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930. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XIII » pp. 109-125

Le mouvement était donné à l’esprit social ; la conversation était devenue le besoin général ; il fallait à tout prix le satisfaire ; ce besoin remontait à des causes plus anciennes et plus puissantes que l’hôtel de Rambouillet, qui, lui-même, leur dut son origine et ses progrès, et il ne fit qu’en favoriser le développement et l’éclat.

931. (1904) Prostitués. Études critiques sur les gens de lettres d’aujourd’hui « Chapitre II. Filles à soldats »

Même le commerce s’est élargi, on a pris un associé fraternel et la maison, dont le chiffre d’affaires va augmentant, est avantageusement connue sur la place de Paris sous la raison sociale Paul et Victor Margueritte.

932. (1872) Les problèmes du XIXe siècle. La politique, la littérature, la science, la philosophie, la religion « Livre V : La religion — Chapitre III : Le problème religieux »

Si pourtant le sentiment religieux, comme la philosophie spiritualiste l’enseigne, n’est pas une chimère ou une illusion, si Dieu n’est pas une pure fiction de l’imagination, si l’âme humaine va naturellement et nécessairement vers l’infini ; si d’un autre côté le sentiment religieux, comme tous les autres sentiments, ne se nourrit que d’actes, si les actes religieux sont nécessairement des actes sociaux, il faut une religion, même aux philosophes.

933. (1906) Les œuvres et les hommes. À côté de la grande histoire. XXI. « Tallemant des Réaux »

C’est un de ces hommes qui ont commis des crimes en histoire avec les mains de la vertu, mais, du moins, c’est une âme dans sa haine, c’est une tierté dans son orgueil, c’est une intelligence respectueuse pour toutes les grandes croyances sociales, et, au milieu de tout cela, c’est un artiste de génie qui ne se regarde pas faire et qui fait des merveilles, sans se douter de l’éclat qu’elles jettent et de leur incomparable beauté !

934. (1906) Les œuvres et les hommes. À côté de la grande histoire. XXI. « Louis XVI et sa cour »

Ils ont la conscience de l’histoire et sa gravité, le soin vigilant des faits et du détail, et cette raison moderne et libérale, cet esprit du temps qui voit peut-être avec trop de confiance et de sérénité les problèmes sociaux auxquels est suspendu l’avenir.

935. (1906) Les œuvres et les hommes. Femmes et moralistes. XXII. « Les Femmes de la Révolution » pp. 73-87

Elle avait bien des défauts et nous les reconnaissons… Pédante si l’on veut, quelquefois sans grâce et précieuse, esprit faux en philosophie, bas-bleu à ravir l’Angleterre de l’éclat enragé de son indigo, madame de Staël, par la distinction de sa pensée, par la subtilité de son observation sociale, par son style brillant d’aperçus, par ses goûts, ses préoccupations, ses passions même, tendait vers la plus haute aristocratie, vers la civilisation la plus raffinée.

936. (1888) Les œuvres et les hommes. Les Historiens. X. « M. Charles d’Héricault » pp. 291-304

En action historique, les idées générales, les influences sociales ont besoin d’un homme… Quoique la France fût éperdue d’égalité, à cette heure maudite, et qu’elle eût commencé déjà le nivellement par l’échafaud, elle n’en reconnut pas moins la supériorité et la souveraineté de l’homme qui, à un jour donné, avait créé cette chose inouïe, universelle et compacte, qui s’étendit tout à coup sur la France entière comme une voûte qui ne permettait plus de respirer, et qu’on appela du même nom que le sentiment dont elle transissait les âmes : la Terreur !

937. (1888) Les œuvres et les hommes. Les Historiens. X. « Xavier Eyma » pp. 351-366

Ce n’est pas, celle-là, une aristocratie de source et de vocation divine, mais le contresens de l’aristocratie méritante et dévouée : une négation de l’ordre social.

938. (1895) Les œuvres et les hommes. Journalistes et polémistes, chroniqueurs et pamphlétaires. XV « Armand Carrel » pp. 15-29

Révolté de position sociale, révolté déjà à l’École où l’on savait le mieux obéir, révolté militaire plus tard, enfin révolté politique, il fut un révolté toujours.

939. (1895) Les œuvres et les hommes. Journalistes et polémistes, chroniqueurs et pamphlétaires. XV « Eugène Pelletan » pp. 203-217

Ôtez le pittoresque de l’expression dans cette page terrible des Soirées de Saint-Pétersbourg, écrite ainsi pour faire mieux sentir la vérité de sa thèse, de Maistre, en parlant du bourreau, n’a posé que la nécessité de la peine de mort pour la conservation de tout ordre social, ce qu’on peut soutenir, n’est-il pas vrai ?

940. (1887) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (deuxième série). IX « M. Jules Soury. Jésus et les Évangiles » pp. 251-264

Ce n’est pas, dans ce temps de législation athée et désarmée, de la punition sociale qu’il mériterait bien !

941. (1899) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (troisième série). XVII « Ernest Hello »

Il n’est ni fantastique comme Hoffmann, ni diaboliquement mystérieux comme Edgar Poe, — quoiqu’il ait aussi la préoccupation de cette chose terrible, le mystère, — ni universellement humain et social comme Balzac, ce puissant des puissants, qui eut aussi son jour de mysticisme, et quel jour !

942. (1889) Les œuvres et les hommes. Les poètes (deuxième série). XI « M. Théodore de Banville »

Il a l’emphase gaie, et sa gaieté n’est pas celle non plus de son oncle, Alfred de Musset ; ce n’est pas la gaieté de l’auteur d’Un spectacle dans un fauteuil, qui vient d’une observation sociale très raffinée.

943. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « M. Jules Sandeau » pp. 77-90

Ce n’est pas, assurément, la première fois qu’un romancier a peint l’orgueil nobiliaire, ce magnifique sentiment social, périssant invaincu sous sa couronne fermée, dans l’inflexible pureté de son blason, et qu’on a essayé de nous montrer, comme M. 

944. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « M. Malot et M. Erckmann-Chatrian » pp. 253-266

Hector Malot tout ce qui appartient à notre époque et ce qui passera avec elle, toutes les choses qui sont le domaine commun pour qui plante sa plume dans un sujet moderne, et les lectures contemporaines et la langue générale des romans actuels, que resterait-il à ce communiste littéraire qui vit sur l’apport social bien plus que sur son propre talent ?

945. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « M. Ch. Bataille et M. E. Rasetti » pp. 281-294

Dans un roman d’observation humaine et sociale, vous ne pouvez pas faire abstraction de tout ce qui n’est pas l’objet même que vous devez peindre.

946. (1901) Figures et caractères

Rancune certes contre l’Église, rancune historique et sociale. […] Il pratiqua la noble habitude de la méditation et, poète, il médita sur la vie sociale du poète, de même que, soldat, il avait médité sur la vie sociale du soldat. […] La hiérarchie sociale de son temps conserve les préjugés de caste, de naissance et de métier, et il se joue à l’aise au milieu d’eux. […] Un motif sentimental semble s’être ajouté à ces raisons sociales. […] Ils y voient une des plus belles et des plus complètes expressions sociales des temps modernes.

947. (1914) Une année de critique

Voyez : selon que l’on ajoute ou que l’on retranche la dernière incidente, vous avez devant vous l’Anatole France qui paraît croire à la vertu d’un bouleversement social, ou celui qui sait la vanité de tous nos efforts de pygmées. […] Dans la Fête arabe, si j’ai bien pénétré le dessein des auteurs, c’est beaucoup moins un fait psychologique qu’un fait politique et social que l’on se propose de nous rapporter. […] Lucien Corpechot nous fait assister aux progrès de leur art, qui avait besoin, pour atteindre son plein épanouissement, de la volonté des hommes et de l’agrément du sort, des circonstances sociales et de l’intervention du génie : la France eut Louis XIV, et. […] Marcel Boulenger est dans le vrai : mieux vaut cent fois ne point mêler les genres, mais, comme c’était la coutume au dix-huitième siècle, traiter à part les affaires de convenances sociales, et les affaires de l’amour. […] Que ne dénonce-t-il des ridicules ou des maux auxquels il n’est pas impossible de porter remède, parce qu’ils ne tiennent pas à l’humaine nature, mais à l’organisation sociale ?

948. (1894) La bataille littéraire. Sixième série (1891-1892) pp. 1-368

Maurice Barrès était, sans s’en douter peut-être, parti pour nous donner la formule d’un second Contrat social, un Contrat social d’autant plus attrayant qu’il eût été, celui-là, fait de sentiment ; mais le sentiment est un terrain très mobile, très glissant et qui conduit non pas où l’on veut aller, mais où sa pente nous entraîne. Cette fois il nous a menés à deux pôles imprévus, du rêve de nouvelles conventions sociales à l’amélioration des amphithéâtres où l’on égorge les chiens. […] Édouard Drumont, que, considérant la question antisémitique épuisée, il se retire définitivement de la lutte pour s’occuper uniquement de la solution du problème social. […] « Le présent volume, écrit-il, clôt momentanément la série de mes livres, consacrée à l’étude psychologique et sociale de l’époque actuelle. […] Quel tour prendront les questions sociales ?

949. (1926) La poésie de Stéphane Mallarmé. Étude littéraire

La distinction entre la durée sociale et spatiale, la durée psychique et vivante est passée dans le courant de nos idées. […] La durée sociale n’est pas partout et en tout temps identique à elle-même, elle est en fonction d’états religieux, intellectuels, d’inventions comme l’écriture, l’imprimerie, les chronographies. […] Il est une seconde forme de la durée, non plus vécue intérieurement, mais extérieure et sociale, qui préoccupe tout écrivain et au sujet de laquelle il importe de savoir ce qu’il a pensé et senti. […] Au cœur du romantisme il y avait la conscience âpre et passionnée de cette question sociale : Quelle est la place, quelle est la fonction du poète ? […] Malherbe biffa cet orgueil en se plaçant carrément au rang social d’un bon joueur de quilles, en tenant boutique de louanges garanties éternelles.

950. (1912) Chateaubriand pp. 1-344

Je suis si convaincu de cette vérité sociale, que je ne passe guère dans les rues sans baisser la tête. » Troisième règle : « Fierté intraitable. […] Il inclinait vers une espèce de christianisme social. […] Cette sensibilité régnait partout dans Atala, René, les Natchez, et aussi la croyance à l’utilité sociale du christianisme. […] L’affirmation du dogme par persuasion de sa nécessité sociale, avec un sincère attendrissement, et avec un ardent désir que le dogme soit vrai ? […] C’est beaucoup… Il donna la formule d’une sorte de foi sentimentale, esthétique et sociale, oh !

951. (1911) Nos directions

C’est en vain qu’on altérera sa figure, que l’on exigera de lui un rôle national, social et humain. […] Il conçut une humanité sociable, sociale, formée et menée par le milieu. […] Le monde lui apparaîtrait non plus comme une combinaison de chinoiseries sociales, mais comme le champ de bataille des antagonismes moraux. […] Drame social ? […] Molière entreprend d’améliorer l’homme social.

952. (1896) Psychologie de l’attention (3e éd.)

Il fallait descendre jusqu’à ces formes rudimentaires pour saisir la raison de sa puissance — elle est une condition de la vie  et elle conservera le même caractère dans les formes supérieures où, cessant d’être un facteur d’adaptation au milieu physique, elle deviendra, comme nous le verrons, un facteur d’adaptation au milieu social. […] Le même progrès qui, dans l’ordre moral, a fait passer l’individu du règne des instincts à celui de l’intérét ou du devoir ; dans l’ordre social, de la sauvagerie primitive à l’état  d’organisation ; dans l’ordre politique, de l’individualisme presque absolu à la constitution d’un gouvernement  le même progrès, dans l’ordre intellectuel, a fait passer du règne de l’attention spontanée au règne de l’attention volontaire. […] La grande majorité des gens civilisés s’est adaptée d’une manière suffisante aux exigences de la vie sociale ; ils sont capables à quelque degré d’attention volontaire. […] Nous croyons avoir établi qu’elle est une adaptation aux conditions d’une vie sociale supérieure, qu’elle est une discipline et une habitude, une imitation de l’attention naturelle, qui lui sert à la fois de point de départ et de point d’appui. […] Sans rechercher si les grands efforts faits dans ce sens depuis plus d’un demi-siècle ont une valeur sociale et si cette somme de travail n’aurait pas pu être dépensée plus utilement, nous voyons que les divers systèmes d’éducation essayent tous de constituer quelques états prédominants et régulateurs, c’est-à-dire une sorte d’attention.

953. (1813) Réflexions sur le suicide

L’opinion exerce sur la plupart des individus une action poignante dont il est très difficile de diminuer la force : ce mot : — je suis déshonoré — trouble entièrement l’esprit de l’homme social, et l’on ne peut s’empêcher de plaindre celui qui succombe sous le poids de ce malheur, car probablement il ne l’avait pas mérité, puisqu’il le ressent avec tant d’amertume. […] L’homme social met trop d’importance au tissu de circonstances dont se compose son histoire personnelle. […] On trouve de très belles choses en fait de morale sociale et dans les prophètes hébreux et dans les philosophes païens : mais c’est pour prêcher la charité, la patience et la foi que J.

954. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Lamartine — Lamartine, Jocelyn (1836) »

Les barrières du champ clos n’existant plus, ces talents ont pu, sans infidélité, aller à leur tour dans tous les champs de l’avenir, qui déjà, de bien des côtés, s’ensemençaient sans eux ; ils ont pu arriver à temps, et là, en perspectives sociales, en espérances, en images sublimes, prélever, par droit de génie, toutes les dîmes glorieuses, qu’ils ajoutent chaque jour à leurs vieilles moissons. […] En politique, en pensées sociales, comme il dit, en religion, en poésie même à proprement parler, il a vu évidemment avec ardeur son horizon s’agrandir, et son œil a joué plus à l’aise, tout cadre factice étant tombé.

955. (1860) Cours familier de littérature. X « LXe entretien. Suite de la littérature diplomatique » pp. 401-463

Voici ce que je me répondis, en croyant véritablement entendre la voix creuse et impassible, la voix lapidaire de l’oracle des cabinets : X « Il y a deux partis à prendre, quand on est maître absolu de ses décisions, le lendemain d’un événement qui a fait table rase en Europe, quand on est la France de 1848 et qu’on s’appelle république : on peut se placer en idée sur le terrain des ambitions napoléoniennes, des ressentiments de Waterloo, des vengeances militaires, des humiliations populaires, des propagandes insurrectionnelles, des appels des peuples contre tous les trônes ; on peut faire appel à toutes les turbulences soldatesques ou populaires ; jeter au vent tous les traités, toutes les cartes géographiques qui limitent les nations ; lever, au chant d’une Marseillaise agressive, un million de soldats lassés de la charrue ou de l’atelier ; les lancer, comme des proclamations vivantes, par toutes les routes de la France, sur toutes les routes de l’Italie, de l’Espagne, de l’Allemagne, de la Belgique, de la Hollande, et promener ces quatorze armées révolutionnaires avec le drapeau de l’insurrection universelle des peuples contre les rois, la grande Jacquerie moderne, le rêve de tous les démagogues et de tous les forcenés de gloire, contre toutes les bases sociales, contre tous les pouvoirs et contre toutes les paix du continent. […] Nous ne connaissons rien de plus beau dans l’organisation sociale qu’une armée donnant son sang pour la patrie.

956. (1861) Cours familier de littérature. XII « LXXIe entretien. Critique de l’Histoire des Girondins (2e partie) » pp. 305-367

Ne serait-il pas possible de retrouver ce sens vrai de la Révolution française en remontant à son origine et à ses premiers organes, d’en dégager la juste signification des passions et des crimes à travers lesquels elle a perdu son caractère et son but, et de rappeler ainsi la France de 1840 à la philosophie sociale et politique dont elle fut l’apôtre et la victime pour devenir, quoi ? […] C’est ainsi que, voulant restituer à Robespierre son vrai caractère historique de fanatisme systématique et convaincu, d’aberration politique et sociale au commencement et de férocité désespérée à la fin, je recherchai avec soin pendant tout un hiver, à Paris, les moindres fils encore subsistants qui pouvaient se rattacher à cette figure, et dire non la vérité convenue, mais la vérité vraie et occulte sur ce tribun, précipité de sa dictature le 9 thermidor, journée dont Bonaparte, qui avait connu et fréquenté ce tyran du comité de salut public, disait à Sainte-Hélène que : « c’était un procès jugé, mais non instruit ».

957. (1889) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Quatrième série «  M. Taine.  »

Il a trois atlas principaux en lui, à demeure, chacun d’eux composé « d’une vingtaine de gros livrets » distincts et perpétuellement tenus à jour : un atlas militaire, recueil énorme de cartes topographiques aussi minutieuses que celles d’un état-major ; un atlas civil, qui comprend tout le détail de toutes les administrations et les innombrables articles de la recette et de la dépense ordinaire et extraordinaire ; enfin, un gigantesque dictionnaire biographique et moral, où chaque individu notable, chaque groupe local, chaque classe professionnelle ou sociale, et même chaque peuple a sa fiche. […] La force, qui chez lui coordonne, dirige et maîtrise des passions si vives, c’est un instinct d’une profondeur et d’une âpreté extraordinaires, l’instinct de se faire centre et de rapporter tout à soi, un égoïsme prodigieusement actif et envahissant, développé par les leçons que lui donnent la vie sociale en Corse, puis l’anarchie française pendant la Révolution.

958. (1914) Enquête : Les prix littéraires (Les Marges)

Cependant, le corps social a besoin d’une magistrature et il est nécessaire qu’on rende la justice, tant bien que mal. […] On travaille aujourd’hui non pour produire une œuvre selon son cœur, mais pour entrer dans tel ou tel mouvement, plaire à tel ou tel maître et, par-dessus le marché, la bonté des chers maîtres s’en mêle, cette sorte de trémolo social qu’on emploie pour accompagner le geste élégant de protection qu’il convient d’étendre sur la tête du candidat.

959. (1889) Histoire de la littérature française. Tome IV (16e éd.) « Conclusion »

Il aime les petits, non pour en faire les grands dans un état social imaginaire, mais pour les avoir vus de près, dévoués et contents, remplissant, à la place où Dieu les a mis, le beau rôle qui leur a été donné de soutiens, de défenseurs, de nourriciers des sociétés humaines. […] Des aventures touchantes, les mœurs de la vie des champs, des paysages frais dans quelque coin de notre belle France, des villageois auxquels l’écrivain prête sa langue élégante, non comme Fontenelle a prêté la sienne à ses bergers, pour leur faire parler le beau langage de la ville, mais pour les aider à mieux rendre leurs sentiments ; le style des Confessions, avec plus d’aisance et de grâce ; le pinceau de Bernardin de Saint-Pierre retrouvé, ont rendu certaines pastorales aussi populaires que Paul et Virginie ; et de même que Paul et Virginie a plus fait pour la gloire de Bernardin de Saint-Pierre que ses Études et ses Harmonies, ainsi ces pastorales seront plus comptées à leur illustre auteur que les plus ingénieuses de ses utopies sociales.

960. (1902) Le culte des idoles pp. 9-94

Notre art de penser, notre manière de sentir, de goûter la vie, d’imaginer l’amour, voilà nos trésors les plus chers. » C’est la singularité d’Hugues Rebell, que ce contempteur de la morale religieuse et sociale fut un moraliste à rebours, réclamant la liberté des instincts et rêvant d’hommes capables de produire des œuvres viriles. Aristocrate de nature et d’éducation, il devenait anarchiste au milieu de la démocratie égalitaire et voulait détruire l’édifice social pour le reconstruire selon ses plans ; adversaire des utopies, il en avait une à proposer, l’union des trois aristocraties qu’eut réalisée le Tyran beau et fort qu’il appelait dans ses Chants de la Pluie et du Soleil.

961. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre XIV. La littérature et la science » pp. 336-362

Dans les sciences dites sociales et qui jusqu’ici sont si peu sciences, l’utopie, qui esquisse la figure de l’avenir, a eu et aura toujours sa fonction nécessaire à côté des enquêtes sur le présent et le passé. […] Il a été scientifique en appliquant le déterminisme au tracé des caractères, en rattachant les pensées, les sentiments et les actes des personnages à leurs antécédents, en remontant pour les expliquer aux trois milieux qui façonnent l’individu : milieu physique, milieu social, milieu psycho-physiologique.

962. (1888) Préfaces et manifestes littéraires « Romans et nouvelles » pp. 3-80

Aujourd’hui que le Roman s’élargit et grandit, qu’il commence à être la forme sérieuse, passionnée, vivante, de l’étude littéraire et de l’enquête sociale, qu’il devient, par l’analyse et par la recherche psychologique, l’Histoire morale contemporaine ; aujourd’hui que le Roman s’est imposé les études et les devoirs de la science, il peut en revendiquer les libertés et les franchises. […] Préface de la première édition (1877)8 Mon frère et moi, il y a treize ans, nous écrivions en tête de Germinie Lacerteux : Aujourd’hui que le roman s’élargit et grandit, qu’il commence à être la grande forme sérieuse, passionnée, vivante de l’étude littéraire et de l’enquête sociale, qu’il devient par l’analyse et la recherche psychologique l’Histoire morale contemporaine ; aujourd’hui que le roman s’est imposé les études et les devoirs de la science, il peut en revendiquer les libertés et les franchises.

963. (1899) Esthétique de la langue française « Esthétique de la langue française — La déformation  »

En l’absence d’une autorité sociale et littéraire à la fois, les langues se modifient si rapidement que le vieillard ne comprend plus ses petits-enfants . […] Elles sont venues de l’anglais  : après avoir souillé notre vocabulaire usuel, il va, si l’on n’y prend garde, influencer la syntaxe, qui est comme l’épine dorsale du langage ; du grec, manipulé si sottement par les pédants de la science, de la grammaire et de l’industrie ; du grossier latin des codes que les avocats amenèrent avec eux dans la politique, dans le journalisme, et dans tout ce que l’on qualifie science sociale.

964. (1870) La science et la conscience « Chapitre II : La psychologie expérimentale »

C’est ainsi que l’historien qui n’éclaire pas son sujet des lumières de la conscience arrive inévitablement à faire de toutes les institutions politiques, sociales et religieuses qui ont duré et dominé, autant de principes éternels de la nature humaine. […] Selon Bain, les sentiments moraux sont d’un caractère très-complexe ; ils résultent en grande partie de la combinaison des affections sociales et des émotions sympathiques ou antipathiques.

965. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Correspondance de Voltaire avec la duchesse de Saxe-Golha et autres lettres de lui inédites, publiées par MM. Évariste, Bavoux et Alphonse François. Œuvres et correspondance inédites de J-J. Rousseau, publiées par M. G. Streckeisen-Moultou. — I » pp. 219-230

Rousseau, interrogé par son amie, commence par rechercher de quelle vertu et de quel bonheur il peut être question pour l’homme social ou civil.

966. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Lamennais — Lamennais, Paroles d'un croyant »

Nous regretterions que les Paroles d’un Croyant n’y fussent pas acceptées ou tolérées, comme une de ces paroles libres de prêtre, qui ont toujours eu le droit de s’élever en sens contradictoire dans les crises sociales et politiques aux diverses époques.

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