L’enthousiasme profond et sévère de Villehardouin ce vaste espoir qui se montre dans la description de la flotte, l’oubli de tout ce qu’il quitte dans son entraînement vers ce qu’il va chercher, ne sont pas moins propres à l’esprit français que le sens rassis de Joinville réfléchissant sur le danger qu’il brave, et se rendant bon témoignage à lui-même dans cette crainte qu’il exprime pour l’homme qui s’embarquerait avec une conscience mauvaise. […] Que ces grands mots de falsification, de trahison, conviennent mal, à propos d’une conscience si légère et d’un livre si peu ambitieux !
déesse dont le culte signifie raison et sagesse, toi dont le temple est une leçon éternelle de conscience et de sincérité, j’arrive tard au seuil de tes mystères ; j’apporte à ton autel beaucoup de remords. […] Providence de Jupiter, ouvrière divine, mère de toute industrie, protectrice du travail, ô Ergané, toi qui fais la noblesse du travailleur civilisé et le mets si fort au-dessus du Scythe paresseux, Sagesse, toi que Zeus enfanta après s’être replié sur lui-même, après avoir respiré profondément ; toi qui habites dans ton père, entièrement unie à son essence ; toi qui es sa compagne et sa conscience ; Énergie de Zeus, étincelle qui allumes et entretiens le feu chez les héros et les hommes de génie, fais de nous des spiritualistes accomplis.
., exécutèrent des pirouettes tout aussi prestes : les mœurs et les événements imposaient de semblables virements de conscience. […] Tant que la Bourgeoisie eut à redouter un retour agressif de l’aristocratie, les romantiques, emboîtant le pas aux historiens libéraux, ont fouillé le Moyen-Âge pour rapporter de sombres repoussoirs aux délices du temps présent ; mais dès que le Prolétariat, constitué en classe, devint l’ennemi, ils délaissèrent les romans historiques et les horreurs de l’époque féodale pour s’occuper des événements du jour : Zola, le lendemain des épouvantables massacres de la Semaine sanglante, afin d’épargner à la conscience bourgeoise le moindre remords, dépeignit, dans l’Assommoir, la classe ouvrière sous les traits les plus repoussants tandis que les George Ohnet décrivaient avec une servile complaisance l’âme généreuse et noble des maîtres de forges. — Les rapins de 1830 poursuivaient le bourgeois de leurs impitoyables railleries ; mais ayant compris, avec l’âge, que l’argent est un porte-respect, ils se sont domestiqués et ne travaillent que pour mériter l’approbation du bourgeois, qui achète leurs tableaux20.
Je persévérai dans mes études, et vers la fin de 1813 je résolus de vaincre les seules difficultés qui me restaient encore, et je me crus enfin en état de publier ce chef-d’œuvre, sinon avec toute la perfection désirable, du moins avec la conscience de n’avoir rien négligé pour me rapprocher autant que possible de mon modèle. […] Le soleil et la lune, le feu et le vent, la terre et le firmament, et la vaste étendue des eaux, le jour et la nuit, les deux crépuscules du matin et du soir, tous les éléments sont les témoins des actions les plus secrètes de l’homme : s’il n’a point agi contre la voix intérieure de sa conscience, le juge incorruptible le fait jouir d’une félicité éternelle ; mais si en étouffant cette voix il s’adonne au crime, il est condamné aux plus terribles châtiments. » Un tel discours, dans un tel moment, est déplacé ; on voit que dans ces poèmes les situations les plus pathétiques servent moins au développement des passions qu’au développement de la haute morale qui domine dans l’âme des poètes les passions elles-mêmes.
Non seulement un dénouement tragique troublerait la conscience du peuple, mais il blesserait la religion, qui révèle comme un dogme absolu l’absorption ou la réunion définitive de tout être à la source de son être dans le sein de la Divinité. […] En vain la conscience agitée se replie sur elle-même ; Bavahbouti va y chercher le crime et le remords, qu’il traîne au grand jour.
Si l’Académie n’avait elle-même conscience de sa propre faiblesse, elle ne cacherait pas absolument ses réunions derrière les rideaux impénétrables de son huis-clos ; si elle se savait capable, je ne dirai pas de quelque chose de bon, mais seulement de quoi que ce soit, elle publierait le rendu compte de ses réunions. […] Il y a trop longtemps que le diable sert à diriger les consciences faibles et douteuses ; entre les mains de l’Église, c’est un moyen de gouvernement, et voilà tout.
Ce ne fut qu’après mainte zizanie survenue et des manquements de parole qu’il était d’ailleurs trop aisé de prévoir, que la guerre sur un autre pied recommença et qu’il fut décidé qu’on pouvait en toute conscience déposséder des traîtres.
Du reste, il ne croit avoir à se justifier qu’en ce qui touche à Henri III, car envers le roi de Navarre il n’avait aucun engagement particulier ; Henri III assassiné (août 1589), il se pouvait considérer comme libre jusqu’à un certain point de suivre le parti de Mayenne, tant que Henri IV ne se faisait point catholique, et moyennant que lui-même il avait conscience de ne donner que les meilleurs avis possibles, les plus favorables à l’État, et de rester un bon conseiller jusque dans un méchant parti.
Par son cri d’alarme, il fait bien sentir le danger où fut à une certaine heure la France de se réveiller toute calviniste, au moins par la tête, c’est-à-dire à la Cour, dans les classes élevées et même dans la haute bourgeoisie ; car il y eut un moment de mode presque universelle pour la nouvelle religion ; la jeunesse parlementaire en était plus ou moins atteinte : « Il n’était fils de bonne mère, dit Montluc, qui n’en voulût goûter. » Montluc ne fait point la part de la conviction et de la conscience chez bon nombre de ses adversaires ; mais chez les chefs et les grands il fait très bien la part des motifs ambitieux et intéressés : « Si la reine (Catherine de Médicis) et M. l’amiral (de Coligny) étaient en un cabinet, et que feu M. le prince de Condé et M. de Guise y fussent aussi, je leur ferais confesser qu’autre chose que la religion les a mus à faire entretuer trois cent mille hommes, et je ne sais si nous sommes au bout… » Homme d’autorité et royaliste de vieille roche, il met bien à nu et dénonce l’esprit républicain primitif des Églises réformées et leur dessein exprès de former un État dans l’État.
On me dira que M. de Montmorency n’avait pas les mêmes raisons que M. de Chateaubriand d’être irrité au vif et ulcéré, que ses talents ne le dévoraient pas, qu’il n’avait pas la conscience d’être le plus habile et le seul capable de mener à bien la monarchie.
Mais en conscience, je ne savais pas M. de Laprade si étouffé ni si comprimé dans sa voix et dans ses pensées ; je ne le savais pas si mal apparenté avec le régime actuel5.
C’en était fait : peu importait, de part et d’autre, les pertes peu considérables en elles-mêmes ; l’effet moral était produit ; la honte du 20 mai était réparée ; l’armée française avait acquis conscience d’elle-même, elle existait ; l’ennemi le sut et, à dater de ce jour, se mit à la respecter, à la craindre.
C’est, on le devine, même quand M. l’abbé Moigno ne nous l’aurait pas appris (n° du Cosmos du 7 février 1862), c’est que le vieillard avait changé, c’est qu’il avait remis depuis des années sa conscience en des mains pieuses, mais en des mains étrangères ; c’est que le Père de Ravignan ou le Père de Pontlevoy, cités avec éloge à un endroit du travail, avaient passé par là, et qu’il y a un petit souffle imperceptible venu du Vatican ou du voisinage, qu’on ne voit pas, mais qu’on sent, et qui, dans ce compte rendu du procès de Galilée, est bien capable à la fin d’irriter les âmes non patelines et grossièrement généreuses14.
Comment voudriez-vous en conscience que Gœthe acceptât Quasimodo, lui qui, même quand il a fait son diable, Méphistophélès, l’a présenté beau encore et élégant ?
On entendait dans le bois de Tanit le tambourin des courtisanes sacrées ; et, à la pointe des Mappales, les fourneaux pour cuire les cercueils d’argile commençaient à fumer. » J’admire la conscience et le pinceau du paysagiste : mais de même que Salammbô m’a rappelé Velléda, je me rappelle inévitablement ici tant de belles descriptions de l’Itinéraire, et particulièrement Athènes contemplée du haut de la citadelle au lever du soleil : « J’ai vu du haut de l’Acropolis le soleil se lever entre les deux cimes du mont Hymette… » Le panorama de Carthage vue de la terrasse d’Hamilcar est un paysage historique de la même école, et qui accuse le même procédé ; ce qui ne veut pas dire qu’il ne soit pris également sur nature, du moins en ce qui est des lignes principales.
Tout dans ses œuvres et dans ses écrits annonce et déclare si bien la netteté de la conscience, l’habitude de l’honnête homme en lui, qu’il serait bien surprenant qu’il se fût montré autre dans les actes de sa vie.
A la fin, Bossuet, comme s’il avait pourtant la conscience de s’être un peu trop attardé, se secoue et se relève : il dit quelque chose à l’adresse des critiques et de ce Richard Simon dont il avait écarté jusque-là l’idée.
C’est alors sans doute que, pour apaiser ses scrupules et pour épurer le passé, il contracta un mariage de conscience avec Mlle Leduc.
Mais ce n’est que vers 1828 que cette école (j’emploie souvent ce vilain mot pour abréger) a pleine conscience et science d’elle-même, qu’elle s’organise avec plus d’étude et de sérieux, qu’elle marche en avant d’un air d’ensemble, chacun sur son point, et plusieurs avec originalité.
Le pays était beau, les fonctions médiocrement assujettissantes ; il paraît les avoir remplies avec, plus de conscience et d’assiduité que de goût.
Voyez ce que fait le crime au milieu d’une nation ; des persécuteurs toujours agités, des persécutés toujours implacables ; aucune opinion qui paraisse innocente, aucun raisonnement qui puisse être écouté ; une foule de faits, de calomnies, de mensonges tellement accumulés sur toutes les têtes, que, dans la carrière civile, il reste à peine une considération pure, un homme auquel un autre homme veuille marquer de la condescendance ; aucun parti fidèle aux mêmes principes ; quelques hommes réunis par le lien d’une terreur commune, lien que rompt aisément l’espérance de pouvoir se sauver seul ; enfin une confusion si terrible entre les opinions généreuses et les actions coupables, entre les opinions serviles et les sentiments généreux, que l’estime errante ne sait où se fixer, et que la conscience se repose à peine avec sécurité sur elle-même.
Il semble reposer tout entier sur cette gageure, de ne donner à la poésie aucun point d’appui ni dans la réalité extérieure ni dans la conscience intime.
Écrivains et artistes ont conscience d’être un même monde, de poursuivre pareilles fins par des moyens divers ; et ces rapports tendent à rendre aux écrivains le sens de l’art, leur rappellent qu’ils sont créateurs de formes et producteurs de beauté.
Mais la poésie contemporaine (et je suppose ici réalisées toutes les promesses, sans doute inconscientes, qu’elle contient), a pris conscience de sa véritable nature.
Je suis calme comme on l’est quand la conscience ne reproche rien ; j’ai un profond regret d’abandonner mes pauvres enfants.
Le numéro était une fois par semaine rempli tout entier d’une fantaisie de Banville, et pour montrer à quel point on laissait ce poète hausser le ton coutumier de journaux, nous citerons de lui cette magnifique phrase, dont le pendant ne se trouvera guère dans nos quotidiens : « Ainsi dans le calme silence des nuits, aux heures où le bruit que fait en oscillant le balancier de la pendule, est mille fois plus redoutable que le tonnerre, aux heures où les rayons célestes touchent et caressent à nu l’âme toute vive, où la conscience a une voix, où le poète entend distinctement la danse des rhythmes dégagés de leur ridicule enveloppe de mots, à ces heures de recueillement douloureuses et douces, souvent, oh !
Quelquefois ils naissent d’une protestation de la conscience contre les mœurs et les institutions d’un temps, et par là ils ont encore leurs raisons d’être dans le temps lui-même : par exemple, la révolution de Socrate ou celle de Rousseau ; mais il ne faut pas exagérer le point de vue des origines extérieures des systèmes philosophiques.
Maurice Barrès donna Sous l’œil des Barbares, les causeurs et les critiques trop nombreux qui parlent des livres après les avoir à peine feuilletés, s’imaginèrent que l’auteur entendait par ces Barbares, à la mode romantique, les imbéciles, les bourgeois, les Philistins, tandis qu’au contraire il comprenait dans ce terme tous les hommes, fussent-ils de la plus haute, de la plus délicate culture, qui attentent à l’intégrité de notre moi, ou empêchent que nous en prenions pleine conscience.
Sachons que l’on trouve dans tous les partis, non seulement des honnêtes gens, ce qui est incontestable ; mais des hommes éclairés et généreux, dont les opinions et la conduite, dictées par les lois les plus rigoureuses d’une conscience austère, sont indépendantes des positions diverses où ils peuvent être placés.
je ne me fie pas à ces récits qui, s’ils étaient vrais, ne prouveraient que l’épouvantable anarchie des intelligences et la nuit qui a remplacé, dans la conscience humaine, l’impérieuse lumière de la fierté et des devoirs !
Une jatte de lait, une chemise blanche et une conscience pure… » Il a la savoureuse et forte sagesse de ceux que l’Évangile a calmés, et c’est à son génie et à ses œuvres bien plus qu’aux meilleurs des vins de la terre, qu’on pourrait donner ce doux nom de larmes du Christ, que les hommes, consolés de tout par une jouissance, ont donné à quelques gouttes d’éther parfumées de soleil !
Dans ces moments où tout fuit, mais où la vertu reste ; où les flatteries et les éloges de cinquante années se taisent pour laisser élever la voix de la conscience et de la vérité qui ne meurt pas, où l’âme tranquille et courageuse pèse dans un calme terrible tout ce qui a été, et seule avec elle-même, apprécie les crimes, les succès, les victoires, et toutes ces tristes grandeurs humaines qui vont la quitter ; dans ces moments il se reprocha d’avoir sacrifié à un vain désir de gloire la félicité des peuples.
Juger de tout, apprécier la vie, peser la crainte et l’espérance, voir et l’intérêt des hommes, et l’intérêt des sociétés, s’instruire par les siècles et instruire le sien, distribuer sur la terre et la gloire et la honte, et faire ce partage comme Dieu et la conscience le feraient, voilà sa fonction.
Mais pour cette vierge comme pour toute femme, il n’y a pas de bonheur, il n’y a pas de vie et conscience de vivre sans l’amour : elle songe à ceux qui devraient s’aimer et qui ne se connaissent pas : Ah ! […] Pour arriver à cet état de sympathie universelle, à cette sorte de nirvâna panthéiste, il faut d’abord avoir pris conscience de soi-même, s’être dissocié du monde extérieur, s’en être isolé comme une particule chimique. […] La poésie de Cécile Sauvage est bien son propre reflet : c’est par son chant qu’elle a pris conscience d’elle-même et de la nature, qu’elle sent battre, à ses tempes, comme une artère enfiévrée. […] Cette mort, pour elle, ne la flatte ni né l’attriste : déjà son organisme (dont sa petite conscience n’est en somme que l’inscription inconsciente) redemande de la joie, du sommeil, de l’amour, comme tous les jours.
Brunetière a dit qu’elle en était la conscience. […] N’est-ce pas souvent à l’étranger que l’on prend le plus clairement conscience de sa qualité de Français et des raisons qu’on peut avoir d’en être fier ? […] Ce païen sensuel dépasse l’épicuréisme égoïste des médiocres ; il brave parfois la morale établie et n’a pas du tout la notion du péché ; mais il a une conscience et un idéal. […] Je crois pouvoir rassurer la conscience de M. […] Il faut que chacun fasse son examen de conscience et sache exactement qui il est et quel est son bien, avant d’entrer avec les autres dans le nouveau siècle.
Il a montré en eux les formes diverses de la conscience humaine. […] Elle n’eut jamais pleine conscience d’elle-même, cette divine enfant. […] Il a pour confrères à l’Académie deux grands directeurs de consciences. […] Et il met ainsi saint Ambroise un peu malicieusement du côté des défenseurs les plus modernes et les plus impétueux de la liberté de conscience. […] Théologien profond et moraliste austère, il agit d’après les suggestions de sa conscience et les mouvements d’une foi exaltée par le jeûne et l’insomnie.
Les vérités subjectives sont celles qui découlent de principes dont l’esprit a conscience et qui apportent en lui le sentiment d’une évidence absolue et nécessaire. […] Mais ce rapport ne peut être absolu qu’autant que les conditions en sont simples et subjectives, c’est-à-dire que l’esprit a la conscience qu’il les connaît toutes. […] De même, quand nous raisonnons sur nos propres actes, nous avons également un guide certain, parce que nous avons conscience de ce que nous pensons et de ce que nous sentons. […] En effet, nous devons avoir conscience de l’incertitude de nos raisonnements à cause de l’obscurité de leur point de départ. […] Le point d’appui du corps, c’est le sol dont le pied a la sensation ; le point d’appui de l’esprit, c’est le connu, c’est-à-dire une vérité ou un principe dont l’esprit a conscience.
Certaines altérations de l’organe cérébral amènent la folie, font disparaître la liberté morale comme l’intelligence et obscurcissent la conscience chez l’aliéné. […] Tout le monde sait que les anesthésiques, l’éther, le chloroforme, ont la propriété d’éteindre momentanément la sensibilité, et par conséquent d’empêcher le malade qu’on opère d’avoir conscience et souvenir de la douleur, ce qui équivaut à sa suppression. […] C’est sur le protoplasma plus délicat des centres nerveux que l’anesthésique porte d’abord son action, et ce sont en effet les phénomènes de la conscience et de la perception sensorielle qui disparaissent les premiers, tandis que le protoplasma des nerfs, des muscles, des glandes et des autres
Leur examen de conscience est aussi profitable à nous qu’à eux. […] Il a conscience de ce qu’il a fait. […] Faustus entend ces plaintes, les reconnaît et sent se réveiller en lui la conscience et la sympathie fraternelles. […] Il me suffira de dire que le nom d’Hector Malot recommande Conscience aux lecteurs qui veulent qu’on les respecte alors même qu’on les divertit. […] C’est sa conscience qui lui parlait ainsi, mais il se persuada que c’était un diable, et il cessa de se tourmenter.
J’entendais un jour une femme d’esprit, une des pénitentes de Dumas fils, dire, en parlant de son directeur de conscience : « Il est incroyablement naïf. […] Orphelin de père et de mère, il ne devait compte de ses actes qu’à sa conscience de gentilhomme et de ses pensées qu’à Dieu. […] Non, la main sur la conscience, je n’ai pas de remords. […] Si, l’ayant au bras, vous rencontrez votre professeur, votre oncle, ou votre directeur de conscience, il croira qu’elle est votre cousine, votre belle-sœur, quelque jeune parente fraîchement débarquée de province. […] François Coppée est Parisien ; il l’est avec délices et avec conscience, il l’est adorablement.
Il sait que tous ces hommes sont de la même espèce que lui-même, qu’ils ne sont coupables d’autres crimes que de ceux qu’ils ont commis sur cette terre, que leur conscience est née pure, qu’ils n’ont point de souillure originelle, et qu’en naissant ils le valaient ; mais que pensera le partisan du nouveau système ? […] On fait tout par eux et devant eux ; l’ordre du prince est leur volonté, et son caprice leur conscience ; trahison, rapt, calomnie, assassinat, ils prêtent à l’instant leur main, leur langue, leur approbation ou leur silence. […] Là-dessus les lettres de Racine sont extrêmement touchantes ; son ménage est pauvre, triste ; il est souffrant, il a toujours quelque enfant malade ; une de ses filles a des tourments de conscience ; une autre se fait religieuse ; il en a le cœur déchiré, mais il se résigne. […] » Ni l’amour de la gloire, ni la joie du succès, ni l’espoir du salut, ni l’entraînement de la lutte, ni le goût des affaires ne le soutenaient, mais la seule conscience ; comme un pilote sans espérance, il gouvernait son navire, sentant que son navire devait sombrer. […] Toutes sont saintes, et la griffe intérieure du scrupule est là pour les imprimer dans la conscience terrifiée.
Certes, c’est en conscience qu’ils maudissent les profanateurs qui viennent troubler ce culte heureux qui, en échange de petites pensées arrangées en jolies phrases ; leur vaut tous les avantages que le gouvernement d’un grand peuple peut conférer, les cordons, les pensions, les honneurs, les places de censeurs, etc., etc. […] Voici bientôt soixante ans, monsieur, que j’admire Mérope, Zaïre, Iphigénie, Sémiramis, Alzire, et je ne puis pas vous promettre en conscience de siffler jamais ces chefs-d’œuvre de l’esprit humain. […] « C’est monsieur un tel qui a ou l’heureuse idée du poing coupé » ou bien : « Monseigneur, quand vous ne parlez pas, ma foi, je vote suivant ma conscience ».
C’est notre devoir strict, et mistress Bute s’acquitte du sien en conscience. […] L’auteur a pris la place de notre conscience, et le roman, transformé par la réflexion, devient une école de mœurs. […] Il punit en homme convaincu, qui tient sur sa table une liasse de preuves, qui n’avance rien sans un document ou un raisonnement, qui a prévu toutes les objections et réfuté toutes les excuses, qui ne pardonnera jamais, qui a raison d’être inflexible, qui a conscience de sa justice, et qui appuie sa sentence et sa vengeance sur toutes les forces de la méditation et de l’équité.
Mais quelle conscience, quelle probité, quelle délicatesse de sentiments, quelle abnégation personnelle ! […] il emporte jusque dans la mort la conscience d’avoir vécu.
. — On peut comparer la sourde élaboration dont l’effet ordinaire est la conscience à la marche de cet esclave qui, après les jeux du cirque, traversait toute l’arène un œuf à la main, parmi les lions lassés et les tigres repus ; s’il arrivait, il recevait la liberté. Ainsi s’avance l’esprit à travers le pêle-mêle des délires monstrueux et des folies hurlantes, presque toujours impunément, pour s’asseoir dans la conscience véridique et dans le souvenir exact77.
Les premiers gravent en traits de foudre les dogmes éternels ou imaginaires dans la conscience ; les seconds écrivent en caractères de pierre ou de bronze les tables des lois ou les constitutions des sociétés politiques. […] J’ai voulu relire récemment sa constitution, modèle qu’il présente aux hommes comme un type des sociétés politiques accomplies ; j’ose déclarer en toute conscience que le délire d’un insensé joint à la férocité d’un scélérat ne pouvait jamais arriver aux excès d’absurdité et aux excès d’immoralité de ce prétendu sage tombé en folie et en fureur pour avoir trop bu l’idéal dans la coupe de l’imagination.
C’est ainsi que le saint homme servait en conscience un amour naissant, en croyant servir le ciel ; c’est la première fois sans doute que la piété la plus sincère sonnait à des profanes l’heure des rencontres. […] C’était la ville hanséatique des consciences et des opinions.
Cela explique pourquoi les époques les plus littéraires, au sens étroit du mot, sont celles où la nation retrouve le calme dans un ordre accepté par la grande majorité ; où il se forme pour un temps une quasi-unité de la conscience collective ; où le régime établi, quel qu’il soit, féodal, monarchique, démocratique, donne une impression de stabilité. […] La puissance de l’argent, qui permet d’acheter des votes, des journaux, des sièges au Parlement, et les privilèges de l’Église qui a gardé mille moyens de peser sur les consciences, font échec à la liberté des citoyens.
D’autres, pris, semble-t-il, avec une particulière conscience, au plein milieu de l’humanité courante, Charles Bovary, cet être essentiellement médiocre et chez qui une bonté molle ajoute à l’insupportable pesanteur morale, — Jacques Arnoux, plus canaille et plus réjoui, mais non moins irresponsable, béat, et odieux, traduisent tout ce que le type humain social de la moyenne contient de lourde bassesse et de haïssable laisser-aller. […] Enfin certains passages de ses lettres indiquent à la fois l’une et l’autre de ces tendances, la conscience qu’eut Flaubert de leur coexistence, et la solution probable de cet antagonisme.
Jamais la conscience du genre humain n’écrivit avec plus d’autorité et d’évidence ces lois inspirées de Dieu, qui sont le code inné de l’être créé pour vivre de justice, de dévouement et de vertu en société. […] Tout y est passionné, mais calme ; la raison y plane sur la passion ; tout y est naïf comme la nature surprise dans ses cris les plus spontanés : jamais elle n’inspira à une poésie des accents plus vrais et plus intimement émanés de l’émotion et de la conscience.
Son caractère distinctif était un vif sentiment de l’honnête, une conscience droite et ferme qui fut révoltée des honteuses conséquences de la philosophie à la mode. […] Kant avait la conscience de la révolution qu’il entreprenait ; il avait jugé son époque et compris ses besoins.
Les heures de la nuit s’écoulaient et je ne m’en apercevais pas ; je suivais avec anxiété ma pensée, qui de couche en couche descendait vers le fond de ma conscience, et dissipant l’une après l’autre toutes les illusions qui m’en avaient jusque-là dérobé la vue, m’en rendait de moment en moment les détours plus visibles.
Il semble que le grand fabuliste ne l’ait voulu traiter que pour l’acquit de sa conscience et pour en tirer vite la moralité.
Douze ans après, au lit de mort lui-même, et durant sa dernière maladie, Töpffer revenait sur cette méditation, sur cette énigme de la destinée, dont il avait désormais une pleine conscience, et il la dénouait, selon sa mesure, en homme de famille, en époux et en père, pieux, résigné et saignant : « Renoncer au monde, si l’on prend le précepte à la lettre, disait-il, c’est fausser sa destinée en dépravant sa nature.
Cette obstination à donner à Walt la découverte de la décomposition de l’eau, ajoute ingénieusement M. de La Rive, tenait à un remords de conscience ; il voulait le dédommager de lui avoir enlevé l’invention de la machine à vapeur pour la donner à Papin.
Navier, médecin et chimiste à Châlons-sur-Marne, prononcé le 16 mars 1781, parlant d’une polémique que soutint cet académicien et dont il aurait pu se dispenser, Vicq d’Azyr disait avec la conscience d’un homme qui a éprouvé le venin des libellistes : Ceux qui travaillent avec courage à l’édifice des sciences peuvent-ils donc ignorer qu’il y a une classe d’hommes uniquement occupés à détruire, qui mettent toute leur gloire à troubler celle des autres, toute leur jouissance à les affliger, toute leur adresse à les distraire, dont on est sûr de triompher en n’engageant point le combat, et avec lesquels toute autre victoire compromettrait celui qui ne craindrait pas de souiller ses mains en cueillant de semblables lauriers ?
Ces tableaux de Léopold Robert résultaient d’études d’hommes et de femmes vus sur place, rendus avec sagacité et conscience dans leur physionomie, dans leur caractère intime et leur génie natif, et groupés ensuite par l’artiste dans une composition longuement méditée et savamment réfléchie : ce sont de grandes idylles de Théocrite en peinture, reconstruites avec l’effort heureux et le sentiment plus rassis qui préside à une scène des Géorgiques.
En ne considérant même ce pèlerinage que dans le sens philosophique, n’a-t-on pas quelques réflexions satisfaisantes à faire dans un lieu où la faible et souffrante humanité vient chercher des secours contre les maux de l’âme, un lieu que les consciences effrayées regardent comme un port assuré contre les orages qui les tourmentent, où l’infortuné dévoré de scrupules trouve contre des remords, peut-être imaginaires et factices, des remèdes sûrs, et par cela même précieux ?
Il faut se placer dans le point de vue intime de la conscience, et, ayant alors présente cette unité qui juge de tous les phénomènes en restant invariable, on aperçoit le moi, on ne demande plus ce qu’il est.
Il avait ses troubles, ses défaillances intérieures, je le sais : nous reviendrons, au moins pour l’indiquer, sur ce côté faible de son âme et de sa volonté ; son talent, plus tard, sera plus viril en même temps que sa conscience moins agitée ; ici il est dans toute sa fleur délicate d’adolescence.
On le voit, lui-même il n’est pas sans avoir conscience d’une partie de sa folie.
C. de Lafayette ne s’attribue en rien cette supériorité dont il ne peut s’empêcher cependant d’avoir conscience, et il n’en fait pas honneur à son propre talent ; il aime à la rapporter à des maîtres, à des devanciers qu’il nomme et que parfois même il exagère un peu (nous avons le droit de le remarquer).
Que vient-on nous parler de mythe, de réalisation plus ou moins instinctive ou philosophique de la conscience humaine se réfléchissant dans un être qui n’aurait fourni que le prétexte et qui aurait à peine existé ?
En a-t-il eu conscience, ou sa voile n’a-t-elle fait qu’obéir à l’air du temps et prendre le vent sans manœuvre aucune ?
Ils ont la fierté et la conscience d’eux-mêmes et de leur noblesse, « un facile et gracieux langage, un sentiment exquis du beau dans la pose et dans le costume, une intelligence subtile, un amour extraordinaire de l’étude. » Cet amour de l’étude, hérité et renouvelé des ancêtres, est porté à un point qu’on ne se figure pas.
Envie, bassesse, hypocrisie, osent revêtir le manteau d’une conscience pure, et de leur conjuration naît tout mon malheur.
Racine ne put jamais s’y décider ; il se donnait pour excuse de conscience qu’en restant sur ce terrain glissant il pouvait mieux servir à l’occasion les religieuses de Port-Royal ; mais au fond il ne pouvait se résoudre à se sevrer de ces douceurs enchanteresses : il était atteint de la même-faiblesse que Bossuet qui, lui aussi, se montra aussi longtemps qu’il put à Versailles et qui, même à la fin, et à bout de force, s’y traînait ; il était affecté de la même faiblesse encore que M. de Pomponne, le plus aimable des Arnauld, mais un Arnauld amolli, qui, tout octogénaire et tout pieux qu’il était, ne pouvait se décider à résigner le ministère et qui, apprenant la retraite chrétienne de M.
Ce pauvre seigneur a toujours eu sa connaissance ; il a mis ordre à sa conscience de lui-même.
Sainte-Beuve ne crut pas pouvoir faire cette concession : « Je ne veux blesser la conscience de personne, dit-il ; je l’ai toujours évité ; mais ici ce n’est pas même l’épiderme d’un catholique que j’ai atteint ; ce serait la première fois depuis quarante ans que je ferais une concession de ce genre. » Et il écrivit à M.
Après cette sublimité de vertu, qui fait trouver dans sa propre conscience le motif et le but de sa conduite, le plus beau des principes qui puisse mouvoir notre âme est l’amour de la gloire.
En peignant les jouissances de l’étude et de la philosophie, je n’ai pas prétendu prouver que la vie solitaire soit celle qu’on doit toujours préférer : elle n’est nécessaire qu’à ceux qui ne peuvent pas se répondre d’échapper à l’ascendant des passions au milieu du monde ; car on n’est pas malheureux en remplissant les emplois publics, si l’on n’y veut obtenir que le témoignage de sa conscience ; on n’est pas malheureux dans la carrière des lettres, si l’on ne pense qu’au plaisir d’exprimer ses pensées, et qu’à l’espoir de les rendre utiles ; on n’est pas malheureux dans les relations particulières, si l’on se contente de la jouissance intime du bien qu’on a pu faire, sans désirer la reconnaissance qu’il mérite ; et dans le sentiment même, si n’attendant pas des hommes la céleste faculté d’un attachement sans bornes, on aime à se dévouer sans avoir aucun but que le plaisir du dévouement même.
Mais il est comme la conscience de son siècle : j’aperçois chez lui nettement ce qu’il faudrait beaucoup de peine et de temps pour analyser dans la société et dans la littérature du temps ; il révèle certains dessous, qui expliquent les caractères apparents.
Négation de la métaphysique, souveraineté des lois physiques, déterminisme, évolution, progrès, nécessité et efficacité de l’expérience, réduction de la conscience morale à une disposition organique héréditaire que modifient les habitudes et les sensations, en théorie poursuite de la jouissance, en pratique accomplissement du bien : voilà les principales idées que met en lumière la forte unité du fameux livre de d’Holbach.
Scribe et le genre Sardou ; puis à faire aimer les idées au théâtre, idées de psychologie, de morale, de philosophie, traduites dramatiquement, c’est-à-dire en états concrets de conscience, en résonances de la sensibilité, en tensions de la volonté.
Il faut admirer en elle la conscience nette qu’elle conserve de sa destinée.
Ce sont des flambeaux menaçants qui éclairent tout à coup les ténèbres de toutes ces dispositions équivoques où s’embarrasse notre conscience, et qui nous y montrent le mal si près du bien, et le bien si mélangé de mal, qu’ils nous font peur même de notre honnêteté.
Son beau minois tu ne verras, Si tu fais quelque manquement… Les confesseurs n’avaient eux-mêmes qu’un rôle secondaire et subordonné à l’influence de la supérieure, qui tenait en main la clef des consciences.
Le crime eut de l’écho par-delà les mers : L’Hôpital, ce représentant de la conscience humaine en un siècle affreux, apprit, dans la retraite de sa maison des champs, l’égarement de celle dont il avait célébré le premier mariage et la grâce première ; il consacra son indignation par une nouvelle pièce de vers latins, dans laquelle il raconte les horreurs de cette nuit funèbre, et ne craint pas de désigner l’épouse et la jeune mère, meurtrière, hélas !
Elle avait le soin de le laisser toujours en avant sur le premier plan : délicatesse d’autant plus vraie qu’on ne sait même si elle en a eu conscience.
Mais ici la méfiance, déjà propre à cette jeune nature, se marqua à l’instant ; sa physionomie se ferma : « Mais je ne connais personne à Paris », répondit-il ; — et après une pause d’un instant : « Je n’y connais plus que la colonne de la place Vendôme. » Puis s’apercevant qu’il avait interprété trop profondément une parole toute simple, et pour corriger l’effet de cette brusque réponse, il envoya le surlendemain à M. de La Rue, qui montait en voiture, un petit billet où étaient tracés ces seuls mots : « Quand vous reverrez la Colonne, présentez-lui mes respects. » Au maréchal Marmont, comme à toutes les personnes avec qui il parlait de la France, le jeune prince exprimait l’idée qu’il ne devait, dans aucun cas, jouer un rôle d’aventure ni servir de sujet et de prétexte à des expériences politiques ; il rendait cette juste pensée avec une dignité et une hauteur déjà souveraines : « Le fils de Napoléon, disait-il, doit avoir trop de grandeur pour servir d’instrument, et, dans des événements de cette nature, je ne veux pas être une avant-garde, mais une réserve, c’est-à-dire arriver comme secours, en rappelant de grands souvenirs. » Dans une conversation avec le maréchal, et dont les sujets avaient été variés, il en vint à traiter une question abstraite ou plutôt de morale, et comparant l’homme d’honneur à l’homme de conscience, il donnait décidément la préférence à ce dernier, « parce que, disait-il, c’est toujours le mieux et le plus utile qu’il désire atteindre, tandis que l’autre peut être l’instrument aveugle d’un méchant ou d’un insensé ».
Sans qu’on puisse, en conscience, rien affirmer à cet égard, cette manie ou cette adresse était singulièrement fâcheuse.
Sully-Prudhomme, Mallarmé et Kahn, voilà donc ce que produit la conscience non déguisée que la Poésie, en d’autres temps logique telle qu’on la conçoit, ne peut plus être la même en les temps nouveaux peu à peu découverts : une pensée malgré tout religieuse, des principes à priori et rêveries paradoxales, erreurs pédantes de raisonnement et d’expérience scientifique.
Criminel instruit, ayant tué par théorie, nerveux, tendre, disposé aux consultations de conscience, farouche cependant et d’une volonté raidie par accès, posé ainsi comme un mécanisme complexe, il est amené successivement aux contacts, qui causeront en lui telle ou telle évolution spirituelle.
Qu’un méchant soit en société, qu’il y porte la conscience de quelque infamie secrète ; ici il en trouve le châtiment.
Rousseau est fort gai : tout le monde s’accorde à le reconnaître, et tout le monde s’accorde à reconnaître aussi que la gaieté est la marque d’une conscience tranquille.
Et, sans aller jusque-là, voici que moi, simple lecteur de bonne foi, je ne puis, en conscience, quoique M.
Obligé de se garder peintre de mœurs et d’être vrai, l’auteur d’Autour d’une source ne pouvait éviter la pourriture sociale qui nous fait, à tous tant que nous sommes, des taches plus ou moins grandes sur la conscience et sur le cœur.
Le seul guide qui ne trompera pas, c’est une conscience affinée, respectueuse des âmes, et, pour tout dire, le tact chrétien de l’auteur.
Le bon apôtre et le plaisant directeur de conscience ! […] La conscience égotiste, le sentiment du moi, n’a peut-être pas l’importance que lui attribue M. […] Est-ce que l’antiquité ne respectait pas la liberté de conscience ? […] Rien de plus salubre, de plus tonifiant, que de reprendre contact avec cette pensée si noble et cette haute conscience. […] Le libre arbitre n’existe probablement pas, et la conscience l’affirme, mais la raison le nie : en tout cas, il ne joue aucun rôle historique.
Il y a eu des conflits nouveaux de passions et de croyances, une complication de la conscience morale, un approfondissement de la tristesse, un enrichissement de la sensibilité. […] Il fut, dans bien des circonstances, quelque chose comme sa conscience morale et sa conscience littéraire. […] Phèdre est la seule douce et la seule pure parmi ces « femmes damnées » ; Phèdre est une conscience tendre et délicate ; elle sent le prix de cette chasteté qu’elle offense : elle est torturée de remords ; elle a peur des jugements de Dieu. […] Jupiter, le Soleil, « l’univers plein des aïeux » de la coupable, évoquent pour nous l’idée de l’œil de Dieu partout présent, partout ouvert sur notre conscience ; Minos est le juge éternel qui attend l’âme après la mort ; et, quand Phèdre, écrasée de terreur, tombe sur ses genoux en criant : « Pardonne ! […] Le poète a si bien atteint son but ; il est si évident que Phèdre succombe, non par sa volonté, mais parce que Dieu lui refuse la grâce efficace, qu’elle nous semble réellement irresponsable ; plus douloureuse seulement et, par suite, plus sympathique par la conscience inutile qu’elle a de son péché.
Il en étudia, en lui et autour de lui, les déboires et les mélancolies ; mais il en comprit la grandeur, s’il en connut la servitude, et la conscience de l’une le rendit stoïque envers l’autre. […] Il pouvait se satisfaire doublement, puisqu’il connut le plaisir d’agir et la conscience d’avoir agi. […] Les vivants de ce XVIIe siècle, pompeux et raisonneur, plus logiciens que rêveurs, eurent conscience, parmi l’apparat de leurs pensées ou les mêlées de leurs ambitions, de la nécessité d’être parfois en présence de soi-même. […] Ils descendent dans leur conscience et en déchiffrent la cryptographie intime et les arabesques sophistiques ; ils tiennent plus à se savoir qu’à s’imaginer, aussi je suppose que pour eux les murs du réduit intérieur sont ornés surtout de portraits et de miroirs. […] Après un ouvrage titré Des Jésuites, publié en 1843, Michelet poursuit sa réflexion en dénonçant fermement le principe de la direction de conscience dans Du Prêtre, de la femme et de la famille (1845).
L’habitude prise de bonne heure de ne pas se placer du tout en face du public, mais seulement en face des choses, induit l’écrivain à des lenteurs d’expression qui tiennent au scrupule même de la conscience et au respect le plus honorable de la vérité. […] Manzoni, on le sait, travaillait lentement ses tragédies ; cette lenteur, qui peut tenir à diverses causes, à la délicatesse et à la fantaisie même d’une organisation nerveuse, aux irrégularités de la machine physique, qui ne suit pas toujours le train de l’esprit, n’est pas chose à louer absolument en elle-même : ce qui mérite d’être loué à coup sûr et proposé en exemple, c’est la conscience qu’il a mise à préparer les matériaux et à étudier les sujets de ses compositions. […] « Lorsqu’un Français cherche à rendre ses idées de son mieux, disait Manzoni à Fauriel un jour qu’il ressentait plus vivement ces difficultés et ces scrupules qui sont la conscience de l’écrivain, voyez quelle abondance et quelle variété de tours, de modi, il trouve dans cette langue qu’il a toujours parlée, dans cette langue qui se fait depuis si longtemps et tous les jours dans tant de livres, dans tant de conversations, dans tant de débats de tous les genres. […] Ce n’était point assurément par la crainte des jugements, mais par conscience, qu’il se montrait si difficile ; mais, lui qui avait tant lu, il devait savoir mieux qu’un autre combien de vues neuves, profondes et vraies seraient restées inconnues, combien d’ouvrages de la plus haute importance n’auraient jamais vu le jour, si leurs auteurs ne s’étaient pas résignés à y mêler beaucoup de peut-être et beaucoup d’à-peu-près. […] Sa conscience d’historien porte M.
Le moyen âge en France (si l’on donne ce nom à toute l’époque intermédiaire qui précède la Renaissance) achevait donc, dès l’entrée du xve siècle, de se traîner comme un vieillard à qui un grave accident a ôté plus qu’à demi la conscience de lui-même. […] Il fait son travail en conscience, avec beaucoup de savoir, et en rassemblant d’immenses matériaux.
Sans même parler de conscience, de justice, de respect des bonnes lettres, du lecteur, et des talents, à qui l’on fait tort en louant des niaiseries, cela lui est physiquement impossible. […] Mais ils ne peuvent nier que la neutralité de l’Etat respecte les cultes et les consciences.
Mais que les théoriciens français ne s’avisent pas de dire quelle est a priori, de peur que l’ombre de Molière ne vienne aussi troubler leur conscience. […] — Uranie a aimé Shakespeare, elle a goûté Le Misanthrope, non en devenant plus sauvage, mais en perfectionnant sa culture ; et, dès lors, loin d’être jalouse pour son goût d’une indépendance qui n’existe pas et qui n’est qu’une servitude sans conscience, elle l’a maintenu fermement sous la discipline de la science et de la raison.
cher canonico, s’écrièrent en battant des mains la belle comtesse Léna, sa charmante fille, le professeur et moi ; nous pourrons lire, et, si nous lisons une stance de trop, nous mettrons tous nos péchés sur la conscience du chanoine. » Ainsi fut convenu ; après souper nous nous endormîmes tous avec la perspective amusante des enchantements, des tournois, des aventures, des amours, des chevaleries, des héroïsmes et des poétiques folies du plus inventif et du plus gracieux des poètes. […] Car Ariodant, c’est évidemment l’Arioste ; le poète n’a pu trouver que dans son cœur ce magnanime dévouement ignoré même de celle pour laquelle on se dévoue, et qui ne demande sa récompense qu’au mystère et à sa conscience d’amant.
La vaine gloire était la vertu des grands hommes à ces époques où une religion, plus magnanime et plus épurée des vanités humaines, n’avait pas encore enseigné aux hommes l’abnégation, la modestie, l’humilité, qui déplacent pour nous la gloire de la terre, et qui la reportent dans la satisfaction muette de la conscience ou dans la seule approbation de Dieu. […] Si mes concitoyens, prévenus d’injustes soupçons, me haïssaient comme ils te haïssent, j’aimerais mieux me priver de leur vue que d’avoir à soutenir leurs regards irrités ; et toi, quand une conscience criminelle t’avertit que depuis longtemps ils ne te doivent que de l’horreur, tu balances à fuir la présence de ceux pour qui ton aspect est un cruel supplice !
La vraie critique se refuse à admettre l’impossible ; la conscience de l’esprit humain a son évidence, comme la conscience du cœur.
Il y a lieu d’admirer deux choses, et presque contradictoires : la conscience ce vrai savant avec laquelle Wagner a évidemment étudié toutes les sources, et le génie avec lequel il a su discerner ce qui était bon à prendre dans chaque, et ce qu’il fallait inventer pour transfigurer le tout et le rendre acceptable au sentiment moderne. […] « Ainsi nous nous sentions éloignés du monde ordinaire, par l’influence de l’atmosphère acoustique et optique sur notre sensibilité, et nous en avions conscience et souvenir lors de notre retour au jour… » C’est par ces paroles que Wagner termine sa lettre sur Parsifal.
Elle est, au nom des intérêts matériels, la conseillère qui pousse aux abaissements, aux platitudes, aux lâchetés, à toutes les petites misérables transactions de la conscience. […] » — On s’étonne, en lisant l’Histoire auguste, que les notions du bien, du mal, du juste et de l’injuste aient pu survivre aux Césars, et que les Empereurs romains n’aient pas tué la conscience humaine.
Et cela au milieu des malaises de l’un et de l’autre qui s’interrogent de l’œil, et ont conscience de leurs mutuelles souffrances : l’un tourmenté de perpétuelles migraines, l’autre d’un perpétuel malaise d’estomac, qui en fait seulement un vivant, ou plutôt un misérable ressuscité du soir, à l’heure où l’on allume le gaz. […] Et il se met à nous prêcher d’écrire pour le public, de descendre nos œuvres à l’intelligence de tous, nous reprochant presque notre effort, l’ambition de notre conscience littéraire, le travail de nos livres, pour ainsi dire, sués de notre sang, enfin la passion, que nous mettons à nous satisfaire.
Un déluge intérieur d’idées ténébreuses submerge la pensée ; la conscience noyée ne peut plus faire signé à l’âme ivrogne. […] Quelquefois même les philosophes aident étourdiment à cet abaissement en mettant dans les doctrines le matérialisme qui est dans les consciences.
Filiger La banalité de la mode étant à qui parle d’art de répondre qu’il vaut mieux vivre (ce qui serait peut-être admirable si compris, mais tel quel, sans plus de conscience, gratté de la table de Faust, se redit depuis bien longtemps), il est permis, nos serfs pouvant suffisamment cette chose, d’exister dès maintenant en l’éternité, d’en faire de notre mieux provision, et de la regarder chez ceux qui l’ont su mettre en cage surtout discolore de la nôtre. […] Et Don Juan, qui est limité à un certain amour, d’abord ne comprend pas cet amour supra-sensuel, ensuite voit la force supérieure et recule pour n’être englobé, Trois ayant conscience d’être plus petit que Quatre.
Pourtant, sa croyance profonde en l’avenir social nous éclaire sur la conscience d’André Couvreur. […] Transformée, « civilisée », cette jeune paysanne reprend conscience d’elle-même et devenue « indulgente » pour la beauté des autres, admiratrice même de cette beauté et par conséquent délivrée du souci d’être mal jugée, indépendante enfin, armée d’une conception de l’honneur plus personnelle et plus fière que celle qui lui était imposée, elle connaît des bonheurs insoupçonnés, une quiétude profonde et douce.
Dans un moment, l’œil est louche, dans un autre les lames du ciseau sont émoussées, ou la main n’est pas sûre ; et puis jugez d’après cela de la confiance que vous devez à mes découpures ; et que cela soit dit en passant, pour l’acquit de ma conscience, et la consolation de Mr La Grenée. […] On en dit tant, sans le scavoir, qu’il faut bien avoir quelquefois la conscience de quelques-unes.
Cette coïncidence m’a frappé, et je me suis dit que pour que deux esprits sérieux, appliqués, travaillant en conscience et loin du bruit, l’un à Dijon et dans un ordre d’idées et de considérations catholiques, l’autre à Alais dans la communion protestante, que pour que ces deux esprits, ayant fait chacun de Mézeray une étude spéciale, se fussent ainsi rencontrés dans une opinion commune, il fallait que l’historien, à bien des égards, le méritât.
Les religieuses sont pourtant séparées, mais j’occupe une partie de leurs logements… » Interrogé sur un cas de conscience lorsqu’il venait de donner un conseil royal et de politique, Fénelon souffre évidemment ; il rassure en deux mots son élève : « Vous ne devez avoir aucune peine, lui dit-il, de loger dans la maison du Saulsoir : vous n’avez rien que de sage et de réglé auprès de votre personne ; c’est une nécessité à laquelle on est accoutumé pendant les campements des armées. » Mais il fait précéder sa réponse sur ce point-là de bien des avis plus généraux que le duc de Bourgogne devait être capable d’entendre : « On dit que vous êtes trop particulier, trop renfermé, trop borné à un petit nombre de gens qui vous obsèdent.
D’Aubigné voyait dans ce dévouement et cette vaillance une preuve du bon droit : « Il arrive peu souvent, pensait-il, que l’injustice ait les meilleures épées de son côté, parce que c’est la conscience qui émeut la noblesse et la porte aux extraordinaires dépenses, labeurs et hasards. » D’Aubigné, si on l’avait pressé, eût peut-être été dans l’embarras de fixer ce beau temps où l’épée de la noblesse était toujours pour le parti le plus juste ; dans les souvenirs de la fin de sa vie, il confond involontairement ce temps idéal avec celui de sa jeunesse, le bel âge pour tous : quand il devint vieux, il ne fut pas des derniers à crier à la décadence.
Il s’occupait avant tout de les bien trouver, de les bien choisir, afin de les copier ensuite en toute conscience.
Il a pris soixante places en une seule campagne… » Ici il ne s’agissait que de consciences, et ces autres places fortes cédaient au même ascendant de Louis le Grand.
Il accorde beaucoup à la piété, à la véritable, qu’il distingue soigneusement et en traits vigoureux d’avec la superstition ; puis il ajoute un avis nécessaire, dit-il, à celui qui prétend à la sagesse, qui est, d’une part, de ne point séparer la piété de la vraie prud’homie, et d’autre part, et encore moins, de ne les confondre et mêler ensemble : « Ce sont deux choses bien distinctes et qui ont leurs ressorts divers, que la piété et la probité, la religion et la prud’homie, la dévotion et la conscience : je les veux toutes deux jointes en celui que j’instruis ici… mais non pas confuses. » Le père Buffier, d’ailleurs très équitable envers Charron, a relevé ce passage en disant : « Une probité sans religion serait une probité sans rapport à la divinité et indépendante de la loi de Dieu.
Henri, dès lors, a senti la responsabilité, comme nous dirions, qui pèse tout entière sur lui ; il a conscience qu’il est chargé d’une grande cause, d’une cause plus grande que celle même du parti protestant.
Et, en effet, à ce grand moment de la Renaissance, lorsqu’au sortir de l’étude fervente des belles œuvres de l’Antiquité on s’était retrouvé en présence d’une poésie française naturelle, élégante, mais peu élevée, on avait eu conscience à cet égard de la pauvreté domestique ; on avait fait effort pour en triompher, et pour monter une lyre au ton des plus graves et des plus héroïques desseins.
Au lieu d’une route désormais tout ouverte pour lui de grand capitaine en plein soleil, de généreux et féal Français, sous un grand homme dont il aurait été le lieutenant illustre et le second, il va se trouver engagé par la force des choses dans une vie de faction, de lutte en tous sens, de dispute pied à pied et de chicane avec les siens et les orateurs envieux de son parti, de rébellion en face des armées et de la personne même de son roi, d’alliance continuelle avec l’étranger ; il va former et consumer ses facultés d’habile politique et d’habile guerrier dans des manœuvres où l’intérêt et l’ambition personnelle font, avec les noms sans cesse invoqués de Dieu et de conscience, le plus équivoque mélange, tellement que celui même qui s’y est livré si assidûment serait bien embarrassé peut-être à les démêler.
Le signe des belles et tout à fait grandes âmes est de n’en jamais perdre la conscience ni l’habitude aux heures de la force et de la prospérité.
Gustave Flaubert des autres observateurs plus ou moins exacts qui, de nos jours, se piquent de rendre en conscience la seule réalité, et qui parfois y réussissent ; il a le style.
Lorsqu’on le mettait sur ce chapitre de l’émigration française, à laquelle il fut si généreusement secourable : Ma conscience, disait-il gaiement, ne me reproche que deux méfaits pendant cette importante et difficile période de mon gouvernement.
On raconte que, bien des années après, et dans les mois qui précédèrent sa fin, ce roi mélancolique, infirme, tourmenté de scrupules, ne sachant à qui léguer en conscience ses États, environné d’intrigues inextricables, fuyant les cris du peuple ameuté à Madrid sous son balcon, alla s’enfermer seul dans l’Escurial, et voulut descendre dans le caveau du Panthéon pour visiter les corps de ses ancêtres qui y sont déposés ; il espérait trouver quelque trêve à ses maux de corps et d’esprit par l’intercession de leurs âmes.
Un jour qu’il était en veine de querelle avec lui, il vint trouver M. l’intendant et lui dit : « Qu’il y avait longtemps que sa conscience lui reprochait sa condescendance pour le procureur général, sur la vie scandaleuse qu’il menait, n’ayant pu l’obliger à mettre hors de chez lui la fille qu’il entretenait au vu et au su de tous ; qu’il était résolu, avant d’en venir aux monitions canoniques, d’avoir recours au Parlement, et de demander l’assemblée des Chambres pour se disculper envers la Compagnie, s’il était obligé d’agir par les voies ecclésiastiques. » « Je crus donc, ajoute Foucault, devoir profiter de la conjoncture de leur brouillerie pour le bien de la justice et de l’ordre, et approuvait résolution de M. de Lescar, en lui disant qu’il ne pouvait trop tôt la mettre à exécution.
Littré dont les opinions philosophiques sont connues, et qui est un disciple de Condorcet autant que d’Auguste Comte, de rendre justice à son aise et en toute conscience, comme il le fait dans le Journal des Savants, aux travaux historiques de MM. de Montalembert et Albert de Broglie, traitant des vieux siècles religieux, si ce n’est en vertu de ce notable changement intellectuel qui vint affranchir l’ancien libéralisme de ses préjugés exclusifs, et qui éleva et étendit tous les points de vue ?
Mais que celui qui, pendant la durée de l’orage, n’a été froissé par aucune secousse douloureuse, qui n’a sacrifié à aucune passion, n’a épousé aucun parti, n’a éprouvé aucun sentiment de haine ou de ressentiment, dont l’opinion a toujours été calme, l’esprit toujours froid, le jugement toujours impartial ; que celui qui peut dire avec Tacite, non dans une épigraphe pompeusement inscrite sur le frontispice de son livre, mais dans l’intérieur de sa conscience : Mihi Galba, Otho, Vitellius, nec amicitia, nec odio cogniti, que celui-là écrive pour nos contemporains l’histoire de la Révolution.
Guizot, dans le calme et la dignité de sa retraite, continue de régler sur tous les points les affaires de sa pensée et de sa conscience.
Molé s’est livré à des réflexions pleines de justesse et d’application : ce n’était plus un simple et noble amateur des lettres qui excelle à y toucher en passant, il en parlait avec autorité, avec conscience et plénitude.
Dans le secret de la conscience se trouve aussi la source de l’attendrissement.
Cette honorable mission dont on est revêtu par sa propre conscience, c’est la noblesse du caractère qui peut seule lui donner quelque force.
Il n’existe aucune manière de prouver qu’elle est toujours d’accord avec cet intérêt, à moins d’en revenir à placer le bonheur de l’homme dans le repos de sa conscience ; ce qui signifie simplement que les jouissances intérieures de la vertu sont préférables à tous les avantages de l’égoïsme.
De son vivant même, Rousseau dirige des consciences ; ses lettres en font foi.
Il n’y a plus d’éloquence religieuse après Massillon, du moins dans l’église catholique : car lorsque Rousseau parle sur la Providence et la conscience, sur la religion et sur la morale, nous avons reconnu dans sa parole une inspiration protestante ; notre grand orateur philosophique est un prêcheur de Genève.
À tous, littérateurs ou autres, il nous a donné cette générale leçon, d’avoir trouvé la paix de la conscience et le bonheur en cette pauvre vie, simplement parce que la vérité toujours l’a conduit.
III Ce qu’il y a d’inspiration sincère dans la Chanson des Gueux, le poète nous le dit lui-même dans sa préface : J’aime mes héros, mes pauvres gueux lamentables, et lamentables à tous les points de vue ; car ce n’est pas seulement leur costume, c’est aussi leur conscience qui est en loques.
L’homme intérieur est simple, parce qu’il n’y a qu’une conscience.
Sans que l’homme en eût conscience, et parfois même tandis que l’homme croyait agir sans elle ou contre elle, elle l’a influencé pourtant, elle l’a dirigé et conduit.
N’est-ce pas grâce à la forme prestigieuse que les poètes ont su leur donner, que la plupart des idées se sont imposées à notre conscience ?
Quant à la manière dont madame de Sévigné s’est exprimée dans une lettre confidentielle à son cousin sur la nomination de Racine et de Boileau à la place d’historiens, Voltaire était plus capable que personne den sentir la justesse ; Racine et Boileau eux-mêmes, en mettant la main sur la conscience, n’auraient pu la trouver injuste.
Il nous apprend que Ménandre, le prince des poètes comiques, à qui les rois d’Égypte et de Macédoine rendaient un si bel hommage en le demandant avec une flotte et des ambassadeurs, refusa leurs offres, et s’honora encore davantage en préférant le sentiment littéraire, la conscience des lettres (c’est le mot de Pline), à la faveur des rois.
S’il est permis d’appliquer l’examen à de telles matières, on en peut seulement conclure qu’elle n’avait pas tout dit chaque fois bien en détail au père de La Rue, et qu’il lui coûtait trop d’avoir à réparer avec lui ces omissions légères dans une confession générale, telle que la commande à la conscience des mourants l’approche du moment suprême.
Revenant à plus d’une reprise sur ce même ordre d’argumentation et usant de son droit d’avocat, Pellisson suppose, en lieu et place de Fouquet, le cardinal Mazarin en personne, questionné et chicané sur ce fait du maniement d’argent et obligé de rendre compte : En conscience, dit-il, quel homme de bon sens lui eût pu conseiller d’autre harangue que celle de Scipion : Voici mes registres, je les apporte, mais c’est pour les déchirer.
Le second discours de Portalis que je veux signaler est précisément celui dans lequel il défendait les pauvres prêtres restés fidèles à l’ancienne orthodoxie ; on était prêt à renouveler contre eux les gênes d’un serment qui violait leur conscience, et qui allait les placer entre le mensonge et la proscription.
Vous avez fait de moi une espèce de partisan politique et littéraire, faisant la guerre en conscience pour le compte de ses opinions qui se trouvent celles du grand nombre, sans prendre ni recevoir de mot d’ordre d’aucune autorité organisée ; ennemi du pouvoir, sans engagement avec l’opposition légale, ni même avec les affiliations populaires.
Quelle combinaison fatiguée pour produire tous les mélanges et toutes les indécences, tous les croisements qui peuvent choquer les idées reçues et insulter les consciences délicates !
C’est ainsi que la lecture, si elle exige l’habitude de l’examen de conscience, par contre-coup aussi nous la donne.
Mais j’exige pourtant que l’on sente à quelque chose dans la peinture qu’une conscience morale s’agite dans le peintre ; qu’il y ait, enfin, dans l’artiste, l’être moral sans lequel même le grand artiste n’existe pas.
Pour l’acquit de sa conscience et de son titre, Michelet n’a pu se dispenser de nous donner une tempête de sa façon, la tempête de rigueur, qui, par parenthèse, n’est pas, au point de vue du talent, ce que j’aime le mieux dans son livre.
Il a rempli plusieurs années ce devoir en conscience.
Il tirait aussi de lui-même bien plus qu’il ne les empruntait à sa longue fréquentation du monde, — de lui-même, c’est-à-dire de son génie et de la conscience de son génie, — une certitude, une aisance de manières merveilleuse, avec une politesse qui admettait, comme un prisme, toutes les nuances, depuis la bonhomie la plus cordiale jusqu’à l’impertinence la plus irréprochable. […] Et même, pour rassurer complètement ma conscience, on supposera que tout ce que j’ai à dire de sa nature, si curieusement et si mystérieusement éclatante, est plus ou moins justement suggéré par les œuvres en question ; pure hypothèse poétique, conjecture, travail d’imagination. […] On peut aussi le comparer, lui, à un miroir aussi immense que cette foule ; à un kaléidoscope doué de conscience, qui, à chacun de ses mouvements, représente la vie multiple et la grâce mouvante de tous les éléments de la vie. […] Le vice porte atteinte au juste et au vrai, révolte l’intellect et la conscience ; mais comme outrage à l’harmonie, comme dissonance, il blessera plus particulièrement de certains esprits poétiques ; et je ne crois pas qu’il soit scandalisant de considérer toute infraction à la morale, au beau moral, comme une espèce de faute contre le rythme et la prosodie universels. […] Mais comme le sens intime de Dieu est bientôt noyé dans toute conscience par les concupiscences de la chair, le chant représentatif de la sainteté est peu à peu submergé par les soupirs de la volupté.
Elle est appliquée confusément dans les œuvres avant d’être mise en lumière dans une exposition rationnelle ; en sorte que la pratique en est déjà maîtresse, quand la théorie, venant s’en emparer, lui donne la conscience claire et la vraie possession d’elle-même. […] Nous comprendrons alors comment l’Iphigénie a pu naître ; mais Goethe avait beau être Goethe, nous comprendrons aussi qu’il était allemand, qu’il était moderne, lorsque nous l’entendrons dire à Eckermann : « Schiller me prouva que malgré moi j’étais romantique, et que mon Iphigénie, par la prédominance du sentiment, n’était pas si classique et si antique que je le croyais. » De même l’Alarcos de Frédéric Schlegel ne sera plus inintelligible pour nous, quand sa biographie nous aura rendu témoins des veilles qu’il consacrait à l’étude passionnée de la littérature espagnole, et nous aura répété ces paroles enthousiastes : « Je ne saurais trouver une plus parfaite image de la délicatesse avec laquelle Caldéron représente le sentiment de l’honneur que la tradition fabuleuse sur l’hermine, qui, dit-on, met tant de prix à la blancheur de sa fourrure, que, plutôt que de la souiller, elle se livre elle-même à la mort quand elle est poursuivie par des chasseurs397. » Je me sens pris ici d’un remords de conscience. […] Selon divers besoins, il est une science D’étendre les liens de notre conscience, Et de rectifier le mal de l’action Avec la pureté de notre intention.
Dans ce grand vide inconnu que vous placez au-delà de notre petit monde, les gens à tête chaude ou à conscience triste peuvent loger tous leurs rêves, et les hommes à jugement froid, désespérant d’y rien atteindre, n’ont plus qu’à se rabattre dans la recherche des recettes pratiques qui peuvent améliorer notre condition. […] Et la raison en est visible ; car ce fait que j’aperçois par les sens ou la conscience n’est qu’une tranche arbitraire que mes sens ou ma conscience découpent dans la trame infinie et continue de l’être.
On ne se contentera pas d’une supériorité « latente », en quelque sorte, et qui trouverait dans l’orgueilleuse mais silencieuse conscience d’elle-même sa principale satisfaction. […] La « nationalisation » de la littérature, si les circonstances ne lui permettent pas de se réaliser encore, est devenue l’objet que les écrivains, la société, la royauté même vont se proposer ; et, en un mot, si l’idéal classique n’a encore qu’une conscience un peu vague de lui-même, il est cependant déjà formé. […] 2º L’Homme et l’Écrivain. — Celui-ci aussi, comme Bodin déjà, et comme Palissy, quoique dans un autre genre, est un « observateur ». — Sa carrière militaire ; — mais qu’il ne faut pas prendre son surnom de Bras de fer pour un témoignage de son énergie ; — et qu’il y a eu du politique dans ce soldat. — Les scrupules de conscience d’un capitaine protestant ; — comparaison de Montluc et de La Noue ; — supériorité morale du second. — Les Discours politiques et militaires. — Ils sont l’ouvrage de ses prisons. — Curieux rapports entre Bodin, Palissy et La Noue. — Division des discours de La Noue : Discours militaires proprement dits [11, 13, 14, 15, 16, 17, 18]. — Comparez la manière dont il y parle de la guerre avec une page célèbre des Soirées de Saint-Pétersbourg. — Discours politiques [1, 4, 6, 12, 20, 21, 22] ; — Comparez les vues politiques de La Noue et le « grand dessein « d’Henri IV. — Mais les plus intéressants pour l’histoire des idées sont les Discours moraux [5, 3, 5, 6, 7, 10, 19, 23, 24, 25] et parmi ceux-ci, les Discours 23, sur la pierre philosophale ; 6, contre les Amadis ; et 24, contre les Épicuriens ; — La Noue précurseur de Bossuet [Maximes sur la comédie] dans son Discours contre les Amadis ; — et de Rousseau dans son Discours contre les Épicuriens. — C’est dire de lui qu’il est surtout un « moraliste ». — La composition dans les Discours de La Noue ; — le tour oratoire ; — la fermeté de la langue et du style ; — la passion patriotique. — Succès des Discours. — Quelques mots des Mémoires de La Noue. — Sa mort au siège de Lamballe.
Dans ce grand vide inconnu que vous placez au-delà de notre petit monde, les gens à tête chaude ou à conscience triste peuvent loger tous leurs rêves, et les hommes à jugement froid, désespérant d’y rien atteindre, n’ont plus qu’à se rabattre dans la recherche des recettes pratiques qui peuvent améliorer notre condition. […] Et la raison en est visible ; car ce fait que j’aperçois par les sens ou la conscience n’est qu’une tranche arbitraire que mes sens ou ma conscience découpent dans la trame infinie et continue de l’être.
Dès l’instant que l’on écarte l’hypothèse du devoir d’élève ou du pastiche prémédité, il faut toujours chercher un élément de sincérité dans cette ouverture sur l’âme humaine qu’est une page littéraire… Sincérité, c’est-à-dire aveu, confession, manifestation du trait individuel qui échappe à la conscience. […] Leurs lèvres une fois descellées et leurs bras désunis, quand la pleine possession de la conscience a remplacé cette folie d’une minute qu’est la fougue de l’instinct, quel abîme entre deux êtres qui tout à l’heure n’en faisaient qu’un ! […] Aujourd’hui les travaux des psychologues, fondés sur l’observation directe de la vie, sur l’éveil de la conscience chez l’enfant, et trouvant d’ailleurs leur meilleure justification littéraire dans l’épanouissement romantique du dix-huitième siècle, reconnaissent, dans la vie émotive, l’assise de toute personnalité, comme le tuf où l’intelligence vient plonger les racines qui fortifieront son développement. […] J’imagine qu’un long sommeil de vingt siècles ait appesanti ses membres, les ait maintenus dans cette sorte de léthargie qui se confond avec la mort, tout en laissant subsister la vie : à son réveil elle n’eût pu restituer, avec plus de fidélité, les états antérieurs qui constituèrent sa première conscience.
Pillez-moi, sans conscience, les sacrés thresors de ce temple Delphique … » Du Bellay ne fut que trop bien compris. […] Il peut arriver que le souvenir visuel passe inaperçu de la conscience et que la phrase surgisse toute faite des limbes où s’élaborent les phrases ; ce ne sera pas un motif suffisant pour nier la vision initiale ; et, en sommé, un expert en styles la reconstituera très facilement. […] Nihil in intellectu quod non prius fuerit in sensu : les sens sont la porte unique par où est entré tout ce qui vit dans l’esprit, et la notion même de la conscience, et le sentiment même de la personnalité. […] A ce propos, il cite cette phrase de Renan : « L’esprit de l’homme n’est jamais absurde à plaisir, et chaque fois que les productions de la conscience apparaissent dépourvues de raison, c’est qu’on ne les a pas su comprendre. » Le principe n’est pas mauvais, encore que trop absolu. Le mot conscience est mis là pour faire le départ entre les esprits sensés et les déments ; mais la frontière qui les sépare n’est pas une ligne droite.
Il ira ainsi paisiblement et philosophiquement jusqu’à son dernier jour, rutilant de célébrité, adoré des pédants, méprisé des âmes fières, et chargé de l’exécration de toutes les consciences religieuses. […] Flor O’Squarr se croit, en son âme et conscience, obligé de nous servir. […] Venu en critique à la Porte-Saint-Martin, j’ai écouté son drame avec toute l’attention que la Providence m’a fait capable d’octroyer à une œuvre de néant et voici, en conscience, ce qui m’a le plus frappé. […] Mais il est facile d’observer que ce mouvement lyrique a d’autant plus de puissance que la partie raisonnante de l’esprit a moins de lumière religieuse, et que le sentiment gagne en intensité tout ce que la conscience a perdu de son libre essor. Cette conscience est le fauve captif dont j’ai parlé plus haut, patient jusqu’à paraître le geôlier de ses stupides gardiens, mais, à la fin, n’en pouvant plus et jetant par terre les murailles de son cachot à force de rugissements !
Ce qui distingue Villon d’entre tous les poètes de son temps, c’est que, outre le talent le plus personnel et le plus rare, il montre qu’il a une conscience ; il a été le péché, oui, il l’est souvent encore, sans doute, mais il sait ses torts et les avoue, s’en macère par l’humiliation ; son âme est comme une petite Madeleine dans le désert de l’ennui. […] Pillez-moi sans conscience les sacrés trésors de ce temple Delphique ainsi que vous avez fait autrefois. » Et avec un redoublement de belle fureur lyrique, Joachim Du Bellay s’écrie : « Qu’il vous souvienne de votre ancienne Marseille et de votre Hercule gallique, tirant les peuples après lui par leurs oreilles, avec une chaîne attachée à sa langue. » Si éclatante et si ingénieusement conduite qu’elle soit, cette allégorie, quant à son sens intime, est absurde. […] Jamais l’hésitation, devant l’œuvre pourtant nécessaire, à cause, de l’infamie des mains qui l’achèveront, ne fut exprimée en un aussi torturant conflit d’une âme avec l’incertitude de la conscience. […] C’était le franc rire d’un honnête cœur, d’une conscience saine qui s’épanouit en belle humeur. […] Cependant, je le répète, quand même je n’aurais pas eu l’honneur de prendre part, — le plus humble sans doute, mais, par la date, l’un des premiers, — aux combats d’où mes amis sont sortis triomphants, mon admiration pour José-Maria de Heredia ne serait pas moindre ; et c’est avec la conscience d’une absolue impartialité que je salue dans les Trophées, — ah !
. — Et il est de fait qu’on ne s’empare pas des consciences par la douceur. […] Madame de Staël est pendant dix ans sa conscience et sa lumière. […] Il éprouve même « l’humble orgueil des hommes obscurs qui ont un instant la conscience nette de leur rôle utile et ignoré dans une grande œuvre » (p. 222). […] C’est par eux que nous prenons une pleine conscience de nos voluptés et de nos angoisses. […] Ce serait cruel de me faire mourir quand je suis si accommodante. » À certaines heures, elle a l’obscure et terrible conscience du mal qu’elle couve.
J’ai été vivement excité à faire mon examen de conscience de critique dramatique par un petit article assez sévère de notre confrère Caliban, vous savez, celui qui signe assez souvent du pseudonyme Émile Bergerat. […] je fais mon examen de conscience) il me serait impossible de lire l’article de tel autre et de le constater conforme à mon jugement propre, sans qu’aussitôt je changeasse d’avis avec une sorte de précipitation passionnée, de fougue ardente, et avec la conviction profonde que je m’étais abominablement trompé. […] Non, on ne peut, en justice et en conscience, lui demander beaucoup davantage. […] » Guéret, Guéret, vous en demandez trop ; mais vous avez une bien belle conscience. […] Ce n’est pas à des rimeurs qu’il demande de diriger sa conscience.
Quant au conseil direct de se convertir à la religion catholique, Rosny, tout en l’indiquant assez, s’excuse de ne point le donner en propres termes, n’ayant point qualité de théologien ; mais il marque assez sensiblement qu’il souhaite que le roi y entre, autant que la conscience le lui permettra.
Si Bernier, dans cette lettre, ne se réconcilie pas nettement avec Descartes qu’il continue de considérer comme un philosophe trop affirmatif en ses solutions, il y rétracte du moins aussi formellement que possible les doctrines de Lucrèce et d’Épicure et toutes les assertions purement matérialistes nées de la théorie des atomes ; il y insiste particulièrement sur l’impossibilité d’expliquer par la matière seule et par le mouvement de corpuscules, si petits qu’on les fasse, des opérations d’un ordre aussi élevé que celles qui constituent l’intelligence, le raisonnement, la perception de certaines idées, la conscience qu’on a d’avoir ces idées, la volonté, le choix dans les déterminations, etc. ; en un mot, il y combat au long et avec détail l’épicuréisme, auquel il sait bien que Chapelle incline et est d’humeur, soit en théorie, soit en pratique, à s’abandonner : Je me promets, lui dit-il, que vous donnerez bien ceci à ma prière, qui est de repasser un moment sur ces pensées si ingénieuses et si agréablement tournées qu’on a su tirer de vos mémoires (apparemment quelques écrits et cahiers de philosophie et de littérature de Chapelle), sur tant d’autres fragments de même force que je sais qui y ont resté, et généralement sur tous ces enthousiasmes et emportements poétiques de votre Homère, Virgile et Horace, qui semblent tenir quelque chose de divin.
Cowper voit dans cette disposition et dans ce vœu universel un cri de la conscience qui, longtemps méconnue, mais non abolie, rappelle toute créature humaine à son origine et à sa fin, et l’avertit de sortir du tourbillon des villes, de cette atmosphère qui débilite et qui enflamme, pour revenir là où il y a des traces encore visibles, des vestiges parlants d’un précédent bonheur, et « où les montagnes, les rivières, les forêts, les champs et les bois, tout rend présent à la pensée le pouvoir et l’amour de Celui qui les a faits. » Et dans une description minutieuse et vivement distincte, où il entre un peu trop d’anatomie, mais aussi de jolis traits de pinceau, il donne idée de la manière d’interpréter et d’épeler la création, et il montre qu’ainsi étudié, compris et consacré, tout ce qui existe, loin d’être un jeu d’enfant ou un aliment de passion, ne doit plus se considérer que comme une suite d’échelons par où l’âme s’élève et arrive à voir clairement « que la terre est faite pour l’homme, et l’homme lui-même pour Dieu. » Tout cela est grave et solennel sans doute, il faut s’y accoutumer avec le poète : Cowper, c’est à bien des égards le Milton de la vie privée.
— À cette heure où, entrant dans une veine de composition nouvelle, il prenait véritablement possession de tout son talent, et où, comme il le disait d’un mot, le rejeton était devenu un arbre (« fit surculus arbos »), Cowper rappelait, avec l’orgueil d’un auteur ayant conscience de son originalité, qu’il y avait treize ans qu’il n’avait point lu de poète anglais, et vingt ans qu’il n’en avait lu qu’un seul, et que, par là, il était naturellement à l’abri de cette pente à l’imitation que son goût vif et franc avait en horreur plus que toute chose : « L’imitation, même des meilleurs modèles, est mon aversion, disait-il ; c’est quelque chose de servile et de mécanique, un vrai tour de passe-passe qui a permis à tant de gens d’usurper le titre d’auteur, lesquels n’auraient point écrit du tout s’ils n’avaient composé sur le patron de quelque véritable original. » C’est ainsi qu’en se créant tout à fait à lui-même un style selon ses pensées et une forme en accord avec le fond, ce solitaire sensible et maladif, ingénieux et pénétrant, a été l’un des pères du réveil de la poésie anglaise.
Si l’abbé Barthélemy reçut beaucoup de ses nobles amis, il leur apporta donc aussi beaucoup du sien en retour ; il leur sacrifiait plus qu’il ne laissait voir ; il en avait conscience, en même temps qu’il en gardait pour lui le secret : tout cela l’honore.
D’abord révolté, récalcitrant, ruant et fort roué de coups, voulant parler et crier à tous ce qu’il est, ce qu’il a sur le cœur, et ne parvenant qu’à braire, puis soumis et résigné, il n’a pas tardé à s’apercevoir que le plus sage pour lui est encore de faire son métier d’âne en conscience ; peu à peu, la curiosité aidant, il y prend presque plaisir et trouve çà et là, pour prix de sa patience, de petits dédommagements, jusqu’à ce qu’à la fin son mérite singulier le tire du pair et qu’il devienne un âne savant et tout à fait célèbre, un âne à la mode, un âne à bonnes fortunes.
Nous la comprenons, cette tendresse de scrupule et de conscience, nous l’honorons et dans la famille et chez les amis catholiques bretons qui la partagent ; mais qu’on me laisse dire qu’elle est excessive et qu’elle ne saurait prévaloir contre les faits.
Je ne te demanderais alors, en me résignant et en m’accommodant à toi, que d’être comme chez les frères Le Nain, d’un ton solide, ferme, juste, d’une conscience d’expression pleine et entière ; car, selon que La Bruyère l’a remarqué, — et ces honnêtes peintres, aujourd’hui remis en honneur, en sont la meilleure preuve, — « un style grave, sérieux, scrupuleux, va fort loin. » 15.
L’un d’eux, l’abbé Émery, offrait dans sa personne, à ce commencement du siècle, comme le type de ces vénérables survivants : l’abbé Émery, celui qu’on a pu appeler « le suppléant des évêques », l’oracle du Clergé et sa boussole dans l’orage, le modérateur pendant les tempêtes, le centre caché où venaient aboutir les consultations, la lampe dans l’ombre où venaient s’éclairer toutes les consciences chrétiennes.
Il avait conscience et il se rendait parfaitement compte de cette unité si nécessaire de direction et d’emploi.
Moland nous dépeint au sortir de là, le Molière âgé de trente-six ans, rompu au métier, maître enfin de son art et avec la pleine conscience de son génie, est bien celui que nous connaissons et que tout Paris va applaudir : « Si l’apprentissage était rude, nous dit le judicieux critique, il était aussi merveilleusement propre à former l’auteur comique.
L’amour-propre, s’il est fin, change de ton et de voix ; il a des gémissements et des soupirs ; il se fait inquiet sur le sort de ses frères, sur le danger que courent des âmes fidèles et simples ; il faut, à tout prix, préserver les faibles : et l’amour-propre agit et s’en donne alors en toute sûreté de conscience et, comme on dit, à cœur joie : il accuse l’adversaire, il le dénonce, il le conspue, il le qualifie dans les termes les plus outrageux, les plus humiliants ; et comme il ne veut point cependant paraître, même à ses propres yeux, de l’amour-propre, il se retourne, quand il a fini, et se fait humble aussitôt ; il demande pardon à son semblable d’en avoir agi de la sorte : il n’a voulu que le toucher, le convertir ; on assure même qu’il est de force à lui proposer en secret (après l’avoir insulté en public) de lui donner le baiser de paix et de l’embrasser.
Le fait est que Michel, malgré ses instants de joie et de triomphe, ne l’a point complètement soumise et domptée ; il n’a pu parvenir à la réduire dans son orgueil, dans son raffinement d’esprit ; il ne lui a pas donné le sentiment qu’elle était vaincue : et la conscience qu’il a de ce peu de succès intérieur le décourage à son tour et le refroidit.
Et puis il faut tout dire : comme lui-même, si humble et si soumis descripteur qu’il soit, il n’est, après tout, dans cette tâche dont il s’acquitte si en conscience, qu’un peintre et un poète dévoyé, il est juste qu’il se ménage de temps à autre de petites satisfactions et jouissances, c’est-à-dire des morceaux d’exécution.
Herman, en présence du baron Fritz, ce beau-frère entiché de sa noblesse et des vieux préjugés germaniques, maintient lui-même le rôle du noble moderne converti aux idées du siècle : il répond à l’accusation banale d’être un déserteur de sa caste et de n’avoir ni foi ni principes : « Croyez plutôt, dit-il en parlant des Biron, des Custine, des La Fayette, qu’il a fallu une foi bien ferme à ces déserteurs qui, dans la solitude de leur conscience, se sont voués à la haine de ceux qu’ils abandonnaient, à la méfiance de ceux qu’ils voulaient servir, sans autre espoir que la justice tardive de la postérité. » Mais ce commencement de discussion entre Herman et Fritz est arrêté à temps par un-geste d’Emma qui n’entend pas que ses deux adorateurs, comme elle dit, combattent sur ce terrain, et qui les rappelle à l’ordre.
Je ne m’étonne pas plus qu’il ne le faut de ce résultat auquel ont concouru d’illustres confrères de tous les bords, les uns éclectiques, les autres voltairiens, d’autres gallicans, plusieurs enfin purement catholiques, lesquels réunis tous ensemble et coalisés, la plupart déclarant qu’ils n’avaient pas lu l’ouvrage, se sont crus pourtant autorisés et obligés à le repousser en conscience sur le simple exposé des objections.
On dirait vraiment qu’elle y a mis de la conscience comme pour un devoir pénible.
Deux choses l’enhardissent et lui délient la langue dans la prison, deux pensées l’absolvent à ses yeux : la considération du danger présent et de la mort, et la conscience qu’elle a de faire honneur bientôt à Roland en le suppléant de sa personne devant le tribunal inique et de lui payer ainsi en monnaie historique son indemnité de mari.
Il y a eu dans les deux communions des réveils, des coups de baguette impérieux et puissants, des coups de trompette, de grands talents, de belles âmes éloquentes, ardentes, qui ont essayé de fondre les divisions artificielles, de dégager le vrai courant, de reporter les esprits aux hauteurs et aux sources, de ne s’attacher qu’à ce qui est la vie ; et je le dirai avec la conscience de ne faire injure à aucun, s’il y a eu d’un côté Lacordaire, ce regard flamboyant, cette parole de feu, on a eu de l’autre Adolphe Monod, cette âme d’orateur et d’athlète chrétien qui, à ceux qui l’ont vue de près dans son agonie suprême, a rappelé le martyre et l’héroïsme de Pascal.
— « Voyons, Talleyrand, la main sur la conscience, combien avez-vous gagné avec moi ?
Jusque dans ce système moyen si bien mis en œuvre par lui, et qu’il faisait chaque fois applaudir, il avait conscience de sa résistance aux endroits qu’il estimait essentiels.
Son absolution est pire que le forfait lui-même : c’est le forfait rétrospectif, le forfait de sang-froid, le meurtre de la conscience publique, seul refuge que la fortune triomphante laisse ici-bas à la justice et à la vertu !
Boileau ne le fit pas, et n’alla point au-delà des idées littéraires proprement dites : il ne regarda point les réalités psychologiques qui se cachent derrière ces abstractions, une langue, un genre : il n’y vit point les expressions de ces consciences collectives qu’on appelle des peuples, et ne se rendit pas compte que chaque nation façonne sa langue à son image, et que l’apparition et la disparition, la perfection et la décadence de ces formes organiques qui sont les genres, représentent la succession des états d’âme, la diversité des aptitudes intellectuelles et des aspirations morales des divers groupes de l’humanité.
On appelle de ce nom au xviiie siècle la réflexion de l’intelligence sur les émotions, réelles ou possibles, de la sensibilité : c’est moins le sentiment que la conscience et surtout la notion du sentiment.
Il s’abandonne, avec une joie d’artiste, comme il l’a dit, à l’impression des documents qu’il est le premier à consulter : il atteint à la vérité par la force de sa sympathie ; il a voulu « retrouver cette idée que le moyen âge eut de lui, refaire son élan, son désir, son âme, avant de le juger » ; il se fait à lui-même une âme du moyen âge : de sorte que les obscurs instincts des masses populaires deviennent, dans sa conscience d’érudit, une claire notion du rôle de l’Église et du rôle de la royauté.
Cette idée que des hommes peuvent juger des hommes, non pas seulement au point de vue utilitaire, mais au nom de la vérité, de la conscience universelle, de l’absolu, me paraît de plus en plus baroque et monstrueuse.
Le goût, pour lui, est la conscience littéraire de l’âme.
Il a peint à ravir la paix, l’espèce de rajeunissement qu’on éprouve dans les premiers jours, lorsqu’au sortir du monde on entre au séminaire, et qu’on y retrouve son enfance de cœur, la docilité de ses jeunes années, la règle austère, toutes choses simples dont on a désormais la conscience réfléchie et le doux mérite.
Ferdousi n’a pas besoin d’avoir lu Horace ni Ovide pour dire les mêmes choses qu’eux, avec la haute conscience de sa force, et dans un sentiment plus poignant.
J’avais à dire ceci pour l’acquit de ma conscience ; c’est le côté faible et le travers d’un grand talent.
Il a bien des qualités du vrai critique, conscience, indépendance, des idées, un avis à lui.
En cette circonstance toutefois, et quelle que fût la réalité des motifs qu’il a exposés lui-même en toute nudité, il viola ce que les anciens appelaient la conscience du genre humain, et il coopéra à l’un de ces scandales qui ébranlent toujours la confiance des peuples dans le droit protecteur des sociétés.
. — La mort, sire (répondit le seigneur de La Vacquerie, premier président, portant la parole pour toute la compagnie) ; la mort qu’il vous a plu nous ordonner, comme celle que nous sommes résolus de choisir plutôt que de passer votre édit contre nos consciences.
Ajoutez la multitude d’affaires qui passaient par ses mains, celles de religion surtout et de conscience, car elle se croyait l’« abbesse universelle », a dit Saint-Simon ; et elle-même s’appelle la « femme d’affaires des évêques ».
En ce sens, Perrault applique expressément la méthode de Descartes à l’examen de la littérature et des arts ; il la proclame hardiment un des premiers, et avec pleine conscience de ce qu’il fait : L’autorité, dit-il, n’a de force présentement et n’en doit avoir que dans la théologie et la jurisprudence… Partout ailleurs la raison peut agir en souveraine et user de ses droits.
C’est ainsi encore qu’elle dira, à propos des cabales de cour et de direction de conscience qui trouvaient moyen de s’immiscer autour du duc de Bourgogne jusque dans les camps et au milieu des plus grands périls : Qu’est-il question, madame, quand il s’agit d’un roi qu’on veut détrôner, d’un autre dont on veut abattre la puissance, enfin des plus grandes choses du monde, d’y mêler M. de Cambrai, les Jésuites, les libertins et les jansénistes ?
Un homme sage, mêlé autrefois à ces guerres de parti, m’indique avec précision le point de conscience resté un peu sensible chez Carrel, et en même temps les circonstances qui triomphèrent de son scrupule.
Converti d’abord par politique, il paraît qu’il le fut ensuite plus sérieusement et plus sincèrement avec les années, et que les raisons de conscience finirent par se joindre en lui aux autres considérations du personnage public et du roi.
Seulement, disons-le d’abord, pour éviter tout embarras, le livre d’Aubryet brille de tant de talent et de tant de conscience que, pour nous, la vérité n’est pas plus difficile à dire que la reconnaissance n’est difficile à porter.
Talleyrand, dit-on, n’écrivit jamais une seule lettre ; Talleyrand, cet homme médiocre qui sentait sa médiocrité et malgré la conscience de l’enchantement de ses manières, n’avait pas tant d’esprit puisqu’il n’avait pas d’âme dessous !
Et voilà comment eux, ces pantins à qui tout est ficelle, accusèrent de duplicité, de titubation et d’un pantinisme semblable au leur, un homme majestueux d’unité et de vérité en toute chose, — l’esprit le plus appuyé sur la conscience la plus droite qui ait peut-être jamais existé !
Des docteurs en sincérité se sont établis carrément dans la conscience du poète Richepin pour mieux savoir que lui ce qui s’y passe, et ils ont déclaré que son impiété n’était qu’une comédie.
L’aumônier se fait scrupule de rassembler dangereusement les hommes, et de créer une obligation de conscience à des enfants qu’il priverait de leurs heures de repos.
Il est donc permis de dire qu’en Russie l’unification reste superficielle ; l’organisation bureaucratique de l’État est comme suspendue au-dessus d’une nation qui n’a pas encore conscience d’elle-même.
Les éléments qu’ils personnifiaient, les forces actives dont ils étaient la conscience, se ressouviennent d’avoir été divins avec eux. […] » Ainsi isolé entre ces deux grands vides, entre ces deux néants de la responsabilité et de la conscience, le César romain perd toute vue lucide, tout aperçu de rapports, tout sentiment de juste et d’injuste. […] Otez d’un homme la conscience, le sens moral, le cœur, les entrailles, s’il n’a pas de génie pour remplir ces vides, qu’en restera-t-il ? […] Allégé du poids de l’âme, de la conscience, du remords, de tout ce bagage moral qui ralentit la marche des scélérats ordinaires, il va vite, se multiplie, tranche au lieu de dénouer, et porte des coups d’autant plus sûrs que son bras ne tremble jamais. […] A peine a-t-il conscience de son être.
c’était à sa conscience à le conseiller, à l’accuser ou à l’absoudre. […] Mais, censeurs, ne vous tourmentez pas autour de ce cas de conscience : ce sont les imprudences d’Agrippine, ce fut son ambition, et non le dégoût de Néron qui la perdirent. […] C’est la conscience du despote qui lui inspire, c’est sa terreur qui lui dicte ces édits qui n’apprennent à la nation qu’une chose : c’est que son oppresseur connaît le sort qu’il mérite, et qu’il a peur. […] Sera-ce la voix du peuple ou celle de ma conscience que j’écouterai ? […] La pureté de sa conscience et le souvenir de ses actions adoucissaient l’amertume des journées qu’il passait dans l’attente de la proscription.
La conscience, à l’idée de la mort et de l’obscure éternité, s’était troublée ; des anxiétés sourdes y avaient pullulé en secret comme une végétation d’épines, et le cœur malade, tressaillant à chaque mouvement, avait fini par prendre en dégoût tous ses plaisirs et en horreur tous ses instincts. […] Les alarmes de la conscience s’étaient changées en lois d’État. […] Ses sujets, s’il l’ordonne, doivent renoncer au Christ, au moins de bouche ; le pacte primitif lui a livré sans réserve l’entière possession de tous les actes extérieurs ; au moins, de cette façon, les sectaires n’auront pas, pour troubler l’État, le prétexte de leur conscience. […] C’est le débordement de l’orgie qui triomphe, se décerne elle-même la couronne et s’étale en maximes. « Notre vertu, dit l’une d’elles, est comme la conscience de l’homme d’État, la parole du quaker, le serment du joueur, l’honneur du grand seigneur : rien qu’une grimace pour duper ceux qui se fient à nous. » À la dernière scène, les soupçons éveillés se calment sur une nouvelle déclaration de Horner. […] It is certain that, as it now is, the seamen of England, in my conscience, would, if they could, go over and serve the King of France or Holland, rather than us. (24 juin 1667.
Mais les choses se tiennent ; s’il n’y avait pas de poètes, il n’y aurait pas de primes à leur donner et naturellement l’Académie serait supprimée, car l’Académie est une institution uniquement créée pour distribuer des primes aux poètes, tant que l’Académie subsistera, il y aura des poètes… Il serait injuste cependant de ne pas dire un peu de bien de ces pauvres gens ; je crois donc les honorer aux yeux du monde en déclarant qu’ils sont, dans la vie privée, une race généralement satisfaite et gaie, cela prouve au moins qu’ils n’ont pas commis de grands crimes capables de troubler leur conscience, à moins que ce ne soit la joie de mettre tout le monde dedans. […] C’est non seulement une affaire de conscience, mais une affaire de raison. […] Les demi-lettrés ont conscience de l’insuffisance de leur instruction, et ne jugent que d’après les jugements des autres. […] Et que ceux qui tiennent à trouver une chose belle, pour leur satisfaction personnelle et un reste de concession à leur éducation, remarquent que je ne nie pas la notion du beau, je ne fais que changer sa place ; au lieu de le chercher dans une idée vague, sans consistance et surtout inappréciable à tout le monde, je le trouve dans le portrait fidèle du grand modèle que l’artiste a devant les yeux, qu’il peut sentir, rendre et faire comprendre à tous ; je veux que, s’il fait un tableau de femme nue, une baigneuse, comme votre peintre Courbet, il fasse voir à chacun une femme et pas autre chose et qu’il n’y ait personne pour s’écrier devant sa toile, comme je l’ai entendu devant nombre de Vénus : « C’est dommage qu’il n’y ait pas de créatures comme cela au monde. » Je crois que vous avez, en fondant ce journal et en soutenant les idées qu’il proclame, fait une chose bonne et utile, parce que c’est une chose de conscience ; je crois que vous avez fait mieux, beaucoup mieux que tant d’autres qui fondent un journal pour des satisfactions d’amour-propre, des vengeances de parti, des amitiés du monde, des intérêts personnels et je vous place parmi ceux qui suivent la bonne voie. […] Je veux voir poursuivre un but littéraire pour la satisfaction de la conscience et pour le but lui-même, et non pour se faire admirer par les bourgeois et par le public.
Tout le monde regardant avec un pressentiment triste, mais sans avoir encore la conscience du lamentable fiasco. […] Par acquit de conscience, et comme dans le jeu d’un rôle, une de ces femmes laisse-t-elle échapper : « C’est bien triste ! […] Les instinctifs, — c’est ainsi qu’il les appelle, — sans conscience du sentiment qui les mène, doivent commander une obéissance, qui n’est pas due à la science, à la connaissance, à l’étude, à la réflexion. […] Sa force lui vient absolument de la conscience, que le peuple a d’avoir été incomplètement et incapablement défendu par le gouvernement de la Défense nationale. […] Les uns dérangent deux ou trois pavés de la chaussée, les autres donnent, comme par acquit de conscience, une dizaine de coups de pioche dans l’asphalte du trottoir.
Il n’avait pas le droit de tant s’en moquer, ayant bien pis sur la conscience en fait de déclamatoire et de forcé. […] Il portait en épigraphe ces vers des Marrons du feu : N’allez pas nous jeter surtout de pommes cuites Pour mettre nos rideaux et nos quinquets à bas, et il commençait ainsi : « Voyez la force de la conscience ! […] Chez Musset, c’est un réveil de passion auquel la conscience de l’irréparable communique une immense tristesse. […] Musset n’avait pas encore pris conscience de lui-même et de son génie propre. […] Cécile sera sa raison et sa conscience.
Cet exemple prouvera une fois de plus que nous n’avons de criterium absolu que dans notre conscience, et que dès que nous nous livrons aux interprétations des phénomènes qui sont en dehors de nous, nous ne sommes entourés que de causes d’erreur et d’illusions. […] En effet, d’un côté nous avons la certitude de l’existence du déterminisme des phénomènes, parce que cette certitude nous est donnée par un rapport nécessaire de causalité dont notre esprit a conscience ; mais nous n’avons, d’un autre côté, aucune certitude relativement à la formule de ce déterminisme, parce qu’elle se réalise dans des phénomènes qui sont en dehors de nous. […] II Les phénomènes métaphysiques de la pensée, de la conscience et de l’intelligence, qui servent aux manifestations diverses de l’âme humaine, considérés au point de vue physiologique, ne sont que des phénomènes ordinaires de la vie, et ne peuvent être que le résultat de la fonction de l’organe qui les exprime. […] Elle nous apprend que c’est dans les lobes cérébraux que réside la conscience ou l’intelligence proprement dite, tandis que les parties inférieures de l’encéphale recèlent des centres nerveux affectés à des fonctions d’ordre inférieur. […] Les anesthésiques, par exemple, font disparaître la conscience et engourdissent la sensibilité en laissant la motricité intacte.
Les romans se font rarement conscience de distiller et de vendre de bien dangereuses inventions ; la concurrence de ces négociants est souvent basée sur la pire espèce de leur marchandise ; mais les romans connaissent trop bien les acheteurs qu’il s’agit d’affriander pour offrir leur denrée dans du papier gris. […] Nous ne pouvons, en conscience, suivre le poète dans le détail des charmes trop proéminents de la mystérieuse inconnue qui, prenant la parole, félicite le nouvel arrivé de son retour dans sa patrie, et lui parle d’un ton tout à fait inspiré. […] Très probablement, il a conscience de cette disposition de son esprit, car il aborde rarement les auteurs de quelque portée, et si par hasard il le fait, il ne s’attache jamais qu’à une petite partie de leur talent.
On veut en bannir délibérément, en toute conscience, ce qu’on appelle, — je crois, — les contingences, c’est-à-dire les accidents de milieu, d’époque, les faits particuliers. […] Et ce m’est une bien grande fierté, l’honneur qu’elle me fait de se grouper en haute liberté et toute conscience pour ma Méthode. […] À la même époque, la science bouleversait, magnifiait le monde de ses engendrements ; notre philosophie, coordonnant ses principes, prenait définitive conscience d’elle-même. […] Deux de ses romans déjà, dans un style de belle race, ont confessé des dandysmes du cœur, des cas de conscience singuliers. […] Malheureusement, cette conscience ne s’acquiert pas d’un seul coup.
Nisard a pu avoir conscience du xviiie siècle ; il ne fait point passer cette conscience dans l’âme du lecteur. […] La voici maintenant qui ressuscite, mais absolue, mais inflexible, appliquée sans délibération, avec une rigueur géométrique et, si j’ose dire, avec un esprit de ligne droite, sans conscience d’elle-même, désormais force qu’on subit et non plus règle qu’on se donne. […] Flaubert excelle à nous les faire sentir, quelquefois sans en avoir conscience, puisqu’il lui arrive de donner comme « ignobles » des coins de toile qui, à leur manière, plaisent. […] Aspirations vers la liberté de conscience, mépris du clergé, harangues assidues contre l’ambition romaine, cela ne suffit point encore pour être affilié, même de loin, à l’Encyclopédie. […] Il envisage mieux les choses sous leur jour, et son adresse n’a d’égale que la parfaite sérénité de sa conscience.
Je déclare que je me sens plus jaloux de mes principes de conscience, que de mes dogmes sur les belles-lettres, persuadé, comme je l’établis en ce travail, que la probité est le fonds et la principale disposition naturelle à tout poète, à tout prosateur, qui aspire à se rendre utile par ses écrits. […] C’est de lui seul qu’on acquiert la conscience de ses fautes, ou de ses propres forces : car, en se défiant trop de soi-même, on perd quelquefois le juste sentiment qui conseille le mieux : on atténue son originalité. […] leur dit-il : — La mort, sire. » Et le politique judicieux promet de ne plus envoyer que des édits dont l’enregistrement ne coûtera rien à la conscience du parlement. […] C’est peu ; figurez-vous que vous allez soumettre vos ouvrages à des juges tels qu’Homère, Platon ou Démosthène, et la conscience de votre faiblesse vous avertira des défauts qui attireraient leur sévère censure. […] Vous le louerez aussi d’avoir cédé modestement à la conscience de ce qui lui manquait, lorsqu’il passe avec rapidité sur Homère, et sur la poésie épique, et qu’il s’étend sans mesure sur Lucain, sur la Henriade, et sur les autres poésies que peut-être jugeait-il plus à sa portée.
Pour faire de pareilles tragédies, il fallait non seulement avoir un génie vigoureux, il fallait encore être honnête homme et avoir de la conscience : les cœurs vils et corrompus se moquent de la postérité et trompent leur siècle. […] C’est en vain que ces manœuvres sans conscience entassent à la hâte absurdités sur absurdités, et recrépissent le tout d’un enduit brillant, capable de tromper les yeux : quand on y regarde de près, les crevasses et les lézardes se font apercevoir de toutes parts, et bientôt l’ouvrage croule. […] Grâce au ciel, sa conscience est tranquille ; il n’a rien à faire qu’à s’admirer : tous ses critiques ne sont que des envieux et des méchants. […] Le suffrage de Louis XIV et de madame de Maintenon ne suffisait pas à l’auteur, tout grand courtisan qu’il était : il prit le parti de faire imprimer sa tragédie pour lui donner plus de célébrité ; et, pour le repos de sa conscience, il fit seulement insérer dans le privilège une défense expresse aux comédiens de la jouer ; précaution qu’on avait également prise pour Esther, et qui fut également inutile. […] Quand il parlait ainsi, il était encore poète, homme de lettres, homme de goût, et n’était rien autre chose ; il avait encore de la conscience en littérature, et ne pouvait mentir à son cœur.
Il y avait alors des partis en ligne, de grandes opinions rangées en présence ; il y avait des positions régulières à emporter, des principes légitimes à faire prévaloir, une vérité sociale en un mot, et c’est la conscience de cette vérité qui développait et doublait les jeunes talents, occupait les jeunes passions, et leur donnait tout leur emploi dans une direction à la fois utile et généreuse. […] je crois que tous ceux qui participèrent alors à l’œuvre d’opposition et bientôt de délivrance, qui y mirent plus ou moins du leur, soit de leurs actes, soit de leurs vœux, ont encore droit de se dire : « Non, nous n’avons pas erré, » et qu’ils ont aussi le devoir d’ajouter : « Si nous avions à recommencer, même en sachant avenir, ce serait encore à refaire. » Ceci dit une fois et pour nous mettre la conscience tout à fait à l’aise, l’étude de l’attaque, au point de vue tout à fait stratégique, nous devient singulièrement curieuse : rien de plus instructif, de plus dramatique aujourd’hui que cette lecture du National.
Je ne sais plus me plaindre, mes chers amis ; la conscience que j’ai de la grandeur de mon infortune ne comporte pas l’usage des paroles. […] « Je ne fais pas appel, en mourant, aux rois sourds de l’Olympe ou du Cocyte, ni à l’indigne terre, ni à la nuit ; je ne t’invoque point non plus, dernier rayon dans l’ombre de la mort, ô conscience de l’âge futur !
Vous y êtes tout près de l’église. » XIV Mais le chef-d’œuvre de la piété paternelle est cette lettre admirable, véritable testament du cœur de Mozart le père, adressée comme une recommandation de l’âme à son fils pour le préserver contre les dangers de Paris, et pour faire en même temps devant Dieu, devant sa femme et devant ce fils, l’examen de sa conscience de père pendant les tribulations de son existence. […] Elle est morte sans en avoir conscience ; elle s’est éteinte comme une lampe ; elle s’était confessée trois jours auparavant, elle avait communié et reçu l’extrême-onction.
Le crime de ce prince fut de vouloir, ou punir un insensé qui n’avait pas conscience de son délire, ou guérir par la sévérité et par la violence un délire sacré qui ne pouvait être guéri que par la douceur, la compassion et la charité. […] Il a la conscience de ce qu’il vaut, et dans toute sa conduite il montre ce légitime orgueil qui est inséparable du génie.
Et les saints eux-mêmes ne sont pas fâchés sans doute de pouvoir mépriser en sûreté de conscience, par une pensée religieuse, ce que le vulgaire déteste par un mouvement naturel. […] Et l’on sait enfin que, chez l’artiste, la passion s’amortit toujours un peu par la conscience qu’il en prend, et parce que ses propres sentiments lui deviennent « matière d’art ».
Alors se confirmera dans toutes les consciences le sens définitif de notre dignité, et l’homme trouvera dans l’accomplissement de sa nature, dans la perfection de ses facultés individuelles et sociales, la joie religieuse dont les cultes anciens n’offraient que des figures. […] On reviendra sur les concessions jadis faites et qui le furent injustement : la conscience et l’intelligence, l’imagination et la sensibilité, échappant aux théologies, redeviendront définitivement humaines : à la charité nous substituerons l’amour.
— Soudain toute cette foule et tout ce peuple et cette domination, s’arrêtent, le bonnet, le chapeau, ou la couronne à la main, devant l’opinion d’une douzaine de consciences que rien ne peut fléchir, et qui se dressent au milieu de ces abjections et de ces émeutes, semblables aux monts Apennins si quelque géant Adamastor les transportait sur la lisière de la plaine Saint-Denis ! […] La cour était un monde à part, où il était nécessaire absolument, si l’on y voulait faire un grand chemin, d’être effronté, insolent, mendiant, avide et menteur ; où l’oubli, la fierté, l’arrogance, la dureté, l’ingratitude, étaient une courante monnaie ; où l’honneur, la vertu, la conscience, étaient des oripeaux passés de mode ; où l’on voyait, c’est toujours La Bruyère qui parle ainsi, « des gens enivrés et comme ensorcelés de la faveur, dégouttant l’orgueil, l’arrogance, la présomption ».
Elle apprend que ses funérailles auront lieu le lendemain ; elle se promet de se trouver debout, chapeau bas, tout entière, dussent les rues être trop étroites, à la suite de son convoi, non pas pour que la famille du vieillard note la présence d’un million de visages anonymes dans le cortège, mais pour que le soleil la voie payer un tribut de conscience, de respect et de patriotisme à ce cercueil qui lui semble renfermer quelque chose de mort dans l’image de la patrie. […] Nous ne pensons pas non plus que la conquête universelle, que la civilisation subordonnée à l’armée, qu’une volonté sans réplique à ses décrets, qu’un concordat rétablissant légalement un sacerdoce d’État sur les consciences, que la résurrection des noblesses, des baronnies du moyen âge, des majorats, des substitutions, des principautés, des féodalités recrépies de gloire, nous ne pensons pas que tant d’autres institutions du premier empire fussent des articles du programme philosophique et républicain de Béranger et de ses amis politiques de 1814.
Il faut bien le dire, il a diminué la notion du roman, de cette chose complexe et toute-puissante, égale au drame par l’action et par la passion, mais supérieure par la description et par l’analyse ; car le romancier crée son décor et descend, pour l’éclairer, dans la conscience de ses personnages, ce que le poète dramatique ne fait pas et ne peut pas faire. […] J’ai essayé d’indiquer ce qu’il est, en réservant ce qu’il pouvait être… En mon âme et conscience, je le crois, dénaturé, un romancier qui pourrait être grand, mais un romancier qui s’est compromis dans un genre non pas faux (entendez-moi bien !)
Bernis, par conscience même et par sentiment de son peu de force, reculait et retardait : ses mœurs étaient celles de son âge et de son temps ; son cœur et son esprit n’avaient rien d’irréligieux : la perspective d’un évêché, qu’on lui laissait entrevoir moyennant des sacrifices extérieurs, était plus faite pour l’effrayer que pour le tenter : Non, tu connais trop ma droiture : Coupable par fragilité, Mais ennemi de l’imposture, Je ne joins pas l’impiété Aux faiblesses de la nature.
Puis récapitulant tous les pouvoirs affaiblis qui se flattaient alors de gouverner, et la Cour qui espérait toujours regagner par ruse et par achat des consciences ce qu’elle avait perdu, et les orateurs de l’Assemblée qui se croyaient forts de ce qu’ils avaient conquis en applaudissements, et la municipalité de Paris, le maire en tête, qui se croyait maître de la Commune, et les chefs même les plus populaires, Pétion, Marat, dont les noms retentissaient dans toutes les bouches : Pétion, Marat même, concluait-il, étaient gouvernés par la multitude.
En voyant les excès qui déshonoraient une cause qui aurait pu être si belle, en considérant le champ illimité d’anarchie et d’aventures dans lequel on se lançait à l’aveugle, il en revint à aimer cette Constitution anglaise pour laquelle il s’était toujours senti assez tiède ; il redevint fier de ce qu’il appelait le bon sens de sa nation et de ce qu’elle avait conscience des bienfaits dont elle jouissait : Les Français, écrivait-il à lord Sheffield (1790), répandent tant de mensonges sur les sentiments de la nation anglaise, que je souhaiterais que les hommes les plus considérables de tout parti et de toute classe se réunissent dans quelque acte public pour déclarer qu’ils sont eux-mêmes satisfaits de notre Constitution actuelle et résolus à la maintenir.
Pendant que le roi disait ses grâces, Joinville, tout pensif, s’en alla donc à une fenêtre grillée qui était dans un enfoncement vers le chevet du lit du roi, et là, passant ses bras à travers les barreaux de la fenêtre, il pensait mélancoliquement à ce qu’il ferait s’il lui fallait demeurer en Syrie sans son maître et seigneur ; car il se croyait en conscience obligé d’y rester jusqu’au rachat de ses amis et de tout son monde.
On a donc pu noter un coin de faiblesse humaine dans ce qui était néanmoins un acte véritable de conscience.
Ma mère, lorsque j’appris que tu étais morte, dis, est-ce que tu as eu conscience des pleurs que j’ai versés ?
… » Comme Voltaire l’avait dénoncé d’emblée aux puissances et signalé comme un calomniateur de Louis XIV, de Louis XV et du roi de Prusse, La Beaumelle le rappelait à l’ordre et lui faisait toucher son inconséquence : « Apprenez qu’il est inouï que le même homme ait sans cesse réclamé la liberté de la presse, et sans cesse ait tâché de la ravir à ses confrères15. » Il y a même une lettre assez éloquente, la xiiie , dans laquelle l’auteur suppose un baron allemand de ses amis, qui s’indigne de l’espèce de défi porté par Voltaire, dans son enthousiasme pour le règne de Louis XIV : « Je défie qu’on me montre aucune monarchie sur la terre, dans laquelle les lois, la justice distributive, les droits de l’humanité, aient été moins foulés aux pieds… que pendant les cinquante-cinq années que Louis XIV régna par lui-même. » La réponse est d’un homme qui a souffert dans la personne de ses pères et qui sort d’une race odieusement violentée dans sa conscience, opprimée depuis près de quatre-vingts ans16 et traquée.
Ces observations faites pour l’acquit de sa conscience, il doit, avant tout, homme pratique et de bon sens, porter un regard scrutateur sur l’âme et sur la nature d’Aurélie, afin de bien voir si cette apparence candide et calme ne recèle point un foyer de trouble et d’orage.
L’impression de ce songe lui demeura ; il lui semblait que sa conscience eût parlé.
Il aimait pourtant l’art en lui-même ; il avait de la conscience dans les bagatelles, il soignait extrêmement ses « chansons et autres breloques. » Mais voilà tout ; il ne songeait qu’à vivre, à rire, à s’amuser avec ses confrères du Caveau, et il fallut que Crébillon fils et d’autres amis clairvoyants l’avertissent qu’il pouvait mieux et plus pour qu’il s’avisât de s’élever jusqu’au genre de proverbes et de petites comédies où il a excellé.
» La réminiscence est, en un mot, un réveil fortuit de traces anciennes dont l’esprit n’a pas la conscience nette et distincte.
Le premier contact avec un monde plus varié a révélé au solitaire ses aspirations puissantes, irrésistibles ; il ne se borne plus à se considérer lui-même comme à La Chesnaie, il se compare : il a conscience de ce qu’il peut désormais, il osera.
Il est peu de pages plus honorables au point de vue de la conscience littéraire, de la part surtout d’un écrivain aussi accepté déjà, aussi acclamé du jeune public et en pleine possession de la vogue : « (14 novembre 1833.)
Mais, comme la conscience de leur usurpation les tient, pareils à ces empereurs nés d’une émeute, c’est à qui dévorera son règne d’un moment.
J’ignore s’il est quelqu’un de nos amis qui ait su garder, à travers les épreuves diverses, cette fleur de libéralisme primitif, de libéralisme pour ainsi dire platonique et en dehors de toute action, et cette tendresse extrême de conscience qui ne souffre examen ni doute à l’endroit des anciennes idoles ; s’il en est de tels, je les admire et je les envie.
Les voici donc, et avec leurs épigraphes, pompon en tête ; quand on cite le minutieux auteur, il y aurait conscience de rien oublier.
Ce bonhomme, qui semble tout fondant de chaleur dévote, et qu’on prendrait pour un doux illuminé, a le sens ferme et la conscience austère : ne prenez pas son tempérament pour sa doctrine, ni ses manières pour ses principes.
Il est impossible, dans l’infinie complexité des choses humaines qu’une infinité de forces concourent à produire, quand les causes physiques et les causes morales se perdent dans les obscures profondeurs de notre organisme et de notre conscience, quand on ne démêle encore — et au temps de Montesquieu on était loin d’être aussi avancé que nous sommes — quand on ne démêle que les plus superficielles réactions et les plus grossiers enchaînements de phénomènes, il est impossible de déterminer ce qu’il aurait fallu ôter ou retrancher d’énergie humaine ou de travail législatif pour détourner ou barrer le cours des événements.
Et c’est aussi une idée grande et belle d’avoir fait de l’innocent un juge et un justicier, d’avoir fait briller dans ce cerveau trouble une seule lumière, la conscience, qui apparaît alors comme quelque chose de primordial, d’inexpliqué, de divin.
Par sa science colossale, puisée aux sources les plus diverses, par la sagacité de son esprit et son ardent besoin de vérité, Littré a été à son jour une des consciences les plus complètes de l’univers.
Il pourra se féliciter d’avoir fait tout ce qu’il pouvait faire, s’il a conscience de n’avoir laissé de côté aucune œuvre qui ait marqué dans l’évolution littéraire.
Son âme se trouble, sa conscience s’émeut, il l’interroge avec inquiétude : — « Agni !
Ce qu’il faut faire, ou ne pas faire, en vérité, je l’ignore. » — Pélasgos a pourtant la conscience très vive du sacrilège qu’il commettrait en rejetant de telles suppliantes.
Philippe a beau objecter qu’il aime sa cousine ; l’avoué refuse de prendre au sérieux cet enfantillage, et la mère, prévenue par lui, vient livrer à la conscience ébranlée de son fils un suprême assaut.
On avait manqué le port, et il fallait faire double traversée : « Ce n’est plus le voyage de l’Amérique, disait ingénieusement Barnave, c’est celui de l’Inde. » Mais il n’en concluait pourtant pas au découragement ni au désespoir, et il écrivait de Grenoble à l’un des Lameth (31 mars 1792) : « Des hommes qui ont excessivement voulu une révolution ne peuvent pas, au milieu du chemin, manquer de tête ou de courage. » Ce noble sentiment de dévouement et de foi à sa cause ne l’abandonna jamais, même au milieu des dégoûts et des ingratitudes ; il en a consacré l’expression dans une page généreuse qui résume tout son examen final de conscience en politique : (1792).
si feu Barère n’avait jamais rien fait de pis dans sa vie que de publier ces lettres, et s’il n’avait jamais eu de plus grosse affaire sur la conscience, nous dirions aujourd’hui de grand cœur en l’absolvant : Que la terre lui soit légère !
Cela dit, et sa propre confession faite, il arrive délibérément à celle des autres, et il entame en toute conscience cette espèce de dissection universelle, cette ouverture impitoyable des âmes, qui le fait ressembler, au milieu de cette foule éparse, à un loup qui serait entré dans la bergerie, ou encore à un chien de meute qui serait à la curée.
L’élévation, le calme, la dignité, la conscience de sa force, c’était ce qui se marquait dans toute sa personne.
C’est un républicain de naissance et d’affection, ne l’oublions pas, un vrai citoyen de Genève, que cet homme qui, par bon sens et par la force de la vérité, est obligé de déclarer à la France de 89 et de 92 qu’elle n’est pas faite pour la république, et qu’il faut trente ans encore d’éducation préliminaire pour que les Français s’accoutument à quelque pratique de la liberté ; c’est un républicain qui n’est royaliste que parce que l’évidence de la raison l’y oblige et qu’il ne peut écrire contre sa conscience.
Mais il est plus utile d’insister sur les ressorts élevés qu’il trouvait dans cette foi et dans cette conscience royale, ce qui lui faisait dire au milieu des hasards de la politique : « Mais au moins, quel qu’en soit l’événement, j’aurai toujours en moi toute la satisfaction que doit avoir une âme généreuse quand elle a contenté sa propre vertu. » Parlant de ces six volumes de Mémoires au moment où ils parurent, M. de Chateaubriand les a très bien jugés en disant : Les Mémoires de Louis XIV augmenteront sa renommée : ils ne dévoilent aucune bassesse, ils ne révèlent aucun de ces honteux secrets que le cœur humain cache trop souvent dans ses abîmes.
Il comparut devant la justice, il s’y traîna, n’avouant d’abord qu’à demi ; mais bientôt, pressé par les magistrats et par sa conscience, sa déposition se rapprocha de plus en plus de celle de la fille Grivault, au point de n’en plus différer que sur des circonstances très secondaires.
Sans doute que le bonheur dont j’allais jouir était trop parfait pour pouvoir devenir ici-bas mon partage, et c’est (oui, je l’espère fermement, mourant en bon chrétien, et avec la tranquillité que m’inspire le témoignage de ma conscience), c’est pour m’en rendre participant dans une autre vie que le Maître suprême de nos destinées va me retirer de celle-ci.
Si on a vécu trente ans, avec une conscience assez aiguisée, dans un coin pas trop fermé de la terre, on peut compter n’avoir plus à éprouver de sensations radicalement neuves, mais seulement des nuances inaperçues jusqu’alors, des nouveautés de détail.
L’alambic du père Colombe ronfle, tressaille et rutile comme s’il avait conscience du poison qu’il élabore.
Ils ont une hospitalité sévère qui plaît à la conscience.
Je ne saurais en conscience vous en dire autant des nuages qui portent votre sainte ; les enfants envelopés de ces nuages sont légers et minces comme des bulles de savon et les nuages lourds comme des ballons serrés de laine volans.
Saint-Simon, avant qu’il eût la conscience de son génie d’écrivain, avait en lui, plus profondément que l’artiste, un ambitieux, dont l’ambition avait encore plus d’intensité que son génie, et c’est l’ambitieux qui, dans sa vie, doit expliquer tout !
Aussi le rire des enfants, qu’on voudrait en vain m’objecter, est-il tout à fait différent, même comme expression physique, comme forme, du rire de l’homme qui assiste à une comédie, regarde une caricature, ou du rire terrible de Melmoth ; de Melmoth, l’être déclassé, l’individu situé entre les dernières limites de la patrie humaine et les frontières de la vie supérieure ; de Melmoth se croyant toujours près de se débarrasser de son pacte infernal, espérant sans cesse troquer ce pouvoir surhumain, qui fait son malheur, contre la conscience pure d’un ignorant qui lui fait envie. — Le rire des enfants est comme un épanouissement de fleur.
Là-dessus, demandez donc au vaincu si ce n’est pas qu’il aurait manqué de capacité, de prévoyance ou de courage ; s’il n’est pas peut-être battu par sa propre faute, pour avoir trop présumé de lui-même, et trop peu de l’ennemi ; s’il n’a pas la conscience enfin des erreurs qu’il a commises, et s’il ne devrait pas désormais, par-dessus tout, songer à les réparer. […] Ce qu’il y a de plus délié dans le sentiment, ce qu’il y a de plus subtil dans les détours de la passion, ce qu’il y a de plus tristement ingénieux dans les illusions de la conscience humaine, si habile à se méprendre elle-même sur les vraies raisons de ses actes, voilà ce que Massillon a observé, discerné, mis à nu comme personne. […] Ils l’inventeraient au besoin, ne sachant guère d’instrument de règne plus utile sur le peuple, ni surtout de plus salutaire épouvantail pour la conscience des rois. […] Mais en vain ont-ils cette redoutable connaissance de l’humaine perversité que doit donner à des gens tels qu’ils sont l’un et l’autre l’expérience du confessionnal et de la direction des consciences ! […] Que si cependant l’amitié du censeur et son désir de complaire cèdent parfois à l’évidence trop claire du devoir, le manuscrit passera de ses mains à celles d’un deuxième, d’un troisième, d’un quatrième censeur, et jusqu’à ce que l’on en trouve un dont les idées plus larges, ou la conscience moins étroite veuillent bien s’accommoder au caprice de l’auteur.
Dans ce vaste soliloque : Novissima Verba, le poète, près de désespérer, se réfugie, parmi la fuite, la vanité et le néant du tout, dans la seule certitude de la conscience morale, et rencontre, pour la définir, des images qui semblent d’exactes transpositions des formules kantiennes : Non ! dans ce noir chaos, dans ce vide sans forme, Mon âme sent en elle un point d’appui plus ferme, La conscience ! […] Noble instinct, conscience, ô vérité du cœur ! […] Mais supposons que, par un malheur, les « tyrans positivistes » de Renan ne soient pas bons ; et nous aurons tout justement les hommes-dieux savants et méchants (« science sans conscience est la ruine de l’âme ») conçus par Lamartine trente-cinq ans avant que les Dialogues philosophiques ne fussent écrits.
L’historien, en demeurant fidèle à des convictions que le spectacle des choses de ce temps n’a pu qu’enraciner plus profondément dans sa conscience, n’a eu besoin d’aucun effort pour se souvenir qu’il ne devait point porter, dans un livre d’histoire et dans un ouvrage littéraire, les ardeurs d’un esprit polémique. […] Et j’irais prévenir la décision du chef de l’Église, braver l’opinion unanime de mes pasteurs, déshonorer ma religion en plaçant les prêtres entre la conscience et l’intérêt, le parjure et l’avilissement ! […] Ce n’est pas une fois seulement qu’elle est exprimée, elle revient sans cesse, et toutes les fois qu’il arrive à une de ces frontières de l’esprit humain, auxquelles les sages s’arrêtent avec respect et que les téméraires entreprennent en vain de franchir. « La loi de la pensée, dit-il excellemment35, qui fait sortir le moi de la conscience de ses actes, est la même qui, par le ministère et l’artifice de l’induction, fait sortir la substance matérielle de la perception de ses qualités. […] Mais il y avait quelque chose de plus : en ne demandant, comme Archimède, qu’un point pour reconstruire l’édifice des certitudes détruites, en se bornant à découvrir une chose qui soit certaine et indubitable, pour servir de base à tout le reste, minimum quid quod sit certum et inconscussum, et en prenant, pour cette chose seule certaine et indubitable, la conscience qu’il avait de sa pensée, il ne vit pas qu’il rompait toutes ses communications avec le monde extérieur et qu’il se mettait dans l’impossibilité de se démontrer à lui-même l’existence de ce monde, car la conscience ne nous rend témoignage que des opérations intérieures de notre esprit. […] Il reconnaissait ainsi les grandes lois de l’intelligence, qui règlent tout et qui n’ont pas de règles, qui expliquent tout et que rien n’explique, les mystères de l’esprit humain, si l’on peut s’exprimer ainsi, qu’on ne saurait rejeter sans tomber dans le chaos ; et il démontrait que, si l’on voulait ébranler l’autorité d’une seule de ces sources de connaissances, la perception externe, la conscience, la mémoire, la perception morale, la raison, on les ébranlait toutes, et l’on tombait dans le scepticisme, ce fléau des âmes, qui est aussi le fléau des sociétés.
Et plus loin il le dit en vérité : « Toujours j’ai eu horriblement conscience du néant des néants, de la poussière des poussières. » Et, bien qu’il fût peu raisonneur, il en concluait logiquement que rien ne vaut d’être désiré, que rien ne vaut un effort : Quand je regardais les hommes d’un certain âge qui m’entouraient, même ceux qui occupaient les positions les plus honorables, les plus justement respectées, auxquelles je pusse prétendre, et que je me disais : il faudra un jour être comme l’un d’eux, vivre utilement, posément, dans un lieu donné, dans une sphère déterminée, et puis vieillir et puis ce sera tout… alors une désespérance sans bornes me prenait ; je n’avais envie de rien de possible ni de raisonnable ; j’aurais voulu plus que jamais rester un enfant, et la pensée que les années fuyaient, qu’il faudrait bientôt, bon gré mal gré, être un homme, demeurait pour moi angoissante. […] Cette pauvre petite procession d’enfants abandonnés avait achevé de me serrer le cœur, en ajoutant à mon désenchantement sur les soirées de mai la conscience de la vanité des prières et du néant de tout. […] Et il a révélé ses efforts vers le genre de perfection dans un de ces examens publics de conscience où il se plaît. […] Spuller n’en est pas moins une nature religieuse ; si, comme on peut le croire, il y a de la religion dans le respect des consciences, dans l’amour de la liberté et dans le zèle d’un cœur qui veut la paix et la dignité des âmes.
Je supplée, pour les objets qui m’intéressent, certaines incapacités par un discernement rare des diverses qualités des hommes, joint à la conscience bien exacte de ce qui me manque.
Ce n’était pas, comme l’avait été Vauvenargues, un jeune stoïque croyant fermement aux vérités morales et se fondant sur les points élevés de la conscience pour fuir le mal et pour pratiquer le bien, ce n’était point une âme héroïque condamnée par le sort à la souffrance et à la gêne de l’inaction : c’était une âme tendre, timide, ardente, pleine de désirs pieux et fervents, inhabile au monde et à ces scènes changeantes où elle ne voyait que des échelons et des figures, avide de se fondre dans l’esprit divin qui remplit tout, de frayer sans cesse avec Dieu, de le faire passer et parler en soi, une âme née pour être de la famille des chastes et des saints, de l’ordre des pieux acolytes, et à qui il ne manquait que son grand-prêtre.
Il se mit à se préparer en conscience à son métier d’ambassadeur, et il fut bientôt le meilleur qu’on pût envoyer à Lisbonne et le plus capable, autant qu’on l’est par la lecture.
Esprit hiérarchique, militaire classique comme il le dit quelque part, né pour obéir en toute discipline et pour commander dans les seconds rangs, il a rempli jusqu’au bout avec conscience cette destination méritoire.
Appliquant son examen à quatre batailles exposées par Horace Vernet à ce Salon, Iéna, Friedland, Wagram et Fontenoy, il concluait en ces termes : « Certes, il n’y a pas là la conscience d’un Holbein, la couleur d’un Titien, la grâce d’un Vinci ; ce n’est ni flamand, ni italien, ni espagnol ; mais, à coup sûr, c’est français.
S’il est vrai que Théophile Gautier partagea ou eut l’air de partager quelques-uns des travers qu’il décrit, il était impossible de les railler avec plus de conscience, d’esprit et de finesse.
Chimène aime plus Rodrigue, non pas quoique, mais parce qu’il a tué son père ; et lui qui sent qu’il a fait ce qu’il a dû, il a conscience du secret de Chimène et d’autant plus d’envie, avec un reste d’espoir, d’être pardonné.
Lorsqu’elle faisait son examen de conscience, elle sentait bien au fond qu’elle avait, elle et ses amis, quelques petites peccadilles à se reprocher.
Ainsi il se jouait en Piémont une partie double : Tessé, à la fois homme d’épée et diplomate officieux, menant une intrigue en vue de la paix ; Catinat faisant son métier de général, et le faisant en toute conscience, mais bien péniblement, à cause du peu de secours qu’on lui donnait et du manque d’argent, de moyens de transport, de subsistances, de tout.
Il publie le recueil de ses Opinions et Discours, ses Lettres sur la Révolution ; il s’acquitte d’une dette de conscience et n’a pour le lendemain que les plus tristes présages.
En conscience, on ne saurait demander aux hommes d’avoir des horizons historiques tout à fait hors de leur temps, de savoir ce que nul alors ne savait, de deviner ce qui était caché et ce qui s’était perdu ou altéré au point d’être méconnaissable ; je reviendrai, à l’occasion d’un chapitre de Du Bellay, sur cet article des romans de chevalerie sons lesquels on aurait voulu qu’il retrouvât les chansons de geste.
Les nombreux articles de critique dans lesquels il juge les ouvrages et drames nouveaux respirent une conscience profonde, et accusent un retour pénétrant sur lui-même, un souci comme effaré de l’avenir.
J’en note, pour acquit de conscience, quelques petites, sans être très-sûr moi-même de ne pas me tromper.
C’est quand la conscience intime nous dit qu’on va être à bout, qu’on devient regardant pour les autres et susceptible pour soi.
Je vais me hâter de définir cette espèce d’indifférence qui n’exclut pas du tout la curiosité et la conscience, ces deux vertus du critique, et qui même leur laisse un plus libre jeu.
A cette époque unique dans la vie, le génie, qui, depuis quelque temps adulte et viril, habitait avec inquiétude, avec tristesse, en sa conscience, et qui avait peine à s’empêcher d’éclater, est tout d’un coup tiré de lui-même au bruit des acclamations, et s’épanouit à l’aurore d’un triomphe.
S’il lui faut supposer parfois des faits multiples ou des coïncidences trop arrangées, c’est qu’il médite des cas de conscience raffinés, des conflits héroïques de sentiments.
La tête de Condé est bien connue ; mais, par un surcroît de conscience, je suis allé consulter les estampes de la bibliothèque Victor Cousin.
La conscience de son unicité et de son originalité ne lui vient pas des considérations économiques.
J’ai lu quelque part qu’un poète ou philosophe (allemand, je crois) s’enivrait régulièrement et par conscience une fois par mois, afin de se procurer cet état mystique où l’on touche de plus près l’infini.
Son unique fonction semble être de plaire aux dames, et il s’en acquitte en conscience.
Voici la marche ordinaire des choses : si nous prenons pour point de départ une époque où elle est maîtresse incontestée des âmes, par exemple l’époque des premières croisades, nous la voyons d’abord, dans la plénitude et l’orgueil de sa force, faire peser un joug de fer sur les consciences, régenter la société civile, essayer de gouverner à la fois et les rois et les peuples, se faire l’arbitre de la paix et de la guerre, s’ériger en dépositaire unique et infaillible de la vérité tant religieuse que scientifique.
Un soir, à la tombée du crépuscule, assis dans le salon déjà sombre, devant le jardin, — comme de rares paroles, entre de longs silences, venaient d’être échangées, sans avoir troublé le recueillement où nous nous plaisions, — je demandai, sans vains préambules, à Wagner, si c’était pour ainsi dire, artificiellement — (à force de science et de puissance intellectuelle, en un mot) — qu’il était parvenu à pénétrer son œuvre, Rienzi, Tannhæuser, Lohengrin, le Vaisseau Fantôme, les Maîtres Chanteurs même — et le Parsifal auquel il songeait déjà — de cette si haute impression de mysticité qui en émanait, — bref, si, en dehors de toute croyance personnelle, il s’était trouvé assez libre-penseur, assez indépendant de conscience, pour n’être chrétien qu’autant que les sujets de ses drames-lyriques le nécessitaient ; s’il regardait, enfin, le Christianisme, du même regard que ces mythes scandinaves dont il avait si magnifiquement fait revivre le symbolisme en ses Niebelungen.
Mais si leur angoisse consterne son intelligence, elle n’abat pas sa conscience.
Déjà, dans les Effrontés, il nous montrait un entrefilet de la Conscience publique chassant du monde une grande dame calomniée.
Un jour, qu’elle engageait M. de Sainte-Aulaire à aller à confesse comme elle, il lui répondait : Ma Bergère, j’ai beau chercher, Je n’ai rien sur ma conscience.
André Chénier, témoin des mêmes actes, et jugeant Condorcet dans la mêlée comme un transfuge de sa cause, de la cause des honnêtes gens, s’écriait : C…, homme né pour la gloire et le bien de son pays, s’il avait su respecter ses anciens écrits et su rougir devant sa propre conscience ; homme dont il serait absurde d’écrire le nom parmi cet amas de noms infâmes, si les vices et les bassesses de l’âme ne l’avaient redescendu au niveau ou même au-dessous de ces misérables, puisque ses talents et ses vastes études le rendaient capable de courir une meilleure carrière ; qu’il n’avait pas eu besoin, comme eux, de chercher la célébrité d’Érostrate, et qu’il pouvait, lui, parvenir aux honneurs et à la fortune, dans tous les temps où il n’aurait fallu pour cela renoncer ni à la justice, ni à l’humanité, ni à la pudeur.
Pour mieux faire sentir que c’est tout à fait l’orateur ici qui est en scène et qui va chercher son argument dans la conscience de l’adversaire, je n’ai qu’à rappeler ce que Mirabeau dit en vingt endroits : « Je crois à un Dieu, mais non à un Dieu rémunérateur. » Il croyait, pour son compte, à une Cause première qu’il ne définit guère autrement, et non pas à l’immortalité de l’âme.
Necker était usé, que sa prévoyance était à courte échéance et s’était toujours bornée à la révolution de chaque mois ; qu’il n’avait aucune vue d’avenir ; qu’il n’y avait de ressource que dans un ministère véritablement capable et agissant, dans un ministère de première force ; et alors, avec cette conscience de lui-même qu’il était en droit d’avoir, mettant sous le pied toute fausse modestie, Mirabeau se présentait avec cordialité et franchise.
Ayant à parler des Directions pour la conscience d’un roi, écrites par Fénelon pour le duc de Bourgogne, l’abbé Maury n’avait osé une première fois, en présence de l’Académie, définir nettement la confession et le confessionnal ; il avait dit vaguement : « Ce n’est plus à un enfant, c’est au chrétien qu’il s’adresse.
Ce fut surtout de cette mollesse de conscience que me guérit mon nouvel état.
À Paris, on n’en était pas dupe : « En vain les trompettes de la Renommée ont proclamé telle prose ou tels vers ; il y a toujours dans cette capitale, disait Rivarol, trente ou quarante têtes incorruptibles qui se taisent ; ce silence des gens de goût sert de conscience aux mauvais écrivains et les tourmente le reste de leur vie. » Mais, en province, on était dupe : « Il serait temps enfin, conseillait-il, que plus d’un journal changeât de maxime : il faudrait mettre dans la louange la sobriété que la nature observe dans la production des grands talents, et cesser de tendre des pièges à l’innocence des provinces. » C’est cette pensée de haute police qui fit que Rivarol, un matin, s’avisa de publier son Petit almanach de nos grands hommes pour l’année 1788, où tous les auteurs éphémères et imperceptibles sont rangés par ordre alphabétique, avec accompagnement d’un éloge ironique.
Le Brun, dans l’orgueil de sa conscience solitaire, souriait de pitié lorsqu’il entendait dire que La Harpe avait en vers quelque chose du « style de Jean Racine » ; mais, si La Harpe, s’autorisant de Voltaire, en venait à parler à la légère de ce grand Corneille, « le raisonneur ampoulé », comme on le voit qualifié dans la correspondance de Ferney, oh !
En attendant, il mène large et joyeuse vie dans ses maisons de campagne aux bords du lac ; il donne à dîner à ces mêmes ministres de Genève dont d’Alembert a blessé la susceptibilité et la conscience : « Ce n’est pas tout de se moquer d’eux, écrit-il, il faut encore être poli.
Il tire de la conscience tout l’imprévu qu’elle contient.
Sans doute les aristocraties dirigeantes, qui mettent la nuit sur les yeux des masses, sont les premières coupables, mais, en somme, la conscience existe pour un peuple comme pour un individu, l’ignorance n’est qu’une circonstance atténuante, et quand ces dénis de justice durent des siècles, ils restent la faute des gouvernements, mais deviennent la faute des nations.
La conscience de sa roture accable Maillet.
L’homme a besoin d’être aidé à produire ses pensées ; s’il n’a pas la confiance intime d’un appui dans l’opinion ou le sentiment de ses contemporains, il s’effraie de sa solitude ; s’il ne sent pas dans les autres l’influence qu’il se croyait appelé à exercer, le découragement vient le saisir, et il garde un silence qui le dévore : il n’est pas assez assuré dans sa propre conscience parce qu’il est éminemment un être social.
III La conscience historique qui manque au nouveau livre de M.
Résolution d’art ou de conscience, laquelle des deux ?
La conscience et la propriété du moi s’effacent chez elle, à ce point que dans les maisons aux gros numéros, les filles prennent indistinctement avec les doigts dans l’assiette de l’une ou de l’autre. […] * * * — Le tourment de l’homme de pensée est d’aspirer au Beau, sans avoir jamais une conscience fixe et certaine du Beau.
On voit que je ne touche même pas à la grande question : les animaux ont-ils conscience de leur douleur ? […] Mais les souvenirs s’épaississent encore, et il ne nous reste de conscience que pour courir après une respiration qui menace de s’échapper tout à fait.
C’est un réel examen de conscience qu’exige votre enquête ; seul, un casuiste, après mûre et réfléchie pesée du pour et du contre, pourrait peut-être se prononcer avec assurance. […] Pour moi je préfère les faits, les faits de conscience, aux divagations abstraites, et j’aime mieux dire ceci : quand j’ai la sensation d’une belle chose, il arrive parfois que cette sensation intéresse, captive mon être tout entier.
Gœthe, ce curieux qui a touché à tout, qui a voulu tout être et a été pris pour étant tout, — ce qui, dans sa conscience, était la grande affaire, — ne peut être découpé et servi que par tranches, comme les beaux melons et les citrouilles. […] en gardant la conscience de l’ennui qui le noie et dont il meurt, sans en mourir.
Ces habitudes loyales d’un travail plein de conscience et de zèle, la critique les impose et bien vite, même aux esprits les plus disposés à la tentation et aux libertinages du hasard. […] Molière, cette observation mélancolique et bienveillante, avait fort bien deviné que le rire est en dernier résultat, la plus grande, la plus utile, mais aussi la plus difficile leçon qui se puisse donner aux hommes assemblés ; son rire sortait de sa conviction et de sa conscience, et certes, il fallait être un hardi courage pour oser rire devant Tartuffe, et un grand poète pour faire rire de Tartuffe ! […] Il entraîne, il est chaleureux, il est abondant, il est rempli des défauts et des qualités de son époque ; on comprend que l’homme qui écrivait ainsi avait, à un haut degré, la conscience de sa force et de son importance : or, ce sont là des qualités trop rares, surtout dans la comédie moderne, pour qu’on soit le bienvenu à s’armer de la Grammaire et du Dictionnaire de l’Académie contre un philosophe tel que Fabre d’Églantine. […] Elle était tour à tour, au gré de son génie, au gré de notre cœur, Célimène, Henriette, Elmire, et comme elle les jouait ces grands rôles dont elle avait les traits, la conscience et l’accent !
Terrifiée du mal qu’un élan de sa conscience lui a fait commettre, Renée, faible, délicate, atteinte d’une maladie de cœur, doit mourir à son tour ; le médecin a fait comprendre au malheureux père le sort qui l’attend. […] , qui, tout en voulant marcher droit, ne sait aller que de travers, et qui commet mille petites infamies sans en avoir conscience. […] De la première, il a gardé un profond dévouement pour la famille de son barine, la deuxième en raffinant se mœurs a élargi sa conscience. […] Au roulement de tambour qui précède la représentation, la conscience d’artiste de Joli-Cœur se réveille ; il veut, presque mourant, mettre son uniforme de général ; on est obligé de le lui faire endosser. […] M. de Talyas est marié et la marquise est une franche et charmante coquette ; le jeune héros lui plaît et, malgré les révoltes de sa conscience, le trouve fort à son gré.
Molinier, qu’il convient de rapprocher l’un et l’autre fragment ; et c’est aussi pourquoi je pense qu’en toute sécurité de conscience nous pouvons continuer de lire, comme autrefois : « placer adroitement une balle ». […] Et puis, un grand homme, en ce temps-là, qui ne ressemblait guère au nôtre, sous ce rapport, n’avait jamais une telle et si superbe conscience de sa valeur que de croire en soi, seul contre tous. […] Il devait avoir quelque sentiment de sa valeur, quelque conscience de son génie ; d’ailleurs, il avait cette fragilité des âmes tendres et passionnées : les plus susceptibles, ce sont les plus aimants. […] En découronnant toutes ces nobles et charmantes figures de leur auréole de poésie, j’ai comme la conscience de commettre une sorte de crime. […] Aussi le premier, quand il a vu la mort approcher, a-t-il pu s’endormir dans la paix d’une haute et loyale conscience ; le second, de son vivant même, a pressenti l’heure où ses disciples se retourneraient contre lui.
La mère s’est acquittée de cette tâche avec une conscience qui fait peur. […] Quant à tromper une pauvre enfant crédule et confiante qui s’adresse à leur conscience et à leur probité littéraire, ces hommes illustres voudraient-ils y consentir ? […] Madame Dubarry demandant grâce au bourreau pourra remuer les furies de guillotine ; elle inspire un profond dégoût à ces honnêtes gens qui meurent la tête haute et la conscience tranquille. […] Il exaltait les choses ignorées ; il glorifiait les forces méconnues ; il racontait les œuvres dédaignées ; lui aussi, il aurait pu dire en toute sécurité de conscience : « À chacun selon ses œuvres ! […] Il n’en voulait ni à l’autorité, ni à la puissance, ni à la fortune, ni à la renommée ; mais il était jaloux de son crédit sur les âmes honnêtes et sur les consciences timorées dont il était l’arbitre souverain.
Quoi qu’il en soit, c’en est assez pour montrer que, dans le cabinet de Gui Patin, le grand crucifix pouvait, en toute sincérité, occuper la première place, et que le bon Dieu, comme on disait et comme il disait en langage de famille, continuait de régner en effet sur cet assemblage un peu disparate de personnages si divers et sur la conscience du maître lui-même.
Il me semble que l’honorable érudit s’est laissé en ceci dévoyer et tromper par le détail : il s’est perdu par excès de recherches et par trop de conscience.
Ce sont ces années actives et fécondes de la première maturité qu’il regrettait plus tard de n’avoir pu appliquer selon qu’il s’en estimait capable : repassant sa vie dans sa vieillesse et faisant son examen de conscience, il croyait qu’il y avait moins encore de sa faute dans cette médiocre fortune que de celle de son étoile : Si on me demande ce que c’est qu’étoile, disait-il, je répondrai que je ne le sais pas ; je sais seulement que c’est quelque chose de réel qu’on ne connaît point ; et je suis persuadé que ceux qui prétendent que notre bonne ou notre mauvaise fortune dépend de notre conduite ont grand tort ; elle y peut beaucoup, mais l’étoile y peut encore plus.
La lettre, d’ailleurs, se terminait par un post-scriptum plus grave et qui montrait qu’à travers les bouffées et les saillies de la vanité, on avait affaire à un chef réfléchi, ayant la conscience de ses hauts devoirs militaires.
Ne proscrivons pas plus au nom du goût qu’au nom de la conscience ; toutes les orthodoxies ont leur danger.
Appelé pour la première fois, Messieurs, et par un honneur que je ressens comme je le dois, à rendre compte des motifs et des choix de l’Académie, on me permettra de dire mon impression la plus sincère : c’est que jamais, devant aucun tribunal, examen ne s’est fait avec plus de scrupule et de conscience, que celui des dossiers qui chaque année nous sont soumis.
Il présage, dès ce moment, un coup de vent soudain qui peut tout renverser, un 24 février possible ; il songe même, lui homme d’un autre temps, au rôle de courage et d’audace qu’il aurait à remplir, tel cas échéant et en telle rencontre : le Si forte virum quem… lui revient à l’esprit, et il a conscience que ce jour-là il ne se tairait pas comme Sieyès et qu’il oserait.
La raison modérée a beau dire et vouloir mitiger, il y a dans les grands cœurs repentants quelque chose qui crie plus haut, une conscience qui veut se punir et ne pas être consolée à si peu de frais.
ils sont inviolables pour tous : nul n’y viendra relancer votre rêverie, pas plus qu’en ces autres bosquets qui en sont l’image, bosquets tout voisins de votre Passy, et où vous vous enfoncez au milieu du jour, à l’abri même des amis, fuyant, selon la saison, ou cherchant le soleil, cherchant surtout l’entretien de la conscience et l’habitude de la Muse !
Nous avons à examiner aujourd’hui ce dernier ouvrage, remarquable, intéressant, et traité avec conscience.
C’est ainsi que M.Mignet a eu tour à tour à apprécier des philosophes, des hommes d’État, des jurisconsultes, des médecins, des économistes : il n’a failli à aucun de ces emplois, et on l’a vu porter dans tous la même conscience d’études, une vue équitable et supérieure, et une grande science d’expression ; mais il nous semble n’avoir jamais mieux rencontré que dans les portraits qui se détachent par la hauteur et l’unité de la physionomie, ou dans ceux qui se lient naturellement à de grands exposés de systèmes, par exemple dans ceux de Sieyès et de Broussais.
Une certaine conscience intérieure, au milieu de tous leurs succès de société, semble avoir averti les poëtes et beaux-esprits de ce bord, qu’ils n’étaient pas à leur vraie place dans le siècle, que leur moment était passé ou n’était pas venu, que d’autres, véritablement grands, régnaient, qu’ils étaient évincés, en un mot.
Le sacrifice une fois consommé, la conscience lucide lui revint : « Je reconnus, dit-il, que ce cœur si vif étoit encore brûlant sous la cendre.
Il ne peut pas être zélé pour l’État et il est tenu en conscience de supporter les tyrans.
Avec un peu de sympathie, il aurait fait un chef-d’œuvre et une œuvre définitive : il n’a fait, malgré sa conscience de travailleur et son génie lucide d’écrivain, qu’une œuvre de parti, fausse et dure.
» Et on ne songe pas seulement à sa longueur patiente d’exposition, mais à la rudesse de quelques-unes de ses plaisanteries et même, par une injuste extension, par un sophisme dont on n’a pas conscience, à son style en général.
Sa conscience le met à l’abri des tentations, son caractère l’élève au-dessus de son temps, son goût est entretenu par la seule lecture des maîtres.
M. de Régnier est surtout un droit et pur artiste ; son vers a des lignes bien tracées, des couleurs transparentes et rares disposées avec justesse ; il démontre une grande probité d’écriture, un idéal d’art austère, la volonté d’un homme qui garde haute sa conscience.
Elle en avait au nom de la liberté de conscience, fruit, chèrement payé, des querelles religieuses ; elle en avait au nom de la science économique, née des souffrances du commerce et de l’industrie dans les dernières années, et qui se plaignait avec le double crédit de critiques fondées et d’espérances sans limites.
Ce peuple semblait résigné à la mort, il avait perdu toute conscience et ne comptait plus comme individualité dans le monde, quand un groupe incomparable de génies, Gœthe, Schiller, Kant, Beethoven sont venus le révéler à lui-même.
Chez le second, c’est le fils honnête qui juge, condamne et abandonne à sa solitude le père usurier93 ; c’est le fils au cœur délicat qui donne des leçons d’honneur au père dont la conscience de banquier fut trop élastique et qui le contraint même à réparer ses fautes.
Il sent sa faiblesse, il a conscience de sa déraison ; mais la passion l’emporte, et il cède avec de nobles rougeurs.
Car ce serait une vraie duperie que d’attribuer l’insulte de ce Clarkson, et le combat qu’elle provoque, à la révolte d’une conscience indignée par les méfaits conjugaux du duc de Septmonts.
On raconte que le fameux maître de danse Marcel, si connu par la solennité de ses aphorismes, demanda un jour une audience à M. de Lamoignon père pour lui déclarer qu’il ne pouvait lui dissimuler en conscience que son fils ne danserait jamais bien et ne pourrait conséquemment faire son chemin ni dans la magistrature ni dans l’armée : « À la manière dont il marche, concluait-il, vous ne pouvez raisonnablement le placer que dans l’Église. » M. de Malesherbes se plaisait gaiement à raconter ce lamentable pronostic de Marcel.
Cette vie politique, depuis 1814, peut se diviser en trois temps : 1º du 30 mars 1814 au 6 juin 1824, la période royaliste pure ; 2º du 6 juin 1824, jour de son renvoi du ministère jusqu’à la chute de la Restauration, la période libérale en contradiction ouverte avec la première ; 3º la période de royalisme et de républicanisme après juillet 1830, quand Chateaubriand dit à la duchesse de Berry pour l’acquit de sa conscience : « Votre fils est mon roi », et qu’il donne en même temps une main à Carrel, une autre à Béranger, et prend à l’avance ses précautions avec la république future.
Il y mêle des considérations politiques qui sont toutes dans le sens de l’ordre et de la défense sociale : mais, même quand il serait plus sobre de ce genre de discussions, le seul tableau des faits, la suite même des textes, les pièces à l’appui qu’il produit avec étendue, fournissent une base de jugement irréfragable, et tout lecteur, en se laissant conduire par le biographe, peut statuer à son tour en connaissance de cause et en sûreté de conscience.
V Flaubert d’ailleurs ne s’en est pas tenu à mettre en scène en des consciences individuelles, comme on l’a vu le faire avec Mme Bovary, avec Frédéric Moreau, avec Homais, avec les personnages secondaires de L’Éducation sentimentale et de Bouvard et Pécuchet, ce don de métamorphose qui permet aux hommes de prendre le change sur eux-mêmes et parfois semble les y contraindre.
Dimanche 28 décembre Près de trois semaines, où du matin, où depuis mon retour du Palais de Justice à midi, je m’enterre dans le travail jusqu’à minuit, sans voir âme qui vive, et je travaille dans un état de corps vague, bizarre, dans lequel il ne me semble pas avoir la conscience d’être réveillé.
Ainsi plus de monarque à flatter ; plus d’humbles dédicaces à faire ; plus de temps à perdre dans les antichambres et les cours ; plus d’assouplissement de caractère ; plus de compromis gênant entre la conscience et l’intérêt.
Qu’on se rappelle le début du premier volume, le vol chez Mgr Myriel et le pardon de l’évêque, la lutte intérieure, chez Jean Valjean, entre l’instinct mauvais et la conscience qui s’éveille : quel est l’ouvrier, l’apprenti enfermé avec son livre, un soir de dimanche, qui ne comprendra pas cela ?
Et, si quelques traits de ce poëme furent le prétexte ou la cause de l’accusation de sacrilège intentée contre Eschyle et repoussée par son frère Aminyas, au nom de leurs blessures communes, jamais l’instinct de la conscience contre un culte faux, jamais le cri de l’humanité contre la force n’aura été plus poétique ni plus grand.
Sa conscience pouvait l’avertir en secret qu’il avait tort de reprocher à un autre l’injustice qu’il avait commise à son égard. […] L’esprit de ces anciens auteurs est d’une étoffe plus forte ; ils ont travaillé en conscience, cherchant avant tout la perfection de l’art, plus jaloux de bien faire que de réussir ; ils n’ont connu d’autre combinaison que l’impulsion de leur génie, d’autre calcul que le sentiment intérieur qui les guidait. […] Pauline eût mieux fait d’avouer cette faiblesse à une confidente, et de faire la généreuse devant Sévère, en lui disant que son devoir et son mariage avaient étouffé tous les sentiments qu’elle avait pu concevoir autrefois en sa faveur ; c’est la conduite que devait garder une femme vertueuse, surtout dans une tragédie qui n’était pleine que de maximes chrétiennes et de saintes paroles, et qui finissait par un martyre ; mais c’est un de ces beaux endroits de Corneille qui pèchent contre le jugement, et qui n’ont pas laissé de ravir ceux qui se laissent abuser par de faux brillants. » D’Aubignac parle en prédicateur, en directeur de consciences, et non pas en littérateur, en législateur de l’art dramatique. […] Ce grand ministre, en protégeant le Menteur, voulut sans doute expier le tort qu’il avait eu de persécuter le Cid ; il était sur le point d’aller rendre compte de son administration à un juge plus sévère que Louis XIII ; sa persécution contre le Cid n’était peut-être pas l’action dont sa conscience devait être le plus alarmée. […] Aurait-il pu, en conscience, appeler belle une copie aussi difforme, aussi monstrueuse ?
Zola peut-il croire en conscience, que, si la critique persiste à maintenir contre lui les droits du roman qu’il appelle « idéaliste », ce soit au nom des Alexandre Dumas et des Frédéric Soulié, par un reste d’admiration de collège pour les Mémoires du Diable ou pour Monte-Cristo ? […] Ce n’est pas une histoire à conter qui le hante ; ce ne sont pas des figures entrevues ou rencontrées qui l’obsèdent jusqu’à ce qu’il les ait fixées, pour s’en débarrasser, dans une action dramatique ou dans une intrigue de roman ; ce n’est pas enfin quelque remarquable et singulier état de l’âme ou de la conscience humaine dont il éprouverait le besoin de retrouver les antécédents ou de déterminer les conséquences psychologiques. […] vous retournerez contre nous les scrupules de notre conscience d’artiste ! […] Uniquement parce qu’il est prétentieux, c’est-à-dire uniquement parce qu’à chaque fois qu’il ouvre la bouche, il affirme la conscience entière qu’il a de sa supériorité. […] « Madame Winthrop était, sous tous les rapports, une femme de conscience scrupuleuse, tellement avide de devoirs que la vie paraissait ne pas lui en offrir suffisamment, à moins qu’elle ne se levât à quatre heures et demie, ce qui alors diminuait l’ouvrage pour les heures suivantes, problème qu’elle aurait désiré résoudre.
Alors seulement nos idées sont exprimées ; nous avons la conscience ou la connaissance de nos pensées, et nous pouvons la donner aux autres ; alors seulement nous nous idéons nous-mêmes, nous idéons les autres êtres et les rapports qu’ils ont entre eux et avec nous ; et de même que l’œil distingue chaque corps à sa couleur, l’esprit distingue chaque idée à son expression. […] Si la parole est nécessaire à la manifestation de l’idée, et que la parole entre par les sens, l’âme dans une autre vie, dépouillée des organes du corps, n’a donc pas la conscience de ses pensées ? […] Quintilien et Élien nous parlent de cet Archiloque qui osa le premier publier l’histoire honteuse de sa conscience à la face de l’univers, et qui florissait en Grèce avant la réforme de Solon. […] Votre indifférence vous rendrait un jour responsables des égarements que vous seriez forcés de punir ; votre conscience au moins serait effrayée du reproche que pourrait vous adresser un jeune homme traduit devant un tribunal criminel, un jeune homme prêt à subir une condamnation rigoureuse. […] Rollin, par exemple, tout chargé qu’il est des trésors de l’antiquité, ne paraissait plus digne de servir de guide aux écoliers d’un siècle de lumière, qui aurait eu grand besoin lui-même d’être renvoyé à l’école54… Des hommes qui avaient passé quarante ans de leur vie à faire en conscience quelques excellents volumes pour l’instruction de la jeunesse ; des hommes qui dans le silence de leur cabinet, vivaient familièrement avec Homère, Démosthènes, Cicéron, Virgile ; des hommes qui étaient si simplement et si naturellement vertueux, qu’on ne songeait pas même à louer leurs vertus ; des hommes de cette sorte se voyaient préférer une méchante espèce de charlatans sans science, sans gravité, sans mœurs.
Et quelle conscience artistique ! […] quand à l’époque on avait contre soi la conscience littéraire du siècle ! […] Haute conscience, il ne leur rend pas justice, les condamnant sans leur accorder même des circonstances atténuantes auxquelles ils ont droit.
Et il termine en disant : « Ma conscience est sereine, car j’aperçois toujours… l’œil de ma mère morte ! […] J’ai la conscience d’être une individualité qui se forme et se développe, et je marche entraîné souvent par quelque chose de plus que ma seule volonté. […] Je n’y ai ajouté que quelques circonstances indifférentes, mais qui, m’étant personnelles, ont encore en cela même de la réalité. » Telle est l’excellente intention de l’écrivain, le scrupule de sa conscience. […] Dans les actions compliquées et longues, il est rare que le lecteur arrive à la fin sans avoir oublié le commencement ; l’auteur ne peut suivre ses caractères avec la même conscience, la même sûreté, étant entravé à chaque pas par les besoins du plan, l’étrangeté des scènes, et tout finit par être un mensonge ennuyeux et insignifiant. […] Je sais bien qu’il est difficile de ne pas faire un livre, quoi qu’on en dise, et que la tentation va jusqu’à obscurcir l’entendement pour quelque temps ; mais comme c’est beau et comme on a la conscience nette et pure quand on peut se dire : J’ai sacrifié une gloire d’un jour à un tout petit principe de logique !
. — Les « cas de conscience » dans la tragédie de Corneille ; — et comment ils en font la grandeur ; — mais aussi la subtilité. — De là, dans son théâtre, les actions qu’il appelle « implexes » [Cf. dans Horace le personnage de Sabine, ou dans Polyeucte celui de Sévère] ; — analyse d’Héraclius ; — aveux de Corneille à ce sujet. — Comment à la complication de l’intrigue il ajoute celle des motifs ; — et observations de Schlegel sur ce point [Cf. […] La Bruyère]. — Mais où il a réussi moins encore qu’ailleurs, c’est contre les médecins ; — et justement, c’est depuis qu’il les a poursuivis de ses plaisanteries que les médecins sont devenus de véritables directeurs de conscience. — S’il faut conclure des échecs de Molière que l’art ne doive avoir d’autre objet de lui-même ? […] Abbé Bellon, Bossuet, directeur de conscience, Paris, 1895. […] 2º L’Homme et l’Écrivain. — D’un écrivain de plus qui ne ressemble point à son style ; — et qu’autant il y a de douceur ou d’onction même dans le Télémaque, autant le vrai Fénelon fut dur, imployable et cassant. — Si l’on ajoute, à ce trait essentiel, une très haute idée de soi-même, de sa race, et de sa dignité personnelle ; — une préciosité naturelle qui se traduit par le goût des opinions rares et singulières ; — enfin une espèce d’insincérité dont il n’a presque pas conscience ; — on aura le premier Fénelon, — dont le second ne s’est dégagé que très tard ; — et on ne l’aura pas tout entier, le personnage étant étrangement complexe et ondoyant ; — mais on aura de quoi le comprendre ; — et de quoi ramener à une sorte d’unité, sa vie, son rôle et son œuvre. […] 5º Écrits politiques, comprenant divers Mémoires concernant la guerre de la succession d’Espagne ; — l’Examen de conscience sur les devoirs de la royauté ; — et l’Essai philosophique sur le gouvernement civil, qui n’est point de Fénelon, mais du chevalier de Ramsai, « d’après les principes de M. de Fénelon », Londres, 1721 [t.
L’analyse psychologique n’étant point son fait, et, pour mon compte, je ne m’en plaindrai pas, les nombreuses observations qui remplissent les Récits d’un Chasseur portent principalement sur l’état social, les mœurs et l’extérieur des paysans russes ; l’auteur nous fait rarement pénétrer dans les replis de leur conscience. […] … elle s’était attachée à Arina, … et Arina, qui la servait, n’a pas eu assez de conscience pour… Ah !
Hamzeh-Mirza lui-même, pour qui vous avez prostitué vos consciences, ne vous en saura pas de gré un jour ; il vous regardera comme des chiens, qui ne lui auront procuré cet honneur que dans le désir de faire curée, et qui, dans l’espérance de s’engraisser pendant son bas âge, auront laissé Dieu et la loi, le Prophète et le livre, l’explication, la droite raison et la justice. […] La conscience de l’eunuque, ou sa profonde habileté, l’emporta contre le conseil tout entier.
C’est une grande et belle chose que de voir se déployer avec cette largeur un drame où l’art développe puissamment la nature ; un drame où l’action marche à la conclusion d’une allure ferme et facile, sans diffusion et sans étranglement ; un drame enfin où le poëte remplisse pleinement le but multiple de l’art, qui est d’ouvrir au spectateur un double horizon, d’illuminer à la fois l’intérieur et l’extérieur des hommes ; l’extérieur, par leurs discours et leurs actions ; l’intérieur, par les a parte et les monologues ; de croiser, en un mot, dans le même tableau, le drame de la vie et le drame de la conscience. […] Ce n’était plus seulement le Cromwell militaire, le Cromwell politique de Bossuet ; c’était un être complexe, hétérogène, multiple, composé de tous les contraires, mêlé de beaucoup de mal et de beaucoup de bien, plein de génie et de petitesse ; une sorte de Tibère-Dandin, tyran de l’Europe et jouet de sa famille ; vieux régicide, humiliant les ambassadeurs de tous les rois, torturé par sa jeune fille royaliste ; austère et sombre dans ses mœurs et entretenant quatre fous de cour autour de lui ; faisant de méchants vers ; sobre, simple, frugal, et guindé sur l’étiquette ; soldat grossier et politique délié ; rompu aux arguties théologiques et s’y plaisant ; orateur lourd, diffus, obscur, mais habile à parler le langage de tous ceux qu’il voulait séduire ; hypocrite et fanatique ; visionnaire dominé par des fantômes de son enfance, croyant aux astrologues et les proscrivant ; défiant à l’excès, toujours menaçant, rarement sanguinaire ; rigide observateur des prescriptions puritaines, perdant gravement plusieurs heures par jour à des bouffonneries ; brusque et dédaigneux avec ses familiers, caressant avec les sectaires qu’il redoutait ; trompant ses remords avec des subtilités, rusant avec sa conscience ; intarissable en adresse, en pièges, en ressources ; maîtrisant son imagination par son intelligence ; grotesque et sublime ; enfin, un de ces hommes carrés par la base, comme les appelait Napoléon, le type et le chef de tous ces hommes complets, dans sa langue exacte comme l’algèbre, colorée comme la poésie.
Je prie Me D de le qualifier elle-même en conscience. […] Nous pouvons prononcer sur les ouvrages d’esprit de tous les temps, on pourroit même mépriser Homere (ce que je ne fais pourtant pas) en toute sûreté de conscience ; et il n’y a rien qui captive nôtre jugement sur son mérite. […] Je lui ai rendu sur tout cela, l’honneur que j’ai crû lui devoir, je n’ai point dissimulé ses talens ; et si j’avois là-dessus quelque chose sur ma conscience, ce seroit peut-être d’avoir trop déferé quelquefois à sa réputation. […] Je l’avouë, c’est de cette difficulté de rendre Homere, que je me faisois un mérite ; et j’espérois que les poëtes s’en feroient un plaisir ; mais il y en a peu d’assez généreux pour établir eux-mêmes la réputation d’un ouvrage qu’ils n’ont pas fait ; car je ne veux pas parler de ceux qui se hâtent de le décrier contre leur conscience : la plûpart attendent comment le public le prendra : ils laissent parler ceux qui ne se connoissent guéres en poësie ; et s’il arrive que ces juges incompetens condamnent l’ouvrage, ils se joignent à eux, par égard, disent-ils, pour le public ; au lieu que s’ils avoient d’abord le courage de relever les beautez qu’ils sentent, et d’excuser certaines fautes par l’impossibilité de les éviter, dont ils ont l’expérience, ce public qui les entraîne à ce qu’ils disent, seroit peut-être entraîné par eux ; et ils donneroient le ton à ceux dont ils le prennent lâchement.
Georg Finsler a eu la conscience de les chercher dans les Conjectures. […] Seillière appelle mystiques les phénomènes que la conscience claire n’atteint pas : l’extase évidemment, puis l’inspiration, l’exaltation, l’enthousiasme, et d’autres encore. […] Les soldats ont pris conscience de leur force bien dépensée : « Nous avons su nous battre. […] Pour le savoir, il tente son examen de conscience, en quelque sorte, ou présente — c’est le titre du volume — son État civil. […] Il caractérise la génération qui a fait la guerre et qui, dans le secret d’une conscience collective, refusait la défaite avant d’avoir remporté la victoire.
ce n’est pas là de la conscience, de l’observation, ce n’est pas même du sens commun. […] au moins ma conscience est-elle légère, si leur tête est lourde… Mille souvenirs. […] Certes, j’ai la conscience nette sur ce que j’ai écrit dans mes huit lettres ; mais pourtant j’avoue franchement que cela me convenait mieux à faire et à signer, dans la position indépendante que j’occupe, qu’à M.
Je choisis la pièce intitulée La Conscience, qui est aussi bien une des plus belles : Lorsqu’avec ses enfants vêtus de peaux de bêtes, Échevelé, livide au milieu des tempêtes, Caïn se fut enfui de devant Jéhovah, Comme le soir tombait, l’homme sombre arriva Au bas d’une montagne en une grande plaine ; Sa femme fatiguée et ses fils hors d’haleine Lui dirent : Couchons-nous sur la terre, et dormons. […] Ici, il a voulu nous montrer l’idée du remords, la naissance du sentiment de la conscience : et pour nous montrer cette idée, pour lui donner forme, il tache d’évoquer sous nos yeux le décor même de l’époque. […] Après La Conscience, voici Booz endormi, et je ne veux de cette pièce vous citer quelques vers que parce que je ne crois pas que Victor Hugo jamais ait poussé plus loin l’art de décrire.
Quant à moi, je fais de mon mieux ; quand je quitte mon atelier pour me reposer, je le fais la conscience pure comme la plus belle fille du monde qui n’a pu donner que ce qu’elle avait.
Cette réponse qu’on lui arrache est une sorte de réclamation dernière faite pour l’acquit de sa conscience plus encore que pour l’honneur de la cause.
Mais Du Bellay n’est point de cette famille épicurienne de poètes : il n’entend rien au lucre, et il a conscience que la Muse se mésallie à ce commerce.
Et voilà que, sous prétexte d’indépendance et de scrupule de conscience, une portion de la magistrature agissant tout à fait isolément, et absolument comme si elle eût vécu dans une île déserte en dehors de notre atmosphère morale, ne tenant aucun compte du moment, du courant de l’opinion, de la crise politique, à l’une de ces heures toujours périlleuses où le vent est en train de tourner ; voilà que, saisie d’une superstition judaïque, elle se met à distinguer entre tel ou tel article rétrospectif chez tous les journaux indistinctement ; et, après examen, toute réflexion faite, elle en traduit la plupart en police correctionnelle !
Soyez bien persuadé que pas une ligne n’en paraîtra avant d’avoir subi les retouches que ma conscience et vos conseils jugeront propres à enlever à ce livre les dangers qui vous ont frappé.
Et la littérature dispute à la foi attiédie, à la philosophie et à la science peu populaires la direction des consciences.
Et dans ces trois sujets, que de formes d’âmes nouvelles et variées : Ulysse, le politique froid, qui ne recule jamais devant les moyens, quand il a choisi le but, point insensible pourtant, mais rassuré par la conscience qu’il a de ne voir que le bien public ; Agamemnon, père tendre, faible ambitieux, qui voudrait les fruits du crime sans le crime, et qui ne peut se résoudre à sacrifier sa fille à son égoïsme, ni son égoïsme à sa fille, plus sympathique que le Félix de Corneille, parce qu’il est plus déchiré ; Clytemnestre, la « mère », qui ne connaît plus ni patrie, ni dignité, ni mari, dès que sa fille est en péril, en qui, mieux qu’en aucune amplification romantique, apparaît le sentiment primitif, animal, de la maternité ; c’est la bête défendant son petit.
Steeg lui-même, nourri de bonnes lettres anciennes, comme le fondateur de son église, Jean Calvin, l’auteur de l’Institutio christianæ religionis… Non, en conscience, en toute liberté d’esprit, je ne crois à l’influence du latin sur la politique.
L’ouvrier de conscience et de savoir unique qui « instrumenta » ce poème, en modula les chants suivants la variété infinie des sentiments qu’il voulait exprimer.
Bourde consacre aux poètes prétendus décadents dénote en maints endroits, et malgré un badinage inutile et un peu lourd, une louable conscience littéraire ainsi qu’une certaine compréhension du sujet traité, compréhension, il est vrai, latente plutôt et quasi timorée.
J’ai la conscience que j’ai tout pris de l’expérience ; mais il m’est impossible de dire par quelle voie j’y suis arrivé, de quels éléments j’ai composé cet ensemble (qui peut avoir très peu de valeur sans doute, mais qui enfin est ma vie).
Il est une impression que j’ai pu fréquemment contrôler par celles d’autres personnes qui l’avaient éprouvée comme moi, il est une impression exactement dominatrice de tout l’organisme subjectif, impression dont on ne se rend pas compte sur le moment, impression inconsciente et formelle, c’est qu’au Wagner-Theater, on n’a pas conscience de soi-même.
C’est accomplir une œuvre utile que de grouper les jugements divers portés chez nous sur l’œuvre du grand réformateur dramatique ; les hommes qui ont défendu la musique wagnérienne, d’après le jugement de leur conscience artistique, la droite raison, la simple équité, et aussi d’après leur compétence réelle, ne peuvent qu’en avoir aujourd’hui de l’honneur ; espérons que les autres en tireront quelque confusion.
» — II a la conscience de la Fatalité qui l’emporte, il sait qu’il n’est qu’un patient manié et secoué par ses mains terribles.
Cette affirmation ne me touche guère, parce que j’ai la conscience de l’avoir plus aimé, qu’aucun de ceux qui diront cela, n’ont jamais aimé une créature humaine.
Après tout, peut-être dis-je cela, parce qu’il y a en moi, la conscience que dans quelque affection, que je pourrais rencontrer dans l’avenir, l’affection compréhensive de ma pensée ne sera plus retrouvable.
. — On rirait bien, de nos jours, de cette précaution dramatique des Séleucides, et comme on se moquerait de cette loi du drame antique qui exigeait que l’on fît grâce au spectateur de certaines actions des honnêtes ou criminelles, également offensantes à la conscience et à l’honnêteté publiques.
Telle est l’affaire du Cas de conscience dont nous avons une longue & ennuyeuse histoire ; telle est celle de la Bulle Unigenitus sur laquelle nous avons tant de mémoires.