Ces raisons, qu’il indique d’une manière aimable et bien naturelle, je les résume plus au net : dix ans se sont écoulés ; dans l’intervalle, Du Bellay a vieilli ; il a passé à Rome des années qui ont compté double ; les ennuis, les affaires, peut-être les plaisirs, l’ont blanchi ; il allègue pour excuse la diminution de la verve, « de cet enthousiasme qui le faisoit librement courir par la carrière de ses inventions », et en même temps il a conservé, dit-il, son goût de la poésie, « de ce doux labeur, jadis seul enchantement de ses ennuis ».
qu’un peu de ces chants, un peu de ces couronnes, « Avant les pâles jours, avant les lents automnes, « M’eût été dû plutôt à l’âge efflorescent, « Où jeune, inconnu, seul avec mon vœu puissant, « Dans ce même Paris cherchant en vain ma place, « Je n’y trouvais qu’écueils, fronts légers ou de glace, « Et qu’en diversion à mes vastes désirs, « Empruntant du hasard l’or qu’on jette aux plaisirs, « Je m’agitais au port, navigateur sans monde, « Mais aimant, espérant, âme ouverte et féconde !
La plus douce occupation du guerrier philosophe, au milieu de cette inaction prolongée qui le dévorait, était de s’entretenir avec le jeune Victor, de le prendre sur ses genoux, de lui lire Polybe en français, s’appesantissant à plaisir sur les ruses et les machines de guerre, de lui faire expliquer Tacite en latin ; car l’intelligence robuste de l’enfant mordait déjà à cette forte nourriture.
Advisez donc si vous avez desir De rien prester : vous me ferez plaisir ; Car puis un peu, j’ai basti à Clément Là où j’ay fait un grand desboursement, Et à Marot qui est un peu plus loing : Tont tombera, qui n’en aura le soing.
La jeune fille de Saint-Cyr, tombée ainsi au milieu de ces gentilshommes révoltés, et de ce prochain de Bretagne moins joli et plus tumultueux que jamais, le prit sur un tout autre ton d’intérêt et d’émotion, on peut le croire, que Mme de Sévigné en son temps simple spectatrice pour son plaisir, du bout de son avenue des Rochers.
Il poursuit : « Cependant la nuit approche ; le bruit commence à cesser au dehors, et le cœur palpite d’avance du plaisir qu’on s’est préparé.
Nous ne l’écoutons pas assez, seulement pour le plaisir de l’oreille.
Apprendre quelque chose qui ne nous regarde en rien et sentir que le “devoir” consiste précisément dans cette activité “objective” ; apprendre à évaluer séparément le plaisir et le devoir, voilà la tâche et l’action inappréciable de la pédagogie.
Leur spécialité était de jeter des pierres aux passants pour le plaisir de les blesser.
Ainsi avec les jésuites, si nous les considérons surtout au dix-septième et au dix-huitième siècles, domine une piété fleurie, qui ne déteste ni les plaisirs du monde ni les agréments du style.
Ainsi, dans l’époque que nous avons résumée plus haut, la poésie dramatique et la littérature religieuse me paraissent avoir droit aux deux premiers rangs, et ce rapprochement seul de deux genres qui se ressemblent si peu, qui sont même, à certains égards, en pleine opposition, fait comprendre à merveille cette société catholique et mondaine qui voltige avec aisance du théâtre au sermon et se partage entre l’Église et les plaisirs du siècle.
Le poète avait, comme à plaisir, accumulé les obstacles sur son champ de combat : situations scabreuses, scandales à tourner, justes scrupules à vaincre, objections toutes prêtes à surprendre.
Une belle scène nous fait redescendre à terre, de ces nuages accumulés à plaisir.
Dans ses Mémoires, où l’homme d’esprit, l’homme de tenue et de bon ton a recouvert les fautes du personnage politique, il est convenu lui-même de quelques-uns de ces torts : « La Fayette, dit-il, eut des torts avec Mirabeau, dont l’immoralité le choquait ; quelque plaisir qu’il trouvât à sa conversation, et malgré beaucoup d’admiration pour de sublimes talents, il ne pouvait s’empêcher de lui témoigner une mésestime qui le blessait. » Il est bon que ceux qui mettent la main aux affaires publiques et aux choses qui concernent le salut des peuples le sachent bien, les hommes en face de qui ils se rencontrent, et qui souvent sont le plus faits pour être pris en considération, ne sont pas précisément des vierges, et il n’est pas de plus grande étroitesse d’esprit que de l’être soi-même à leur égard plus qu’il ne convient.
Après 1815, quand la maison de Savoie est rétablie dans son antique héritage, M. de Maistre, à la veille de rentrer dans sa patrie, mais lésé lui-même dans sa fortune et à peu près ruiné dans son patrimoine, ne forme plus que le vœu du patriarche ; il nous laisse voir l’unique fond de son désir au milieu de cet ébranlement de l’Europe, où le volcan ne se ferme d’un côté que pour se rouvrir d’un autre : « Ma famille, mes amis et mes livres suffisent aux jours qui me restent, et je les terminerais gaiement si cette famille ne me donnait pas d’affreux soucis pour l’avenir. » Faisant allusion à cette vivacité qu’il portait volontiers en tout, et dont il ne prétend pas s’excuser : Cependant, écrivait-il à un ami, si j’avais le plaisir de vivre quelque temps avec vous sous le même toit, vous ne seriez pas peu surpris de reconnaître en moi le roi des paresseux, ennemi de toute affaire, ami du cabinet, de la chaise longue, et doux même jusqu’à la faiblesse inclusivement !
Mais de tous ceux qui ont pris La Harpe à partie, nul ne l’a fait avec autant de plaisir et de délectation vengeresse que Le Brun.
Comme il s’en faut bien que ma fortune approche de sa médiocrité d’or, je ne vous donnerai que des fraises et du lait dans des terrines ; mais vous aurez le plaisir d’entendre les rossignols chanter dans les bosquets des Dames-Anglaises, et de voir leurs pensionnaires et leurs jeunes novices folâtrer dans leur jardin.
Il poursuivit ces études de pure chronologie et trouvait évidemment plaisir à ces questions épineuses.
Il ne faut pas oublier que Marie-Antoinette avait quinze ans et demi, lorsqu’elle arrive en France, lorsqu’elle tombe dans ce royaume du papillotage et du Plaisir, parmi cette génération de Françaises qui semblent représenter la Déraison, dans l’agitation fiévreuse de leurs existences futiles et vides.
Il faut avouer que ses compliments sont à peu près dans ce goût : « Autrefois, je ne vous connaissais pas, je ne vous lisais pas, je ne rencontrais que des gens qui me disaient du mal de vos romans… Maintenant tout est changé… alors je vous lis, je vous lis avec un grand plaisir… et vous trouve vraiment beaucoup de talent… Mais au fait, on dit que vous avez aussi publié des livres d’histoire très curieux… moi je n’y croyais pas, quand j’ai commencé à lire vos romans… je les ai trouvés si bien, que ça me mettait en défiance contre vos autres livres… Je me disais : ils sont trop romanciers pour être des historiens… » * * * — Voltaire n’a que l’esprit, tout l’esprit d’une vieille femme du xviiie siècle ; mais jamais de son esprit ne jaillit une pensée, ayant la moindre parenté avec une pensée de Pascal, avec une pensée de Bacon, avec n’importe quelle pensée d’une grande cervelle philosophique.
Soyons donc indulgents pour nos plaisirs et goûtons dans les images nouvelles ce qu’elles ont de beau, leur nouveauté.
Les juifs, même ceux du moyen âge, ont, du reste, raison de dire que pas un d’eux n’est Shylock ; les hommes de plaisir ont raison de dire que pas un d’eux n’est don Juan.
Au reste, si l’on affirme avec Descartes que l’homme a le droit d’examiner ce qu’on lui propose de croire et de ne se décider que sur l’évidence, ce n’est point à dire pour cela que l’homme ait le droit de penser, selon sa fantaisie et selon son caprice, tout ce qui peut lui passer par la tête, qu’il puisse à son gré déclarer vrai ce qui est faux et faux ce qui est vrai, prendre sa passion pour souverain arbitre et faire de son bon plaisir la règle de tous ses jugements : ce serait confondre la liberté avec l’arbitraire, et je ne sache pas qu’aucun philosophe ait jamais réclamé ce droit extravagant.
Il s’ensuit que l’expérience a prise sur les phénomènes, car elle peut écarter successivement toutes les conditions accessoires d’un phénomène jusqu’à ce qu’elle ait trouvé celle qui lui est essentiellement liée ; quand elle l’a trouvée, elle produit ou supprime le phénomène à volonté, ce qui n’aurait pas lieu si la production des phénomènes était capricieuse ou arbitraire et dépendait du seul bon plaisir de la force vitale.
Sacontala, celle qui ne buvait point l’onde pure avant d’avoir arrosé vos tiges ; celle qui, par tendresse pour vous, ne détacha jamais une seule feuille de votre aimable verdure, quoique ses beaux cheveux en demandassent une guirlande ; celle qui mettait le plus grand de tous ses plaisirs dans cette saison qui entremêle de fleurs vos flexibles rameaux !
On avoit lu avec moins de plaisir que de surprise celles de Guichard, qui sçachant l’hébreu à fond, crut faire honneur aux François en faisant remonter leur langue jusqu’à sa premiere source.
Ou il rapportera toute la connaissance humaine aux principales facultés de notre entendement, comme nous l’avons pratiqué dans l’Encyclopédie, rangeant tous les faits sous la mémoire ; toutes les sciences sous la raison ; tous les arts d’imitation sous l’imagination ; tous les arts mécaniques sous nos besoins ou sous nos plaisirs ; mais cette vue qui est vaste et grande, excellente dans une exposition générale de nos travaux, serait insensée si on l’appliquait aux leçons d’une école, où tout se réduirait à quatre professeurs et à quatre classes : un maître d’histoire, un maître de raison, une classe d’imitation, une autre de besoin.
Il arrive encore à quelques sons de blesser l’oreille lorsqu’ils viennent la frapper immediatement après de certains sons, qui feroient plaisir à l’oreille s’ils se presentoient après d’autres sons.
Le libre prince, des fantaisies venait, en effet, d’être immobilisé quelques journées durant par le bon plaisir de ces procureurs qui, généralement chargés de convoitises, de dols et de stupres infiniment plus vastes que ceux de leurs adversaires, se plaisent à venger la Morale Publique.
Avocat de métier, avocat de conviction, avocat d’âme, mettant sa main corrompue dans l’or et le sang, de quelque trésor ou de quelque veine qu’ils coulassent, cet ambitieux manqué qui croulait par la ceinture, comme tous les ambitieux esclaves des plaisirs matériels, n’a jamais eu au cœur ou à la tête le bronze qu’on lui croit.
Ferrari, passent pour le moment sur le ventre aux idées de l’abbé du Bos et de Montesquieu, qui se relèveront et le rendront à qui les foule ; seulement, ses idées une fois jetées parterre, qu’on me fasse le plaisir de me dire ce que deviendra le très honorable M.
Elle est dans Le Soir de la jeunesse, qui est la méfiance de l’amour ; dans La Contredanse, ce dialogue de la tristesse au sein du plaisir ; dans la Promenade, qui est la caractérisation la plus vive et la plus pénétrante de la manière de ce poète pathologique, que M.
que j’aime bien mieux ma joie et mon plaisir, Et toute ma famille, avec tout mon loisir, Que la gloire ingrate et frivole, Dussent mes vers, troublés de ces cris familiers, S’enfuir, comme devant un essaim d’écoliers, Une troupe d’oiseaux s’envole !
Parti pour écrire une plaquette, je me trouvai entraîné par la suite de mon discours et le courant de mon plaisir. […] L’art du xviiie siècle remis à la mode, le plaisir à transposer en vers Watteau et Fragonard, contribuaient à élargir ce mouvement. […] De sorte que le plaisir apporté par cette poésie est, loin de demeurer inintelligible, de solliciter sans cesse l’intelligence, et non point d’être comprise, mais de faire comprendre. […] Avec de l’imagination et de la tendresse nous ressentons, je veux bien, l’amour d’Oreste, mais notre plaisir malgré tout demeure d’intelligence. […] Le goût de Mallarmé laisse au lecteur ami le soin et le plaisir de cette besogne, et à l’autre lecteur il épargne même lu peine de la tenter.
» Il apostrophe la bague, il gambade autour de Ruth, il frappe dans ses mains de plaisir. […] Ce sont des maladies ; si on se contente de les maudire, on ne les connaîtra pas ; si l’on n’est physiologiste, si l’on ne se prend pas d’amour pour elles, si l’on ne fait pas d’elles ses héros, si on ne tressaille pas de plaisir à la vue d’un beau trait d’avarice comme à la vue d’un symptôme précieux, on ne peut dérouler leur vaste système et étaler leur fatale grandeur.
Nous nous croyons donc dans d’excellentes conditions d’impartialité pour étudier avec vous ce livre ; et si le plaisir est déjà un jugement anticipé, nous pouvons laisser préjuger d’avance le nôtre, car nous avons lu cinq fois cette histoire depuis la première page jusqu’au dernier mot, et n’avons jamais fermé le volume qu’avec ce regret et avec ce déboire qu’on éprouve en quittant trop tôt le commerce d’un grand esprit. […] Je ne puis résister au plaisir de citer ces deux belles pages ; elles sont au nombre de celles qui font le plus sentir et le plus penser parmi les innombrables repos de ce livre, repos toujours courts, où M.
Tous lui répondirent qu’il y avait une grande différence, que le premier avait été un jour de fatigues et de peines, et que le second n’avait offert que des plaisirs et des jouissances. […] Vous ne douterez donc pas que nous ne vous ayons traités comme vous êtes dignes de l’être, et vous pourrez rapporter au roi, qui vous envoie, qu’un Grec, actuellement simple gouverneur de la Macédoine, a su vous procurer tous les plaisirs que peuvent donner la table et le lit. » Lorsque Alexandre eut cessé de parler, chacun des Macédoniens, qu’il était facile de prendre pour une femme, alla s’asseoir à côté d’un des députés, et au moment où les Perses voulurent porter les mains sur eux, les jeunes gens, tirant leurs poignards, les percèrent de coups. » Ces Péoniens aux mœurs féroces devaient être les Albanais d’aujourd’hui : les noms changent, jamais les mœurs.