Ce qui est plus curieux pour nous, et ce qui d’ailleurs répond bien à l’idée qu’on doit se faire du philosophe et du solitaire de Segrès, c’est cette page qui est tout à fait d’un disciple de l’abbé de Saint-Pierre : Je ne connais aujourd’hui qu’un bon roi en Europe et un bon gouverneur en France, c’est le roi Stanislas, comme souverain de la Lorraine, et mon ami et voisin M. de Vertillac, gouverneur de la petite ville de Dourdan. […] Si j’étais en ce moment plus soigneux de la renommée de d’Argenson que de la vérité, j’omettrais de dire que, tout en appelant L’Esprit des lois un « grand livre », il mettait bien au-dessus, pour la solidité du raisonnement, plus d’un ouvrage oublié de ce temps-là, par exemple un livre qu’on croyait alors traduit de l’anglais et qui était du maître des comptes Dangeul, intitulé Remarques sur les avantages et les désavantages de la France et de la Grande-Bretagne par rapport au commerce ; et même un livre bien autrement radical et qui nous ferait peur aujourd’hui, intitulé Code de la nature ou le véritable esprit des lois, qu’il croyait de Toussaint et qui est de Morelly : « Excellent livre, s’écriait d’Argenson (juin 1756), le livre des livres, autant au-dessus de L’Esprit des lois du président de Montesquieu, que La Bruyère est au-dessus de l’abbé Trublet, mais contre lequel il n’y aura jamais assez de soufre pour le brûler, etc. » Morelly, dans cet ouvrage, dénonce la propriété comme le principe de tous les maux et de tous les vices existants. […] D’Argenson ose être lui-même sans peur du ridicule et parler à sa guise sans rien de cette « petite circonspection » qui en France, dit-il, « étête » tous nos personnages. […] Mon esprit a peu de curiosité d’autres esprits, mais mon imagination aime les images, et le bonheur coule de là chez moi par les sens, Je ne puis cependant ne pas dire un mot du livre des Considérations sur le gouvernement de la France, qui est ce qu’on cite d’abord quand on parle du marquis d’Argenson. […] Il pensait que les abus et les maux de l’ancien régime étaient venus au point d’exiger qu’on tirât la France, « non de dessous ses rois, à Dieu ne plaise !
Ce qu’il dit sur les événements qui se sont précipités depuis qu’il a quitté la France en 1791, il le devinait et le présageait à la date de sa sortie ; il est de ceux que la Révolution a le moins étonnés et déconcertés, même en allant à ses extrêmes conséquences. Si Mme de Créqui avait pu lire L’Émigré et si l’on avait osé en introduire en France un exemplaire à son adresse, elle eût reconnu son ami à chaque page et se fût écriée : « C’est bien lui. » L’action du roman est censée se passer en 1793. […] Il appelle à son aide les différents faits analogues dans l’histoire ; il discute les divers cas, le possible et le vraisemblable ; il est bien résolu en ceci, qu’il pense que la contre-révolution ne peut se faire qu’en France : mais de quelle manière y arriver ? […] Ma bibliothèque était composée en grande partie de livres sur la jurisprudence et sur l’histoire de France ; un de mes oncles qui était évêque m’avait, laissé une collection complète des procès-verbaux du Clergé, etc., etc. » ; et il montre que la Révolution qui s’accomplit a déjà mis beaucoup de ces livres à la réforme, et qu’elle va simplifier bien des sciences. […] Il poursuit ses raisonnements au sujet de la perte de sa bibliothèque, et démontre par des applications sa pensée : « À mesure que l’esprit humain avance, une multitude d’ouvrages disparaît. » Le président estime que nous n’avions pas en France, à sa date, de bons historiens : Un historien ne peut avoir de gloire durable que lorsqu’il approfondit la moralité de l’homme, et développe avec sagacité et impartialité les modifications que lui ont fait subir les institutions civiles et religieuses : alors il devient intéressant pour toutes les nations et pour tous les siècles… Ce n’est pas dans nos histoires qu’on apprend à connaître les Français, mais dans un petit nombre de mémoires particuliers, et je maintiens que l’homme qui a lu attentivement Mme de Sévigné est plus instruit des mœurs du siècle de Louis XIV et de la Cour de ce monarque, que celui qui a lu cent volumes d’histoire de ce temps, et même le célèbre ouvrage de Voltaire.
Un jour, du milieu de ces ignominies, qui ne laissaient pas de fournir matière à sa verve, Villon eut un accent de patriotisme, et il lança contre les ennemis de l’honneur français une ballade dont l’énergique refrain aurait encore son écho ; il maudit et honnit, sur tous les tons, qui mal vouldroit au royaume de France ! […] Mais ce legs, comme tant d’autres, m’a tout l’air d’avoir été quelque peu dérisoire et imaginaire : l’étudiant Villon dut ressembler de bonne heure à cet écolier du vieux fabliau qui avait joué aux dés tous ses livres et les avait dispersés à tous les coins de la France. […] Il dut cependant quitter Paris, et pendant quatre ans entiers il mena une vie errante et en France et aux frontières de France : l’idée de suicide lui traversa un instant l’esprit. […] Plus tard enfin, banni de Paris, lorsque, chevauchant sans croix ni pile par tous les chemins de France et de Navarre, il promenait son exil et sa misère d’une frontière à l’autre, méditant déjà dans sa tête et dans son cœur les confessions et les plaintes douloureuses du Grand Testament, l’arbre et le buisson de la route ne lui avaient-ils donc jamais parlé et fait oublier un instant ses douleurs, comme ils devaient un jour, plus d’une fois, calmer celles de Jean-Jacques vagabond ?
Prisonnier par accident, enlevé par une guérilla, enfermé, frappé de langueur, mourant après seize mois de misère sur un lit d’agonie, il ne parvenait point à apprendre distinctement son nom à la France et à l’histoire. […] Et puisque j’ai nommé Auguste Colbert, j’indiquerai, au tome III des Mémoires publiés par son fils, la belle Instruction envoyée par lui au ministre de la guerre, ce compte rendu de la situation morale de son régiment au moment de la paix d’Amiens et de la rentrée en France. […] L’ancienne France et la France nouvelle, le vieux maréchal disciple de Boufflers et le jeune colonel d’après Marengo se rencontrent dans un sentiment d’esprit patriotique et de moralité militaire élevée, Austerlitz semblait présager à Franceschi le plus beau sort. […] Ils ne voient point en lui un guerrier : il a beau faire, les militaires ne s’y tromperont jamais… » — Franceschi, qui n’avait que le grade de général de brigade en France, était général de division au service du roi Joseph, son premier aide de camp et l’un de ses écuyers, etc.
Ce que c’était qu’être classique au sens où l’avait conçu Du Bellay, et comme on l’a été en France jusqu’au temps de notre jeunesse, nous le savons tous, nous qui y avons passé et qui en avons été témoins ; mais nos neveux, je le crains, ne le sauront plus bien et auront peine à se le figurer dans la juste mesure. […] Il décerne à François Ier tous les éloges qui lui sont dus à cet égard, pour avoir commencé à restituer le langage français en sa dignité, et en avoir fait l’interprète public de la loi et de l’enseignement, au moins au Collège de France. […] Tant qu’on a été classique en France, que le goût du public a été tel, et d’un classique moyen, on a aimé la traduction en vers des poètes. […] Quel dommage qu’il n’ait pas rejailli quelque chose de ce sentiment patriotique dans l’effort courageux du xvie siècle ; que la tradition de la vieille France et de la France de la Renaissance ne se soit point unie et continuée par ce glorieux chaînon ou par quelque autre pareil ! […] L’éloge de la France qui s’y mêle est le pendant de celui que Virgile a fait de l’Italie dans les Géorgiques.
Il est l’un des premiers en France qui aient à ce point voyagé dans un simple but de littérature et pour aller étudier sur place, sous toutes les zones, les diverses productions de la pensée. […] Il a pensé avec les Bénédictins, et par des raisons que j’ose dire plus profondes, que l’histoire littéraire de la France ne se pouvait circonscrire aux siècles où l’on a commencé d’écrire en français. […] Pour lui, sa méthode est sûre ; elle est lente, mais inévitable ; il dispose ses lignes, il mesure ses bases, il croise ses opérations : on dirait d’un ingénieur sur le terrain faisant la carte de France. […] Dom Rivet qui, aidé de dom Duclou, de dom Poncet, de dom Colomb, de dom Tennes, ces humbles inconnus, est le principal auteur des neuf premiers volumes de l’ Histoire littéraire de la France, avait en vue, au point de départ, les travaux de La Croix du Maine et de Du Verdier, dans leurs Bibliothèques françoises qui s’arrêtent au xvie siècle. […] Histoire littéraire de la France avant le xiie siècle, chez Hachette.
On a beau faire, nous n’aimons en France à sortir de l’horizon hellénique et de ses lignes distinctes qu’à bon escient. […] Mais saint Colomban, arrivé tout exprès d’Irlande en France, y saisit en main l’influence religieuse, contrarie les directions romaines et se pose en ennemi mortel de Brunehaut. […] Toute cette histoire des Mérovingiens, sillonnée de tels points de vue, gagne singulièrement, sinon en rigueur, du moins en intérêt ; le temps n’est plus où une femme d’esprit, quand elle commençait à lire l’histoire de France, disait : Moi, je saute toujours la première race. […] La légitime gloire du talent qui, le premier en France, nous a rendu le goût et déroulé le tableau de ces grandes époques barbares, qui les a refaites et gravées en traits profonds, sobres et précis, pour notre agrément et à notre usage, cette gloire durable de l’historien épique demeure hors de cause, et ce n’est point par nous ici que la vérité de tel ou tel détail se débattra. […] La France a longtemps été monarchique ; elle a toujours assez et, trop aimé, sauf les intervalles, aller à un seul, obéir à quelqu’un ; et cette idée, qui trouverait ses retours jusque dans le triomphe de la démocratie, vaut bien la peine qu’en temps régulier, et même à travers l’apparente défaveur, on s’y arrête encore : l’observer à loisir et la reconnaître, c’est le bon moyen d’en moins abuser.
La Révolution sérieuse, dont la France était incapable, devait aboutir à la monarchie ; l’armée, enorgueillie de ses victoires et lasse d’attendre, allait transférer l’empire à un de ses chefs. La France réunit toutes ses mains en une pour applaudir. […] Vous avez ce bonheur, que les trois quarts de la France et de l’Europe vous devancent dans la voie des expiations et qu’un héros vous précède ; vous ne pouvez douter que Bonaparte ne veuille s’allier à la religion tôt ou tard, pour rendre au peuple l’obéissance et pour mettre sous la sanction du Dieu des armées l’autorité dont il s’empare. […] Fontanes amena son jeune ami au futur empereur ; c’était lui amener, dans un même homme, l’imagination de la jeunesse et des femmes, la religion et la pitié de la France : les trois prestiges de tout pouvoir nouveau. […] Quels étaient les amis de France qui eurent sur lui tout d’abord une influence si directe et si heureuse ?
L’histoire trouva sa forme, semble-t-il, dans le nord de la France, en Picardie, en Flandre, à la veille ou aux premiers jours du xiiie siècle : des traductions de la chronique du faux Turpin, deux notamment où l’emploi de la prose est signalé par les auteurs comme une excellente nouveauté, et une compilation de l’histoire universelle faite pour ce même comte de Flandre. […] Nous n’avons pas à nous arrêter aux vastes compilations qui sont formées en France, en Angleterre ou en Flandre. […] Il faut retenir aussi la chronique que vers 1260 rédigea un ménestrel de Reims : ce recueil confus et sans chronologie de tout ce qui se disait parmi le peuple sur les hommes et les choses de Terre Sainte, de France, d’Angleterre, entre 1080 et 1260, nous rend la couleur et le mouvement de la vie du temps. […] De retour en France, il était venu fréquemment à Paris, toujours bien accueilli de Louis IX, qui lui montrait une amicale confiance. […] Par un effort plus méritoire, cet aimable homme, qui regrette si tendrement la France et les siens, refuse de quitter la Terre Sainte : il y fait rester le roi, il y resterait sans lui.
Donnant libre cours à son vœu le plus cher, il essaya d’une France littéraire. […] Comme s’il avait voulu se targuer d’un joug secoué, son nom, sur la couverture jaune, s’étalait en plus gros caractères, mais la France littéraire rendit l’âme après trois ou quatre numéros ! […] « Revenu en France, en 1884, le vœu maternel le fixa à un emploi administratif qui lui laissait assez de loisir pour donner cours à ses goûts littéraires. […] La France, qui le fit barboter dans son auge aux fonds secrets, peut seule lui rendre un hommage que les Allemands lui refusent. […] Georges Izambard, qui fut, à Charleville, le professeur d’Arthur Rimbaud, nous décochait cette ballade sans venin, dans, la Jeune France, revue libre où Maurice Barrès publia des fragments de Sous l’œil des barbares.
Lucas sur le système pénal, et en particulier sur la peine de mort, il essaie de fixer dans ses limites et de rattacher à son principe le droit qu’a la société de punir, qu’il recherche les raisons qui rendent la vie humaine respectable encore jusque chez les criminels, et qu’il s’inquiète des moyens de régénérer ceux mêmes qu’on châtie ; soit que, réfutant la théorie brutalement matérialiste de Broussais, il se complaise à rétablir les titres authentiques, selon lui, et irréfragables, de la spiritualité et de l’énergie propre de l’âme ; soit enfin qu’abordant, à propos de l’Othello de M. de Vigny, la question de l’art dramatique en France, il se félicite de la disposition du public, et que, de ce côté aussi, il marque sa foi en un certain bon sens général qui semble mûr pour le vrai et pour le beau. […] … Qu’est-ce maintenant que le théâtre en France ? […] M. de Broglie eut les Affaires étrangères ; les dépêches, aujourd’hui publiées, montrent qu’eu égard aux circonstances d’alors et aux termes dans lesquels le problème était posé, il ne les dirigea point sans fermeté, ni sans un juste sentiment de la dignité de la France. […] Les puissances avaient signifié que, si elles croyaient avoir à secourir leurs alliés (il s’agissait surtout de l’Italie), elles le feraient sans tenir compte de l’opposition de la France, et elles donnaient à entendre qu’une intervention armée de sa part serait considérée comme une hostilité directe contre chacune d’elles. […] [NdA] On peut voir dans l’ouvrage de M. d’Haussonville (Histoire de la politique extérieure du gouvernement français, 1830-1848), la série des dépêches de M. de Broglie, qui réglèrent alors la ligne de conduite de la France à l’égard de l’Autriche en particulier.
De retour à Naples, devenu magistrat et conseiller du Commerce, tout en insistant sur certaines réformes positives et utiles, et en s’appliquant à les introduire dans son pays, il ne chercha point du tout, comme on disait en France, à propager les lumières. […] On oublia même les vignes pour ne parler que de froment et de seigle… Les blés et tout ce qui se rapporte à ce commerce étaient donc très à la mode durant le séjour de l’abbé Galiani en France. […] Galiani, très au fait de ces questions, et qui les avait étudiées avant son arrivée en France, avait en horreur les idées absolues en telle matière, et surtout la façon dogmatique, tranchante, mystérieuse et ennuyeuse, dont les économistes présentaient les leurs. […] Il paraît même que ce fut à quelque plaisanterie qu’il se permit à ce sujet et qui atteignait M. de Choiseul, pour les concessions que ce ministre faisait aux idées nouvelles, qu’il dut son rappel de France, sollicité près de sa cour par M. de Choiseul même. […] On n’a jamais mieux parlé de la France, on ne l’a jamais mieux jugée que l’abbé Galiani ; il faut l’entendre expliquer pourquoi Paris est la « capitale de la curiosité » ; comme quoi « à Paris il n’y a que l’à-propos » ; comment nous parlons si bien des arts et de toute chose, en n’y réussissant souvent qu’à demi.
Mirabeau déjà célèbre, et des plus en vue comme écrivain politique, avait fait, en 1788, la connaissance du comte de La Marck, grand seigneur belge au service de la France. M. de La Marck, fils cadet du duc d’Arenberg, avait passé au service de France à dix-sept ans, et y était devenu, à vingt (1773), colonel propriétaire d’un régiment d’infanterie allemande que lui avait laissé son grand-père maternel. […] Il développa ses idées sur la situation à M. de La Marck et ses vues générales sur une direction possible : « Le sort de la France est décidé, s’écria Mirabeau ; les mots de liberté, d’impôts consentis par le peuple, ont retenti dans tout le royaume. […] Six mois auparavant et lorsqu’il partait pour se faire élire en Provence, son père, le marquis, écrivait de lui au bailli (22 janvier 1789) : « Il dit hautement qu’il ne souffrira pas qu’on démonarchise la France, et en même temps il est l’ami des coryphées du Tiers. » La double pensée politique de Mirabeau, dès avant l’ouverture des États généraux, était tout entière dans ces deux conditions, tiers état et monarchie, et l’on peut dire qu’il ne cessa d’en poursuivre l’accord et le maintien depuis le premier jour de sa vie législative jusqu’à sa mort, avec toutes les secousses pourtant, les intermittences et les fréquents écarts qu’apportaient dans sa marche et dans sa conduite ses impétuosités d’humeur et de caractère, ses instincts d’orateur et de tribun, ses nécessités de tactique, et ses irritations personnelles. […] Car, ne l’oublions pas, l’objet constant de Mirabeau, dans ses notes et correspondances avec la Cour, de quelque date qu’elles soient, et quelles qu’en paraissent d’ailleurs les variantes de ton, son but fixe est de concilier la liberté nationale et la monarchie, de chercher à former la coalition entre le pouvoir exécutif et le pouvoir législatif, sans laquelle un empire tel que la France ne peut durer.
Adressons, avant tout, nos remerciements à la Société de l’histoire de France, qui, au milieu des circonstances pénibles où les lettres ont passé depuis 1848, n’a pas désespéré un seul instant de la patrie, je veux dire des études historiques sérieuses, et qui n’a pas fait trêve à ses publications. […] Mais les ducs et maréchaux de France prétendaient aussi avoir un banc dans l’église pendant la cérémonie, et ils menaçaient même de s’emparer de celui des évêques si on ne leur en donnait un ; en définitive, les maréchaux l’emportèrent. Le cardinal Mazarin, qui s’amusait de ces disputes, dit le soir même à Cosnac, pour le harceler, « qu’un maréchal de France s’était vanté en sa présence que, s’il eût trouvé un évêque assis et qu’il eût été debout, il l’aurait pris par la main et se serait mis à sa place ». […] Le cardinal lui avait dit en lui remettant son brevet : « Cela s’appelle faire un maréchal de France sur la brèche. » Ce brevet reçu, Cosnac, qui n’était abbé que le moins possible, va trouver l’archevêque de Paris : « Le roi, lui dit-il, monseigneur, m’a fait évêque ; mais il s’agit de me faire prêtre. » — « Quand il vous plaira ! […] Ils demandaient à la France du secours et un prince, ils demandaient Monsieur.
Peindre la France, les mœurs, les âmes, la physionomie nationale, la couleur des choses, la vie et l’humanité de 1789 à 1800, — telle a été notre ambition. […] Il ne faut pas oublier que Marie-Antoinette avait quinze ans et demi, lorsqu’elle arrive en France, lorsqu’elle tombe dans ce royaume du papillotage et du Plaisir, parmi cette génération de Françaises qui semblent représenter la Déraison, dans l’agitation fiévreuse de leurs existences futiles et vides. […] Ainsi tout le siècle tient dans ces quatre études, qui sont comme les quatre âges de l’époque qui nous a précédés et de la France d’où sont sortis le siècle contemporain et la patrie présente. […] Il rappellera comment, par les exigences de leur toute-puissance, par les lâchetés et les agenouillements qu’elles obtinrent autour d’elles d’une petite partie de cette noblesse, ces trois femmes anéantirent dans la monarchie des Bourbons ce que Montesquieu appelle si justement le ressort des monarchies : l’honneur ; comment elles ruinèrent cette base d’un état qui est le gage du lendemain d’une société : l’aristocratie ; comment elles firent que la noblesse de France, celle qui les approchait aussi bien que celle qui mourait sur les champs de bataille, et celle qui donnait à la province l’exemple des vertus domestiques, enveloppée tout entière dans les calomnies, les accusations et les mépris de l’opinion publique, arriva comme la royauté, désarmée et découronnée, à la révolution de 1789. […] La France, amusée dans son enfance par des hochets, bercée dans sa jeunesse par des prestiges de gloire, et parvenue enfin à la raison de l’âge mûr, s’est lassée de mensonges, d’illusions, de fables… Au lieu de cela, que nous ont offert les mémoires contemporains ?
Toute sa vie, dans tous les domaines de son activité, il s’est tenu au carrefour de deux routes, à l’angle de deux directions cardinales, il a oscillé entre le judaïsme, le christianisme et une sorte de paganisme poétique ; entre la France et l’Allemagne ; entre tous les genres, en prose et en vers. […] Plus tard Heine, devenu un des chefs du parti libéral, réclama et préconisa les institutions constitutionnelles de la France ; il demeura dans ce pays pendant la fin de sa vie. […] Il apportait à Paris les romances tendres, tristes et vagues que l’on chante de la Forêt Noire aux Alpes Tyroliennes ; il prit en France la souplesse et la prestesse d’intelligence, la grâce, la mesure et l’esprit que Beaumarchais a légués à ses petits-fils du boulevard. […] Il a été Français et admirateur de Napoléon en Allemagne, patriote allemand en France, choisissant toujours, il faut le remarquer, le parti le plus hasardeux. […] Venu en France, il parut dégoûté par le spectacle des institutions parlementaires qu’il préconisait, et rompit avec les libéraux allemands par son pamphlet contre Bœrne.
Née au dixième siècle, composée en partie de la langue romaine, qui était le reste du langage de nos premiers vainqueurs, de la langue des Gaulois ou des Celtes, de la langue des anciens sauvages des bords du Rhin, de la langue des Scandinaves ou des Danois, qui, sous le nom de Normands, vinrent ravager l’Europe, et s’établir en France après l’avoir désolée ; elle fut longtemps, comme la monarchie française, un amas de débris. […] Dans toute cette époque, l’empire grec fut presque une province de la France. […] La littérature espagnole, qui était alors très connue en France, dut contribuer encore à nous donner une fausse grandeur. […] La société, après les guerres civiles, dut acquérir en France ce degré de perfection qui, est nécessaire pour les arts, et qui, portée à un certain point, les anime, mais qui au-delà peut les étouffer et les corrompre : heureusement elle n’était point encore parvenue à cet excès ; et de la perfection de la société et du goût, jointe à celle de la langue, devait naître peu à peu celle de l’éloquence. […] On vit la France quarante ans aux prises avec l’Europe ; on vit des provinces conquises, tous les rois humiliés, ou protégés, ou vaincus, une foule de grands hommes, les arts et les plaisirs au milieu des batailles, partout un caractère imposant, et cet éclat de renommée, qui subjugue autant que la force, qui annonce la puissance, la fait et la multiplie : alors les esprits et les âmes se montèrent au niveau du gouvernement ; chacun fut jaloux de soutenir la dignité de sa nation.
Les comédies d’Athènes servaient, comme les journaux de France, au nivellement démocratique, avec cette différence, que la représentation d’une comédie remplie de personnalités contre un homme vivant, est un genre d’attaque, auquel de nos jours aucun nom considéré ne pourrait résister. Nous nous livrons trop peu à l’admiration, pour n’avoir pas tout à craindre de la calomnie ; les amis, en France, abandonnent trop facilement, pour qu’il ne soit pas nécessaire de mettre une borne à la violence des ennemis.
Ainsi les poëtes excellens qui ont travaillé en France et dans les païs voisins ont bien pu embellir, ils ont bien pu enjoliver, qu’on me pardonne ce mot, la poësie moderne ; mais il ne leur a pas été impossible de changer sa premiere conformation qui avoit son fondement dans la nature et dans le génie des langues modernes. Les tentatives que des poëtes sçavans ont faites en France de temps en temps pour changer les regles de notre poësie, et pour introduire l’usage des vers mesurez à la maniere de ceux des grecs et des romains, n’ont pas réussi.
en France ? […] Cet horizon, c’est le seizième siècle de France, et dans le seizième siècle, c’est la première moitié. […] Vous apprendrez que les bibliothèques de France ne possèdent, sur l’époque choisie par M. […] Ne serait-il pas dans les droits de la France de réveiller ses législateurs assoupis ? […] La France a repris le coq.
Rentré en France, sa fortune, jusque-là brillante, eut une première éclipse. […] Marot y était à la fois en France et hors des atteintes de laSorbonne. […] Il demande un « petit sauf-conduit » pour revoir la France. […] C’est une histoire de bourgeois de France qui cherchent distraction plutôt qu’aventures. […] Tous les genres que vous introduisez en France nous les avons, seulement sous des désignations plus modestes.
M. Anatole France maintient son droit à la fantaisie. […] M. Anatole France a donné, cette fois, toute liberté à la fantaisie, et l’a suivie en historiographe, relatant en termes exquis toutes les aventures que le hasard mettait au travers de son chemin. […] M. Anatole France. […] Dès ce moment commencent les aventures de la France. […] Henry Houssaye ; date d’une de nos années terribles et que ses derniers désastres n’ont pas fait oublier à la France.
La France n’avait rien qui approchât du Brockhaus. […] Vous pensez que vos livres n’en feront que mieux aimer la France. […] En cette cruelle année la France se couvrit de gloire et de honte. […] Mais si un grand capitaine a manqué à la France, la France ne s’est pas manqué à elle-même. […] L’éducation en France a perdu de sa force et de sa fermeté.
Je revendiquais le poète au nom du régime qui s’inaugurait, au nom de la France nouvelle. […] Fortoul en 1854 professeur de Poésie latine au Collège de France, en remplacement de M. […] Victor Hugo, qui était alors directeur ou président. — L’instabilité qui, après la Révolution de février 1848, semblait devoir présider pour longtemps aux destinées de la France, détermina M. […] Sainte-Beuve fut nommé professeur de Poésie latine au Collège de France en 1854, en remplacement de M. […] Sainte-Beuve a continué de figurer en qualité de professeur titulaire sur les affiches du Collège de France, mais il a depuis longtemps renoncé à tous ses droits.
Publiciste de la monarchie dans le livre des Considérations sur la France, il devenait le publiciste de la papauté dans ce dernier livre. Après avoir flatté la France, à laquelle l’auteur s’adresse comme à l’arbitre de tous les succès en littérature sacrée ou profane, il établit nettement la base d’une théocratie. […] La Terreur raisonnait-elle autrement en France en promenant de ville en ville l’instrument du supplice sur les ruines des temples dont elle immolait les ministres ? […] Comme le pape y donne des chapelets, et que tout est mode en France, on a fait à Paris une mode des chapelets ; chaque fille de joie a le sien. […] Cette chère Savoie, votre berceau, ne sait pas de quel côté elle va rouler, du haut de ses montagnes, dans la lutte de l’Allemagne et de la France.
l’histoire de la France contemporaine. […] Vers 1750 commencent à retentir en France des mots qu’on n’y entendait plus depuis longtemps. […] Il a pourtant, sans le vouloir, contribué au grand changement qui devait bouleverser la France. […] On peut affirmer, du reste, que l’Académie, institution aristocratique, autoritaire et centralisatrice, qui a été un grand instrument d’unification pour la langue française, voit son influence décroître dans la France nouvelle. […] Histoire critique des doctrines de l’éducation en France, I,421.
On peut observer depuis quelque temps par toute la France un fait général, et qui est caractéristique de notre époque. […] La ville d’Hesdin acquittait à la fois sa dette municipale envers une famille honorable et chère, et elle acquittait aussi la dette générale de la France envers un écrivain aimé, populaire, qui ne fut point heureux en son temps, qui n’eut jamais les honneurs littéraires et académiques, qui travailla constamment pour vivre, et qui, un jour de bonne fortune, a fait un chef-d’œuvre sans y songer. […] Revenu en France et à Paris, il a remis quelques endroits au ton d’un monde plus poli, plus prompt au dégoût. […] Après un long exil de sept ans, rentré en France en 1735, retiré quelque temps, pour la forme, à l’abbaye de La Croix-Saint-Leufroy au diocèse d’Évreux, chez l’abbé de Machault, où il voyait bonne compagnie, et d’où il correspondait avec Thieriot et avec l’abbé Le Blanc, qui lui donnaient des nouvelles littéraires ; ayant achevé sa courte pénitence spirituelle à Gaillon ; puis devenu l’hôte et l’aumônier commode et tout honoraire du prince de Conti, l’abbé Prévost, quoique souvent aux expédients jusque sous le toit d’un prince, vivait toutefois d’une existence relativement heureuse au prix de son ancienne vie errante, lorsqu’au commencement de 1741, un service de correction de feuilles, qu’il rendit imprudemment à un nouvelliste satirique, l’obligea de quitter de nouveau Paris et le royaume.
Biot qui rentrait en France, et s’étant rendu à l’île de Majorque pour y terminer l’opération entreprise, il y subit bientôt le contrecoup de l’effet produit par l’entrée de l’armée française en Espagne. […] De là, par l’intervention du consul de France, il fut embarqué sur un bâtiment de la Régence, qui faisait voile pour Marseille. […] Dubois-Thainville, consul de France à Alger : Pour tromper les ennuis d’une sévère quarantaine, dit M. […] Le retour d’Arago en France fit bruit dans le monde savant ; le jeune astronome devait à ses premiers travaux, rehaussés de cette suite de persécutions et d’aventures, une réputation précoce.
Il a très bien montré que c’était une grande nouveauté alors en France de lire Homère en grec, que dans l’Université même, et parmi ceux qui passaient pour doctes, on ne s’en avisait que depuis peu, et il en a fait un mérite à notre poète, qui, non content de l’étudier sans cesse, voulait encore l’imiter, le reproduire, et doter son siècle et son pays d’un poème épique : vain effort, mais noble pensée ! […] C’est à Fénelon qu’il en faut venir pour posséder l’esprit familier et adouci d’Homère, tout ce qui pouvait alors se naturaliser de lui en France et y être à l’usage de chacun dans une prose suave et persuasive. […] Une sorte d’Énéide était-elle possible en France au xvie siècle ? […] Michelet dans le dernier volume publié de son Histoire de France, où il traite de la Renaissance des lettres, a réengagé de plus belle le procès contre Ronsard : Dans une des tours du château de Meudon, dit-il, le cardinal de Lorraine, ce protecteur des lettres, logeait un maniaque enragé de travail, de frénétique orgueil, le capitaine Ronsard, ex-page de la maison de Guise.
En France, vers le même temps, combien de jeunes héritiers de la noblesse se comportaient plus ou moins de même ! […] Bonstetten fut au dehors de la France un de ces jeunes nobles, et des plus précoces, que l’esprit du xviiie siècle enflamma et transforma. […] Cette contradiction entre les mœurs et les idées, entre les manières et les doctrines, ne nous est pas nouvelle ; nous l’avons vue en France et chez La Fayette lui-même et chez Benjamin Constant. […] Au moment du départ de son jeune ami pour la France, il écrit à leur ami commun Nicholls : C’est pour le coup que mes soirées solitaires vont me paraître moins légères à passer qu’avant de l’avoir connu.
Après sa fuite de Motiers, après sa tentative manquée d’établissement en Angleterre, revenu en France, réfugié pendant quelque temps à Trie sous la protection du prince de Conti, il s’alarme, il se figure que la main du maître est insuffisante à le soutenir contre le mauvais vouloir des subalternes ; déjà il lit dans la contenance des habitants que la conjuration tramée contre lui opère : ce ne sont qu’allées et venues souterraines ; que va-t-il sortir des conseils caverneux de ces taupes ? […] S’il ne haïssait point la vie à laquelle cependant il imputait tant de maux, il ne haïssait pas non plus la France, sa vraie patrie, celle qui était la plus faite pour le goûter et le comprendre ; il écrivait : Les Français ne me haïssent point, mon cœur me dit que cela ne peut pas être. Je n’impute pas à la France les outrages de quelques écrivains que son équité condamne et que son urbanité désavoue. […] Aussi est-ce la France, est-ce Paris, le lieu du monde où il est le plus aisé de se passer de bonheur, qu’il avait choisi pour y achever de vieillir et de souffrir.
Neuf ou dix années se passèrent pour lui en études spéciales, en voyages : il parcourut en tous sens, et le crayon à la main, la France, l’Espagne, l’Italie ; il séjourna au moins une année à Rome. […] Entré à la Sainte-Chapelle en qualité d’inspecteur vers 1840, il dut se mettre à étudier particulièrement l’architecture gothique ; il recommença, en ce sens, des voyages ; il refit des comparaisons sans nombre, et plus attentives, en France, en Allemagne, en Italie encore, et bientôt sa vocation dans ce genre fut déterminée et constatée. […] En France, quoiqu’il y ait dans notre génie, dans notre tour naturel d’esprit et de langage, ainsi qu’Henri Estienne l’a dès longtemps observé, quelque chose qui nous rapproche davantage des Grecs, nous tenons des Romains par une filiation presque immédiate ; nous y tenons aussi par réflexion, par habitude et routine ; nous empruntons d’eux volontiers nos formules en tout ; dans nos jugements et dans nos raisonnements sur l’art, nous sommes latinistes. […] Il est de règle en France qu’on ne sait pas faire respecter un professeur insulté indécemment, et c’est toujours lui, en définitive, qui doit céder.
. — Retour en France ; camp de Boulogne. — Campagne d’Ulm […] Il montrait des goûts militaires très prononcés ; mais les circonstances étant peu favorables, les régiments suisses en France se trouvant licenciés par le fait de la Révolution, on le destina au commerce. […] Et avant tout, il faut bien se rendre compte de l’état de la science critique militaire en France pour apprécier ce qu’il y introduisit de tout à fait neuf, et qui mérita de faire événement. […] Ce sont ces deux écrivains militaires que Jomini, jeune, avait surtout étudiés et qu’il s’appliqua, le premier, à faire connaître à la France, en les résumant, les analysant et les mettant sans cesse aux prises dans son Traité.
Ce fut une gloire européenne : Elisabeth, Marie Stuart, le Tasse, souverains et poètes l’encensaient ; l’Angleterre, l’Italie, l’Allemagne, jusqu’à la Pologne enviaient à la France le rival d’Homère et de Virgile. Et le président de Thou ne croyait pas faire une phrase quand il disait que la naissance de Ronsard avait réparé la perte de la France, vaincue ce même jour à Pavie. […] Cependant Ronsard pouvait encore faire quelque chose de son sujet, s’il y avait versé les sentiments généraux de cette nation qui depuis un siècle et demi commençait à prendre conscience d’elle-même, s’il avait su imiter la « curieuse diligence » de Virgile, et jeté toute la France, ses souvenirs, son âme et son génie dans ce mythe érudit. […] Élégie sur les troubles d’Ambroise, 1560 ; Institution pour l’adolescence du Roy, 1562 ; Discours des misères de ce temps, 1562 ; Continuation, 1562 ; Remontrance au peuple de France, 1563 ; Responce aux injures et calomnies, etc., 1563.
Richelieu l’avait fait conseiller d’État et historiographe de France, sans peut-être se montrer disposé à utiliser les talents de Balzac dans les grands emplois auxquels celui-ci se serait estimé propre. […] Sur l’Hist. de France) au t. […] Il était très consiédré de Richelieu, et il fut de même en grand crédit auprès de Colbert, dont il fut le principal agent dans la répartition des libéralités royales entre les principaux savants et écrivains de France et d’Europe ; très écouté à l’Hôtel de Rambouillet, il eut jusqu’à la fin, en dépit de Boileau, l’estime et l’amitié de Montausier, de Retz, de Mme de Sévigné. […] Inéd sur l’Hist. de France, Paris, 1880-1883, 2 vol. in-4. — À consulter : Fabre, Chapelain et nos deux premières académies, Paris, 1800.
Les derniers temps de la comédie italienne en France La comédie italienne, pendant son premier séjour à l’Hôtel de Bourgogne, jeta un vif éclat. […] » Les femmes, de leur côté, exercent de justes représailles : « En France, dit Colombine, les hommes ne font que babiller jusqu’au jour de la noce ; aussi, quand ils sont mariés, ils n’ont plus rien à dire à leurs femmes. […] La mode nous en est venue presque aussitôt qu’en France. […] Nous en avons donc fini, à proprement parler, avec la comédie italienne en France.
L’abbé de Ciron pouvait être lié avec quelques amis et disciples de Saint-Cyran, l’institut fondé par Mme de Mondonville put être persécuté à ce titre, et finalement détruit, comme une succursale que les jansénistes avaient dans le midi de la France : mais ce n’était pas là et ce ne fut jamais l’esprit pur du sévère et intègre Port-Royal. […] Le Tellier, qui fut plus tard chancelier de France, et qui la soutint tant qu’il vécut. […] En fait, on chargeait surtout la maison de Toulouse et la supérieure de deux accusations graves : 1º d’avoir donné asile à deux ecclésiastiques, poursuivis pour avoir résisté aux ordres du roi dans l’affaire dite de la Régale ; 2º d’avoir une imprimerie clandestine, d’où sortaient, au moment voulu, des placards, et même de petits pamphlets théologiques, qui se répandaient dans tout le midi de la France. […] Un livre parut bientôt au milieu de la France indignée, qui fut à la fois le châtiment des vainqueurs et la consolation des vaincus.
Il est vrai que, pour traiter de tels sujets qui sont toujours un peu abstraits et moraux, il convient de parler dans le calme, d’être sûr de son attention et de celle des autres, et de saisir un de ces quarts d’heure de silence, de modération et de loisir, qui sont rarement accordés à notre aimable France, et que son brillant génie est impatient à supporter, même quand elle veut être sage et qu’elle ne fait plus de révolutions. […] L’Italie moderne avait ses classiques, et l’Espagne avait tout droit de croire qu’elle aussi possédait les siens, quand la France se cherchait encore. […] La meilleure définition est l’exemple : depuis que la France posséda son siècle de Louis XIV et qu’elle put le considérer un peu à distance, elle sut ce que c’était qu’être classique, mieux que par tous les raisonnements. […] En France, nous n’avons pas eu de grand classique antérieur au siècle de Louis XIV ; les Dante et les Shakespeare, ces autorités primitives, auxquelles on revient tôt ou tard dans les jours d’émancipation, nous ont manqué.