» Oui, je sais, il y a comme cela des gens qui se sont donné pour tâche d’expliquer, et, par suite, d’aimer toutes les manifestations, quelles qu’elles soient, de la vie et de l’art humain à travers les pays et les âges.
Brunetière est incapable, ce semble, de considérer une œuvre, quelle qu’elle soit, grande ou petite, sinon dans ses rapports avec un groupe d’autres œuvres, dont la relation avec d’autres groupes, à travers le temps et l’espace, lui apparaît immédiatement ; et ainsi de suite.
Elle tend à préserver de la destruction les organismes collectifs comme les organismes individuels, mais à travers quelles secousses et quelles épreuves ! […] Nous ne recevons ces disciplines qu’à travers lui. […] L’une, celle de Biran, est en marche vers la foi, mais n’y arrive que sur le soir de sa vie, à travers quel long et douloureux chemin ! […] Regardons-le maintenant à travers les souvenirs du prince de Bülow. […] Bismarck les corrige à travers des luttes intérieures auxquelles mirent fin — toujours le mot de Mirabeau — des guerres heureuses.
Au contraire, n’ayez qu’un souci, celui d’être exact ; étudiez bien un temps, les personnages qui le remplissent, leurs qualités, leurs vices, leurs altercations, les causes qui les divisent, et puis appliquez-vous à les rendre simplement… Si, pour systématiser vos récits, vous n’avez pas cherché à les grouper arbitrairement, si vous avez bien saisi leur enchaînement naturel, ils auront un entraînement irrésistible, celui d’un fleuve qui coule à travers les campagnes. […] On vient tout récemment d’exposer aux yeux émerveillés du public, parmi les chefs-d’œuvre de l’industrie du siècle, des glaces d’une dimension et d’une pureté extraordinaires, devant lesquelles les Vénitiens du quinzième siècle resteraient confondus, et à travers lesquelles on aperçoit, sans la moindre atténuation de contour ou de couleur, les innombrables objets que renferme le palais de l’Exposition universelle. […] Thiers, c’est l’excès de nationalisme ; c’est une espèce de patriotisme littéraire qui compte la patrie pour tout et le monde pour peu ; c’est, en conséquence, un engouement irréfléchi de militarisme empanaché, qui, voyant toujours le droit où est la patrie, et la patrie à travers la fumée de tous les champs de bataille, à quelque distance qu’ils soient de nos frontières, s’enivre non comme un historien, mais comme un combattant, de poudre et de gloire, ne voit plus dans la nation qu’une armée, et dans le chef d’armée qu’un maître du monde par droit de discipline et de victoire. […] Il n’y a pas un coup de fusil sur les remparts de Gênes qu’on n’entende retentir à travers ce demi-siècle. […] L’historien, et c’est un des éloges qu’on lui doit, court à travers le siècle avec la rapidité des événements.
À travers les charmants et bien mérités éloges auxquels prêtait ce genre de réponse toute personnelle, j’ai regretté, je l’avoue, de rencontrer deux ou trois traits piquants qui visaient au-delà, qui semblaient s’adresser à de grands talents placés hors de la sphère et de la portée académique60.
Jeune, au sein de la pauvreté, à travers les entraînements de l’âge, il ne cessa, par un travail secret, opiniâtre, de se préparer un talent supérieur aux choses légères et déjà charmantes auxquelles il s’essayait.
Le chevalier de Bernis, son neveu, la guidait dans ses promenades nocturnes à travers les ruines du Colisée ; mais il avait au moins cinquante ans.
Lucien, Milton, disjecti membra poetæ, à travers le fatras d’un parodiste de Chapelain.
Mais il est peut-être d’autres lecteurs qui n’ont pas trouvé inutile d’étudier la pensée d’esthétique et de philosophie cachée dans ce livre, qui ont bien voulu, en lisant Notre-Dame de Paris, se plaire à démêler sous le roman autre chose que le roman, et à suivre, qu’on nous passe ces expressions un peu ambitieuses, le système de l’historien et le but de l’artiste à travers la création telle quelle du poëte.
Il y rencontre la malheureuse Didon ; il l’aperçoit dans les ombres d’une forêt, comme on voit, ou comme on croit voir la lune nouvelle se lever à travers les nuages .
Il a décomposé la phrase de Rousseau et de Buffon, il en a mesuré les nombres ; il rémonte par eux à Bossuet ; il remonte à travers Condillac à Fénelon. Pareillement pour les anciens ; comme Marie-Joseph Chénier, son maître, c’est à travers l’antiquité latine qu’il atteint la Grèce. […] Decazes ce que le grand usage du monde avait commencé de lui donner, cette merveilleuse faculté de garder, au milieu des distractions et des emplois divers, et à travers mille occupations graves ou épineuses, un esprit vif, alerte, détaché, toujours présent, jamais obscurci, tout au plus capricieux par moments et fugitif ; c’est, à lui, sa seule manière d’être préoccupé et appesanti.
Elle y revint après plusieurs voyages à travers l’Europe, en 1801, à ce moment de paix et de renaissance brillante de la société et des lettres. […] Mais on sent ici, à travers le déguisement et l’idéal, une réalité particulière qui donne au récit une vie non empruntée. […] Le portrait de Valérie elle-même revient, repasse sans cesse à travers cela, dans toutes les situations, dans toutes les poses, souriant, attristé, mobile, et comme amoureusement répété par mille glaces fidèles.
Puis il se hâta d’atteler les quatre taureaux à une charrue neuve, et il laboura tout le jour une longue pièce de terre, derrière les jardins, d’où l’on apercevait, sur la colline opposée, à travers les bois, le village d’Arcey et la fumée du toit de la maison de la Jumelle. […] J’avais suivi à pied le cercueil porté à bras, par quatre paysans de nos amis, à travers les sentiers escarpés d’une chaîne de montagnes, creusés dans un océan de neige. […] Je voyais ainsi, à travers les ogives du clocher, le branle alternatif de la cloche.
Jamais je n’ai vu de plus bel effet de lumière sur le papier, à travers des arbres en peinture. […] C’est tantôt ici, tantôt là, à Paris, à Alby où est Mimi, aux montagnes, au ciel quelquefois, ou dans une église, enfin où je veux ; car je suis libre parmi mes entraves et je sens la vérité de ce que dit l’Imitation, qu’on peut passer comme sans soins à travers les soins de la vie. […] Ses mains jointes sont tellement éloquentes par la pression des doigts contre les doigts et par les veines à travers lesquelles on voit circuler le sang brûlant de se répandre pour l’homme, son frère, que, lors même qu’on ne verrait ni le corps, ni les jambes, ni le buste, ni la tête divine, mais que ces mains seules sortiraient de l’ombre, le tableau aurait suffisamment parlé au cœur ; on aurait pleuré, on aurait compris que ces deux mains tendues par l’enthousiasme de l’agonie triomphante étaient assez fortes pour arracher l’aiguillon à la mort et le salut de l’humanité au ciel. — La passion de ces mains est égale à l’objet.
La nuit, par un ciel couvert, lorsque toutes les autres étoiles étaient voilées, l’étoile nouvelle est restée plusieurs fois visible à travers des nuages assez épais. […] X Quant à moi, — si j’avais, non pas le génie des découvertes que M. de Humboldt n’avait évidemment pas reçu du ciel, mais l’aptitude patiente et infatigable aux études physiques que cet homme, remarquable par sa volonté, a manifestée pendant quatre-vingt-douze ans d’existence ; Et si je possédais, comme lui, la notion exacte et complète de tous les phénomènes dont l’univers est composé, de manière à me faire à moi-même et à reproduire pour les autres le tableau de l’universelle création, je commencerais par une humble invocation à genoux à l’auteur caché de ce Cosmos à travers lequel il me permet, sinon de l’entrevoir, du moins de le conclure ; et une belle nuit d’été, soit sur les vagues illuminées de l’Océan qui me porte aux extrémités de l’univers, soit sur un sommet neigeux du Chimboraço, soit sur un rocher culminant des Alpes, je tomberais à ses pieds ; je laisserais sa grandeur, sa puissance, sa bonté, me pénétrer, m’échauffer, m’embraser, comme le charbon de feu qui ouvrit les lèvres du prophète, et je lui dirais en face de ses soleils, de ses étoiles, de ses nébuleuses et de ses comètes : « Toi qui es ! […] De grands cours d’eau navigables ouvrent des routes naturelles à travers les bois.
Ne trouverons-nous pas une boussole pour nous guider à travers les mers orageuses de l’imagination et du caprice ? […] Nous nous ferons les concitoyens, les contemporains de ces puissants génies qui ont éclairé le monde, afin de les mieux comprendre, et de les voir de plus près qu’à travers les siècles. […] Lorsqu’à grand-peine on était parvenu à se placer sur les bancs, sur les chaises et jusque sur les marches de l’estrade du professeur, on voyait se glisser à travers la foule un petit homme, déjà vieux, dont les traits étaient empreints de cette laideur spirituelle qui, chez les hommes, est souvent préférable à la beauté.
C’est lorsqu’en sa douleur profonde, Pour fermer le convoi du monde, Il scelle le cercueil de l’empire romain, Et qu’il élève alors ses accents prophétiques À travers les débris antiques Et la poudre du genre humain ! […] L’Imagination, à ces murs dévastés, Rend leur encens, leur culte et leurs solennités, À travers tout un siècle écoute les cantiques Que la Religion chantoit sous ces portiques. […] Là, d’antiques forêts, un vallon solitaire, Où le daim vagabond paît l’herbe des tombeaux, Quelques sapins épars, un torrent dont les eaux Roulent avec fracas à travers la bruyère ; Le tonnerre grondant sous un ciel nébuleux, Et des vents et des flots le sauvage murmure ; Aux gothiques débris d’un cloître ténébreux La fougère mêlant sa funèbre parure, Tout enchante mes sens, tout en ces sombres lieux D’une sublime horreur épouvante mes yeux.
On ne peut donc les atteindre directement, mais seulement à travers la réalité phénoménale qui les exprime. […] Puisque, d’un autre côté, ces pratiques ne sont que de la vie sociale consolidée, il est légitime, sauf indications contraires30 d’étudier celle-ci à travers celles-là. […] C’est en vertu de ce principe que nous avons étudié la solidarité sociale, ses formes diverses et leur évolution à travers le système des règles juridiques qui les expriment31.
À part, en effet, quelques mots plus profondément jaillis que les autres à travers un langage très artistement composé, Pindare est un poète essentiellement de convention, comme le sont les Académies. […] Car toute rapetissée, toute tassée, toute étouffée qu’elle y soit, on la sent à travers ces lignes qui la diminuent pour qu’elle y tienne. L’opinion historique et politique du rhéteur passe à travers sa rhétorique.
Feydeau, ç’a été le contraire : au lieu de voir le mariage à travers l’adultère, il n’a vu que l’adultère dans l’adultère, et tel a été tout son sujet. […] Le ton solennel y domine trop ; il y a trop de mélancolies d’étalage pour qu’on ne croie pas à quelque modulation de vengeance dans tout cela, mais, quant au droit, le droit n’apparaît dans cette fumée de larmes que sous la forme d’un cauchemar, et à travers l’indécision d’un ménagement. […] Il y a là des dévouements ordinaires à tout roman sentimental, plus lieux communs encore que les duels ; et, entre autres, il y a celui-là qu’aimait La Fontaine : De la dame Emportée à travers la flamme !
Comme ils ont affaire à des peuples dont le génie s’est manifesté sur un théâtre plus ou moins vaste et à travers une durée plus ou moins longue, ils sont moins exposés à se tromper sur l’existence et la nature de caractères psychologiques qui se sont produits au grand jour de l’histoire. Mais là encore il n’y a que des œuvres supposant des facultés, des effets supposant des causes que l’historien peut tout au plus deviner à travers leurs manifestations, mais qu’il ne peut ni décrire, ni analyser, ni définir, parce qu’il ne les atteint pas directement. […] Mais si à ce genre d’observation qui lui fait voir les lois des phénomènes à travers leur succession, il joint cet autre genre d’observation qui plonge dans le for intérieur du sujet observé, il comprendra bien vite la nécessité de modifier les conclusions auxquelles il s’était laissé aller tout d’abord.
Un grand sourimono d’une facture surprenante : un store à moitié relevé sur une branche en fleur dont une partie se voit obombrée à travers le tissage du store. […] Des tisseuses de soie, au métier établi en pleine campagne, et dont l’une se voit à travers les fils d’un compartiment du métier. […] Une galerie où, à travers le jardin, on entrevoit des femmes faisant leur toilette. […] Vue du Fouji à travers la ville des fleurs (Yoshiwara) du côté de Sénjû. […] Fouzi vu de Shinagawa à travers Gotènyama (à Yédo).
Il y a dans une intelligence jeune une originelle noblesse qui répugne à livrer à la vie sans condition les forces de son activité : arriver, oui, mais vers une victoire et à travers une bataille. […] Emerson, lu trop souvent à travers M. […] Ainsi, il élève à côté de l’église des dogmes une chapelle sans dôme, d’où on voit le ciel sans regarder à travers des nuages d’encens. […] De la nuit éternelle nous allons à travers des obstacles vers la nuit éternelle, nous sommes un drapeau qui flotte une journée au bout d’un mât et qu’on rentre le soir et qui ne reverra jamais la lumière. […] C’est la vie vue à travers un éblouissant réseau d’images, la vie même, mais avec toute sa féerie intérieure ; toute la nature tremble et rêve dans ces versets lents, comme une femme portée dans une barque à travers le soir.
Chez une nation ainsi homogène, et à travers les vicissitudes de sa destinée, le christianisme même ne joua point le rôle qui lui échut ailleurs. […] Ici elle semble, conduite par l’abondance, parcourir l’année à travers une série de fêtes. […] Tant est vagabond et négligent le vol du poëte à travers ces capricieuses compositions ! […] Il faut que le poëte dramatique renoue sans cesse cette relation, qu’il la maintienne à travers les vicissitudes de situations diverses. […] Ainsi concentré dans l’individu, le spectacle du monde se révèle à nous sur la scène du théâtre ; ainsi, à travers l’âme qui en reçoit l’impression, les événements nous atteignent par la sympathie, source de l’illusion dramatique.
La terre ne fut plus qu’un nuage de poussière — à travers ce nuage, je vis les traits illuminés de la Bien-Aimée. […] Pour citer des exemples, la décadence romaine n’a pas un détail qui ne soit rigoureusement exact ; la barbarie mahométane ressort de Cantemir, à travers l’enthousiasme de l’historiographe turc, telle qu’elle est exposée dans les premières pages de Zim Zizimi et de Sultan Mourad. » Victor Hugo n’avait-il pas le droit d’inventer librement ses admirables images épiques ? […] À travers ce vallon, le silence et le crépuscule, frères jumeaux, continuent leur garde de midi, et voguent parmi les ombrages, comme des formes vaporeuses qu’on peut à peine voir. […] éternel charme de mon cœur, Voici les lieux où soupira jadis pour toi Le plus fidèle amant du monde35… Chateaubriand lui succédait, pour que le grand secret ne fût pas perdu, et de façon qu’à travers un demi-siècle, se préparât la revanche de la poésie. […] « C’est l’avarice (Helvétius n’écrit pas toujours avec la simplicité désirable) qui guide les vaisseaux à travers les déserts de l’Océan, l’orgueil qui comble les vallons, aplanit les montagnes, s’ouvre des routes à travers les rochers, élève les pyramides de Memphis, creuse le lac Moeris et fond le colosse de Rhodes.
À travers le cours des événements et la diversité des fortunes, cette nation demeure inflexiblement attachée au même programme et à la même foi. […] En karriole à travers la Suède et la Norvège ! […] Jusqu’au soir, on les pourchassa comme un gibier malfaisant, à travers les brousses, les fondrières et les marécages. […] Il leur serait si facile d’étudier l’évolution de la peausserie à travers les âges, ou de dépouiller des cartulaires concernant la corporation des savetiers ! […] Il fait bon, dans cette ombre fraîche et ces parfums, sous le tiède soleil qui fait pleuvoir, à travers les branches, des flèches d’or.
Le pathétique, chez Delille, alla en augmentant à travers le technique, et il y eut sympathie de plus en plus vive de toute une partie de la société pour ce qui semblait n’avoir dû être d’abord qu’un passe-temps de ses loisirs. […] Dans les Amours de Psyché, La Fontaine a aussi décrit les merveilles naissantes de Versailles : les vers, le plus souvent techniques, sont parfois éclairés d’un reflet d’âme inattendu, que je ne retrouve pas à travers le bel esprit de Delille : L’onde, malgré son poids, dans le plomb renfermée, Sort avec un fracas qui marque son dépit, Et plaît aux écoutants, plus il les étourdit. […] Ovide, par exemple, en était venu à ne faire du distique qu’une paire de vers tombant deux à deux, tandis qu’auparavant, et surtout chez les plus anciens, comme Catulle, la phrase poétique se déroulait libre à travers les distiques. […] Un jour (à Londres, je crois), dans un dîner où était l’abbé Dillon, il avait jasé sur ce chapitre à tort et à travers.
Ampère, a droit de faire remarquer que le génie des lieux et des races se maintient et subsiste à travers les siècles, que je ne sais quoi de doux, de suave et de clair, s’est retrouvé, bien longtemps après, dans la bouche et sur les lèvres de certains orateurs français, sortis de cette contrée voisine de Marseille : Massillon et Fléchir, Maury et Cazalès, et d’autres plus modernes. — Plus tard ou même déjà, les écoles de Bordeaux étaient célèbres et présageaient les succès oratoires de la Gironde. […] On n’entrevoit qu’à de rares endroits et comme par de rares fissures ce latin vulgaire, qui filtre accidentellement à travers le latin écrit. […] Il compare encore ce grand phénomène aux formations géologiques : « Ce ne sont pas, dit-il, des amas çà et là disséminés par l’action turbulente et saccadée de mille courants variables, mais ce sont des dépôts lents et uniformes produits par l’action également lente et uniforme de vastes mers et de grands lacs. » Il cherche et retrouve la filiation jusque dans le désordre apparent ; il la dégage et la démontre souvent avec bonheur à travers tous les déguisements qui la masquent, et les irrégularités qui sautent aux yeux. […] Le mot est de Caton l’ancien, qui dit « Pleraque Gallia duas res industriosissime consequitur, rem militarem et argute loqui. » Nation belliqueuse et bien parleuse ; c’est à nous de juger (en tant qu’on peut se juger soit même) si le double trait s’est bien conservé à travers les siècle.
En sorte que l’archétype et le prototype de la comédie dans vos doctes traités, le modèle éternel et universel des poètes comiques à travers les peuples et les âges, c’est mon théâtre — moins les indécences et les allusions personnelles. […] Pourquoi, lorsqu’elle était enfant, n’aimait-elle pas Molière ou l’aimait-elle si mal que Le Misanthrope lui paraissait moins beau que Les Fourberies de Scapin, et que, dans cette farce préférée, Géronte roué de coups à travers un sac lui semblait plus comique que Géronte maudissant le Turc et sa galère ? […] Ceux qui ne voient pas l’astre du jour au firmament, ne l’aperçoivent point à travers le prisme qui le décompose en sept couleurs. […] Car « la trame de nos sensations est si compliquée, qu’à grand-peine l’analyse la plus subtile en peut-elle saisir un fil bien séparé et le suivre à travers tous ceux qui le croisent.
C’est l’immortel caractère de ce monument musical : on y sent à la fois bouillonner le vice, prier l’innocence, défier le ciel, foudroyer le crime, éclater la justice divine, rayonner l’immortalité rémunératrice à travers les fausses joies et les faux triomphes d’un scélérat de plaisir. […] Le tonnerre gronde dans les basses, les éclairs jaillissent de toutes parts ; et don Juan, intrépide, impavidus, au milieu de cette conflagration de tous les éléments harmoniques et de la colère des hommes, puisant dans l’idéal qui l’illumine une force héroïque, se fraye un passage à travers la foule tremblante, qu’il accable de son mépris. […] À travers le tumulte des instruments s’échappent, comme par éclairs, les accents infernaux. » L’actrice qui a représenté donn’Anna se glisse pendant l’entracte dans la loge d’Hoffmann. […] Le vent, qui pénètre à travers les portes entrouvertes, agite le rideau.
Je ne l’ai jamais connue, mais je l’ai entrevue quelquefois dans ses promenades en voiture sous les pins parasols, à travers les statues, moins belles qu’elle, des jardins Borghèse. […] Avant d’atteindre la cime du plateau, et de tourner à gauche dans la gorge sombre de pâturages, de torrents, de grands bois qui servent d’avenues à l’abbaye, la nuit était faite ; on ne voyait plus le chemin sous les pas de son cheval ; quelques rares lueurs, à travers les branches d’arbres, indiquaient seules une ou deux chaumières éparses, châlets des pasteurs de l’Apennin plaqués sur les flancs de la montagne, à notre gauche ; à droite, le murmure d’un torrent invisible et profondément encaissé montait comme une terreur dans la nuit. […] Je commençais à maudire ma curiosité, quand un bruit de pas, à travers le feuillage, sous les arbres sur notre droite, appela notre attention. […] Son mari est un de ces deux beaux et vigoureux marins, tout pensifs, qui se préparent au départ ; elle ne les regarde déjà plus, car elle ne verrait plus à travers ses larmes ; ses joues sont pâles et fanées de sa douleur ; mais cette douleur est calme et belle comme l’habitude de la résignation dans une profession qui vit de périls mortels.
L’armée poursuivait sa marche à travers la Piérie et la Chersonèse. […] Ils entrevirent confusément, à travers les tourmentes des vents et des eaux, des faces de Divinités courroucées. […] Une foudre extraordinaire éclata sur les assaillants ; la montagne se fit catapulte et lança deux rochers énormes qui roulèrent à travers leurs rangs, en les écrasant par longues files. […] Il lui fallut appeler à l’aide les Athéniens restés en dehors de l’attaque centrale, aux prises avec les Thébains Médisants. — Athènes contre la Béotie : duel naturel et prédestiné qui s’est poursuivi, sous toutes les formes, à travers les âges.
La chaîne de ces formes transitoires ne forme cependant pas en ces divers cas, ou en aucun autre, une série droite d’une espèce vivante à l’autre, mais elle dessine un circuit irrégulier passant à travers les formes qui ont vécu antérieurement. […] D’après ces diverses considérations ou quelques autres analogues, d’après notre ignorance complète au sujet de la géologie des contrées autres que l’Europe et les États-Unis, et surtout d’après la révolution que les découvertes faites depuis ces douze dernières années ont effectuée dans nos idées paléontologiques, il me semble aussi présomptueux de dogmatiser sur la succession des êtres organisés à travers le monde entier, qu’il le serait à un naturaliste de discuter du nombre et de la distribution des productions naturelles de l’Australie, après avoir pris terre pendant cinq minutes sur l’une des côtes les plus stériles. […] Nos continents semblent bien avoir été produits par une force de soulèvement prépondérante à travers de fréquentes oscillations ; mais les aires où cette même force s’exerce avec prépondérance ne peuvent-elles avoir changé dans le cours des âges ? […] Comme les plus hautes montagnes sont celles qui paraissent avoir subi la plus longue série de soulèvements, et que ce sont encore celles qui se sont le plus récemment soulevées ; que, du reste, ces soulèvements aient été réels ou qu’ils ne soient, au contraire, que le résultat de l’affaissement des plateaux et des plaines voisines, on peut toujours dire qu’en thèse générale les irrégularités de la surface du globe ont été constamment en augmentant, à travers toute la succession des âges géologiques.
Aussi est-il partout presque à la fois, et jamais ne vit-on voyageur plus multiplié, plus infatigable : tantôt à la suite du prince de Galles à Bordeaux, tantôt à Melun, tantôt à Milan, à Bologne, à Rome, tantôt à Auch ou à Orthez, puis en Hollande, et à travers tout cela de temps en temps en Hainaut où il obtient une cure ; mais il n’y eut oncques curé moins sédentaire ni qui fît plus gagner les aubergistes et taverniers en tous lieux où il passait. […] Il a la morale de son temps, celle des seigneurs et chevaliers qu’il hante et qu’il sert ; il a le culte de ce qui paraît beau et brillant autour de lui, de ce qui rapporte profit, honneur et renommée à travers le monde.
Cet apaisement, cette simplification et ces temps de repos qu’il lui prêche, cet état de tranquillité et de quiétude morale auquel il le voudrait insensiblement amener, — ne pas toujours voir Dieu à travers la grille d’un raisonnement étroit et serré, — c’est de la part de Fénelon un conseil du bon sens le plus clairvoyant, le plus net, et qui dans le cas présent, autant que nous en pouvons juger, allait le mieux à son adresse ; c’est encore du bon quiétisme. […] Ici Fénelon, parlant à un jeune homme, y mêle un ton d’affection plus gracieux, plus paternel ; ces lettres au vidame d’Amiens, lues à leur date à travers les autres, sont d’un effet aimable : l’énergie et quelque ton de sévérité s’y tempèrent aussitôt d’un sentiment de tendresse que l’ami du père reporte sur les enfants.
Sévère jusqu’à l’injustice pour ces hommes de science positive, Buffon sensible au talent, au grandiose, à la réflexion humaine quand elle se projette à travers les vues physiques, fait plus de cas d’un Pline à l’esprit fier, triste et sublime, bien qu’il déprise toujours l’homme pour exalter la nature ; il ne parle de cet ancien qu’avec une impression de respect et en laissant sous le voile ses nombreux défauts. […] Comme Mme Necker, comme Hume et Gibbon, vous ne pouvez concevoir Buffon qu’à travers l’auréole que son Histoire naturelle lui a faite.
» Le roi, secouant la tête, lui répondit : « C’est un peuple : si mon plus grand ennemi était là où je suis, et qu’il le vît passer, il lui en ferait autant qu’à moi, et crierait encore plus haut qu’il ne fait. » Cromwell ne dirait pas mieux ; mais, comme le caractère d’un chacun imprime aux mêmes pensées une diverse empreinte, Henri IV ne laissait pas de rester, à travers cela, indulgent et bon, et, qui plus est, de gausser l’instant d’après comme de coutume. […] Même à travers ce qu’il peut y avoir d’inexactement recueilli ou d’arrangé après coup dans la harangue de Henri, nous saisissons aussitôt les différences.