Mais quand il tient Paul, Jean et Jacques pour des êtres semblables à lui, pourvus d’une conscience comme la sienne, il oublie réellement sa physique ou profite de l’autorisation qu’elle lui laisse de parler dans la vie courante comme le commun des mortels. […] Mais alors les deux personnages en S et S′ peuvent être amenés par notre pensée à coïncider ensemble, comme deux figures égales qu’on superposerait : ils devront coïncider, non seulement quant aux divers modes de la quantité, mais encore, si je puis m’exprimer ainsi, quant à la qualité, car leurs vies intérieures sont devenues indiscernables, tout comme ce qui se prête en eux à la mesure : les deux systèmes demeurent constamment ce qu’ils étaient au moment où on les a posés, des duplicata l’un de l’autre, alors qu’en dehors de l’hypothèse de la Relativité ils ne l’étaient plus tout à fait le moment d’après, quand on les abandonnait à leur sort. […] Mais « savoir l’heure qu’il est », c’est noter la simultanéité d’un événement, d’un moment de notre vie ou du monde extérieur, avec une indication d’horloge ; ce n’est pas, en général, constater une simultanéité entre des indications d’horloges.
XII Vous voyez donc que ressusciter l’Italie antique, à quelque date que vous la preniez de son histoire, est un mot qui n’a aucun sens : Ni sens historique, puisque l’histoire ne vous montre, depuis l’ancienne Rome, tyrannie sanguinaire du monde, aucune Italie une et agglomérée ; ni sens politique, puisqu’il y a eu depuis la chute de l’empire romain autant de politiques diverses et contraires qu’il y a eu de fragments de nationalités distinctes et opposées l’une à l’autre ; ni sens national, puisqu’il y a eu, depuis l’extinction de Rome, trente ou quarante nationalités vivant comme des polypes d’une vie propre et individuelle dans l’élément général italien. […] La preuve que chacun de ces États a eu sa nationalité et sa vie propre, c’est que chacun a son histoire parfaitement distincte de l’histoire générale de l’Italie ; il n’y a point et ne peut pas y avoir une histoire générale de l’Italie.
Les imaginations tranquilles et touchées des agrémens de la vie champêtre, ont inventé la poësie pastorale. […] Il aimoit passionnément le plaisir ; et comme il n’imaginoit rien pour l’homme au-delà de la vie présente, il en mettoit le bon usage à en consacrer tous les instans à la volupté.
Ote-moi cet objet odieux, Qui reproche ton crime et ta vie à mes yeux. […] Émilie a déterminé Cinna à ôter la vie à Auguste ; Cinna s’y est engagé, mais il se percera le sein du même poignard dont il aura vengé sa maîtresse.
Il est victorieux, et il est puissant, et, ce qui vaut mieux, il est producteur, il a créé de la paix, du bonheur et de la vie tout autour de lui. […] Telle est des Iroquois la gent presque immortelle : La vie, après cent ans, chez eux, est encor belle.
Selon moi, au moment où nous entrons sur la scène de la vie, c’est surtout l’instinct et le sentiment des facultés que nous portons en nous qui détermine, à notre insu, la manière dont nous voyons et dont nous entamons les choses.
“Si vous êtes réellement Don Juan, je suis encore en vie ; sinon, je suis bien trépassé”, répond Arlequin.
Les langues sont des formations historiques, qui indiquent peu de choses sur le sang de ceux qui les parlent, et qui, en tout cas, ne sauraient enchaîner la liberté humaine quand il s’agit de déterminer la famille avec laquelle on s’unit pour la vie et pour la mort.
Puis Cloto, la première des Parques, fileuse fatidique de la vie humaine, retira le petit Pélops vivant de l’eau bouillonnante.
L’abbé Goujet n’a pas osé la mettre dans son ouvrage, « parce que, dit-il, je ne veux pas donner une nouvelle vie à des libèles diffamatoires ».
Rien n’est plus vraisemblable ; il vécut loin d’elle presque toute sa vie.
Agis mourut pour avoir voulu rendre un instant la vie aux lois antiques de Lycurgue, lois qui firent la gloire et la force de Sparte, mais qui étaient tombées en désuétude.
Ni les attitudes et les volontés masculines, ni l’indépendance absolue qui se soucie de la réserve et de la pudeur comme d’un vieux jeton, et qui fait de la femme, si charmante autrefois, le plus désagréable inconvénient qui puisse tomber maintenant dans la vie d’un homme, ne sont des choses essentiellement cosaques.
que la fausse métaphysique d’un esprit gâté par les philosophies allemandes, et qui lutta toute sa vie contre les deux impossibilités pour les femmes, la métaphysique et l’histoire.
Au lieu de s’astreindre aux conditions de temps et d’espace qui enserrent l’histoire comme la vie, il fait l’aigle, s’abat où il lui plaît, prend l’histoire où il veut la prendre, et procède même méthodiquement, comme Montesquieu, quand il s’agit de la Civilisation occidentale, la seule qu’il sache ou qu’on sache bien, dans l’état actuel des connaissances historiques auxquelles, par son livre, il n’ajoute, certes !
« Il avait l’égoïsme prudent. » Mais nous connaissons cette prudence, qui jeta son bouclier à Philippe et eût recommencé dans tous les dangers de la vie.
En le prenant dans les faits les plus publics de sa vie, il n’a jamais été — qu’on le croie bien !
Il a rappelé que Charlemagne avait laissé la vie aux Saxons s’ils se faisaient chrétiens.
Travaillée par leur enseignement, décapitée de l’autorité paternelle, ouverte à tout, amollie, presque dissoute, la Famille, qui liait le faisceau des nations, est-elle capable aujourd’hui, contre ceux qui la menacent dans sa vie et dans son action, de la décision d’une énergie ou de la cohésion d’une résistance ?
L’au-delà pour lui sera le Schéol des Hébreux, l’endroit où vivent d’une vie vague ou presque éteinte les morts immobiles. — Hier signifie pour elle dans le passé, et demain, dans l’avenir ; aucun de ces deux mots ne désigne dans son esprit un jour précis par rapport à celui d’aujourd’hui, le précédent ou le suivant. — Voilà encore un exemple d’un sens trop vaste qu’il faudra rétrécir. — Il n’y a presque pas de mots employés par un enfant dont le sens ne doive subir cette opération. […] Pareillement, en chinois, un bipède avec des plumes s’appelle kin, un quadrupède avec du poil sheu, et les animaux en général kin-sheu… « Mais il est clair que cette addition de mots à la suite les uns des autres ne pourrait pas être prolongée à l’infini ; autrement la vie deviendrait trop courte pour achever une phrase.
Il eut beaucoup d’ennemis pendant sa vie ; il en a encore après sa mort. […] Ainsi le talent et la vertu troublèrent sa vie et en avancèrent les derniers momens.
« On m’appelle souvent un fantaisiste, me disait-il un jour, et pourtant, toute ma vie, je n’ai fait que m’appliquer à bien voir, à bien regarder la nature, à la dessiner, à la rendre, à la peindre, si je pouvais, telle que je l’ai vue. » Qu’il y ait eu des excès dans le rendu des choses réelles, je le sais et je l’ai dit quelquefois.
Un sage a souhaité qu’il fût accordé à l’homme de bien par le ciel de recommencer sa vie, comme on donne une seconde édition d’un premier ouvrage, afin de pouvoir le retoucher et le corriger, en effacer toutes les fautes.
Le brave La Noue, cet excellent homme de guerre du xvie siècle, a soutenu dans ses Paradoxes militaires « qu’il est profitable à un chef de guerre d’avoir reçu une route », c’est-à-dire d’avoir, une fois dans sa vie, essuyé une déroute ou du moins un échec qui lui est une leçon ; Joubert essuya une première défaite à Corona, et cela dut lui servir : il paraît bien, d’ailleurs, qu’il avait reconnu tout d’abord, et mieux que Masséna son chef, l’importance de ce poste de Corona, qui est la clef, le point stratégique des opérations dans cette contrée du Montebaldo : Pour ce qui me regarde, dit-il, je n’osais, après ma défaite de Corona, me présenter à Bonaparte ; mais tous les volontaires avaient parlé de ma défense.
Entre l’Iliade et l’Odyssée, si l’on y découvre à toute force deux époques bien différentes et que n’ait pu embrasser une seule et même vie de poëte, on pourrait toujours admettre le partage ; l’Iliade serait d’Homère, l’Odyssée serait du premier et du plus grand des homérides.
Celle-ci, après avoir obtenu grâce pour la vie de celui qu’elle a aimé et qu’elle n’aime plus, lui ordonne d’aller vivre dans la solitude, et quant à elle, elle épouse Cinthio.
Ce n’est que quand ils auront ainsi perdu toute vie que nous pourrons classer nos souvenirs dans le temps, comme un botaniste range dans son herbier les fleurs desséchées.
Le propre de ces cultures scolastiques est de fermer l’esprit à tout ce qui est délicat, de ne laisser d’estime que pour les difficiles enfantillages où l’on a usé sa vie, et qu’on envisage comme l’occupation naturelle des personnes faisant profession de gravité 587.
Combien d’hommes dont la vie est absorbée complètement par la poursuite de la richesse et l’ambition !
De la part des grands écrivains, et il est inutile de citer ici d’illustres exemples qui sont dans toutes les mémoires, ces sortes de confidences ont un charme extrême ; le beau style donne la vie à tout ; de la part d’un simple passant, elles n’ont, nous le répétons, de valeur que leur sincérité.
La vie sédentaire de l’homme d’étude ; la méditation, exercice le plus contraire à la nature, sont en même temps des sources de maladies particulières ; la stagnation des humeurs en amène l’altération, et le corps se corrompt tandis que l’âme s’épure ; cela est triste.
L’un l’aimait comme un père spirituel à qui il devait reconnaissance du don de la vie ; l’autre l’aimait comme un homme à qui il devait de savourer continuellement sa supériorité intellectuelle ; l’un l’aimait avec dévotion, l’autre avec égoïsme ; l’un l’aimait de tout l’amour que l’on a pour l’être d’élection, l’autre de tout l’amour que l’on peut avoir pour soi-même ; et l’un était fier de se dire que, s’il rencontrait Proudhon, il le réfuterait et le confondrait assurément ; et l’autre de se dire que, s’il rencontrait Proudhon, il l’expliquerait à lui-même avec une clarté définitive.
Les générations naissantes viendraient se former par nos conseils à la vie du monde et de l’art.
Ne faudrait-il pas créer de nouveau la puissance de ces traditions mythologiques, la pompe de ces solennités religieuses et nationales qui donnent la vie à ces admirables compositions ?
Ces romans n’étaient point, comme on eût pu le supposer, des impies plaidoyers en faveur des désordres d’une vie effrénée, mais une attaque directe et à fond contre l’inégalité matrimoniale, assez mal commode pour l’adultère.
Révolutionnaire, quoiqu’il dise pour s’en défendre, l’auteur de la Nature des Sociétés humaines a écrit « que les révolutions sont les suprêmes efforts du genre humain pour découvrir les vraies conditions de sa vie, pour les définir exactement et s’y soumettre » ; ce qui revient positivement à dire que toutes les ivrogneries de la colère doivent servir à clarifier la vue ; singulier collyre, il faut en convenir !
Cette belle place littéraire à prendre aurait pu le tenter cependant, car Gobineau est un esprit sérieux, de philosophie stoïque, et le stoïcisme est pour lui — il le dit en termes formels dans une thèse qui a de la fierté — un des plus nobles buts de la vie.