Emprisonné, odieusement réduit à toutes les privations, parce que son existence est déclarée incompatible avec la sûreté des Gouvernements, La Fayette ne cesse un seul instant d’être à la hauteur de sa cause. […] Je crois avec madame de Tessé que sa faculté d’espérer persista toujours un peu disproportionnée aux circonstances, et que, par instants contenue, elle reprenait les devants au moindre jour qui s’ouvrait. […] Il avait beau s’ensevelir à Lagrange, dans une vie de fermier et de patriarche, on le savait là ; Bonaparte ne le perdit jamais de l’œil un instant : « Tout le monde en France est corrigé, disait-il un jour dans une sortie au Conseil d’État, il n’y a qu’un seul homme qui ne le soit pas, La Fayette ! […] En arrivant très-rapidement à Paris, nous vîmes bien qu’elle était fort malade ; mais il y eut dès le lendemain un mieux que j’attribuai un peu au plaisir de nous revoir… « Voilà bien des souvenirs que j’aime à déposer dans votre sein, mon cher ami ; mais il ne nous reste que des souvenirs de cette femme adorable à qui j’ai dû un bonheur de tous les instants, sans le moindre nuage. […] Cet instant d’embarras à part, la conduite de La Fayette rentre bien vite dans sa rectitude incontestée, et elle se rapporte, durant toute la Restauration, à des sympathies générales trop partagées et encore trop récentes pour qu’il ne soit pas superflu de rien développer ici.
Il s’y rapporte par le ton et par les sujets : j’y touche aux Anciens, je m’arrête un instant au seizième siècle, je me complais au dix-septième, et nos contemporains ont aussi leur part.
Ils peuvent nous dire en détail, ces amants, ce qui se passe exactement dans leur âme, pas un instant ils ne nous font illusion, pas un instant nous ne sommes touchés : on sent trop bien que c’est Jean-Jacques qui parle. […] À chaque pas il rencontre des fantômes, et pour un instant il leur rend l’existence. […] Un instant, l’idée m’était venue, qu’il y avait de ma part quelque inconvenance à parler de M. […] Léon Bloy, dans ces instants-là, trouve ses plus beaux accents. […] Je peux vous répondre depuis un instant.
Telle est l’Histoire de Marie Bucaille, Sorciere, qui, étant en prison à Valogne, parut à quelques lieues de là, dans le même instant que le Juge de Valogne l’interrogeoit.
Karr avait éreinté sa pièce, me proposa de l’accoster quelques instants. […] Je fus le premier à reconnaître, quelques instants après, M. […] Sue de sa loge, et je le croisai quelques instants dans les couloirs. […] Sainte-Beuve, que nous avons aperçu un instant au foyer de l’Opéra, est un homme de 35 ans. […] C’est un jeune cavalier élégant et d’une physionomie extrêmement distinguée ; j’ai causé quelques instants avec lui chez M.
On dirait par instants qu’il s’intéresse à la malheureuse créature dont il raconte la vie et la mort ; on dirait qu’il la plaint et veut la faire excuser. […] Détachez un instant Madame Bovary du milieu où elle s’est produite, détachez-la de cette littérature d’imagination où, à part quelques exceptions éclatantes, on voit la nullité prétentieuse occupée à se battre les flancs, vous verrez quelles défaillances dans cette prétendue force et quelles taches dans ce soleil. […] Flaubert, s’il revenait un instant parmi nous. […] Si je m’arrête à ce mot un instant, c’est pour montrer l’espèce d’emphase particulière à l’auteur de Salammbô.
Étonnée de la désertion subite de l’ami de tous les instants, madame Victor Hugo apprit-elle de son mari le secret de Sainte-Beuve ? […] L’attendre sous la pluie quand son caprice est de ne venir que longtemps après l’instant promis ! […] Il semble, par instant, qu’on lise un de ces petits livres de la « Bibliothèque amusante » de Cazin, cousins de ceux de Crébillon fils. […] Il a cherché son chemin et, pour s’être détourné un instant, n’est pas moins rentré dans le lit où il faut qu’il achève son cours. […] Charmants souvenirs que ceux que laisse le théâtre, qui ne nous rappellent que des soirées de plaisir ou d’émotion, qui pour un instant nous font revoir de grands artistes jouant de belles pièces et dont le grand mérite est de nous rajeunir pour un instant.
Ce n’est pas que le poète se forme du beau une image grossie et exagérée : bien au contraire, il nous semble intimement pénétré par instants des plus franches délicatesses de l’idéal. […] Absorbé dans son atroce jouissance, dont le réveillait par instants un cri lointain arrivé à ses oreilles, il ne s’amusait guère à énumérer par leurs noms et qualités Pallas l’affranchi, le Grec Agénor, Aglaé de Phalère et Sénèque, qui, tout en louant Diogène, buvait du falerne dans l’or .
» Un ne pouvait dire plus de choses en moins de mots : mais, comme il suffisait de dire : « Je ne le trouvai pas chez lui », le grand nombre des circonstances fait longueur… La clarté consiste à dire d’abord ce qui s’est fait dès le premier instant, à garder l’ordre des temps et des faits, à raconter les choses comme elles se sont passées ou auront pu se passer. […] Souvent un fait immense tient dans un très court moment de la durée ; souvent, dans un instant indivisible, une action impossible à décomposer s’est produite : ce qui en fera sentir la grandeur, c’est l’opposition fortement marquée entre cette action et les actions qui la précèdent et qui la suivent, les antécédents et les conséquents, que l’on développera parfois jusqu’à la limite extrême de la patience du lecteur.
Car on ne rit pas du tout, on ne plaisante pas un instant avec le Démon de l’Absurde. […] « La Petite classe, dit Barrès, en préface, c’est le nom charmant dont Lorrain, qui y fait figure, baptise ceux et celles qui se piquent d’avoir les opinions, les sensations, les enthousiasmes, les dégoûts, les frissons artistiques les plus neufs… Les plus jeunes, les plus naïfs, les plus séduisants et aussi les plus compliquées élégantes professionnelles, voilà ce qu’est la petite classe, en même temps que son nom souligne fort bien le goût très singulier et très décidé qu’ont les femmes de cet instant pour l’instruction. » Au vrai, je ne crois guère que les petites femmes de Lorrain aient le moindre goût pour les professeurs.
La mahométane Mme Henry Gréville qui s’est créée homme… par le nom, est une nouvelle venue dans la littérature de l’instant. […] L’Expiation de Saveli vaut beaucoup mieux, sans doute, par certains détails russes qui n’appartiennent pas en propre à l’auteur, et par l’idée même, qui en est le fond ; mais l’exécution en est si pauvre et d’une telle simplicité sans couleur, que cette exécution n’est jamais, un instant, à la hauteur de l’idée qui l’a inspirée.
Il n’était pas moins instant de les publier. […] Il y a là un dénoué d’existence qui permit à ces deux êtres, si éloignés l’un de l’autre dans la vie, de se trouver un instant âme à âme, et ces deux âmes se fondirent.
De donnée, l’histoire en question, attestée par ces pages, est la plus plate et la plus vulgaire des réalités ; mais ce qui la sauve de la déshonorante admiration de ceux qui, en littérature, aiment la réalité pour sa vulgarité et sa platitude mêmes, c’est l’âme qui passe sur cette réalité et qui y met un accent absolument incompréhensible aux porcs littéraires du Réalisme, qui tracassent, pour l’instant, leur fumier, avec un groin presque superbe ! […] — ajoute-t-il en insistant, — je ne crois pas au ciel, mais je crois à l’enfer, où ma place est marquée de toute éternité ; à un enfer où l’inique Jeffries qui doit me juger m’ôtera, pour me confondre, le sentiment de l’iniquité divine, et par ses tout-puissants prestiges, domptant, éblouissant, affolant ma conscience, me fera avouer en grinçant des dents que l’injustice est juste, que l’horreur est clémente, qu’une faiblesse d’un instant exige une éternité de peine infinie ; que le péché originel, la prédestination, le petit nombre des élus, la damnation de Socrate et des enfants non baptisés, sont des miracles de miséricorde, et qu’il est juste et très juste qu’éternellement avec eux je hurle, et qu’éternellement ils râlent avec moi !!!
Alexandre Dumas, le chef de cette École de producteurs, qui imposa un instant à l’Opinion étonnée et qui se donnait, avec une gasconnade presque splendide, pour un volcan d’idées et d’inventions à jet continu, a dû être terriblement humilié en voyant de petits jeunes gens littéraires et jusqu’à des femmes imiter sans effort son genre de génie et continuer cette plaisanterie de la grande production, qui est l’ébahissement des sots. […] Il habita tour à tour les deux camps, un instant celui de Rome où de Maistre avait paru, et plus longtemps celui du village où n’existait plus que Lamennais.
Stéphane Mallarmé « Une naturelle et élégante badine qui cingle des fleurs et, par instants, rylhme songeur un souvenir… » [Lettre (juin 1897).]
Pour ma part, je crois l’expérimenter à chaque instant. […] S’il s’agit de l’instant actuel, — je veux dire d’un instant mathématique qui serait au temps ce que le point mathématique est à la ligne, — il est clair qu’un pareil instant est une pure abstraction, une vue de l’esprit ; il ne saurait avoir d’existence réelle. […] Supposez même qu’il existe : comment y aurait-il un instant antérieur à celui-là ? Les deux instants ne pourraient être séparés par un intervalle de temps, puisque, par hypothèse, vous réduisez le temps à une juxtaposition d’instants. […] Essayons, un instant, d’en faire une multiplicité.
Paul Maritain La sève qui fécondait sa belle intelligence ne s’est pas ralentie un instant ; et dans les pages suprêmes qu’il traçait de sa main défaillante, lorsque les ombres sinistres du trépas commençaient à pâlir son front, on retrouve la pureté harmonieuse, la fraîcheur de sentiments et d’images, la noblesse et l’élévation de pensées qui resteront comme les traits caractéristiques de son génie.
Aussi, quand il surmontait sa timidité et chassait sa vague tristesse de malade, inventait-il à chaque instant des paroles tour à tour enthousiastes, tendres et ingénues, qui donnaient à son entretien un charme extrême.
Tous ses Ouvrages ont été frappés de mort au même instant qu’ils ont paru.
M. du Tillet s’exprime ainsi à son sujet, avec plus de vérité que de grace : « Il avoit une facilité merveilleuse à composer des Chansons presque dans l’instant, sur tout ce qui se présentoit d’agréable ou d’intéressant, & personne n’a mieux réussi que lui dans ce genre d’écrire.
Vieux, il y revenait en souvenir et avec regret comme aux meilleurs instants de sa vie, « instants heureux, s’écrie-t-il, où, loin de s’occuper d’événements sinistres tels que ceux qui ont empoisonné la fin de notre carrière, on ne s’occupait que d’amours et de plaisirs ! […] Autre lèpre du siècle, et dont Besenval nous offre une variété : la raillerie, le persiflage, éclater de rire aux plus graves instants, et, en définitive, se moquer de tout.
Il rappela en commençant : « Qu’il y avait quarante ans que dans la même salle, dans le même lieu, et quasi à la même heure, il avait été émancipé du consentement de l’empereur Maximilien, son grand-père ; qu’il n’avait alors que quinze ans ; qu’en 1516 le roi catholique étant mort, il fut obligé de passer en Espagne l’année suivante ; qu’en 1519 il perdit l’empereur, son aïeul ; qu’alors il sollicita l’élection à l’Empire, non par ambition d’avoir plus de seigneuries, mais pour le bien de plusieurs de ses royaumes et pays, et principalement de ceux de par deçà ; que, depuis, il avait fait neuf voyages en Allemagne, six en Espagne, sept en Italie, dix aux Pays-Bas, quatre en France, deux en Angleterre, et deux en Afrique, sans compter ses visites en ses autres royaumes, pays et îles, lesquelles avaient été nombreuses, et son passage par la France en 1539, qui n’était pas la moindre de ses entreprises ; qu’il avait, dans ces divers voyages, traversé huit fois la Méditerranée et trois fois l’Océan… » Quarante années d’un semblable règne, de telles fatigues pour pourvoir à tout instant et subvenir à tant de royaumes et d’États disjoints, une santé détruite et dont le délabrement dans sa personne était visible à tous, justifiaient suffisamment une pensée de retraite depuis longtemps conçue, mais qu’il avait fallu ajourner jusqu’à ce que son fils eût atteint l’âge d’homme. […] À midi, il dînait d’une grande variété de mets ; il faisait collation peu d’instants après vêpres, et, à une heure de nuit, il soupait, mangeant dans ces divers repas, toutes sortes de choses propres à engendrer des humeurs épaisses et visqueuses. » Même dans le cloître où il s’était retiré pour soigner la double santé de l’âme et du corps, il ne mettait (son médecin Mathys nous l’apprend) aucun frein à ses envies, et ne se privait ni de fruits ni de poissons : « Dans la saison des fruits, Charles-Quint commençait son dîner en mangeant une grande quantité de cerises et de fraises, celles-ci accompagnées d’une écuelle de crème : ensuite il se faisait servir un pâté assaisonné d’épices, avec du petit salé bouilli et du jambon frit. […] Cet enfant qui promettait un héros ne paraît pas avoir égayé un instant cette triste demeure.
Il fut fort question de cela pendant l’année 1743 ; mais il y avait encore à choisir l’instant et à préparer cette entrée en scène. […] Rousset, c’est qu’on y sent l’esprit mou, la volonté molle, à la mollesse même de la phrase ; le relâchement et l’indécision sont dans la parole comme dans la pensée ; le sens y flotte ; on y passe du pour au contre en un instant. […] Le maréchal de Noailles, en cette crise troublante, ne fait rien qui vaille en Alsace, et s’il est vrai que Louis XV ait dit au comte d’Argenson : « Écrivez de ma part au maréchal de Noailles que, pendant qu’on portait Louis XIII au tombeau, le prince de Condé gagna une bataille » ; si ce mot, qui a tout l’air de ceux qu’on fait après coup et qu’on prête aux rois, n’est pas de l’invention de Voltaire, le maréchal répondit mal à l’appel ; il ne répondit certainement pas à l’intention ; il a manqué là le moment rapide, le moment illustre ; il n’est pas Turenne, et dès cet instant le prestige de son grand crédit s’évanouit.
Désormais séparée de sa fille, qu’elle ne revit plus qu’inégalement après des intervalles toujours longs, Mme de Sévigné chercha une consolation à ses ennuis dans une correspondance de tous les instants, qui dura jusqu’à sa mort (en 1696), et qui comprend l’espace de vingt-cinq années, sauf les lacunes qui tiennent aux réunions passagères de la mère et de la fille. […] Le monde va si vite de nos jours, et tant de choses sont tour à tour amenées sur la scène, que nous n’avons pas trop de tous nos instants pour les regarder et les saisir. […] Mme de La Fayette lui écrivait : « Votre présence augmente les divertissements, et les divertissements augmentent votre beauté lorsqu’ils vous environnent ; enfin la joie est l’état véritable de votre âme, et le chagrin vous est plus contraire qu’à personne du monde. » Mme de Sévigné avait ce qu’on peut appeler de l’humeur, dans le sens d’humour, mais une belle humeur à chaque instant colorée et variée de la plus vive imagination.
Par tous ces défauts si chers au siècle, autant que par ses beautés si neuves et si bien ménagées, le livre de Bernardin eut, dès le premier instant, un succès d’enthousiasme. […] Au milieu du bruit qu’occasionnaient tous ces déplacements multipliés, on n’entendait guère que le mot philosophie, sortant à chaque instant de la bouche de l’orateur. […] La meilleure lecture au sortir de là, l’antidote le plus direct à prendre, c’est Pascal qui fait, à chaque instant, crier dans l’homme la contradiction éternelle, et qui, dans son langage ferme et nu, est le moins asiatique des écrivains.
Puis au bout de quelques instants, au café du coin de la rue de Richelieu, deux ou trois : « Ah ! […] Mme Commanville nous a parlé du cher mort, de ses derniers instants, de son livre qu’elle croit incomplet d’une dizaine de pages. […] Alphonse Rothschild a un beau mot pour se défendre, dans le premier instant, contre un objet qu’on lui fait trop cher : « Non, non, dit-il, c’est immoral à ce prix !
C’est ce qu’on ne voit pas bien au premier instant. […] Il est clair que les idées sont représentatives, que j’ai eu en moi un simulacre de la forêt, que mon esprit a la propriété de prendre toutes sortes d’apparences, et que je puis apercevoir en lui comme dans un miroir ou dans un tableau, tantôt véridique, tantôt infidèle, les objets qu’en cet instant je ne vois pas. […] Mais selon la loi de Dugald Stewart, l’état primitif d’une idée ou représentation, c’est de faire illusion et d’être affirmative ; donc, un instant auparavant, c’est-à-dire dans la perception, cette représentation ou simulacre intérieur nous a fait illusion, et nous est apparue comme un objet extérieur et réel. — Dans un très-grand nombre de cas, par exemple dans toutes les illusions des sens, l’objet apparent diffère de l’objet réel, et par conséquent s’en distingue12.
Un instant, il songe à se faire historien, et projette une biographie du duc Bernard de Saxe-Weimar. […] Je ne doutai pas un instant que je renoncerais au théâtre régulier. […] (Elle ferme un instant les yeux, puis retire ses mains et regarde dans la direction opposée.) […] Je me refuse à croire qu’il ait un seul instant songé à imiter Jérusalem. […] Un instant même, il crut marcher dans la réalisation de ses rêves.
Weill est un moraliste qui ne croit point à la supériorité de l’homme sur la femme : « Il faut qu’un homme soit bien sottement infatué de son sexe — dit-il, presque avec colère, — pour pouvoir admettre un instant (quoi ! pas même un instant !)
Elles n’ajouteront rien à l’opinion du monde, et il n’y aura que des curieux, des lettrés et des exceptionnels, qui chercheront le journaliste, cette aiguille dans une botte… de gloire, et qui se préoccuperont de le trouver dans l’homme qui fit déroger sa poésie à n’être, un instant, que cela !… Ce ne fut qu’un instant, en effet ; car le poète, toujours vivace, avant d’être immortel, comprimé par la volonté d’être un prosateur et d’ajouter cette flèche de l’arbalète humaine à son carquois d’Apollon, a été, ressort divin !
Mais, quand nous savons qu’il n’y en a pas, que c’est là tout simplement un monstre, impénétrable au regard du moraliste comme au scalpel du chirurgien, l’intérêt, soulevé à l’aide d’invraisemblances prodigieuses, comme un poids difficile à enlever à l’aide de cabestans faussés, l’intérêt tombe à plat…, et on s’accuse même d’être inférieur et presque puéril de l’avoir un instant éprouvé ! […] Évidemment, au dix-neuvième siècle, avec l’influence physiologique qui pleut sur nos têtes, avec l’empoignement de l’Imagination publique par ces questions de magnétisme contre lesquelles les plus forts d’entre nous vont à chaque instant se cogner, évidemment les romanciers et les poëtes (dramatiques ou non dramatiques) devaient avoir une autre manière de toucher à cette corde mystérieuse du système nerveux humain, dont le génie de Shakespeare a tiré une vibration si déchirante, rien que pour l’avoir effleurée !
Il se mit à marcher en toute hâte dans les champs, prenant les chemins et les sentiers qui se présentaient, sans s’apercevoir qu’il revenait à chaque instant sur ses pas. […] « Ici il est difficile de ne pas méditer un instant. […] Jean Valjean eût renouvelé ces tentatives, si parfaitement inutiles et folles, autant de fois que l’occasion s’en fût présentée, sans songer un instant au résultat, ni aux expériences déjà faites. […] Il y eut dans l’auditoire un instant d’hésitation. […] « Impression qui passa vite, mais qui dans l’instant fut irrésistible.
Parlons donc un instant de l’art. […] Pensez à ces myriades de spectacles que la surface vivante de la terre, animée par le contact des cieux, engendre à chaque instant de l’éternité, et qui n’attendent pas, pour se produire toujours nouveaux, qu’un œil ou une oreille soient là pour les saisir. […] Et il est tout simple encore que la partie la plus avancée de l’Europe lise avec ravissement des écrits qui lui font oublier un instant son spleen et son scepticisme. […] Ou il ne voit dans toutes ces formes que des chaînes qui emprisonnent la vie, en empêchant chaque partie de se réunir à l’Être universel ; ou bien, quand son cœur d’homme recommence à battre, quand la vie s’individualise un instant pour lui, il les contemple avec effroi, comme des enveloppes trop faibles pour préserver la vie qu’elles renferment contre l’océan de vie qui les bat et qui va les briser, comme des digues impuissantes que le flot universel du temps et de l’espace emporte. Voilà les deux seuls mouvements de sa poésie : semblable à la mer qui monte et redescend, qui apporte un instant quelques corps sur le rivage, et bientôt les replonge dans l’obscurité de son sein.
Il me reçut au bout de quelques instants. […] Passons un instant du côté des artistes et entrons dans les coulisses alors fameuses du Gymnase, du Vaudeville, des Variétés, du Palais-Royal. […] Vous connaissez la surprenante biographie d’Homère qui commençait par cette phrase : « Homère était atteint de cécité qui se disputait l’honneur de lui avoir donné le jour. » Mais il n’y avait pas que de la cocasserie dans les articles de Grosclaude : il s’y trouvait de très profondes observations sur les choses du jour et, à chaque instant, les traces d’une culture supérieure. […] Mais ne doutez pas un instant que l’un et l’autre leur doivent beaucoup et qu’ils le savent. […] En somme, nous démolissons avec entrain, en gardant toujours à notre insu l’arrière-pensée de reconstruire, et c’est ce qui explique la réapparition soudaine, à chaque instant, de tant de choses, modes, idées, et même institutions, que l’on croyait à jamais disparues de chez nous.
Le ton y change à chaque instant. […] Il y a là des fragments d’une poésie incomplète, à chaque instant brisée, inégale, mais toujours puissante, fière et triste. […] Il se rencontre à chaque instant. […] Il faut, nous dit-il, que par instants le poète fasse frissonner. […] La lutte fut en moi aussi douloureuse que longue, et il me semblait par instants que j’allais devenir fou.
Mestrallet a trop poussé au noir la note de sa désillusion ; il tombe, par instant, dans un pessimisme exagéré.