En un mot, étant admis qu’elles sont les moyens nécessaires pour atteindre le but poursuivi, la question reste tout entière : Comment, c’est-à-dire de quoi et par quoi ces moyens ont-ils été constitués ? […] Les principes qui précèdent méconnaissent si peu le caractère spontané de tout vivant que, si on les applique à la biologie et à la psychologie, on devra admettre que la vie individuelle, elle aussi, s’élabore tout entière à l’intérieur de l’individu. […] C’est une œuvre d’art, une machine construite tout entière de la main des hommes et qui, comme tous les produits de ce genre, n’est ce qu’elle est que parce que les hommes l’ont voulue telle ; un décret de la volonté l’a créée, un autre décret la peut transformer.
Il y a de grands auteurs qui n’ont pas besoin du tout de leur biographie pour qu’ils soient expliqués ; on peut les comprendre tout entiers sans rien savoir de leur existence. […] Ce qu’il y a de certain, c’est que de ses études, qu’il les ait faites en partie à Paris ou qu’il les ait faites entières à Château-Thierry, il n’a pas gardé un très bon souvenir. […] Les Contes furent accueillis avec un véritable enthousiasme ; ils eurent des éloges — il ne faut pas le dissimule — des plus grandes et des plus honnêtes dames du temps, comme Mme de Sévigné, Mme de La Fayette, et il y eut — ce qui surprend davantage — il y eut un grand éloge écrit tout entier de la digne main et de la grave main de Chapelain.
Le xvie siècle était pour Mézeray ce que le xviiie a été pour nous : il en sortait, il en était nourri, il en savait les traditions, le langage ; il en avait ouï raconter les derniers grands événements à des vieillards ; les souvenirs et l’esprit lui en venaient de tous les côtés ; nul n’était plus propre que lui à en retracer une histoire entière, et c’est ce qu’il a fait pendant l’étendue d’un in-folio et demi. […] Je la donne ici en entier à cause de la généralité du projet et du plan qui fait honneur à Mézeray, bien qu’il fût sans doute trop paresseux à la fois et trop cassant pour l’exécuter et le mener à bonne fin31 : Louis, etc.
Voici en son entier une petite lettre railleuse, et digne, par le tour, d’un Pline le Jeune : Au révérend John Newton Olney, 16 avril 1780. […] Mais le vrai Cowper ne reparaît et ne se dessine tout entier que dans les vers qui suivent immédiatement.
Avec une intelligence forte et un travail vigoureux, on pouvait sans doute tenir le grand chemin, parcourir la route entière des études classiques, et au plus vite, en toute hâte, se diriger encore à temps, si l’on en avait la volonté, vers les études spéciales, mathématiques et autres, qui ouvraient l’entrée des grandes écoles savantes ; mais la question alors était tout ou rien, et un faux pas au terme faisait échouer. […] Parcourant dans le plus grand détail le cercle entier des études, depuis les classes les plus humbles jusqu’à celles de rhétorique et de logique, il s’attache à exposer dans quel esprit, dans quelle mesure chaque ordre d’enseignement doit être dirigé et distribué.
M. d’Argenson l’aîné fut d’abord traité par le monde comme il l’avait été par son père, et on l’avait surnommé d’Argenson la bête pour le distinguer de son frère l’homme d’esprit : il n’était que sérieux, réfléchi, et plus occupé d’être que de paraître, tandis que son frère était tout entier tourné à percer et à plaire. […] Ils se plaignaient, entre autres choses, de ce que mon père menait avec lui à l’auditoire (à l’audience) un grand chien à collier, à peu près comme était le mien, mort depuis peu et nommé Calot… Et il continue sur ce ton, en passant aux commencements de la fortune et de l’élévation de son père, due tout entière à son mérite et à ses talents dès qu’ils furent connus.
A peine le prince de Condé se fut aperçu de l’absence de son fils et de celle du duc de Longueville, qu’oubliant pour ainsi dire, si l’on ose parler ainsi du plus grand homme du monde, son caractère de général, et s’abandonnant tout entier aux mouvements du sang et de l’amitié tendre qu’il portait à son fils et à son neveu, accourut ou pour les empêcher de s’engager légèrement, ou pour les retirer du mauvais pas où leur courage et leur peu d’expérience auraient pu les embarquer ; il les trouva avec tous les volontaires aux mains avec les ennemis, qui, se voyant pressés et profitant du terrain qui leur était favorable, avaient tourné brusquement… « Cette action fut fort vive et fort glorieuse ; mais la blessure du prince de Condé au poignet, la mort du duc de Longueville et les blessures des ducs de La Rochefoucauld, de Coislin et de Vivonne, du jeune La Salle, de Brouilly, aide-major de mes gardes du corps, etc., et de plusieurs autres gens de qualité, en diminuèrent fort le prix et me donnèrent une grande mortification, particulièrement la blessure de M. le Prince, tant à cause de sa naissance et de son mérite singulier que de la faiblesse de son tempérament, exténué par la goutte, que j’appréhendais ne pouvoir pas résister à la violence du mal. […] Un jugement définitif ne sera possible sur lui (s’il l’est jamais) qu’après sa pleine et entière carrière, si brusquement rompue par la mort.
I En l’année 1580, Montaigne qui, depuis neuf ans déjà, s’était affranchi des devoirs d’une bien grave profession et s’était retiré dans son manoir champêtre pour s’y vouer tout entier au culte des doctes Sœurs, se voyant plus libre que jamais par la publication de la première édition de ses Essais, qui est de cette année même, entreprit un long voyage et voulut faire son tour d’Allemagne, de Suisse et d’Italie. […] Il juge très bien, à première vue, du changement de configuration du sol, et de l’ensevelissement de l’ancienne Rome : la forme des montagnes et des pentes n’est plus du tout la même, et il tenait pour certain « qu’en plusieurs endroits nous marchions sur la tête des vieux murs et sur le faîte des maisons tout entières. » La liberté de vie à Rome lui paraît bien différente de celle de Venise : la sûreté y manque.
pensais-je en moi-même, je suis donc au milieu de cette Thessalie, terre classique des enchantements et célèbre à ce titre dans l’univers entier ! […] Mais, au commencement de la nuit, Vénus revient du repas de noces, abreuvée de rasades, répandant une odeur de baume, et le corps entier ceint de roses éblouissantes.
L’histoire de Charles-Quint tout entière, dont Robertson semblait avoir élevé le monument définitif, a été renouvelée de nos jours par la connaissance directe des sources et des papiers d’État contenus dans les archives des divers pays, régis et gouvernés par ce puissant monarque ; l’étude des diverses branches dont se compose, en si grand nombre, ce règne étendu et complexe est devenue l’objet d’une savante émulation, et en Espagne, et à Vienne, et en Belgique surtout par les exactes et si essentielles publications de M. […] Ses amis, sa famille apposaient des objections ou des délais à l’entier accomplissement de son vœu, au moins en ce qui était de la dignité impériale.
J’ai sous les yeux trois lettres de lui à Garrick, le grand tragédien, celui qui, vers le milieu du dernier siècle, ressuscita Shakespeare tout entier aux yeux des Anglais étonnés et le remit en plein honneur. […] Deleyre n’a contre lui que son organisation trop nerveuse, trop susceptible ; il ne lui faut d’autres remèdes que « de la dissipation, des soins, de la vigilance pour les choses essentielles, et un entier abandon, une insouciance vraiment sage dans les détails : « C’est mon fort de le prêcher en vers et en prose.
Il me semble qu’il y a lieu de tout maintenir, de ne rien sacrifier, et en rendant plein hommage et entière révérence aux grandes forces humaines qui, semblables aux puissances naturelles, éclatent comme elles avec quelque étrangeté et quelque rudesse, de ne cesser d’honorer ces autres forces plus contenues qui, dans leur expression moins semblable à une explosion, se revêtent d’élégance et de douceur. […] Taine, tel qu’il s’offre dans cette première forme une et entière, subsistera comme une des œuvres les plus originales de notre temps.
Ces quatre ou cinq années de plus lui ont manqué pour entière et dernière école : elle y a suppléé, et amplement, par une mort sublime ; l’héroïsme t’a dispensée et exemptée de trop d’expérience. […] Mais le mieux est de chercher le morceau entier dans la Revue française du mois d’octobre 1838.
On est même allé jusqu’à contester cette entière probité et délicatesse qu’aucun des contemporains n’avait soupçonnée, et, s’autorisant d’un passage des Mémoires du duc de Luynes, on a dit que « l’incapacité complète de Saint-Simon en matière d’affaires ne l’empêcha pas, à un moment donné, de faire perdre cinquante pour cent à ses créanciers, en substituant habilement 40,000 livres de rente à sa petite-fille, la comtesse de Valentinois ». […] Avouez toutefois qu’on profite grandement de lui pour connaître les personnages, même lorsqu’on ne les accepte pas tout entiers de sa main tels qu’il les fait : il vous procure de belles avances pour les peindre, même lorsqu’on ne le suit pas jusqu’au bout.
Le problème moral que soulève le personnage de Talleyrand, en ce qu’il a d’extraordinaire et d’original, consiste tout entier dans l’assemblage, assurément singulier et unique à ce degré, d’un esprit supérieur, d’un bon sens net, d’un goût exquis et d’une corruption consommée, recouverte de dédain, de laisser-aller et de nonchalance. […] Ici deux points de vue, deux façons de sentir, qui avaient l’une et l’autre leur raison d’être et leur légitimité, sont en présence, et l’histoire ne peut que les constater sans trancher le différend : il y avait la manière héroïque et patriotiquement guerrière d’entendre la défense du sol, la résistance nationale ; de faire un appel aux armes comme aux premiers jours de la Révolution, et, ainsi que Napoléon l’écrivait à Augereau, de « reprendre ses bottes et sa résolution de 93 » ; mais il y avait aussi chez la plupart, et chez les hommes de guerre tout les premiers, fatigue, épuisement, rassasiement comme après excès ; il y avait partout découragement et dégoût, besoin de repos, et, dans le pays tout entier, un immense désir de paix, de travail régulier, de retour à la vie de famille, aux transactions libres, et, après tant de sang versé, une soif de réparation salutaire et bienfaisante.
Et notez que cet éclat survient dans une des parties les moins importantes du sermon, dans le développement d’un argument accessoire Le style, souvent excellent, n’est pas toujours d’une entière pureté (c’est une critique que l’on peut se permettre, puisque le Père Monsabré apprend par cœur et récite ses discours, comme Massillon et comme les neuf dixièmes des orateurs). […] Je n’ai pas assez entendu le Père Monsabré pour définir son talent avec une entière sécurité.
la pensée est le produit du corps entier. […] Claude aime Christine, puis est ressaisi tout entier par son art : c’est aussi simple que cela.
Il y a çà et là dans le recueil quelques pages extraites en entier des ouvrages de Jean Paul, et c’est là que sont les plus belles ; mais elles tiendraient trop de place. […] Ce n’est point seulement dans le détail que les poètes de cette école cultivent le symbole : ils ont quelquefois jeté dans ce moule une pièce tout entière et de grande étendue.
Des séries entières de psaumes étaient consacrées à chanter le bonheur de cheminer ainsi en famille 197, durant plusieurs jours, au printemps, à travers les collines et les vallées, tous ayant en perspective les splendeurs de Jérusalem, les terreurs des parvis sacrés, la joie pour des frères de demeurer ensemble 198. […] les livres XVII et XVIII entiers, et B.
Te dirai-je ma pensée entière, séducteur que quelques-uns proclament divin parce que tu es féminin, toi dont la langue lumineuse fait rêver de loin aux splendeurs de Platon et qui, regardé de près, n’es plus que madame Renan ? […] Se parodier soi-même, manière aimable de se faire accepter tout entier.
Guizot ne devait se sentir à l’aise et comme chez elle que sur la scène parlementaire, au cœur des luttes politiques : c’est là qu’il devint tout entier lui-même et qu’il grandit. […] Il y envisage la révolution d’Angleterre dans tout son ensemble, depuis l’origine des troubles sous Charles Ier jusqu’après Guillaume III, et jusqu’à l’entière consolidation de l’établissement de 1688.
Si jamais vous allez en Perse, dans ce pays de vieille civilisation, qui a subi bien des conquêtes, bien des révolutions religieuses, mais qui n’a pas eu, à proprement parler, de Moyen Âge, et dans lequel certaines traditions se sont toujours conservées, prenez un homme d’une classe quelconque, et dites-lui quelques vers de Ferdousi : il y a chance, m’assure-t-on, pour qu’il vous récite de lui-même les vers suivants ; car les musiciens et chanteurs vont en redisant à plein chant des épisodes entiers dans les réunions, dans les festins. […] Au premier rayon de l’aurore, Roustem prit un onyx qu’il portait au bras, et qui était célèbre dans le monde entier ; il le donna à Tehmimeh en disant : Garde ce joyau, et si le ciel veut que tu mettes au monde une fille, prends cet onyx et attache-le aux boucles de ses cheveux sous une bonne étoile et sous d’heureux auspices ; mais si les astres t’accordent un fils, attache-le à son bras, comme l’a porté son père… Là-dessus Roustem part au matin, monté sur son cheval Raksch ; il s’en retourne vers l’Iran, et, durant des années, il n’a plus que de vagues nouvelles de la belle Tehmimeh et du fils qui lui est né ; car c’est un fils et non une fille.
Elle reste des semaines entières sans nouvelles de son ami ; elle n’apprend plus ses marches et démarches que par les gazettes ; son cœur est froissé : Que de choses à lui reprocher ! […] Quand l’âge et les maladies ont diminué son goût, j’ai été longtemps sans m’en apercevoir : j’aimais pour deux ; je passais ma vie entière avec lui, et mon cœur, exempt de soupçons, jouissait du plaisir d’aimer et de l’illusion de se croire aimé.
Voilà comme il se juge, et il avait raison à cette date ; cet homme de vingt-cinq ans sent qu’il n’est rien encore et qu’il n’a pas même commencé : « Quand des personnes d’un certain rang, fait-il remarquer, remplissent la moitié d’une carrière, on leur adjuge le prix que les autres ne reçoivent qu’après l’avoir achevée. » Et il s’indigne de cette différence de mesure, comme si l’on jugeait les princes d’une nature moindre que les autres hommes, et moins capables d’une action entière. […] Ce cœur de géomètre, si sensible à l’amitié, ne craint pas de s’épancher dans l’âme de Frédéric, d’y verser son affliction et presque ses sanglots, et le roi lui répond en ami et en sage, par deux ou trois lettres de consolation philosophique, qu’il faudrait citer tout entières.
Toute sa personne avait de la roideure, de l’audace, un air de décision et de certitude auquel il manqua toujours quelque chose pour être de l’autorité entière et véritable. […] Elle était entière du temps de La Harpe, et nul n’a plus que lui contribué à l’environner de raisons justes et lumineuses.
Quoi qu’il en soit du procédé, on a cette suite de lettres, auquel il s’en est ajouté depuis beaucoup d’autres, et plus anciennes, et plus récentes ; de telle sorte que la vie de Courier se retrouve peinte en entier dans sa correspondance. […] Je pleure encore un joli Hermès enfant que j’avais vu dans son entier, vêtu et encapuchonné d’une peau de lion, et portant sur son épaule une petite massue.
Après un premier passage très rapide à Rome, d’où il est parti pour visiter Naples et ses environs, il revient dans cette capitale du monde chrétien, et c’est là que pendant des mois il vit chaque jour de jouissance en jouissance et achève de se former au grand goût, dont elle offre seule l’entier modèle. […] Je n’essaierai pas d’en donner une complète idée : entre autres projets, par exemple, il avait celui d’une histoire des temps incertains et fabuleux jusqu’au règne de Cyrus : « Car, vous savez, disait-il en riant, que je traite tous les siècles postérieurs de petits jeunes gens. » L’histoire du président de Brosses comme magistrat, comme érudit, durant les trente-sept années qui s’écoulèrent depuis son retour d’Italie jusqu’à sa mort, est tout entière dans l’ouvrage de M.
Qui aurait dit que la Providence eût choisi un poète pour bouleverser le système de l’Europe et changer en entier les combinaisons politiques des rois qui y gouvernent ? […] Si l’on voulait prendre à cœur toutes les infortunes des particuliers, la vie humaine entière ne serait qu’un tissu d’afflictions.
Le vers régulier compte l’e à valeur entière quoiqu’il ne s’y prononce point tout à fait, sauf à la fin d’un vers. […] Un continuateur de Banville pourrait m’objecter qu’avec le vers libre la difficulté ne fait que changer et que l’aphorisme de Banville demeure entier : soit : si le vers pseudo-classique ou le vers romantique faible ne se distingue que par la rime, et peut être confondu avec de la prose, le vers libre, plus flottant, pourra être confondu avec une prose poétique, rythmée et nombrée, avec une sorte de musique.
L’art tout entier est chose de luxe ; l’activité esthétique ne se subordonne à aucune fin utile ; elle se déploie pour le seul plaisir de se déployer. […] Entraîné par la collectivité, l’individu se désintéresse de lui-même, s’oublie, se donne tout entier aux fins communes.
Aujourd’hui, cette fresque nous apparaîtra tout entière. […] La preuve est faite depuis ce jugement qui reste entier.
Cette forme élargie et flottante de la Critique moderne, qui, à propos d’un ouvrage à serrer dans son étau, peut embrasser le monde tout entier, cette forme qui n’était plus le livre et qui n’était pas non plus l’article de journal, était née. […] … Du reste, pour bien faire apprécier cette grande entente des choses et cette grande manière de les exposer et de les discuter qui distinguent particulièrement l’éloquent essayist de la Revue d’Édimbourg, il faudrait donner des passages entiers des Essais que M.
Mais les Fragments sur la Russie, qui ont suivi la Correspondance diplomatique datée de Turin, nous redonnèrent, eux, du de Maistre pur, dans la radicale beauté de sa pensée et dans la simplicité de ce style, unique de transparence, qui est comme la vue immédiate de l’idée elle-même… Enfin, voici une publication, — qui n’est peut-être pas encore la dernière, — et qui prouve autant que toutes les autres l’inépuisabilité de ce génie qu’on croyait posséder tout entier, et qui repart en jets inattendus de publicité quand on se disait qu’il n’y avait plus rien à attendre de la source cachée, semblable à un puits artésien qui se remettrait à jaillir à mesure qu’on ôterait les pierres qui le couvrent. […] ce qui me frappe d’abord et ce qui frappera tout le monde, c’est cette unité de pensée qui commence, et qui, sortie des abîmes de l’homme et de son être, va prendre l’homme tout entier et s’asservir sa vie.
« Chateaubriand. » En citant de semblables éloges à mon sujet, je n’ai qu’une intention et qu’un désir : c’est de montrer que si, la veille ou le lendemain d’une telle lettre, nous venions à louer M. de Chateaubriand, comme il était tout naturel de le faire dans le milieu de société où nous vivions près de lui, nous ne faisions nullement pour cela la cour à un puissant lettré dont nous eussions besoin, ni une platitude envers un grand nom idolâtré ; il pouvait y avoir de notre part quelque complaisance assurément, mais cette complaisance n’était pas tout entière de notre côté, et elle était elle-même partagée.
De là vient qu’il court des journées entières après des inconnus qui ont quelque chose de singulier dans leur marche, dans leur costume, dans leur ton et dans leur regard ; qu’il réfléchit avec profondeur sur une circonstance contée légèrement et que personne ne trouve digne d’attention ; qu’il rapproche des choses complètement antipodiques et qu’il en tire des comparaisons extravagantes et inouïes. » « Lélio s’écria à haute voix : « Arrêtez, c’est là notre Théodore.
En ce moment surtout, il semble que pour l’Europe entière les anciennes générations expirent dans la personne de leurs plus augustes représentants ; il se fait un renouvellement solennel ; les têtes sacrées des maîtres de l’intelligence et de l’art tombent de toutes parts moissonnées.
Il est faux, par exemple, que Dampré ait pu attendre si longtemps pour s’expliquer avec Émilie ; avec ces sortes d’assiégeants, les années entières ne se passent pas dans des manœuvres si discrètes et si respectueuses.