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541. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome II « Mémoires pour servir à l’histoire des gens-de-lettres ; et principalement de leurs querelles. Querelles particulières, ou querelles d’auteur à auteur. — Addisson, et Pope. » pp. 17-27

Les Anglois n’oublieront jamais son poëme sur la campagne de 1704, sa tragédie de Caton & son Spectateur.

542. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome II « Mémoires pour servir à l’histoire des gens-de-lettres ; et principalement de leurs querelles. Querelles particulières, ou querelles d’auteur à auteur. — Jean-Baptiste Rousseau et M. de Voltaire. » pp. 47-58

Il envoya sa tragédie aux comédiens, qui n’ont jamais pû la jouer, & au libraire Didot, qui n’a jamais pû la vendre.

543. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Seconde partie. Poétique du Christianisme. — Livre premier. Vue générale des épopées chrétiennes. — Chapitre V. La Henriade »

Telle est néanmoins la puissance des idées religieuses, que l’auteur de la Henriade doit au culte même qu’il a persécuté les morceaux les plus frappants de son poème épique, comme il lui doit les plus belles scènes de ses tragédies.

544. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Première partie — Section 42, de notre maniere de réciter la tragédie et la comedie » pp. 417-428

Section 42, de notre maniere de réciter la tragédie et la comedie Puisque le but de la tragedie est d’exciter la terreur et la compassion, puisque le merveilleux est de l’essence de ce poëme ; il faut donner toute la dignité possible aux personnages qui la representent.

545. (1882) Études critiques sur l’histoire de la littérature française. Deuxième série pp. 1-334

La tragédie classique avait fourni sa carrière quand Voltaire s’en empara. […] Ni ces tragédies ni ces sermons ne sont des chefs-d’œuvre, au vrai sens du mot ; ce sont au moins des œuvres beaucoup plus qu’honorables. […] Je ne sais d’ailleurs, ni n’ai besoin de savoir, si Marivaux s’est proposé comme un modèle à suivre la tragédie de Racine. […] On peut rencontrer sans peine le nom de Dieu dans un genre d’écrire tel que le mien, plein de mœurs et de sentiments, moins romanesque et presque aussi grave que la tragédie. […] Car, après Buzot, roi du Calvados, ou la Mort de Robespierre, voulez-vous des tragédies, ornées de quelques allusions, sans doute, mais enfin selon la formule ?

546. (1913) Les idées et les hommes. Première série pp. -368

Jérôme et Jean Tharaud viennent de publier La Tragédie de Ravaillac. […] Le sujet de leur « tragédie », c’est l’analyse de cette dépravation singulière. […] La Tragédie de Ravaillac mérite ce nom de « tragédie » : ce n’est pas un petit éloge ; et c’est l’indication d’un art très dégagé des influences romantiques, d’un art — à vrai dire — classique. […] Un Jean Racine compose ses tragédies ; et, par ailleurs, sa vie n’en est pas modifiée. Il a, pour ses tragédies, son esthétique ; et, pour sa vie, il a sa morale, sa religion.

547. (1896) Le IIe livre des masques. Portraits symbolistes, gloses et documents sur les écrivains d’hier et d’aujourd’hui, les masques…

Quelle douloureuse tragédie de la mort et du néant ! […] Il représente le calme des lacs abrités et des palais sans tragédies. […] Tout le long de la tragédie l’idée est portée par le rythme comme selon une danse où les coups de sabots font des pauses douloureuses. […] Le ton singulier de cette tragédie est donné par une sorte de mysticisme charnel. […] Les deux tragédies se rejoignent par cette idée que le sang de la femme, pur ou impur, haine ou amour, est une malédiction pour l’homme.

548. (1940) Quatre études pp. -154

Même une fable de La Fontaine est une « comédie », ou une « tragédie », avec ses actes faciles à découper dans leur succession progressive : on nous l’a suffisamment répété dans les classes pour que nous en soyons justement convaincus. […] Des lignes et des lignes, des pages et des pages, des cahiers et des cahiers ; des odes, des dithyrambes, des épîtres, des satires, des tragédies, des fragments d’épopée : ce ne sont que des brouillons nécessaires ; ce sont « les bêtises que M.  […] Parce qu’Homère a composé un poème épique qui s’est classé au rang des chefs-d’œuvre immortels ; parce qu’Eschyle, Sophocle et Euripide ont donné la formule de la tragédie ; parce que l’éclat de ces génies a ébloui les générations successives ; parce que les hommes sont généralement paresseux et faibles, et qu’instinctivement ils courent après le succès : pendant des siècles on recommencera à écrire poèmes épiques et tragédies, d’après les modèles qui ont réussi. […] Il accompagnait cette philosophie d’exemples pratiques, montrant combien les tragédies de Racine auraient gagné, si elles n’avaient pas été écrites en vers ; et n’écoutant plus que l’inspiration de son génie, il inventait un genre nouveau : l’ode en prose. […] Rousseau, que par les Essais de Pope, que par les tragédies de Voltaire, que par les vers agiles dont les correspondances s’ornent encore quelquefois : et ce sont les moins mauvais peut-être, puisqu’ils sont sans prétention.

549. (1854) Causeries littéraires pp. 1-353

Ils tiennent par une parenté trop évidente à la vieille tragédie. […] On dirait un chœur antique s’élevant tout à coup dans la nuit pour préparer par ses plaintes une émouvante tragédie. […] En somme, Lucrèce, début très supérieur aux Vêpres siciliennes, vraie tragédie de collège, était faite pour recommander aux gens de goût le nom de M.  […] Ponsard, et vaut à lui seul toute la tragédie de Lucrèce. […] La tragédie d’Ulysse, le poëme d’Homère, sont des œuvres très estimables, qui compteront un jour parmi les meilleurs titres littéraires de leur auteur.

550. (1874) Portraits contemporains : littérateurs, peintres, sculpteurs, artistes dramatiques

Les critiques demandent toujours au poëte autre chose que ce qu’il a fait ou voulu faire ; rien n’est plus aisé que de dire à quelqu’un : Votre tragédie ne m’a pas assez fait rire, ou votre comédie ne m’a pas assez fait pleurer. […] Voilà donc maître Honoré juché près du ciel, assis devant sa table, et s’essayant au chef-d’œuvre qui devait donner raison à l’indulgence de son père et démentir les horoscopes défavorables des amis  Chose singulière, Balzac débuta par une tragédie, par un Cromwell ! […] Il se soumit à la sentence, mais seulement pour la tragédie ; il comprit qu’il devait renoncer à marcher sur les traces de Corneille et de Racine, qu’il admirait alors sous bénéfice d’inventaire, car jamais génies ne furent plus contraires au sien. […] Ils se mouvaient dans un milieu abstrait comme celui de la tragédie. […] Les siècles ont leur perspective et leur recul ; à cette distance les grandes masses se dégagent, les lignes s’arrêtent, les détails papillotants disparaissent ; à l’aide des souvenirs classiques, des noms harmonieux de l’antiquité, le dernier rhétoricien venu fera une tragédie, un poëme, une étude historique.

551. (1887) Revue wagnérienne. Tome II « Paris, le 8 juin 1886. »

Encore ces fleurs, un peu maladives, du génie grec, les tragédies d’Euripide : « Vos dieux sont en vos âmes : ils sont les cruelles passions, détruisant l’équilibre salutaire des besoins : voyez les effets de ces maux ; tenez Hermione et Phèdre pour les images de vos passions. »   Mais à cette race exemplaire de dialecticiens ni le récit ni le drame ne pouvaient suffire longtemps : ils exigeaient une vie toute de notions pures, bellement enchaînées : ils exigeaient la forme du roman dialectique. […] Déjà l’on Sent, dans ses tragédies classiques, l’impossibilité prochaine de la forme théâtrale. […] Les tragédies du XVIIe siècle, les mélodrames des romantiques allemands et français, et toutes les pièces scéniques de notre temps ont gardé la valeur de créations artistiques pour les âmes qui ont encore le besoin de voir la vie recréée matériellement : mais à des âmes supérieures ces choses, si même elles étaient moins romanesques, et d’une analyse plus subtile, paraîtraient inartistiques, exposées par l’intermédiaire d’acteurs. […] Les tragédies de Racine furent des romans psychologiques, restituant dans l’art la vie rationnelle des passions ; aussi peu semblables à des drames que les dialogues de Platon : moins encore, car Platon créait des entretiens véritables, tandis que souvent les personnages de Racine ne parlent point, expriment seulement, sous prétexte de discours, l’enchaînement de leurs intimes motifs.

552. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Journal et mémoires du marquis d’Argenson, publiés d’après les manuscrits de la Bibliothèque du Louvre pour la Société de l’histoire de France, par M. Rathery » pp. 238-259

Elle l’avait adoptée, depuis Richelieu, pour la tragédie comme pour la politique. De nos jours, on s’en est fort écarté en tragédie : on s’y conforme plus que jamais en politique.

553. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « La comtesse d’Albany par M. Saint-René Taillandier (suite et fin.) »

Les dix années qu’elle passa avec son ami furent tout entières consacrées par elle à adoucir son amertume, à favoriser ses goûts, à y entrer autant qu’elle le pouvait, soit qu’il voulût jouer la tragédie, — ses propres tragédies, — à domicile (ce qu’il fit d’abord avec le feu et l’acharnement qu’il mettait à toute chose), soit qu’il lui plût de s’enfermer et de tirer le verrou pour travailler comme un forçat, versifier jour et nuit ou étudier le grec à mort : c’étaient les seules diversions assez fortes pour l’absorber et pour l’aider, tant bien que mal, à endurer les invasions intermittentes de la Toscane par les armées républicaines.

554. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Deuxième partie. Ce qui peut être objet d’étude scientifique dans une œuvre littéraire — Chapitre VIII. La question de gout ce qui reste en dehors de la science » pp. 84-103

Je ne dis pas, sans doute, qu’il soit toujours aisé ni même possible de décider la question de préséance entre des œuvres supérieures appartenant à des époques ou à des races diverses ; il est permis d’hésiter entre le Parthénon et une belle cathédrale gothique, entre un drame de Shakespeare et une tragédie de Sophocle, entre le Faust de Gœthe et la Divine Comédie du Dante. […] Les drames de Victor Hugo sont moins concentrés, moins élégants, moins simples, moins psychologiques que les tragédies de Racine ; ils ont, en revanche, plus de couleur, de mouvement, de vie extérieure.

555. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre XVII. Rapports d’une littérature avec les littératures étrangères et avec son propre passé » pp. 444-461

Il est bien certain que le drame libre, à la façon de Lope de Vega et de Shakespeare, a contribué à briser le moule de notre tragédie classique. […] Rotrou prit dans les tragédies de Corneille des leçons d’art dramatique et, en portant à la scène le martyre de saint Genest, il rendit hommage au grand rival qui l’avait aidé à se surpasser.

556. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Histoire du Consulat et de l’Empire, par M. Thiers. Tome IXe. » pp. 138-158

La tragédie classique, même celle de Corneille, tire moins à conséquence. […] Puis il passa à la littérature moderne, la compara à l’ancienne, se montra toujours le même en fait d’art comme en fait de politique, partisan de la règle, de la beauté ordonnée, et, à propos du drame imité de Shakespeare, qui mêle la tragédie à la comédie, le terrible au burlesque, il dit à Goethe : “Je suis étonné qu’un grand esprit comme vous n’aime pas les genres tranchés.”

557. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Adrienne Le Couvreur. » pp. 199-220

Mais la tragédie s’achevait à peine, que les gens de police entrèrent et firent défense de passer outre. […] Molière veut que, même dans la tragédie, on parle naturellement, humainement ; la difficulté est de concilier avec la parfaite dignité et la noblesse ce naturel qui ne peut être ici qu’un naturel très travaillé et très savant.

558. (1898) Inutilité de la calomnie (La Plume) pp. 625-627

Rien de plus froissant que l’admiration en laquelle nous tiennent des gens du commun, car quand ceux-ci forment l’entreprise de composer des tragédies, de pathétiques romans ou des églogues naïves, leur vulgarité dépasse tout.

559. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Seconde partie — Section 3, que l’impulsion du génie détermine à être peintre ou poëte, ceux qui l’ont apporté en naissant » pp. 25-34

Racine portoit encore l’habit de la plus sérieuse des professions, quand il composa ses trois premieres tragédies.

560. (1900) Taine et Renan. Pages perdues recueillies et commentées par Victor Giraud « Renan — III »

On veut y voir, pour l’ordinaire, un drame de la conscience, une de ces tragédies intérieures qui mirent, certain soir, le pauvre Jouffroy dans un état si propre à la composition littéraire.

561. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Les nièces de Mazarin et son dernier petit-neveu le duc de Nivernais. Les Nièces de Mazarin, études de mœurs et de caractères au xviie  siècle, par Amédée Renée, 2e éd. revue et augmentée de documents inédits. Paris, Firmin Didot, 1856. » pp. 376-411

Racine faisait des tragédies, Pradon en faisait aussi. […] Racine fut bien au-dessus de Pradon, il ne laissait pas de le regarder comme une espèce de concurrent, surtout quand il sut que Pradon composait en même temps que lui la tragédie de Phèdre par émulation, et qu’il avait doublé celle de M.  […] On ne parla d’autre chose pendant tout le souper : chacun dit son sentiment sur la tragédie, et on se trouva plus disposé à la critique qu’à la louange.

562. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre quatrième. La propagation de la doctrine. — Chapitre II. Le public en France. »

La tragédie du temps n’en diffère presque pas, sauf en ceci qu’elle a toujours l’air solennel et ne se joue qu’au théâtre ; l’autre prend toutes les physionomies et se trouve partout, puisque la conversation est partout. […] À la fin les économistes d’un côté et les parlementaires de l’autre donnent le signal. — « Vers 1750, dit Voltaire524, la nation rassasiée de vers, de tragédies, de comédies, de romans, d’opéras, d’histoires romanesques, de réflexions morales plus romanesques encore, et de disputes sur la grâce et les convulsions, se mit à raisonner sur les blés. » D’où vient la cherté du pain ? […] , I, 151. « J’entendis toute la cour, dans la salle de spectacle du château de Versailles, applaudir avec enthousiasme Brutus, tragédie de Voltaire, et particulièrement ces deux vers : Je suis fils de Brutus et je porte en mon cœur La liberté gravée et les rois en horreur. » 540.

563. (1868) Cours familier de littérature. XXVI « CLVIe Entretien. Marie Stuart (reine d’Écosse) »

» Cette tragédie fut comme le prélude de toutes celles qui devaient bientôt après consterner et ensanglanter ce palais des voluptés et des crimes. […] Il y eut, en effet, dans tous les actes de la reine qui précédèrent cette tragédie, non-seulement les indices d’une complicité atroce dans le plan d’assassiner son mari, mais quelque chose de plus atroce que l’atrocité même, c’est-à-dire l’artifice hypocrite d’une femme qui cache le meurtre sous l’apparence de l’amour et qui se prête au vil rôle d’embaucher la victime pour l’attirer sous le fer de son assassin. Sans prêter aux termes de la correspondance, vraie ou apocryphe, de Marie Stuart avec Bothwell plus d’autorité historique que cette correspondance contestée n’en mérite, il est évident qu’une correspondance à peu près de cette nature a existé entre la reine et son séducteur, et que si elle n’a pas écrit ce que contiennent ces lettres non autographes, par conséquent suspectes, elle a agi dans tous les préliminaires de cette tragédie de manière à ne laisser aucun doute sur sa participation au piége où elle s’était chargée de ramener l’infortuné et amoureux Darnley.

564. (1895) Histoire de la littérature française « Quatrième partie. Le dix-septième siècle — Livre I. La préparations des chefs-d’œuvre — Chapitre II. Attardés et égarés »

Si l’on excepte la tragédie, qui sera la première prête et la première féconde, il faudra laisser écouler la moitié du siècle pour atteindre un chef-d’œuvre authentique ; et ce sera la prose qui le fournira, dans une œuvre de circonstance, dans les Provinciales de Pascal. […] Entre deux guerres civiles, il enchante la cour de Charles IX, et fait une tragédie lyrique de Circé pour le divertissement du roi. […] De sa tragédie de Pyrame et Thisbé (probablement 1625) date le règne du goût précieux dans la poésie.

565. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre VII. La littérature et les conditions économiques » pp. 157-190

Boileau, sur le point de mourir, entend lire une tragédie de Crébillon père et il s’écrie épouvanté : « Les Pradon étaient des soleils auprès de ces gens-là. » Voltaire écrira plus tard, frappé de cette stérilité soudaine : « La nature fatiguée après avoir produit tant de beaux génies sembla vouloir se reposer. » Et ce ne sont pas seulement les œuvres qui sont moins nombreuses, les grands hommes qui sont plus petits ; il y a aussi un changement profond dans l’esprit qui anime les auteurs. […] Et enfin, dans le domaine littéraire, les règles, les sacro-saintes règles d’Aristote et de Boileau ne sont pas épargnées davantage : on réclame des tragédies en prose, on bafoue les anciens. […] Il en est où la vie littéraire a été plus difficile : qu’on se rappelle-le pauvre Hardy, fournisseur attitré du théâtre du Marais, grand fabricant de tragédies, comédies, pastorales et autres pièces innombrables, s’écriant lamentablement : « Les fers de la pauvreté empêchent l’esprit de volet dans les cieux ! 

566. (1900) Le rire. Essai sur la signification du comique « Chapitre I. Du comique en général »

Un personnage de tragédie ne changera rien à sa conduite parce qu’il saura comment nous la jugeons ; il y pourra persévérer, même avec la pleine conscience de ce qu’il est, même avec le sentiment très net de l’horreur qu’il nous inspire. […] C’est pourquoi les héros de tragédie ne boivent pas, ne mangent pas, ne se chauffent pas. […] Napoléon, qui était psychologue à ses heures, avait remarqué qu’on passe de la tragédie à la comédie par le seul fait de s’asseoir.

567. (1898) Essai sur Goethe

D’abord intermède du service divin, puis solennellement politique, la tragédie montra au peuple de grandes actions isolées de ses ancêtres, avec la pure simplicité de la perfection ; elle éveilla de grands et complets sentiments dans les âmes, car elle était elle-même grande et complète. […] C’est pourquoi toutes les tragédies françaises sont aussi des parodies d’elles-mêmes. […] Pas une allusion ne rappelle les tragédies dont la cour de Ferrare était d’habitude le théâtre. […] Et maintenant, voici que Goethe interrompt son Faust, abandonne le projet longuement caressé d’une épopée homérique (L’Achilléide), pour se dévouer à l’adaptation de deux tragédies de Voltaire, Mahomet et Tancrède, destinées aux représentations du théâtre de la cour. […] Aussi y eut-il des protestations violentes : « Comment peut-on faire une tragédie avec de telles créatures !

568. (1856) À travers la critique. Figaro pp. 4-2

Le feuilleton de la semaine est presque aussi mortellement ennuyeux que la tragédie Dantesque de feu Charles Marenco. Et quand je pense que Méry conseille fortement à la grande tragédienne, qui a fait le succès de cette pauvreté, de se garder comme de la peste de toucher aux tragédies de Corneille et de Racine, afin d’obliger les Parisiens à apprendre l’italien l’année prochaine ! […] D’où il faut conclure que la tragédie de Mirrha a le don d’égayer très fort le spirituel académicien. […] Arthur Ponroy croit à l’avenir de la tragédie et de mademoiselle Georges ! […] Ponroy a en Portefeuille pas mal de tragédies dont le placement est devenu difficile.

569. (1891) Essais sur l’histoire de la littérature française pp. -384

Qu’on porte cette méthode dans l’étude de notre littérature, on ne déplacera pas les rangs sur le Parnasse français : les drames de Diderot n’en deviendront pas meilleurs ni les tragédies de Racine plus mauvaises. […] Quoique les héros de notre tragédie ne s’épargnent pas les belles tirades, les héros de la scène espagnole, de la scène allemande et même de la scène anglaise débitent encore les discours plus longs et plus soigneusement composés. […] Massillon se place tout naturellement au-dessous de Bossuet ; Florian au-dessous de La Fontaine ; Voltaire, auteur de tragédies, au-dessous de Corneille. […] Il conçoit la littérature contemporaine comme une tragédie en cinq actes, mêlée de parades et de chants patriotiques, avec Février pour dénouement. […] Poitou se figure une madame Sand plus immuable que les héros de la tragédie antique, et il n’est pas besoin de dire que c’est la madame Sand des premières fougues.

570. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Étienne de La Boétie. L’ami de Montaigne. » pp. 140-161

Comme c’est du véritable La Boétie, déjà homme fait, que je veux m’occuper ici, j’ai hâte de me débarrasser de ce premier traité soi-disant politique, qui est comme sa tragédie de collège, La Servitude volontaire ou Le Contr’un, œuvre déclamatoire, toute grecque et romaine, contre les tyrans, et qui provoque à l’aveugle le poignard des Brutus. […] En 1835 et 1836, on l’a réimprimé à part avec des préfaces à notre usage, comme on eût réimprimé une tragédie révolutionnaire de Charles IX, de Tiberius Gracchus, ou de Brutus41.

571. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Marivaux. — I. » pp. 342-363

Il croit sincèrement que la première tragédie de La Motte a pu passer pour une dernière tragédie posthume de Racine.

572. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « La marquise de Créqui — II » pp. 454-475

Quand il arrive, dans cette revue qu’il fait en idée de sa bibliothèque, aux auteurs dramatiques et aux tragédies, le président exprime des idées littéraires très libres, très dégagées, et qui, bien que justes au fond, ne sont pas vérifiées encoreao. Il prédit, il dessine à l’avance un futur rival romantique de Racine et de Corneille ; nous aussi nous le croyons possible, mais nous l’attendons toujours : Les tragédies de Corneille, de Racine, de Voltaire (en nommant Voltaire à côté des précédents, il paie tribut au siècle) semblent devoir durer éternellement ; mais si un homme de génie donnait plus de mouvement à ses drames, s’il agrandissait la scène, mettait en action la plupart des choses qui ne sont qu’en récit, s’il cessait de s’assujettir à l’unité de lieu, ce qui ne serait pas aussi choquant que cela paraît devoir l’être, ces hommes auraient un jour dans cet auteur un rival dangereux pour leur gloire.

573. (1872) Nouveaux lundis. Tome XIII « Œuvres françaises de Joachim Du Bellay. [I] »

Un poète dramatique normand, auteur d’une tragédie de Marie Stuart, et de plus économiste, Antoine de Montchrétien, a été étudié avec soin sous ces divers aspects par M.  […] Dans une étude du Développement de la Tragédie en France (1862), M. 

574. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Lamartine — Lamartine »

Racine, dans quelques portions de son œuvre, dans les chœurs de ses tragédies bibliques, dans le trop petit nombre de ses hymnes imités de saint Paul et d’ailleurs, avait laissé échapper d’adorables accents, empreints de signes profonds sous leur mélodieuse faiblesse. […] Aux soi-disant poëtes de son époque qui dépensaient leurs rimes sur des descriptions, des tragédies ou des épopées, toutes de convention et d’artifice, Saint-Martin fait honte de ce matérialisme de l’art : Mais voyez à quel point va votre inconséquence !

575. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Victor Hugo — Victor Hugo en 1831 »

En 1816, après la seconde Restauration, Victor composa, dans ses moments de loisir, une tragédie classique de circonstance sur le retour de Louis XVIII, avec des noms égyptiens : elle avait pour titre Irtamène. En 1817, il en commença une autre intitulée Athélie ou les Scandinaves, mais il n’alla qu’à la fin du troisième acte et s’en dégoûta à mesure qu’il avançait : son goût se fit plus vite que sa tragédie.

576. (1862) Portraits littéraires. Tome II (nouv. éd.) « Le comte de Ségur »

M. de Ségur, au retour de sa campagne d’Amérique, rapportait en portefeuille une tragédie en cinq actes de Coriolan, qu’il avait composée dans la traversée à bord du Northumberland et qui fut jouée ensuite par ordre de Catherine sur le théâtre de l’Ermitage. […] Il s’empressa de venir à Paris, armé de sa tragédie de Coriolan, d’une douzaine de fables et de cinq à six chansons.

577. (1895) Histoire de la littérature française « Cinquième partie. Le dix-huitième siècle — Livre IV. Les tempéraments et les idées (suite) — Chapitre IV. Le patriarche de Ferney »

Il fait des tragédies — fort mauvaises — mais qui mettent sous les yeux les conséquences du fanatisme. […] Il fit une tragédie, les Lois de Minos (1773), sur la suppression des Parlements.

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