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2496. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « Méditations sur l’essence de la religion chrétienne, par M. Guizot. »

La création du monde et de l’homme, voilà la réponse chrétienne, et non pas l’éternité du monde, c’est-à-dire sa formation et ensuite sa transformation (une première matière étant donnée) en vertu de lois naturelles, éternellement existantes, constantes même dans leur infinie progression et ne dérivant que de soi. […] Ce point donné, tous les autres suivent, pour peu qu’on soit logique et conséquent. […] Je n’ai pas fini : tout homme, par cela même qu’il vit, a une secrète horreur de l’anéantissement total ; on se donne le change comme on peut ; on veut au moins lutter contre l’oubli, laisser un souvenir, un nom. […] Dans ce que nous lisons chaque matin, combien de fois la parole donne un corps à ce qui n’en a pas ! […] Je crois pouvoir me permettre ici de donner la lettre que j’ai reçue de M. 

2497. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « Observations sur l’orthographe française, par M. Ambroise »

Dans l’édition qu’il donna, en 1664, de son Théâtre revu et corrigé, il mit en tête un Avertissement où il exposait ses raisons à l’appui de certaines innovations qu’il avait cru devoir hasarder, afin surtout, disait-il, de faciliter la prononciation de notre langue aux étrangers. […] L’abbé d’Olivet eut la principale part dans ce travail ; il fut en réalité le secrétaire et la plume de l’Académie ; elle avait fini, de guerre lasse, par lui donner pleins pouvoirs ; il s’en explique lui-même dans une lettre au président Bouhier, du 1er janvier 1736, et l’on est initié par lui aux coulisses du Dictionnaire. […] Ne l’admettons pas dans le Dictionnaire, dira-t-on ; ne lui donnons point le droit de cité ; émouvoir suffit. — A quoi je réponds : Non, émouvoir ne suffit pas ; car il est des cas où j’emploierai émotionner et où j’en aurai besoin. […] C’est déjà beaucoup si l’on ne vous donne pas tout à fait tort. […] Fénelon, qui ne fut de l’Académie qui ; bien après Bossuet, et trop tard pour participer au travail du premier Dictionnaire, a donné, on le sait, d’excellents préceptes pour les occupations de la Compagnie, indépendamment de cette obligation principale et perpétuelle du Dictionnaire ; il lui a en quelque sorte taillé sa tâche : et avec quelle largeur, quel sentiment vif de la tradition, et aussi quelle intelligence présente du lendemain !

2498. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Lamartine — Lamartine, Recueillements poétiques (1839) »

Le devoir d’un écrivain et de tout homme public est en raison  composée de ce qu’il est et de ce qu’il a donné à croire par ses écrits et par ses paroles. […] Sans avoir aucune autorité pareille, ne serait-il donc pas permis à ceux qui ne sont, qui ne veulent être que littérateurs et poètes, qui croient ainsi servir le monde à leur manière et y remplir leur humble rôle, qui s’y attachent d’autant plus que la vue des intrigues présentes leur donne plus fort la nausée ; à ceux qui écoutent avec bonheur la voix de M. de Lamartine s’élever un moment avec pureté du milieu des récriminations, et qui regrettent qu’elle n’y soit qu’une trêve, ne leur serait-il pas permis de lui demander qu’il leur laissât au moins la dignité de leur silence en politique ? […] M. de Lamartine, par un procédé tout inverse, à force de lui donner raison d’avance et de lui faire beau jeu, lui ôte également toute prise et l’annule. […] La nouvelle conclusion de Jocelyn, qui nous est donnée par manière de variante, a une ampleur et une sublimité merveilleuses : elle s’accorde dignement avec le souvenir de cet aimable poëme. […] Jocelyn ne la laissait encore percer qu’à peine ; la Chute d’un Ange y a donné pleine excroissance.

2499. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « DIX ANS APRÈS EN LITTÉRATURE. » pp. 472-494

N’aura-t-on eu décidément que de beaux commencements, un entrain rapide et bientôt à jamais intercepté, cette verve courageuse d’esprit que donne la jeunesse ? […] M Guizot a donné Washington, M. […] Il doit nous en donner sous peu de jours des preuves rassurantes. […] Hugo a donné à la fois les plus belles marques de son génie lyrique dans les Feuilles d’Automne, et de son talent de prosateur dans sa Notre-Dame de Paris ; Marion Delorme aussi (une œuvre dramatique véritable) n’a paru à la scène que depuis 1830. […] Leroux et Reynaud, c’est à cause de l’aspect parfois exclusif et répulsif que se donne dans l’expression une doctrine si vaste, si patiente au fond, si faite en définitive pour comprendre et tolérer.

2500. (1895) Histoire de la littérature française « Cinquième partie. Le dix-huitième siècle — Livre II. Les formes d’art — Chapitre IV. Le roman »

Chaque personnage raconte son histoire à un moment ou à l’autre ; et il y a bien des aventures où Gil Blas n’est jeté que pour donner occasion à quelqu’un de paraître et de narrer sa vie. […] Pour se donner carrière avec vraisemblance, Marivaux a adopté la forme de l’autobiographie. […] Prévost a fait cette simple histoire avec quelques souvenirs de sa vie orageuse : il l’a contée rapidement, sans dissertations et sans gros effets, avec un naturel qui donne la sensation de la vie même. […] L’Orient, Turquie, Perse, Inde, Chine, deviendra de plus en plus à la mode ; et nombre d’écrivains y placeront leur action romanesque, on y trouve un double avantage : les mœurs orientales donnent toute liberté à l’imagination grivoise ; de plus, on est dispensé de peindre les mœurs avec exactitude. […] Lesage et Marivaux l’ont fait sans doute ; mais Lesage nous donnait une collection d’épisodes, Marivaux une suite d’aventures : Rousseau nous fait assister à l’évolution des consciences.

2501. (1854) Histoire de la littérature française. Tome I « Livre I — Chapitre quatrième »

Toutefois, cette connaissance même imparfaite du passé leur donnait un avantage immense sur les écrivains en langue vulgaire, et les mettait en quelque sorte sur la voie des vérités générales. […] De tant d’écrits en langue latine qui donnent l’illusion d’une fausse maturité, il n’est rien arrivé dans la langue vulgaire, et l’esprit français n’a fait de progrès que le jour où il a cherché la morale sous la théologie, et secoué la servitude de la scolastique. […] C’est ainsi que les théologiens et les philosophes du. moyen âge cherchèrent, dans la société ancienne et dans les traditions d’une langue générale, une matière à l’activité de leur esprit ; et la fausse puissance que leur donnait sur quelques imaginations l’application violente qu’ils en faisaient au présent, leur fit négliger la seule puissance vraie, qui est celle du savoir et de la raison. […] Elle est ravagée par deux siècles de guerres effroyables, tantôt avec l’Angleterre, qui lui arrache un moment sa nationalité et lui donne pour roi un régent anglais ; tantôt avec son ancienne organisation féodale : elle ne produit point d’homme de génie dans les lettres. […] Qui nous donnera cette connaissance du passé ?

2502. (1911) La morale de l’ironie « Chapitre premier. La contradiction de l’homme » pp. 1-27

Et souvent les formes récentes de l’éthique, celles mêmes qui repousseraient, comme trop discrédité, le titre de « morale », ne font que donner inconsciemment une forme nouvelle à ces mensonges éternels. […] Quand elle avait des petits à nourrir, elle venait encore avec moi, mais à un moment donné, elle m’abandonnait, s’enfuyait en courant, la tête basse, en évitant autant que possible mon regard et ma voix. […] C’est pour cela qu’elle s’est donné des préceptes d’hygiène physique et morale, de morale individuelle. […] L’animal se laisser aller à l’alcoolisme quand l’homme lui en donne l’occasion. […] Il était nécessaire que des contreforts extérieurs vinssent s’accoler à l’édifice pour le consolider et lui donner la durée.

2503. (1889) Le théâtre contemporain. Émile Augier, Alexandre Dumas fils « Alexandre Dumas fils — Chapitre XIII »

La Princesse Georges L’égalité de l’homme et de la femme devant l’adultère, le droit de mort donné à l’épouse trahie, aussi bien qu’au mari trompé : telle est l’idée que M.  […] Elle le conçoit selon la fière formule de la loi romaine : ubi tu Caïus, ibi ego Caïa, « là où tu seras Caïus, je serai Caïa. » Elle aime passionnément son mari, elle s’est donnée à lui corps et âme ; donc elle a le droit d’exiger qu’il se donne à elle tout entier. […] A M. de Fondette, l’adolescent ébloui qui la regarde, du fond de sa timidité embrasée, comme un ver luisant amoureux d’un astre, elle donne un rendez-vous, sous le balcon de sa fenêtre, qui s’entrouvrira. […] L’avis est bon, mais la bouche par laquelle il passe lui donne l’accent d’un dernier outrage. Ainsi la livrée furète dans les plus intimes secrets de son cœur ; son alcôve donne dans l’antichambre ; sa pudeur est déshabillée, maniée, exploitée par des mains serviles !

2504. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Des lectures publiques du soir, de ce qu’elles sont et de ce qu’elles pourraient être. » pp. 275-293

Émile Souvestre, dans un cadre plus élargi, donner en une même soirée, en les environnant des explications à la fois utiles et fines, la bataille des Franks, tirée des Martyrs de Chateaubriand, et, par contraste, la gaie comédie du Grondeur de Brueys et Palaprat. […] On ne peut tout lire, sans doute, de chaque auteur ; il n’est besoin que d’en lire assez pour bien marquer le sens de sa manière et donner, à l’auditeur qui sort de là, l’envie d’en savoir plus en recourant à l’original : mais il faut, à la rigueur, lui en avoir déjà offert et servi un assez ample choix, pour que, même sans aller s’informer au-delà, il en garde un souvenir propre, et qu’il attache à chaque nom connu une idée précisé. […] Voici, au reste, quelques notes que je donne telles que je les reçois de M.  […] J’analysais et je donnais les principales scènes, de manière à pouvoir faire connaître, chaque fois, toute une pièce. — L’effet a toujours été très grand. […] Je continue de donner les simples notes qui suggèrent, chemin faisant, plus d’une réflexion littéraire : Fables de La Fontaine. — Elles amusent ; mais la morale qu’elles expriment déroute parfois les ouvriers ; ils cherchent où est la leçon.

2505. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Histoire de la Restauration, par M. de Lamartine. (Les deux premiers volumes. — Pagnerre.) » pp. 389-408

Une teinte de bile mêlée au sang jaunissait la peau, et donnait de loin comme un vernis d’or pâle au visage. […] La pâleur des joues donnait plus d’éclat au bleu des yeux. […] Tout en regard, pour montrer à nu le procédé, je mettrai le portrait de Louis XVIII, que M. de Lamartine nous donne au second volume. […] II, p. 438), il se trompe, ou plutôt son copiste se trompe dans la transcription, et il nous donne comme faisant partie du texte de Carnot deux ou trois phrases que M.  […] Peu importent, encore une fois, ces bagatelles : il y a longtemps qu’on a dû en faire son deuil avec M. de Lamartine, ne plus même lui donner de conseils, et se contenter de profiter, en le lisant, de tout ce qui échappe encore d’heureux aux rapidités et aux négligences de son génie.

2506. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Regnard. » pp. 1-19

C’est à Alger qu’on les transporte : la belle Elvire, donnée comme esclave au roi du pays, est respectée par lui et traitée mieux qu’à la française. […] On regrette en cet endroit que Regnard n’ait pas fait comme pour ses autres voyages, qu’il n’ait pas donné un récit tout nu et sans ombre d’art : ce serait aujourd’hui plus intéressant pour nous. […] Dans Le Bal, Regnard commence à employer le vers et nous donne le premier échantillon de cette jolie versification si vive, si nourrie, si pétillante. […] En lisant Regnard, on est frappé de cette idée qu’il donne des mœurs finales du règne de Louis XIV. […] Regnard se défendit en homme qui a pour lui le public ; il donna une petite pièce en prose qui a pour titre La Critique du Légataire.

2507. (1872) Les problèmes du XIXe siècle. La politique, la littérature, la science, la philosophie, la religion « Livre I : La politique — Chapitre II : Philosophie politique de Tocqueville »

La principale erreur des partisans passionnés de la démocratie est de considérer cette forme de société comme un type absolu et idéal qui, une fois réalisé ici-bas, donnerait aux hommes le parfait bonheur. […] On pourrait trouver d’autres exemples non moins remarquables des démentis donnés par les faits à la théorie. […] A la vérité, cet effet est dû surtout à la liberté politique, qui peut se rencontrer dans des sociétés non démocratiques ; mais si l’on y regarde de près, on verra que c’est la part que les classes laborieuses ont au gouvernement de l’État qui leur donne cet esprit d’initiative et d’entreprise que nous admirons. […] Les grands publicistes se bornent à donner des directions générales, c’est au législateur de faire le reste. […] Sans doute, lorsqu’une question particulière est soulevée, le publiciste doit lui donner une solution pratique et proposer des moyens proportionnés aux conjonctures ; mais dans la science il doit se borner aux principes : c’est à cette condition qu’il peut espérer de vivre au-delà d’un temps et d’un pays particulier.

2508. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « [Avertissement] » p. 2

[Avertissement] L’auteur de ces causeries a marqué plus d’une fois le désir de les clore au moins sous forme de recueil distinct ; et toujours l’impulsion qu’il s’était donnée l’a entraîné plus loin qu’il n’avait prévu. […] On les a réunis à ceux que l’auteur a depuis donnés dans Le Moniteur à son jour ordinaire, et ils n’en diffèrent en rien.

2509. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — F — Frémine, Aristide (1837-1897) »

Alphonse Lemerre Il a donné la Légende de Normandie, qui témoigne d’une réelle puissance d’imagination et d’une grande sincérité de sentiment. […] Aristide Frémine a donné une Légende de Normandie.

2510. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — L — Ledent, Richard »

Sur cette donnée, que d’aucuns auraient volontiers compliquée ou d’épisodes secondaires ou de dissertations savantes, il a écrit une œuvre qu’il nous est bien difficile d’exactement apprécier. […] Mais on ne peut pas dire non plus qu’elle revête le caractère d’étrangeté que l’auteur semble avoir voulu lui donner.

2511. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — B — article » p. 411

Bunel, [Pierre] né à Toulouse, & mort à Turin en 1546, à l’âge de 47 ans, est le premier des modernes, sans en excepter les Italiens, qui ait écrit en Latin avec autant d’élégance que de pureté, raison qui lui donne droit de paroître dans notre Collection. […] Les Magistrats de la ville de Toulouse lui ont donné une place dans la Galerie des Illustres, où l’on voit sa statue.

2512. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — H — article » p. 503

Après avoir donné au Théatre deux Tragédies qui n’eurent pas de succès & n’en méritoient aucun, il s’adonna à l’Histoire, où il ne réussit pas mieux. […] Il est à remarquer que notre Histoire n’a jamais été mieux écrite que par ceux qui s’y sont appliqués par l’impulsion du talent, & non par celle du devoir qui ne le donne pas.

2513. (1874) Premiers lundis. Tome I « Fenimore Cooper : Le Corsaire Rouge »

Nous reviendrons aujourd’hui, quoiqu’un peu tard, sur ce bel ouvrage que tout le monde a lu ; et sans chercher à en donner une sèche et inutile analyse, nous en causerons un instant avec nos lecteurs, comme d’une ancienne connaissance dont on aime de part et d’autre à se ressouvenir. […] Cooper, en effet, ne conte pas pour conter, mais pour décrire : cette remarque bien entendue nous donnera la clef de son talent. […] On ne peut donner que des éloges au caractère de Henri Wilder : l’auteur a réalisé en lui le type américain dans toute sa pureté.

2514. (1890) Conseils sur l’art d’écrire « Principes de composition et de style — Quatrième partie. Élocution — Chapitre VIII. De la clarté et des termes techniques »

Si votre lecteur ignore le sens du mot dont vous vous servez, si ce mot n’évoque pas en autrui l’idée qui pour vous lui tient par un rapport nécessaire et universel, la propriété de votre expression ne lui donne pas la clarté, et dans ce cas, trop de justesse nuit : on se fait mieux entendre en parlant improprement, Ovide exilé parmi les Scythes disait : « C’est moi qui suis le barbare ici, puisque je ne me fais pas comprendre. » La plus belle harangue en beau langage latin ne valait pas alors pour lui trois mots de jargon scythe tant bien que mal assemblés, plus ou moins écorchés. […] Tous les ouvrages faits pour une classe spéciale de lecteurs, traités de science, d’art, d’industrie, peuvent et doivent ainsi être rédigés dans la langue spéciale de ces lecteurs, et donner à chaque objet le nom exact qui l’y désigne pour eux. […] Fontenelle disait de ses Entretiens sur la pluralité des mondes : « Je ne demande aux dames, pour tout ce système de philosophie, que la même application qu’il faut donner à la Princesse de Clèves, si on veut en suivre bien l’intrigue, et en connaître toute la beauté. » Dans un dialogue de Diderot, le philosophe Crudeli, au moment d’entamer une discussion sur les matières les plus ardues avec la Maréchale, qui n’avait jamais lu que ses heures, répond à ses inquiétudes en disant : « Si vous ne m’entendiez pas, ce serait bien ma faute » ; et il fait toute sa démonstration en transposant dans le langage d’une femme ignorante les idées des plus obscurs métaphysiciens, sans que, dans cette conversion, la profondeur perde ce que gagne la clarté.

2515. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Seconde partie — Section 31, que le jugement du public ne se retracte point, et qu’il se perfectionne toujours » pp. 422-431

Ainsi les soixante ans qui se sont écoulez depuis la mort de Moliere, sans que personne l’ait remplacé, donnent un lustre à sa réputation qu’elle ne pouvoit pas avoir un an après sa mort. […] Chaque année qui se passera sans donner un successeur au Terence françois, ajoutera encore quelque chose à sa réputation. Mais, me dira-t-on, êtes-vous bien assuré que la postérité ne démentira point les éloges que les contemporains ont donnez à ces poetes françois, que vous regardez déja comme placez dans les temps à venir à côté d’Horace et de Terence ?

2516. (1913) Essai sur la littérature merveilleuse des noirs ; suivi de Contes indigènes de l’Ouest-Africain français « Contes — XVIII. La bague aux souhaits »

La guinnârou alors s’en vient trouver Ahmed : « Le jour où je t’ai donné la bague, lui reproche-t-elle, je t’ai recommandé de ne pas laisser ta femme s’en emparer : Maintenant il te faut rester ici trois mois. Je vais te donner un fusil et de la poudre de chasse. […] Le dernier jour de ce délai arrivé, avant de tirer ton dernier coup de fusil, tu viendras me trouver et je te donnerai quelque chose ».

2517. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — A — article » p. 117

Quand on donne des préceptes de langage, il faut bien se garder d’avoir soi-même un langage qui prête à la censure & au ridicule. […] Son Plan d’éducation annonce un homme qui est en état d’en donner une bonne.

2518. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — H — article » p. 481

Les Romans qu’il a faits n’amusent que par un ton de badinage & de plaisanterie, dont il a le premier donné l’exemple. […] Celui du Belier sur-tout est recommandable par des critiques pleines de finesse, & par un précepte donné, sans air de prétention, aux Gens de Lettres : Belier, mon ami, je t’en prie, commence par le commencement, On lui attribue les Mémoires du Comte de Grammont, qui sont très-bien écrits, & qu’on peut proposer comme un modèle à suivre dans ces sortes de Productions.

2519. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — H — article » p. 506

La Traduction qu’en a donnée l’Abbe Bosquillon, sans en faire sentir tout le mérite, ne laisse pas d’être élégante & de donner une idée des beautés qu’elle contient.

2520. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre VII. La littérature et les conditions économiques » pp. 157-190

Les noms les plus harmonieux s’y sont donné rendez-vous. […] Le commerce, qui convie toutes les civilisations à ses expositions universelles, a contribué plus que toute autre chose à donner à la littérature de notre siècle ce caractère cosmopolite qui la distingue. […] Puisque nous parlons choses économiques, il nous sera permis de donner quelques chiffres64. […] On a entendu des chefs de maisons bien assises dire à des débutants : « Donnez-nous donc quelque chose d’épicé, de poivré ! […] Celui qui gouverne, c’est le financier qui, du fond de la coulisse où il reste invisible, donne leur consigne aux rédacteurs, décide en quel sens on se prononcera, ce qu’on défendra ou attaquera.

2521. (1920) Action, n° 3, avril 1920, Extraits

Lenormand a certainement donné une explication exacte dans une certaine mesure. […] Leurs ébats se donnent libre cours autour des appareils génitaux de l’un et l’autre sexe. […] Ils ne les vendent point, ils les donnent et ils ont la manière. […] Mais, même lorsqu’il donne des résultats aussi curieux, quelle est la valeur littéraire d’un procédé ? […] La science moderne — continue-t-il — adopte comme principe absolu la nécessité de baser toute recherche sur un fait donné précis.

2522. (1888) Les œuvres et les hommes. Les Historiens. X. « H. Forneron » pp. 149-199

Il domine les choses vulgaires et populaires (souvent les mêmes choses) par un très noble mépris, et la forme qu’il donne à son mépris y ajoute encore. […] Cette mère pieuse lui avait, en effet, donné sa foi comme elle lui avait donné sa race, et c’est ainsi qu’il grandit dans l’amour de l’Église, identifié tellement à l’Église par cet amour qu’il crut parfois à tort ne faire qu’un avec elle, et que trop souvent, et par illusion coupable de cet amour encore, il confondit dans sa conscience et dans ses actes le Pape et le Roi ! […] Mais le Rembrandt qui la donnera est-il né ? […] Ne lui avaient-elles pas donné, ces rhétoriques, à la Muse de l’Histoire, comme elles disaient, une plume de fer, pour se dispenser de lui en donner une de feu ? […] Mais, après lui, un homme qui, pour être le plus grand journaliste de son temps, n’en fut pas moins un grand historien, Granier de Cassagnac, dans son Histoire de la Révolution, donna le détail dont Chateaubriand n’avait vu que l’affreux ensemble.

2523. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — A — article » p. 118

On doit des éloges à ces hommes laborieux & assez modestes pour préférer les productions des Auteurs anciens à celles qu’ils auroient pu donner eux-mêmes. […] On donne ce nom, par métaphore, à des Recueils de Pieces qui n’avoient point été imprimées.

2524. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — A — article » p. 174

Ce n’est pas pour ses Ouvrages, qui ne consistent qu’en quelques Plaidoyers, que nous lui donnons une place dans cette Galerie littéraire ; il a rendu aux Lettres des services plus réels, que ceux qu’ont cru lui rendre tant d’Ecrivains par leurs Ecrits. C’est lui qui le premier donna, dans sa patrie, l’exemple d’une Assemblée académique, laquelle, à sa sollicitation, fut confirmée par Lettres-patentes du Roi (en 1724), sous le titre d’Académie Royale des Sciences & Belles-Lettres de Lyon.

2525. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — A — article » p. 185

Sa Traduction des Œuvres de Démosthene, lui donne des droits à la reconnoissance publique. […] On ne trouve également qu’une image imparfaite de l’éloquence d’Eschine, dans la traduction qu’il a donnée des trois Harangues qui nous restent de cet Auteur.

2526. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — C — article » p. 489

Mahomet II, qu’il donna en 1714, eut des succès dans sa nouveauté, & est resté depuis dans le plus profond oubli : la foiblesse du cinquieme Acte est la principale cause qui a empêché cette Piece de paroître. M. de Châteaubrun donna, quarante ans après, trois autres Tragédies, dont deux sont restées au Théatre, les Troyennes & Philoctete, quoiqu’elles ne soient pas exemptes de défauts.

2527. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — E. — article » p. 236

Quarante Ouvrages traduits de l’Anglois ou du Latin, sont la preuve de sa vocation particuliere au métier de la Traduction ; nous disons métier, parce qu’il s’en faut bien que l’Auteur ait donné à son travail toute l’application qu’il exigeoit. […] Il vaut mieux laisser les Productions étrangeres dans l’oubli, quand on ne sait pas en faire un choix éclairé ou leur donner une nouvelle vie, que de les exposer à l’opprobre d’une seconde mort ; ce qui est arrivé précisément à tout ce dont M.

2528. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — W. — article » p. 523

Le nouveau Grammairien auroit dû au moins répandre quelque jour sur les connoissances que nous devons aux Auteurs qu'il a mis à contribution ; mais il s'en faut bien qu'il se soit donné cette peine, si indispensable quand on travaille pour les Jeunes gens. […] Peut-être s'en ressouviendra-t-il dans une nouvelle édition, qu'il paroît être en état de rendre supérieure aux précédentes, s'il veut y donner ses soins.

2529. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Mémoires et journal de l’abbé Le Dieu sur la vie et les ouvrages de Bossuet, publiés pour la première fois par M. l’abbé Guettée. — I » pp. 248-262

Il paraît s’être donné d’assez bonne heure ce rôle d’historiographe de Bossuet, et dans les dernières années il s’était fait purement et simplement son Dangeau. […] Il était à cet âge dont parle Cicéron, et où l’orateur romain a dit que son éloquence elle-même se sentait blanchir (« quum ipsa oratio jam nostra canesceret ») ; il avait hâte d’en employer toute la maturité et la douceur pour la famille chrétienne qui lui avait été donnée. […] C’est en vertu du même principe de modestie, et de juste et rigoureuse distinction entre l’homme et le talent qu’au lit de mort et dans sa dernière maladie, comme le curé de Vareddes lui exprimait son étonnement qu’il voulût bien le consulter, lui à qui Dieu avait donné de si grandes et si vives lumières, il répondait : « Détrompez-vous, il ne les donne à l’homme que pour les autres le laissant souvent dans les ténèbres pour sa propre conduite. » Nous savons de nos jours, et par toutes sortes d’expériences, ce que c’est que l’homme de lettres livré à lui-même, dans toute la liberté et la verve de son caprice et de son développement ; nous savons ce qu’il est, même dans le cas où il se combine avec l’écrivain religieux et où il le complique par des susceptibilités sans nom. […] La vraie critique, à son égard, ramène à cette conclusion, à cette consécration, et, après plus d’un circuit et d’un long tour, elle aboutit au même point que l’admiration la moins méditée. — Je n’ai rendu aujourd’hui que l’impression générale que laisse la lecture des mémoires de l’abbé Le Dieu ; il me reste à parler de son journal, qui donne une impression moins nette, moins agréable, mais qui en définitive ne permet pas de tirer un jugement différent, C’est ce qu’il n’est pas inutile de montrer.

2530. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Variétés littéraires, morales et historiques, par M. S. de Sacy, de l’Académie française. » pp. 179-194

Il savait encore, et mieux que personne, m’a-t-on dit, le moment opportun où, dans les grandes mêlées polémiques engagées alors entre les principaux journaux, l’adversaire s’étant trop avancé et venant à prêter flanc, il était à propos d’entrer dans l’action et de donner ; il avait du tacticien. […] D’ailleurs, M. de Sacy ne s’est jamais donné comme un critique de profession, un critique complet, aspirant à tracer un tableau littéraire de son temps : il se borne à traduire avec feu et à nous livrer avec candeur une image de ses goûts intègres, de ses prédilections restées toutes sérieuses et probes. […] Il a gardé du rédacteur politique ce mouvement qu’il porte dans l’exposé de ses impressions littéraires et qui donne du courant à son discours. […] Il nous donne ingénument ses raisons, raisons d’homme de goût et qui sait les délicatesses du sentiment. […] Je ferai ici une simple remarque : c’est qu’ayant relu depuis peu la première édition des Maximes en la comparant à la dernière qu’a donnée l’auteur et qui est celle qu’on suit généralement, j’y ai trouvé assez de différences pour pouvoir affirmer que c’est la première seule qui contient toute la pensée de l’homme, pensée franche, absolue à l’origine, toute verte et toute crue, sans adoucissement, et qui, par la portée, va rejoindre d’autres systèmes moraux de date plus récente.

2531. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Étude sur la vie et les écrits de l’abbé de Saint-Pierre, par M. Édouard Goumy. L’abbé de Saint-Pierre, sa vie et ses œuvres, par M. de Molinari. — I » pp. 246-260

Après trois ou quatre ans donnés à la physique, à laquelle il eût été propre peut-être plus qu’à aucun autre objet, désirant surtout faire servir ses progrès personnels au bonheur des hommes, il suivit l’exemple de Pascal et de Socrate, il passa à l’étude de la morale ; et comme celle-ci ne trouve guère son application en grand et son développement qu’à l’aide des lois et des institutions civiles, il fut conduit nécessairement à s’occuper de politique : car nul esprit n’était plus docile que le sien à mettre en pratique et à suivre jusqu’au bout la série de conséquences qui s’offraient comme justes. […] Rousseau, dans les quelques notes qu’on a de lui sur le digne abbé, nous donne là-dessus d’agréables témoignages : L’abbé de Saint-Pierre disait qu’en France tout le monde était enfant. M. de Fontenelle lui demandait : « Quel âge me donnez-vous ?  […] C’est au chapite « Du mérite personnel » ; le malin portrait se glissa dans la cinquième édition des Caractères, qui fut donnée en 1690 : Je connais Mopse d’une visite qu’il m’a rendue sans me connaître. […] Nommé à l’Académie française deux ans après La Bruyère lui-même, qui avait signalé son entrée par un si neuf et si éloquent discours de réception, il en fit un des plus ordinaires ; et, comme Fontenelle, à qui il le montrait en manuscrit, lui faisait remarquer que le style en était plat : « Tant mieux, dit l’abbé, il m’en ressemblera davantage ; et c’est assez pour un honnête homme de donner deux heures de sa vie à un discours pour l’Académie. » Il était homme à répondre comme un de nos contemporains à celui qui critiquait une de ses phrases : « Ah !

2532. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « Bossuet. Œuvres complètes publiées d’après les imprimés et les manuscrits originaux, par M. Lachat »

Ce studieux et ardent jeune homme meurt à la peine ; il a, le premier, donné le signal devant le public. […] Et montrant de plus, au sujet de la controverse avec Leibnitz, que Bossuet n’était entré, à aucun moment, dans l’esprit même de cet essai de conciliation chrétienne supérieure et avait prolongé, sans paraître s’en douter, un malentendu perpétuel, il se risquait à dire que cela donnait quasi raison à certains critiques délicats « qui trouvent à Bossuet l’imagination d’Homère et point d’esprit ». […] Au milieu de tant d’études où il se plongeait sans cesser d’être sociable, aimable et doux, on a remarqué qu’il ne donna jamais « dans la curiosité des mathématiques » ; on les considérait en effet, alors, comme une curiosité. […] Ce latinisme intime et si sensible de Bossuet dans sa parole française me paraît plus qu’un accident, qu’un trait curieux à noter ; c’est fondamental chez lui, c’est un caractère constant ; il nous en a avertis quand il a dit, dans ses Conseils pour former un orateur sacré : « On prend dans les écrits de toutes les langues le tour qui en est l’esprit, — surtout dans la latine dont le génie n’est pas éloigné de celui de la nôtre, ou plutôt qui est tout le même. » Il réintègre ainsi, par l’acception qu’il leur donne, quantité de mots dans leur pleine et première propriété et sincérité romaine ; il en renouvelle ainsi la saveur, la verdeur. […] J’en ai eu la preuve, notamment sur le premier Sermon pour la Fête de tous les Saints, que lui-même a donné précisément comme échantillon.

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