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308. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « M. Andrieux »

C’était en général à la diction que se bornait cette surveillance de l’aimable et fin aristarque ; on n’abordait pas dans ce temps les questions plus élevées et plus fondamentales de l’art, comme on dit ; quelques maximes générales, quelques préceptes de tradition suffisaient ; mais on savait alors en diction, en fait de vrai et légitime langage, mille particularités et nuances qui vont se perdant et s’oubliant chaque jour dans une confusion, inévitable peut-être, mais certainement fâcheuse. […] Je crois bien qu’on s’occupe d’idées plus larges, de théories plus radicales et plus absolues ; mais il en est peut-être à ce sujet des littératures qui se décomposent, comme des corps organiques en dissolution, lesquels donnent alors accès en eux par tous les pores aux éléments généraux, l’air, la lumière, la chaleur : ces corps humains et vivants étaient mieux portants, à coup sûr, quand ils avaient assez de loisir et de discernement pour songer surtout à la décence de la démarche, aux parfums des cheveux, aux nuances du teint et à la beauté des ongles. […] Andrieux y déploya dans un cadre plus général les qualités précieuses de critique, de finesse délicate, de malice inoffensive et ingénieuse, qu’attestaient ses œuvres trop rares, et dont ses amis particuliers avaient joui.

309. (1895) Histoire de la littérature française « Première partie. Le Moyen âge — Introduction. Origines de la littérature française — 3. Causes générales de diversité littéraire. »

Causes générales de diversité littéraire. […] Mais on conçoit sans peine que la société cléricale, en vertu du principe qui régit son activité et lui fixe son objet, ne lasse œuvre de littérature que par exception, ou par accident ; elle a autre chose à faire eu général, que de réaliser la beauté pour le plaisir de l’esprit. […] Cet esprit français dont j’ai essayé de marquer les principaux traits, est né comme la patrie, comme la langue, entre Loire et Meuse, dans ce que Michelet appelle les « plaines décolorées du centre6 » : presque aucune particularité n’en modifie la définition générale dans cet ancien duché de France, qui en donne comme l’exacte moyenne, dans ce Paris surtout, qui, comme la première des bonnes villes, doit à ses marchands, ses étudiants, et, bientôt ses gens de palais, de paraître la propre et naturelle patrie de l’esprit bourgeois.

310. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « M. BALLANCHE. » pp. 1-51

Mais avant ce livre, et durant ses années les plus valétudinaires qui correspondent au temps du siège de Lyon, il s’était fort occupé de l’Épopée lyonnaise, grand poëme en prose, dont parle la Préface générale, et qui ne fut jamais imprimé. […] Quand le poëme parut l’année suivante, dans les pompes de la Restauration, un sentiment général y voulut reconnaître une princesse orpheline, la fille des rois. […] Ce serait ici le lieu, si nous le voulions, d’offrir une exposition générale de la doctrine de M. […] Le poëte ne s’est inquiété que d’évoquer l’esprit général de ces temps, de le faire circuler abondamment çà et là ; quant aux détails, il n’a pas cherché à les mettre en rapport exact avec les débris qui se sont conservés. […] Il n’a donc tenu qu’à se faire l’organe d’un certain esprit général et intime avec lequel il se sentait en communication, et il a pris d’avance son parti sur l’invraisemblance (je parle de l’invraisemblance poétique) du langage et de beaucoup de peintures.

311. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre premier. La structure de la société. — Chapitre III. Services locaux que doivent les privilégiés. »

Très belle lettre de Joseph de Saintignon, abbé de Domèvre, général des chanoines réguliers de Saint-Sauveur et résident. […] Cahiers des États généraux de 1789. […] Archives nationales, Procès-verbaux des États généraux de 1789, t.  […] L’exemple est donné par le roi, qui vend aux fermiers généraux, moyennant une somme annuelle, l’exploitation des principaux impôts indirects. […] — Procès-verbaux manuscrits des États généraux (Archives nationales), t. 

312. (1870) De l’intelligence. Deuxième partie : Les diverses sortes de connaissances « Livre troisième. La connaissance de l’esprit — Chapitre premier. La connaissance de l’esprit » pp. 199-245

Véracité générale du souvenir. — Étant donné le mécanisme du souvenir, son jeu est ordinairement sûr. — À l’image actuelle, nette et circonstanciée, correspond presque toujours une sensation antécédente, dont l’image est le reliquat. — À l’emplacement apparent de l’image refoulée correspond presque toujours l’emplacement réel de la sensation antécédente. — Véracité générale de la notion que nous avons de nos facultés. — L’expérience incessante la contrôle, la rectifie et la consolide. — Cohésion de ses éléments. — Il faut des circonstances exceptionnelles pour les disjoindre ou y en insérer d’étrangers. — Raison générale de la concordance de nos pensées et des choses. […] Elle provoque une secousse générale ou une sorte d’élancement aigu qui va s’affaiblissant, et cela fait un désordre qui dure. […] Or, on a vu que la sensation, après qu’elle a cessé, a la propriété de renaître par son image ; en règle générale, presque toute image nette et circonstanciée suppose une sensation antécédente ; de sorte que, si notre jugement est toujours faux en soi, il est presque toujours vrai par contrecoup. […] Par conséquent, la loi mentale qui lie nos deux pensées est générale comme la loi physique ou morale qui lie les deux faits. Mais ce n’est pas dès l’abord que nous la savons générale ; primitivement, elle agit en nous, sans que nous démêlions son caractère ou que nous sondions sa portée.

313. (1887) Études critiques sur l’histoire de la littérature française. Troisième série pp. 1-326

Boileau s’arrête au général, il ne va pas jusqu’à l’universel. […] Et le général, comme le fait très bien observer M.  […] Havet, le problème général de la casuistique. […] Ces caractères sont généraux avant d’être individuels. […] Peut-être aussi n’était-ce là qu’une allusion générale.

314. (1907) L’évolution créatrice « Chapitre II. Les directions divergentes de l’évolution de la vie. Torpeur, intelligence, instinct. »

Il y a simplement le mouvement général de la vie, lequel crée, sur des lignes divergentes, des formes toujours nouvelles. […] C’est affaire aux logiciens de chercher si ce sont là autant de relations irréductibles, ou si l’on ne pourrait pas les résoudre en relations plus générales encore. […] On est réduit alors à prendre les cadres généraux de l’entendement pour je ne sais quoi d’absolu, d’irréductible et d’inexplicable. […] Quelle est la propriété la plus générale de la matière brute ? […] Le thème général est « la nécessité de paralyser sans tuer » : les variations sont subordonnées à la structure du sujet sur lequel on opère.

315. (1905) Promenades philosophiques. Première série

Elle vibre, non d’elle-même, mais en obéissance à un mouvement général. […] C’est avec ces faits seuls qu’ils ont construit leur logique générale. […] A quoi est bonne la logique générale ? […] Toute idée générale est de la métaphysique. […] Il conseillait, comme on sait, l’emploi des termes les plus généraux.

316. (1730) Des Tropes ou des Diférens sens dans lesquels on peut prendre un même mot dans une même langue. Traité des tropes pp. 1-286

Telle est la modification ou diférence générale, qui fait que ces façons de parler sont des tropes. […] Nous avons vu dans la cinquiéme partie de cette grammaire, que la préposition supléoit aux raports qu’on ne sauroit marquer par les terminaisons des mots ; qu’elle marquoit un raport général ou une circonstance générale, qui étoit ensuite déterminée par le mot qui suit la préposition : or, ces raports ou circonstances générales sont presque infinies, et le nombre des prépositions est extrèmement borné ; mais pour supléer à celles qui manquent, on done divers usages à la même préposition. […] La synecdoque est donc une espèce de métonymie, par laquelle on done une signification particulière à un mot, qui dans le sens propre a une signification plus générale ; ou au contraire, on done une signification générale à un mot qui dans le sens propre n’a qu’une signification particulière. […] Il n’y a point dans la nature une matière générale dont l’art puisse faire tout ce qu’il veut : c’est ainsi qu’il n’y a point une blancheur générale d’où l’on puisse former des objets blancs. […] Chacune de ces idées générales, quoiqu’on en dise, est aussi positive que l’autre, puisqu’elle peut être également le sujet d’une proposition.

317. (1865) La crise philosophique. MM. Taine, Renan, Littré, Vacherot

Dans ce système, il n’y a que des vérités générales, d’une vraisemblance proportionnée au nombre des faits observés. […] Dans celle-là, le général n’est que la somme des faits particuliers, et l’abstrait qu’une partie ou un point de vue de ces mêmes faits. […] Dans d’autres cas, l’explication était tellement générale qu’elle équivalait à une défaite. […] Je viens de caractériser l’esprit général des doctrines de M.  […] Que diront-ils donc d’une théorie générale qui embrasserait toutes ces théories conjecturales ?

318. (1895) Histoire de la littérature française « Seconde partie. Du moyen âge à la Renaissance — Livre I. Décomposition du Moyen âge — Chapitre II. Le quinzième siècle (1420-1515) »

Décadence générale de la littérature française ; exceptions individuelles. […] Voilà le sentiment général qu’il a rendu avec une très extraordinaire et douloureuse vibration de tout son être, un frémissement de tous ses nerfs. […] Nous avons gagné à cette prudence d’avoir, au lieu de mémoires personnels, une histoire générale de la politique de Louis XI. […] Il y a des intérêts généraux et des sentiments publics, des intérêts privés et des passions personnelles : voilà les réalités qu’il aimait et sur lesquelles il opère. […] Et ainsi se retrouve chez lui le second des sentiments généraux du siècle.

319. (1919) L’énergie spirituelle. Essais et conférences « Chapitre VI. L’effort intellectuel »

Je partis de l’impression générale qui m’en était restée. […] Il faut les modifier plus ou moins, infléchir chacun d’eux dans la direction du mouvement général de la valse, surtout les combiner entre eux d’une manière nouvelle. […] Ainsi, quand je veux me remémorer un nom propre, je m’adresse d’abord à l’impression générale que j’en ai gardée ; c’est elle qui jouera le rôle de « schéma dynamique ». […] Dira-t-on que ce n’est pas une chance, que c’est la ressemblance des images qui fait qu’elles s’appellent les unes les autres, mécaniquement, selon la loi générale d’association ? […] AUDIBERT, Traité de mnémotechnie générale, Paris, 1840, p. 173.

320. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Le baron de Besenval » pp. 492-510

Cet échec final, qui concourt avec la chute de l’Ancien Régime et la défaite de la monarchie, a laissé une ombre sur la figure de Besenval : on se le représente volontiers malencontreux et disgracié de la fortune, comme les généraux vaincus devant les révolutions. […] La paix faite, il obtint de M. de Choiseul, qui, sans compter qu’il était ministre de la guerre, avait la charge de colonel général des Suisses d’en être nommé inspecteur, et, en cette qualité, il s’appliqua à y réformer la discipline, honteusement relâchée, et à remettre ce service sur un bon pied qui répondît à la vieille renommée du corps helvétique. […] Malgré son mérite réel comme officier général, et quoique ensuite, en poussant de tout son crédit au ministère de la guerre M. de Ségur, il ait travaillé indirectement à remettre sur un meilleur pied l’armée française, Besenval n’était pas un de ces militaires ardents qui le sont corps et âme et avant toute chose. Brave, aimant son métier, embrassant avec ensemble et précision ce qui concernait son corps particulier de troupes, il n’avait pas cette avidité à s’instruire dans toutes les branches qui dénote une nature de général proprement dit, l’homme destiné à de grands commandements. […] mais dans un politique et un ministre qui a charge d’intérêts généraux et qui devrait avoir à cœur la grandeur ou le bien de la chose publique, il y a là un vice radical de caractère et qui ruine les autres qualités : il rit de tout.

321. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Divers écrits de M. H. Taine — I » pp. 249-267

Taine, je le devinerai ou le conclurai d’une manière générale d’après ses écrits. […] Il a écrit quelque part dans un de ses derniers articles, ces paroles qui, bien qu’ayant un sens plus général là où il les dit, expriment évidemment l’impression qu’ont dû lui laisser les années pénibles de l’apprentissage : Aujourd’hui la lutte est partout, et aussi le sérieux triste. […] Ce qu’il faut lui répondre quand il s’exprime avec une affirmation si absolue, c’est que, entre un fait si général et aussi commun à tous que le sol et le climatu, et un résultat aussi compliqué et aussi divers que la variété des espèces et des individus qui y vivent, il y a place pour quantité de causes et de forces plus particulières, plus immédiates, et tant qu’on ne les a pas saisies, on n’a rien expliqué. […] Les formules générales n’attestent qu’une vue et un vœu de certains esprits ; il est mieux d’en être sobre et de ne les faire intervenir qu’à la dernière extrémité, car, trop fréquentes et présentées à tout moment, elles offusquent et elles écrasent. […] [1re éd.] entre un fait aussi général et aussi commun à tous que le sol et le climat

322. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Campagnes d’Égypte et de Syrie, mémoires dictés par Napoléon. (2 vol. in-8º avec Atlas. — 1847.) » pp. 179-198

Napoléon donne, au début, le portrait des généraux les plus distingués qu’il emmenait avec lui : Desaix, Kléber, Caffarelli du Falga. […] Il en commandait la principale division, s’y distingua, y rendit des services importants, y acquit la réputation d’un général habile. […] Peu d’instants après, le général entrait, s’asseyait au milieu d’eux, sur le même divan, et cherchait à leur inspirer de la confiance par des discussions sur le Coran, s’en faisant expliquer les principaux passages et montrant une grande admiration pour le Prophète. […] Pendant ce peu de temps, il avait pris Malte, conquis la basse et la haute Égypte ; détruit deux armées turques, pris leur général, leur équipage, leur artillerie de campagne ; ravagé la Palestine, la Galilée, et jeté les fondements, désormais solides, de la plus magnifique colonie. […] Ces deux volumes sont à joindre comme un complément indispensable aux neuf volumes des Mémoires publiés par les généraux Gourgaud et Montholon, et dont M. 

323. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Discours sur l’histoire de la révolution d’Angleterre, par M. Guizot (1850) » pp. 311-331

Mais il n’en a pas été exempt pour son compte, et il a autorisé ces manières générales de voir, par son ascendant. […] Ce n’est donc qu’avec une discrétion extrême qu’on devrait, ce me semble, proposer les remèdes généraux dans lesquels il n’entre que des idées. […] Si vous venez dire à un général d’armée : « N’adoptez que la méthode défensive, jamais l’offensive », en sera-t-il beaucoup plus avancé pour gagner une bataille ? […] Chez les historiens modernes, qui se sont élevés à des considérations générales et toutes raisonnées, la Providence intervient seulement par endroits et, si l’on peut dire, dans les grands moments. […] Mais ils comprenaient leur temps ; les vues et les efforts de leur politique étaient en harmonie avec ses besoins, avec l’état et le mouvement général des esprits.

324. (1868) Les philosophes classiques du XIXe siècle en France « Chapitre III : M. Maine de Biran »

Il n’est obscur que parce que ses phrases sont générales : remplacez-les par des exemples particuliers. […] Son style indique à chaque ligne la haine des faits particuliers et précis, l’amour de l’abstraction, l’habitude invincible de considérer uniquement et perpétuellement les qualités générales. […] Platon, à force d’étudier le même, l’un, la différence, et toutes les qualités générales, avait fini par déclarer que ces qualités sont des substances. […] Quoi qu’ils découvrent, ils ne font que passer du phénomène particulier au phénomène général. […] On vous renverra à l’idéologie, et on vous prouvera par l’analyse que le mot pouvoir n’est rien qu’une expression générale.

325. (1898) Manuel de l’histoire de la littérature française « Livre II. L’Âge classique (1498-1801) — Chapitre III. La Déformation de l’Idéal classique (1720-1801) » pp. 278-387

Nous n’essaierons pas non plus d’en dégager l’idée générale ou maîtresse, qui n’a jamais sans doute été très « générale » dans l’esprit sec, dur et borné de D’Alembert, ni très claire dans la cervelle fumeuse de Diderot [Cf., dans les Œuvres de Diderot, son article Encyclopédie] ; et qu’au surplus le nombre des collaborateurs appelés à en faire l’application ne pouvait manquer d’obscurcir encore. […] — « ce n’est pas, ajoute-t-il, comme on le dit, le scandale qui fut général ; c’est l’admiration et une sorte de terreur qui furent presque universelles ». […] celui de l’ancienne morale, dont le principe était de substituer en nous des motifs généraux d’action à l’impulsion personnelle de l’instinct ? […] Tous ces ouvrages, d’un caractère assez général, doivent d’ailleurs être complétés, contrôlés et reliés au moyen des recherches plus particulières de M.  […] Lemercier, dans son Cours analytique de littérature générale ; — Petitot, Répertoire du théâtre français, t. 

326. (1890) Conseils sur l’art d’écrire « Avertissement »

La méthode qu’il convient alors d’appliquer est celle de Mme de Maintenon, qui ne s’embarrassait point de théories ni de principes généraux. […] Le but que j’ai poursuivi est le but général de toute l’éducation : former la raison et le jugement. […] J’ai voulu fournir à de jeunes esprits l’occasion de réfléchir sur les moyens par lesquels ils pourront donner à leurs écrits la bonté qu’ils ont dû rêver souvent et désespérer d’atteindre, sur les meilleures et plus courtes voies par où ils pourront se diriger à leur but et nous y mener ; leur inspirer des doutes, des scrupules, des soupçons d’où leur méditation pourra tirer ensuite des principes et des certitudes, sur toutes les plus importantes questions que l’écrivain doit résoudre et résout, bon gré mal gré, sciemment ou non, par cela seul qu’il écrit d’une certaine façon ; donner le branle enfin à leur pensée, pour que, s’élevant au-dessus de l’empirisme, ils cherchent et conçoivent la nature et les lois générales de l’art d’écrire, pour qu’ils développent en eux le sens critique, et que, mettant la conscience à la place de l’instinct, ils arrivent à bien faire en le voulant et en le sachant.

327. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XII » pp. 100-108

Point de table, point d’équipages, toujours à cheval, même en en route, il mangeait chez le général. […] La reine et le cardinal, au milieu de l’enivrement général, ne négligeaient pas de diriger l’esprit et les premières affections du jeune roi. […] Le débordement était général.

328. (1818) Essai sur les institutions sociales « Préface » pp. 5-12

J’aurais pu marquer, par des notes au bas des pages, ces changements divers et mutuels, pour expliquer les modifications survenues dans la pensée générale de tous les partis, et surtout pour en faire remarquer le progrès. […] Lémontey, au contraire, né dans les temps qui ont immédiatement précédé la révolution, avait vu l’inquiétude et le malaise général des années, qui se sont écoulées depuis 1783 jusqu’en 1789 ; de plus, comme il était fort jeune à cette époque, il s’était accoutumé à penser que le dix-huitième siècle avait fondé des doctrines, établi des principes. […] Ce que les anciens appelèrent l’isonomie, et la conquête successive du droit commun seront expliqués, surtout dans la Formule générale, objet du cinquième volume de la présente publication.

329. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre XXXII. Des éloges des hommes illustres du dix-septième siècle, par Charles Perrault. »

Nous avons vu jusqu’à présent, que dès qu’un homme en place, roi ou prince, cardinal ou évêque, général d’armée ou ministre, enfin quiconque, ou avait fait ou avait dû faire de grandes choses, était mort, tout aussitôt un orateur sacré, nommé par la famille, s’emparait de ce grand homme, et après avoir choisi un texte, fait un exorde ou trivial ou touchant, sur la vanité des grandeurs de ce monde, divisé le mérite du mort en deux ou trois points, et chacun des trois points en quatre ; après avoir parlé longuement de la généalogie, en disant qu’il n’en parlerait pas, faisait ensuite le détail des grandes qualités que le mort avait eues ou qu’il devait avoir, mêlait à ces qualités des réflexions ou fines ou profondes, ou élevées ou communes, sur les vertus, sur les vices, sur la cour, sur la guerre, et finissait enfin par assurer que celui qu’on louait, avait été un très grand homme dans ce monde, et serait probablement un très grand saint dans l’autre. […] Enfin ceux qui sentent tout le prix des talents, et qui ont le goût des arts, voient avec intérêt, à la suite des princes, des généraux et des ministres, les noms des artistes célèbres ; de Lully, de Mansart, de Le Brun ; de ce Claude Perrault, qu’on essaya de tourner en ridicule, et qui était un grand homme ; de la Quintinie, qui commença par plaider avec éloquence, et qui finit par instruire l’Europe sur le jardinage ; de Mignard, dont ses parents voulurent faire un médecin, et dont la nature fit un peintre ; du Poussin, qui, las des intrigues et des petites cabales de Paris, retourna à Rome vivre tranquille et pauvre ; de Le Sueur qui mérita que l’envie allât défigurer ses tableaux ; de Sarrazin, qui, comme Michel-Ange, fut à la fois sculpteur et peintre, et eut la gloire de créer les deux Marsis et Girardon ; de Varin, qui perfectionna en homme de génie l’art des médailles ; enfin du célèbre et immortel Callot, qui eut l’audace, quoique noble, de préférer l’art de graver, à l’oisiveté d’un gentilhomme, et qui imprima à tous ses ouvrages le caractère de l’imagination et du talent. […] Les noms d’Apelle et de Phidias étaient peut-être aussi chers à la Grèce que celui de Thémistocle ; et de tous les généraux de l’Italie moderne, quel est celui dont le nom est mis à côté de Raphaël ?

330. (1904) En lisant Nietzsche pp. 1-362

On retrouve ici la lâcheté générale de l’homme. […] Dans l’ordre des idées générales, qu’en savez-vous ? […] C’est une espèce de neurasthénie générale et contagieuse. […] Le général est un et l’armée cent mille. […] J’ignore du reste s’il l’a dit ; mais cela est dans son sens général.

331. (1876) Chroniques parisiennes (1843-1845) « LXVII » pp. 264-265

Le général irrité, ambitieux, malingre, suivait un mauvais régime, et Volney se fait son médecin conseiller. […] Lemercier (Népomucène) racontait l’avoir vu, après un dîner chez Bonaparte, et tandis que celui-ci causait, l’arrêter par le bras au moment où il allait boire son café trop chaud, prendre la tasse, la poser sur un guéridon, et de temps en temps, quitter la conversation pour s’assurer du degré de chaleur de la tasse, puis la rapporter au général qui avait continué de causer avec feu sans trop s’apercevoir de ce manége. — La lettre publiée rentre bien dans le sens de cette anecdote.

332. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Histoire de la querelle des anciens et des modernes par M. Hippolyte Rigault — [Introduction] » pp. 132-142

Il s’ensuivit pendant deux années une mêlée des plus vives et des plus générales, qui se termina par un souper de réconciliation entre La Motte et Mme Dacier, sous les auspices de M. de Valincour (1716). […] Ma critique générale se réduit à peu près à ceci, que M.  […] Rigault, qui n’a jamais perdu de vue l’idée générale et la doctrine du progrès, a tenu, au contraire, à être le plus complet possible, à tout décrire successivement avec une curiosité égale, à suivre le fleuve, comme il l’appelle quelque part, dans toutes ses sinuosités, dans ses tours et retours, jusqu’à ce qu’il se perde dans l’idée générale et théorique qui est son océan.

333. (1866) Petite comédie de la critique littéraire, ou Molière selon trois écoles philosophiques « Première partie. — L’école dogmatique — Chapitre II. — De la poésie comique. Pensées d’un humoriste ou Mosaïque extraite de la Poétique de Jean-Paul » pp. 97-110

Danse sur la corde (À la fin la corde casse, et les danseurs tombent qui sur les pieds, qui sur la tête, au milieu du brouhaha général.) Le comique est le contraire du sublime. — Dansons ici, auteur et lecteurs, dansons, le balancier en main, sur la chaîne de fleurs d’un syllogisme bien tendu138. — Le sublime ambitionne les termes généraux qui ont de la noblesse : le comique doit donc rechercher les expressions individuelles à l’adresse des sens139. […] La réalité a pour symbole une planche partagée en cases sur laquelle le poète peut jouer le vulgaire jeu de dames ou le royal jeu d’échecs, selon qu’il ne possède que de simples morceaux de bois rond, ou des figures artistement taillées164 — Le besoin d’effacer en soi toute originalité pour se faire une surface unie a donné aux Français pour les termes généraux un goût contraire au vrai style comique. De même que les expressions générales, ils aiment les sentences générales165.

334. (1911) La morale de l’ironie « Chapitre II. Le rôle de la morale » pp. 28-80

Au reste, de quelque ordre et de quelque nature que soit le changement que l’on rêve, c’est là une loi générale. […] Nous sommes des bandits qui s’entendent pour mettre la main sur une proie, s’unissent, se concertent, sacrifient — pour un moment — à l’ordre général leurs convoitises personnelles. […] Son « devoir » et ses « droits » sont nettement établis par ses relations avec les autres organes, et par les besoins généraux de l’organisme. […] Quand un général n’a plus de prise sur ses hommes, si l’on blâme l’indiscipline du soldat, on est peut-être plus dur encore pour le chef qui manque d’autorité. […] C’est une des formes abstraites et générales de l’action de l’instinct social.

335. (1888) La critique scientifique « La critique scientifique — Analyse sociologique »

Le caractère général industriel et positif de l’Italie actuelle n’est plus celui que constatait Stendhal, au commencement de ce siècle, ni celui de ses Chroniques italiennes ou des Mémoires de Benvenuto Cellini. […] Il est inutile de multiplier ces exemples généraux que l’on ne saurait rendre bien concluants à cause de l’absence même de caractères nationaux collectifs qui soient nets et que l’on puisse opposer. […] L’expérience générale ne se si guère trompée sur ce point ; ce qu’on cherche à connaître d’un homme pour le juger, ce ne sont pas ses occupations, ce sont ses goûts. […] Il a laissé des études sur les Pygmées, les Polynésiens, le transformisme et les « précurseurs » de Darwin, « l’histoire générale des races humaines », ou encore la question de « l’unité de l’espèce humaine ». […] Muller (Allgemeine Ethnologie) tout en admettant (§ 18) l’influence de l’habitat sur les caractères physiques et moraux, ne peut donner de cette action que des exemples extrêmement vagues et généraux.

336. (1870) La science et la conscience « Chapitre I : La physiologie »

Jusque-là, le problème avait été résolu d’une manière vague ; on n’avait fait appel qu’à une expérience banale qui ne portait que sur des faits significatifs sans doute pour la thèse générale, mais sans suite et sans conséquence pour une véritable doctrine scientifique. […] Y a-t-il pour chacune de ces fonctions de relation, sensation, perception, entendement, volonté, faculté motrice, un organe spécial et distinct dans l’organisme général du système nerveux ? […] Vulpian et Lhuys, embrassé dans une doctrine générale l’ensemble des phénomènes de la vie psychique ; mais presque tous, même les moins disposés en faveur des idées matérialistes, appliquent ce que nous appelons la méthode physiologique aux diverses questions de psychologie particulière, comme le libre arbitre, la moralité, la folie, le génie, l’éducation. […] Vulpian, Leçons sur la physiologie générale comparée du système nerveux. […] Physiologie générale et comparée du système nerveux, p. 105 et suiv.

337. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « Journal de Dangeau. tomes III, IV et V » pp. 316-332

Je demande aujourd’hui à poursuivre cette espèce d’analyse pour les autres volumes, et à rendre quelque chose de l’effet général qui résulte d’une lecture suivie. […] Les questions de cérémonial et de salut militaire ne sauraient être oubliées : « En arrivant ici (au camp de Lamsheim), Monseigneur vit toute l’infanterie en bataille sous une ligne à quatre de hauteur… M. de La Feuillée, lieutenant général, qui était demeuré ici pour commander l’infanterie, salua Monseigneur de l’épée, à cheval. » Monseigneur, toutefois, dans cette campagne, s’il ne fait rien d’extraordinaire, ne manque à rien d’essentiel : il remplit les devoirs de son métier, il fait manœuvrer son monde. […] C’est l’impression générale seulement que je veux donner. […] Il renonce désormais à être général et à aller de sa personne à la guerre. […] Le roi, qui a retranché une moitié sur les étrennes de ses enfants (1694) et deux cents chevaux de son écurie, cherche à étendre ses économies sur tout ce qui est dépenses de luxe, et sur les courriers que les généraux multipliaient sans nécessité pour la moindre affaire, et sur les Gobelins dont on a congédié tous les ouvriers.

338. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Première partie. De la littérature chez les anciens et chez les modernes — Chapitre XVII. De la littérature allemande » pp. 339-365

Les Anglais sont moins indépendants que les Allemands dans leur manière générale de considérer tout ce qui tient aux idées religieuses et politiques. […] Le caractère général de la littérature est le même dans tous les pays du Nord ; mais les traits distinctifs du genre allemand tiennent à la situation politique et religieuse de l’Allemagne. […] Le vrai talent a peine à se reconnaître au milieu de cette foule innombrable de livres : il parvient à la fin, sans doute, à se distinguer ; mais le goût général se gâte de plus en plus par tant de lectures insipides, et les occupations littéraires elles-mêmes doivent finir par perdre de leur considération. […] Je n’ai point prétendu faire une analyse de tous les livres distingués qui composent une littérature ; j’ai voulu caractériser l’esprit général de chaque littérature dans ses rapports avec la religion, les mœurs et le gouvernement. […] Les odes de Klopstock, les tragédies de Schiller, les écrits de Wieland, le théâtre de Kotzebue, etc., exigeraient plusieurs chapitres, si l’on voulait approfondir leur mérite littéraire ; mais ce travail, comme je l’ai déjà dit, ne pouvait entrer dans le plan général de mon ouvrage.

339. (1900) L’état actuel de la critique littéraire française (article de La Nouvelle Revue) pp. 349-362

L’état actuel de la critique littéraire française Une opinion qu’on peut tenir pour générale, aujourd’hui, est que nous avons encore des critiques, et même en nombre considérable, — mais que nous n’avons plus une critique française. […] Et ils ont établi le système des réclames payées, qui est aujourd’hui général, au point qu’il est quasi impossible de dire du bien d’un volume sans rétribution du journal par l’éditeur ou l’auteur. […] L’esprit scolaire et académique se meurt devant le grand sentiment d’indépendance générale qui inspire toute la fin de ce siècle. […] Ceux-là fuient la nécessité de leur état en se réfugiant dans l’idée générale aussitôt qu’ils peuvent la faire entrer dans trois lignes avarement économisées sur l’insipidité du roman ou du vaudeville dont il faut parler. […] Paul Adam, outre l’abondante et luxuriante fresque de ses romans byzantins ou modernes, donne depuis quelques années aux journaux une Critique des mœurs et des articles de politique générale autant que l’idéologie pure, qui témoignent d’un esprit supérieurement armé pour l’essai critique ; sa lumineuse intelligence touche à toutes choses, c’est un incomparable associateur d’analogies, une conscience pour la critique comparée.

340. (1897) Le monde où l’on imprime « Chapitre VIII. Les écrivains qu’on ne comprend pas » pp. 90-110

Le talent, notre auteur le définit : « pouvoir de réduire un tempérament original aux lois générales de l’art, au génie permanent de la langue ». […] Qu’est-ce que les lois générales, de l’art ? […] Le maniement poétique des concepts n’est pas le fait de nous poètes familiers, qu’aussi bien les idées générales « n’étouffent pas »… Ils auraient tort, dit-on, de s’adresser aux facultés logiques, c’est à la sensibilité, etc. — Mais qui dit ou qui fait le contraire ? […] Mon vieux maître de rhétorique Eugène Réaume, l’éditeur d’Agrippa d’Aubigné, disait en ses matins de découragement : « Messieurs, il serait temps qu’on organisât une classe de Lettres spéciales — comme on fait pour les jeunes gens aptes aux études scientifiques, — un cours aussi fermé et aussi sérieux que les Mathématiques spéciales. » Les décadences générales coïncident toujours avec quelques exceptions de culture intensive. […] Une création de l’esprit — drame de Marlowe, fugue de Bach, théorème de Fermat — n’est pas obscure si elle est intelligible (intelligible signifie, non pas « évident », mais « qui peut être compris », sans préjuger l’importance de l’initiation générale et de l’application spéciale nécessaires au « récepteur »).

341. (1881) La psychologie anglaise contemporaine « M. Bain — Chapitre II : L’intelligence »

Il sait que chaque illustration est une preuve à l’appui de quelque forme particulière de l’association des idées ; au-dessus des faits, il voit les lois partielles ; au-dessus des lois partielles, il voit la loi générale, fondamentale, cette propriété irréductible de l’intelligence, en vertu de laquelle nos idées s’attirent et s’enchaînent. […] C’est grâce à ce pouvoir de reconnaître le semblable dans le dissemblable, que se produit ce que nous appelons idées générales, principes. […] Quand la connaissance est une affirmation, il faut au moins deux choses connues, et l’on fait rentrer ce couple sous une troisième propriété très générale : par exemple, la coexistence ou la succession. […] Bain sous ces quatre titres : Classification, abstraction, généralisations de notions, noms généraux, définitions : la classification consistant à grouper les objets d’après la ressemblance ; de là résulte une généralisation ou idée abstraite qui représente ce qu’il y a de commun dans le groupe ; et une définition qui exprime les caractères communs de la classe. […] La loi générale de ce mode d’association s’établit ainsi : « Des actions, sensations, pensées, émotions passées sont plus aisément rappelées, quand on les associe par contiguïté ou ressemblance avec plus d’une impression ou d’un objet présent. » Les associations composées résultent de contiguïtés seules, de ressemblances seules, de contiguïtés et ressemblances réunies.

342. (1936) Réflexions sur la littérature « 6. Cristallisations » pp. 60-71

(les fortes tentatives de Taine et de Sorel pour fixer la psychologie de l’époque révolutionnaire appartiennent à la psychologie comme celles de Balzac et de Stendhal pour fixer celle de l’époque où ils vivaient, et toute la psychologie bien faite d’une époque apporte une lumière sur la nature générale de l’homme.) — Joignez-y même (vous ne serez pas au bout, mais vous atteindrez au moins un chiffre consacré) comme une septième lignée la plus ancienne, la plus obscure, la moins écrite, et, dans les temps modernes, la source vraie des autres : tout l’ordre religieux qui cristallise dans l’église catholique autour de la confession auriculaire et qui pousse encore au XIXe siècle, de Lamennais à l’abbé Bremond, de vigoureux rameaux. […] Je crois bien qu’il est le seul aujourd’hui à représenter un type complet de critique esthétique, à qui sont familières chacune des trois branches de l’art, plastique, littéraire et musicale, et qui sait constamment les réunir par des lianes souples d’idées générales. […] L’art, la critique, à plus forte raison la critique esthétique générale, exigent cette préoccupation. […] L’amour parfait arrive à noyer les instants de la possession charnelle dans une telle constance et une telle habitude de possession générale qu’ils cessent presque d’être des instants privilégiés, et ne participent plus qu’à ce privilège général d’une vie nombreuse, élastique et tendue, qu’ils relient ces « conversations » tout autant que ces conversations les relient.

343. (1796) De l’influence des passions sur le bonheur des individus et des nations « Introduction »

Alors même que le cœur est à jamais déchiré par les blessures qu’il a reçues, l’esprit peut encore, après un certain temps, s’élever à des méditations générales. […] Enfin, les caractères passionnés sont les seuls qui, par de certains points de ressemblance, peuvent être tous l’objet des mêmes considérations générales. […] Il faudrait développer et ces raisons, et beaucoup d’autres encore, exceptant de part et d’autre celles qu’on croit tirer du droit pour ou contre ; car le droit en politique, c’est ce qui conduit le plus sûrement au bonheur général ; mais l’on doit exposer sincèrement tous les moyens de ses adversaires quand on les combat de bonne foi. […] À la fin d’un semblable ouvrage, cependant, sous quelque point de vue général que ces grandes questions fussent présentées, il serait impossible de ne pas finir par les particulariser dans leur rapport avec la France et le reste de l’Europe. […] On ne s’avise d’appliquer aucune de ces idées générales à sa situation particulière ; tout ce qui vous arrivera, tout ce qui vous entoure doit être une exception ; ce qu’on a d’esprit n’a point d’influence sur la conduite : là où il y a un cœur, il est seul écouté ; ce qu’on n’a pas senti soi-même est connu de la pensée, sans jamais diriger les actions.

344. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre troisième. L’esprit et la doctrine. — Chapitre IV. Construction de la société future »

On isole une donnée simple, très générale, très accessible à l’observation, très familière, et que l’écolier le plus inattentif et le plus ignorant peut aisément saisir. […] Chez Marmontel, Florian, dans toute la petite littérature qui précède ou accompagne la Révolution, dans tout le théâtre tragique ou comique, le personnage, quel qu’il soit, villageois inculte, barbare tatoué, sauvage nu, a pour premier fond le talent de s’expliquer, de raisonner, de suivre avec intelligence et avec attention un discours abstrait, d’enfiler de lui-même ou sur les pas d’un guide l’allée rectiligne des idées générales. […] Si telle est la chance pour la trame et le canevas grossier, pour les gros fils à peu près solides de notre intelligence, quels doivent être les hasards pour la broderie ultérieure et superposée, pour le réseau subtil et compliqué qui est la raison proprement dite et se compose d’idées générales ? […] Les idées générales et le raisonnement suivi ne se rencontrent que chez une petite élite. […] Accoutumé au grand air et à l’exercice des membres, s’il reste immobile, au bout d’un quart d’heure son attention défaille ; les phrases générales n’entrent plus en lui que comme un bruit ; les combinaisons mentales qu’elles devraient provoquer ne peuvent se faire.

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