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456. (1882) Autour de la table (nouv. éd.) pp. 1-376

Elles sont le ciment du pont invisible jeté sur les abîmes du ciel entre cet Éden et notre terre d’exil. […] Pour moi, une pensée, jetée à travers ce livre, exprime admirablement le livre et l’auteur lui-même. […] Elle n’était pas encore sur l’horizon lorsque Goethe jetait sa vie et son génie dans le creuset du siècle. […] C’est bien là le regard qu’un grand et courageux désespoir jette en passant sur la vie tranquille des hommes simples. […] Mais il avait besoin de jeter hors de lui cette humeur secrète qui manquait d’aliments.

457. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — N. — article »

Ces Vies, au nombre de soixante-seize, peuvent jeter un grand jour sur l’Histoire de notre ancienne Littérature.

458. (1898) XIII Idylles diaboliques pp. 1-243

Pour le ravigourer, je lui conseillai Hegel1. — Il se jeta dans Hegel, comme on se jette dans un puits : il ne trouva pas la vérité au fond. […] Ne trouvant pas le syllogisme, il entrait en fureur et il jetait des cailloux dans les branches des arbres. […] Il arrache la croix et la jette dans l’abîme. […] Le vent me jette des poignées de grêle à la figure. […] Il lui jette une poignée de flammes à la figure.

459. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « en tête de quelque bulletin littéraire .  » pp. 525-535

Les talents plus anciens, et des plus éminents, qui appartenaient à des groupes et à des doctrines considérables sous la Restauration, se sont trouvés tout d’un coup sans protection et comme jetés hors de leur cadre : ils n’ont plus su se tenir, et, en voulant continuer à se déployer, ils sont vite arrivés à n’être plus eux-mêmes. […] Le rapprochement philosophique et littéraire de l’auteur des Paroles d’un Croyant et du peintre magnifique de Lélia n’a rien eu de plus inattendu, de plus caractéristique par rapport à l’époque, que le soudain et profond reflet que vient de jeter la manière de M. de Balzac sur toute une partie souterraine de la Chute d’un Ange par M. de Lamartine.

460. (1874) Premiers lundis. Tome II « Poésie — Alexandre Dumas. Mademoiselle de Belle-Isle. »

Nous remontons sans doute au moyen âge aussi ; mais c’est là, surtout au théâtre, une fièvre chaude, un peu factice, et qu’il est difficile de faire partager au grand nombre : au lieu qu’avec le xviiie  siècle, nous ne nous sentons pas tellement éloignés que cela ne rentre aisément dans nos goûts au fond et dans nos mœurs, sauf un certain ton, un certain vernis convenu qu’on jette sur les personnages, un peu de poudre et de mouches qui dépayse et rend le tout plus piquant. […] L’auteur s’est conduit bravement, il est entré in medias res, comme on dit ; il s’est jeté là comme son héros à Port-Mahon.

461. (1920) La mêlée symboliste. I. 1870-1890 « F.-A. Cazals » pp. 150-164

On précisait : un chaud et froid contracté à la sortie d’une des séances de la Haute-Cour ; un érysipèle de la face ; trois jours de maladie, de cauchemars, de fièvre délirante, puis soudain le réveil d’une conscience abolie, un regard douloureux qui se reprend et qui jette une dernière lueur consciente sur les êtres chers qui vous entourent, comme pour leur demander pardon de les quitter ; des mains hâtivement pressées dans la chaleur d’une rapide étreinte, d’un adieu suprême, puis la tête qui retombe… et… plus rien ! […] Le facteur entre et jette un paquet de lettres portant la suscription : « Léon Deschamps » ; cruelle ironie, témoignage de la fragilité des choses que ces lettres écrites d’hier et qui arrivent trop tard.

462. (1920) La mêlée symboliste. II. 1890-1900 « L’Âge héroïque du Symbolisme » pp. 5-17

Il se voit pris à partie par une belle assistante qui s’indigne de son entreprise comme d’un hommage au Symbolisme et qui, brandissant, contre lui, un éventail menaçant, le poursuit à son départ jusque dans l’antichambre et lui jette avec un frémissement colère : « Vos symbolistes… je les déteste !  […] C’est l’année où, tandis que Th. de Banville jette en suprême adieu Les Occidentales et Rimes dorées, Verlaine donne Bonheur ; Stéphane Mallarmé, Pages ; Henri de Régnier, Épisodes, Sites et Sonnets ; Jean Moréas, le Pèlerin passionné ; Maurice du Plessys ; la Dédicace à Apollodore ; Laurent Tailhade, Vitraux et le Pays du Muffle ; Rodenbach, le Règne du Silence ; Stuart Merrill, Les Fastes ; Gustave Kahn, Chansons d’amant ; Emmanuel Signoret, le Livre de l’Amitié ; René Ghil, le Vœu de Vivre ; Louis Dumur, Lassitudes ; Gabriel Vicaire, À la Bonne Franquette ; Ajalbert, Femmes et Paysages ; Ernest Raynaud, Les Cornes du Faune 3, et si je ne devais m’en tenir aux poètes, je mentionnerais que c’est l’année où Maurice Barrès donne Sous l’œil des barbares et Trois stations de psychothérapie ; Léon Bloy, la Chevalière de la mort ; Huysmans, Là-Bas ; Péladan, l’Androgyne ; Rachilde, La Sanglante ironie ; Albert Autier, Vieux… 1891 !

463. (1885) Préfaces tirées des Œuvres complètes de Victor Hugo « Préfaces des pièces de théâtre — Préface de « Ruy Blas » (1839) »

En effet, au-delà de cette barrière de feu qu’on appelle la rampe du théâtre, et qui sépare le monde réel du monde idéal, créer et faire vivre, dans les conditions combinées de l’art et de la nature, des caractères, c’est-à-dire, et nous le répétons, des hommes ; dans ces hommes, dans ces caractères, jeter des passions qui développent ceux-ci et modifient ceux-là ; et enfin, du choc de ces caractères et de ces passions avec les grandes lois providentielles, faire sortir la vie humaine, c’est-à-dire des événements grands, petits, douloureux, comiques, terribles, qui contiennent pour le cœur ce plaisir qu’on appelle l’intérêt, et pour l’esprit cette leçon qu’on appelle la morale : tel est le but du drame. […] Cela dit, ou même simplement senti, le gentilhomme prend la chose au vif, décuple sa livrée, achète des chevaux, enrichit des femmes, ordonne des fêtes, paie des orgies, jette, donne, vend, achète, hypothèque, compromet, dévore, se livre aux usuriers et met le feu aux quatre coins de son bien.

464. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre XII. Mme la Princesse de Belgiojoso »

Grand sujet de curiosité pour les utopistes de tous les genres, — et, dans ce temps-là, le catholicisme n’en manquait pas, — une révolution à Rome, une révolution qui allait, croyait-elle, jeter la barque de saint Pierre dans les aventures, fit lever et rallia, comme le coup de trompette du Josaphat des vivants, tous les fous superbes de l’univers, tous les bohèmes de la fortune, de l’esprit et de la beauté pour les rasseoir, il est vrai, un peu rudement, quand la machine chargée par Lamennais, Gioberti et tant d’autres, éclata, mais montrant, à travers ses débris, Rossi poignardé, le Pape en fuite et Mazzini régnant dans Rome assiégée. […] Elle a recouvré sa grâce première ; elle a ôté ce vilain bas bleu qui n’allait pas à sa jambe de princesse et l’a jeté placidement au nez de la civilisation occidentale, du fond de cette simple ferme d’Asie qu’elle habite, porte fermée aux illusions.

465. (1885) Les œuvres et les hommes. Les critiques, ou les juges jugés. VI. « Paul de Saint-Victor » pp. 217-229

Il la jetait dans ces feuilletons, qui ne durent qu’un jour, et qui sont toujours un peu la fenêtre par laquelle on jette l’argent de son esprit à cette bête de foule, qui ne le ramasse même pas !

466. (1885) Les œuvres et les hommes. Les critiques, ou les juges jugés. VI. « Lenient » pp. 287-299

L’Université en a donné plusieurs qui ont jeté de l’éclat dans les lettres ; mais M.  […] et non plus seulement comme un homme jeté dans un moule, fait à l’emporte-pièce ou obtenu à l’aide de procédés quelconques ?

467. (1905) Les œuvres et les hommes. De l’histoire. XX. « La Révolution d’Angleterre »

Un esprit de cette gravité, de cette conscience, dédaignerait, après les grands travaux qu’il a publiés, de jeter au public les larves d’une pensée qui vivrait ailleurs, forte, organisée et complète. […] Toujours est-il que le coup d’œil jeté, dans ces biographies, sur ce tas d’hommes médiocres qui ont eu, pourtant, leur jour et leur heure, n’est jamais tombé de plus haut et avec un rayon plus calme.

468. (1906) Les œuvres et les hommes. Femmes et moralistes. XXII. « Laïs de Corinthe et Ninon de Lenclos » pp. 123-135

Quelque éclat qu’ils aient jeté, c’est toujours le règne de la bête, quand la bête serait aussi spirituelle que Laïs l’était peu et que Ninon de Lenclos le paraît, sans l’être beaucoup davantage. […] Elle a jeté d’élégantes draperies sur sa conception.

469. (1861) Les œuvres et les hommes. Les historiens politiques et littéraires. II. « XIV. Vaublanc. Mémoires et Souvenirs » pp. 311-322

Dès sa jeunesse, il avait été une des têtes les plus comptées de ce parti royaliste qui périt, après avoir jeté son dernier cri de détresse inutile, en 89 ! […] C’est celui où Julien se dit en parlant de la femme qu’il aime et en mettant un pistolet chargé dans sa poche : « Je la presserai dans mes bras ce soir, ou je me brûlerai la cervelle. » À chaque péril qui peut le démoraliser, à chaque fatigue qui tombe sur son âme, Vaublanc a mieux que le pistolet de Julien ; il a son mépris qu’il se parle et qu’il se tient toujours chargé sur le cœur. « Tu es un lâche si tu fais cela », dit-il, et il ne le fait pas, le noble homme ; et il continue de vivre dans des conditions d’existence intolérables, traqué, mourant de faim, persécuté de gîte en gîte, mais ne voulant pas émigrer et ne voulant pas que ses ennemis qui le poursuivent pour le jeter à l’échafaud, aient plus d’esprit que lui en le prenant !

470. (1888) Les œuvres et les hommes. Les Historiens. X. « Léopold Ranke » pp. 1-14

En poésie, il y a des poèmes qui, comme certaines pierres précieuses, n’ont pas un défaut, ou qui le cachent sous l’éclat qu’elles jettent. […] C’était un défaut, mais ce défaut, du moins, jetait un intérêt profond, amer et toujours excité, sur l’Histoire, prise ainsi dans ses sources abaissées, et faisait de Ranke un historien piquant, sans être pourtant scandaleux.

471. (1893) Les œuvres et les hommes. Littérature épistolaire. XIII « L’abbé Galiani »

Il avait pour oncle Mgr Célestin Galiani, archevêque de Tarente, grand aumônier du Roi de Naples, et dès son premier âge on lui jeta des abbayes à la tête comme à un neveu de Monseigneur son oncle. […] Si la nostalgie de Paris n’avait pas poussé le pauvre Galiani à jeter des lettres dans ce tombeau où les lettres arrivent , disait si mélancoliquement Madame de Staël de l’absence, il ne se serait pas endormi sous le bleu du ciel de Naples comme les lazzaroni de ses bornes, car il n’avait rien du lazzarone, cet homme d’éther et de phosphore, mais il aurait, avec cette dextre souplesse qui est le caractère de son genre de génie, rempli stoïquement les hautes fonctions économiques, financières, administratives et judiciaires auxquelles le gouvernement napolitain l’appela pour lui faire oublier sa disgrâce d’un jour.

472. (1899) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (troisième série). XVII « Barthélemy Saint-Hilaire »

Bayle, le sceptique, avait été moins injuste, et Voltaire, plus tard, superficiel et détraqué, avait, dans son Essai sur les Mœurs, relevé son bonnet, tombé dans la titubante ivresse de la haine… Du reste, encore une chose à remarquer de la part de ces philosophes, qui ont été bien heureux que Molière eût inventé Tartufe pour avoir une injure à jeter à toute l’humanité religieuse ! […] Il n’a pas tiré tout seul de son cerveau cette vaste organisation d’une religion que l’on jette aux hommes.

473. (1906) Les œuvres et les hommes. Poésie et poètes. XXIII « Maurice Bouchor »

Nous ne savions pas quels cris cela jetait vers le ciel, qui n’était pour eux que du bleu, — que de l’azur sourd, vide et stupide ! […] Jamais au clair soleil je ne tendrai les bras, Car il ne connaît point les rayons qu’il nous jette ; Rien ne peut animer notre sol qui végète… Sans savoir que tu meurs, ô terre, tu mourras !

474. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre V. Des Grecs, et de leurs éloges funèbres en l’honneur des guerriers morts dans les combats. »

Je m’imagine que dans ce moment, le père devait approcher de son fils, et lui dire : « Tu vois dans quel pays tu es né, et comme on y honore tout ce qui est grand ; et toi aussi, mérite un jour que ton pays t’honore. » Ainsi, chez les Grecs, de quelque côté qu’on jetât les yeux, on trouvait partout des monuments de la gloire ; les rues, les temples, les galeries, les portiques, tout donnait des leçons aux citoyens. […] Le peuple y accourait en foule ; il jetait sur ces ossements des couronnes de fleurs, de l’encens et des parfums.

475. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — B — Bengy-Puyvallée, Antoine de (1854-19..) »

Charles Fuster M. de Bengy-Puyvallée a trouvé des mignardises tout à fait délicates et délicieuses ; il s’est fait un moyen âge exquis, un dix-huitième siècle adorable, — et, à travers tout cela, la passion moderne jette parfois ses cris : l’ensemble est d’une originalité extrême, d’une fine saveur… Nous le répétons, c’est un art très particulier, très subtil et infiniment nuancé.

476. (1761) Salon de 1761 « À mon ami M. Grimm » pp. 112-113

Je les jette sur le papier sans me soucier ni de les trier ni de les écrire.

477. (1761) Salon de 1761 « Peinture —  Drouais  »

comme ces cheveux sont jetés !

478. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — D — Des Essarts, Alfred (1811-1893) »

Anonyme Alfred des Essarts se jeta vers 1832 dans le mouvement de l’école romantique, à laquelle il est demeuré fidèle, tout en ayant modifié et perfectionné sa facture depuis l’évolution marquée par la Légende des siècles.

479. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — C — article » p. 450

Les Notes & les Dissertations qui accompagnent cette derniere, jettent un grand jour sur plusieurs objets concernant les usages & les révolutions arrivées chez les Romains.

480. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — L — article » p. 62

Il n’est pas toujours exact ; la multitude de ses compositions l’a sans doute jeté quelquefois dans des négligences & des méprises, qu’un plus mûr examen lui auroit fait corriger.

481. (1862) Cours familier de littérature. XIV « LXXXe entretien. Œuvres diverses de M. de Marcellus (3e partie) et Adolphe Dumas » pp. 65-144

Enfin, maintenant une divinité me jette ici pour y subir peut-être de nouvelles infortunes ; car je pense qu’elles ne vont pas cesser, mais bien plutôt que les dieux les multiplieront encore. […] Va plus loin que lui, et jette tes bras autour des genoux de ma mère, afin de voir l’heureux jour du retour, quelque lointain que soit ton pays. […] — Donnez-moi cela, lui dis-je, et ne le publiez jamais ; les poètes aussi doivent jeter leur manteau sur les nudités de leur temps. […] J’oubliais de vous dire qu’un gros livre in-quarto à deux colonnes était ouvert sur sa table, et qu’un chapelet grossier, dont les grains luisants témoignaient qu’ils avaient glissé longtemps dans les doigts (celui de sa mère), était négligemment jeté sur les pages. […] Si mon petit chien voit passer un régiment dans la rue, il me suit sans y faire attention ; mais s’il aperçoit de loin un groupe d’enfants sur le trottoir, il se jette à toute course de l’autre côté de la rue, il se range et il évite les ennemis naturels de tout ce qui est bon et faible, et il va m’attendre bien loin au-delà du danger.

482. (1889) Histoire de la littérature française. Tome IV (16e éd.) « Chapitre septième »

Tantôt il regarde le mystère en face, et il se porte impétueusement au plus épais des saintes obscurités, avec le généreux courage d’un soldat qui se jette dans une mêlée. […] Pendant que le dialecticien échoue devant la raison de tel petit esprit opiniâtre qui, du doute où vous l’avez laissé, passera bientôt au mépris, Bossuet, en attaquant l’homme par tous les points sensibles, abat toute contradiction, et jette l’âme la plus rebelle dans un trouble d’où sortira peut-être la foi, d’où ne sortira jamais le mépris. […] Il insultera les pécheurs ; il leur jettera la malédiction et l’anathème ; la chaire chrétienne retentira d’expressions violentes. […] Il jette de la défaveur sur les vertus chrétiennes, la prudence, l’humilité, le manque d’ambition, la crainte de soi-même qu’il appelle servile. […] Qui sait même si ces premiers regards de la gloire, dont Vauvenargues compare la douceur à celle des premiers rayons de l’aurore, ne sont pas le premier coup d’œil que jeta Voltaire étonné et charmé sur les Réflexions critiques du jeune écrivain ?

483. (1887) Journal des Goncourt. Tome I (1851-1861) « Année 1857 » pp. 163-222

Je jette mes phrases en l’air… comme des chats, je suis sûr qu’elles retomberont sur leurs pattes. […] Il est bien souvent descendu là-dedans, une corde suspendue à un arbre jeté en travers. […] un fort trou, où on jette des pierres qu’on n’entend pas tomber. […] * * * — Idée d’une insertion dans les petites affiches à propos d’un dîneur qui n’est plus amusant : « À céder un parasite qui a servi. » 28 mai Notre pièce des Hommes de lettres va être finie — des châteaux en Espagne — et nous nous disons que, si elle nous rapportait de l’argent, beaucoup d’argent, nous nous amuserions à blaguer cet argent, à le fouler aux pieds, à en rire, à en faire abus, à le jeter et à le faire rouler dans l’absurde. […] Un nom d’homme est prononcé, à propos duquel Deslions jette à Juliette : — Tu sais, cet homme que tu as tant aimé et pour lequel tu t’es tuée ?

484. (1856) Cours familier de littérature. II « VIIe entretien » pp. 5-85

Nous pensons plutôt que ces belles parties vivantes du monde n’ont pas encore atteint leur maturité, et qu’elles jettent encore, comme nous disons nous autres contemplateurs des vagues, la folle écume de leur longue jeunesse. […] Violer cette base, ce n’était pas seulement une iniquité, c’était la guerre, c’était le meurtre en masse, c’était le sang humain jeté au hasard et à pleine main sur la terre d’Europe ! […] L’imagination et l’amour ont aussi leur patriotisme ; c’est le patriotisme de l’imagination et de la poésie qui m’attachait à cette patrie d’adoption où je fus jeté avant l’âge où l’on pense à s’attacher à sa patrie natale. […] Ils foulèrent aux pieds la fleur venant de naître,         Et la danseuse avec dédain, Se courbant, te jeta pâle par la fenêtre,         Comme un vil débris du jardin. […] Les hauts et immobiles cyprès qui commencent là à végéter, jetaient çà et là sur la route l’ombre allongée et noire de ces obélisques de la végétation ; les figuiers, semblables à des spectateurs accoudés autour d’un cirque, appuyaient leurs larges feuilles poudreuses sur les murs blancs qui bordaient le chemin ; les oliviers tamisaient d’une légère verdure les rayons du soleil qui tremblaient entre leurs branches sur les sillons.

485. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Agrippa d’Aubigné. — I. » pp. 312-329

Il y paya tribut par des sonnets jetés dans le même moule ; amoureux, il composa ce qu’on appelle son Printemps, c’est-à-dire un recueil de vers plus ou moins tendres ou légers ; il convient qu’il y avait moins de politesse et de correction que de verve et de fureur. […] Ce notable seigneur, deux heures après avoir donné le bonsoir à sa femme, fut réveillé par les chauds soupirs et sanglots qu’elle jetait : il se tourne vers elle, et après quelques propos il lui donna occasion de parler ainsi. […] Pour nous, lecteurs d’aujourd’hui, à qui échappent un bon nombre des termes, des qualifications en usage et des métaphores courantes qu’il emploie, autant vaudrait donner dans une forêt de piques que de nous jeter dans ses récits d’Arques ou de Coutras, si on n’avait pas d’autre narration plus distincte pour en prendre idée.

486. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Journal d’Olivier Lefèvre d’Ormesson, publié par M. Chéruel » pp. 35-52

Il jeta ses vues sur la famille de M. de Morvilliers, évêque d’Orléans et conseiller d’État, et rechercha une de ses nièces qui lui fut accordée : cette jeune personne appartenait du côté paternel à la famille de saint François de Paule, pour qui la famille d’Ormesson aura une dévotion toute particulière. […] Ce ne sont pas seulement les pages et laquais, ce n’est pas seulement le menu peuple, qui est ingrat envers le cardinal, c’est le roi qui, en mourant dévotement, lui paye cette dette de reconnaissance pour toute la grandeur qu’il avait donnée à son règne ; et en effet qu’aurait-il été, ce roi, sans le cardinal qui, pendant vingt ans, ne lui avait jamais fait faire les choses que par contrainte : « De sorte que pendant sa maladie il disait que les peines et contraintes que le cardinal avait faites sur son esprit l’avaient réduit en l’état où il était. » Louis XIII mort, la rage du bon peuple est au comble ; neveux et nièces du cardinal, les marquis de Brezé et de Pont-de-Courlay et la duchesse d’Aiguillon, sont obligés de se retirer d’appréhension et de se jeter dans le Havre. […] Le temps fera raison à ce grand homme de toutes ces injures, et ceux qui le blâment aujourd’hui connaîtront peut-être à l’avenir combien sa conduite eût été nécessaire pour achever la félicité de cet État, dont il a jeté tous les fondements.

487. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « Le Poëme des champs par M. Calemard de Lafayette. »

Quand l’aube jette aux monts sa rose bandelette, Cet étroit paradis, parfumé de verdeurs, Au devant du soleil, comme une cassolette, Enroule autour des pics la brume violette, Qui, par frais tourbillons, sort de ses profondeurs. […] Dans une page déchirée des Mémoires d’Outre-Tombe que le vent m’apporte par ma fenêtre entr’ouverte, je trouve un aveu, un refus presque pareil, bien que sur un tout autre ton, une confession où se peint, une fois de plus, cette passionnée et délirante nature de René ; j’y supprime seulement, çà et là, quelques traits, quelques notes trop ardentes et qui ne seraient à leur place que dans le Cantique des Cantiques : « Vois-tu, s’écrie le vieillard poëte s’adressant à la jeune fille qui s’est jetée à sa tête, comme on dit, et qui lui offre son cœur, vois-tu, quand je me laisserais aller à une folie, je ne serais pas sûr de t’aimer demain. […] Les cigales dans l’air jettent leur note aride ; Les champs sont embrasés.

488. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « Salammbô par M. Gustave Flaubert. Suite et fin. » pp. 73-95

Après la scène du sacrifice, où l’on jette entre les bras de la statue d’airain jusqu’à quatorze enfants, on a aussitôt la pluie ; le ciel se détend, et bientôt la chance tourne aussi, la face des affaires change, et l’on arrive un peu vite à la scène du défilé de la Hache, où la plus grande partie de l’année barbare est cernée. […] L’érudition, qui peut y jeter un pont, nous refroidit en même temps et nous glace. […] Tout ce que nous lui demandons, nous, du simple troupeau des mortels parisiens, c’est qu’il nous revienne le même qu’auparavant, bronzé au front, un peu plus mûr cependant et légèrement radouci au cœur ; ayant jeté là bas, sur la plage africaine, tous ses surcroîts de fureurs et de rages vengeresses ; toujours armé, mais non impitoyable.

489. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « Ducis épistolaire (suite) »

A vingt-deux ans, il s’était complètement affranchi des croyances ; mais le principe d’exaltation était dans sa famille, et l’un de ses jeunes frères, entré également chez les Jésuites, et juste au moment de leur suppression en France, avait l’imagination si frappée qu’il n’avait cru trouver de salut et d’abri qu’en s’allant jeter de là à La Trappe. […] Aussi, quand il vit les brouilles et les petites altercations commencer entre eux, il se jeta à la traverse, il les supplia à mains jointes de ne pas rompre par de misérables zizanies la bonne intelligence qui faisait une partie de leur force : « Qui aimerez-vous, Messieurs, quand votre amitié réciproque aura cessé ? […] On entend le bruit de la vague qui nous dit que nous passons, et l’on jette un regard sur la scène variée du rivage qui s’enfuit. » Ces charmants passages de Ducis m’en rappellent de tout pareils dans les lettres de Béranger : même philosophie riante et résignée, mêmes images poétiques à la fois et naturelles ; mais, chez Ducis le tragique, il s’y mêle bientôt des tons plus sombres et qui montent.

490. (1866) Nouveaux lundis. Tome VI « Vie de Jésus, par M. Ernest Renan »

Sa mère, femme sage, et jugeant que son fils n’était pas de la force ni de la trempe qui fait les combattants, lui écrivait : « Il ne faut pas jeter ainsi feu et flamme ; penses-y, toi qui as besoin d’être aimé ! […] Ce n’est pas jeter feu et flamme qu’il veut, ce n’est pas attaquer et fronder, ce n’est pas ébrécher, ce n’est pas détruire. […] Renan a dû se dire de même : « J’ai vu les croyances de mon temps, et j’ai publié mon livre. » Rousseau ajoutait, en parlant des mêmes lettres de Saint-Preux et de Julie : « Que n’ai-je vécu dans un siècle où je dusse les jeter au feu ! 

491. (1866) Nouveaux lundis. Tome VI « Œuvres de M. P. Lebrun, de l’Académie française. »

On ne saurait mieux voir ni mieux dire : « Entouré de bois et élevé au sommet d’une falaise, sur le bord de la Seine, à l’endroit où elle commence à devenir la mer, ce château domine de ses tours quelques maisons de pêcheurs et une petite vallée étroite et boisée, au fond de laquelle naît un ruisseau qui la partage, et qui vient se jeter à la Seine après avoir fait tourner un moulin. […] Il ne reverra plus son cher Tancarville qu’après trente années presque révolues d’absence (septembre 1845) ; en le revoyant, sa verve se ranime avec toutes les émotions de son cœur, et il le salue, il le célèbre encore une fois par une Épître où l’homme sensible et le sage jettent un dernier regard mélancolique, mais non morose, sur ce passé : Parmi tous ces débris où j’ai souvent erré, Où j’ai joui, souffert, aimé, rêvé, pleuré, Mon heureuse jeunesse en vingt lieux dispersée Soudain de toutes parts remonte à ma pensée. […] Pour ceux qui ignorent la géographie (et ils sont nombreux en France), nous dirons que le Lez est un fleuve qui se jette dans la Méditerranée et qui fait partie du bassin du Rhône.

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