manière avantageuse. […] Au moment du départ, et lorsque le prince était encore en Suède, Frédéric lui écrivait (12 août 1770) : « Vous apprendrez à connaître là bien des gens dont nous avons besoin. […] Frédéric fit remarquer à son frère que la guerre tirait peut-être à sa fin, et qu’il n’y aurait probablement aucun événement nouveau à cause de l’hiver, jusqu’à ce que cette question de paix fût tranchée ; il le pria de différer sa résolution de quelques mois : Je suis bien fâché d’apprendre que votre santé, mon cher frère, n’est pas telle que je la désire.
Mais nous avons encore bien des choses à apprendre d’elle et sur elle, bien des noms célèbres à rencontrer dans sa compagnie et à ses côtés. […] » 35 Le dernier tableau de cette existence mondaine de Mme de Boufflers, nous l’emprunterons encore à Mme du Deffand, malgré la teinte de malveillance qui se mêle toujours à ce qu’elle dit de l’Idole, mais enfin les traits finissent par se radoucir, et ce qu’elle est forcée de lui accorder à son corps défendant a d’autant plus de prix : « J’avais toujours oublié, écrit-elle à Walpole (4 avril 1780), de parler à l’Idole de la maladie de Beauclerk, et la première fois que je lui en ai parlé fut vendredi dernier que je lui ai appris sa mort ; elle en a été peu touchée, quoiqu’elle ait eu pour lui une petite flamme. […] Grimm nous apprend que ces vers, lus dans la société de Mme de Polignac, furent généralement trouvés détestables : des jours toujours sereins, mauvaise consonnance ; — en interrompt la course, est-ce la course des plaisirs ou la course de la source ?
Nous y verrons un à un tous les fils dont se compose la trame la plus solide de l’histoire, le dessous et l’envers de la tapisserie ; nous apprendrons à y connaître au naturel quelques figures de diplomates guerriers, d’hommes d’État, gens d’esprit ou même écrivains originaux, que les récits du dehors et le spectacle de l’avant-scène laissaient à peine soupçonner43. […] Montaigne, lorsqu’il apprit sur la fin de son voyage d’Italie, aux bains de Lucques où il se trouvait à ce moment (septembre 1581), son élection inopinée à la mairie de Bordeaux, et quand après une première hésitation il crut devoir accepter, Montaigne n’était nullement étranger aux fonctions publiques. […] Mais il se ravisa : « On m’apprit, dit-il, que j’avais tort, le commandement du roi s’y interposant aussi. » Il se mit en route pour revenir, avant d’avoir reçu la lettre et l’injonction du roi datée du 25 novembre 1581.
« Nous écrivons avant d’avoir appris, même parfois avant d’avoir pensé », dit-il quelque part ingénument. […] Il est difficile d’intéresser la postérité à des conseils assez fins de tour et de forme, mais fort vulgaires de fond, donnés à un jeune employé des finances pour lui apprendre le moyen de se faire bien venir de ses chefs : « Mon cher fils, — mon cher enfant, — faites-vous une besogne particulière et séparée de vos devoirs journaliers ; intéressez l’amour-propre de vos supérieurs (voire directeur entre autres), en les consultant sur cette besogne particulière, en les priant d’être vos guides… C’est M. de Saint Amand qu’il vous importe d’enjôler (sans fausseté, pourtant). […] Dans sa Correspondance avec le jeune homme, seule partie assez intéressante du volume et qui ne l’est encore que médiocrement, Collé se montre à nous avec la douce manie des vieillards ; il revient sur le passé, sur ses auteurs classiques, sur Horace « le divin moraliste » qu’il cite sans cesse et qu’il a raison d’aimer, mais tort de parodier en de mauvais centons latins ; il voudrait que son jeune financier apprît le grec « à ses heures perdues », ce qui est peu raisonnable.
Elle sait certainement, autant et mieux que personne, les heureuses et charmantes qualités de sa fille, de « cette gentille Antoinette », comme elle l’appelle ; est-ce à une mère tendre qu’il faut apprendre ces choses ? […] Là-dessus aucune négligence, et n’imitez personne ; suivez ce que vous avez vu et appris ici. » Elle ne cesse de conseiller à sa fille des lectures fortes, des lectures suivies ; elle attend tous les mois en vain la liste des livres sérieux que l’abbé de Vermond s’était chargé de procurer à la jeune princesse, et qui, on le sait aujourd’hui par les catalogues, étaient si absents de ses bibliothèques particulières : « Tâchez de tapisser un peu votre tête de bonnes lectures ; elles vous sont plus nécessaires qu’à une autre, … n’ayant aucun autre acquit, ni la musique, ni le dessin, ni la danse, peinture et autres sciences agréables. » Il est permis sans doute, surtout à son âge, de s’amuser, mais d’en faire son unique soin et de n’être occupée qu’à « tuer le temps entre promenades et visites », elle en reconnaîtra le vide et en sera un jour aux regrets. Elle doit apprendre de bonne heure à s’occuper de choses sérieuses et se rendre capable d’être utile à son époux, s’il lui demandait un avis et lui parlait amicalement des affaires.
A cette école de la vie, s’il y avait été mêlé à temps et dans l’âge où l’on se forme, La Mennais aurait-il appris la tolérance, l’indulgence ? Dans tous les cas, il y aurait sans doute aiguisé encore et surtout poli son talent, il aurait appris à le varier (ce dont il ne s’avisa que trop tard). […] Son étude elle-même, dans sa direction habituelle, est presque toute tournée à la théologie, aux citations des Pères : à peine Virgile et Horace se laissent-ils quelquefois deviner à travers cette sombre culture ; M. de La Mennais lisait le latin, mais il était peu capable de l’écrire ; il l’avait appris solitairement et ne s’était formé à aucun des exercices qui, ne fussent-ils bons à autre chose, disposent du moins à apprécier, à goûter avec justesse la belle fleur de l’antiquité109.
« C’est alors que le théâtre offrit, pour eux et pour moi, une sorte de refuge ; — on m’apprit à chanter, — je tâchai de devenir gaie, — mais j’étais mieux dans les rôles de mélancolie et de passion. — C’est tout à peu près de mon sort. […] Alibert, qui soignait ma santé devenue fort frêle, me conseilla d’écrire, comme un moyen de guérison, n’en connaissant pas d’autre. — J’ai essayé sans avoir rien lu ni rien appris, ce qui me causait une fatigue pénible pour trouver des mots à mes pensées. — Voilà sans doute la cause de l’embarras et de l’obscurité qu’on me reproche, mais que je ne pourrais pas corriger moi-même. […] Je suis, comme tout le monde, à la vie pour souffrir ; — c’est plutôt apprendre à penser qu’à parler.
Beaucoup d’hommes vicieux n’ont d’autre ambition que d’échapper au ridicule ; il faut leur apprendre, il faut avoir le talent de leur prouver que le succès du vice prête plus à la moquerie que la maladresse de la vertu. […] Une haute vertu, un génie vaste, voilà les dignités nouvelles qui doivent caractériser la tragédie, et plus que tout encore le sentiment du malheur, tel que nous avons appris à l’éprouver. […] Mais les romans qui peignent les mœurs et les caractères, vous en apprennent souvent plus sur le cœur humain que l’histoire même.
Elle semble se réveiller chez les poètes de la Pléiade française, mais imitée, apprise, affaiblie ; ce n’est vraiment qu’un reflet. […] Un magistrat sait son code, a appris à se reconnaître dans les affaires embrouillées, dans les questions d’héritage et d’intérêt. […] Elle le met au collège, où le lourdaud n’apprend rien.
Il y a, en Chine, un proverbe que les mères apprennent à leurs fils dès le berceau, et qui est le fond de la langue chinoise, comme goddam est celui de la langue anglaise, — Siao sin, — « Rapetisse ton cœur. » Formé par ce dicton, le jeune Chinois acquiert bientôt cette souplesse d’échine et de tête que nous admirons dans les magots de porcelaine du Céleste-Empire. […] Elle forme l’enfant à son image, qui est celle du plus saint amour ; elle lui apprend le dévouement, la foi, l’enthousiasme, la fierté du cœur, toutes les puretés et toutes les beautés. […] Elle inculque à sa jeune âme les soucis et les prudences des vieillards ; elle lui apprend à flatter, à feindre, à regarder d’un côté en marchant de l’autre, à saluer bien bas des gens qui ne valent quelquefois pas l’abaissement d’un regard… Siao sin !
À travers ces premiers mécomptes et ces diverses écoles, son éducation s’achevait, il apprenait la vie et le monde réel. […] Ils éveillent la compassion même des impies ; les étrangers n’apprennent qu’avec horreur les menaces dont on les accable depuis vingt mois. […] Dès le début, on sent l’homme désabusé qu’un devoir ramène sur la scène bien plus que l’illusion ou l’espérance : Lorsqu’on a atteint quarante ans, et qu’on n’est pas absolument dépourvu de jugement, on ne croit pas plus à l’empire de l’expérience qu’à celui de la raison : leurs instructions sont perdues pour les gouvernements comme pour les peuples ; et l’on est heureux de compter cent hommes sur une génération à qui les vicissitudes humaines apprennent quelque chose.
Elles apprendraient l’expérience, si jamais l’expérience s’apprenait par les livres. […] [NdA] Mme de Motteville nous apprend, dans ses Mémoires, que M. de Senneterre lui dit, le dernier jour de l’année 1647, « qu’il craignait qu’à l’avenir l’État ne fût troublé par beaucoup de malheurs ».
Camarade du jeune Racine, qui était petit-fils du grand poète, il reçut les conseils de Louis Racine, auteur du poème de La Religion, et il apprit à se rattacher à la tradition poétique du xviie siècle plus directement qu’on n’avait coutume de le faire de son temps. […] … Mais qu’avons-nous à apprendre à ceux qui ont lu son ancienne invocation À Némésis, et quelle rage pourrait étonner de sa part après l’imprécation contre sa mère ? […] Dans son duel prolongé avec le poète-grammairien Urbain Domergue ou avec Baour-Lormian, il n’eut pas toujours l’avantage ; il avait appris son secret à ses adversaires.
Il ne contribua pas seulement à fonder par souscription la première bibliothèque commune, la première société académique (qui deviendra l’université de Philadelphie), le premier hôpital ; il leur apprenait à se chauffer au logis par des poêles économiques, à paver leurs rues, à les balayer chaque matin, à les éclairer de nuit par des réverbères de forme commode. […] Franklin imagina un moyen de le gagner sans sollicitation ni bassesse, et ce moyen, ce fut de se faire rendre un petit service par lui : Ayant appris, dit-il, qu’il avait dans sa bibliothèque un certain livre très rare et curieux, je lui écrivis un mot où je lui exprimais mon désir de parcourir ce volume, et où je demandais qu’il me fît la faveur de me le prêter pour peu de jours : il me l’envoya immédiatement, et je le lui renvoyai au bout d’une semaine avec un autre billet qui lui exprimait vivement ma reconnaissance pour cette faveur. […] C’est une nouvelle preuve de la vérité d’une vieille maxime que j’avais apprise, et qui dit : Celui qui vous a une fois rendu un service sera plus disposé à vous en rendre un autre, que celui que vous avez obligé vous-même.
Elle m’aura fait un homme ; elle m’aura appris que je puis m’assurer toujours sur moi-même. […] Une nuit qu’il est de garde dans la tranchée, entre une et quatre heures, et que les balles et les grenades s’écrasent contre le parapet, il note les combinaisons et le scintillement des étoiles, et ajoute : « Il faudra que j’apprenne l’astronomie. » Cela est très beau. […] J’ai été habitué de longue date à la solitude ; j’ai appris à l’aimer et à la rendre féconde ; je travaille intérieurement le plus possible ; je sais vivre au milieu des gens qui me sont indifférents comme si j’étais seul, sans récriminations insensées contre eux et sans me ronger moi-même, en toute paix, avec un complet détachement de ceux auprès desquels je dois vivre.
Hugo nous apprend qu’en 1818, à seize ans, il paria qu’il écrirait un roman en quinze jours, et que Bug-Jargal provint de cette gageure. […] Puis, lorsque plus tard encore il vit sans doute qu’illusions pour illusions il ne fallait pas être trop dédaigneux des premières, il revint à Bug, le remania, conserva le cadre, mais le redora en mille manières, enrichit le paysage de ces couleurs où la Muse lui avait récemment appris à puiser, compliqua les événements, introduisit entre ses personnages le seul sentiment qui ait un attrait souverain pour la jeunesse, et d’où sortent les rivalités, les perfidies, les sacrifices, les incurables blessures ; il mit l’amour, il montra la douce Marie.
Jeunes gens qui voulons nous retremper et nous affermir dans l’intégrité politique, qui voulons espérer en l’avenir sérieux dont l’aspect momentanément se dérobe, qui sommes résolus à ne nous immiscer d’ici là à aucun mensonge, à ne signer aucun bail avec les royautés astucieuses, à ne jamais donner dans les manèges hypocrites des tiers-partis, faisons donc, pour prendre patience et leçon, ce salutaire voyage d’Amérique ; faisons-le dans Jefferson du moins ; étudions-y le bon sens pratique, si différent de la rouerie gouvernementale ; apprenons-y la modération, la tolérance, qui sied si bien aux convictions invariables, la rectitude, la simplicité de vues, qui, si elle s’abstient maintes fois, a l’avantage de ne jamais s’embarquer dans les solutions ruineuses ; apprenons-y, quelle que soit la vivacité de nos préoccupations personnelles sur certains points de religion, de morale, d’économie ou de politique, à ne prétendre les établir, les organiser au dehors que dans la mesure compatible avec la majorité des esprits : car la liberté et la diversité des esprits humains sont le fait le plus inévitable à la fois et le plus respectable qu’on retrouve désormais dans le côté social de toutes les questions.
Stanislas Julien ; on y apprend mille jolis petits détails bizarres, tout en se pénétrant d’une excellente morale en action. […] La déclaration de la duchesse de Berri, qui n’a guère rien appris de nouveau aux personnes bien informées, atteste l’obstination presque violente qu’on a dû mettre à l’obtenir, et l’importance qu’on attachait à l’enregistrement solennel d’un tel aveu.
Le moment où le vieux Tarass apprend d’un Juif qu’Andry est dans la place et qu’il figure dans les rangs des seigneurs polonais, sa stupéfaction à cette nouvelle, ses questions réitérées, toujours les mêmes, toujours empreintes d’une opiniâtre incrédulité, ce sont là des traits naturels, profonds, et tels qu’on est accoutumé à en admirer dans les scènes de Shakspeare. […] On apprend que les Tatars, profitant du départ des guerriers zaporogues, ont pillé la setch et emporté le trésor.
Ce Dieu maintenant est raisonnable ; il a beaucoup appris. Mais il n’a pas tout appris encore.
Ainsi, voulant tout enseigner et tout apprendre, absolument tout, n’admettant aucune ignorance partielle, on aboutit à un savoir littéral sans vertu littéraire. […] On ne la sait pas, on ne l’apprend pas : on la pratique, on la cultive, on l’aime.
Ceux-là, dès le berceau, sont nos maîtres, et la critique, loin de leur rien apprendre, doit tout apprendre d’eux.
On en apprend le motif dans une lettre qu’elle adressa à la comtesse de Saint-Géran ; lettre malheureusement sans date dans toutes les éditions des lettres de Maintenon. […] Une lettre écrite de Versailles, à Gobelin, sans date, lui annonce un nouveau don du roi. « J’avais, dit-elle, une grande impatience de vous apprendre que le roi m’a encore donné 100 000 fr. ; ainsi, en voilà 200 000 que j’ai à votre service. » Je prie de remarquer ce mot à votre service : il veut dire : pour vous aider à me trouver une terre à acheter, ce qui montre que Gobelin était un véritable agent de madame Scarron103.
Un Soulary récent et si complètement oublié nous apprend combien ça dure en France un prince du sonnet. […] S’il en était autrement, que pourraient bien nous apprendre les théories générales ?
Consultons l’une des plus grandes autorités de notre époque dans ce genre de recherches, Esquirol ; il nous apprendra : 1° qu’il faut bien distinguer la folie de toutes les affections nerveuses qui la compliquent et qui la masquent (paralysie, convulsions, épilepsie) ; — 2° que les lésions organiques de l’encéphale et de ses enveloppes ne sont en général observées que dans les cas de complication ; — 3° que toutes les lésions observées chez les aliénés se retrouvent souvent dans les cadavres d’individus qui n’avaient point perdu l’usage de la raison ; — 4° que dans un grand nombre de cas, le cerveau des aliénés ne présente aucune altération appréciable, quoique la folie ait duré un grand nombre d’années. […] N’est-ce pas comme si l’on disait : J’apprends la nouvelle de la mort d’un ami ; cette nouvelle imprime une secousse anormale à mon cerveau, et à la suite de cette secousse j’éprouve une grande douleur, d’où il suivrait que le chagrin causé par la mort d’un ami ne serait en réalité que la conséquence d’un mal de tête.