Piquons au passage une anecdote instructive, uniquement pour nous rendre compte du degré d’aisance et de commodité auquel une grâce d’état spéciale leur permet de réduire le poids incommode des scrupules de l’art. […] Que ces Contes soient écrits le mieux possible, que la morale et la décence n’y soient pas trop offensées : voilà ce qu’il nous est permis de souhaiter. […] Ces guides serviraient de phares au lecteur et lui permettraient de se reconnaître dans ce dédale de productions de tout acabit qui inondent les vitrines des libraires, les gares des chemins de fer. Ils lui permettraient surtout de se composer peu à peu une bibliothèque de choix. […] Pro domo sua [Pierre Sales] Monsieur et cher confrère, Pourquoi traiter avec dédain un genre de littérature qui permet de s’adresser à l’immense masse du public, laquelle ne comprend jamais tout de suite les novateurs absolus et serait à jamais fermée à toute beauté morale ou artistique, si certains écrivains ne les faisaient arriver jusqu’à elle ?
Écrite dans la langue colorée, pittoresque, expressive de la tradition romantique, elle permettra enfin de juger Shakespeare dans son originalité, pour les Français qui ne savent pas l’anglais, presque entièrement inconnue. […] Il n’est permis à personne de confondre et de brouiller les notions nécessaires à expliquer l’homme dans la réalité de son être, fût-ce même pour faire honneur au génie de Shakespeare et plaisir à ceux qui l’aiment, mais cependant qui ne veulent pas l’aimer comme des idolâtres ou des fous ! […] Il fut un être moral quelconque, dont le degré de moralité est resté un secret entre lui et Dieu, un être dont nous n’avons vu passer que l’extrémité des passions ou des sentiments dans des traditions incertaines, mais ce fut à ciel ouvert un être de génie qui a déposé non pas le secret, mais la révélation de son génie en des œuvres splendides sur le compte desquelles il n’est pas permis de s’abuser. […] Mais, qu’on me permette de le dire, j’oserais croire qu’il y a dans Lear un arrangement d’art plus profond des articulations plus formidables, et que jamais Shakespeare n’a campé debout de création plus forte et qu’il ait fait marcher de ce pas-là devant nos esprits confondus ! […] Si j’étais Philoxène Boyer, le commentateur éloquent et savant de Shakespeare ; si j’avais devant moi une tribune où les développements sont permis, je suivrais en détail la comparaison entre ces deux grandes œuvres, filles l’une de l’autre, mais égales.
Rêvée, de loin en loin, par des âmes d’élite, elle réalise chaque fois quelque chose d’elle-même dans des créations dont chacune, par une transformation plus ou moins profonde de l’homme, permet de surmonter des difficultés jusque-la insurmontables. […] Qu’on nous permette d’évoquer un souvenir. […] Qu’on prenne de ce biais la devise républicaine, on trouvera que le troisième terme lève la contradiction si souvent signalée entre les deux autres, et que la fraternité est l’essentiel : ce qui permettrait de dire que la démocratie est d’essence évangélique, et qu’elle a pour moteur l’amour. […] Pour ce qui est de l’uniformité du produit, l’inconvénient en serait négligeable si l’économie de temps et de travail, réalisée ainsi par l’ensemble de la nation, permettait de pousser plus loin la culture intellectuelle et de développer les vraies originalités. […] Le grand souffle de vie qui passa sur notre planète avait poussé l’organisation aussi loin que le permettait une nature à la fois docile et rebelle.
Sans plus donc chercher à la déplacer en idée et à la transporter par delà les lointains de l’horizon, nous allons l’envisager et la suivre dans ce qu’il lui a été permis d’être au jour qu’elle a vécu. […] Une bienveillance précieuse nous permet de reproduire quelques lignes qui peignent cette situation intérieure : « J’ai vu hier Mme de Krüdner, écrivait Benjamin Constant212, d’abord avec du monde, ensuite seule pendant plusieurs heures. […] Au temps d’Ausone, saint Paulin, depuis sa conversion, se permit ou même s’imposa toutes sortes d’incorrections dans ses vers. […] Aujourd’hui qu’elle s’est jetée dans la dévotion mystique, elle fait des prophéties, c’est encore du roman, mais d’un genre tout opposé… » Il finissait et concluait du même ton : « L’Évangile en main, j’oserai lui dire que nous aurons toujours des pauvres au milieu de nous, ne fût-ce que de pauvres têtes. » L’anonyme du Journal de Paris se permit de trouver ce jeu de mots final plus digne de Potier ou de Brunet, que d’un chrétien sérieusement pénétré de l’Évangile.
Il leur était permis de l’observer plus à l’aise et plus fréquemment que cela n’était possible au temps d’Hiram ou des Ptolémées, sous la domination romaine et sous celle des Arabes, quand on était borné à la mer Rouge ou à l’océan Indien, c’est-à-dire à l’espace compris entre le détroit de Bab-el-Mandeb et la presqu’île occidentale de l’Inde. […] X Quant à moi, — si j’avais, non pas le génie des découvertes que M. de Humboldt n’avait évidemment pas reçu du ciel, mais l’aptitude patiente et infatigable aux études physiques que cet homme, remarquable par sa volonté, a manifestée pendant quatre-vingt-douze ans d’existence ; Et si je possédais, comme lui, la notion exacte et complète de tous les phénomènes dont l’univers est composé, de manière à me faire à moi-même et à reproduire pour les autres le tableau de l’universelle création, je commencerais par une humble invocation à genoux à l’auteur caché de ce Cosmos à travers lequel il me permet, sinon de l’entrevoir, du moins de le conclure ; et une belle nuit d’été, soit sur les vagues illuminées de l’Océan qui me porte aux extrémités de l’univers, soit sur un sommet neigeux du Chimboraço, soit sur un rocher culminant des Alpes, je tomberais à ses pieds ; je laisserais sa grandeur, sa puissance, sa bonté, me pénétrer, m’échauffer, m’embraser, comme le charbon de feu qui ouvrit les lèvres du prophète, et je lui dirais en face de ses soleils, de ses étoiles, de ses nébuleuses et de ses comètes : « Toi qui es ! […] » — Allons à lui par la contemplation, et rendons-nous compte de son œuvre complète, afin de l’adorer plus complètement dans son œuvre, qu’il me permet d’entrevoir, jusqu’au moment où des instruments intellectuels plus parfaits me rapprocheront encore davantage, et où la science fera tomber les voiles qui me dérobent la perfection et l’immensité de l’infini. […] Le terrain est susceptible de culture et les produits seraient de ceux qui permettent l’emploi des engins et des machines les plus perfectionnés.
Ces réserves faites, je demeure partisan des prix littéraires, si je considère qu’ils permettent tout de même d’aider quelques écrivains, mais je suis moins ferme en mon parti quand j’examine les mœurs qu’ils ont introduits, ou développés et exaspérés, chez certains auteurs et certains éditeurs, quand je prévois quels instruments d’injustice fatale ils peuvent devenir pour ceux qui n’en ont point obtenu. […] Je ne les ai jamais compris et je me permets même de vous féliciter de votre enquête, car j’espère, pour l’honneur des lettres, que la protestation va être unanime contre eux. […] Ce serait au public à le dégager ; et je me permets de vous renvoyer à ce sujet, à la préface si curieuse que Gœthe mit au Neveu de Rameau, quand il le présenta à ses compatriotes, vers 1808, je crois. […] Permettez-moi de vous dire en bon français, que je m’en fous !
Au moral, il est permis de dire ce qui n’est pas vrai au physique : quand les creux d’une coquille sont très profonds, ces creux ont le pouvoir de reformer l’animal qui s’y était moulé. […] À défaut du mariage, on eût dû la faire religieuse : la règle et les austérités l’eussent calmée, mais il est probable que le père n’était pas assez riche pour payer la dot et sa condition ne permettait pas de la faire sœur converse. […] Le vicaire était la seule personne de son rang qu’elle vit, s’il est permis de parler de la sorte. […] Elle serait toujours privée de lui, c’est vrai, mais l’impossible est l’impossible ; elle se serait approchée de lui autant que c’était permis.
Leur cœur de fièvre ne leur permet pas un long repos. […] Le dément s’assied dans son inconscience dont je ne sais quelle vague lueur lui permet de souffrir encore, « abandonné comme un colombier en ruines par les souvenirs vagabonds ». […] Les sottises d’Armand Silvestre m’ont permis de définir Boissier de façon plus vivante et je dirai peu de choses de son volume suivant : Esquisses et fresques. […] Dès les premiers pas, comme une rose épineuse et hautaine j’ai aimé ce mot de satirique méprisant adressé aux inintellectuels : « Un certain bétail à pain » — Voici, bientôt après, une liane jolie, souple et solide et qui devrait lier mes fleurs, si j’essayais un bouquet « Ce livre est un document humain transporté dans le Rêve. » — Et nous sourient, en effet, de rêveuses corolles : « Les voix blanches qui parlent une langue invertébrée, dont aucun vocable ne s’efforce vers la réalité dure. » — « Quand tu parles, c’est tout bas, afin que le silence assourdissant se taise et ne décoordonne pas la moire des souhaits naissants. » — « J’ai permis que mes sentiments luttassent d’analogie avec les nuages dont me plaisent les bornes imprécises et l’indécision des formes. » Voulez-vous des beautés de précision ?
Qu’il me soit permis de le dire ; les grands esprits qui sont tellement frappés de l’obligation qu’on a aux anciens, qu’ils imputent à ingratitude d’y trouver quelques défauts, tombent ordinairement dans une espéce de contradiction. […] Le style diffus peut convenir aux orateurs : il leur est permis d’étendre leurs raisons, et de les offrir sous diverses faces, pour suppléer par cette abondance, à ce qui peut échapper aux auditeurs. […] Ses descriptions sont vives, ses comparaisons justes et choisies, ses figures variées ; mais il ne s’en permet jamais de trop hardies ; et sage jusques dans ses emportemens, comme l’a dit un grand critique, il a presque toujours fait voir qu’on peut être raisonnable, sans être froid. […] L’émulation peut donc subsister avec la modestie, et je demande seulement qu’on nous la permette à cette condition.
Si, d’ailleurs, il nous est permis d’invoquer notre expérience personnelle, nous croyons pouvoir assurer que, en procédant de cette manière, on aura souvent la satisfaction de voir les faits en apparence les plus arbitraires présenter ensuite à une observation plus attentive des caractères de constance et de régularité, symptômes de leur objectivité. […] Par conséquent, il est permis de croire que, du jour où ce principe de la méthode sociologique sera unanimement reconnu et pratiqué, on verra la sociologie progresser avec une rapidité que la lenteur actuelle de son développement ne ferait guère supposer, et regagner même l’avance que la psychologie doit uniquement à son antériorité historique24. […] Mais il n’importe ; car il ne s’agit pas simplement de découvrir un moyen qui nous permette de retrouver assez sûrement les faits auxquels s’appliquent les mots de la langue courante et les idées qu’ils traduisent. […] En effet, une sensation est d’autant plus objective que l’objet auquel elle se rapporte a plus de fixité ; car la condition de toute objectivité, c’est l’existence d’un point de repère, constant et identique, auquel la représentation peut être rapportée et qui permet d’éliminer tout ce qu’elle a de variable, partant de subjectif.
Sophocle d’aussi près que le permettaient la nature de l’alexandrin français et les exigences de la rime.
Si M. de Vicq avoit la foiblesse de s'affliger de ces persécutions odieuses, qui ne sont propres qu'à déshonorer ceux qui se les permettent, nous prendrions la liberté de lui faire observer que le suffrage du Gouvernement & l'estime des Citoyens honnêtes & éclairés dont il jouit, sont plus que suffisans pour le dédommager des clameurs de ses ennemis.
Le tout permet de prononcer avec exactitude sur son degré d’insuffisance à la tête des affaires, et sur les motifs d’excuse qui sont à sa décharge. […] Elle peut tout se permettre avec lui ; il lui doit tout, il ne se brouillera jamais avec elle ; mais il ne lui dissimule plus ce qu’il croit l’entière vérité sur la situation, et elle ne lui en sait aucun gré. […] Il faut que, puisqu’ils n’ont pu empêcher ma disgrâce, il ne leur ait pas été permis de s’y opposer.
L’ambition ni la légèreté n’eurent point de part à son changement ; le respect et la tendresse qu’elle conservait pour Mme la princesse Palatine, sa tante, qui était catholique, ne lui permirent pas de refuser l’instruction : elle écouta le père Jourdan, jésuite ; née avec cette droiture qui l’a si fort distinguée pendant sa vie, elle ne résista pas à la vérité. […] Elle n’était pas si inférieure à ce roi qu’on le croirait, ou plutôt elle ne lui était inférieure qu’en politesse, en mesure, en esprit de suite et de précision : mais, à certains égards, elle le jugeait avec bien de l’intelligence et avec un bon sens plus libre et plus étendu qu’il n’osait se le permettre pour son propre compte ; elle le trouvait ignorant sur une foule de points, et elle avait raison. […] Elle aida plus que personne à le consoler ou à le distraire de la mort de la duchesse de Bourgogne ; elle allait près de lui le soir, aux heures permises, et marquait qu’elle se plaisait dans sa compagnie : « Il n’y a que Madame qui ne me quitte pas, disait Louis XIV, je vois qu’elle est bien aise d’être avec moi. » Madame a ingénument exprimé le genre d’affection ouverte et sincère qu’elle se sentait pour Louis XIV, lorsqu’elle a dit : « Quand le roi eût été mon père, je n’aurais pu l’aimer plus que je ne l’ai aimé, et j’avais du plaisir à être avec lui. » Quand la santé du roi décline et qu’il approche de la dernière heure, on voit Madame dans ses lettres laisser éclater sa douleur à nu ; elle, dont le fils sera Régent, elle craint, plus que tout, le changement de règne : « Le roi n’est pas bien (15 août 1715) ; cela me tracasse au point que j’en suis à moitié malade ; j’en perds l’appétit et le sommeil.
En France, trop de science chez les femmes, et surtout l’affiche et le diplôme qui y serait attaché, nous a toujours paru contre nature : « Nous avons bien de la peine à permettre aux femmes un habit de muse, disait Ginguené en parlant de celles qui font honneur à l’Italie : comment pourrions-nous leur souffrir un bonnet de docteur ? […] Il l’avait prouvé en se faisant calviniste à un moment et en s’engageant on ne sait trop pourquoi dans un parti qui véritablement n’était guère le sien, et qui permettait peu de liberté à un commentateur d’Aristophane, de Sapho ou d’Anacréon. […] Qu’il soit permis à une mère affligée de se livrer ici un moment à sa douleur.
Il doit paraître dans quelques semaines, chez un libraire bien connu et estimé des bibliophiles, un petit volume fait pour attirer l’attention, et qui permettra de rétablir avec précision et fidélité une des physionomies les plus remarquables et les plus caractéristiques de la société française dans la seconde moitié du xviiie siècle67. […] Et, en etfet, par une rencontre imprévue et qui permet la confrontation, le fabricateur fait dire à sa fausse marquise, sur les personnes de son monde et de sa connaissance, des méchancetés plus ou moins atroces, qui sont justement le contraire de ce qu’on trouve dans les lettres authentiques et qui en reçoivent un entier démenti. […] On y chercherait en vain ce qu’il est trop ordinaire de rencontrer dans la jeunesse des femmes du xviiie siècle, le tempérament ou le roman ; c’est à une personne tout à fait calme et vertueuse (s’il est permis de savoir si bien ces choses de si loin) qu’on a affaire ici.
A conjecturer pourtant, comme il est permis, d’après l’ensemble et le terrain courant des générations survenantes, l’imagination pourrait sembler dorénavant avoir moins de chances pour les grandes œuvres, que l’érudition et la critique pour les travaux historiques dans tous les sens, et que l’esprit pour les charmants gaspillages de tous genres. […] Je me permets tout bas de penser que ce laisser-aller est une erreur ; rarement les moindres choses (à plus forte raison les grandes) s’organisent d’elles-mêmes. […] La vie du talent a d’autres conditions ; l’égalité, s’il est permis de le dire, l’égalité toute flatteuse en si bon lieu, est peu son fait et son but définitif : il aspire à plus, à autre chose, à être discerné et apprécié en lui-même.
Le travail publié dans cette Revue 85 sur la jeunesse de Benjamin Constant et ses relations avec madame de Charrière a produit son effet, l’effet que permettaient d’en attendre la quantité et la qualité des documents intimes versés pour la première fois dans le public. […] N’ai-je pas cité le passage d’Adolphe où il nous peint le caractère de son père, si contraire à toute confiance et ne permettant aucune ouverture à l’affection ? […] » Et sur ce dernier mot je me suis permis d’ajouter que c’était là une fatale parole quand on la prononçait à vingt ans, et qu’on courait risque de ne s’en guérir jamais.
Pour qui se complaît à ces ingénieuses et tendres lectures ; pour qui a jeté quelquefois un coup d’œil de regret, comme le nocher vers le rivage, vers la société dès longtemps fabuleuse des La Fayette et des Sévigné ; pour qui a pardonné beaucoup à Mme de Maintenon, en tenant ses lettres attachantes, si sensées et si unies ; pour qui aurait volontiers partagé en idée avec Mlle de Montpensier cette retraite chimérique et divertissante dont elle propose le tableau à Mme de Motteville, et dans laquelle il y aurait eu toutes sortes de solitaires honnêtes et toutes sortes de conversations permises, des bergers, des moutons, point d’amour, un jeu de mail, et à portée du lieu, en quelque forêt voisine, un couvent de carmélites selon la réforme de sainte Thérèse d’Avila ; pour qui, plus tard, accompagne d’un regard attendri Mlle de Launay, toute jeune fille et pauvre pensionnaire du couvent, au château antique et un peu triste de Silly, aimant le jeune comte, fils de la maison, et s’entretenant de ses dédains avec Mlle de Silly dans une allée du bois, le long d’une charmille, derrière laquelle il les entend ; pour qui s’est fait à la société plus grave de Mme de Lambert, et aux discours nourris de christianisme et d’antiquité qu’elle tient avec Sacy ; pour qui, tour à tour, a suivi Mlle Aïssé à Ablon, où elle sort dès le matin pour tirer aux oiseaux, puis Diderot chez d’Holbach au Granval, ou Jean-Jacques aux pieds de Mme d’Houdetot dans le bosquet ; pour quiconque enfin cherche contre le fracas et la pesanteur de nos jours un rafraîchissement, un refuge passager auprès de ces âmes aimantes et polies des anciennes générations dont le simple langage est déjà loin de nous, comme le genre de vie et de loisir ; pour celui-là, Mlle de Liron n’a qu’à se montrer ; elle est la bienvenue : on la comprendra, on l’aimera ; tout inattendu qu’est son caractère, tout irrégulières que sont ses démarches, tout provincial qu’est parfois son accent, et malgré l’impropriété de quelques locutions que la cour n’a pu polir (puisqu’il n’y a plus de cour), on sentira ce qu’elle vaut, on lui trouvera des sœurs. […] Je ne suis pas jaune, mais fort pâle ; je n’ai pas les yeux mauvais ; avec une coiffure avancée je suis encore assez bien ; mais le déshabillé n’est pas tentant, et mes pauvres bras, qui, même dans leur embonpoint, ont toujours été vilains et plats, sont comme deux cotrets. » Si Mlle Aïssé, même dans son meilleur temps, a toujours été un peu maigre, il est certes bien permis à Mlle de Liron d’avoir toujours été un peu grasse ; cela nous a valu au début une jolie scène domestique de pâtisserie, où l’on voit aller et venir dans la pâte les mains blanches et potelées, et les bras nus jusqu’à l’épaule de Mlle de Liron. […] C’est ainsi qu’on voit dans les lettres latines d’Héloïse à Abélard que celle-ci refusa de devenir la femme du théologien, comme il était permis alors, mais peu honorable, aux gens de sa robe, et qu’elle aima mieux rester sa maîtresse, afin d’avoir seule la tache, et qu’il n’y en eût pas au nom de l’illustre maître.
Dussent mes lettres être vues un jour de tout le monde, je ne veux point dérober à la lumière les seuls monuments de ma faiblesse, de mes sentiments. » Allons, puisqu’on nous le permet et qu’on nous y invite même, pénétrons dans l’intérieur virginal où il lui plaît de nous guider. […] Saint François de Sales, qui a l’air de permettre quelques affiquets aux filles en vue d’un honnête mariage, lui paraît trop indulgent. […] Roland, dans son bon sens d’économiste, se permet de juger l’historien philosophique des deux Indes comme un charlatan assez peu philosophe, et n’estime ses lourds volumes qu’assez légers et bons à rouler sur les toilettes.
Les spéciaux (qu’on me permette l’expression) commettent souvent la faute de croire que leur travail peut avoir sa fin en lui-même et prêtent par là au ridicule ; tout ce qui est résultat les alarme et leur semble de nulle valeur. […] Quand on est certain que les matériaux que l’on possède sont les seuls qui existent, tout incomplets qu’ils sont, on peut se permettre ces marqueteries ingénieuses où sont groupées toutes les paillettes dont on dispose, à condition toutefois que l’on fasse des réserves et que l’on se reconnaisse incapable de déterminer les relations mutuelles des parties, les proportions de l’ensemble. […] La délicatesse beaucoup plus grande des sciences philologiques ne permettrait pas sans doute l’emploi rigoureux d’une telle méthode.
Permettez-moi une distinction. […] Permettez-moi de vous rappeler votre belle découverte de l’acide droit et de l’acide gauche. […] Déjà, du sein de la vie individuelle, il est permis de s’associer à cet avenir, de travailler à le préparer, de devenir ainsi, par la pensée et par le cœur, membre de la société éternelle, et de trouver en cette association profonde, malgré les anarchies contemporaines et les découragements, la foi qui soutient, l’ardeur qui vivifie, et l’intime satisfaction de se confondre sciemment avec cette grande existence, satisfaction qui est le terme de la béatitude humaine. » Votre dévouement absolu à la science vous donnait le droit, Monsieur, de succéder à un tel homme et de rappeler ici cette grande et sainte mémoire.
J’avoue que mes muscles étaient crispés… On voit, ce me semble, la situation, l’attitude et le geste des deux parts : d’un côté, M. de Lally, celui qu’on a appelé le plus gras, le plus gai, le plus gourmand des hommes sensibles, ce personnage spirituel et démonstratif, à qui un moment d’éloquence généreuse et de pathétique dans sa jeunesse permit d’être déclamateur toute sa vie, ayant le beau rôle des larmes et se le donnant ici comme toujours ; de l’autre côté, un homme jeune, ardent, un peu amer, irrité de voir un mouvement d’humanité devenir une machine oratoire et un coup de tactique ; qu’on se représente les deux hommes en présence, et tout s’expliquera. […] Nous arrivions insensiblement à Dormans, écrit Pétion ; j’observai plusieurs fois Barnave (qui était placé en face de lui, entre le roi et la reine), et quoique la demi-clarté qui régnait ne me permît pas de distinguer avec une grande précision, son maintien avec la reine me paraissait honnête, réservé, et la conversation ne me semblait pas mystérieuse. […] Le récit de Mme Campan, bien qu’inexact sur plusieurs points, et trahissant dans son ensemble une légère teinte romanesque qui sied peu à Barnave, ne semble point permettre de doute là-dessus.
Je doute fort s’il est permis à un homme d’écrire contre le culte et la croyance de son pays, quand même il serait de bonne foi persuadé qu’il y eût des erreurs, à cause du trouble et du désordre qu’il y pourrait causer ; mais je suis bien sûr qu’il n’est nullement permis d’attaquer les fondements de la morale, et de rompre des liens si nécessaires et déjà trop faibles pour retenir les hommes dans le devoir. […] À propos des femmes encore, s’il semble bien dédaigneux parfois, il leur fait ailleurs réparation, et surtout, quoi qu’il en pense, il ne permet pas à son fils d’en trop médire : Vous paraissez croire que, depuis Ève jusqu’à nos jours, elles ont fait beaucoup de mal ; pour ce qui est de cette dame-là, je vous l’abandonne ; mais, depuis son temps, l’histoire vous apprend que les hommes ont fait dans le monde beaucoup plus de mal que les femmes ; et à vrai dire, je vous conseillerais de ne vous fier ni aux uns ni aux autres qu’autant que cela est absolument nécessaire.
Cette médiocrité dans tous les genres est la suite d’une curiosité effrénée et d’une fortune si modique, qu’il ne m’a jamais été permis de me livrer tout entier à une seule branche de la connaissance humaine. […] « Allez toujours, lui disait-elle quand elle le voyait hésiter par hasard dans quelque liberté de propos, entre hommes tout est permis. » Dans la soirée d’adieux qu’il passa avec elle, il y eut un moment où, sur une parole de bonté et d’amitié qu’elle lui adressa, il se mit à pleurer à chaudes larmes, « et elle presque aussi », assure-t-il. […] lui crie-t-il ; tu as été plus loin qu’il ne l’est permis à ton âge… Tu as une compagne charmante qui doit te fixer.
Je me permettrai d’ajouter, pour prendre le ton du sujet, que, s’il n’avait jamais fait ah ! […] Disciple de Descartes en philosophie, mais disciple libre et qui se permettait de juger son maître, il comprit qu’il y avait un rôle à prendre, un milieu à tenir entre les gens du monde et les savants, et que l’esprit, qui, d’un côté, servait à entendre, pouvait servir, de l’autre, à exprimer. […] » Fontenelle avait quarante ans quand il fut nommé secrétaire perpétuel de l’Académie des sciences (1697) ; il avait publié tous les ouvrages qui le distinguent sous sa première forme littéraire, et il va durer soixante années encore sous sa forme plus épurée, plus contenue, plus sérieuse : le grand esprit va désormais prendre le pas sur le bel esprit, ou du moins ne plus permettre qu’on l’en sépare.
Elle me permit plusieurs fois de lui donner un baiser ; ce que je fis avec ma maussaderie ordinaire… Le pauvre Jean-Jacques fait des réflexions à perte de vue sur ce baiser, qui ne le rendait pas moins interdit que la pauvre petite. […] On lui donna la coupe ; il la porta à miss Marianne en y mettant un petit billet tout préparé à l’avance, qui disait : « Sir Marmaduke étant arrivé un instant trop tard, permettez-moi de suivre ses intentions et de mettre la coupe à vos pieds. » Miss Marianne reconnaissait l’écriture de Lauzun et disait : « Il est charmant ! […] On raconte que l’exécuteur se présentant le matin, pendant qu’il déjeunait dans sa prison, pour l’avertir qu’il était l’heure de partir : « Vous me permettrez bien encore une douzaine d’huîtres », lui dit gaiement Biron, et il lui offrit un verre.
. — Quant au petit roi, il jugeait son bon maître tout en le comblant : on rapporte qu’il le raillait parfois sur son avarice et sa parcimonie, et enfin, lui qui se connaissait en vers et qui en faisait même d’assez bons, il se permettait de trouver durs ceux qu’Amyot mêlait à ses traductions : Amyot, très peu poète en cela, ne l’en trouvait pas moins aimable. […] Ce sont là les mérites de ce traducteur incomparable, venu à un moment décisif et où il pouvait se permettre ce qui, depuis lors, n’eût plus été également accordé. […] Que les érudits me permettent encore de leur soumettre une pensée.
Un Français, un Allemand et un Anglais seront toujours très inférieurs sous ce rapport, toutes choses égales d’ailleurs en facultés, à un Corse, un Albanais ou un Grec ; et il est bien permis de faire entrer encore en ligne de compte l’imagination, l’esprit vif et la finesse innée qui appartiennent comme de droit aux méridionaux, que j’appellerai les enfants du soleil. […] Dans le beau portrait qu’il a tracé d’un général qui remplit toutes les conditions du commandement, il n’oublie pas celle-ci : « Un général doit être aussi magnifique que sa fortune le lui permet. » Ce n’est pas mon fait ici de suivre pas à pas Marmont dans tous les degrés de sa carrière. […] Général en chef de l’armée de Portugal, c’est lui qui, en 1812, introduira parmi ses troupes l’usage des moulins portatifs qui permettent au soldat de faire lui-même sa farine et son pain, moyen le plus sûr pour qu’il n’en manque jamais.
C’est lui qui a écrit, à la dernière page de son Testament politique : « Beaucoup se sauveraient comme personnes privées, qui se damnent en effet comme personnes publiques. » Permis à Voltaire de rire de ces maximes et d’y voir la trace d’un petit esprit ! […] Cette mission lui convenait fort ; mais les propositions de la reine qui lui vinrent par le maréchal d’Ancre l’emportèrent : « Outre qu’il ne m’était pas honnêtement permis, dit-il, de délibérer en cette occasion, où la volonté d’une puissance supérieure me paraissait absolue, j’avoue qu’il y a peu de jeunes gens qui puissent refuser l’éclat d’une charge qui promet faveur et emploi tout ensemble. » En entrant au Conseil, il y devient du premier jour le personnage important ; il a, comme nous dirions, le portefeuille de la Guerre et celui des Affaires étrangères, de plus, la préséance sur ses collègues comme évêque ; et tout cela à trente et un ans. […] Du fond de sa retraite grondeuse et tournée vers le passé, il ne lui rendra jamais justice ; mais, dans ce premier moment, l’erreur peut-être était permise : le maréchal d’Ancre masquait encore Richelieu.
Le jour de la première représentation du Devin du village, au sortir de l’Opéra, le duc des Deux-Ponts abordant Rousseau avec beaucoup de politesse lui avait dit : « Me permettez-vous, monsieur, de vous faire mon compliment ? […] Grimm, présent au récit, lui avait dit en riant : Illustre citoyen et cosouverain de Genève (puisqu’il réside en vous une part de la souveraineté de la république), me permettez-vous de vous représenter que, malgré la sévérité de vos principes, vous ne sauriez refuser à un prince souverain les égards dus à un porteur d’eau, et que, si vous aviez opposé à un mot de bienveillance de ce dernier une réponse aussi brusque, aussi brutale, vous auriez à vous reprocher une impertinence des plus déplacées ? […] Je me permets d’insister sur Grimm ; la France, ce me semble, lui doit des réparations ; on ne l’a payé trop souvent de ses services et de ses talents voués à notre littérature, que par un jugement tout à fait injuste et, à certains égards, inhospitalier.
Necker intervient dans la guerre ouverte entre les incrédules et les intolérants de tout genre dont il était environné, comme un médiateur honnête, sensé, sincère, éloquent même à la longue, si l’on consent à l’écouter ; il dira de toutes les manières à ceux qu’il s’efforce de ramener : Un homme sage ne se permet jamais de semer la tristesse et le découragement, pour la ridicule vanité de se montrer un peu élevé au-dessus des opinions communes, ou pour le plaisir de faire des distinctions plus ou moins ingénieuses sur quelques parties de la religion établie. […] disait-il, tous les hommes sans doute sont égaux devant vous, lorsqu’ils communiquent avec votre bonté, lorsqu’ils vous adressent leurs plaintes, et lorsque leur bonheur occupe votre pensée ; mais, si vous avez permis qu’il y eût une image de vous sur la terre, si vous avez permis du moins à des êtres finis de s’élever jusqu’à la conception de votre existence éternelle, c’est à l’homme dans sa perfection que vous avez accordé cette précieuse prérogative ; c’est à l’homme parvenu par degrés à développer le beau système de ses facultés morales ; c’est à l’homme enfin, lorsqu’il se montre dans toute la gloire de son esprit.
Le Frédéric de Remusberg, même dans ses accès de métaphysique, ne se laissera donc pas emporter plus loin que ne lui permet le bon sens ; mais ce qui fait le cachet de cette correspondance de jeunesse, c’est l’absence de toute ironie, et, même dans le doute, un sérieux digne de ces sujets graves. […] Mais les autres ne le lui permirent pas de sitôt ; et, après avoir commencé par être un envahisseur, force lui fut de rester pendant des années un infatigable donneur de batailles et de devenir le plus grand capitaine de son époque : mais, l’étoffe de l’esprit et du caractère y étant, on peut dire encore qu’il ne le devint que par la force des choses. […] Le ciel ne permet pas que vous ayez le temps d’exécuter vos bons desseins envers moi.
Ainsi, notons bien ceci : en premier lieu, voici un auteur, — un chrétien, sans doute, — qui considère comme certain que le Sage y regarde de bien près avant de se permettre de rire, comme s’il devait lui en rester je ne sais quel malaise et quelle inquiétude, et, en second lieu, le comique disparaît au point de vue de la science et de la puissance absolues. […] Qu’on me permette une supposition poétique qui me servira à vérifier la justesse de ces assertions, que beaucoup de personnes trouveront sans doute entachées de l’a priori du mysticisme. […] Permis aux contradicteurs jurés de citer la classique historiette du philosophe qui mourut de rire en voyant un âne qui mangeait des figues, et même les comédies d’Aristophane et celles de Plaute.
Voici les formules de correction qui te permettront de rentrer dans la vérité. […] S’il avait pu établir ses équations directement, sans intervention de Pierre, il les aurait aussi bien fournies à Pierre pour lui permettre, connaissant x, y, z, t, v″, de calculer x′, y′, z′, t′, v′. […] Il va sans dire que nous appelons horloge, dans ce paragraphe, tout dispositif permettant de mesurer un intervalle de temps ou de situer exactement deux instants par rapport l’un à l’autre.
Intelligence ferme et décidée comme elle est, ennemie du vague, allant droit au fait, droit au but, — Elle et son frère, le prince Napoléon, en cela semblables, — si l’on se permettait d’être observateur en les écoutant, on se plairait à retrouver en eux, pour le trait général et le contour, quelque chose de la forme et du profil d’esprit du grand empereur leur oncle. […] De là, autour d’elle, des sujets inépuisables et sans cesse renaissants de conversation et de contradiction qu’elle permet, ou, bien mieux, qu’elle provoque et qu’elle anime.
Depuis lors, le fils du général Friant, dans une pensée de piété domestique, a publié une Vie militaire fort exacte de son glorieux père, auprès duquel il a servi lui-même durant des années, et il nous est maintenant permis de nous faire une idée précise du genre de mérite et d’héroïsme de ce modèle des divisionnaires. […] J’aime mieux essayer de les faire sentir que de repasser sèchement toutes les grandes batailles où il fut un des vigoureux artisans, Austerlitz, Auerstaedt, Eylau, Eckmuhl, Wagram, Smolensk, la Moskowa : — une intrépidité de premier ordre, cela va sans dire ; — l’affection de ses troupes qui lui permettait de tirer d’elles de merveilleux surcroîts de fatigue et des combats acharnés au sortir des marches les plus rudes : — « Cet homme me fera toujours des siennes », disait l’empereur, en apprenant une de ces marches sans exemple à la veille d’Austerlitz ; — l’habileté des manœuvres et le coup d’œil sur le terrain, le tact qui lui faisait sentir l’instant décisif, ce talent pratique qui est du tacticien et du capitaine, et qui montre l’homme né pour son art (cela se voit surtout dans sa conduite à Auerstaedt, à Eckmuhl) ; — oser prendre, au besoin, la responsabilité de ses mouvements dans les circonstances critiques, sans se tenir à la stricte exécution des ordres ; et, quand il se bornait à les exécuter, une activité sans trêve.