Nous disons je pense, et, si le sujet désigne notre individualité, l’attribut désigne quelque chose qui la dépasse, qui est valable pour les autres comme pour nous, qui est soumis à des lois communes et générales, à une logique impersonnelle : la pensée. Je pense signifie au fond : moi, je pense comme vous, selon les mêmes lois que tous. […] Pour vivre en société, il a fallu penser selon des catégories collectives, selon des régies collectives, sans quoi on n’eut pu ni se faire comprendre, ni comprendre autrui. […] L’être vivant, après avoir voulu être et vivre, voudra être et vivre d’une façon intense et, pour cela, ordonnée, harmonieuse, une ; il voudra donc, en prenant peu à peu conscience de ses sensations, se sentir un, puis se penser un. […] Dans la conscience, le résultat final est la sélection croissante de l’idée du moi parmi toutes les autres : cette idée grandit sans cesse, s’éclaire, se détermine, et, comme l’idée de l’unité réalise de plus en plus l’unité même, nous finissons par penser invinciblement notre être sous la forme de l’unité.
L’objection la plus répandue contre l’histoire de la philosophie est celle-ci : les philosophes, dit-on, feraient beaucoup mieux de nous apprendre ce qu’il faut penser que de nous apprendre ce que les autres ont pensé. […] En effet, si par exemple lorsque je rencontre dans Platon la distinction de l’âme et du corps, je développe ses arguments au point d’en tirer tout ce qu’ils peuvent contenir, et si je traite à fond cette question, je n’ai plus aucune curiosité de savoir ce qu’en ont pensé Descartes et les modernes. […] Ce que je veux, c’est de savoir ce que je dois moi-même penser. […] Cependant rien non plus ne paraît autoriser une telle hypothèse, et on n’y songerait même pas, si d’autres faits empruntés à d’autres sciences ne donnaient à penser que la nature n’a pas toujours été dans un même état, et qu’elle a eu aussi ses vicissitudes et ses évolutions. […] S’il est intéressant de savoir ce qu’a fait Alexandre, qui oserait dire qu’il est insignifiant de savoir ce qu’Aristote a pensé ?
À ce titre, je n’ai jamais pu penser à Cicéron sans penser à Voltaire, et je n’ai jamais pu lire Voltaire sans penser à Cicéron. […] Voltaire y trouverait, indépendamment de l’amitié d’un roi philosophe, la liberté de penser, le droit de penser tout haut devant son siècle, les honneurs de la cour auxquels il n’était pas insensible, une place de chambellan, une pension de vingt mille francs, un logement dans les palais du roi et l’intimité d’un homme supérieur à son trône. […] Il demanda son congé ; il renvoya, avec des vers d’une affection équivoque, ses croix de chambellan, ses honneurs, ses pensions. […] Il voulut être apôtre sans être jamais martyr ; il pensait qu’en combattant masqué, il était plus utile à la cause de la philosophie qu’une victime. […] Il ne semblait du reste nullement penser à convertir à sa cause la majorité du genre humain.
S’il avait été plus avancé en âge et en réflexion, il aurait bien pensé le contraire, n’est-ce pas, monsieur ? […] qui ne savait encore que penser et qui me regardait du fond de l’ombre. […] Mais une pauvre fille des montagnes, amoureuse et désolée, mon père et ma tante, excusez-moi cela, ne pense pas à tout à la fois ; je ne pensais alors ni à moi, ni à vous, mais au pauvre Hyeronimo. […] Toi, tu lui attacheras un fil à la patte pour me dire : Je pense à toi, je t’ai comprise, je suis content ou je suis en peine. […] soupirait-elle en soulevant son beau nourrisson endormi du mouvement de sa poitrine, à présent qu’il n’y est plus, je ne pense plus seulement à la musique ; quand un air ne tombe pas dans un cœur, qu’importe ?
Il n’y aurait plus alors que les gens qui pensent et écrivent d’une certaine façon pour être avantagés. Serait-ce juste, serait-ce heureux, serait-ce profitable à la liberté d’écrire et de penser ? […] Pensez-vous que les destinées de la littérature soient liées à cette question de prix masculins ou féminins ? […] Ce qu’il faudrait inventer, je pense, c’est une « machine à découvrir le talent ». […] Vous pensiez que j’allais parler de Titine de Machard, ou des Lauriers salis de Régismanset ??
Au reste j’y prens la liberté de dire ce que je pense. […] On dira peut-être que je ne pense pas assez noblement de mon art. Le mérite n’est pas à penser noblement des choses ; mais à les voir comme elles sont, sans se les affoiblir, ni se les exagérer. […] Ils pensent que pour copier ce qu’ont dit de grands hommes, ils sont eux-mêmes de grands hommes. […] Mais j’ai dû dire ici les choses précisément comme elles sont, ou du moins comme je les pense.
L’impossibilité de penser la négative. […] Telle est la nature de notre esprit, que nous pensons comme successif ce qui dans la nature est simultané : la condition de la pensée c’est le changement. Penser, c’est juger ; c’est unir un prédicat à un sujet. […] L’auteur pense, qu’en dépit des apparences, c’est au positivisme qu’est l’avenir ; et il en note curieusement tous les symptômes. […] Lewes pense de la philosophie française.
Croire ce que pense tout le monde, c’est le vrai parti. […] Lamennais était le seul qui pût s’étonner de ne point rester catholique quand il pensait comme il pensait depuis 1830. […] Les hommes aiment à penser en commun, et ils aiment à penser librement. […] Il ne peut pas penser autrement. Quand il n’a pas une pensée religieuse, il ne pense pas.
Excepté en poésie, où il sent et pense pour son propre compte, M. […] Savez-vous à quoi je pensais en lisant ce livre qui a la prétention d’être un livre écrit dans l’esprit et pensé dans la langue d’un temps qui n’est plus ?… Je pensais, devant la défaite, tout naturellement à la victoire. Je pensais aux Contes drôlatiques de Balzac. […] Tout d’abord donc, Sigognac ne pense point à se faire comédien, mais, une fois en route, son amour pour Isabelle augmentant et la troupe diminuant de l’acteur qui joue les Matamores, Sigognac s’engage à le remplacer sous le nom du capitaine Fracasse.
Il y a bien du plaisir à penser qu’on ne pense point. […] Je désirerais vivement que tu pusses venir à Paris vers le même temps ; marque-moi si tu penses que cela soit possible. […] Je pense en tout comme vous et avec vous ; notre maison est une espèce de séminaire, où les pieux exercices se renouvellent chaque jour. […] Je ne tracasse personne ; qu’on me laisse en repos de mon côté : ce n’est pas trop exiger, je pense. […] Peyrat pense et parle en ministre de la Religion réformée) ; mais il se relâchait, il s’abandonnait par moments avec Béranger.
Avec quel front, avec quelle contenance penses-tu supporter tant d’humiliations ? […] Cicéron ne rêve jamais : il pense. […] Si j’avais pensé que vous y fussiez, j’aurais été certainement vous y rendre visite […] « Pensez-vous que j’extravague jusqu’à donner là-dedans ? […] Pensons-y donc sérieusement, croyez-moi, séparons-nous ainsi de nos corps, accoutumons-nous à mourir.
Que penser d’un poisson qui déserterait son élément, s’imaginant nager plus rapide dans l’air ! […] Le parnassien ne pense, ne traduit que des symboles. […] Le parnassien pense et parle par symboles. […] Pour lui, penser c’est conditionner. […] Je ne prêche nullement la relativité de la connaissance, comme on pourrait le penser.
L’esprit humain, à un moment donné, est le produit de tout ce qui reste de l’esprit des âges antérieurs accumulé comme une sorte de terre végétale, et qui devient ainsi le point de départ et l’excitant à demi artificiel d’une façon légèrement nouvelle de penser et de sentir. À chaque époque il y a donc de nouvelles façons de penser possibles et nécessaires, et toutes ne sont pas épuisées, pas plus que les airs que la nature trouve à varier à l’infini dans le composé des physionomies et des visages. […] Je ne dis pas qu’ils pensent très distinctement ce que je leur fais penser ; mais tout cela est dans leur tête, et je ne fais que débrouiller le chaos de leurs idées : j’expose en détail ce qu’ils sentent en gros, et voilà, pour ainsi dire, la monnaie de la pièce. […] C’est ainsi qu’en se couvrant du nom de La Rochefoucauld, Marivaux présente sa propre défense ; il cite encore Montaigne, le grand exemple cher aux novateurs, comme un des écrivains dont les critiques de 1725 eussent chicané le style : « Car il ne parlait ni français, ni allemand, ni breton, ni suisse : il pensait, il s’exprimait au gré d’une âme singulière et fine. » Et La Bruyère, n’est-il pas tout plein de singularités ? […] J’ai toujours pensé qu’il faut prendre dans l’écritoire de chaque auteur l’encre dont on veut le peindre ; j’en serai sobre pourtant avec Marivaux.
En littérature où je m’entends un peu mieux, je dirai peut-être un jour ce que j’en pense. […] Il avait peur avant tout de paraître penser comme le peuple et d’être pris pour un simple passant. […] En vérité, quand on y pense, la critique est bien difficile : chercher partout ce qui n’y est pas, au lieu de voir ce qui doit vôtre ! […] C’est un soldat en campagne ; il voit, il pense, il sent en même temps, et sa phrase dit comme elle peut tout cela. […] Requin ne pensait pas de son élève autrement que nous.
Béranger, même comme chansonnier, a trop d’art, trop de ruse et de calcul, il pense à trop de choses à la fois, pour être parfaitement et innocemment gai. […] Au milieu de ce recueil plus grave de 1833, il y a une chanson, Ma nourrice, qui fait penser à celle de Ma grand-mère ; qui a fait l’une devait faire l’autre. […] Mais Béranger vieilli, et voyant d’ailleurs à l’œuvre des poètes de conversion nouvelle, aura pensé qu’il était de trop dans l’arène ; il a eu la migraine et s’est dégoûté. […] Ceux qui ont eu le mieux occasion de le juger pensent que son rare bon sens est quelquefois gâté par un esprit de contradiction et par un grain de caprice, et aussi par une habitude de calcul trop continuel et trop raffiné. […] Sur Béranger, je déclare donc en toute sincérité que j’ai dit et très nettement ce que je pense, tout ce que je pense, et qu’ajouter un mot de plus, défavorable à l’illustre poète, c’est aller non seulement au-delà de ma pensée, mais contre ma pensée.
Il n’est personne qui n’ait éprouvé l’ennui de cet état où l’on n’a point la force de penser à rien, et la peine de cet autre état, où malgré soi l’on pense à trop de choses, sans pouvoir se fixer à son choix sur aucune chose. […] Il faut que l’esprit ait contracté l’habitude de mettre en ordre ses idées et de penser sur ce qu’il lit ; car la lecture où l’esprit n’agit point et qu’il ne soutient pas en faisant des reflexions sur ce qu’il lit, devient bientôt sujette à l’ennui. […] La situation de leur esprit est même inconnuë au commun des hommes qui, jugeant de ce que les autres doivent souffrir de la solitude par ce qu’ils en souffrent eux-mêmes, pensent que la solitude soit un mal douloureux pour tout le monde.
ma chère mère, n’y pensez plus. […] Mais, ne peignant personne, on peint tout le monde : cela doit être, et je n’y avais pas pensé. […] Ne t’y fie pourtant pas : demande et pense. […] Que pensera-t-on de toi dans le monde, si on apprend ton propos ? […] … Mais c’est presque impossible ; il n’y faut plus penser : je tacherai de n’y plus penser un seul instant.
Loti pense à ses anciennes nuits de Noël. […] Yves pense à sa Bretagne. Mme Chrysanthème ne pense à rien. […] — Tiens, dit-elle, c’est drôle, je n’y avais pas pensé. […] » II pense que l’enfant l’a devancé chez M.
Sa Majesté Impériale n’est pas de l’avis de Bayle, qui prétend qu’une société d’athées peut être aussi ordonnée qu’une société de déistes, mieux qu’une société de superstitieux79 ; elle ne pense pas, comme Plutarque, que la superstition est plus dangereuse dans ses effets et plus injurieuse à Dieu que l’incrédulité80 ; elle ne définit pas avec Hobbes la religion une superstition autorisée par la loi, et la superstition une religion que la loi proscrit. Elle pense que la crainte des peines à venir a beaucoup d’influence sur les actions des hommes, et que la méchanceté que la vue du gibet n’arrête pas, peut être retenue par la crainte d’un châtiment éloigné. […] Il est donc à propos que l’enseignement de ses sujets se conforme à sa façon de penser et qu’on leur démontre la distinction des deux substances, l’existence de Dieu, l’immortalité de l’âme et la certitude d’une vie à venir, comme les préliminaires de la morale ou de la science qui fait découler de l’idée du vrai bonheur, et des rapports actuels de l’homme avec ses semblables, ses devoirs et toutes les lois justes ; car on ne peut, sans atrocité, m’ordonner ce qui est contraire à mon vrai bonheur, et on me l’ordonnerait inutilement. […] Quelques-uns penseront peut-être que la connaissance de l’histoire devrait précéder celle de la morale. […] Tout ce préambule a été, comme on le pense bien, supprimé par M.
Jean-Jacques Rousseau pensait de même, et avec moins d’inconséquence que Voltaire, lequel, dans le détail, se moquait sans cesse, et avait l’air de triompher de tous les désaccords, comme si la Providence n’était pas. […] Vous êtes peut-être le seul qui, avec moi, ait pensé à ce jour ; aussi vous dois-je bien des témoignages de gratitude pour une attention aussi bienveillante ; elle a accru le sentiment qui me fait remercier Dieu de m’avoir mis sur cette terre que tant d’autres ont eu le droit de maudire. […] Il y pense beaucoup, à sa réputation, à sa popularité, il s’en inquiète ; elle lui tenait au coeur, on le sait : mais toutes les réflexions que vous êtes prêt à faire en souriant, il les a faites avant vous ; il s’est dit à lui-même ses vérités, et plus gentiment que nous ne les lui dirions. […] Il pensa même, un moment, au suicide. […] Au contraire, le critique liseur, si je puis dire, celui qui, dans son fauteuil, reprenait pour la centième fois de vieux écrits et se mettait à penser tout haut en refermant le livre, c’est celui-là qu’il y avait plaisir à entendre et à faire causer : idées justes, idées fines ou hardies, boutades légères et inspirées, lui sortaient en foule à la fois.
Quant à moi, je pense qu’il convient, dans la biographie d’un homme, dans son portrait fidèle, de conserver aux choses l’importance relative qu’elles eurent dans sa vie et dans ses pensées. […] Mais autour de lui, et sous son influence, se formait peu à peu une opinion qui gagnait et qui avait ses courants de toutes parts dans ce haut monde officiel, où chacun commençait à penser à soi. […] Quand je pense à cela, je ne puis m’empêcher d’en gémir. […] Revenu à son hôtel, il ne pensa plus qu’à ménager et à hâter l’entrée des souverains alliés. […] À son âge, pensai-je, on tient un peu de la vieille femme ; il doit être bavard au réveil : voilà le moment qu’il faut saisir.
L’écrivain écrit, l’homme sent et pense. C’est par ce qu’il a senti et pensé que j’ai toujours jugé Balzac. […] Mais en face du visage on ne pensait plus à la charpente. […] … y penses-tu, mon frère ? […] Pensez-vous à moi autant que je pense à vous ?
Il y a, selon lui, deux espèces d’époques, celles où la philosophie est en honneur et où l’on pense, celles où la philosophie est découragée et où l’on ne pense pas : Là où il n’y a pas de philosophie, a-t-il dit en homme qui sait les lois et presque les dogmes de l’histoire, il n’y a pas de civilisation ; là où il n’y a plus de philosophie, la civilisation dépérit et l’humanité s’affaisse. […] d’une voix lamentable ; mais que faut-il penser de ces philosophes modernes ou de ces esprits académiques qui, lorsqu’ils ont dit du temps présent et du régime où l’on vit : Tout est mal ! […] On est induit à penser que ce sont des citoyens de satisfaction facile et des philosophes qu’excite encore mieux le succès d’un moment que la recherche et le tourment de la vérité. […] Ces hommes que de loin on se figure si unis ne l’étaient pas autant qu’on le pense. […] Mignet a trop pensé à célébrer la génération dont il était lui-même.
Cette idée de bonheur, que Léopold Robert avait pensé d’abord à faire entrer dans le tableau de Venise, il la reportait maintenant dans son projet du tableau futur de Toscane : le bonheur reculait et fuyait devant lui. […] Ne pensez-vous pas qu’avec ces moyens on puisse faire une scène intéressante ? […] Il est facile de penser ce que les imitateurs de l’Antiquité lui reprocheront : il est si rare qu’ils comprennent ce sentiment vigoureux81 ! […] Il y en a qui penseront qu’au contraire il peut être développé par ce moyen : voilà comment on ne s’entend guère. […] Ensuite, quand il est question de faire une grande composition, pensez-vous que le premier modèle que je trouve soit convenable pour servir à rendre une figure, un sujet que je veux faire ?
S’étonnant de n’être pas sensible, comme elle devait l’être, à l’arrivée prochaine d’un ami, elle dira de ses malheurs : « Ils m’ont rendu l’âme si noire, que je ne sens plus le plaisir, je ne fais que le penser. » — Et plus loin : « Le croiriez-vous ? […] Il était de ceux à qui le plaisir de penser et d’écrire en liberté tient lieu de tout, et un moment il songea à se livrer sans réserve à cette passion dans un pays libre et en renonçant au sien. […] Il voulait penser et dire, mais il était impatient aussi d’entendre à l’instant l’écho. […] Il rêvait donc, après ce premier grand orage de sa vie, une retraite où il pût, sans être isolé, vivre abrité, indépendant, et penser assez haut, sans être privé tout à fait de sentir : Mon Dieu ! […] Je voudrais bien pouvoir lui dire tout ce que j’en pense ; mais entre l’arbre et l’écorce il ne faut pas mettre le doigt.
Mais où commence la différence entre ces deux inconnus faits pour ne pas l’être, le voici : L’auteur des Ruines de la Monarchie française est mort dédaigneux de la publication de son livre, qu’il savait, de conception et de sujet, impopulaire, l’ayant gardé fermé sous son coude après l’avoir écrit, et achevé ainsi de vivre, la tête qui l’avait pensé dans sa main, ne demandant rien à son siècle… L’auteur des Philosophes et la Philosophie n’a pas eu, lui, cette indifférence, qui est une impertinence sublime ! […] Qu’y a-t-il de plus beau, en effet, que d’écrire bravement ce qu’on croit être la vérité, et de l’écrire pour soi et pour elle, sans se préoccuper de ce que les autres en penseront ? […] Dès qu’il a pu penser par lui-même en dehors de ses maîtres, la vie intellectuelle du Dr Athanase Renard a été de la plus profonde unité. […] Descartes, pour lequel il a peut-être trop d’entrailles, a tellement muré l’homme dans son moi, avec son principe psychologique (je pense, donc je suis !) […] Le livre du Dr Athanase Renard a été pensé pendant des années, et finalement écrit contre cela.
Je pense cependant qu’elle devait être moins triste lorsque votre sœur vivait. […] — C’est comme si tu nous disais : Que pensez-vous de la nature ? […] La nature est tout, c’est elle seule qui pense et qui parle ! […] Vivent les hommes qui ne pensent pas à ce qu’ils disent ! […] Qu’est-ce donc que penser, concevoir, imaginer et écrire ?
Blum, le travail difficile, ce n’est pas d’éviter les répétitions, de faire la chasse aux auxiliaires, de surveiller la cohérence des images, c’est de voir clair dans ce que l’on pense et d’appliquer à ce que l’on écrit ce que l’on a pensé. » M. […] Nous ajoutons seulement que le travail, la refonte, la rature sont également des moyens de bien « voir clair dans ce que l’on pense ». En d’autres termes, ce que nous enseignons, c’est qu’on peut débrouiller ce que l’on pense, non seulement par l’inspiration immédiate, mais en se reprenant, en se corrigeant, en travaillant.
Napoléon ne pensa pas à relever le monopole de la faculté de théologie. […] Il devient alors quelque chose de touchant : on se défend de penser, de peur de penser mal. […] J’ai toujours pensé qu’il y eut en la vie de M. […] Je pense que, depuis, rien n’a changé. […] Non que cet ouvrage ne soit honnêtement pensé et assez bien écrit.
« Maint guerrier pensa : « Ah ! […] » pensa l’homme hardi. […] Il pensait qu’il allait venger l’offense reçue par ses amis. […] L’illustre reine se prit à penser à ses ennemis. […] Je ne pense point que personne vous ait donné en otage.
Section 36, des erreurs où tombent ceux qui jugent d’un poëme sur une traduction et sur les remarques des critiques Que penserions-nous d’un anglois, supposé qu’il en fut un assez leger pour cela, que penserions-nous, dis-je, d’un anglois qui sans entendre un mot de françois, feroit le procès au Cid sur la traduction de Rutter, et qui le termineroit en prononçant qu’il faut attribuer l’affection des françois pour l’original aux préventions de l’enfance ? […] Que penser d’une procedure laquelle donne lieu à de pareils jugemens ?
C’est une prétention d’user des mots en artiste, non pour penser et sentir, ni pour provoquer des pensées et des sentiments, mais pour produire les impressions les plus spéciales qui appartiennent aux autres arts, à la musique, à la peinture, à la sculpture, des impressions de son, de couleur et de forme. […] Tout ce qu’on pense est vrai ; la première pensée venue en vaut une autre ; ce que les mots se trouvent signifier n’est ni mauvais ni pire que ce que d’autres mots signifieraient : il ne reste donc de sûr, de solide, que l’apparence, la beauté même des mots, harmonie, couleur, forme, ce qui enivre ou charme les sens. […] Il est des jeunes gens qui écrivent d’un style naturel et simple, quand ils s’abandonnent, et ne songent pas à ce qu’ils font : quand ils croient penser, quand ils veulent écrire, arrivent les grands mots et les belles phrases, le style drapé, guindé, important, à moins que ce ne soit le langage maniéré, alambiqué, quintessencié, qui coupe les idées en quatre, et danse sur les pointes d’aiguilles. […] Les femmes qui pensent ou qui font du style ressemblent fort aux écoliers : et de là vient que, dans notre littérature, celles qui n’ont pas cru faire œuvre d’écrivains, se sont mises au-dessus des autres.
Et je ne pense pas sur ce point comme M. […] Il pense avant d’écrire, il pense en écrivant, il pense même en corrigeant ses épreuves : « Rêveur, j’ai levé les yeux au-dessus des caractères d’imprimerie, qui m’obsédaient. […] Un premier point : Jean Lorrain pensait mal, il devait mal écrire. […] Savez-vous à quoi je pense, en le lisant ? […] Ce Félix fut introduit à la vie intellectuelle vers 1895, je pense.
» — Dès la fin du régime devenu trop asiatique de Louis XIV, un certain nombre de bons citoyens pensaient très sérieusement aux moyens de rétablir dans l’État une règle, une constitution reconnue trop absente, et dont les abus d’un long règne et les calamités survenantes faisaient sentir l’utilité. […] Vous me l’avez dit assez souvent ; je n’y ai pas pensé quand il le fallait ; j’ai laissé prendre à mes étourderies la couleur des crimes, n’en parlons plus. […] La façon de penser des autres ne m’a jamais conduit : si je m’en suis mal trouvé du côté de la fortune, j’ai toujours pensé qu’un homme de qualité était au-dessus d’elle ; et, du moins, cela m’a-t-il toujours attiré de ces attentions de société qui ne dépendent que de nous. […] Vous dites qu’il y a beaucoup de gens d’esprit, des gens de lettres, etc. : je le crois, mais pensez-vous qu’à Paris il n’y en ait pas davantage, et que cette grande ville ne rassemble pas des hommes excellents dans tous les genres, ce qu’on ne trouve dans aucune province ? […] La correspondance est des plus actives et des plus engagées à ce moment ; Vauvenargues ne reste pas court, comme bien l’on pense.
Je conviens qu’il lui manque cependant une des qualités qui rendent le plus agréable, une certaine facilité qui donne, pour ainsi dire, de l’esprit à ceux avec qui l’on cause ; il n’aide point à développer ce que l’on pense, et l’on est plus bête avec lui qu’on ne l’est tout seul, ou avec d’autres. […] Necker, en s’attaquant à Turgot « comme n’ayant que le désir et le soupçon de la grandeur sans en avoir la force », semblait se désigner assez distinctement en plus d’un endroit à titre de ministre bien préférable : « S’il y avait constamment à la tête de l’administration, disait-il, un homme dont le génie étendu parcourût toutes les circonstances ; dont l’esprit moelleux et flexible sût y conformer ses desseins et ses volontés ; qui, doué d’une âme ardente et d’une raison tranquille, etc. » Si l’on ne pense pas à soi en parlant ainsi et en décrivant si complaisamment celui qu’on appelle, il y a au moins manque de tact, puisqu’on fait croire à tout le monde qu’on y a pensé. […] Quoique le moi soit un sujet de conversation interdit, il pensait pourtant que « c’est le seul que la plupart des hommes aient bien étudié, le seul où ils aient fait des découvertes » ; et il disait comme Montaigne, avec quelque variante : Laissez-les vous confier l’opinion qu’ils ont d’eux-mêmes, et ils vous amuseront plus qu’en répétant, après tant d’autres, les lieux communs de la vie. — C’est de leur chose, pensait-il encore, de leurs intérêts, de leur vanité régnante qu’il faut les entretenir, si l’on veut voir leurs traits s’animer, leur voix s’accentuer, leurs bras se débattre, si l’on veut faire aller le pantin et jouir de ses mouvements. […] Il pensait qu’il était difficile à chacun d’avoir de soi-même l’opinion qu’il en doit avoir : Les hommes qui ont une parfaite opinion d’eux-mêmes sont des heureux ridicules. […] Elles ont, dès leur entrée dans un salon, une manière de saluer, une manière de s’asseoir, une manière de regarder autour d’elles, qui désigne déjà leur degré de confiance, et ce qu’elles pensent de leur proportion avec les autres.
Ceux qui pensent que leurs opinions, en fait de gouvernement, les obligent à combattre la perfectibilité de l’esprit humain, font, ce me semble, un grand acte de modestie. Les partisans de la monarchie, comme ceux de la république, doivent penser que la constitution qu’ils préfèrent est favorable à l’amélioration de la société et aux progrès de la raison ; s’ils n’en étaient pas convaincus, comment pourraient-ils soutenir leur opinion en conscience ? […] Il n’est donc aucune opinion, excepté celle qui défendrait de penser, de lire et d’écrire ; il n’est aucun gouvernement, excepté le gouvernement despotique, qui puisse s’avouer contraire à la perfectibilité de l’espèce humaine. […] » Je pourrais récuser une objection tirée de Virgile, puisque je l’ai cité comme le poète le plus sensible ; mais en acceptant même cette objection, je dirai que, lorsque Racine a voulu mettre Andromaque sur la scène, il a cru que la délicatesse des sentiments exigeait qu’il lui attribuât la résolution de se tuer, si elle se voyait contrainte à épouser Pirrhus ; et Virgile donne à son Andromaque deux maris depuis la mort d’Hector, Pirrhus et Hélénus, sans penser que cette circonstance puisse nuire en rien à l’intérêt qu’elle doit inspirer. […] Après avoir réfuté les diverses objections qui ont été faites contre mon ouvrage, je sais fort bien qu’il est un genre d’attaque qui peut éternellement se répéter ; ce sont toutes les insinuations qui ont pour objet de me blâmer, comme femme, d’écrire et de penser.
qu’aurait-elle pensé si elle avait pu lire les Mésaventures du commandant Laripète ? […] Je ne pense pas que, sur une centaine, il y en ait plus de quatre ou cinq qui soient franchement drôles. […] D’autre part, le conteur n’y met, je pense, aucune espèce de prétention. […] Moi, je me permets de penser tout le contraire. Nous voulons bien le penser aussi.
La main insensible d’une hystérique est cachée derrière un écran : sans qu’elle s’en aperçoive, touchez cette main un certain nombre de fois ; priez ensuite la personne de penser et de prononcer un nombre quelconque, à son choix. […] Au moment où on lui demande de penser un nombre, elle en a déjà pensé un très vaguement. […] Si le sujet pense spontanément à une personne à un objet, à un chiffre, ou si on le prie de penser à tout cela, sa main anesthésique, qui tient une plume, « écrit aussitôt, dit M. […] Nous avons, pour ainsi dire, les deux extrémités d’un courant mental ; d’une part, des idées dont le sujet a la conscience claire ; d’autre part, la sensation subconsciente d’une plume provoquant la tendance à écrire ; en même temps que le sujet pense, sa main est invitée par des sensations sourdes à exprimer la pensée.
Tout dépendra de ce qu’on pense à l’Académie de son avenir politique. […] Qu’en pensez-vous ? […] Pierre Pensez-vous que M. […] Pierre Qu’en eût pensé Barrès ? […] Et celui-là pensait.
C’est un livre fait d’après nature, un des plus pensés qui existent et des plus fortement écrits. […] La Bruyère, lui, vrai philosophe et d’un cœur élevé, ne pensa qu’à être témoin, spectateur et moraliste au profit du public. […] Mais, quoi qu’on pense du fond des idées, on ne se trompera point en observant que cette pointe finale vers le Ciel était, après l’éloge du roi, un second paratonnerre. […] Il a peu voyagé, et il pense comme s’il avait voyagé et comparé. […] » J’aime à croire que La Bruyère pressentait, au contraire, la vogue possible de son livre et qu’il pensait bien faire à sa petite amie un véritable et solide cadeau.
Malheureusement, l’effort dont il croit, titanique, dresser de l’impossible en montagnes infranchissables aboutit à quelque misérable boursouflure de taupinée et, quand il pense montrer sa grâce à gravir de si pénibles obstacles, il tombe sur le nez lourdement. […] Des « philosophes » avaient proclamé qu’il est impossible à un catholique de penser. […] Ce fut la grande taquinerie de Veuillot contre Hugo, qui n’est pas un Spinoza assurément, mais qui pense tout autant que Veuillot, c’est-à-dire assez pour être un grand polémiste ou un très grand poète. […] Or les catholiques ont plusieurs façons de démontrer que Dieu leur a réservé le singulier privilège de penser. […] Cela fait penser à la masturbation d’un cadavre. » À propos de certaines affirmations contenues dans ce livre, j’aimerais pourtant causer avec Léon Bloy.
Quoique Tocqueville soit peut-être un des publicistes qui se sont le moins trompés, je pense cependant que sa doctrine pourrait gagner en étendue et en solidité. […] Tocqueville décrit l’Amérique, et il pense à l’Europe : de là des traits discordants qui ne peuvent s’appliquer à la fois à l’une et à l’autre. […] J’en citerai principalement trois : la liberté de penser, la liberté de conscience, la liberté de l’industrie. La liberté de penser a grandi avec la société moderne et avec l’esprit d’égalité ; elle est aujourd’hui un de nos besoins les plus impérieux. […] La liberté de penser, au moins dans l’ordre spéculatif et scientifique, est donc une première limite à l’esprit de tyrannie des démocraties.
., pensent et parlent de même, et par les mêmes raisons. […] Quoique nous ayons déjà fait connaître en différents endroits de ces Mélanges ce que nous pensons sur ce sujet, il ne sera pas inutile de le traiter un peu plus à fond. […] M. de Voltaire, dont l’autorité, quoiqu’il soit vivant, vaut pour le moins celle de Boileau en matière de goût, pense absolument de même. […] Or je demande ce qu’on devrait penser d’une pareille bigarrure ? […] Que penser à plus forte raison de ses vers latins, et surtout de ses vers grecs ?
Sa vie se passa de la sorte, à penser d’abord, à penser surtout et toujours, puis à parler de ses pensées, à les écrire à ses amis, à ses maîtresses ; à les jeter dans des articles de journal, dans des articles d’encyclopédie, dans des romans imparfaits, dans des notes, dans des mémoires sur des points spéciaux ; lui, le génie le plus synthétique de son siècle, il ne laissa pas de monument. […] mon amie, ne faisons point de mal ; aimons-nous pour nous rendre meilleurs ; soyons-nous, comme nous l’avons toujours été, censeurs fidèles l’un à l’autre. » « Je disais autrefois à une femme que j’aimais et en qui je découvrais des défauts (madame de Puisieux) : Madame, prenez-y garde ; vous vous défigurez dans mon cœur : il y a là une image à laquelle vous ne ressemblez plus. » Dans une lettre, Diderot raconte comment il est tout occupé de la philosophie des Arabes, des Sarrasins et des Étrusques ; puis il s’écrie avec un élan de tendresse incomparable : « J’ai vu toute la sagesse des nations, et j’ai pensé qu’elle ne valait pas la douce folie que m’inspire mon amie, j’ai entendu leurs discours sublimes, et j’ai pensé qu’une parole de la bouche de mon amie porterait dans mon âme une émotion qu’ils ne me donneraient pas. […] L’auteur, qui avait eu l’occasion de voir continuellement Louis XV dans ses chasses, parle de ce roi d’un ton de vérité plutôt bienveillante ; mais il insiste autant que personne sur sa timidité, sa défiance de lui-même, son impuissance totale de s’appliquer, et cette inertie, cette apathie incurable, qui ne fit que croître avec les années. » La Nouvelle lettre de Junius, publiée en 1872 chez Michel Lévy, fait penser (notamment page 10) à cet écrit posthume de Georges Leroy.
Il ne faut pas se croire trop aisément leur parent et leur pareil ; il faut aller avec le vulgaire et penser qu’on en est, tant qu’on n’a pas de fortes preuves du contraire. […] Il est très vrai qu’il y a des esprits d’une malheureuse fécondité, qui savent parler avant d’avoir pensé, échauffés de je ne sais quelle chaleur, qui emporte leur langue ou leur plume d’une folle et infatigable allure : n’ayant pas toujours le temps de se rendre compte de ce qu’ils disent, confiants en leur démon et dans la bonne foi du public, qui saura bien y trouver un beau sens. […] L’ordre est ce qu’il y a de plus rare dans les opérations de l’esprit : quand l’ordre, la justesse, la force et la véhémence se trouvent réunis, le discours est parfait. » Ceux qui penseraient que le mérite de bien placer chaque pensée est un mérite purement négatif, se tromperaient. […] « J’aimerais autant qu’on me dît que je me suis servi de mots anciens ; et comme si les mêmes pensées ne formaient pas un autre corps de discours par une disposition différente, aussi bien que les mêmes mots forment d’autres pensées par leur différente disposition. » Ainsi pensait Pascal, et tout son siècle avec lui. […] Descartes part d’un mot de saint Augustin : Je pense, donc je suis, et ne prouve que de vieilles vérités, l’existence de Dieu, celle du monde extérieur, l’immortalité de l’âme.
Il en revenait encore de temps en temps à ses regrets et à son projet de ligue philosophique universelle : « Si les véritables gens de lettres étaient unis, ils donneraient des lois à tous les êtres qui veulent penser. » Mais il sentait bien qu’il n’avait pas de prise et qu’il ne l’entraînerait pas. […] Dans son genre et dans le cercle qu’il s’est tracé, il a de bonnes et utiles remarques de détail, et il justifie pleinement, quand il écrit, l’axiome de son temps qu’il professe avec Condillacj : « En s’appliquant à parler avec précision, on s’habitue à penser avec justesse. » Ses conversations étaient d’une tout autre nature et échappaient à cette loi ; bien qu’il y parlât fort net, je ne sais s’il en pensait toujours plus justement. […] Je convins de la sévérité, à certains égards, de nos lois criminelles, telles que la question préparatoire ; mais j’ajoutai, et je pense que, sans proscrire aucun genre de mort, il n’y aurait, pour la réforme de notre Code criminel, qu’à fixer une gradation de peines comme une gradation de délits. […] Il n’est pas favorable aux religieux des ordres mendiants, mais il n’est pas contre toute espèce de communautés religieuses, et il les croit compatibles avec l’ordre politique moyen qu’il conçoit : Les religieux rentés, en France, sortent communément d’une honnête bourgeoisie, dit-il, paraissent peu dans le monde et sont, malgré beaucoup de plates déclamations, plus utiles à l’État qu’on ne le pense. […] Il avait de la fortune, il jouissait, tant en pensions qu’en rentes, de 30 000 livres de revenu, dit Petitot.
— Je l’ai dit une fois à feu M. le chancelier (d’Aguesseau), qu’il se damnait sans y penser, par sa haine contre Voltaire. […] Qu’en pensait-il ? à peu près ce qu’en a pensé de nos jours M. de Tracy. […] Il pensait que les abus et les maux de l’ancien régime étaient venus au point d’exiger qu’on tirât la France, « non de dessous ses rois, à Dieu ne plaise ! mais de dessous une aristocratie odieuse, — non une aristocratie de noblesse qui penserait plus généreusement, — mais une satrapie de roture qui a tout mis en formes, en mauvaises règles, en méchants principes et en ruine. » Il avait donc pensé que, « pour mieux gouverner, il ne s’agissait que de gouverner moins », et d’organiser la monarchie elle-même à l’aide d’une démocratie bien entendue, très divisée, non périlleuse, c’est-à-dire d’un système municipal et cantonal ; il en forme le plan détaillé, essayant en quelque sorte de provoquer un second établissement des communes par le bienfait direct de la royauté.
Avant lui, autour de lui et même en lui, elle subsistait, travaillée par le milieu social dans lequel il pense et qui lui a appris à penser. […] Pensons à la sagesse et à la largeur de l’Église romaine. […] … Doré, qui est un artiste vrai, a pensé, lui, à bien autre chose qu’à daguerréotyper tout le mobilier d’une époque, armes et bagages, et il s’est mis à peindre, en pied et en esprit, les divers personnages des Contes, puis, s’inspirant des différentes scènes de ce drame multiple, à composer des tableaux. […] Balzac, le premier homme littéraire du xixe siècle, et qui en a fait le premier livre, devait tenter des éditeurs intelligents, qui ne pensent pas seulement à consommer une grande et belle affaire, mais, par-dessus le marché, à s’honorer. […] Tout ce qui a plume en a écrit, attendu que le privilège du génie est de faire jaser les hommes qui pensent, ou qui ne pensent pas, comme des portières, et même sur la manière dont il prend sa clé pour aller se coucher !
Je ne le pense pas, et aucun de ceux qui ont quelque peu connaissance de son œuvre ne seront, je le crois, tentés de le contester. […] Il y a dans vos lettres un ton de hauteur dont je ne songe pas à être blessé, car il est adorable. — Ce que je penserai de vous ? […] Votre pudeur, c’est vous. » Le malheur est que Marie n’est pas simple, elle n’est pas toujours la même ; elle a trop lu, trop subtilisé Elle a trop pensé : le trop d’esprit amène bien des sottises dans l’amour. […] Les sots s’aiment mieux que les autres… J’ai souvent pensé que des gens qui ne parleraient pas la même langue, un Russe et une Espagnole, je suppose, pourraient passer ensemble de bien douces soirées, sous les bosquets d’un jardin, — pourvu qu’il fasse un peu de lune. Il faut au moins s’entrevoir… « Vous allez voyager, il est tout simple de vous dire que vous penserez quelquefois à moi ; pensez-y surtout quand le soir viendra et que la voiture montera lentement une côte ; imaginez que je suis auprès de vous et que nous ne sommes pas seuls, mais que j’ai pris votre main sous votre mantelet.
La nation avait bien autre chose à quoi penser, et l’attention publique était ailleurs. […] Mais il faut plus que jamais penser que toutes les classes d’hommes, quand ils sont honnêtes, sont nos sujets également, et savoir distinguer ceux qui le sont, partout et dans tous les états. […] si l’on pouvait croire que c’est là ma véritable pensée, peut-être m’aimerait-on un peu ; mais il ne faut pas penser à moi. […] Ce n’est pas parce que ma lettre sera lue que je te parle ainsi ; non, mon cœur, c’est que je le pense de bien bonne foi. […] Cette sainte et dévote princesse, je l’ai dit, a son franc-parler à elle et exprime son libre avis sur toute chose et sur chacun ; elle n’a pas le sens commun ou moderne, le sens politique : elle pense comme une enragée d’émigrée, mais elle est soumise comme une sœur, son abandon à la Providence fait sa joie.
Hugo : il pense par images. […] Impuissant à penser, il a le respect, la religion de la pensée : il a l’ambition d’être un penseur. […] Et c’est un spectacle à la fois comique et touchant de voir ce primitif s’appliquer à penser, manier laborieusement, gauchement, fièrement, des doctrines, dont il n’embrasse que les mots. […] Ame égale, sans fièvre et sans orages, esprit moyen, sans idées ni besoin de penser, Théodore de Banville881 jongle sereinement avec les rythmes. […] Il y pense partout et toujours, il la voit partout, il la désire toujours ; et par là il sort du romantisme.
De tout temps, elle fut la personne qui demanda le moins à son voisin ce qu’il fallait penser. […] Permettez-moi de vous dire ce que je pense, c’est que si elle n’était pas occupée, elle ne serait pas remplie. […] Mme Du Deffand était plus aguerrie : « On s’est moqué de nous, dites-vous ; mais ici on se moque de tout, et l’on n’y pense pas l’instant d’après. » Cette crainte de Walpole revient sans cesse ; il modère le plus qu’il peut sa vieille amie ; il la raille d’être romanesque, sentimentale ; il la pique en la taxant de métaphysique, ce qu’elle abhorre le plus. […] Ce qu’elle avait aimé tout d’abord dans Walpole, c’était sa liberté de penser et de juger. […] nous ne sommes pas comme cela ; nous avons des livres ; les uns sont l’art de penser ; d’autres l’art de parler, d’écrire, de comparer, de juger, etc. » Mais si elle a l’air ici de flatter Walpole et d’épouser le goût de sa nation, elle ne le complimente pas toujours, et sait au besoin lui résister.
D’Argens, dans je ne sais quel de ses ouvrages, avait fait des réflexions critiques sur l’amitié, et avait voulu prouver qu’on peut s’en passer et être heureux : Je ne suis malheureusement point de votre sentiment sur l’amitié, lui répond Frédéric (31 août 1745) : je pense qu’un véritable ami est un don du ciel. […] j’en ai perdu deux (Jordan et Keyserlingk) que je regretterai toute ma vie et dont le souvenir ne finira qu’avec ma durée… Selon ma façon de penser, l’amitié est indispensable à notre bonheur. Que l’on pense de la même manière ou différemment, que l’un soit vif, l’autre mélancolique, tout cela ne fait rien à l’amitié ; mais l’honnête homme, c’est la première qualité qui unit les âmes et sans laquelle il n’y a point de société intime. […] Il lit donc, il compose, il pense beaucoup, tout comme dans les journées de Ruppin et de Remusberg. […] Frédéric recommande à Milord Maréchal de lui ménager un asile et de lui faire tenir des secours : Je vois que nous pensons de même ; il faut soulager ce pauvre malheureux, qui ne pèche que pour avoir des opinions singulières, mais qu’il croit bonnes.
En l’absence de William Shakespeare, trépassé il y a trois siècles, Beaumont-Vassy avait pensé à nous ressusciter le galbe imposant de cet halluciné sublime dans je ne sais quel drame, — ou plutôt dans je ne sais quelle scène historique de longue haleine comme ont imaginé d’en écrire les hommes qui ne savent pas remuer puissamment l’échiquier du théâtre, où les conceptions de la pensée se carrent et se cubent sous l’empire des plus difficiles combinaisons. […] … Analysez donc cet empire singulier, inachevé et vieux déjà, vous ne trouverez en bas que les hordes des Ivans dont les tentes, fichées dans la terre, ne se lèvent plus et sont des villes, et en haut des individualités européennes qui, par le cerveau de Pierre Ier ou de Catherine II, ont pensé un gouvernement comme l’aurait pensé Montesquieu. […] Ils sont d’ailleurs plus près du fait que de la pensée, et, quand ils pensent, ils inventent moins qu’ils ne se souviennent. […] si Catherine le Grand vivait en l’an de grâce 1854, que penserait-elle du mot flatteur des philosophes : C’est du Nord aujourd’hui que nous vient la lumière, et qu’elle n’acceptait de son temps que comme une espérance, un chant du coq, un point du jour ? […] Cela donnait à penser qu’il y avait des choses bien fortes… Il n’y a rien !
Laurent, les meneurs de toutes les factions se sont montrés bien modestes, en se réunissant pour proclamer unanimement la nullité de celui qui, sans autre ressource que l’austérité de ses mœurs et de ses principes, parvint à les dompter tous, et ne succomba ensuite que pour avoir tenté de régulariser l’action révolutionnaire, dans un temps où elle ne pouvait céder encore à la prudence des hommes. » Nous avouerons que cette médiocrité absolue de Robespierre nous avait toujours un peu chagriné, et que nous ne pensions point sans quelque embarras que l’homme monstrueux qui a mis son sceau sur la plus épouvantable période de l’histoire du monde, et l’a, pour ainsi dire, frappée à son effigie, n’eût eu d’autre mérite que celui d’un phraseur vulgaire et d’un passable académicien de province. […] Laurent nous paraît disposé à beaucoup accorder à la conviction et au patriotisme ; il pense que, pour un bon nombre de montagnards, et peut-être pour Robespierre lui-même, les sacrifices humains étaient autant de devoirs pénibles et douloureux que leur arrachait un patriotisme austère. […] Si Pompée et César, dit Montesquieu, eussent pensé comme Brutus et Caton, d’autres auraient pensé comme Pompée et César.
Il y a, dans la langue française, dans celle que parlent les trois quarts des gens, tout un vocabulaire qui sert à ne pas penser ; ce sont ces mots mal définis, qui s’adaptent à tout, qui n’empruntent leur sens que de l’objet auquel on les applique, et qui signifient plus ou moins selon l’esprit de l’auditeur ou du lecteur. […] De là ces expressions si fort à la mode, qui sont aussi des dispenses de penser : étonnant, merveilleux, délicieux, superbe, inouï, prodigieux, adorable, divin ; c’est un bijou ; c’est une merveille ; c’est une passion ; j’en raffole, et, par contre, exécrable, affreux, horrible, atroce, dégoûtant, assommant, abominable ; c’est une horreur ; je ne peux pas le sentir. […] Si grande est notre paresse, inaccoutumés que nous sommes à chercher des idées ou des mots, que souvent nous aurions quelque inclination à penser d’une manière : nous parlons d’une autre, non par modestie, non par timidité, mais parce qu’il est plus commode de répéter une phrase apprise que de créer pour une pensée personnelle une forme originale. […] Eût-on quelque velléité de sentir autrement, fût-on convaincu même que la vérité des faits y oblige, la phrase est là, si tentante, si facile à prendre ; il est si commode de la ramasser ; on a si peu le loisir, si peu l’habitude de sentir sa propre pensée et d’en chercher l’exacte formule, qu’on se laisse aller ; et l’on dit blanc quand on eût pensé noir si l’on n’avait pas lu son journal.
L’homme une fois mort, pensez-vous qu’il revive ? […] L’intelligence comprend et pense. […] Ce sont les deux mots de tout ce qui vit, de tout ce qui pense et de tout ce qui pèche ici-bas. […] Le besoin de penser le dévore, et, chaque fois qu’il pense à ce qui est le plus digne d’être pensé, ses pensées, comme des aigles à qui l’oiseleur a laissé les ailes et crevé les yeux, vont se heurter, se briser, se confondre contre les limites de son horizon, le mystère, l’inconnu, l’inexplicable. […] Un sceptique n’est jamais qu’un homme d’esprit qui n’a pas assez pensé.
Que pense-t-il de la vie ? […] Quand il pense, il doute. […] Il pense et il dit ce qu’il pense. […] c’est ainsi, pensai-je. […] Mais que pense-t-il ?
Nous avons pensé qu’il était possible de les coordonner suivant un certain plan, et de leur donner ainsi une sorte d’unité. […] Dans notre travail sur la Liberté de penser, nous avons essayé de réfuter l’opinion qui confond à priori cette liberté avec l’esprit de négation et de scepticisme. […] Nous avons pensé que les droits de la méthode expérimentale sont absolus, et que nul ne peut interdire au savant de la pousser aussi loin qu’il lui est possible.
Je pense qu’il leur est permis au moins de l’essayer. […] Ils ont commencé d’écrire avant d’avoir pensé. […] Nous faudra-t-il donc penser d’eux tout le bien qu’ils en pensent eux-mêmes ? […] Ils expriment pour nous ce que nous pensons comme eux. […] Veulent-ils nous faire penser ?
Ils pensent pour nous, et ils nous rapportent les conquêtes de leurs pensées ; prêtons-leur l’oreille et ouvrons-leur nos cœurs. […] Voltaire, à cet égard, pensait comme nous ; il bénit la philosophie de Socrate, et il maudit le verbiage, quelquefois sublime, plus souvent sophistique, de Platon. […] et je pensais qu’il ne sortait de ce monde que sous la protection des Dieux, qui lui destinaient, dans l’autre monde, une félicité aussi grande que celle dont puisse jouir aucun mortel. […] Et ne les percevez-vous pas d’autant plus clairement que vous y pensez davantage ? « Eh bien, y a-t-il rien de plus logique que de penser avec la pensée seule, dégagée de tout élément étranger et corporel ?
Elle écrit des lettres parce qu’elle ne sait pas penser toute seule, et qu’elle a toujours à qui faire ses confidences. […] Pour elle, penser à sa fille et lui écrire, c’est tout un. […] On sait que je n’estime, dans ce que je pense, que ce que les autres peuvent penser comme moi. […] Il n’eut pas même la curiosité de savoir ce qu’on pensait de ce travail, et il n’en fit rien paraître de son vivant. […] Saint-Simon ne pense pas toujours au public.
copier ainsi les pensées des auteurs qui ont dit le pour & le contre, ce n’est pas penser, c’est arborer les livrées du pédantisme. […] Les auteurs précédens abondent plus en passages qu’en réfléxions ; en voici un qui pense trop par lui-même pour avoir besoin de compiler ce que les anciens & les modernes ont pensé.
Mais Daly n’en a pas moins eu raison de penser que Mérimée devait prendre un intérêt très vif, soit comme artiste, soit comme archéologue, à cette passionnante question des concours, si lucidement traitée dans le livre, et peut-être encore plus au talent qui y brille, à ce genre de talent qui a — sans rien couper ! […] Or, ce mérite absolu, qui appartient en propre au continuateur du chef-d’œuvre, la critique doit d’autant plus le reconnaître et le signaler dans Daly que c’était le seul des mérites qu’il pouvait avoir sur lequel elle n’avait pas complètement sa sécurité… Pourquoi ne dirions-nous pas ce que nous pensons ? […] Moi aussi, je pense comme Daly que l’art est un symbole, — l’expression symbolique des hautes convenances d’ordre et de vérité souveraine, la prescience universelle des choses qu’il faut nommer et connaître, l’inventaire innocent du bien et du mal, de ce qu’il faut imiter et de ce qu’il faut écarter. […] Historiquement je pense comme Daly, mais la théologie nous sépare. […] Un jour César Daly perdra-t-il, sur la toute-puissance de cet art qui est une véritable religion pour sa pensée, les illusions de tous ceux qui pensent que l’absolu peut se réaliser sur la terre ?
Mais il ne faut pas s’y méprendre, l’art et l’émotion ne sont pas ce qu’un vain peuple d’utilitaires pense. […] , actualité comme l’incendie quand il flambe, et à laquelle tout ce qui pense, tout ce qui a un pauvre mort aimé sous la terre (et qui n’en a donc pas ?) […] L’une est l’enterrement des vivants, cette épouvantable hypothèse, sur la possibilité, et même la probabilité de laquelle non seulement l’imagination, mais le bon sens, peut trembler toujours… Et l’autre, c’est l’invasion qui s’avance sur nous des grands cimetières, effroyable manière d’appliquer l’axiome : le mort saisit le vif, à laquelle n’avaient pas pensé les jurisconsultes, car, avec les immenses cimetières qu’on nous promet, foyers inévitables de tous les genres de corruption et d’infection accumulées, nous serons bientôt saisis et dévorés par nos morts ! […] En vain : on leur montre un jour ces deux têtes de Gorgone ; en vain on leur casse le museau contre les cercueils où les êtres qu’ils ont le plus aimés se sont peut-être tordus dans d’inexprimables agonies, que le lendemain, brutes légères, ils n’y pensent plus, et, souriants et tranquilles, se tournent d’un autre côté. […] Ces bâtisseurs de lazarets pour les vivants n’ont pas pensé à créer des lazarets pour les morts.
» ne pensait pas à eux. […] Personne ne pensait à m’en demander compte. […] L’affaire était une de celles auxquelles il avait le plus pensé, auxquelles il pensait encore, quoique déchu sans retour du poste où il pouvait faire profiter son pays de ses pensées. […] Sous le coup de cet ineffable malheur, est-ce que je me souviens de ce que j’ai pensé autrefois, est-ce que je sais ce que je pense aujourd’hui de la république ? […] Il est vrai qu’il n’y pensait qu’après avoir pourvu à celui des autres.
Cette unité indissoluble du penser et de l’agir est la loi psychologique d’importance capitale que nous résumons par le terme : idée-force. […] On ne peut ni vouloir, ni agir à vide, pas plus qu’on ne peut penser sans penser un objet, conséquemment un résidu quelconque de sensations. […] Ou je souffre, et je n’ai pas besoin de penser ma souffrance, qui est ce qu’elle est sans qu’il faille la convertir en pensée ; ou je pense réellement que je souffre, et cette pensée n’est déjà plus ma souffrance ; elle est une classification que je fais du phénomène actuel pour le ranger dans la classe des douleurs avec accompagnement des mots : je souffre. […] Ce défilé de processus subjectifs différents et différemment combinés, nous l’appelons réflexion ; mais, en croyant réfléchir sur un fait actuel, nous donnons réellement naissance à des faits nouveaux ; en croyant penser au son même, nous pensons au souvenir du son et à une foule d’autres choses. […] Quand je pense à un arbre, non seulement ma représentation est faible, mais elle est indéterminée et très simplifiée : je ne vois qu’un tronc et une masse confuse de feuilles.
Elle est comme une circonspection scientifique à l’égard de ce qu’on dira et de ce qu’on pensera de soi. […] Elle consiste à voir devant soi ce à quoi l’on pense, au lieu de penser à ce qu’on voit. […] Les uns pensent que c’était Bill, d’autres que c’était moi. — Étrange. Mais vous, qu’en pensez-vous ? […] Cela repose de la fatigue de penser.
Thiers sont d’un heureux augure ; elles attestent déjà un auteur qui pense par lui-même et qui n’a nullement besoin de déclamation ; elles n’ont pas d’efforts, et elles ont de la portée. Écrire comme on pense, modeler son style sur les choses, les bons esprits en viennent là d’ordinaire en avançant ; mais M. […] combien de choses ce berger, qui ne pense peut-être pas plus que l’oiseau chantant à ses côtés, combien de choses il me fait sentir et penser ! […] Plus loin, derrière eux, est la patrie avec des lauriers ou des cyprès ; et toutes ces images, il faut les chasser, il faut penser, penser vite, car une minute de plus, et la combinaison la plus belle a perdu son à-propos, et, au lieu de la gloire, c’est la honte qui vous attend. […] Or personne, je le pense (et cette conclusion ressortirait de notre seule étude), personne ne refusera à M.
Certains marchands pensent que l’écrivain doit être forcément aussi intéressé qu’ils le sont eux-mêmes. […] Elle met fin, d’une certaine manière, à sa liberté de penser et d’écrire. […] Ils pensent qu’une réparation en espèces suffira à compenser le trouble qui a été apporté à l’artiste dans sa liberté de penser. […] Vont-ils encore continuer à nous importuner, pensent les héritiers ? […] Inutile d’insister, je pense, sur le service que cela rendrait aux jeunes.
Ce qui conduirait surtout à penser que la vie est un voyage, c’est que rien n’y semble ordonné comme un séjour. […] Par une sorte d’abstraction, dont la jouissance est cependant réelle, on s’élève à quelque distance de soi-même pour se regarder penser et vivre ; et comme on ne veut dominer aucun événement, on les considère tous comme des modifications de notre être qui exercent ses facultés et hâtent de diverses manières l’action de sa perfectibilité. […] C’est là que le gouvernement de soi exige une main plus assurée ; mais dans la retraite, le philosophe n’a de rapports qu’avec le séjour champêtre qui l’environne, et son âme est parfaitement d’accord avec les douces sensations que ce séjour inspire, elle s’en aide pour penser et vivre. Comme il est rare d’arriver à la philosophie sans avoir fait quelques efforts pour obtenir des biens plus semblables aux chimères de la jeunesse, l’âme qui pour jamais y renonce, compose son bonheur d’une sorte de mélancolie qui a plus de charme qu’on ne pense, et vers laquelle tout semble nous ramener.
Dès que les jeunes gens sont arrivez au temps où il faut penser de soi-même, et tirer de son propre fonds, la difference qui est entre l’homme de génie et celui qui n’en a pas, se manifeste et devient sensible à tout le monde. […] Mais cet enfant, dès qu’il est parvenu dans l’âge où il faut penser, parler et agir de soi-même, déchoit tout-à-coup de ce mérite précoce. […] L’éducation trop soigneuse qu’il a reçûë lui devient même nuisible, parce qu’elle lui a été l’occasion de prendre l’habitude dangéreuse de laisser penser d’autres pour lui. […] Comme il faut donner la main au premier quand il marche, de même il faut aider l’autre à penser et même à vouloir.
Le monde ne va-t-il pas de la sorte, que les derniers venus profitent de tout ce qui a été découvert, pensé, imprimé avant eux ? […] Les premiers ne s’inquiètent pas si d’autres ont pensé ce qu’ils pensent à leur tour ; c’est assez qu’ils le pensent sincèrement ; ils sauront bien se l’approprier par l’expression. […] S’ils pensaient ce qu’un autre a pu penser comme eux. […] Lamotte l’a répété après Fontenelle ; tous les deux font penser à la fable du Renard qui a la queue coupée. […] Il avait trente ans quand il écrivait ce livre ; il devait penser dès lors à l’art d’en vivre cent.
Non seulement je n’ai rien dit que ce que je pense ; chose bien plus rare et bien plus difficile, j’ai dit tout ce que je pense. […] Homais arrivant d’emblée et avec si peu de peine au dernier mot de la philosophie, c’est bien dur à penser. […] Pendant la nuit, je ne pensais qu’à elle ; je ne pouvais prendre aucun sommeil. […] Plus tard, la liberté de penser arriva également jusqu’à moi par les Solvuntur objecta des Théologies. […] Je pense qu’il se trompait.
Ce qu’il faut penser des critiques qu’on a faites du plan. — De nos prétentions et de nos besoins en matière d’histoire. — § III. […] Ce fut son ouvrage personnel, et, bien loin d’y être aidé par son temps, s’il n’eût pensé qu’au succès, peut-être ne l’eût-il pas entrepris. […] Il se rencontrait des Français pour penser, des écrivains pour imprimer, que le peuple n’était pas si fou quand il voulait déchirer le corps de Colbert, puisqu’il avait été malheureux, et malheureux par Colbert. […] Ce qu’il faut penser des critiques qu’on a faites du plan du Siècle. — De nos prétentions et de nos besoins en matière d’histoire. […] Il aimait toutes les grandes choses ; il ne confondait pas la gloire avec le bruit de son nom ; il ne pensait pas encore à recommander Dieu comme une institution de police.
Ce que d’Alembert pense, il ne le voit pas, encore moins le sent-il : il le démêle sans le détacher ; il l’éclaircit sans le faire briller. […] Il n’y a que deux choses auxquelles il ne pense pas et qui en sont le principal : la forme et la beauté. On éprouve quelque embarras à louer le meilleur ouvrage de Diderot, le meilleur, parce qu’il l’a fait sans y penser : ce sont ses Lettres. […] Bien lui a pris de la demander à un petit livre moins ambitieux, où il n’a rien mis de ses systèmes où, ce qu’il a rêvé est si supérieur à ce qu’il a pensé. […] Ce livre, où il n’y a d’épargnés que les oubliés, fait penser avec effroi que l’on courait le même péril à être des amis de l’auteur que de ses ennemis.
Ceux-ci, que pensaient-ils ? […] Alors les officiers s’adressent à ceux-ci : « Que penses-tu ? Si tu penses cela comme moi, va donc le dire à tes camarades. » Ici, nous touchons sans doute au fond de notre race, plus guerrière que militaire. […] Alfred Sala-belle pensait pour un grand nombre d’eux, quand il disait le mot que nous citions plus haut : « Nous sommes à une période où l’on peut s’instruire. » Eh bien ! […] Souvent il a pensé, ce qui s’appelle penser ; souvent ce qu’il exprime, ce sont les expériences de l’instituteur, de l’homme « en proie aux enfants », comme il disait, et de l’honnête homme en proie au scrupule.
Et, cependant, voici un écrivain qui a plus de talent qu’il n’en faut pour faire du bruit, — voici un écrivain qui publie un livre, grave et pourpensé, qu’il appelle d’un nom, rouge, pour les uns, comme le voile d’écarlate qui fait écumer le taureau ; lumineusement vermeil, pour les autres, comme une banderole de victoire ; et ni ceux qui pensent comme lui ni ceux qui pensent autrement que lui ne semblent disposés à prendre à partie cette Histoire de la Liberté religieuse et à en affronter l’examen ! Pour ceux qui pensent autrement que lui, on le comprend, quoiqu’il valût mieux ne pas se taire, quoique la vérité, dite et déduite, vaille toujours mieux que le dédain ; mais pour ceux qui pensent comme l’auteur de l’Histoire de la Liberté religieuse, pour les hommes de la même confraternité politique et philosophique, qui n’ont pas encore parlé de cette histoire, plus intéressante à tous les points de vue que la plèbe de livres qu’ils ont l’habitude de vanter, il serait vraiment incompréhensible qu’ils se fussent tus ou qu’ils eussent dosé à l’auteur si chichement l’éloge, s’il n’y avait à cela une raison tirée de cette Histoire de la Liberté religieuse et que mon devoir de critique est, avant tout, de dégager. […] Dargaud, qui ne croit ni à la Chute ni à la Grâce, mais à la Nature, a l’optimisme de ceux qui pensent que, dans un temps donné, rien n’est impossible à la puissance de la raison. Or, ceux qui pensent cela froidement sont ordinairement des niais, mais lui, il est ému, et l’éloquence de son émotion le sauve de la niaiserie.
Cette filiation est reconnue par tous les critiques » — « Tous les critiques, réplique-t-on, cela veut dire un critique copié par un autre. » J’admire ce dédain, M. de Gourmont pense-t-il qu’une opinion soit moins bonne parce que des gens compétents la partagent, et qu’on a plus de chance d’avoir raison lorsqu’on n’est d’accord avec personne ? […] Il est toujours facile de contredire, et c’est vraiment abuser du paradoxe que de suspecter la sincérité d’un critique sous prétexte qu’il pense ce que pensent d’autres critiques. […] Historique ou littéraire, je ne pense pas avoir laissé, sur ce sujet, une seule affirmation de nos adversaires sans réponse, et je suis persuadé que les conclusions que nous avons dégagées resteront acquises. […] on nous montre le poing. « Non, affirme-t-on en propres termes, quoi qu’en pense notre critique, les œuvres banales n’ont pas de succès. » Il faut ignorer bien des choses ou être plus distrait que Ménalque, pour mettre en doute une vérité si authentique, qui est tout simplement un fait d’histoire.
Oulibicheff, ce miracle est peut-être moins grand qu’on ne le pense. […] « Comme son cœur avait besoin de se soulager, je pensai que c’était le moment de lui parler de ses deux fils perdus pendant mon absence. […] Cette pensée se traduisait en musique d’Église ; il pensait en sons, ces sons remplissaient d’âme les voûtes des cathédrales. […] Que penseriez-vous de la peinture qui relèverait en bosse les dessins de Raphaël ou de Titien pour donner plus d’illusion et plus de saillie à ses tableaux ? Vous penseriez que ces deux arts sortent des conditions propres que la nature leur a assignées, pour produire plus d’effets peut-être ; mais quels effets !
Le véritable enthousiasme ne pense pas, ne décrit pas ; il chante. […] Je me nourrissais de mes songes, et j’étais heureux ; j’ai appris à penser, et je suis tenté de pleurer d’avoir vu le jour. […] Ces phénomènes de jeunes filles, répandant, comme Madeleine, leur urne de parfum sur les cheveux blancs d’un homme illustre, sont plus fréquents qu’on ne pense. […] C’est ici, pensai-je, qu’elle erra désespérée et qu’elle enfonça le terrible fer dans sa poitrine. […] Nous sommes loin de le penser, sans doute ; nous ne pensons pas non plus que la nature produise souvent, et même produise deux fois un homme supérieur en puissance de tête à Goethe.
Mais afin de conserver les pensions acquises, il garda ses vers en portefeuille jusqu’en 1866 : ils sont publiés dans Les Chansons des rues et des bois sous le titre : « Écrit en 1827 ». […] Le républicain flatta Louis-Philippe pour obtenir la pairie, comme le napoléonien adula les Bourbons pour arracher des pensions. […] Thiers pensait ainsi après la Commune. […] Une étrange fatalité pesa sur Victor Hugo ; toute sa vie, il fut condamné à dire et à écrire le contraire de ce qu’il pensait et ressentait. […] Il se disait simple de cœur, parlant comme il pensait et agissant comme il parlait ; mais, ainsi que tout commerçant cherchant à achalander sa boutique, il jetait de la poudre aux yeux à pleines poignées, et montait constamment des coups au public.
Ainsi pensa-t-il de bonne heure ; mais, au début, il songeait peu à ajouter à ses modèles. […] Je suis à penser à un sujet qui me conviendrait pour faire un tableau un peu grand. […] Plus je deviens vieux, plus je pense que c’est la meilleure chose pour un artiste qui aime véritablement son art. » — En octobre 1826, au moment d’une réunion avec sa mère, qu’il avait décidée à venir passer quelque temps à Rome, il écrivit au même ami M. […] Ma mère pense quitter Rome au printemps prochain : l’isolement où nous nous trouverons, mon frère et moi, ne sera pas assez long, j’espère, pour nous faire faire des retours trop sérieux sur les moments heureux que nous passons actuellement. […] Je pense à la nature et je ne vois que des poupées.
Sa mère, femme sage, et jugeant que son fils n’était pas de la force ni de la trempe qui fait les combattants, lui écrivait : « Il ne faut pas jeter ainsi feu et flamme ; penses-y, toi qui as besoin d’être aimé ! […] Renan qui, depuis des années, avait formé le dessein de donner une histoire critique des origines et des progrès du christianisme pendant les trois premiers siècles, crut devoir modifier un peu son plan de campagne : il pensa qu’il serait bon et opportun de détacher le premier volume et de le donner hardiment sous forme de récit, presque de cinquième Évangile ; il publia la Vie de Jésus, qui vient de mettre le feu aux poudres et de passionner le public. […] » Rien n’autorise à penser que M. […] Quant aux fidèles proprement dits, je ne pense pas que M. […] Il n’a rien négligé pour les amener à penser comme lui.
Les listes de Gratifications et pensions aux gens de lettres, qui figurent dans les Registres des comptes des bâtimens du roi, sont une lecture fort instructive : depuis 1664 jusqu’à sa mort, Chapelain guide les libéralités du roi et de son ministre. […] Dieu me garde de penser qu’elle saisisse les chefs-d’œuvre des grands écrivains surtout par leurs parties inférieures et caduques, et qu’elle n’en sente pas la vraie grandeur et la grâce intime ! […] On ne pensait point aller contre les préceptes de l’Art poétique : l’entêtement de Boileau pour les Grecs et les Latins, sa colère contre Perrault, ne semblaient être que des boutades, des saillies de son humeur originale, dont on souriait, et qu’on n’estimait pas tirer à conséquence. […] Cette société reçut l’Art poétique comme le code officiel et pour ainsi dire le livre sacré du bon goût : et ce préjugé une fois reçu se tourna en lourde tyrannie, parce que dans le monde il est de mauvais ton de ne pas penser comme tout le monde. […] Ces gens-là savaient et pensaient bien des choses dont l’honnête Despréaux ne s’est jamais inquiété ni douté : mais il y avait une chose qu’ils ne soupçonnaient pas, et que ce « correct auteur de quelques bons écrits » entendait à merveille : ce que c’est qu’un vers, et la très particulière jouissance qui résulte des sons et des rythmes.
Magdalena et Fior d’Aliza alors, qui n’avaient jamais, plus que moi, pensé seulement qu’on pouvait nous abattre le châtaignier sur la tête, ne cherchaient pas de raisons, mais des supplications contre cet homicide. […] Voyons, pensez un peu ; je vous donne pour réfléchir le temps que l’ombre de cette branche mettra à se replier jusqu’à ses racines. […] Le malheur était plus près que nous ne pensions. […] Je pensai que je n’oserais jamais sortir de dessous l’arche du pont sur lequel j’entendais déjà les pas des contadins qui portaient des raisins et des figues au marché, et surtout que je n’aurais jamais le courage de passer devant les gardes des portes, et d’entrer dans la terrible ville. […] Si j’étais la Madone, pensais-je tout en jouant, il me semble que je serais flattée et attendrie par un air.
Ils sont d’accord tous les deux sur ce point, que les langues ne se sont pas perfectionnées successivement : Court de Gébelin a pensé le contraire. […] Dans ce sens, le mot étymologie voudrait dire la science de la vérité, et je pense que c’est ce que les anciens entendaient. […] Cependant on trouve dans sa Contemplation de la Nature, au sujet de l’orang-outang qui ne parle point, quoiqu’il présente à l’œil même de l’anatomiste de si grandes conformités avec l’homme, on trouve, dis-je, ces mots : « Il ne pense donc point, car pour penser il faut parler. » M. […] Le professeur d’analyse de l’entendement humain y disait affirmativement : L’homme ne pense que parce qu’il parle ; ce qui revient à cette proposition de M. de Bonald : L’homme ne peut parler sa pensée sans penser sa parole . Euler, plus timide, avait dit : Sans une langue nous ne serions presque pas en état de penser nous-mêmes .
Mais qu’il y pense ou qu’il n’y pense pas, sa méthode historique le trahit, et cette méthode même, il n’en a pas le triste mérite. […] Taine n’a pas même pensé à eux. […] Il ne pense donc, comme tout anatomiste, qu’à l’animal qu’il a entre les mains. […] … Carlyle s’en tira avec deux ou trois coups de pinceau qui firent penser tout ce qui est capable de penser. […] Taine vient de nous donner la Bête humaine tout entière, et sur cette Bête, il n’y a pas moyen de penser autrement que lui !
Mais en ce moment c’est à autre chose que je pense : je pense au merveilleux chapitre de Freud sur l’Angoisse. […] Il existe plus souvent, je pense, chez la femme que chez l’homme. […] Mais justement il semble ne penser jamais qu’à des raisons extérieures. […] Vous pensez bien qu’il n’a pas commencé à exister du jour seulement où on l’a découvert. […] Ils pensent que c’est quelque chose et ils cherchent quoi.
Obligé de penser à la subsistance, il obtint un emploi à Hanovre, dans un bureau de la Guerre. […] S’il était occupé d’une grande idée, ses paroles coulaient avec une inépuisable richesse ; on croyait alors être au printemps, dans un jardin où tout est en fleur, où tout éblouit et empêche de penser à se cueillir un bouquet. […] Je voudrais que vous voulussiez bien examiner avec soin ces travaux de jeunesse, pour me dire ce que vous en pensez ; je désire savoir s’ils méritent d’entrer dans la prochaine édition de mes Œuvres. […] Qu’on veuille y penser : il n’en est pas de Weimar comme de Paris. […] Tout ce qu’il a pensé, il l’a pensé à propos de quelque chose et dans un cas déterminé.
Rousseau fait-il un pas hors du lieu commun, et s’avise-t-il de penser hors des pensées des autres, d’écrivain incertain il devient barbare. […] Quand on lit les Épîtres et les Satires de Voltaire, on pense à Horace qui, dans la même morale, est plus élevé et plus aimable, et, par le tour et par l’image, plus poète ; à Boileau, qui, dans une morale supérieure, tire ses plus beaux vers de sa fidélité à cette morale ; on pense à Voltaire lui-même, qui, dans ses poésies légères, dira plus agréablement les mêmes choses. […] Ce qu’il écrit avec colère sur les auteurs en renom, la postérité le pense froidement. […] C’est ce que nous pensons, ou plutôt c’est ce que nous nous épargnons de penser, en ne lisant point Saint-Lambert. […] C’est à peine si çà et là un hémistiche commun, une rime un peu maigre, un vers pensé où l’on voudrait un sentiment, donnent la date du morceau.
Huet écrivait cela à la fin du xviie siècle : que penserait-il donc aujourd’hui, que science et paquebot, tout marche à la vapeur ? […] cet homme qui avait le plus lu, qui avait, comme particulier, la plus vaste bibliothèque qu’on pût voir et à laquelle il tenait tant, savez-vous ce qu’il pensait des livres ? […] Un homme donc, à l’âge de trente ans, disait-il, pourrait, si ce recueil se faisait, savoir tout ce que les autres hommes ont jamais pensé. […] Que faut-il pourtant penser, au fond, de la religion de Huet ? […] Il pensait encore que Descartes, ce soi-disant nouvel inventeur de la vérité, après avoir commencé avec prudence par le doute, cesse tout à coup de douter, et se fourvoie dès le second pas, en affirmant ce qui n’est pas du tout clair.
Galiani avait pris à dessein cette forme du dialogue, comme plus française : « Cela est naturel, disait-il ; le langage du peuple le plus social de l’univers, le langage d’une nation qui parle plus qu’elle ne pense, d’une nation qui a besoin de parler pour penser, et qui ne pense que pour parler, doit être le langage le plus dialoguant. » Quant au fond, en combattant les idées absolues et les raisonnements des économistes, Galiani visait à faire entrevoir les idées politiques qui doivent régir et dominer même ces matières. […] Ce qu’on sent trop d’ailleurs dans ces Dialogues, et ce que Galiani a pris soin plus tard de nous confirmer en toutes lettres, c’est que son Chevalier Zanobi, qui représente l’auteur, « ne croit ni ne pense un mot de tout ce qu’il dit ; qu’il est le plus grand sceptique et le plus grand académique du monde ; qu’il ne croit rien en rien, sur rien de rien ». […] Je pense qu’à ses moments les plus sérieux il aurait défini le sage « celui qui, aux heures de réflexion, se dégage complètement et se dépouille de toutes les impressions relatives, et qui se rend compte de son propre accident, de son propre rien, au sein de l’universalité des choses ». […] Il s’applique aussi à des ouvrages nouveaux ; il pousse plus loin son étude sur Horace, qu’il avait déjà commenté avec un goût rare, aiguisé de paradoxe ; il pense à tirer de son poète favori toute une philosophie morale. […] Apprenant par Mme d’Épinay la mort d’un de ses amis de Paris, le marquis de Croismare, il s’étonne de n’en pas être aussi affecté qu’il aurait cru : Ce phénomène m’a étonné, a pensé me faire horreur à moi-même, dit-il, et j’ai voulu en approfondir la cause.
Il ne la met point hors de là : C’est précisément dans les hautes classes, pense-t-il, que résident les principes conservateurs et les véritables maximes d’État. […] Il disait de lui et de son caractère : « Dieu le fit pour penser et non pas pour vouloir. […] M. de Maistre pensa alors qu’il y avait peut-être à tirer parti de cette occasion singulière ; qu’il y aurait quelques bonnes raisons à faire valoir dans les intérêts de son souverain, dépossédé du Piémont et à peu près rayé de la liste des rois. […] Nous avons boxé comme deux forts de Fleet Street, et, s’il m’a arraché quelques cheveux, je pense bien aussi que sa perruque n’est plus à sa place. » Mais aucun fiel du moins ne se mêlait chez M. de Maistre à ces polémiques, en apparence si ardentes et si passionnées. […] Albert Blanc n’a pas découvert un nouveau Joseph de Maistre, comme il a l’air de le croire, et comme les ambitieuses formules qu’il met en œuvre le donneraient à penser.
De là grande rumeur, comme on peut penser, et réclamations sans nombre. […] L’historien vous parle une langue si rapide, si forte, si poignante, qu’il vous enlève, vous tire à lui, vous force de penser avec lui en cette langue qui lui est propre, et, fût-on un latiniste assez vulgaire, pourvu qu’on comprenne, se fait comprendre face à face, sans trucheman, sans aucune de ces traductions sous-entendues que Cicéron en ses longs développements laisse à son lecteur tout le temps de faire. […] Mais bien que l’énergie et la force caractérisent Tacite, on se tromperait fort de penser qu’elles soient les uniques mérites de son style, et que les autres parties, l’éclat, l’abondance, le nombre, y aient été sacrifiées. […] Non pas que nous pensions qu’il faille systématiquement refaire l’énergie de Montaigne, non plus que la naïveté d’Amyot.
A l’École Normale, où je m’occupais de choisir les principes qui ont déterminé ma vie, une phrase de Stendhal m’a frappé : « Tant qu’on n’a pas six mille francs de rentes, ne penser qu’à cela ; quand on les a, n’y plus penser. » Il faudrait ajouter : « Se choisir un milieu social, un ordre où passer sa vie avec régularité, et, cette élection faite, n’y plus penser. » Un ordre dans lequel on puisse d’ailleurs travailler en toute indépendance. […] A l’abri de ces antiques institutions, je pensais travailler sans tracas.
Pensez-vous que je sois en courroux toutes les fois qu’il m’arrive de hausser le ton et de m’échauffer ? Pensez-vous que, l’affaire étant jugée et absolument finie, quand il m’arrive de mettre mon discours par écrit, je sois en courroux, la plume à la main ? […] « Si l’on demande pourquoi donc j’ai pensé si tard à écrire dans ce genre-ci, ma réponse est simple. […] « Mais plutôt, Scipion, comme ton aïeul qui nous écoute, comme moi qui t’ai donné le jour, pense à vivre avec justice et piété ; pense au culte que tu dois à tes parents et à tes proches, que tu dois surtout à la patrie. […] Cela est écrit, comme cela est pensé, divinement.
Voyons d’abord ce qu’il faut penser de la physiologie, en particulier du cerveau. […] Cela revient à dire que l’individu n’a pas le pouvoir de penser par lui-même ; qu’il ne pense que par la société, c’est-à-dire, en définitive, qu’il est d’autant plus lui-même qu’il est plus les autres. […] Celles-ci vont se consolidant en nous, à mesure que le besoin de sentir et de penser par soi-même s’affaiblit, faute de s’exercer. […] Le disciple continuait à penser autrement que son directeur spirituel (de par sa constitution même) ; mais il était entendu qu’il pensait absolument comme lui et qu’il subordonnait absolument ses vues à celles de son directeur. […] Pour peu qu’on pense dans toute la force du terme, on diffère des autres, pas un individu ne pense en religion, en philosophie, en politique, exactement comme un autre.
Celui qui engage la partie doit penser à tout. […] J’y pensais encore, je pensais justement à vous à mon dernier voyage à Orléans, pour la Foire du Mail. […] Ils pensent, continûment, du même mouvement ils pensent à la vendange de l’année prochaine. […] Au fond, sans trop y penser, sans bien vouloir y penser, nous les tenons valables pour notre éternité même. […] Où je pense que nous pensons ensemble.
Lui demandez-vous de penser encore ? […] À quoi pensent-ils ? […] Il pense. […] Pense-t-il jamais ? […] et on pense quelquefois à la prose rimée de M.
Cependant Sigurd, qui faisait rôtir le cœur, porte sans y penser son doigt sanglant à sa bouche. […] » Ayant retenu ce chant à son réveil, il vint à la ville, et on le mena devant les hommes savants, devant l’abbesse Hilda, qui, l’ayant entendu, pensèrent qu’il avait reçu un don du ciel, et le firent moine dans l’abbaye. […] Hors de là, elle est impuissante ; l’art de penser et de raisonner est au-dessus d’elle. […] Kemble pense que le fond de ce poëme est très-ancien, peut-être contemporain de l’invasion des Angles et des Saxons, mais que la rédaction actuelle est postérieure au septième siècle. […] On pense que, par l’érudit Junius, il a pu avoir quelque connaissance de ce poëme.
Je remarque partout dans l’iliade, les mêmes vûës et la même maniere de penser. […] Je ne donnerai mes sentimens que pour des conjectures, toujours avec respect pour ceux qui pensent autrement, et toujours prêt d’abandonner mes idées pour de meilleures. […] Les diffuses ennuyent, parce qu’elles ne laissent rien à penser : plaisir qu’il faut toujours ménager au lecteur, sans préjudice de la clarté. […] Dans celles que le poëte dit de lui-même, la vérité doit être exacte et absolue, parce qu’il est obligé de penser juste. […] Nous aurions lieu de penser sur le témoignage de leurs contemporains et des siécles suivans, que ces auteurs étoient admirables dans l’expression.
Douce image, qui des deux côtés est charmante, quand je pense qu’une sœur est fleur de dessous ! […] C’est un charme d’écrire dans ces parfums, d’y prier, d’y penser, d’y laisser aller l’âme. […] Quelquefois je pense que c’est la pensée du couvent qui fait cela, qui m’attire et m’attriste. […] Je pense que mes nuits et mes jours seront changés, et je n’y puis penser sans peine. […] C’est cette petite reine Jeanne Gray, décapitée si jeune, si douce, si charmante, à qui je pense. » Le 10 août.
Tout le monde pensait de même à cette époque ; mais ce fut précisément cette double espérance qui fut pour lui une double illusion et qui lui enleva le seul mérite de ces sortes de Mémoires, la naïveté et la vérité. […] Non ; ce serait intervertir l’esprit du siècle lui-même et remonter au symbole impératif d’un autre âge qui défendait de penser en religion, à moins de penser comme nous ; cela ne serait ni raisonnable ni sensé, ce serait un retour au moyen âge. […] LXI On répond : Mais vous interdisez donc à un écrivain le droit de se corriger et de penser le lendemain autrement qu’il ne pensait la veille ? Non ; nous ne disons pas qu’un tel homme soit coupable, mais nous pensons qu’il est légitimement suspect d’avoir changé par des motifs humains des opinions qui doivent être surhumaines, à moins d’être simulées. […] Ce qu’on pense et ce qu’on écrit est la meilleure partie de ce qu’on fut ; le reste ne dépend pas de nous.
Quand bien même nous ne penserions pas, nous aurions le pouvoir de penser une intelligence virtuelle. […] Si nous le pensons comme cause, il faut nécessairement en même temps le penser comme effet. […] L’absolu ne peut donc être pensé. […] Quand nous pensons une idée générale, nous pensons autre chose qu’un mot. […] Pouvons-nous les penser sans signes ?
L’amitié certainement a des droits, la sincérité d’intention a des priviléges ; il est d’usage de penser et de dire sur l’auteur qu’on publie, sur l’ami dont on recueille les reliques, un peu plus que tout le monde, et la part d’illusion permise a sa latitude. […] on ne saurait avoir même l’idée de mettre l’ouvrage très-distingué d’un homme d’esprit, qui pense, en parallèle avec un écrit de Victorin ! Mais savez-vous bien que cela donne envie à quelques-uns de ceux qui ont connu Victorin Fabre et qui voudraient d’ailleurs observer le respect dû à sa mémoire (et je suis du nombre), que cela leur donne envie de dire tout net que cet écrivain de talent était surtout un écrivain de labeur, qu’il pensait peu, hormis dans les sillons déjà tracés, que sa rhétorique, pour ne s’être pas faite à temps au collége, se prolongea trop longtemps dans les concours académiques, que ces concours académiques où il triompha coup sur coup en vers et en prose ne firent jamais de lui qu’un magnifique écolier, que son front de lauréat ploya, à la lettre, sous le poids de ses couronnes, et que, dès qu’un premier échec l’eut jeté hors de l’arène des concours, on ne retrouva plus en lui, devant le grand public, qu’un talent fatigué et non pas un esprit supérieur ? […] Il y aurait eu peut-être une manière plus simple de penser sur les choses de naissance, c’eût été de n’en être pas fier du tout. […] Certes il n’était pas besoin d’entrer dans de telles particularités enfantines pour établir, ce qui est très-vrai, que Victorin Fabre, imbu des principes de 89, y resta constamment fidèle, et fut jusqu’à son dernier jour un patriote de ce temps-là ; pas plus qu’il n’était besoin, je pense, pour établir l’excellence de ses premières études, d’enregistrer ce propos mémorable d’un de ses maîtres : Enfin je ne lui connais d’autre défaut que celui de ronger ses ongles !
Jouffroy se place seul, en présence de lui-même ; abstraction faite des cinq sens extérieurs, attentif à sa conscience intérieure ; il pense, il veut, il se sent ; et partout où il se sent il dit moi ; de sorte que, comme il y a en nous un certain nombre de fonctions dont nous n’avons pas conscience, le moi ne s’y reconnaît pas ; il ne se sent pas sécréter la bile dans le foie, l’urine dans le rein ; par conséquent, informé d’ailleurs, grâce à l’observation sensible, que ces fonctions s’accomplissent dans le corps, il les rapporte à d’autres forces qu’à lui, à des forces distinctes qui résident, l’une dans le rein, l’autre dans le foie, l’autre dans l’estomac ou le poumon, et dont il désigne l’ensemble sous le nom de force vitale. […] Sans doute, si vous entendez par moi la force qui pense, qui veut et qui a la conscience nette, lucide et réfléchie de toutes ses sensations, vous arriverez à l’isoler à peu près complètement des autres forces que vous supposez dans les divers organes ; mais encore, comme vous ne pouvez nier que dans l’homme, tel qu’on l’entend communément, corps et âme, il n’y ait une certaine unité, il s’ensuivra qu’en nous le je ne sais quoi nécessaire qui unit le moi tel que vous l’entendez dans un sens restreint, et les autres forces des divers organes, est le moi supérieur, le vrai moi, l’homme réel et vivant : que devient alors votre dualité ? […] Jouffroy dit : « À l’exception de la cause que nous sentons penser et agir en nous, toutes les autres causes échappent à notre observation. » Et par le fait d’agir, il n’entend pas l’action réelle, l’activité qui se produit, mais simplement l’intention, le désir d’agir ; ce qui mutile encore et appauvrit la cause. Nous, nous disons : Il n’y a qu’une cause que nous connaissons directement, c’est celle que nous sentons penser et agir, comprendre et pouvoir en nous, sentir, aimer, vivre en un mot ; vivre de la vie complète, profonde et intime, non-seulement de la vie nette et claire de la conscience réfléchie et de l’acte voulu, mais de la vie multiple et convergente qui nous afflue de tous les points de notre être ; que nous sentons parfois de la sensation la plus irrécusable, couler dans notre sang, frissonner dans notre moelle, frémir dans notre chair, se dresser dans nos cheveux, gémir en nos entrailles, sourdre et murmurer au sein des tissus ; de la vie une, insécable, qui dans sa réalité physiologique embrasse en nous depuis le mouvement le plus obscur jusqu’à la volonté la mieux déclarée, qui tient tout l’homme et l’étreint, fonctions et organes, dans le réseau d’une irradiation sympathique ; qui, dans les organes les plus élémentaires et les plus simples, ne peut se concevoir sans esprit, pas plus que, dans les fonctions les plus hautes et les plus perfectionnées, elle ne peut se concevoir sans matière ; de la vie qui ne conçoit et ne connaît qu’elle, mais qui ne se contient pas en elle et qui aspire sans cesse, et par la connaissance et par l’action, par l’amour en un mot ou le désir, à se lier à la vie du non-moi, à la vie de l’humanité et de la nature, et en définitive, à la vie universelle, à Dieu, dont elle se sent faire partie ; car à ce point de vue elle ne conçoit Dieu que comme elle-même élevée aux proportions de l’infini ; elle ne se sent elle-même que comme Dieu fini et localisé en l’homme, et elle tend perpétuellement sous le triple aspect de l’intelligence, de l’activité et de l’amour, à s’éclairer, à produire, à grandir en Dieu par un côté ou par un autre, et à monter du fini à l’infini dans un progrès infatigable et éternel. […] C’est ce qu’ont pensé les chrétiens, c’est ce que doivent croire les psychologistes.
Une fois l’esprit habitué à ce procédé, vous n’aurez plus besoin de faire les demandes : les réponses précéderont les questions ; vous penserez naturellement selon la méthode que vous vous serez imposée, et votre réflexion conformera sa marche à l’ordre accoutumé. […] Et pourtant, par un jeu mécanique de la mémoire, ces mêmes esprits pensent avec des mots abstraits, généraux, collectifs : les ayant pensés et exprimés, ils semblent avoir épuisé du coup leur puissance d’invention, et ne peuvent passer outre. […] Le hasard des devoirs d’écoliers est grand, et peut-être après tout est-ce une bonne gymnastique pour l’esprit, que cette nécessité de parler de tout, si on la prend comme une occasion sérieuse de penser sur tout. […] La même âme sent, pense et veut, et est tout entière dans chacun de ses actes.
Anatole France les questions que voici : Que pensez-vous que doive être la littérature de demain ! […] Disons-nous que nous parlons pour être entendus ; pensons que nous ne serons vraiment grands et bons que si nous nous adressons, je ne dis pas à tous, mais à beaucoup. […] Mais sur ces idées mêmes, j’ai tant à dire et, comme vous l’avez pensé, le sujet intéresse si fort quiconque n’est pas indifférent à la littérature, que je ne crois point excéder mes droits en vous demandant congé, Monsieur, de faire à votre réponse publique puisque aussi bien elle se refuse à conclure et reste hérissée de points d’interrogation une réponse publique aussi D’ailleurs je me défends d’avance de toute ridicule prétention à rien vous enseigner ; vous parlez au nom de l’expérience et avec l’autorité que des livres excellents vous donnent : je ne vous opposerai guère que des intuitions, et no puis compter que sur l’incertain avenir pour légitimer par des œuvres les théories. […] Vinrent les Naturalistes qui proposèrent d’y penser. […] Vous n’y voulez voir qu’un brouillard, je pense que c’est la fumée d’un grand fou.
Peut-être notre siècle mérite-t-il beaucoup moins qu’on ne pense, l’honneur ou l’injure qu’on prétend lui faire, en l’appelant par excellence ou par dérision le siècle philosophe : mais philosophe ou non, les poètes n’ont point à se plaindre de lui, et il sera facile de le justifier auprès d’eux. […] Ce n’est pas à dire pour cela que des vers prosaïques, fussent-ils d’ailleurs bien pensés, puissent obtenir son suffrage. […] Il ne donne pas même le nom de poète au versificateur qui a souvent rempli ces conditions, s’il ne les a remplies beaucoup plus souvent qu’il ne les a violées ; et tel de nos écrivains qui a excellé dans la prose, qui a beaucoup pensé dans ses vers, qui en a fait beaucoup de bons, aurait doublé sa réputation en jetant au feu les trois quarts de ses poésies, et ne donnant le reste que par fragments. […] Cette manière de penser, si j’ose rendre compte ici de la disposition unanime de mes confrères, dirigera dans la suite plus que jamais le jugement de l’Académie Française sur les pièces de poésie qu’on lui adresse pour le concours. […] Si mes scrupuleux et redoutables censeurs veulent prendre la peine de lire le second discours sur l’histoire ecclésiastique, par M. l’abbé Fleury, que personne, je pense, n’accusera d’impiété ; ils y trouveront au chapitre XVI, ces propres paroles : St.
Comme vous le voyez, c’est assez nouveau… et pour nous autres vieux Européens, qui avons toujours pensé que la morale consistait dans l’abnégation, le désintéressement, le sacrifice, c’est assez impertinent aussi, comme vous allez voir ! […] Disons-le à l’honneur de tout le monde, de ce côté-ci de l’hémisphère personne, même parmi ceux que l’or qu’ils remuent dans leurs mains puissantes devrait fasciner, n’aurait voulu penser tout haut que l’amour de l’argent et sa production fussent le dernier mot de la moralité humaine, l’idéal enfin de la perfection absolue pour les individus et pour les peuples. […] Les Américains, que Bellegarrigue a des manières très particulières à lui d’adorer, ne pensent donc pas, sur ce qui fait leur force et leur gloire, comme leur audacieux et compromettant panégyriste. […] Nous pourrions multiplier les citations du livre, mais nous pensons que nous en avons dit suffisamment et que le lecteur en a assez, de cette pensée et de ce style. […] affirme l’excellence de la nature humaine, qui pense que toute direction morale comme tout gouvernement politique est un abus, et que l’adoration de l’homme par l’homme, ou de la femme par la femme, et la satisfaction de tous les besoins, n’importe à quel prix !
Vous le voyez, il fallait du renfort peut-être pour expliquer cette élection, désintéressée de tout, comme on le sait, excepté de littérature, et à laquelle jusque-là personne n’avait pensé, pas même le nouvel académicien ! […] Lacordaire, qui avait fait vœu d’humilité et qui tenait trop à son vœu pour se donner les soins mondains d’une candidature, pensait encore moins à l’Académie que l’Académie ne pensait à sa Révérence, quand tout à coup l’élection provoquée par MM. de Falloux, Cousin et Villemain, a eu lieu. […] Lacordaire, comme la plupart des hommes qui sont beaucoup mieux faits qu’on ne pense, a les opinions et les défaillances d’un talent comme le sien, presque muliébrile, qui se tend ou se détend, comme des nerfs. […] Lacordaire : « L’amitié, dit-il, n’a pas pour portique un contrat qui lie des intérêts. » Ce portique de papier, fait par un contrat, qu’en pensez-vous ?
Le vieux Villon, quand il est poète, est aussi jeune que Lamartine ; et s’il n’y a pas succès quand il y a poète, c’est une raison pour que la Critique soit plus méprisante contre l’opinion qui ne pense pas comme elle, et qui en jugeant usurpe sa place, et pour que le poète soit plus fier. […] Pour des créatures de passage comme nous, qui ne seront peut-être plus demain, l’accent désespéré ou résigné — au fond, si on veut bien y penser, la même chose, — est l’accent qui doit remuer le plus les cœurs ! […] L’auteur d’Armelle est, avant tout, un poète de sentiment, — une de ces sensibilités d’organisation qui semblent penser moins avec la tête qu’avec la poitrine. […] Achille du Clésieux, qui n’est pas seulement religieux, mais catholique, est resté ferme dans sa croyance et dans la vérité, malgré les orages de son âme et les entraînements d’une imagination qui est toujours un danger… Quand on vient de lire le poème d’Armelle, il est impossible de ne pas penser au poème de Jocelyn ; Jocelyn, ce chef-d’œuvre, dont le héros seul fait tache souvent dans la splendide lumière du poème, tandis que le héros d’Armelle fait toujours lumière dans le sien ! […] VI J’ai dit maintenant ce que je pense de ce poème d’Armelle.
Et certains penseront qu’il en naîtrait un bien. […] Seulement la lecture va ici moins loin qu’on ne pense. […] Il pense, et ces messieurs ne pensent point. […] Mais elle l’a pensé, elle y a pensé toujours, elle a vécu en lui et par lui. […] Pour être aimantés, échauffés, éclairés par lui, il nous suffit de le penser.
Pierre Louÿs, le Penses-tu réussir ? […] En lisant M. de Montesquiou, c’est par contagion que l’on pense gagner ses sentiments. […] Pense qui peut, et comme il peut. […] N’est-ce pas de ceux qui pensent autrement que nous, que nous devrions nous préoccuper ? […] Bourget s’est abstenu de ce grand effort, c’est, pensons-nous, pour une autre raison.
Villehardouin décrit peu ; le genre descriptif n’était point inventé alors parmi nous, et le vieux croisé est le contraire de cette brillante et habile jeunesse née de Chateaubriand, qui en sait dire encore plus long qu’elle n’en pense sur tout sujetp : lui, il en dit encore moins qu’il ne sent. […] Ceux qui jamais encore ne l’avaient vue ne pensaient point que si riche cité il pût y avoir en tout le monde. […] Ajoutons que le guerrier ne cesse pas d’être présent dans celui qui admire, et qu’il n’est pas longtemps à contempler sans penser à son but. […] On pense bien que ce n’est point le cas de trop discuter le droit ; il serait difficile assurément de le démêler à travers tant d’intérêts, de cupidités compliquées et de violences. […] [1re éd.] plus long qu'elle ne pense : q.
Ces trois existences si diverses, successivement racontées et finement décrites, donnent beaucoup à penser et à réfléchir sur la forme que revêtent l’esprit et le cœur en trois pays et trois sociétés si dissemblables, sur les directions que parvient à se frayer la spontanéité humaine à travers des contraintes et des pressions si différentes. […] À peine j’eus ouvert les yeux et fait le signe de la croix du réveil que votre souvenir vint me trouver sur mon chevet et me dire que dans ce moment vous pensiez aussi à moi, et que, si nous ne pouvions pas nous voir, nos prières et nos vœux se rencontraient dans le chemin du Ciel. […] Nous disions cela dimanche avec un Monsieur rempli d’esprit et de bons sentiments dormants, mais qui s’avoue coupable de ne pas agir comme il pense… » Notons au passage ces bons sentiments dormants ! […] En tout ce qu’elle dit et ce qu’elle pense, une muse intérieure lui donne le ton, le diapason, la mesure. […] Par pressentiment d’abord, par fidélité ensuite et piété funèbre, elle pense à la mort toujours.
Il appartient même à l’histoire, et beaucoup plus qu’un grand nombre de ministres, dont vous avez, je pense, oublié les noms. […] Mais ce serait, je pense, faire à M. […] Ce révolutionnaire tintamarresque a des balafres sur la peau et, je pense, quelques balles dans le corps. […] Peut-être n’a-t-il point les croyances dans leur plénitude ; mais les haines, je pense qu’il les ressent avec une complète sincérité. […] Vous pensez bien qu’il n’y a dans son cas ni naïveté ni mysticisme.
S’il veut désigner par un nom propre l’esprit d’analyse, il se donne le double ridicule de pensera Paul Bourget et d’oublier Remy de Gourmont. […] Il pense comme il mange. […] Les plus grands et les plus originaux des philosophes allemands furent professeurs en quelque université ; en France, connaissez-vous un professeur qui ait la puissance de penser ou le courage de ne point répéter ? […] Elle « s’applique à toutes les branches de la science, parce qu’elle est une fonction de l’esprit : elle embrasse toute la science, parce qu’elle est une manière de penser le monde ». […] Lorsqu’un des misérables ouvriers dont il nous dit l’effort infinitésimal quitte la loupe et oublie sa minuscule besogne bien « contemporaine » pour regarder un peu autour de lui et penser un peu le monde, M.
Une explication proprement ethnologique du succès des idées égalitaires ne sera constituée que le jour où on aura prouvé qu’elles sont comme écrites dans certaines structures cérébrales : les variétés humaines qui posséderaient ces structures seraient déterminées à penser ces idées. […] Analysez l’esprit de la Révolution : vous trouvez au fond de votre creuset l’esprit cartésien, l’esprit classique, l’esprit chrétien44, c’est-à-dire des systèmes de pensées découverts ou des façons de penser instituées par des hommes supérieurs. […] D’ailleurs, dans le cas qui nous occuper, les amis comme les adversaires de l’égalitarisme pensent trouver intérêt à le représenter comme né des systèmes. […] N’allons pas jusqu’à ces affirmations mystiques : « C’est la société qui pense dans l’individu. » Seul l’individu pense, seules les consciences particulières ont l’unité, condition de ces synthèses qui sont les idées. […] Mais ce ne serait encore qu’une loi empirique. — Supposons donc que nous ayons montré comment, lorsque les sociétés affectent une forme centralisée, les esprits qui les composent se trouvent naturellement amenés, en vertu des lois de la formation des idées, à penser, non par classes, mais par individus, et à mettre, vis-à-vis du centre unique, tous les individus sur le même plan, alors nous aurions pleinement compris la relation établie.
Nous pensons. […] Les poètes pensent, les romanciers pensent, les peintres, les sculpteurs pensent, et, Dieu me pardonne, les philosophes aussi. […] Beaucoup en pensent du mal ; c’est leur affaire. Moi, j’en pense du bien ; c’est mon droit. […] Quoi que nous en pensions les autres et moi, M.
On ouvre le Constitutionnel du lundi ; l’on sait ce qu’a pensé l’Europe, ce qu’elle pense et ce qu’elle pensera dans ce siècle. — L’esprit de parti ne jette plus ni ombre, ni tache, ni prévention sur la page. […] Plus d’un motif nous empêche, comme bien l’on pense, d’être indiscret sur ce point. […] L’homme a des rapports plus multiples et plus lointains qu’il ne pense avec l’avenir. […] Je pense, sans le savoir à fond, que Chateaubriand vieilli, dégoûté, malheureux, consolant et consolé auprès de madame Récamier, devint le vôtre. […] Quand vous vous servez du mot de Seigneur, vous me faites penser à ces cardinaux anciens qui remerciaient Jupiter et tous les dieux de l’Olympe de l’élection d’un nouveau pape.
Il faudrait une jolie chose et M. de Charmoy n’a pas pensé à faire du joli. […] Je pense à ceux qui n’ont pas pour la symétrie le respect moderne. […] La forme inesthétique donnée à leur visage, pourrait dire Rouveyre, est un hommage à leur intelligence : la beauté pure ne pense pas. […] Je n’ose y penser. […] Le fait est que, s’il pensa selon la doctrine d’Épicure, il vécut une vie fort peu épicurienne.
Lorsque l’espoir de faire une découverte qui peut illustrer, ou de publier un ouvrage qui doit mériter l’approbation générale, est l’objet de nos efforts, c’est dans le traité des passions qu’il faut placer l’histoire de l’influence d’un tel penchant sur le bonheur ; mais il y a dans le simple plaisir de penser, d’enrichir ses méditations par la connaissance des idées des autres, une sorte de satisfaction intime qui tient à la fois au besoin d’agir et de se perfectionner ; sentiments naturels à l’homme et qui ne l’astreignent à aucune dépendance. […] Il semble que notre propre destinée se perde au milieu du monde qui se découvre à nos yeux ; que des réflexions, qui tendent à tout généraliser, nous portent à nous considérer nous-mêmes comme l’une des millièmes combinaisons de l’univers, et qu’estimant plus en nous la faculté de penser que celle de souffrir, nous donnons à l’une le droit de classer l’autre. […] Il accomplit les actions ordinaires de la vie comme dans un état de somnambulisme ; tout ce qui pense, tout ce qui souffre en lui, appartient à un sentiment intérieur, dont la peine n’est pas un moment suspendue. […] faites qu’il s’aide du plus beau de vos présents, de la faculté de penser, pour juger la vie au lieu de l’éprouver !
C’est un lieu commun des fraîches écoles que de dénier au romancier le droit de penser avant que d’écrire. […] Loisible, certes, le roman de problèmes, le roman qui veut faire penser, mais à condition que l’auteur ne glace pas dès l’abord par l’allure de moraliste en action. […] Bourget affectionne les paragraphes de ce genre : « Il y a dans la survenue d’un terrible accident, lorsqu’on y avait trop pensé, comme une stupeur et une sorte d’apaisement. […] Car un roman comme La Terre Promise, roman du célibataire-père, est un roman bellement pensé.
Mais les italiens ne pensent pas de même sur les beaux arts. […] Ce goût se forme en nous-mêmes et sans que nous y pensions. à force de voir des tableaux durant la jeunesse, l’idée, l’image d’une douzaine d’excellens tableaux se grave et s’imprime profondément dans notre cerveau encore tendre. […] Le public ne pense aujourd’hui qu’avec indignation aux rivaux qu’on donna pour lors à Vandyck. […] La plûpart des jeunes gens fréquentent les théatres en France, et sans qu’ils y pensent, il leur demeure dans la tête une infinité de pieces de comparaison et de pierres de touche.
Il y a là-dedans des choses que je ne pense plus qu’à demi ; des affirmations qui ne laissent que de m’inquiéter. […] Nous avons à leur offrir d’assez précieux joyaux poétiques, je pense. […] Bourde pense que Baudelaire est le père direct de ces horribles décadents, et il a raison. […] Le goût, le naturel sont de belles choses assurément moins utiles qu’on ne le pense à la poésie. […] Je serais curieux de savoir ce que vous en pensez.
Peut-être pensais-je mieux alors que je n’écrivais. […] liberté à tout ce que pense une tête saine et éclairée ! […] Il n’est personne d’entre nous qui n’y ait pensé. […] — Je n’ai pas le loisir d’en rien penser. » Quoi ! […] En serait-il donc réduit à penser par la mémoire ?
Quoi qu’en pense M. […] Entendez ceux qui ont eu le loisir d’étudier et de penser. […] Pensez donc ! […] Et, j’y pense, M. […] Honni soit qui mal y pense !
Je dirai ce que je pense, uniquement, et sans développements inutiles, convaincu, pour ce qui me concerne, qu’en fait de prose, tout est bien qui finit vite. […] Il ne s’agit ici que de penser librement. […] C’est aux autres hommes à sentir et à penser comme lui. […] Il faut réduire à ce qu’elle vaut cette prétention comique, propre aux Français, de penser et d’exiger qu’on pense. […] Je ne pense pas que ceci soit contestable.
J’ai refléchi sur tout selon ma portée ; j’ai voulu même écrire et ranger ce que je pensois, dès que j’ai cru penser quelque chose de raisonnable : car si l’on y prend garde, on n’a jamais bien achevé de penser, si l’on n’est parvenu à s’expliquer bien nettement. […] Il ne faut que penser à cette politesse délicate qui regne entre les gens d’un certain ordre. […] Je pense qu’elle doit se mesurer à l’importance des sacrifices et à la force des motifs qui engagent à les faire. […] Comment avez-vous pu penser un moment que l’unité d’action entrainât celle de lieu ? […] Il s’en faut bien que je sois là-dessus aussi témeraire qu’on le pense.
J’ai tant couru à pied, à cheval et de toutes les manières, que je n’ai pu que penser à vous. […] Je ne vous demande pas de penser bien de moi, mais pensez à moi. […] Quand elle recevra ceci, jamais elle ne pensera à m’écrire longuement. […] Ce soir, en jouant au loto, j’ai pensé à vous, comme vous le croyez bien. […] Je le pense aussi, mais mon étourderie renverse tous mes projets.
Il avait senti, il n’avait pas pensé. […] « — D’ailleurs, me dit-elle en regardant ma pendule, vous n’y pensez pas, vous autres ; et la lettre ! […] je n’y pensais plus, moi, dis-je. […] Je pensai à me retirer, mais je me dis : — Bah ! […] Moi, je comptais sur la nuit pour cacher l’affaire, et je ne pensais pas à la lumière des douze fusils faisant feu à la fois.
« Il ne me quitte plus, dit-il ; tous les jours j’y pense, et trouve quelque chose ; j’avance. […] Il m’a dit en me tendant un papier : « Quand on a dépassé quatre-vingts ans, on a à peine le droit de vivre ; il faut être prêt chaque jour à être rappelé, et penser à ranger sa maison. […] « Les noms de Philémon et de Baucis, lui dis-je, me transportent sur la côte phrygienne, et je pense à ce couple célèbre de l’antiquité ; cependant la scène se passe dans l’ère chrétienne, et le paysage est moderne. […] Les femmes de notre âge ne peuvent pas croire qu’elles le rendront éloquent et aimable. » « Quand les deux jeunes filles furent rentrées chez elles, elles pensèrent aux paroles de madame de Reck. […] Comme on peut le penser, j’étais aussi très aimable avec la mère.
Pensez donc ! […] Mais, vous n’y pensez pas ! […] Qui pense à remonter aux sources de leurs élucubrations ? […] On l’eût même assez embarrassé en le questionnant, à brûle-pourpoint, sur ce qu’il pensait y mettre. […] Car il ne suffit pas de critiquer le présent, il faut penser à l’avenir.
Les véritables inclinations nous l’arrachent malgré nous. » Mme de La Fayette ne connut pas, je pense, ces passions qui nous arrachent avec violence de nous-même, et elle apporta volontairement son cœur. […] Je suis honteuse des louanges que vous me donnez, et d’un autre côté j’aime que vous ayez bonne opinion de moi, et je ne veux vous rien dire de contraire à ce que vous en pensez. […] Mais je vous prie de lui en parler comme il faut, pour lui mettre dans la tête que ce n’est autre chose qu’une plaisanterie : et je ne suis pas assez assurée de ce que vous en pensez pour répondre que vous direz bien, et je pense qu’il faudroit commencer par persuader l’ambassadeur. […] Enfin je ne veux pas qu’il en pense rien, sinon qu’il est de mes amis, et je vous prie de n’oublier non plus de lui ôter cela de la tête, si tant est qu’il l’ait, que j’ai oublié votre message. […] Elle y passera quinze jours pour être comme suspendue entre le ciel et la terre ; elle ne veut pas penser, ni parler, ni répondre, ni écouter ; elle est fatiguée de dire bonjour et bonsoir ; elle a tous les jours la fièvre, et le repos la guérit ; il lui faut donc du repos ; je l’irai voir quelquefois.
ils ne sont pas si coupables qu’ils le pensent. […] La liberté de penser est imprescriptible : si vous barrez à l’homme les vastes horizons, il s’en vengera par la subtilité : si vous lui imposez un texte, il y échappera par le contresens. […] Le moyen de ne pas varier, c’est de ne pas penser. […] Est-ce de trop penser qui a détruit en eux le sentiment de la patrie et de l’honneur ? […] Supposé que les égards de Descartes pour la théologie ne fussent pas purement politiques ; ce que je ne pense pas.
On vit dans le monde à côté d’eux ; on goûte leur esprit ; on joue avec le sien en leur présence ; on est à cent lieues de penser à l’homme de lettres, à la femme de lettres, à l’auteur, et en effet rien n’y ressemble moins. […] Or penser tout haut, devant tous, opérer sur les idées devant témoins, est un exercice brillant, un jeu plein de charme, et qui finit par envahir. […] On ne pense pas seulement tout haut, on étudie tout haut ; la manière s’y aiguise en clarté, en rapidité, en intérêt ; elle marque moins en originalité et en profondeur. […] J’en fis la remarque au duc quand, vers le soir, tout son monde l’eut quitté : « Je pense, m’a-t-il répondu, que c’est un signe de médiocrité autant que de dédain, chez un homme d’État, que de ne pas permettre qu’aucune question sérieuse soit traitée devant lui. […] Il est consolant de penser que, si l’on ne devine pas tout le mal qui fuit, on ne soupçonne pas non plus tout le bien.
Ce que Bernis écrivait de Venise à Pâris-Duverney, Lassay l’écrira presque dans les mêmes termes à Bolingbroke : « J’ai toujours pensé qu’une extrême ambition ou une entière liberté peuvent seules remplir le cœur d’un honnête homme : l’état qui est entre deux n’est fait que pour les gens médiocres. » En attendant, la guerre ayant recommencé en 1688, Lassay fit comme les gentilshommes de cœur, et alla servir en Allemagne et en Flandre sur le pied de volontaire. […] Récapitulant tous les talents et toutes les facultés qu’il reconnaît ne posséder que d’une manière secondaire et inférieure à ce qu’il avait vu chez d’autres, il ajoute que pour l’esprit de connaissance et de discernement, il croit que peu de personnes l’ont plus que lui : Et cela, conclut-il, m’a fait penser bien des fois fort extravagamment que, de toutes les charges qui sont dans un royaume, celle de roi serait celle dont je serais le plus capable ; car l’esprit de connaissance et de discernement est juste celui qui convient aux rois : ils n’ont qu’à savoir bien choisir ; et, donnant à un chacun l’emploi qui lui convient, ils se servent de toutes ces sortes d’esprits que Dieu a distribués aux hommes, sans qu’il soit nécessaire qu’ils les aient. Dans les affaires, chacun pense et imagine pour eux, ils n’ont qu’à prendre le bon parti ; et, dans toutes les choses qu’on leur présente et qu’on leur dit, ils n’ont qu’à tâcher à démêler la vérité et à ne plus changer quand ils l’ont une fois saisie. […] Comme les hommes qui ont beaucoup vécu dans la société intime des femmes, Lassay se laissait aller volontiers à dire tout le bien qu’il pensait de lui. […] Après des années d’un fidèle attachement, il eut encore la douleur de la perdre, et, à soixante-douze ans, il put se dire une dernière fois avec amertume : Je n’ai plus personne qui m’aime par préférence à tout ce qu’il y a dans le monde et que j’aime de même, à qui je puisse dire tout ce que je pense et les jugements que je fais des personnes et des choses qui se présentent à mes yeux et à mon esprit ; je perds une amie avec qui je passais ma vie.
Il y a un courant d’immoralité et d’obscénité que personne ne défend et qu’on réprouve avec mépris ; mais il y a aussi des opinions philosophiques honorables et respectables que je défends au nom de la liberté de penser et que je ne laisserai jamais attaquer et calomnier sans protestation. […] Mais je croirais manquer à ce que je dois à ma qualité d’homme de lettres et aussi à mon office de sénateur, si je ne disais tout haut ce que je pense sur une question où il est fait appel directement à nos convictions les plus vives et les plus profondes. […] Que si j’avais, par hasard, à intervenir quelquefois et bien rarement, pensais-je, ce ne serait guère que s’il était question de littérature, c’est-à-dire de ce que je connais bien ; s’il s’agissait de défendre les intérêts de mes confrères du dehors, de rendre hautement justice à tant d’efforts laborieux, malheureusement trop dispersés, et de répondre peut-être à quelques accusations comme on est tenté d’en élever trop légèrement, à chaque époque, contre la littérature de son temps. […] Mais y pensez-vous bien ? […] Je me permets même de penser que l’empereur, qui savait mon insuffisance à tant d’égards pour tous les ordres de services et de savoir qui sont si bien représentés dans cette assemblée, n’a pu songer à moi que pour que je vinsse de temps en temps et rarement apporter au milieu de vos délibérations une note sincère, discordante peut-être, mais personnelle et bien vibrante.
Liberté de penser. […] Dans ce séjour, il eut le loisir de penser. […] Dès Œdipe (1718), il dit : Les prêtres ne sont pas ce qu’un vain peuple pense ; Notre crédulité fait toute leur science. […] Un des besoins impérieux de Voltaire, et qui tient aux racines mêmes de son génie, c’est le besoin de dire tout ce qu’il pense. […] Voltaire historien philosophe L’Histoire de Charles XII, que Voltaire publie en 1731, ne procède d’aucune pensé philosophique.
On ne peut pas goûter les premiers sans faire des réserves, ni réfléchir sur leur puissance sans penser à leurs faiblesses, ni leur obéir sans de nécessaires retours d’indépendance. […] Cependant Montesquieu y avait pensé tout d’abord. […] Quand il parle du plaisir qu’il éprouve chaque matin, en s’éveillant, à voir la lumière, il pense à ce livre qu’il va retrouver, livre heureux d’un homme heureux. […] De plus, le voilà en possession d’une faculté nouvelle : il appelle les rois, les ministres, les gouvernements à son tribunal ; il ne pense plus guère qu’à juger, à décider, à charger tout le monde des devoirs dont il s’exempte. […] La vieille monarchie, qui représentait tous les intérêts respectables et tous les abus du présent, n’adopta pas Montesquieu ; la révolution, dans ses premiers hommages à ceux qui l’avaient préparée, ne pensa pas d’abord à lui.
La première chose à laquelle Rodrigue a pensé après avoir tué le comte, ç’a été de courir chez Chimène ; il n’a pas encore revu son père. […] Je dirai tout ce que je pense, en me replaçant dans l’esprit de l’ancien système français, inauguré par Corneille, et qui a régné sur notre scène jusqu’à Voltaire et ses disciples. […] En France, dans la tragédie (je parle comme si l’on y était encore), on ne voit pas les choses si en réalité et en couleur ; on est plus ou moins de l’école de Descartes : Je pense, donc je suis. Je pense, donc je sens. […] Ceux-ci, on doit le dire, placés entre le cardinal qui donnait les pensions et le public qui donne la considération, s’en tirèrent assez convenablement, assez dignement même.
Ils ne pensent qu’à la reine ; je pense surtout à la femme, et c’est ainsi que l’avenir de moins en moins royaliste la verra. — Tout cela dit, j’aborde la lecture de ces billets et confidences de famille dont les possesseurs ou ceux qui en avaient copie ne se sont pas, cette fois, montrés avares, et nous les en remercions. […] « Adieu, mes frères et sœurs, pensez à la jeune Française et aimez-la ; — j’offre tous mes baise-mains et respects fidèles à ma bonne maman. » Tout cela n’est pas extraordinaire, dira-t-on, de la part d’une jeune fille qui quitte pour la première fois sa mère ; mais c’est précisément parce que c’est ordinaire et naturel que c’est bien. […] C’est ce qui fait dire ensuite à chacun : « Cette Dauphine est charmante, elle pense à tout ! […] Déjà, à genoux, en présence de Celui qui dispose de tout, j’ai beaucoup pensé aux bons conseils et aux bons exemples de ma chère maman. […] Je fais cette remarque, parce qu’à voir un passage de cette Introduction il serait naturel de penser que l’un des deux, de M.
Les lettres que lord Chesterfield adressait à son fils, et qui contiennent toute une école de savoir-vivre et de science du monde, ont cela de particulièrement intéressant qu’il n’a point pensé du tout à proposer un modèle, mais qu’il n’a voulu que former un excellent élève dans l’intimité. […] Que chacun pense comme il veut, ou plutôt comme il peut, mais qu’il ne communique pas ses idées dès qu’elles sont de nature à pouvoir troubler le repos de la société. […] Plaisir ou étude, il veut que chaque chose qu’on fait, on la fasse bien, on la fasse tout entière et en son temps, sans se laisser distraire par une autre : Quand vous lisez Horace, faites attention à la justesse de ses pensées, à l’élégance de sa diction et à la beauté de sa poésie, et ne songez pas au De homine et cive de Pufendorf, et, pendant que vous lisez Pufendorf, ne pensez point à Mme de Saint-Germain ; ni à Pufendorf quand vous parlez à Mme de Saint-Germain. […] Lord Chesterfield avait tout d’abord pensé à la France pour dégourdir son fils et pour lui donner ce liant qui plus tard ne s’acquiert pas. Dans des lettres intimes écrites à une dame de Paris, que je crois être Mme de Monconseil19, on voit qu’il avait pensé à l’y envoyer dès l’enfance : J’ai un garçon, écrivait-il à cette amie, qui à cette heure a treize ans.
« On ne persuade pas aux hommes d’être justes, pensait M. de Bonald, on les y contraint. […] Car il lui paraîtrait absurde et sacrilège de penser que Dieu a laissé un seul moyen de connaissance et de vérité aux hommes, et que ce moyen est à jamais détourné ou intercepté. […] Il m’écrivait, peu avant sa mort : « Je n’ai rien pensé que vous ne l’ayez écrit ; je n’ai rien écrit que vous ne l’ayez pensé ». […] Je ne pense point, malgré l’adhésion si distinguée de M. […] Ernest Renan, inséré dans la revue La Liberté de penser, 1848.)
Il avait d’abord pensé à consacrer Benjamin au service de l’Église, comme étant la dîme de sa famille ; mais, son peu de fortune s’y opposant, il le mit simplement dans son état, l’occupant à couper des mèches et à remplir des moules de suif. […] Tandis que ses compagnons étaient hors de l’imprimerie pour prendre leur repas, il y faisait vite le sien qu’il préparait frugalement de ses mains, et il lisait le reste du temps, se formant à l’arithmétique, aux premiers éléments de géométrie, lisant surtout Locke sur L’Entendement humain, et L’Art de penser de Messieurs de Port-Royal. […] qu’est-ce qu’il en pense ? […] Franklin avait naturellement ce don populaire de penser en proverbes et de parler en apologues ou paraboles. […] C’était un homme qui ne manquait jamais une occasion de donner une leçon utile, et là-dessus il me dit : « Vous êtes jeune, et vous avez le monde devant vous ; baissez-vous pour le traverser, et vous vous épargnerez plus d’un bon choc. » Cet avis, ainsi inculqué, m’a été fréquemment utile, et j’y pense souvent quand je vois l’orgueil mortifié et les mésaventures qui arrivent aux gens pour vouloir porter la tête trop haute.
Que pense Grimm, par exemple, je ne dirai pas sur Homère, Sophocle, Molière (il n’en parle qu’incidemment), mais sur Shakespeare, sur Montaigne, et sur tous les hommes du xviiie siècle, Fontenelle, Montesquieu, Buffon, Voltaire, Jean-Jacques, Duclos, etc. ? […] Il remarque que, quoiqu’il y ait dans les Essais une infinité de faits, d’anecdotes et de citations, Montaigne n’était point à proprement parler savant : « Il n’avait guère lu que quelques poètes latins, quelques livres de voyages, et son Sénèque, et son Plutarque » ; ce dernier surtout, Plutarque, « c’est vraiment l’Encyclopédie des anciens ; Montaigne nous en a donné la fleur, et il y a ajouté les réflexions les plus fines, et surtout les résultats les plus secrets de sa propre expérience. » Les huit pages que Grimm a consacrées aux Essais de Montaigne sont peut-être ce que la critique française a produit là-dessus de plus juste, de mieux pensé et de mieux dit. […] Pénétré de la difficulté de l’invention sociale en tant qu’elle s’élève au-dessus d’une certaine agrégation première toute naturelle et grossière, et qu’elle arrive à la civilisation véritable, il ne la conçoit possible que grâce à de merveilleuses passions en quelques-uns et à une héroïque puissance de génie : « Il faut, pense-t-il, que les premiers législateurs des sociétés, même les plus imparfaites, aient été des hommes surnaturels ou des demi-dieux. » Grimm, en politique, se rapproche donc beaucoup plus de Machiavel que de Montesquieu, lequel accorde davantage au génie de l’humanité même. […] Tout en s’étonnant de cette confiance qu’ont en leurs systèmes ces talents vigoureux, « qui n’abondent pas en idées », Grimm ne laisse pas de penser quelquefois que cette prévention leur est peut-être nécessaire pour donner à leurs écrits cette chaleur et cette force qu’on y remarque, tandis que « le modeste et humble sceptique est presque toujours en silence ». […] » Dans sa doctrine essentiellement aristocratique, il pensait encore que la vérité et la liberté, telles qu’il les entendait, n’appartiennent en ce monde qu’à un petit nombre, à une élite, et encore « sous la condition expresse d’en jouir sans trop s’en vanter ».
Ici, à ce moment, en Allemagne, c’était Wolff qui remplissait cet office de maître à penser, et qui, à travers les systèmes très contestables et le roman métaphysique dont il était l’interprète, faisait sentir du moins les avantages d’une raison plus libre et d’un bon sens plus dégagé : « C’est le bonheur des hommes quand ils pensent juste, disait Frédéric, et la philosophie de Wolff ne leur est certainement pas de peu d’utilité en cela. » La reconnaissance de Frédéric envers M. de Suhm « qui lui a débrouillé le chaos de Leibniz, éclairci par Wolff », est donc très sincère et très vive ; il a pour lui une de ces amitiés idéales, passionnées, enthousiastes, telles qu’en conçoivent les nobles jeunesses. […] Il y a si peu d’hommes qui pensent ; « la plupart ne s’occupent que des objets présents, ne parlent que de ce qu’ils voient, sans penser à ce que c’est que les causes cachées et les premiers principes des choses ». […] Il essaie de l’ébranler ; il voudrait le retenir ; il ose lui faire part de ses craintes : J’avoue que plus j’y pense, et plus je crains que je ne sois obligé de prendre un congé éternel de vous. […] Adieu ; je ne puis parler d’autre chose ; le cœur me saigne, et la douleur en est trop vive pour penser à autre chose qu’à cette plaie. […] On se demande ce que serait devenue cette incomparable amitié si M. de Suhm avait vécu, ce qu’il aurait pensé de son ami le philosophe en le voyant devenu guerroyeur et conquérant, ce qu’il aurait dit des soupers de Potsdam, des entretiens de Sans-Souci, des licences philosophiques que certains convives y apportaient, et si l’idéal premier, au milieu de l’admiration persistante, n’aurait pas subi un déchet inévitable ?
Cette supposition, à son tour, vient de ce que l’expérience nous montre des choses autres que notre pensée, existant sans notre pensée et existant d’une autre manière que nous ne l’avions pensé. […] Nous disons que tout être sentant, identique à nous, et dans les mêmes relations que nous, aurait faim : c’est cette universalité qui donne un air d’absolu à notre affirmation d’une relativité radicale, s’étendant à tous les êtres hypothétiquement pensés comme identiques à nous. […] Ils ont raison de dire, en d’autres termes, que la pensée ne saurait se ramener entièrement aux choses qu’elle pense ni s’expliquer entièrement par elles. […] Quelles sont donc les fonctions vraiment constitutives de la conscience, les conditions du fait même de penser et, par conséquent, de toute idée, — voilà ce que Spencer aurait dû déterminer, en réunissant et en complétant les éléments fournis soit par le kantisme, soit par la psychologie de l’association, soit par la doctrine de révolution. […] Il est plus logique d’admettre que le sujet pensant et voulant a un mode d’action qui se confond avec le mode d’action fondamental de l’objet pensé, et que les idées sont les réalités mêmes arrivées, dans le cerveau, à un état de conscience plus élevé.
Dans une théorie littéraire qui partout fait prédominer le fond sur la forme et demande d’abord aux écrivains non comment ils ont écrit, mais comment ils ont pensé, dans cette théorie, la première place était due à celui qui nous a appris à penser, et à préférer la raison à toutes choses. […] On peut même penser que Descartes a trop rejeté la tradition et l’autorité. […] Est-il au monde une manière de penser plus personnelle, plus individuelle que celle de Pascal ? […] Et cependant qui pense à Bergier ? […] Nisard, dans son admiration pour Bossuet, ait à peine pensé à nous faire remarquer l’imagination de cet admirable écrivain.
On peut hardiment supposer que ce petit recueil de lettres exprime une manière de penser qui fut à peu près unique dans les ravins de la Fille Morte. […] Pour ma part, j’ai fait mon service militaire, comme tous les jeunes gens que je connaissais, sans grand plaisir ni enthousiasme, et ne pensais à la guerre que lorsque mon père me racontait sa campagne de 1870. […] Chaque fois que j’avais une décision à prendre, je pensais à Lui et j’étais tranquille. […] Chaque fois que je voyais qu’il fallait aller à la mort, je pensais à « Lui », et mon devoir m’apparaissait naturel, sans mérite. […] Je pense souvent à tous ceux qui t’entourent en ce moment d’une affection si tendre et t’aident à supporter vaillamment la lourde contribution du pays que je t’ai imposée ainsi qu’à moi-même.
Il ne dira rien qu’il ne pense sur les personnes, mais il ne dira pas tout ce qu’il pense ; il exposera les faits, il les expliquera dans leurs raisons principales et générales, il ne les éclairera par aucun jour inattendu. […] C’était la solution inévitable, la seule possible alors et la seule bonne, pensaient M. Guizot et ses amis ; il fallait s’y tenir, et s’y cantonner. — C’était une phase nécessaire par où il fallait passer au moins provisoirement, pensaient d’autres moins confiants, moins absolus […] La tête de la société alors ne l’entendit pas ainsi ; la bourgeoisie (sauf des exceptions) pensait comme la tête et était devenue cette tête elle-même. […] L’homme de 1791 est toujours là, qui en a beaucoup vu et qui pense qu’il peut en voir beaucoup encore ; philosophe, philanthrope, expansif, très verbeux, et ne choisissant pas, ne mesurant pas toujours ses expressions : la quantité l’emportait sur la qualité.
Après avoir vu le soleil, si je ferme les yeux, je ne le vois plus, mais je puis encore y penser. […] Depuis Aristote qui disait : « Nous ne pensons pas sans images, et ce sont des images que les mots », jusqu’au groupe presque contemporain des idéologues, l’école sensualiste a compris de tout temps l’importance du langage. […] Mais les philosophes antérieurs « qui pensaient que l’abstraction est renfermée dans la classification avaient raison à mon avis, ajoute M. […] L’auteur pense qu’on peut la résoudre aussi dans une simple association. […] Quoi qu’on puisse penser de l’explication qui va suivre, il faut du moins reconnaître que l’auteur a très nettement vu qu’une théorie de l’induction est au fond une théorie de la cause.
Ce n’est pas à dire qu’ils ne soient, eux aussi, psychiques en quelque manière puisqu’ils consistent tous en des façons de penser ou d’agir. […] En effet, ce que les représentations collectives traduisent, c’est la façon dont le groupe se pense dans ses rapports avec les objets qui l’affectent. […] Les symboles sous lesquels elle se pense changent suivant ce qu’elle est. […] Nous les faisons consister en des manières de faire ou de penser, reconnaissables à cette particularité qu’elles sont susceptibles d’exercer sur les consciences particulières une influence coercitive. — Une confusion s’est produite à ce sujet qui mérite d’être notée. […] Car tout ce qu’elle implique, c’est que les manières collectives d’agir ou de penser ont une réalité en dehors des individus qui, à chaque moment du temps, s’y conforment.
À la mort du second prince de Condé (1588), il exprime en ces termes les regrets du parti : Longtemps après, le parti des réformés sentit cette perte comme d’un prince pieux, de bon naturel, libéral, d’un courage élevé, imployable partisan (inflexible chef de parti), et qui eût été excellent capitaine pour les armées réglées et florissantes ; car ce qui lui manquait aux guerres civiles était qu’estimant les probités de ses gens à la sienne, il pensait les choses faites quand elles étaient commandées, et n’avait pas cette rare partie, principale au roi de Navarre, d’être présent à tout. […] Par le fait de cette mort, Henri IV « se trouvait roi plus tôt qu’il n’avait pensé et désiré, et demi-assis sur un trône tremblant ». […] à une heure si dangereuse, me penser traîner à ce qu’on n’a pu forcer tant de simples personnes, parce qu’ils ont su mourir ! […] … J’appelle des jugements de cette compagnie à elle-même quand elle y aura pensé… Ceux qui ne pourront attendre une plus mûre délibération, je leur baille congé librement pour aller chercher leur salaire sous des maîtres insolents. […] Il a eu ces jours passés une bourrasque à cause du livre de F… (Le Baron de Fœneste), augmenté de nouveau, qui n’a pas été bien pris en ce lieu-ci, où les personnes pensent trois fois une chose avant que de la mettre en effet une.
Les économistes pensaient que les institutions politiques des peuples ont sans doute une grande importance, qu’il n’est pas indifférent à un peuple d’être libre ou gouverné par un pouvoir arbitraire. […] Or, ils pensaient que le principal but des gouvernements est d’assurer le bien-être des populations ; seulement les gouvernements, suivant eux, s’y prenaient mal pour assurer ce bien-être, car les gouvernements croient que c’est par des règlements, des protections, des autorisations, des inspections qu’ils favorisent le progrès de l’industrie et le progrès des lumières. […] Elle soutient encore le principe, si peu justifié par l’expérience, de la division dans le pouvoir exécutif, et elle persiste à penser, malgré les souvenirs laissés par le Directoire, qu’un corps à plusieurs têtes vaut mieux pour gouverner l’État que le pouvoir d’un seul. […] Mais il se rattache à l’école des économistes en ce qu’il insiste surtout sur les garanties nécessaires à la liberté individuelle, à la liberté du travail, à la liberté de penser. […] Elle était plus propre à combattre qu’à penser.
… Voilà ce que je pensais, en ouvrant avec les frémissements de la curiosité la plus excitée, ce livre sur Byron, qui paraissait après quarante ans de silence, simplement, comme un livre ordinaire, et qui, s’il avait été ce qu’il eût dû être, aurait éclaté !… Je pensais alors à ce qu’aurait dû être un livre sur Byron, écrit par la seule personne qui, dans l’univers du présent, comme dans l’univers de l’avenir, eût pu l’écrire, si elle avait osé ! […] Je me disais que quand il s’agit de Byron et qu’on eut l’honneur d’en être aimée, il fallait quelque chose de plus… Je m’étais persuadé qu’une femme, au moins d’esprit, qui s’aviserait d’avoir du courage, après avoir si longtemps pensé au danger d’en avoir et qui prenait, au dernier moment de sa vie, le parti de dire le mot de la fin sur Byron, ne voudrait pas, uniquement, nous précipiter dans d’anciennes lectures déjà faites, et nous faire reprendre un bain déjà pris dans la même baignoire et dans la même eau. […] la cause de ce déchet d’un livre médiocre, sur un homme de génie, par l’être qui devait trouver, pour en parler, des accents de génie dans le fond de son propre cœur, — oui, la cause de ce triste phénomène d’un livre, écrit et pensé comme l’eût écrit et l’eût pensé le premier bas-bleu venu, c’est uniquement le bas-bleuisme.
Quand on est deux, pense le Romain, je domine. […] Penser au lendemain. […] Quand on ne pense pas, c’est à lui que l’on pense. […] On le sait, mais on n’y pense plus. […] Ils ne pensent pas en bergsoniens, mais ils ne pensent pas non plus en chrétiens : ils pensent en modernes.
Il suffit qu’un tyran y pense dans sa fête. […] Je vous dirai donc franchement ce que je pense sur la doctrine de Descartes ou des cartésiens. […] Je le dirai, si l’on le vent, et en effet, je le pense. […] Mais on commence à le penser ! […] Tout le monde a lu ses Mémoires, et personne, je pense, ne les a oubliés.
Ernest Charrière l’injure de penser qu’il n’a compris que le mot à mot de l’auteur russe qu’il vient de traduire et que le sens et le caractère de l’ouvrage d’Yvan Tourgueneff lui ont complètement échappé. […] pas son modèle (car il pense à Sterne, notre russe imitateur, il y pense d’autant plus qu’il n’en dit rien, le fin compère !) […] Charrière a beaucoup de talent — se méprend si profondément sur le genre de talent d’un autre, lequel ne pense pas plus à dévoiler et à flétrir les institutions d’un peuple, dont il croque en passant les vices, que Téniers, en peignant ses ivrognes, ne songeait à peindre l’état social de la Flandre et la situation politique des Provinces-Unies.
II Il nous est impossible de croire qu’il n’y a point pensé un peu… S’il ne nous avait donné que des poésies dans le livre qu’il publie aujourd’hui, nous dirions : « C’est une grâce d’état, une inspiration particulière que cette poésie perpétuellement grave, que cette cornemuse, perpétuellement enflée du même vent. » La poésie de M. de Laprade, grave et vide, ressemble à la barbe de cet ambassadeur de Venise, dont Paul III disait, croyant qu’il n’y avait rien derrière cette barbe, pleine de gravité : Bella barba ! […] Le poète, qu’il le veuille ou non, qu’il y pense ou qu’il n’y pense pas, est un lakiste, un lakiste attardé qui mêle la description, la description éternelle à l’éjaculation lyrique, et qui malgré ses prétentions à la force, à l’expression simple et à pleine main, a parfois les gaucheries et les vulgarismes de Wordsworth sans en avoir la longue et magnifique rêverie… M. de Laprade veut être naïf ; mais on ne veut pas être naïf, on l’est quand on peut. […] L’auteur des Idylles héroïques, en nous parlant souvent dans ses pages les plus champêtres du bon pain blanc, du bon grain, du cher petit ange, etc., etc., se place dans le ton de ce fameux « petit sou. » Il est plus à l’aise dans la peinture, mais il peint épais quand il pense à être coloriste.
Quelque chose d’analogue se produit dans la genèse des idées : nous commençons par penser à la manière des animaux, avant de penser à la manière humaine ; nous réalisons, pour les dépasser, les diverses phases de leur évolution intellectuelle. […] Mais, selon nous, une troisième théorie des idées est possible : c’est celle qui, sous l’opposition du sujet pensant et du sujet pensé, chercherait une unité plus profonde, une action commune à l’esprit et aux choses, un processus universel dont la « représentation intellectuelle » est un moment et une manifestation incomplète.
Si l’on écarte tout ce que ce type a d’ignoble et d’excessif, que l’on considère l’adresse de ses machinations, ses malices, ses réparties, sa façon déconsidérer les femmes, oscillant entre la galanterie et la méfiance, son scepticisme superficiel, ce sont là autant de façons de penser françaises. […] Par une dénaturalisation périlleuse, nous pensons de plus en plus à l’anglaise, nous sentons de plus en plus à l’allemande. […] Taine, dans un des livres les plus humoristiques de notre temps, est la résignation froide, qui réduit la souffrance à la douleur physique. » L’on ne pourra s’empêcher de penser que ce fruit est amer, petit, à portée de peu de mains, et que depuis trois siècles, nous nous sommes beaucoup éloignés, de Rabelais et du pantagruélisme.
Je vois la même manière de penser dans les autres. […] quel tissu ourdi pour enchaîner tout ce qui pense que ce S. […] Qu’avez-vous pensé de l’ouvrage de mon père119 ? […] Nous serons de retour bien avant que vous pensiez à m’écrire. […] Enfin il est triste de vous aimer et de ne pas causer avec vous. — Vingt fois je me dis : Comment pense Camille ?
Sa foi, si souvent sublime de penser et de propos, est, dans le détail journalier, humble et populaire. […] À condition, bien entendu, qu’ils me laissent penser et parler à ma guise dans mon privé. […] Vous penserez que celui-là fut un vaillant et un tendre. […] Veuillot le pensait, et il osa en courir l’aventure. […] Je ne suis pas un « libre penseur », car c’est une grande sottise de s’imaginer que l’on peut penser librement.
Il a ses préférences… de peintre et il pense, rêve et s’émeut devant les éblouissantes toiles de Th. […] Je pense que nul écrivain n’est toute la poésie d’un siècle. […] Nous ne pensons pas qu’il en soit de plus tumultueuse et de plus brillante. […] Irez-vous lui demander ce qu’il pense du temps et de l’espace, ou de l’avenir des sociétés ? […] Je pensais que la terreur hugolâtre avait cessé de régner.
Je ne pense pas qu’il soit jamais venu à l’idée de M. […] Bien des signes me font croire qu’il y a pensé souvent. […] Victor Hugo pensait avec des sons, des rythmes et des mots. […] ce n’est pas si mal pensé ! […] Je ne pense pas que les livres de M.
Peu d’hommes vivants, je pense, ont plus souffert que moi dans une vie où la souffrance ne m’a pas encore dit son dernier mot ! […] Pour moi (toujours l’immortalité à part), je sais trop ce que j’en pense. […] Car, en quelque climat que l’homme marche ou vive, Au but de ses désirs, pensé, voulu, rêvé, Depuis qu’on est parti qui donc est arrivé ? […] … Demandez-lui s’il pense, immergé dans l’eau vive, Ce qu’il pensait naguère accroupi sur la rive ! […] Marcher seul affranchit, penser seul divinise !
Un philosophe se différencie d’un poète en ceci que l’un pense abstrait tandis que l’autre pense lyrique et concret. […] Griffin pense de même. […] Penser cela serait confondre la liberté avec son contraire, l’anarchie. […] — Il nous dira, je pense, comment le public l’aura reçu. […] J’en saluerai le sentiment s’ils me touchent, et l’aride et sévère noblesse s’ils pensent et me font penser.
L’Auteur pense & fait penser son Lecteur ; les détails les plus arides, les matieres les plus abstraites deviennent intéressantes sous sa plume, par la maniere agréable dont il les présente, & par l’air d’originalité qu’il leur donne. […] Les différentes pensions dont il récompensa ses services, viennent à l’appui de cette anecdote.
Je ne pensais pas qu’il pût échapper à personne que M. […] Je ne pensais pas non plus qu’on pût nier les qualités de composition de M. […] Taine n’avait pas, je pense, à raconter ici les campagnes de l’empereur. […] Il fait rêver, et surtout il fait penser. […] Sully-Prudhomme est le moins sensuel et le plus précis des poètes : il pense et définit au lieu de sentir et de chanter.
Vous savez qu’en composant ce rôle, j’ai pensé à votre voix et à votre diction si nette et si énergique. […] Ainsi pensez à moi et faites-moi bientôt la joie de quelques bonnes nouvelles. […] Je crois bien que les noms des compositeurs de cette école, fort connus chez nous, ne sont plus étrangers au public français ; je pense même que dans les théâtres ou les concerts parisiens vous entendrez bientôt, au moins en partie, les œuvres principales de MM. […] Sur ce point je pense bien que l’exemple de Wagner aurait dû être plus salutaire. […] Benjamin Godard, Saint-Saëns, Massenet, Delibes, Théodore Dubois, je pense qu’ils ont mieux compris la profondeur des théories wagnériennes sur le drame musical.
Mais le devoir est : De savoir et de penser, selon en premier lieu le savoir et la pensée du savant qui expérimenta. […] À s’aimer, en s’aimant la Matière devient : qui intégrale et possessoirement ne s’aimera, que si, des phénomènes d’attraction, elle tend à prendre sensation d’elle-même, et, en se sentant, se pense, et, en se pensant, intégrale se sait. […] Nous pensons unir les deux termes et résoudre l’antinomie, de ce, que le Spiritualisme, c’est-à-dire pour moi le plus de conscience-prise du Tout, émane perpétuellement de la Matière en évolution… Or, pour la détermination de la « valeur humaine individuelle », nous avons dit : — La Matière, la Vie, tendent à se conserver. […] Et si le poète pense par des mots, il pensera désormais par des mots redoués de leur sens originel et total, par les mots-musique d’une langue-musique. — Donc, devons-nous admettre la langue poétique seulement sous son double et pourtant unique aspect, phonétique et idéographique, et n’élire au mieux de notre re-créateur désir que les mots où multiplient les uns ou les autres des timbres-vocaux : les mots qui ont, en plus de leur sens précis, la valeur émotive en soi, du Son, et que nous verrons spontanément exigés en tant que sonores par la pensée, par les Idées, qui naissent en produisant de leur genèse même leurs musiques propres et leurs Rythmes. […] Encore qu’il soit de mon devoir d’avertir qu’on n’apprend pas à penser ainsi : car, ainsi, l’on ne pense point par des mots seulement en valeur d’idéogrammes que l’on voudrait, ensuite, ainsi que traduire en d’autres mots de musique-Verbale.
De même, quand nous voulons parler une langue étrangère, nous commençons par penser dans notre langue, et nous « traduisons ensuite, comme un écolier qui fait un thème, notre pensée, formulée mentalement en français, dans la langue anglaise ou allemande. » Pour parler « réellement bien et sans gallicismes une langue étrangère », il faut nous habituer « à penser » directement « dans cette langue », sans le secours de la nôtre. […] Nous ne le pensons pas. […] » est peut-être une formule concise pour : « Qui l’eût pensé, se le disant intérieurement ? » Si les verbes parler et dire, avec un nom de chose pour sujet, ont si fréquemment le sens d’exprimer, faire penser, c’est assurément que les choses sont des signes plus ou moins directs de certaines idées, mais c’est aussi qu’en pareil cas elles suscitent des paroles intérieures, c’est qu’elles font dire intérieurement ce qu’elles font penser. […] Cette explication suffit pour On dirait que… : ici, dire = penser, parce que la pensée = ce qui se dit ou peut se dire [cf. plus haut, § 6].
Puisque je l’ai souvent contredit, j’ai donc pensé qu’il s’était trompé. […] si j’y avais pensé ! […] Je vais vous aider, et vous en fournir auxquels vous ne pensez pas. […] — « Personne ne pense à la mort. » — Il est bien de penser à la mort, mais afin de se hâter de rendre sa vie utile. […] L’auteur de l’Essai ne saurait penser ainsi.
Certes, il n’est pas nécessaire de penser en géomètre, ni même de penser du tout, pour attendre des mêmes conditions la répétition du même fait. […] Et il est incontestable que, couramment, lorsque nous parlons de désordre, nous pensons a quelque chose. Mais à quoi pensons-nous ? […] Elle pense ainsi un mot ou une juxtaposition de mots, rien de plus. […] Elle ne pense qu’à elle, elle ne vit que pour elle.
Doué dans le roman de qualités dramatiques incontestables, il a pensé à appliquer ces qualités à la scène, en les modifiant, en les proportionnant au cadre circonscrit et plus sévère. […] Ordonio ne pense qu’à séduire et qu’à posséder. […] Au lieu de cela, Geffroy l’a débitée comme la chose du monde la plus simple et la plus facile à penser et à dire, et le succès du passage en a été troublé. […] Il est vrai que, dès qu’elle y pense et qu’on l’en avertit, elle répare, elle tombe à genoux devant lui ; mais c’est trop après trop peu.
On s’est trop accoutumé à penser que les hommes du peuple bornaient leur ambition à la possession des biens physiques ; on les a vus passionnément attachés à la révolution, parce qu’elle leur donnait le plaisir de connaître les affaires, d’influer sur elles, de s’occuper de leurs succès ; toutes ces passions des hommes oisifs ont été découvertes par ceux qui n’avaient connu que le besoin du travail et le prix de son salaire : mais lorsque l’établissement d’un gouvernement quelconque, fait rentrer nécessairement les trois quarts de la société dans les occupations qui chaque jour assurent la subsistance du lendemain, lorsque le bouleversement d’une révolution n’offrira plus à chaque homme la chance d’obtenir tous les biens que l’opinion et l’industrie ont entassé depuis des siècles dans un Empire de vingt-cinq millions d’hommes ; quel trésor pourra-t-on ouvrir à l’espérance, qui se proportionne, comme la foi religieuse, aux désirs de tous ceux qui veulent y puiser ? […] On ne m’accusera point, je crois, d’avoir affaibli le tableau de l’influence de la religion, cependant je ne pense pas qu’indépendamment de l’inutilité des efforts qu’on pourrait faire à cet égard sur soi-même, on doive compter l’absorbation de la foi au rang des meilleurs moyens de bonheur pour les hommes. […] On peut encore penser, en reconnaissant l’avantage des caractères inspirés par leurs propres penchants, que la dévotion étant d’un effet général et positif, donne des résultats plus semblables et plus certains dans l’association universelle des hommes ; mais d’abord, la dévotion a de grands inconvénients pour les caractères passionnés, et n’en eût-elle point, ce serait, comme je l’ai dit, au nombre des événements heureux, et non des conseils efficaces qu’il serait possible de la classer. […] Les esprits ardents n’ont que trop de penchant à croire que le jugement est inutile, et rien ne leur convient mieux que cette espèce de suicide de la raison abdiquant son pouvoir par son dernier acte, et se déclarant inhabile à penser, comme s’il existait en elle quelque chose de supérieur à elle, qui put décider qu’une autre faculté de l’homme le servira mieux.
Vacherot, pense à peu près comme l’Académie. […] Je l’avoué, non comme un philosophe qui pose orgueilleusement des bornes à la science humaine,, mais en homme de bonne foi qui pense que la science humaine peut résoudre au moins la question de la critique littéraire, qui confesse sa propre ignorance sans y condamner l’univers, et qui ne demande pas mieux que d’être instruit. […] Mais, faute d’y penser, faute de comprendre assez l’importance de cette remarque, notre critique tombe à chaque instant dans l’injustice ou dans la banalité. […] La véritable personne de goût, c’est cet homme poli ou mieux encore cette femme aimable, qui se sert de son intelligence sans savoir comment, de même qu’elle respire sans y penser.
Cependant il y en a quelques-unes ou elle me semble manquer de réserve et de modestie ; je ne voudrais pas décider si elle a tort de penser et de sentir avec autant de chaleur, mais il est contre la décence qu’elle se permette de l’exprimer. […] J’ai trouvé la préface mauvaise ; elle m’avait même un peu prévenu contre l’ouvrage : on voit que l’auteur ne pense pas un mot de ce qu’il dit, et qu’il serait très fâché que son livre ne plût qu’à lui seul. […] À propos de chaleur, je dirai ce que je pense de celle de J. […] Rousseau prend aux femmes, paraît surtout dans son quatrième volume : comme il est beaucoup plus attaché à cette moitié du genre humain qu’à l’autre, il s’est aussi beaucoup plus utilement occupé du soin de son éducation ; presque tout ce qu’il dit à ce sujet est vrai, bien pensé, et surtout praticable.
Mais n’oublions pas que si nous pouvons à présent nous passer du secours de la parole pour penser, c’est parce que originairement la parole nous a donné nos pensées. […] Ancillon professent tous les deux la même doctrine, sous le rapport qu’ils voient l’un et l’autre la métaphysique tout entière déposée dans les langues ; sous le rapport qu’ils pensent l’un et l’autre que les termes qui expriment les notions primitives, les faits et les rapports primitifs, ont proprement occasionné et amené les recherches métaphysiques ; sous le rapport enfin que les philosophes qui sont partis de ces termes, c’est-à-dire les partisans de la philosophie expérimentale, comme M. de Bonald et M. […] Je pense que rien ne se fait sentir tout à coup ; et ce perfectionnement du système musical pourrait bien avoir une grande analogie avec le genre de perfectionnement dont parle Smith pour les langues. […] C’est ainsi qu’on a été graduellement amené à penser que tout était d’invention humaine ; c’est ainsi que, ne pouvant expliquer les prodiges de l’harmonie ancienne, on a trouvé plus simple de les nier, ou de les attribuer à des causes indépendantes de l’essence même de la musique primitive ; c’est ainsi qu’on a imaginé d’établir en théorie que l’homme avait pu fonder la société et parvenir à instituer le langage, sans savoir toutefois ce qu’il faisait.
Certes, il y a là des accents superbes, un style étonnant, remuant et remué, et français à nous faire penser que nous avons là dans cet Italien un éloquent compatriote ; mais est-ce tout ? […] Nous aussi nous pensons, comme le P. […] Nous pensons que si un pouvoir chrétien (et certes le pouvoir devant lequel le P. […] Nous pensons que si on opposait aux droits de l’homme de Rousseau la déclaration des droits de la famille française représentée par le Père, ceci nous infuserait un sang nouveau dans les veines, et que le pouvoir politique bénéficierait, à l’instant même, car le Notre Père ne s’adresse pas qu’à Dieu.
Et que pensez-vous de la Renaissance romane ? […] Vous y pensez encore ! […] Qu’en pense M. […] Alors, que penser ? […] Cela m’a fait penser aux combats de coqs.
Ses gestes ont tant de grâce, ils sont si naturels et si parfaitement d’accord avec ce qu’elle dit, qu’il est difficile de n’être pas entraîné à penser et à sentir comme elle. […] Ses flatteries sont d’autant plus enivrantes qu’elles sont plus simples ; on dirait qu’elles lui échappent sans qu’elle y pense, et que c’est son cœur qui s’épanche, uniquement parce qu’il est trop rempli. […] Toutes les femmes de la Cour savent vous persuader cela quand elles veulent, vrai ou non ; mais toutes ne savent pas, comme Mme de Luxembourg, vous rendre cette persuasion si douce, qu’on ne s’avise plus d’en vouloir douter… » C’est la seule page de cet admirable Xe livre que je veuille rappeler ici, et Rousseau lui-même, dans sa plus mauvaise humeur, ne pensa jamais à la rétracter. […] Elle a été très-jolie, très-abandonnée, et très-méchante ; sa beauté s’en est allée, ses amants s’en sont allés, et elle pense que le Diable va venir. […] On avait bien d’autres choses à penser en janvier 1787.
» Un jour, un peintre, Louis Marvy, allant chez Delacroix, le trouva dessinant… devant un Gavarni : « Vous le voyez, dit Delacroix, j’étudie le dessin d’après Gavarni. » Mais quelque carrière qu’eût pu s’ouvrir et se frayer alors Gavarni dans une voie dite plus sévère, je ne pense pas qu’il faille, même au point de vue de l’art, rien regretter pour lui de ce qu’il a été, ni s’amuser à rêver ce qu’il aurait pu être. […] Gavarni littérateur a écrit d’autres choses que ses légendes, et j’ai sous les yeux, en épreuves, un petit recueil projeté et non publié, se composant des divers morceaux qu’il a insérés çà et là, et qui devaient paraître réunis sous ce titre : Manières de voir et façons de penser. […] On y voit, et je l’ai déjà dit, ce qu’il pense de la politique ; on n’y voit pas moins ce qu’il pense de cette philosophie essentiellement idéale et illusoire qui, sans tenir compte de la pratique humaine et de l’expérience, prétend que « le beau n’est que la forme du bon. » Et il a même, à ce sujet, une manière de parabole ou d’apologue assez remarquable. […] Et, en cet instant, une troupe de joyeux requins suivaient dans le sillage et pensaient entre eux : — « Rien n’est beau comme une galère qui va sombrer en mer toute pleine de passagers. » Et dites après cela, philosophes, que « le beau est la forme du bon. » Cet apologue est digne de Stendhal. — Voulez-vous quelque chose de plus gai ? […] je ne le pense pas du tout.
Scribe lui-même, qu’il nous induit à penser le contraire. […] Elle n’aurait qu’à répondre pour toute explication : « Je suis esprit, et rien de ce qui tient aux choses de l’esprit ne me paraît étranger. » Villon était enfant de Paris, et né vers la place Maubert, je pense. […] Arnault dans le tragique, M. de Jouy dans le lyrique, et puis sous eux, bien au-dessous, sans qu’on pensât encore à forcer les barrières, il y avait la monnaie de Laujon, Désaugiers, Gentil, une foule d’autres : ils se contentaient d’amuser. […] Voilà ce qu’aurait pu dire ou penser M. […] Il en choisit tantôt l’un, tantôt l’autre, et dès lors il ne pense plus qu’à celui-là.
Paul Bourget Lorsque, il y a deux ans, — qu’il pensât réagir contre le symptôme de désorientation intellectuelle qui se dégage nettement de la littérature présente, ou qu’arrivé au seuil de l’âge où l’on aime revoir ce par quoi l’on a été quelque chose, il obéît simplement à un scrupule de lettré, — M. […] C’est lui, pour ainsi dire physiquement, qui doit voir pour penser et regarder pour analyser, et qui, dès lors, n’aperçoit que pendant qu’il raisonne et parce qu’il examine. […] Anatole France est un écrivain de race qui porte en soi, comme d’autres l’empruntent, le goût de comprendre, de penser et de bien dire. […] Et s’il inaugure depuis peu une manière en quelque sorte imprévue de chanter leur fait aux acteurs, lui qui savait leur être invariablement débonnaire, il serait exagéré de croire que ce soit la lassitude du spectacle qui lui en consent la fantaisie ; tout au plus pourrait-on penser que l’âge a vaguement modifié son humeur. […] France, nous avons pu penser qu’il s’est façonné au moule de ses vanités intimes, bien mieux qu’il n’a su s’harmoniser avec les formes de sa raison, ce n’aura certes pas été avec cette assurance qui nous eût permis d’être catégorique, en n’estimant pas inévitable, cette manière qui nous a pourtant impressionné.
Ne peut-on pas espérer que l’humanité reviendra un jour à cette belle et vraie conception de la vie, où l’esprit est tout, où personne ne se définit par son métier, où la profession manuelle ne serait qu’un accessoire auquel on songerait à peine, à peu près ce qu’était pour Spinoza le métier de polisseur de verres de lunettes, un hors-d’œuvre qu’on ferait par la partie infime de soi-même, sans y penser et sans que les autres y pensent davantage ? […] Mais rêver n’est pas une profession, et c’est une erreur de croire que les grands écrivains eussent pensé beaucoup plus s’ils n’avaient eu autre chose à faire qu’à penser. […] L’idéal de la vie humaine serait un état où l’homme aurait tellement dompté la nature que le besoin matériel ne fût plus un mobile, où ce besoin fût satisfait aussitôt que senti, où l’homme, roi du monde, eût à peine à dépenser quelque travail pour le maintenir sous sa dépendance, et cela presque sans y penser, et par la partie sacrifiée de sa vie, où toute l’activité humaine en un mot se tournât vers l’esprit, et où l’homme n’eût plus à vivre que de la vie céleste. […] C’est qu’on ne pense plus à la chair, c’est qu’on vive si énergiquement de la vie de l’esprit que ces tentations des hommes grossiers n’aient plus de sens. […] Ce serait l’idylle antique, la vie pastorale rêvée par tous les poètes bucoliques, vie où l’occupation matérielle est si peu de chose qu’on n’y pense pas et qu’on est exclusivement libre pour la poésie et les belles choses.
Il est vrai qu’ils la laissèrent sous la conduite d’une parente… L’oncle a été ici changé en parente ; mais le reste continue de se rapporter à elle : En effet, Madame (c’est un récit qu’un des personnages est censé adresser à la reine de Pont), je ne pense pas que toute la Grèce ait jamais une personne qu’on puisse comparer à Sapho. […] Ne la prenez pas pour un bel esprit de profession, elle s’en défend tout d’abord : « Il n’y a rien de plus incommode, pense-t-elle, que d’être bel esprit ou d’être traitée comme l’étant, quand on a le cœur noble et qu’on a quelque naissance. » Elle sent mieux que personne tous les inconvénients d’un bel esprit (surtout femme), qui est reçu par le monde sur ce pied-là, et elle les expose en fille de bon sens et en demoiselle de qualité qui en a souffert. […] En le faisant, elle se flattait encore de concilier la fable avec l’histoire, l’art avec la vraisemblance : « Il n’est jamais permis à un homme sage, pensait-elle, d’inventer des choses qu’on ne puisse croire. […] Ce qui nous frappe chez elle à première vue, c’est qu’elle prend tous les personnages de sa connaissance et de sa société, les travestit en Romains, en Grecs, en Persans, en Carthaginois, et leur fait jouer quant aux principaux événements le même rôle à peu près qui leur est assigné dans l’histoire, tout en les faisant causer et penser comme elle les voyait au Marais. […] Sapho n’était pas au-dessus de toutes ces petites raisons de métier : « Ma foi, dit Tallemant, elle a besoin de mettre toutes pierres en œuvre ; quand j’y pense bien, je lui pardonne. » Petits cadeaux, gratifications, pensions, elle aimait à joindre ces preuves positives à la considération, qui ne lui a jamais manqué.
Considération oiseuse, pensera-t-on peut-être : la quantité des éléments n’est, dans les êtres sociaux comme dans tous les êtres composés, qu’un phénomène superficiel, et qui n’affecte pas leur constitution intime. […] On a dit des aspects de la nature qu’ils sont capables de modifier, dans une certaine mesure, les façons de penser des hommes : le désert serait « monothéiste », les montagnes « conservatrices ». […] Penser l’humanité, c’est se représenter plus ou moins vaguement un nombre d’hommes considérable, et susceptible de s’accroître indéfiniment. […] C’est en ce sens que l’extension de l’Empire aidait l’opinion romaine à penser l’humanité. […] Tout ce qui tend au contraire à nous faire voir de près et comme toucher familièrement les individus réputés supérieurs nous incite à penser que, eux aussi, ils sont des hommes.
On n’a pas pensé que les muscles subsistent les mêmes sous la face feinte et peinte, et que Mounet et Hamlet n’ont pas semblables zygomatiques, bien qu’anatomiquement on croie qu’il n’y ait qu’un homme. […] Je pense qu’il ne s’agit plus de savoir s’il doit y avoir trois unités ou la seule unité d’action, laquelle est suffisamment observée si tout gravite autour d’un personnage un. […] Qu’en pensez-vous, cher ami ? […] A laquelle l’auteur de la note visée répond : Que pensez-vous de « ces petites mains en forme de cuiller ? […] Il n’est pas interdit de penser que ce tableau — ou un autre — pourrait être le fameux vitrail dont il est question dans l’Amour absolu.
À quoi est-ce que nous pensons ? […] Et ici remarquez qu’il ne fait pas comme dans le discours de Metz où il songeait bien plus à diviser, à approfondir son sujet qu’à le rendre manifeste ; il ne raisonne plus pour lui seul, il pense à ses auditeurs, il ne les perd pas de vue un seul instant : «Ô largeur, ô profondeur ! […] Pour qu’il ne soit pas dit que je ne cherche chez lui que les leçons aux grands et aux puissants, dans ce même Sermon sur l’honneur, où il énumère et poursuit les différentes sortes de vanités, il n’oublie pas les hommes de lettres, les poètes, ceux aussi qui, à leur manière, se disputent le renom et l’empire : Ceux-là pensent être les plus raisonnables qui sont vains des dons de l’intelligence, les savants, les gens de littérature, les beaux esprits. […] Mais qui les pourrait supporter lorsque aussitôt qu’ils se sentent un peu de talent, ils fatiguent toutes les oreilles de leurs faits et de leurs dits, et parce qu’ils savent arranger des mots, mesurer un vers ou arrondir une période, ils pensent avoir droit de se faire écouter sans fin et de décider de tout souverainement ? […] Je fus quelque temps à penser à qui je ferais avoir sa charge… » C’est ainsi que s’exprime un roi.
Il pense « que c’est le fait de la faiblesse humaine que de chercher l’image et la forme de Dieu ». […] César lui paraît à bon droit avoir été, dans l’ordre de l’action, le premier des mortels : Je pense, dit-il, que l’homme né avec l’esprit le plus vigoureux est le dictateur César. […] L’Antiquité aussi a eu son xviiie siècle, j’entends par là sa manière philosophique de penser. […] Cette manière de penser en grand leur a échappé, et Buffon seul l’a reconnue ; il a eu, en jugeant Pline, de ces mots qu’aucun autre que lui n’aurait trouvés. […] Pline passe de là à l’examen des autres animaux, et on pense bien que je ne m’y embarquerai point avec lui.
Il n’est pas de si médiocre écrivain auquel il suffise, pour son coup d’essai, de découvrir des vérités applicables àun grand royaume, et qui ne reste mécontent de lui-même, s’il n’a pu renfermer le genre humain dans le sujet de son discours. » Le point de départ des études de M. de Tocqueville semble avoir été ce mot célèbre de M. de Serres : « La démocratie coule à pleins bords. » Il a cru que la révolution démocratique était inévitable, ou plutôt qu’elle était faite, et au lieu de raisonner à priori sur la justice ou l’injustice de ce grand fait, il a pensé qu’il valait mieux l’observer, et, laissant à d’autres le soin de l’exalter et de la flétrir, il s’est réservé de la connaître et de la comprendre. […] Il pensait que les démocrates et les conservateurs se trompaient également en prêtant à la démocratie organisée et victorieuse, les uns la grandeur, les autres la férocité des crises révolutionnaires. […] Quand il parle de l’Amérique, c’est le premier de ces despotismes qu’il craint pour elle et non le second ; quand il parle du second, c’est à l’Europe qu’il pense et non à l’Amérique. […] Si mes impressions étaient aussi tristes que vous le pensez, vous auriez raison de croire qu’il y a une sorte de contradiction dans mes conclusions, qui tendent, en définitive, à l’organisation progressive de la démocratie, J’ai cherché, il est vrai, à établir quelles étaient les tendances naturelles que donnait à l’esprit et aux institutions de l’homme un état démocratique. […] C’est à M. de Tocqueville qu’il faut attribuer la première origine de cette direction nouvelle de la pensée en France, non pas que les événements n’y aient été pour beaucoup ; mais c’est précisément la supériorité de ce grand esprit d’avoir pensé le premier et avant les événements ce que tant d’autres ne devaient penser qu’après.
Quant à cette alliance dans la formule — alliance verbale que nous retrouverons d’ailleurs souvent — de la France et de l’Église, nous dirons plus loin ce que nous en pensons. […] Je pense qu’il est inutile d’insister ; la duperie est flagrante. […] « Essayons, se dit-il, peut-être croira-t-on de nouveau en moi, si l’on voit encore ma face… Peut-être croira-t-on encore à ma vigueur éternelle… » Et il parle aux hommes qui le pensaient enseveli dans un éternel silence. […] L’impression de grandeur dont on pense, sur la foi des descriptions enthousiastes, être saisi, n’existe nullement. […] Quelques-uns, de nos jours, pensaient y élever « soit un musée, soit un groupe scolaire, soit même un observatoire, d’où l’on découvrirait, sinon Dieu lui-même, au moins les étoiles dont il a semé l’espace67. » Je ne rêve aucune de ces destinations, si honorables fussent-elles, pour la fière colline : j’y rêve quelque chose de plus grand, de plus digne d’elle.
En temps ordinaire, nous nous conformons à nos obligations plutôt que nous ne pensons à elles. […] La première est celle à laquelle nous pensons d’ordinaire quand nous nous sentons naturellement obligés. […] Dévouement, don de soi, esprit de sacrifice, charité, tels sont les mots que nous prononçons quand nous pensons à eux. Mais pensons-nous alors, le plus souvent, à autre chose qu’à des mots ? […] Le moment est venu de penser à soi. » Voilà l’ordre naturel bouleversé.
en un Pensons-y toujours ! […] Amiel pensa toujours avoir obtenu à Berlin la libération inverse. […] Il remuera le champ dans lequel un trésor, pense-t-il, est caché. […] Celle des pensions de famille italiennes et allemandes ? […] Il pensa à Charles Heim, l’ami qui l’avait précédé de treize ans, « mort comme Épictète, comme Spinoza.
Si un jour, un seul jour, un écrivain a pensé sérieusement, il a dû penser à cette chose-là. […] Que pense-t-on de la question américaine, par exemple ? — On n’y pense pas. […] Pense-t-il que ces choses-là se puissent jamais pardonner ? […] » — Y pensez-vous, malheureux ?
Comme ils pensent peu à leur perfectionnement. […] pauvre Muse, de se dire ainsi tout ce qu’on pense ! […] » Il pense à sa vie d’étudiant en droit. […] Il pense de cette destinée qui commence ce que Charles Bovary pense de sa destinée qui finit : c’est la faute de la fatalité. […] Nous pensons bien que non.
Mais, sur ce point encore, qui est le grand point, je ne voudrais pas être plus conservateur que de raison et me brouiller avec l’avenir… Je ne sais si aujourd’hui nous pensons bien, j’en doute un peu ; mais, certes, nous pensons beaucoup ou du moins nous pensons à beaucoup de choses et nous faisons un horrible gâchis de mots.
Mais enfin, poursuivis-je, que pensez-vous de son héros, Jean Valjean, le forçat philanthrope ? […] Et pourquoi le pensez-vous ? […] « — Que pensez-vous de Bossuet chantant le Te Deum sur les dragonnades ?” […] Il pensait, certes, bien autrement quand il écrivait, dans sa verte et pure jeunesse, l’ode sur Louis XVII, ou celle sur les filles de Verdun ! […] Enfin Victor Hugo a senti le vide d’un livre où le prolétaire lit, où le démagogue pense, où l’ouvrier songe.
Gounod : Mon cher Meyer, plus je pense à ce que vous êtes venu me demander hier, plus j’aperçois de raisons et de convenances de m’en abstenir. […] D’ailleurs, je pense, comme Dumas, que seul le temps peut se charger de mettre les choses à leur vraie place. […] Ce que je pense, c’est que la tentative que prépare M. […] Joncières : Mon cher Meyer, vous voulez bien me demander ce que je pense de l’œuvre de Richard Wagner. […] C’est qu’alors elles étaient méconnues, et que je pensais avoir une injustice à réparer.
Que pensez-vous, Monsieur, de la noble activité qui s'épuise à me susciter de nouvelles accusations ? […] J'en ai dit, je pense, assez pour vous satisfaire. […] Je ne sais si vous en penserez comme moi ; mais cet article me paroît sage. […] j’en suis assuré, il ne pense pas ce qu’il écrit. […] Je vous laisse à penser si ces Intelligences, qui la regardoient comme une prosélite, se parerent de tout leur éclat !
On se croit de bonne foi quand on dit ce qu’on pense, et certes il est d’honnêteté puérile de ne pas penser blanc et imprimer noir, mais ce n’est pas assez. La sincérité, c’est l’effort pour penser juste. […] Le père Thierry me conseillait l’indulgence systématique, non par habileté, mais par équité. « Vous serez tout de même complaisant pour vos amis : la justice veut donc que vous le soyez pour tous. » Il suffit, pensai-je, d’être juste même pour les compagnons. […] C’est, sans doute, le rôle du critique de louer les auteurs, mais c’est son rôle aussi de les faire penser aux qualités qu’ils n’ont pas.
Mais nous, qui avons commence à penser en 1830, nés sous les influences de Mercure, le monde nous est apparu comme une machine régulièrement organisée ; la paix nous a semblé le milieu naturel de l’esprit humain, la lutte ne s’est montrée à nous que sous les mesquines proportions d’une opposition toute personnelle. […] Ces êtres ont été moins rares qu’on ne pense aux époques primitives. […] Ce sera donc bien vainement que nos pères, devenus sages, nous prieront de ne plus penser et de nous tenir immobiles, de peur de déranger la frêle machine. […] Vous avez pensé librement, nous penserons de même ; ces grands hommes du passé que vous nous avez appris à admirer, ces illustres promoteurs de la pensée que vous répudiez aujourd’hui, nous les admirerons comme vous.
et voudra-t-on leur ravir l’honneur d’avoir pu penser ce que nous n’avons pensé qu’après eux et par eux ? […] Voilà la règle de la nature, telle qu’Homère l’a choisie, ainsi que je l’ai déjà insinué ; et je ne pense pas qu’on puisse raisonnablement en alléguer d’autres. […] L’histoire et la fable en fournissent d’intéressantes, mais en plus petit nombre qu’on ne le peut penser. […] Pour cela, il faut que le fil qui conduit le spectateur, sans qu’il y pense, soit en effet si délié qu’il ne le sente pas.
Ajoutez qu’une certaine paresse aidant, ou, si vous voulez, la loi du moindre effort, je me contenterai bientôt de savoir ce que pensent des auteurs les critiques les plus autorisés, sans jamais lire les auteurs eux-mêmes ; d’abord, parce que — si l’on sait choisir ses critiques — c’est plus court ; ensuite, parce que même les critiques prolixes ont débrouillé la matière et me donnent, par les citations qu’ils font de leur auteur, le meilleur, évidemment, de cet auteur-là, ce qui peut me suffire ; ensuite et surtout parce que, devant, quand je lirai l’auteur après le critique, subir l’influence de celui-ci et lire dans la disposition d’esprit où il m’aura mis ; si je dois, l’auteur lu après le critique, avoir la même impression que le critique seul étant lu, j’épargne du temps en lisant le critique seul. […] Leurs décisions un peu tranchantes et leurs aperçus, extrêmement inattendus de moi, m’étonnaient et me donnaient beaucoup à penser. […] celui-là même où vous vous apercevez de la monotonie de vos sensations — vous vous avisiez de vous demander : « Qu’en pense un tel ? » Quand vous saurez ce qu’en pense un tel, vous serez préparé pour un nouveau voyage ; non, pour le même, mais avec une autre façon de voir. […] Cela revient à ceci : ne dites rien à l’élève sur le Cid ne lui laissez rien lire sur le Cid, faites-lui lire le Cid et puis demandez-lui ce qu’il en pense.
. — Shakespeare, qui a pensé à tout, nous a donné l’idée de cette tyrannie dans Hamlet, quand, avec une intention profonde que des critiques superficiels taxeraient peut-être de mauvais goût, il mêle aux cris les plus vrais, les plus naturellement déchirants de son Oreste du Nord, des souvenirs mythologiques et pédantesques qui rappellent l’Université de Wittemberg, où le prince danois a été élevé. […] Elle hait l’énergie sous toutes les formes. » Et certainement, en écrivant cela, il pensait à lui et à ses écrits. […] Ses lettres prouvent par ce qu’elles contiennent que l’audacieux et impassible historien des Cenci, que le défenseur presque monstrueux d’Antinoüs, dont l’audace ressemblait à une provocation perpétuelle, ne gasconnait pas dans ses thèses inouïes et qu’il pensait les propositions. Assurément il eût mieux valu ne pas les penser et ne pas les soutenir, mais il ne s’agit pas ici du fond des choses et du mutisme radical de l’esprit de Stendhal en fait de morale, il s’agit seulement de signaler la fermeté d’un caractère dont la force augmentait encore celle d’un esprit qui, naturellement, savait oser. […] En les lisant, on est surtout frappé de la sécheresse d’expression d’une âme pourtant passionnée, et on sent presque douloureusement dans ces pages le tort immense que fait même à la sensibilité d’un homme le malheur d’avoir, sur les grands problèmes de la vie morale, pensé faux.
La tyrannie des habitudes de l’esprit crée une sincérité de seconde main pour remplacer la sincérité vierge qu’elle tue… Shakespeare, qui a pensé à tout, nous a donné l’idée de cette tyrannie dans Hamlet, quand, avec une intention profonde, que des critiques superficiels taxeraient peut-être de mauvais goût, il mêle aux cris les plus vrais, les plus naturellement déchirants de son Oreste du Nord, des souvenirs mythologiques et pédantesques qui rappellent l’université de Wittemberg, où le prince danois a été élevé. […] Elle hait l’énergie sous toutes les formes », et certainement, en écrivant cela, il pensait à lui et à ses écrits. […] Ses lettres prouvent, par ce qu’elles contiennent, que l’audacieux et impassible historien des Cinci, que le défenseur presque monstrueux d’Antinoüs, dont l’audace ressemblait à une provocation perpétuelle, ne gasconnait pas dans ses thèses inouïes, et qu’il en pensait les propositions. Assurément, il eût mieux valu ne pas les penser et ne pas les soutenir, mais il ne s’agit pas ici du fond des choses et du mutisme radical de l’esprit de Stendhal, en fait de morale, il s’agit seulement de signaler la fermeté d’un caractère dont la force augmentait encore celle d’un esprit, qui, naturellement, savait oser. […] En les lisant, on est surtout frappé de la sécheresse d’expression d’une âme pourtant passionnée, et on sent presque douloureusement dans ces pages le tort immense que fait même à la sensibilité d’un homme le malheur d’avoir, sur les grands problèmes de la vie morale, pensé faux !
Elles vous portent et vous font avancer d’elles-mêmes ; on n’a pas besoin d’effort, on pense sans le vouloir, et l’on ne s’aperçoit de son progrès et de ses découvertes qu’au plaisir paisible dont insensiblement on se trouve pénétré. […] Il les ramène à leur origine, et note les légères différences qui les séparent ; il marque soigneusement le sens des mots et les nuances des expressions ; il enseigne aux gens le français qu’ils croient avoir appris, et la logique qu’ils pensent savoir de naissance. […] Il pense que dans le premier cas l’âme subit une modification, et que, dans le second, elle fait une action. […] Ils supposent l’esprit de l’homme plein et comblé d’idées de toutes sortes, entrées par cent sortes de voies, obscures, confuses, perverties par les mots, telles que nous les avons lorsque nous commençons à réfléchir sur nous-mêmes, après avoir pensé longtemps et au hasard. […] Leur science aboutit dès l’abord à la pratique ; et ce qu’ils enseignent, c’est l’art de penser, de raisonner et de s’exprimer.
On dira peut-être que ce sont là plutôt des vertus d’un cénobite que d’un prince ; on se trompe ; on ne pense point assez combien, dans celui qui gouverne, cette vie austère retranche de passions, de besoins, combien elle ajoute au temps, combien elle laisse au peuple, combien elle diminue les moyens de corruption et de faiblesse, combien, par l’habitude de se vaincre, elle élève l’âme. […] Marc-Aurèle agissait et pensait d’après lui ; Julien, d’après les anciens philosophes ; il imitait. […] Que penser donc de Julien ? qu’il fut beaucoup plus philosophe dans son gouvernement, et sa conduite que dans ses idées ; que son imagination fut extrême, et que cette imagination égara souvent ses lumières ; qu’ayant renoncé à croire une révélation générale et unique, il cherchait à chaque instant une foule de petites révélations de détail ; que, fixé sur la morale par ses principes, il avait, sur tout le reste, l’inquiétude d’un homme qui manque d’un point d’appui ; qu’il porta, sans y penser, dans le paganisme même, une teinte de l’austérité chrétienne où il avait été élevé ; qu’il fut chrétien par les mœurs, platonicien par les idées, superstitieux par l’imagination, païen par le culte, grand sur le trône et à la tête des armées, faible et petit dans ses temples et dans ses mystères ; qu’il eut, en un mot, le courage d’agir, de penser, de gouverner et de combattre, mais qu’il lui manqua le courage d’ignorer ; que, malgré ses défauts, car il en eut plusieurs, les païens durent l’admirer, les chrétiens durent le plaindre ; et que, dans tout pays où la religion, cette grande base de la société et de la paix publique, sera affermie ; ses talents et ses vertus se trouvant séparés de ses erreurs, les peuples et les gens de guerre feront des vœux pour avoir à leur tête un prince qui lui ressemble.
Il faut y penser mûrement. Gens sages, en qui je me fie, M’ont dit que c’est fait prudemment Que d’y penser toute sa vie.
Cela la faisait penser à ses souffrances ; elle se prit à pleurer. […] Je pense que Hagene le hardi avait ainsi agi à dessein. […] Pense à nous avec cette affection que tu ne peux nous refuser. […] Je pense que jamais héros ne furent exposés à d’aussi grands tourments. […] Vous n’avez guère pensé à ma désolation et à la vôtre.
La guerre, qui ne pense pas, mais qui tue, tua la pensée en France et en Europe. […] Béranger était l’écho de la Révolution, l’écho de l’armée ; le peuple et l’armée s’écoutaient sentir, penser, aimer, haïr, conspirer en lui. […] Béranger, quand il fut devenu ce qu’il devait être, un aussi grand cœur qu’il était un grand esprit, pensait exactement comme nous. […] C’est la profession la plus rapprochée de celle de l’écrivain, si toutefois penser, sentir et écrire est une profession. […] C’est possible ; mais cela ne serait pas une raison d’impuissance dans un homme né pour penser par lui-même et pour écrire dans la langue usuelle de son pays.
S’ils eussent vécu dans les siècles que nous appelons barbares, ils eussent alors regardé l’ignorance comme l’ennemie de la vertu : le sage qui voit de sang-froid tous les siècles et même le sien, pense que les hommes y sont à peu près semblables. […] En effet, cette société est réellement la plus utile et la plus noble que puisse désirer un homme qui pense. […] Cela devait être : ce n’est point dans une antichambre que l’on apprend à dire, à penser et à faire de grandes choses ; et Corneille plus répandu aurait été plus loué, mais n’eût jamais fait Polyeucte. […] On est fait aux dégoûts, et aux rebuts, et on ne pense plus qu’à mettre à profit la malheureuse habitude qu’on a prise de les dévorer. […] Le respect qu’ils vous témoignent est d’autant plus sincère, que l’attachement en est le principe, et d’autant plus juste que vous ne pensez pas à l’exiger.
Il y a pourtant un sens fondamental : penser intuitivement est penser en durée. […] Que penser de celle des choses ? […] La manière humaine de penser. […] Nous parlons du changement, mais nous n’y pensons pas. […] Et penser un objet, au sens usuel du mot « penser », c’est prendre sur sa mobilité une ou plusieurs de ces vues immobiles.
J’ai vu de près, j’ai suivi dans toutes ses crises une passion presque semblable, non moins emportée, non moins malheureuse ; l’amante, de la même manière, s’obstinait à se tromper après avoir été mille fois détrompée ; elle parlait sans cesse de mourir et ne mourait point ; elle menaçait chaque jour de se tuer, et elle vit encore. » Il est hors de doute qu’il pensait à Mme de Staël en ce moment9. […] il est moins lu qu’il ne le pense ; il est plus loué que lu ; il ne tarde pas à s’en apercevoir, et quand il a affaire à nos savants moins flatteurs que nos grandes dames, à nos académiciens alors en renom, il a des mécomptes. […] J’ai vu bon nombre d’eux à l’île d’Elbe : gauches, mauvaise tournure, ne sachant pas entrer dans mon salon ; mais, sous l’écorce, on trouvait un homme, des idées justes, profondes, du bon sens au moins. » La conversation se détourna quelque temps sur l’Angleterre, dont Sismondi était dès lors moins enthousiaste qu’autrefois : il remit l’auguste interlocuteur sur la voie, en disant le bien qu’il pensait des Français. […] Il écrivait de Pise à la comtesse (16 février 1816) : « Je ne voulais, Madame, me présenter à vous qu’avec trois volumes à la main (trois volumes de ses Républiques italiennes), je voulais les porter comme une offrande expiatoire ; je sentais fort bien que vous auriez vivement blâmé ce que j’ai pensé et écrit dans cette année. […] Les idées religieuses de sa femme, protestante éclairée et sincère, agirent sur lui plus qu’il ne le pensait ; il n’était pas du même avis qu’elle, mais, tout en causant et en discutant, il s’en rapprochait : « Nous avons parlé ce soir de l’efficacité de la prière : ma femme, Jessie, est persuadée qu’on ne peut prendre l’habitude de prier tous les jours sans devenir meilleur.
La Bruyère, qui aimait la lecture des anciens, eut un jour l’idée de traduire Théophraste, et il pensa à glisser à la suite et à la faveur de sa traduction quelques-unes de ses propres réflexions sur les mœurs modernes. […] La Bruyère était très-pénétré de cette idée, par laquelle il ouvre son premier chapitre, que tout est dit, et que l’on vient trop tard après plus de sept mille ans qu’il y a des hommes, et qui pensent. […] Les petites inconséquences du Tartufe, il les a saisies, et son Onuphre est irréprochable147 : de même pour sa conduite, il pense à tout et se conforme à ses maximes, à son expérience. […] — En politique, il a de simples traits qui percent les époques et nous arrivent comme des flèches : « Ne penser qu’à soi et au présent, source d’erreur en politique. » Il est principalement un point sur lequel les écrivains de notre temps ne sauraient trop méditer La Bruyère, et sinon l’imiter, du moins l’honorer et l’envier. Il a joui d’un grand bonheur et a fait preuve d’une grande sagesse : avec un talent immense, il n’a écrit que pour dire ce qu’il pensait ; le mieux dans le moins, c’est sa devise.
Pensare, par exemple, en latin, signifie directement peser ; ce nom d’un phénomène sensible a été étendu à son analogue empirique, mais non sensible, l’acte de penser ; puis, par une nouvelle extension, due aux philosophes, le mot penser a souvent été employé pour désigner une idée métaphysique, analogue à l’idée empirique fournie par la conscience. […] Penser par soi-même, tel est le remède au prestige paresseux de la mode et du préjugé. […] Nous ne pensons ici qu’au langage scientifique, dont les défauts sont autant de qualités pour la langue poétique. […] On peut donc conclure avec Whately qu’elle « pense comme nous, en se parlant à elle-même ». […] « suivant la formule célèbre d’Aristote, oudepte noei aneu phantasmatos hè psukhè » : c’est-à-dire « jamais l’âme ne pense sans représentation » (trad. de R.
J’aurais pu les rajeunir, du moins çà et là, et cela m’aurait satisfait, mais à quoi bon vouloir que j’aie pensé il y a quinze ans exactement comme je pense aujourd’hui ? […] À quoi pensait Socrate pendant ses journées d’immobilité ? Pensait-il ? […] Les fakirs pensent-ils ? […] Il pense comme il mange.
Il plaide ce qu’il pense, mais au moins il le pense ! Seulement, voici qui va devenir très singulier : si ce qu’il pense est réellement ce qu’il faut penser sur Thucydide et son histoire, ce n’est pas là une justification de la gloire qu’ont faite et conservée à l’historien grec les Écoles et les Académies.
Que penser de son jugement, quand on sait qu’il fit une critique de l’immortel Télémaque & de quelques Ouvrages de l’éloquent Bossuet ? Que penser également de celui de tant d’autres Ecrivains, qui se sont efforcés, depuis lui, à déprécier ces mêmes Auteurs ?
Quand on a dit tout ce qu’on pensait, comme on le pensait, on a bien dit : le défaut, s’il y en a, est de la pensée. […] Vous qui commencez à écrire, ne déguisez pas la platitude de la pensée sous la prétention du style : parlez platement, tant que vous ne penserez pas mieux.
Vous devriez bien me dire ce que vous en pensez, vous, messieurs, qui êtes si forts dans ce genre de philosophie. […] La vérité ne rit pas, elle pense. […] L’autre jour le comte Strogonof me demanda chez lui ce que je pensais du pape. […] Il pense seul, il voit loin, il sent juste, il exprime puissamment : c’est un radical monarchique. […] Il veut faire rire, et il était créé pour faire penser ; il marche, en un mot, entre Voltaire et Pascal, mais plus près de Pascal.
Molière ne pensa d’abord qu’à s’amuser le premier de ses pièces. […] Arnolphe, fort troublé d’abord, pense à couper court à l’intrigue. […] Enfants du génie, ils doivent comme lui voir clairement dans leurs pensées, et ne jamais manquer de bien rendre ce qu’ils pensent à propos. […] Alceste s’avise de dire ce qu’il pense du sonnet d’Oronte : voilà son travers. […] Il ne faut pas trop donner à penser à des spectateurs.
J’y pensais depuis longtemps. […] Dupin n’y a pas pensé. […] On pensait alors à m’offrir la présidence de la chambre ; je n’en voulais pas. […] Je n’y pensai jamais ; j’apportais trop de pensées dans le grand procès politique du temps, pour me réduire au rôle d’arbitre des discussions. […] Molé m’apostropha enfin avec un ton de reproche : « Mais enfin, dit-il, qu’en pense M. de Lamartine ?
Il pensera par exemple à l’enthousiasme qui peut embraser une âme, consumer ce qui s’y trouve et occuper désormais toute la place. […] En tout cas le philosophe devra penser à elle quand il pressera de plus en plus l’intuition mystique pour l’exprimer en termes d’intelligence. […] Il est vrai que lorsqu’on parle de la petitesse de l’homme et de la grandeur de l’univers, c’est à la complication de celui-ci qu’on pense au moins autant qu’à sa dimension. […] Impossible de penser à cette multiplicité sans être pris de vertige ; mais elle n’est que l’envers d’un indivisible. […] Le philosophe peut se plaire à des spéculations de ce genre dans la solitude de son cabinet : qu’en pensera-t-il, devant une mère qui vient de voir mourir son enfant ?
Qu’en pensez-vous ? […] Ce que ce pauvre prêtre pensait du traître du mont des Oliviers, le philosophe le pense de tous les criminels. […] Mais ils voient que les historiens pensent, et qu’ils pensent autrement que les philosophes. […] Je le pense aussi. […] Il ne fait point de mal, puisqu’il ne pense point.
Êtes-vous sur le point de rejoindre votre ami Platon ou pensez-vous que ce soit moi qui le doive faire bientôt ? […] Si « le courage, n’est-ce pas, c’est toujours de penser à autre chosecw », le courage de l’esprit justement, c’est que, pensant à tout, on ne pense jamais au fond qu’à cela. […] tout ce qui fut pensé avant elle. […] Et s’il faut que je me charge, qu’importe ce qu’on peut en penser, et même ce que tu peux en penser, toi ! […] Dans quelle mesure est-ce un devoir de penser contre soi-même ?
Inventons donc une religion inédite. » Ce n’était pas mal pensé. […] Pour le despote, toute la nation doit obéir en toute chose à lui et croire ce qu’il croit et penser ce qu’il pense. […] Il faut qu’il y ait des hérésies, c’est-à-dire il est bon qu’on pense, et la seule chose qui indique qu’un peuple pense, c’est ceci qu’il pense de différentes manières. […] Peuples mauvais et qui ont un germe de mort : d’une part, ceux qui n’ont qu’une façon de penser et qui, par conséquent, ne pensent point ; d’autre part, ceux dans lesquels des groupes considérables préfèrent leur façon de penser à la patrie. […] S’engager à être professeur c’est s’engager à penser librement et à faire penser librement.
Nous faisons tous les deux le même métier, vous dans l’art et moi dans la littérature ; or, j’avoue qu’il m’est singulièrement doux de penser que nous le faisons avec les mêmes instincts et les mêmes principes… avec la même résolution de dire la vérité même à ceux qui ne l’écoutent pas ou qui sont blessés de l’entendre. J’ai donc pensé que je dégageais un sentiment et une ressemblance de plus entre nous, en dédiant à l’auteur des Artistes vivants, ces Romanciers vivants, qui sont aussi des peintres ou des sculpteurs, à leur façon, comme vos artistes, puisque, comme eux, mais avec des procédés différents, ils s’efforcent d’exprimer la Vie et veulent atteindre à la Beauté.
Nous ne le pensons pas. […] On pense, mais à loisir. […] A quoi pensais-je ? […] Jusque-là, on pensait, on imaginait volontairement. […] Ils pensent par images.
que tu as raison, dit ma belle-sœur à ma fille ; si mon pauvre mari avait pensé comme toi, je ne serais pas sans appui sur cette terre. […] Il y en aura toujours assez long et assez large pour recouvrir mes pauvres os quand j’irai rejoindre au ciel la céleste mère de Fior d’Aliza, à qui je pense toujours quand j’entends sa voix si claire dans les lèvres de l’enfant ! […] Chacun pensait, à part soi : « Qu’allons-nous faire ? […] Moi, je pensais aux sacs de châtaignes que les cueilleurs de la plaine viendraient ramasser sous mes yeux au mois de septembre, et qu’ils emporteraient à Lucques, sans s’inquiéter s’il nous en resterait pour vivre sur les cinq branches réservées aux habitants de la maison. […] Un frisson nous prit à ces mots, nous pensâmes tous, et tous à la fois au châtaignier, notre seul nourricier sur la terre.
lui dis-je en retirant ma main de la sienne ; voici ce qu’il faut faire, vois-tu, Hyeronimo : il faut penser à ta chère âme comme un homme qui va mourir, bien que nous ne mourrons pas, je le crois fermement. […] Quant à moi, je ne m’en sens qu’une, et elle a toujours été autant dans ta poitrine que dans la mienne : l’idée de voir, de penser, de respirer seulement sans toi, ici ou là ne m’est jamais venue. […] car cela n’aurait été ni juste, ni reconnaissant ; le mal pour le bien, est-ce que cela se doit penser seulement ? […] Pourrais-je ne pas pleurer, quand j’y pense ? […] Non, il n’y faut pas penser ; alors comment donc faire, car tu ne peux le faire évader qu’en le trompant lui-même ?
Ce fut un de ces heureux esprits qui passent leur vie à penser, à converser avec leurs amis, à songer dans la solitude, à méditer quelque grand ouvrage qu’ils n’accompliront jamais et qui ne nous arrive qu’en fragments. […] C’est, je vous assure, en ce moment le seul moyen de ne faire que peu de fautes, de n’adopter que peu d’erreurs, de ne souffrir que peu de maux. — Vivre, lui disait-il encore, c’est penser et sentir son âme ; tout le reste, boire, manger, etc., quoique j’en fasse cas, ne sont que des apprêts du vivre, des moyens de l’entretenir. […] La dernière lettre qu’il lui adresse (12 octobre 1803) est remplie d’une tendresse émue ; on y sent comme une révélation, longtemps contenue, qu’il se fait enfin à lui-même ; il ne s’était jamais dit encore à ce degré combien il l’aimait, combien elle lui était nécessaire : Tout mon esprit, écrivait-il, m’est revenu ; il me donne de grands plaisirs ; mais une réflexion désespérante les corrompt : je ne vous ai plus, et sûrement je ne vous aurai de longtemps à ma portée pour entendre ce que je pense. […] Joubert continua de vivre et de penser, mais avec moins de délices ; il s’entretenait souvent d’elle avec Mme de Vintimille, la meilleure amie qu’elle eût laissée ; mais rien ne se reforma de tel que la réunion de 1802, et, dès la fin de l’Empire, la politique et les affaires avaient relâché, sinon dissous, les relations des principaux amis. […] » La Bruyère, avant lui, avait senti cette même difficulté et se l’était avouée aussi en commençant : « Tout est dit, et l’on vient trop tard depuis plus de sept mille ans qu’il y a des hommes, et qui pensent. » M.
Je sentis ayant de penser, c’est le sort commun de l’humanité. […] Lent à penser, prompt à sentir, avec des convoitises ardentes et rentrées, avec une souffrance et une contrainte de chaque jour, Rousseau arrive à l’âge de seize ans, et il se peint à nous en ces termes : J’atteignis ainsi ma seizième année, inquiet, mécontent de tout et de moi, sans goût de mon état, sans plaisirs de mon âge, dévoré de désirs dont j’ignorais l’objet, pleurant sans sujet de larmes, soupirant sans savoir de quoi ; enfin caressant tendrement mes chimères, faute de rien voir autour de moi qui les valût. […] Il y pensera continuellement au monde de Paris, à la coterie de d’Holbach ; il jouira de sa retraite en dépit d’eux, mais cette pensée empoisonnera ses plus pures jouissances. […] La vue de la campagne, la succession des aspects agréables, le grand air, le grand appétit, la bonne santé que je gagne en marchant, la liberté du cabaret, l’éloignement de tout ce qui me fait sentir ma dépendance, de tout ce qui me rappelle à ma situation, tout cela dégage mon âme, me donne une plus grande audace de penser, me jette en quelque sorte dans l’immensité des êtres pour les combiner, les choisir, me les approprier à mon gré, sans gêne et sans crainte. […] Si j’avais pensé atout cela, rien ne me serait venu.
Ayant à parler du sentiment de la pitié, il le définira admirablement : La pitié n’est qu’un sentiment mêlé de tristesse et d’amour ; je ne pense pas qu’elle ait besoin d’être excitée par un retour sur nous-même, comme on croit. […] Pense-t-on que tout ce qui est nécessaire n’est d’aucun mérite ? […] Il revient en maint endroit, d’une manière détournée, sur ce qu’il y a d’étroit et de gênant dans une existence privée pour « un particulier qui a l’esprit naturellement grand. » On reconnaît à ces retours et à ces regrets mal étouffés l’homme qui, même en se vouant aux lettres, ne pouvait s’empêcher de penser que le cardinal de Richelieu était encore au-dessus de Milton. […] « Avant d’attaquer un abus, pensait-il, il faut voir si on en peut ruiner les fondements. » C’est à quoi les philosophes du xviiie siècle songèrent trop peu, et ils ne se demandèrent jamais, comme lui, s’il n’y a pas « des abus inévitables qui sont des lois de la nature ». […] Dans l’ordre des connaissances et des jugements, il pensait que « l’effet d’une grande multiplicité d’idées, c’est d’entraîner dans des contradictions les esprits faibles ».
Ainsi, à propos de ces gratifications et pensions distribuées à si grand fracas au nom de Louis XIV parmi tous les illustres de France et d’Europe, voici ce que nous apprend Perrault : Il alla de ces pensions en Italie, en Allemagne, en Danemark, en Suède et aux dernières extrémités du Nord : elles y allaient par lettres de change. […] Comme toutes choses ne peuvent pas demeurer au même état et vont naturellement en dépérissant, les années suivantes, il fallut aller recevoir soi-même les pensions chez le trésorier en monnaie ordinaire. […] Perrault, comme Desmarets de Saint-Sorlin et comme d’autres adversaires de Boileau, pensait que la religion chrétienne est de nature à prêter à la poésie, et qu’elle fournit même son vrai fonds à l’imagination moderne. […] Racine, plus contenu et plus ironique, félicita Perrault de son tour de force, en lui disant qu’on voyait bien qu’il n’avait voulu, par ce jeu d’esprit, que rendre parfaitement le contraire de ce qu’il pensait. […] Il avait toujours fait grand cas de leur jugement, et il était d’avis que, dans les matières de goût, leur préférence est décisive : « On sait la justesse de leur discernement, pensait-il, pour les choses fines et délicates, la sensibilité qu’elles ont pour ce qui est clair, vif, naturel et de bon sens, et le dégoût subit qu’elles témoignent à l’abord de tout ce qui est obscur, languissant, contraint et embarrassé. » Dans la préface de L’Apologie, Perrault reprochait à Boileau, entre autres choses, que « les vers de sa satire étaient plus durs, plus secs, plus coupés par morceaux, plus enjambants les uns sur les autres, plus pleins de transpositions et de mauvaises césures que tous ceux qu’il avait faits jusqu’ici ».
Je pense différemment. […] Alors nous pensons à Lavoisier. […] Léonard a-t-il même pensé à ce que nous entendons par circulation ? […] Ainsi ont toujours pensé les peuples primitifs. […] Mais si cet ami ne venait pas, en aurions-nous moins pensé à lui ?
Sandeau, dans la Revue de Paris, a été mieux et il a dit avec bonne grâce et sagesse ce qu’il pensait : Bonnaire s’était cette fois presque insurgé contre Buloz et a voulu être juste ! […] Magnin n’en fera pas moins son article, je pense, mais à loisir.
Pons, comme d’un temps qui marquait dans sa critique, et dans lequel il avait mis aussi tout son aiguillon, ainsi qu’il l’a dit ailleurs de ses Poésies. « En France, ajoutait-il, on n’a que ma critique écrite de ce temps-là, c’est-à-dire celle dans laquelle je ne pouvais dire tout ce que je pensais sur les productions littéraires du moment. […] Cela est vrai tant qu’on n’a pas vu les hommes ; mais si on les a vus une fois de près, on est bien mieux de loin pour les juger, pour en parler sans superstition, et sans se faire l’écho de l’opinion. — Pour les jugements littéraires j’ai pensé dès longtemps qu’on ne les aurait tout à fait libres et indépendants sur les hommes de France, qu’en étant à la frontière, à Genève, à Bruxelles, — à Liége. » C'était aussi l’opinion de Voltaire et, avant lui, comme on va le voir, celle d’un esprit de la même famille, Bayle, l’illustre réfugié protestant du xviie siècle, avec lequel Sainte-Beuve avait tant d’affinité3. […] Les gens de Lettres pensent de même sur la critique littéraire ; ils n’osent pas proposer de la proscrire entièrement, mais leur délicatesse sur cet article est si grande, que, si l’on y avait tout l’égard qu’ils désirent, on réduirait la critique à rien. » — Il paraît que les auteurs du temps de Malesherbes avaient recours à la censure, quand ils voulaient se venger d’un critique.
J’ai souvent pensé combien, malgré tous les soins qu’on prend pour peindre la société de son temps et pour en donner l’idée aux générations survenantes, on y réussit peu et quelles étranges images s’en font ceux qui se mêlent ensuite d’en écrire. […] « Je vous quitte pour retourner à vous ; je pense avec la joie d’un poëte que je laisserai après moi de véritables talents sur la terre. […] « Chateaubriand. » Et maintenant qu’on s’étonne, si l’on veut, et qu’on se scandalise qu’après des années écoulées, en ne cessant de placer M. de Chateaubriand au premier rang littéraire du siècle, j’aie écrit sur lui, dans les deux volumes dont il est le sujet et le centre, comme en pensaient et en parlaient dans la familiarité tous ses amis et connaissances, toutes les personnes de la société en dehors de sa coterie, M.
Agir devant ses enfants, et agir noblement, sans se proposer pour modèle ; les apercevoir sans cesse, sans les regarder ; parler bien, et rarement interroger ; penser juste et penser tout haut ; s’affliger des fautes graves, moyen sûr de corriger un enfant sensible : les ridicules ne valent que les petits frais de la plaisanterie, n’en pas faire d’autres ; prendre ces marmousets-là pour des personnages, puisqu’ils en ont la manie ; être leur ami, et par conséquent obtenir leur confiance sans l’exiger ; s’ils déraisonnent, comme il est de leur âge, les mener imperceptiblement jusqu’à quelque conséquence bien absurde, et leur demander en riant : Est-ce là ce que vous vouliez dire ? […] Je m’en suis félicité ; et j’ai pensé que je pourrais bien avoir de la raison et du goût, puisque de moi-même j’avais tiré les vraies conséquences des principes que mon aimable et belle comtesse avait posés.
Populaires, mais en haut et non point en bas, populaires parmi les lettrés et les artistes, ils sont devenus peu à peu, et comme sans y penser, des Chefs d’École. […] Au lieu de choisir, acceptant tous les sujets, et préférant même les plus bas aux plus nobles : « J’ai pensé — a dit l’un d’eux — que les larmes avaient assez coulé en haut, et qu’il fallait les faire couler en bas. » De ce jour-là, le réalisme était né, et ils le lançaient dans le monde. […] MM. de Goncourt ont compris les goûts de leur temps, ou plutôt ils les ont partagés, si même ils ne les ont subis ; et j’avais raison tout à l’heure de dire qu’avant eux, et avant que les choses de l’art eussent parmi nous leur toute-puissance, personne n’avait pensé, comme eux, à faire tenir toute l’histoire d’un temps dans un catalogue de peinture, et à l’écrire comme Diderot écrivait son Salon. […] Décidées à respecter les dehors et le monde, à s’envelopper et à se couvrir d’une bonne renommée, elles avaient sérieusement cherché dans les moralistes et pesé avec elles-mêmes ce qu’on pouvait faire, ce qu’on devait penser, ce qu’on devait paraître.
Le verbe s’était fait chair, chez ce disciple de Jésus-Christ, comme il s’était fait chair en son divin Maître, qu’il ne pensa jamais qu’à imiter, — imitation, préhension, possession plutôt, par l’amour ! […] On aurait pensé, dit superbement à cette occasion l’abbé Monnin, à qui l’admiration crée très souvent un style ; on aurait pensé que cet homme, qui entraînait tout dans sa sphère d’attraction avec une si intense harmonie, « avait un système comme les astres ». […] Selon moi, la vie du Curé d’Ars est une véritable originalité dans l’ordre hagiographique, et j’en connais peu qui fassent plus penser.
Plus le prince a de réputation, plus cet intérêt augmente ; on aime à voir un homme admiré dans sa cour et sur les champs de bataille, écrire et penser dans son cabinet, et parler en philosophe aux peuples qu’il sait gouverner en roi. […] On voit que l’opinion qui a fait de l’ignorance, en Europe, un titre de noblesse, et a défendu aux hommes qui ont ou croient avoir un nom, de l’avilir par l’art de penser et d’écrire ; opinion introduite par les sauvages du nord qui ne savaient que détruire, consacrée par des seigneurs de châtellenies barbares, qui ne savaient qu’opprimer, combattre et chasser ; opinion bien digne en effet de ces deux époques, et qui, au bout de quatorze siècles, n’est pas encore éteinte, et subsiste même aujourd’hui beaucoup plus qu’on ne croit, n’était pas encore née sur la terre. […] Il pense, il sent, il respire dans un autre ; il est d’autant plus fier qu’il est plus asservi, jusqu’à ce qu’une nouvelle révolution amène un autre empire et d’autres esclaves. […] Il fallait, pour avoir raison, approcher au moins de ce qu’Homère avait pensé.
Lemaître, l’ont pensé, et ils ont chacun apporté à la poésie quelque élément nouveau de musique. […] Sonia, peut-être, pense à l’idée religieuse, et non Raskolnikoff. […] Tu n’es que ce que tu penses, pense donc éternel… « Ce qui passe ou change vaut-il qu’on se le rappelle ? […] Ce sont des pensers de Dieu discontinués en êtres distincts par l’effectualité de la toute-puissance. […] Le comte pense le mettre à ses cuisines.
Velasquez ne pensa donc pas à l’espagnole ? […] Mais qu’en eût pensé Pascal ? […] Buffon ne pense point comme La Mettrie. […] Je ne pense pas que M. […] Dans quelle mesure le penserons-nous ?
Dès qu’il a su penser, M. Bourget a pensé d’une façon précise. […] Et voilà, je pense, où est l’erreur. […] Il voit, il pense, il écrit de même. […] On connaît, je pense, les romans de M.
Voilà ce que je pense d’un art où je me crois encore bien loin d’exceller. […] Cela me fait sentir combien il est utile qu’en matiere d’ouvrages d’esprit, quelques écrivains ayent la hardiesse de dire ce qu’ils pensent. […] Je n’allegue point tous ces jugemens comme des autoritez ; c’est seulement pour faire voir que mon opinion n’est pas aussi hazardée qu’on le pense. […] Et s’il avoit donné comme traduction la tragédie dont il est l’inventeur, nous aviserions-nous de penser qu’il eût rien fait perdre à son original ? […] J’ai mis sans y penser, le lâche devroit-il mandier mon secours ?
Il ne s’estimait ni l’inventeur de ce que les autres auraient pu penser comme lui, ni l’auteur de ce que lui commandait l’esprit ou le besoin de la communauté. […] La grammaire, c’est l’Art de parler ; la logique, c’est l’Art de penser. […] En voulant compléter ces définitions, on les a rapetissées et rendues contestables ; on a persuadé aux esprits légers, qui sont le grand nombre, que parler est autre chose qu’écrire, et qu’on peut penser sans raisonner. […] C’est l’art de parler qui nous apprend l’art de penser. […] On n’y peut pas apprendre à penser sans apprendre à bien penser, tant les auteurs nous font voir avec évidence par quels détours insensibles le meilleur raisonnement nous peut, mener à une mauvaise conclusion, et comment cette corruption de l’esprit peut se glisser dans le cœur.
Je sens que je pense pour eux et qu’ils vivent en moi. […] À quoi penses-tu donc ? […] j’ai bien souvent pensé à lui. […] Ma grand’mère pensa défaillir ; elle revint à Lannion avec ma mère, fondant en larmes, soit qu’elle se reprochât une erreur de son cœur de femme, soit qu’elle fût révoltée contre tant d’orgueil. […] Depuis, j’ai pensé beaucoup plus à elle, et, quand Dieu m’a eu donné une fille, je l’ai appelée Noémie.
Lorry, il est si au fait de tous nos maux, que l’on dirait qu’il a lui-même accouché. » Ce mot familièrement spirituel n’est pas, comme bien l’on pense, dans le discours de Vicq d’Azyr : celui-ci, en effet, observe les tons, respecte les nuances, fait entendre ce qu’il ne dit pas, et, répondant aux détracteurs de M. […] Rien n’autorise à penser qu’à cet égard il se séparât bien nettement de la plupart des médecins et des savants du xviiie siècle ; mais ce qui ressort de plusieurs de ses discours, c’est que du moins il ne prenait aucune part au fanatisme négatif dont plus d’un était atteint, et que Condorcet, par exemple, professait. […] Souvenez-vous que la sagesse consiste plus souvent à se taire qu’à parler ; car il est toujours temps de penser, mais il ne l’est pas toujours de dire ce qu’on pense. […] Il était libéral à la Cour, on peut le penser, et plus optimiste qu’il n’était permis de l’être alors ; la reine l’appelait d’un ton de reproche aimable : Mon philosophe.
Pour moi, et, je pense, pour la plupart des lecteurs, la campagne de France, si louée, était auparavant, et malgré d’intéressants mais incomplets récits, un merveilleux poème écrit plus ou moins dans une langue étrangère que je ne comprenais qu’en gros, à peu près, que j’admirais un peu sur la foi des gens du métier : M. […] C’est le même sentiment d’honneur héroïque et royal, et du noble orgueil invincible qu’on n’en saurait séparer, qui faisait dire au grand Frédéric, au moment le plus désespéré de la guerre de Sept Ans et dans les heures terribles où il songeait à se donner la mort, plutôt que de signer son déshonneur et celui de sa patrie (juillet-octobre 1757) : J’ai cru qu’étant roi, il me convenait de penser en souverain, et j’ai pris pour principe que la réputation d’un prince devait lui être plus chère que la vie… Je suis très résolu de lutter encore contre l’infortune ; mais en même temps suis-je aussi résolu de ne pas signer ma honte et l’opprobre de ma maison… Si vous prenez la résolution que j’ai prise (la sœur généreuse à laquelle il écrit, la margrave de Baireuth, avait résolu de mourir en même temps que lui), nous finissons ensemble nos malheurs et notre infortune, et c’est à ceux qui restent au monde à pourvoir aux soins dont ils seront chargés, et à porter le poids que nous avons soutenu si longtemps. […] Je ne pense jamais à ce temps où se discutait et s’agitait si vivement parmi nous le plus ou moins d’utilité des onze ou douze lieues de murailles et des seize citadelles dominantes, sans me rappeler les sentiments divers et soudains qui, dès le premier jour, partagèrent à ce sujet le monde politique et qui séparèrent des hommes habitués jusque-là à se croire unis. […] Tous ceux, au contraire, qui voulaient à tout prix l’inviolabilité du cœur de la nation ; aux yeux de qui le triomphe de la double invasion avait été la plaie saignante dont on ne s’était pas relevé encore, la plaie intestine qui, même guérie et fermée en apparence, continuait de gêner les mouvements, de paralyser la force et la pleine action de la France ; tous ceux qui, en 1814, avaient pensé comme les soldats de Fontainebleau, et comme aujourd’hui encore M. […] En lisant cette belle histoire qui sans doute a ses défauts, ses redites et ses longueurs, mais où rien n’est oublié ; où toutes les sources contemporaines se sont versées dans un plein et vaste courant ; où se déploie, sous air de facilité, une si grande puissance de travail ; où tout est naturel, — naturellement pensé —, naturellement dit ; si magnifique partout de clarté et d’étendue, et qui offre dans le détail des touches de la plus heureuse finesse ; où le style même, auquel ni l’historien ni le lecteur ne songent, a par endroits des veines rapides et comme des venues d’autant plus charmantes ; — en achevant de lire cette histoire, à laquelle il ne manque plus qu’un ou deux volumes de complément et de surcroît, je dirai encore ce que diront à distance tous ceux qui la liront : c’est que, quelque regret qu’ait droit d’avoir l’historien dans l’ordre de ses convictions politiques, la postérité trouvera qu’il n’eût pu employer les années fécondes de son entière maturité à rien de mieux qu’à édifier un tel monument.
On pense bien, toutefois, qu’à ce moment où il entrait dans la carrière du théâtre, Molière avait prêté une vive attention aux Italiens, ses trop heureux concurrents. […] Car, quoiqu’il semble que votre juridiction ne s’étende pas plus loin que la comédie et que les théâtres, je ne pense pas que les savants s’en puissent affranchir, puisque leur profession, aussi bien que toutes les autres que nous voyons, n’est qu’une comédie, et que toute retendue du monde n’est qu’un vaste théâtre où chacun joue son différent rôle. […] Ils veulent tromper quatre bohémiennes et, comme on le pense bien, ils sont dupes de celles-ci. […] Parmi ces galants d’importance Qui sont jaloux jusqu’à l’excès, Et qui pensent par leur prudence Prévoir et prévenir de dangereux excès, Combien est-il de Jeans Doucets ? […] Ayant commencé de combattre, Nous pensions qu’on nous tînt à quatre.
Devant la médiocrité des emplois administratifs, d’anciens élèves d’Écoles, normale, même centrale et polytechnique, des archivistes, des agrégés de philosophie, pensèrent à gagner la vie littéraire. Tandis que les notoires qui les précédèrent étaient éclos dans l’atmosphère des journaux gais et des théâtres légers, eux apprirent il penser dans les gymnastiques supérieures de Hume, de Bossuet, de Schopenhauer, de Claude Bernard. […] Parce que le public retarde, vous pensez qu’il ne suit plus. […] Pensez-vous que des comparaisons identiques, que de pareilles métaphores s’éveilleront devant un paysage pour un amateur de musées et de bibliothèques et pour le coulissier voisin ? […] Il peut être facile à qui lit des yeux, il n’est pas clair à qui pense.
Aujourd’hui encore, lorsqu’on veut citer quelque témoignage qui donne à penser contre Marie-Antoinette, le témoignage de quelqu’un qui compte, c’est dans les Mémoires du baron de Besenval qu’on le va chercher. […] Pour moi, je pense hardiment que l’intérêt qui s’attache à sa mémoire, que la pitié qu’excitent son malheur et la façon généreuse dont elle l’a porté, que, l’exécration que méritent ses juges et ses bourreaux, ne sauraient en rien dépendre de quelque découverte antérieure, tenant à une fragilité de femme, ni s’en trouver le moins du monde infirmés. Or, maintenant, dans l’état actuel des renseignements historiques sur Marie-Antoinette, en se rendant compte des vrais témoignages, et en se souvenant aussi de ce qu’on a ouï raconter à des contemporains assez bien informés, il est très permis de penser qu’en effet cette personne affectueuse et vive, tout entière à ses impressions, amie des manières élégantes et des formes chevaleresques, ayant besoin tout simplement aussi d’épanchement et de protection, a pu avoir durant ces quinze années de sa jeunesse quelque préférence de cœur : ce serait plutôt le contraire qui serait bien étrange. […] Je ne discuterai pas, on le pense bien, la ligne de politique à laquelle Marie-Antoinette croyait bon de revenir quand elle était livrée à elle-même. […] Quand on pense qu’un siècle dit de lumières, et de la plus raffinée civilisation, aboutit à des actes publics de cette barbarie, on se prend à douter de la nature humaine et à s’épouvanter de la bête féroce, aussi bête que féroce en effet, qu’elle contient toujours en elle-même et qui ne demande qu’à sortir.
Corneille doit donc être plus facile à traduire que Racine, et, ce qui peut-être semblera paradoxe, Tacite doit l’être plus que Salluste : Salluste dit tout, mais en peu de mots, mérite qu’une traduction a peine à conserver ; Tacite sous-entend beaucoup et fait penser son lecteur, mérite qu’une traduction ne peut faire perdre. […] Qu’on interroge ceux de nos grands poètes qui ont fait passer avec succès en notre langue quelques beaux endroits de Virgile ou d’Homère : combien de fois ont-ils été forcés de substituer aux idées qu’ils ne pouvaient rendre, des idées également heureuses et prises dans leur propre fonds, de suppléer aux vers d’image par des vers de sentiment, à l’énergie de l’expression par la vivacité des tours, à la pompe de l’harmonie par des vers pensés ? […] On se trouve quelquefois avec des étrangers de beaucoup d’esprit, qui parlent facilement et hardiment notre langue ; en conversant, ils pensent dans leur langue et traduisent dans la nôtre, et nous regrettons souvent que les termes énergiques et singuliers qu’ils emploient, ne soient point autorisés par l’usage. […] Par ce moyen ils se rendraient propre, non tout ce que les anciens ont pensé, mais ce qu’ils ont pensé de mieux ; ils connaîtraient le génie et le style d’un plus grand nombre d’écrivains ; ils auraient enfin l’avantage d’orner leur esprit en formant leur goût.
Avant d’être pensé, il a dû être vécu. […] Ce serait, pense Rousseau, ramener l’époque de déprédation. […] Penser, vivre et agir par imagination, c’est ne pas sortir de soi. […] Qu’eût-il pensé de cette lymphe de sensibilité allemande ? […] Jean-Jacques pensait ainsi au sujet de Jean-Jacques.
Ils se sont trompés souvent, mais ils ont toujours dit ce qu’ils pensaient, comme ils le pensaient. […] Vertus d’intelligence : le penser médical n’est ni le penser mathématique, ni le penser poétique. — Vertus de caractère : le médecin n’est-il pas l’altruiste par excellence, le secours prêt à se dresser au chevet de tous les lits de douleur ? […] Aucune intelligence n’a vraiment pensé cette formule extravagante. […] Il pensait exactement comme le paysan de Provence. […] C’est par elle qu’il doit se penser, se vouloir, se diriger.
Mme Dubarry, qui connaissait le roi comme Lemonnier, pensait comme lui sur la réalité des douleurs dont le roi se plaignait et s’inquiétait, mais regardait comme un avantage pour elle les soins qu’elle pourrait lui rendre, et l’occupation qu’elle pourrait lui montrer avoir de lui. […] « Vous me dites que je ne suis pas mal, et que je serai bientôt guéri, leur disait-il, mais vous n’en pensez pas un mot ; vous devez me le dire. » Ceux-ci protestaient de dire la vérité, et le roi ne s’en plaignait, n’en geignait, n’en criait pas moins. […] Il n’aurait pas pensé à se procurer cette visite, si L……., qui voulait lui en procurer une autre, ne lui eût pas proposé d’aller chercher ses enfants. […] La fièvre, qui était toujours très-considérable, augmentait fréquemment et par bouffées, et Lemonnier, qui le veillait, en disant qu’il était comme il devait être, avait bien l’air de ne pas dire ce qu’il pensait. […] Quoique ce sentiment fût le même à Versailles, l’air d’inquiétude y était plus général ; c’est d’abord le pays du déguisement, et si le déguisement est permis dans un cas, c’est bien dans celui où quand on peut, sans blesser l’honneur, cacher ce qu’on pense, on ne peut pas le faire paraître sans étourderie et sans courir le risque à peu près sûr d’une Bastille éternelle.
Mill, comme on le pense, s’interdit cette excursion. […] L’enfant qui, ayant brûlé son doigt, se garde de l’approcher du feu, a raisonné et conclu, bien qu’il n’ait jamais pensé au principe général : « Le feu brûle » il ne généralise pas ; il infère un fait particulier d’un autre fait particulier. […] Tandis que certains logiciens y voient le type universel du raisonnement, et pensent que tout procédé discursif se réduit en dernière analyse à tirer les idées les unes des autres, M. […] Mill, d’ailleurs, tout en refusant de voir dans la déduction un procédé fondamental, lui fait la part belle, puisqu’il pense que diverses sciences n’ont fait peu de progrès jusqu’ici que parce qu’elles ont induit au lieu de déduire. […] Il pense que cette question est mal posée, et toute l’école qui nous occupe ici professe la même opinion en termes différents.
Puis tout cet immense mouvement de choses qui se déplacent sans bruit et comme d’elles-mêmes, a quelque chose de mystérieux, et qui fait penser à des rouages féeriques mettant ce monde de machines en branle. […] Et nous pensons que si notre œuvre était l’œuvre de tout le monde, une œuvre moutonnière et plate, le roman que chacun fait, et que le public a déjà lu, notre volume serait accepté d’emblée. […] Je vais écrire ici ce que je pense sincèrement de l’œuvre d’un homme que j’aime, et dont j’ai admiré sans réserve le premier livre. […] J’ai pensé à un homme qui graverait le soleil à la manière noire. […] Ils me font penser à ces pauvres grands poètes nostalgiques, expatriés du ciel de leur rêve et exilés dans la vie, ainsi que ces momies dans la mort, — devant un perpétuel paysage morne.
à quoi pensent-ils ? […] J’ignore quel est le peintre qui a eu l’honneur de faire vibrer, conjecturer et s’inquiéter l’âme du grand romancier, mais je pense qu’il nous a donné ainsi, avec son adorable naïveté, une excellente leçon de critique. […] L’Atala de Girodet est, quoi qu’en pensent certains farceurs qui seront tout à l’heure bien vieux, un drame de beaucoup supérieur à une foule de fadaises modernes innommables. […] Cette impression, difficile à caractériser, qui tient, dans des proportions inconnues, du malaise, de l’ennui et de la peur, fait penser vaguement, involontairement, aux défaillances causées par l’air raréfié, par l’atmosphère d’un laboratoire de chimie, ou par la conscience d’un milieu fantasmatique, je dirai plutôt d’un milieu qui imite le fantasmatique ; d’une population automatique et qui troublerait nos sens par sa trop visible et palpable extranéité. […] Il semble que cette couleur, qu’on me pardonne ces subterfuges de langage pour exprimer des idées fort délicates, pense par elle-même, indépendamment des objets qu’elle habille.
Il avait l’instinct politique si honnête et si sûr qu’il n’avait pas besoin de penser, il lui suffisait de sentir. […] Vous pensez s’il est malheureux ; il perd son maître, et dans son maître son ami ! […] J’étais éveillé ; je pensais tristement et tendrement à vous, lorsque ma montre a marqué minuit. […] Qu’en pense-t-il maintenant. […] Les ministres de la royauté de Juillet ne pensèrent point ainsi, et M. de Chateaubriand fut flétri !
Il faut s’amuser après tout, dit Voltaire ; nous pensons, à cet égard, comme lui. […] dit la belle comtesse. — Parce que le cœur s’y mêle, répondit le professeur, parce qu’il a été pensé avec la sensibilité et non avec la fantaisie, parce qu’il a été écrit avec des larmes. […] Et maintenant que le livre est fermé, que pensez-vous du chant de Ginevra et du génie d’Arioste ? — Je pense, dit la comtesse Léna, que, si l’Arioste avait écrit beaucoup de chants comme celui-là, il ne serait pas seulement l’Arioste, il serait tout à la fois l’Arioste et le Tasse. […] — Je pense, dis-je alors modestement et en regardant avec timidité le professeur, le chanoine et Léna, je pense qu’il n’y a dans aucun poème connu un épisode plus amoureux, plus chevaleresque et plus dramatique que le chant de Ginevra.
Penser, cela sonne haut ; un penseur ! […] Ils ne croient pas qu’il soit très nécessaire de penser par soi-même quand tant d’hommes de génie ont si bien pensé, et, depuis si longtemps qu’il y a des hommes et qui pensent, ils estiment qu’il suffit de penser à nouveau, par une sorte de méditation sur les textes, ce qui a été si bien pensé autrefois. […] Les Anglais seuls pensent, peuvent penser, doivent penser. […] Elle a beaucoup moins pensé qu’elle ne l’a cru. […] Ça me tourne le sang, rien que d’y penser.
À force de contempler, ils oublient de sentir et de penser. […] J’ignore ce que vous pensez, mon cher M***, de la peinture militaire considérée comme métier et spécialité. […] Vice pour vice, je pense comme lui que l’excès en tout vaut mieux que la mesquinerie. […] Elle fait à la fois penser à la peinture de Ribeira et à l’âpre statuaire espagnole. […] Vous voyez, mon cher M***, qu’il était bien inutile d’expliquer ce que chacun d’eux pense comme nous.
Sans doute poussent-ils la mystification un peu loin, pensais-je ; mon Dieu ! […] Vous pensez s’il y réussit ! […] je ne pouvais pas penser que c’était vous ! […] Mais je ne pense pas que Ramuz dut s’en montrer si dépité. […] On n’avait pas à y revenir ni même à y penser.
Qu’en faut-il penser ? […] Les vieux eux-mêmes y pensent toujours, alors que pour eux la partie est jouée. […] Mais l’histoire est encore plus comique que je ne pensais. […] Je le pense bien ! […] Toutefois on se demande ce qu’en pense M.
Je suis de l’élite, je pense, moi aussi. […] Personne n’ose dire ce qu’il pense, exprimer ce qu’il sent. […] Les philosophes allemands portent des lunettes ; ils pensent, ou croient penser, et le monde des formes n’est qu’apparence pour eux. […] Avant que, en bonne esthétique, bien écrire et bien dire ce soit bien penser, parler est, en bonne science naturelle de l’esprit humain, la même chose que penser, et penser est la même chose que parler. « Penser, dit Max Muller, c’est parler tout bas ; parler, c’est penser tout haut. » La parole est une pensée qui a trouvé sa formule ; la pensée est une parole qui peut bien chercher plus ou moins longtemps sa forme achevée, mais qui trouve tout de suite une forme quelconque : sans quoi elle n’existerait point, non pas même à l’état d’ébauche. […] Comment pensons-nous ?
On a beaucoup critiqué cette prédominance de l’esprit historique, et l’on a dit que l’école spiritualiste, en se consumant à découvrir ce que l’on avait pensé avant elle, oubliait un peu de penser pour son propre compte. […] Cependant jamais personne n’a pensé que la nuit fût la cause du jour, ni le jour de la nuit. […] Je ne le pense pas. […] Or quiconque pense et réfléchit est un philosophe, et quiconque pense et réfléchit sur les origines des choses est un métaphysicien. […] Nous ne le pensons pas.
Je ne sais pourtant, monsieur, si vous m’êtes si obligé que vous pensez. […] Qu’aurait-il pensé de N., qui a tant d’esprit et qui se croit si moral, mais qui dès sa jeunesse, et jusque dans ses frais d’esprit, n’a jamais rien fait d’inutile ? […] — J’ai remarqué, reprit-il, les défauts de l’esprit et du cœur de la plupart du monde, et ceux qui ne me connoissent que par là pensent que j’ai tous ces défauts, comme si j’avois fait mon portrait. […] Je pense aussi que je n’en eusse rien dit sans Mme la marquise de Sablé, qui ne croit pas que jamais homme ait approché de l’éloquence de Voiture, et surtout dans la justesse qu’il avoit à s’expliquer. […] Collet a écrit un ingénieux article (dans la Revue, la Liberté de penser, 15 février 1848) ; mais la conjecture qu’il émet me paraît très-sujette à contestation, et elle reste, à mes yeux, tort douteuse.
Nous savons seulement que la parole nous fait penser et que la musique nous fait sentir. […] Scudo, le pense comme nous. […] Que pensez-vous qu’ont dit tous ces gens, et quel vacarme n’ont-ils pas fait ! […] Sais-tu pourquoi je pense à notre canari ? […] « Ainsi s’est écoulée cette triste journée, à laquelle je ne pensais pas être jamais destiné.
Je crois que Raphaël dessine bien, et que Titien est un admirable coloriste, que Voltaire écrit comme pense un homme d’esprit, et que Byron chante comme l’humanité pleure, surtout dans Don Juan ! […] Il a raison, pensais-je, il dit vrai, le poète ! […] Virgile le sentait, et il y pensait déjà ; le triomphe d’Auguste pendant son retour de Brindes à Rome, la vingtième année avant la naissance du Christ, paraît lui avoir donné l’idée première de l’Énéide, poème légendaire de Rome. […] Le temps où nous vivons n’est bon qu’à penser. Pensons donc l’un et l’autre, puisque les événements différemment envisagés par nous, et puisque l’âge qui m’atteint, et qui vous suit, ne nous laissent pas d’autre usage à faire de nos facultés, pensons donc avec l’impartialité de l’âge et avec la patience du temps.
Myniseus traitait de singe Callipide, qui selon lui forçait trop son jeu ; il ne pensait pas mieux de Pindarus. […] Qui a jamais demandé à Platon ce qu’il pensait de l’immortalité de l’âme ? Qui a jamais demandé à Aristote lui-même ce qu’il pensait de l’éternité du monde ? […] L’intelligence même ne pense, ne sent, n’aime, ne se souvient, qu’en compagnie du corps. […] L’âme y est seule avec les Idées qu’elle comprend et qu’elle contemple, mais qu’elle ne fait pas, comme Aristote l’a pensé.
Un corps, comme un individu, pense d’abord et surtout à lui. […] Influence des nobles. — Règlements en leur faveur. — Préférence qu’ils obtiennent dans l’Église. — Distribution des évêchés et des abbayes. — Préférence qu’ils obtiennent dans l’État. — Gouvernements, offices, sinécures, pensions, gratifications. — Au lieu d’être utiles, ils sont à charge. […] Louis XV laisse « la bonne machine » marcher toute seule, et se cantonne dans son apathie. « Ils l’ont voulu ainsi, ils ont pensé que c’était pour le mieux »129, telle est sa façon de parler « quand les opérations des ministres n’ont pas réussi ». — « Si j’étais lieutenant de police, disait-il encore, je défendrais les cabriolets. » Il a beau sentir que la machine se disloque, il n’y peut rien, il n’y fait rien. […] « Votre Majesté sait mieux que moi, écrit l’abbé de Vermond à l’impératrice Marie-Thérèse135, que, d’usage immémorial, les trois quarts des places, des honneurs, des pensions sont accordés non aux services, mais à la faveur et au crédit. […] Les charges de judicature sont les plus assujetties aux services rendus ; et cependant combien le crédit et la recommandation n’influent-ils pas sur la nomination des intendants, des premiers présidents », et des autres Necker, entrant aux affaires, trouve 28 millions de pensions sur le Trésor royal, et, sitôt qu’il tombe, c’est une débâcle d’argent déversé par millions sur les gens de cour.
Je le pense encore et je n’en parle jamais, même à lui. […] » C’est que la mort n’est pas ce qu’une foule en pense ! […] « Ô siècle, arrache-toi de tes pensers frivoles ! […] Je me sentis pressé d’écrire ce que je pensais de cette critique éloquente, passionnée, radicale, prolétaire, de la société. […] Aujourd’hui, vous pensez que l’heure est venue de parler de moi, j’en suis fier ; nous nous aimons depuis quarante ans et nous ne sommes pas morts.
Si elle y pense à ses amis des jours heureux, que mon nom lui revienne et qu’elle se souvienne à son tour de ceux qui l’ont le plus aimée. […] Elle pensait pouvoir renouer un attachement, passionné d’une part, mais combattu de l’autre. […] J’avais des devoirs rigoureux à remplir avant de penser à un repos délicieux, mais coupable. […] chantait-elle en entrecoupant son air de baisers et d’éclats de rire, comme quelqu’un qui pense à revoir et à être revue avec une égale ivresse, le soir de ce beau jour qui commence si bien. […] Elle avait pensé à son amant.
Montaigne pense pour son compte ce que l’antiquité a pensé ; il met l’esprit français de pair avec l’esprit ancien. […] Il put apprécier, dans ces deux circonstances, à quelles interprétations incertaines et diverses sont sujettes les actions publiques, et il apprit, par les jugements qu’on faisait de sa conduite, ce qu’il faut penser de l’opinion et des réputations qu’elle fait ou détruit. […] Comme il n’a point de but, et qu’il pense moins pour se convaincre et s’assurer sur un point, ou pour en persuader les autres que pour entretenir doucement l’activité de son esprit ; comme il n’est point impatient, n’ayant nulle part à aller, tout détail, toute anecdote, toute particularité a droit de l’intéresser ; toute idée lui est agréable, tout chemin lui est bon. […] Montaigne préférait les subtilités de Sénèque, qui le piquaient et qui excitaient sa nonchalance, à cette beauté égale et pure d’un discours ni subtil ni téméraire, ni paradoxal, où l’auteur pense moins à jouir de ses pensées particulières qu’à faire part aux autres de ce qu’il sent en commun avec tous. […] La paresse même de sa mémoire, qu’il a peut-être exagérée par vanité, et cet usage de ne penser qu’à propos ou à la suite des pensées d’autrui, le portaient aux raisons extraordinaires et malaisées.
Boileau a pensé des auteurs de son temps ce que, deux siècles après lui, libres des préventions et des surprises dont il eut à se défendre, nous en pensons à notre tour, sans effort et presque sans mérite. […] Sa haine pour la révolution française n’est pas ce qui donne le moins à penser. […] Mais, après tout, il n’en dit pas plus, pour le fond, que n’en pense tout honnête homme. […] Les beaux vers y abondent, mêlés à des imitations d’école, qui faisaient penser à d’autres maîtres, et désirer que le poète s’en affranchît. […] En lisant les Causeries de Sainte-Beuve on pense à Plutarque et à Bayle, et on les retrouve, avec le trait poétique qui leur manque.
Pour sortir de ces embarras insolubles, je m’enfonçais dans l’étude avec rage, et je n’y pensais plus. […] J’avais souvent pensé depuis à cette énigme sans arriver à me l’expliquer. […] J’ai toujours pensé que c’étaient les vrais nobles. […] Le sentiment de sa supériorité l’empêchait de se tourner vers les jeunes paysans ; pour ceux-ci, elle était une demoiselle, ils ne pensaient pas à elle. […] Si le sens moral n’avait pas été chez elle aussi oblitéré qu’il l’était, elle n’eût pensé qu’à délivrer la sacristine ; mais elle n’y songeait guère.
Nous ne pensons donc le principe d’Archimède qu’« en relation » de ces notions, et le principe lui-même n’a de sens ou de vérité qu’en fonction de ces relations. […] De la comparaison que nous ferons entre eux de leurs caractères, laquelle sans doute ne sera qu’une manière encore de penser « en relation », et de l’expérience que nous aurons des qualités des objets. […] S’il n’existait pas un « inconnaissable » dont les corps, solides ou fluides, ne sont que des manifestations phénoménales, appropriées, si l’on veut, ou adaptées à nos sens, nous ne pourrions nous former aucune idée, même conventionnelle, d’un fluide ou d’un solide, et c’est ainsi que, de la « nécessité même de penser en relations », se conclut la nécessité d’un « non relatif réel. » Que pouvons-nous cependant savoir de ce « non relatif » ou connaître de cet Inconnaissable ? […] Écoutons Comte à ce sujet : « La création de la sociologie complète l’essor fondamental de la méthode positive, et constitue le seul point de vue susceptible d’une véritable universalité, de manière à réagir convenablement sur toutes les études antérieuresafin de garantir leur convergence normale sans altérer leur originalité continue. » Il écrit mal, mais il pense bien ! […] Quand les disciples se sentent devenus assez forts, ils n’aiment pas que leur maître continue de penser, et si surtout, il pense autrement qu’eux, c’est lui qu’ils accusent de ne plus se comprendre !
En développant celles-ci, il a la joie de penser qu’un plus grand nombre d’honnêtes gens seront soumis à son influence. […] C’est drôle quand on y pense. […] Je pense souvent à vous tous et mon seul chagrin est de vous sentir angoissés pour moi. […] Au revoir, peut-être adieu, mais je ne le pense pas. […] Ma seule douleur, mon seul regret sera de penser à la peine que vous fera ma mort.
Aujourd’hui les choses ont changé, et c’est par nos compatriotes qu’est poursuivie avec le plus de persévérance et de bonheur l’étude de la psychologie15. » On peut croire que l’illustre philosophe anglais ne cède pas sans raison à un mouvement d’orgueil national, quand on pense aux travaux d’hommes comme Alexandre Bain, Herbert Spencer et Stuart Mill lui-même. […] Nous sommes loin de le penser, quand nous réfléchissons à ce que cette psychologie nous laisse ignorer sur la nature humaine. […] La vérité est que l’homme parle parce qu’il pense, c’est-à-dire abstrait, généralise, juge, raisonne, tandis que l’animal ne pense pas, dans la véritable acception du mot, étant incapable de ces diverses opérations. […] Toute lutte a cessé, et la volonté, heureuse d’un empire facile, gouverne presque sans y penser, et fait des prodiges avec un abandon plein de grâce. […] Qu’importe que l’ordre et la régularité dans la succession des mouvements de la vie extérieure nous fassent penser à l’ordre de la nature et à l’universelle nécessité qui en fait le caractère ?
On sent que l’Auteur sait penser & faire penser, mérite aussi rare qu’utile ; qu’il a du goût & de la raison, de l’imagination, & de la sensibilité.
Bonhomme ne s’est jamais demandé une seule fois en écrivant : « Qu’aurait pensé de moi mon auteur s’il m’avait lu ? […] Bonhomme ce qu’on pense, car c’est une des plus estimables personnes que je connaisse. […] « Nous écrivons avant d’avoir appris, même parfois avant d’avoir pensé », dit-il quelque part ingénument. […] Collé ne pensait point d’abord à être un auteur proprement dit ; il avait à s’occuper de sa fortune et remplissait un emploi. […] Il eut la douleur de survivre plus de deux années à sa femme, et l’on est allé jusqu’à penser que dans son deuil et sa mélancolie extrême, il avait pu lui-même avancer sa fin.
Il aimait, notamment, à dire et à écrire ce qu’il pensait. […] Duruy, mais il vaut mieux ne pas les rappeler. » L’empereur souffrait ces franchises, et n’en pensait — ou n’en songeait pas moins ; car il me paraît avoir songé sa vie plus qu’il ne l’a vécue. […] Du moins elle pensait ainsi, ou plutôt (car elle ne saurait penser autrement), ce que la nécessité l’oblige à taire aujourd’hui, elle pouvait encore, il y a trente ans, le crier très haut. […] Laissons donc ce que les évêques et des catholiques fervents ont jadis pensé de son œuvre. […] Car, si l’univers a un but, il faut que ce soit, pour le moins, d’être connu de l’homme et de se réfléchir en lui, puisque, au surplus, les métaphysiciens nous disent que le monde n’existe qu’en tant qu’il est pensé par nous. « Science sans conscience est la ruine de l’âme ».
Leur œuvre est un symbole, car ils ne se bornent pas à signifier mieux l’individu, mais déduisent de son attitude physique quelque large attitude morale et, sans y avoir pensé peut-être, le rattachent ainsi au cercle moral de la Vie. […] Je pense que, à son insu peut-être, il sera presque toujours symboliste au moment où il sent l’œuvre s’agiter en lui, et c’est alors que dans les choses aperçues il recherche l’Idée. […] Il ne pense plus que sa fonction soit de susciter en un pressentiment de l’Être le cœur humain et l’âme humaine jusqu’au vertige par l’éloquente harmonie de la Forme. […] Mais le Poète doit chercher moins à conclure qu’à donner à penser, de telle sorte que le lecteur, collaborant par ce qu’il devine, achève en lui-même les paroles écrites. […] Vielé-Griffin est un conteur lyrique ; chez lui, — chaque fois qu’il apparaît accidentellement, — le vers sans image fait penser au geste d’un habile narrateur, lorsqu’après avoir longtemps parlé comme pour lui-même il lève soudain la tête, et lance le mot décisif en vous regardant en face.
La vérité le menait comme un enfant ; il se soumit à elle quand il pensa l’avoir trouvée ; il s’arrêta quand il craignit de n’être plus avec elle ; il recula quand il crut l’avoir dépassée. […] Auguste Comte, qui me semble, le plus souvent, répéter en mauvais style ce qu’ont pensé et dit avant lui, en très bon style, Descartes, d’Alembert, Condorcet, Laplace. […] Notre grand Littré passa toute sa vie à s’interdire de penser aux problèmes supérieurs et à y penser toujours. […] En 1872, visitant un phare sur les côtes de Bretagne, il tomba de la hauteur d’un premier étage ; il en fut quitte pour quelques contusions ; un journaliste des environs regretta qu’il ne se fût pas tout à fait rompu le cou. « Nous ne pensions pas de même sur les croyances théologiques, ajoute M. […] À la vue de tant de bonnes choses qu’enseignent les lettres, en apparence frivoles, vous arriverez à penser que le doute discret, le sourire, l’esprit de finesse dont parle Pascal, ont bien aussi leur prix.
Il va dans le désert penser, à qui ? […] Que pense Eschyle de l’art pour l’art ? […] À en croire une affirmation très générale et très souvent répétée, de bonne foi, nous le pensons, ce mot, l’Art pour l’Art, aurait été écrit par l’auteur même de ce livre. […] Ces pauvres chers vices payants, ces excellents forfaits bons princes, son altesse Rufin, sa majesté Claude, cette auguste madame Messaline qui donne de si belles fêtes, et des pensions sur sa cassette, et qui dure et qui se perpétue, toujours couronnée, s’appelant Théodora, puis Frédégonde, puis Agnès, puis Marguerite de Bourgogne, puis Isabeau de Bavière, puis Catherine de Médicis, puis Catherine de Russie, puis Caroline de Naples, etc., etc., tous ces grands seigneurs, les crimes, toutes ces belles dames, les turpitudes, leur fera-t-on le chagrin de consentir au triomphe de Juvénal ? […] Il faut qu’il défende, selon le côté menacé, tantôt la liberté de l’esprit humain, tantôt la liberté du cœur humain, aimer n’étant pas moins sacré que penser.
Sainte-Beuve, qui s’y sentait provoqué par une allusion assez plate, en prit occasion pour dire une dernière fois ce qu’il pensait de M. […] Je pense que le terme tire sur sa fin. […] Par une analyse sophistique et subtile, assez semblable à celle que l’abbé de Condillac appliqua depuis à la sensation, ou Helvétius à l’amour physique, Lucrèce faisait dériver de cette crainte de la mort l’ambition, l’avarice, l’envie, les haines fraternelles, les proscriptions sanglantes, les suicides ; il pensait donc servir la patrie en guérissant les Romains de cette terreur chimérique, et en prouvant que la mort ne menait à rien ; de là ces arides théories d’athéisme et de néant, toujours entremêlées de conseils probes, de consolations mornes et sévères. […] Que Lucrèce fût déiste ou athée, cela ne le touchait en rien, comme bien l’on pense.
Puisque je viens de citer Martial, je le citerai encore ; j’y pensais involontairement, tandis qu’on célébrait et (qui plus est) qu’on récitait avec sensibilité les vers touchants de la Pauvre fille ; ce n’est qu’une courte idylle, et voilà qu’entre toutes les œuvres du poëte elle a eu la meilleure part des honneurs de la séance. Martial, s’adressant à un de ses amis qui préférait les grands poëmes aux petites pièces, lui disait : « Non, crois-moi, Flaccus, tu ne sais pas bien ce que c’est que des épigrammes247, si tu penses que ce ne sont que jeux et badinages. […] Je n’ose en répondre : « Vous louez douze vers pour en tuer douze mille », ne put-il s’empêcher de dire un jour à quelqu’un qui revenait devant lui avec complaisance sur cette idylle première ; il disait cela avec sourire et grâce, comme il faisait toujours, mais il devait le penser un peu. […] Un bon sens élevé, éloquent, règne dans tout ce discours si bien pensé et si littéraire par l’expression comme par l’inspiration.
Et, plus souvent qu’on ne croirait, une fois mis en train, il leur arrive de se laisser prendre à ce travail forcé, de penser ce qu’ils écrivent et d’achever avec intérêt ce qu’ils avaient commencé avec ennui. […] Rochefort (La Gloire à Paris) : 1° « L’action très grande de Rochefort est dans cette belle gaieté qui est le fond de son tempérament vraiment français » 2° « Rochefort est un des rares Parisiens de l’ancien temps qui ait conservé dans l’âge mûr cette belle insouciance et cette bonne humeur qui furent autrefois les qualités maîtresses de la race française. » (Je pense qu’il faut entendre : « Rochefort est un Parisien le l’ancien temps, un des rares Parisiens qui aient conservé », etc. ) 3° « Chacun dans sa sphère plisse le front… Je ne vois plus guère que Rochefort qui ait conservé la gaieté de la vieille race française » 4° « Après avoir exaspéré beaucoup de ses contemporains par la violence excessive de ses écrits, il les ramène aussitôt à lui par les éclats de sa gaieté si française. » Pour Offenbach, le refrain est : « Quel artiste ! […] Ne pensez-vous pas qu’on appellerait assez justement M. […] Il est partout « le monsieur de l’orchestre », l’homme qui regarde pour son plaisir et ne veut pas en penser plus long.
Détestable écrivain, penseur nul, savant de détails mais fermé à l’intuition exacte, vive, nue et crue d’une civilisation, il s’attachait à l’exactitude morte, et il n’avait jamais songé que des hommes avaient pensé d’autre sorte que lui dans les cuirasses et parmi les tapisseries qu’il exhumait. […] Je pense seulement à ceci : qu’il est d’une douceur infinie de se délasser du travail par une occupation qui est presque le contraire de celle à qui l’on s’adonne d’ordinaire, et où pourtant l’on ne perd pas le bénéfice de ses compétences. […] Quand Joachim est confident, sans le vouloir d’un amour point spirituel, il ne s’indigne, ni ne réfléchit, et ne pense qu’au mariage nécessaire, oubliant tout à fait que l’Église ne permet pas le mariage pour la satisfaction de la volupté, mais seulement pour la création de la famille. […] Il a pensé, senti, écrit assez hors notre temps pour demeurer.
Quelques autres écrivains y ont trouvé un tableau philosophique de ce qui se passe dans l’univers vraiment admirable ; mais tout le monde n’a pas pensé comme eux. […] L’héroïne Julie, mêlange étonnant d’agrémens & de solidité, pense comme un homme, & elle en a un peu le style. […] Cette sombre mélancolie qui domine dans certains morceaux de ce dernier écrivain, caractérise les Romans de M. d’Arnaud, bon prosateur, poëte touchant, qui sçait penser & écrire, & qui dans toutes ses productions a l’art de peindre à l’esprit & de remuer le cœur. […] M. de Marmontel vouloit se faire lire par les femmes, & il a pensé sans doute que ç’auroit été les dépaïser trop, que de peindre les Grecs en Grecs & les Romains en Romains.
À l’époque où commença la prédication de Luther, si la question eût pu n’être qu’une question politique, la réformation n’aurait pas eu lieu : cela est si vrai qu’à présent ceux des luthériens et des calvinistes qui pensent, qui regardent au fond des choses, n’hésitent pas à prononcer que les communions protestantes devraient se réunir à la religion catholique. […] L’homme ne vit pas avec autant d’intensité dans le temps qu’on le pense. […] On pense bien que c’est du philosophe que je parle, car c’est comme philosophe qu’il vient de recevoir une nouvelle apothéose. […] Je suis loin de penser qu’il ne faille pas faire pénétrer le plus possible l’instruction dans toutes les classes de la société ; je sais tout ce qu’il y a d’inévitable et de fatal dans la force des choses, et j’ai déjà expliqué ma pensée à cet égard ; mais enfin cette diffusion des lumières trouvera toujours, et inévitablement aussi, une limite dans le besoin du travail, pour le plus grand nombre.
II Et pour ne parler que de celle-là, à qui l’Opinion, cette femelle, décerne actuellement le titre d’homme de génie, Mme George Sand, qui, dans sa Lélia, ayant voulu montrer des abstractions et des types revêtus d’une humanité agrandie, a glissé bien vite, de cette hauteur de conception et de résolution, dans cette fatalité des portraits, imposés, de par la nature, à la femme, laquelle ne pense guère que quand elle se souvient. […] Telle est la délicieuse théologie au jasmin, plus parfumée et plus sentimentale qu’orthodoxe, d’une femme qui ne s’est pas faite dévote de peur de n’être rien, comme dit Voltaire, car elle était quelque chose, et qui aurait pu rester charmante, sans se compromettre, en n’écrivant pas « que la femme pense plus loin que l’homme », par la plaisante raison « qu’elle aime davantage » ! Eugénie de Guérin, dont Mme de Blocqueville se vante, à la première page de son livre, de s’être inspirée, Eugénie de Guérin qui, si elle revenait au monde, s’effrayerait, dans sa simplicité de cœur et de foi, du fatras auquel on la mêle, n’avait point de ces façons de penser sur le catholicisme que professent Mme la duchesse Eltha et Messieurs ses amis. […] pour cette forte tête, virilisée encore par l’étude et par la réflexion, le peignoir a peut-être une poésie cachée, et pense-t-elle qu’il lui donne l’air plus prêtresse, plus prophétesse et plus Muse ?
Lui qui pensait tout et qui pensait à tout, il avait dû les faire, sous un autre nom, dans son encyclopédique Comédie humaine, et c’est ce vide énorme laissé par Balzac qu’une femme aujourd’hui a cru pouvoir combler ! […] Je me suis tenu à distance des détails de ces livres de femme, écrits comme ils sont pensés, et dans lesquels on n’en trouve pas vraiment un seul qui y soit mis en œuvre par l’art ou par la réflexion. […] Voici que le droit des femmes devient, même pour les hommes d’État, une sérieuse opinion politique ; que le club jadis fondé par Mme Olympe Audouard, de rose mémoire, qui ne pensait peut-être pas en tête-à-tête avec un homme ce qu’elle disait devant des hommes réunis, voici que ce club haché si longtemps par la plaisanterie rejoint ses tronçons et ressuscite avec d’autres Olympe Audouard, aussi affreusement rouges qu’elle était, elle, délicieusement rose… Voici que les Tricoteuses de la Révolution, si elles revenaient dans notre monde, ne voudraient plus tricoter devant la tribune, mais entendraient bien y monter !
voilà ce que nous pensions, mais l’illusion n’a pas été longue. […] Ces messieurs, qui sont, comme nous l’avons dit, des sinologues fort distingués, et qui pensent peut-être très fortement en chinois, se relâchent en français et ne sont plus en cette langue que de modestes compilateurs. […] Deux opinions, comme on le voit, assez dissemblables et hostiles, qui s’entrechoquent comme des sœurs ennemies depuis qu’on s’occupe de la Chine, et que le livre de Pauthier et Bazin ne pacifiera pas en nous montrant ce qu’il nous faut définitivement penser de ce pays, à fantasmagorie et à mirages, qui nous applique, depuis deux siècles, la moralité de la fable des Bâtons flottants, jouée par lui avec ses bambous ! […] S’il n’y avait ici qu’une préoccupation d’études, qu’une adoration de savant qui finit par faire une idole de l’éternel objet de sa pensée, nous trouverions cela touchant et assez frais, car la pensée a aussi son enfance comme la vie ; et, si ce n’était pas suffisant pour expliquer une admiration si naïve ou si profonde, nous penserions à ces moines du mont Athos qui finirent par voir la lumière incréée, à force de regarder attentivement leur ombilic.
Le point d’honneur devint tout l’honneur ; — et, pour peu qu’un homme mit bravement sa vie au bout d’une épée, il avait assez d’honneur comme cela… Ce n’était pourtant pas assez, en réalité, pour qui pense ; mais c’était l’illusion d’une race si profondément militaire qu’à ses yeux la magie du combat et d’un duel brillant couvre tout encore, fait trembler le châtiment sur la tête du coupable et empêche le mépris, même mérité ! […] — même jusqu’aux spectateurs volontaires du duel, privés pour toujours de leurs dignités et pensions s’ils en possédaient ! […] Il est vrai qu’elle en avait un avec toute l’Europe, et qu’entre ses batailles à la frontière et ses échafauds dans le cœur du pays elle était trop occupée pour penser au duel d’homme à homme, grêle chose pour elle qui tuait en masse ! […] Son Code du Duel est de la médecine expectante appliquée à ce mal du duel qu’il ne pense pas à guérir, mais à diminuer.
Nous, que l’histoire comme on l’écrit depuis vingt ans13 a lassés et un peu blasés sur les généralisations à perte de vue qui s’y mêlent, nous aimons cette saveur étrange, parce qu’elle est pure et vraie, que nous donne l’histoire écrite ainsi, et nous pensons que la voilà, impartiale et sincère, autant, du moins, qu’il est permis à la pauvre main humaine de la tracer. […] Nous avons dit ce que cette double biographie nous paraît être comme œuvre d’histoire et comme œuvre littéraire, c’est-à-dire, en somme, un livre excellent, intéressant, tout à la fois pensé et sensé. […] Elle fait plus penser qu’elle n’apprend les faits. […] Ces interprétations de grands esprits qui nous font penser dans le sens de leur propre pensée, ces espèces de torsions imprimées à la réalité toute droite sous la main artiste qui sait la ployer et la reployer à son gré autour d’une idée, étouffent toujours un peu l’histoire et la meurtrissent.
L’auteur, qui a toujours beaucoup voyagé et qui a vécu depuis à l’étranger, avait le charmant dandysme d’abandonner ses livres à eux-mêmes et de n’y plus penser, quand ils étaient publiés. […] l’homme qui a pensé Julien Sorel et l’abbé Fabrice, parce qu’il était ces deux hommes, qui, du reste, n’en font qu’un, avait sous la peau du marbre dont les diplomates doivent être faits, comme les statues. […] C’était la conversation par nappes d’idées et de bien dires, c’était une de ces conversations qui font penser à celle de Diderot. […] Ce sont des historiens non plus de derrière les faits, mais du fond des faits ; des historiens qui osent faire penser et écrire l’Histoire par ceux mêmes qui l’ont faite ; qui, par une merveilleuse intuition rétrospective, la prennent à la source humaine dont elle est sortie, — dans la conscience révélée de ceux qui l’ont créée ; qui se mettent enfin, sans façon, sur les épaules, la tête de Sylla ou de Richard III, et parlent par leur bouche comme ils auraient parlé eux-mêmes, s’ils avaient voulu se faire comprendre et expliquer leurs actes à la Postérité… Ah !
La colère qui y monte comme une flamme, qui y saisit tout, qui y éclaire tout, — mais qui y décompose tout aussi quelquefois, — la colère, qui n’a pas encore cessé dans la plus grande partie de ces deux volumes d’être une sainte colère, est le caractère dominant de cette fulgurante Correspondance, qui fait penser au mot profond des Écritures, quand elles parlent de « la colère de l’Agneau ». […] Mais, avant ces lettres, de toutes les grandeurs auxquelles il aurait pu prétendre c’eût été la dernière peut-être qu’on eût pensé à lui accorder ! […] quand on pense à la destinée et au caractère du vieux Roi auquel il souhaitait cette houlette, on peut se dire que la grâce de l’esprit n’a jamais été plus atrocement cruelle ! […] Quel que soit le jugement qu’on doive prononcer sur la conduite de Lamennais dans sa rupture avec l’Église, et ce jugement, nous pensons que l’Histoire le fera sévère, la Correspondance n’en entraînera pas moins ces deux erreurs contemporaines sur sa personne.
Pour penser à rendre un service, et un service d’argent, au prince Poniatowski, pour lui donner le droit et la hardiesse d’un tel service, il fallait que Madame Geoffrin, cette femme d’un si grand tact et d’une si grande mesure, eût déjà pour lui un sentiment bien profond… Et c’est toujours la même chose, comme dit le paysan de Molière, parce que c’est toujours la même chose ! […] Eh bien, qu’il veuille bien me le pardonner, je me permets de penser autrement que M. de Mouy ! […] Il n’y a jamais de ridicule dans une passion quand elle est vraie, et je pense même comme Madame de Staël, c’est que le ridicule ici est un mot inventé par le monde pour dégoûter des sentiments exaltés les âmes qui valent mieux que lui. […] IV Ainsi, pour moi, j’ose le penser et j’ose le dire, ce fut une amoureuse que Madame Geoffrin, et une amoureuse désheurée, aimant à l’âge où l’on n’aime plus, ce qui ne l’empêcha pas d’être la femme la plus raisonnable de son siècle.
Mais l’homme qui écrit par besoin, pour défendre ce qu’il croit ou ce qu’il aime, pour réaliser un idéal d’art, ou même pour satisfaire son ambition, son égoïsme ou ses vices, ne songe qu’à parler juste, et qu’à trouver les mots qui rendent sa pensée et l’approchent de son but : celui-là est aussi éloigné de concerter ses figures que l’homme du peuple, qui, en jurant, ne pense guère à faire une imprécation. […] En second lieu, des termes simples, exacts, nus, peuvent former un style expressif et plein, par la précision même et la netteté du sens qui résulte de leur juste emploi, quand ils sont maniés par un homme qui pense et qui sait les employer à faire penser.
Que penser de l’audace Philosophique, qui a osé lui attribuer l’assemblage de tous ses délires, en essayant de le faire passer pour l’Auteur du Systême de la Nature ? […] Que penser du sang-froid de ces judicieux Observateurs, qui se vantent de remonter à la source des choses, & ne s’apperçoivent pas qu’ils la troublent, l’empoisonnent, & n’en font découler que des torrens d’erreurs, de vices & de crimes ? […] Pour tout dire en deux mots, qu’on compare les fruits qu’a produits dans tous les Etats une Philosophie raisonneuse, turbulente & destructive, principe de leur altération, de leur dépérissement, & de leur chute, avec les avantages qu’ils doivent à la Religion, qui les a tirés du chaos, les a rendus florissans, les maintient ; & l’on saura que penser des déclamations de tant d’Ecrivains, qui n’ont pas rougi de dissimuler ses bienfaits, de lui imputer des crimes qu’elle condamne, & de lui reprocher des désordres, dont elle a bien pu être le prétexte, mais qui ont cessé aussi-tôt qu’on en est revenu à son esprit & à ses vrais sentimens.
Autrefois il y avait des maîtres dans les arts, et on ne pensait pas se faire tort, quand on avait vingt-deux ans, en imitant et en étudiant les maîtres. […] Mais s’inspirer d’un maître est une action non seulement permise, mais louable, et je ne suis pas de ceux qui font un reproche à notre grand peintre Ingres de penser à Raphaël, comme Raphaël pensait à la Vierge.
Ainsi le public n’a point de tort de penser que le general, dont presque toutes les campagnes sont heureuses, est un grand homme de guerre, quoiqu’un general puisse avoir un évenement heureux sans mérite, comme il peut perdre une bataille ou lever un siege sans être mauvais capitaine. […] Je ne pense pas que ce fut un si grand bonheur pour les peintres et pour les poëtes de n’être jugez que par leurs pairs. […] Notre siecle est trop éclairé, et, si l’on veut, trop philosophe pour lui faire croire qu’il lui faille apprendre des critiques ce qu’il doit penser d’un ouvrage composé pour toucher, quand on peut lire cet ouvrage, et quand le monde est rempli de gens qui l’ont lû.
Et penser qu’il y a des mères qui sont si tranquilles ! […] Vous pensez cela, mon oncle ? […] Nous ne pensions guère à toi le jour où nous t’avons conçue ! […] Alors il me dit : « Ce n’est rien… Que pensez-vous de cette maladie ? […] » — « Je le pensais, M.
Sa personne me faisait penser à un mot qu’on me disait l’autre jour. […] — « Qu’en pensez-vous ? […] Qu’est-ce que vous pensez maintenant de toutes ces réformes ? […] Être poète, ça suffit bien, je pense. […] Voulez-vous que je vous dise nettement ce que j’en pense ?
Racan dit qu’une des raisons de cet éloignement fut que son père s’était fait de la religion réformée ; mais ce changement de religion n’est nullement avéré, et l’on a pensé qu’il y avait en ceci quelque méprise. […] Cependant ces grands conseillers pensaient avoir bien rencontré quand ils avaient dit que c’était assez gagner que de gagner temps. […] On pensera peut-être que je craigne les antagonistes ; non fais. […] Une pièce digne d’Horace, y pense-t-on bien ? […] Ainsi dans une lettre à Peirese, 19 décembre 1626 : « Monseigneur le Cardinal m’a promis toutes sortes de faveurs ; vous pouvez penser si j’en dois espérer bonne issue.
Il y a, comme nous l’avons montré, une corrélation intime entre la faculté de concevoir un milieu homogène, tel que l’espace, et celle de penser par idées générales. […] Mais nous établirons d’abord une distinction entre ceux qui pensent que la connaissance des antécédents permettrait de formuler une conclusion probable, et ceux qui parlent d’une prévision infaillible. […] Nous voici donc obligés de modifier profondément l’idée que nous nous faisions de Paul : ce n’est pas, comme nous l’avions pensé d’abord, un spectateur dont le regard plonge dans l’avenir, mais un acteur, qui joue par avance le rôle de Pierre. […] Le mouvement dont on parle ici n’est donc pas un mouvement qui se produit, mais un mouvement que l’on pense ; c’est un rapport entre des rapports. […] Le principe d’identité est la loi absolue de notre conscience ; il affirme que ce qui est pensé est pensé au moment où on le pense ; et ce qui fait l’absolue nécessité de ce principe, c’est qu’il ne lie pas l’avenir au présent, mais seulement le présent au présent : il exprime la confiance inébranlable que la conscience se sent en elle-même, tant que, fidèle à son rôle, elle se borne à constater l’état actuel apparent de l’âme.
Par optimisme, vous pensez bien que je n’entends pas parler d’une conception philosophique ; non. […] Nous sommes aujourd’hui de l’avis justement opposé : nous pensons que la nature n’est pas insensible, qu’elle n’est pas indifférente ; nous le pensons, nous faisons mieux que de le penser : cette opinion est devenue chez nous une sorte d’instinct. […] Mais il aime les lieux communs : il pense, il sent, il s’indigne en commun. […] Victor Hugo a le don de penser en images ; mais il ne se contente pas de penser en images : ces images, il les multiplie, il les renforce par ses procédés de développement, si vous voulez, par sa rhétorique. […] Alfred de Musset pense que dans la vie il n’y a que l’amour.
On peut ne nous en montrer qu’une, pourvu qu’on soit sûr que nous pensons à l’autre. […] On pensera aussitôt au quiproquo. […] Pensez à la captivité de Bonivard dans le château de Chillon : voilà une première série de faits. […] Au sens le plus large du mot, il semble qu’on appelle esprit une certaine manière dramatique de penser. […] Et le mot est si souvent employé ainsi que nous ne pensons plus, en l’entendant, à la relation concrète et matérielle qu’une parenté implique.
Non pas que je pense discuter l’idée même du concours. […] Je ne le crois pas, et je pense qu’eux non plus. […] Il faudrait alors penser qu’avec lui s’est arrêtée la Vie. […] Mais cette évolution est-elle aussi lente que le pense M. […] J’ai pensé que la note était de cette année, et mon erreur, sans grande importance d’ailleurs, est compréhensible.
Nous n’ignorons pas que les Philosophes & leurs partisans en pensent ou en parlent bien différemment ; mais nous nous faisons gloire de manifester ce que nous pensons du mérite des Auteurs, & nous invitons celui-ci à ne point se laisser aveugler sur les qualités qui lui manquent, par les applaudissemens des Sectateurs d’une Morale ennemie de celle qu’il prêche : leur suffrage n’est propre qu’à humilier l’Orateur Evangélique & Chrétien.
ne vous flattez pas, il pourrait vous surprendre… C’est cette surprise, surprise heureuse et douce, qu’on éprouve en lisant les poètes qui ont à la fois pensé et senti. […] D’autres pièces, empruntées à la légende ou à l’histoire, sont vraiment et franchement impassibles, mais nous pensons que ce genre de poésie savante, qui peut intéresser les amateurs et les érudits (ceux qui connaissent l’orthographe de Qaïn), n’exercera jamais sur une société l’influence que doit exercer la grande poésie. […] Richepin s’érige lui-même en profond philosophe et, s’adressant avec dédain au « bourgeois » : Ici tes bons gros sous seraient mal dépensés, Ici tu trouveras de sévères pensers Qui doivent être lus ainsi qu’un théorème. […] Non, tout n’est pas pour le mieux dans ce monde, mais tout n’y est pas non plus pour le pis, tout n’y est pas méprisable, et le « paquet de chair qui passe » n’en a pas moins pensé, senti, aimé. […] Que penser ?
On peut penser que je dormis peu cette nuit-là. […] J’ai pensé à vous. […] Duchesnois », interrompit Talma d’un ton de modération grandiose et humaine, « tu ne penses pas, tu ne penses pas ce que tu dis là. […] Tenez », ajouta-t-il, « que pensez-vous de cet accent ? […] Pensez-vous être saint et juste impunément ?
Blyth sur les habitudes, la voix, la constitution, etc., du Zébu de l’Inde, il est probable qu’il descend d’un autre type originel que nos Bœufs européens ; et plusieurs juges compétents pensent que ceux-ci ne proviennent même pas d’un type sauvage unique. […] Quant aux Chevaux, par des raisons qu’il serait trop long d’exposer ici, je suis incliné à croire, mais non sans quelque doute, et contrairement à ce que pensent plusieurs auteurs, que toutes nos races descendent d’une même souche sauvage. […] Blyth, dont la science profonde et variée me fait évaluer l’opinion très haut, pense que toutes nos races volatiles proviennent du Coq d’Inde commun (Gallus bankiva). […] Qu’on ne pense pas cependant qu’une déviation de structure ait besoin d’être très apparente pour attirer l’attention d’un amateur. […] Il n’est pas probable que la variabilité soit en quelque sorte inhérente à l’organisation, ni une de ces conséquences nécessaires, sous quelques circonstances que ce soit, ainsi que quelques auteurs l’ont pensé.
Je ne le pense pas. […] Il pense naturellement comme la masse des spectateurs. […] Que pense-t-il des rapports de l’homme et de la femme ? […] — Mais, fils ingrat, pensez-y donc ! […] Des rues étroites du Marais font penser à l’antique Heidelberg.
Ils ont été pensés et sentis par-dedans, comme pensait et sentait Mérimée. […] Pensez-en ce que vous voudrez. […] Je pense combien Goethe l’en eût aimé. […] Y avez-vous pensé ? […] Ils ne pensent même plus qu’ils sont des héros.
J’aime à croire que non, car le fond de mon opinion est le même ; mais j’aime tout ce qui est de l’homme quand l’homme est distingué et supérieur ; je me laisse et me laisserai toujours prendre à la curiosité de la vie, et à ce chef-d’œuvre de la vie, — un grand et puissant esprit ; avant de la juger, je ne pense qu’à la comprendre et qu’à en jouir quand je suis en présence d’une haute et brillante personnalité. […] Seul, sans mission réelle, jeté avec ce titre de ministre à l’extrême Nord par une royauté qui s’est réfugiée à Cagliari et qui se soucie très peu de lui, n’en recevant ni instructions ni directions, et à peine quelque traitement, n’ayant pas toujours de quoi prendre une voiture, n’ayant pas même de quoi payer un secrétaire, il a su par la noblesse de son attitude, par sa dignité naturelle, par sa probité parfaite, par l’éclat et les lumières de sa parole sitôt qu’il se montre, se faire estimer, considérer au plus haut point, pénétrer dans l’intimité des premiers personnages de l’empire, y compris l’empereur lui-même qui le goûte, qui l’écoute, qui lui demande des mémoires et des notes, et qui certainement a dû penser un moment à se l’acquérir. […] il pense, il fermente, il s’exalte, il prend feu, il amasse des mondes d’idées, le projets, des vues, des conceptions de toutes sortes sur les événements, sur les hommes et les choses ; et quand il lui vient un interlocuteur ou un écouteur, il déborde, il lance ses feux et ses flammes, ou quand il prend la plume, il se répand. […] Si c’est un mal, il fallait y penser plus tôt. […] C’est ainsi qu’il pense en tous sens, même en avant, et de droite et de gauche, surtout de haut ; au risque de tirer parfois sur ses propres troupes.
pourquoi, en présence des collègues ou des rivaux politiques tout occupés de l’intérêt ou du péril du moment, ne s’être pas dit : Je pense, moi, à l’avenir, au lendemain ; je le conjure, je le prépare ; je viens de temps en temps à la tribune donner mon coup de main à la politique générale, mais mon principal souci est ailleurs, et je serai content de ma part d’action si je puis être le grand maître perpétuel, non seulement de l’Université, mais des jeunes générations survenantes ? […] Guizot ; on s’est trompé, je n’y pensais pas. » Mais il fallait y penser : dans un gouvernement constitutionnel ce n’est pas là un élément indifférent, et dont il convienne à un ministre qui aspire à être dirigeant de ne tenir aucun compte. […] Il n’y a que les gens qui pensent comme Garnier-Pagès qui aient pu vouloir et soutenir cette Coalition si compromettante pour la couronne… » Je ne sais si M. […] Guizot, comme on le répétait chaque fois, s’était surpassé, un des fidèles de sa majorité me disait avec transport : « Et quand je pense, mon cher ami, que tout cela c’est de l’histoire !
Le matin, à peine éveillée, elle oubliait de se chausser, et étudiait au saut du lit ; elle y prit même une pleurésie qui pensa l’emporter. […] » Quand on pense au résultat final et suprême, chaque mot porte dans ce jugement : l’insensé et l’imprudent ! […] Pendant ce temps-là, le grand-duc, « qui est discret comme un coup de canon », parle au premier venu de tout ce qui lui traverse l’esprit, non pas de ce qu’il pense (car il ne pense pas), mais de tout ce qu’on lui dit et qu’il répète. […] A dire la vérité, je ne me suis jamais crue extrêmement belle, mais je plaisais, et je pense que cela était mon fort.
Il y a des amis auxquels on ne pensait plus, et qu’on se remet ainsi subitement à aimer contre d’autres. […] Sandeau dans le livre, c’est lui, M. de Pontmartin, qui le pense et qui le lui souffle : outre qu’il n’est pas flatteur d’être pris ainsi pour chaperon d’abord, puis pour un simple prête-nom, cela est de soi si peu clair, qu’à un endroit M. […] — « Non, dit le comte après y avoir pensé un moment, je ne trahirai jamais les gens avec qui j’ai dîné. » M. de Pontmartin n’a pas même cette excuse d’être ruiné, puisqu’il a, bon an mal an, il nous le répète assez, de douze à quinze mille livres de revenu et une superbe allée de marronniers. […] Cela me fait sourire de penser que M. de Pontmartin a eu sa chute, toute proportion gardée, comme Lamennais, comme Chateaubriand, quand ce grand transfuge renia ses dieux. […] Le prix extrême que j’attache à votre suffrage vous prouvera mieux que toutes les phrases ce que je pense de vous, etc. » Mais apparemment, le spirituel écrivain qu’on caressait de la sorte et qu’on espérait amadouer, ne répondit pas à l’appel ou n’y répondit que par quelques coups de plume sincères : inde iræ.
Nous avons pensé qu’il pouvait être intéressant de demander à quelques libres écrivains ce qu’ils pensaient de l’Académie, et nous leur avons posé les trois questions suivantes : 1º À votre avis, l’Académie française est-elle ou non en décadence ? 2º Pensez-vous qu’aujourd’hui elle accueillerait un Gustave Flaubert ou un Charles Baudelaire ? […] 2º Je pense que l’Académie accueillerait Flaubert et Baudelaire, mais cela n’aurait d’importance ni pour l’un ni pour l’autre. […] « Il y a un esprit artiste, un esprit libre que l’Académie ne saurait admettre sans se placer en contradiction avec elle-même » pense Eugène Montfort.
Aristote a précédé Théophraste, lequel est né de ce grand maître en l’art de penser sur toutes choses fortement et à fond ; Montaigne est l’aîné de La Rochefoucauld de près d’un siècle et demi. […] Ne dites pas : C’est beau de langage, mais c’est faux de pensée : ce sont là de vaines paroles ; les grands écrivains se trouveraient fort peu dédommagés du reproche d’avoir mal pensé par la louange d’avoir bien dit. […] Ceux qui ont le privilège d’écrire en perfection ne sont pas des aventuriers qui pensent au hasard. […] « Ce que contiennent les Maximes, dit-il, n’est autre chose que l’abrégé d’une morale conforme aux pensées de plusieurs Pères de l’Église, et l’auteur a pensé qu’il lui était permis de parler de l’homme comme les Pères en ont parlé. » Et il ajoute : « L’auteur de ces réflexions n’a considéré les hommes que dans cet état déplorable de la nature corrompue par le péché. » Il n’y a pas, en effet, dans les Maximes, un soupçon ni une insinuation contre la nature humaine qu’on ne trouve non seulement dans les Pères, mais dans les grands prédicateurs du temps. […] Mais les Pensées de Pascal n’ont pas fait tort au livre des Maximes, et ces deux grands exemples de l’art de penser et d’écrire ont formé La Bruyère.
Il n’est pas téméraire, semble-t-il, de penser que plus d’un de ces morts volontaires que l’on invoque a pour cause une suggestion de la coutume, qui, déplaçant le centre de gravité de l’individu, le contraint à se concevoir très différent de ce qu’il est : il sacrifie alors, de la façon la plus tragique, à cette fausse conception de soi-même sa propre personne et son instinct de conservation le plus fort. […] Aussi, loin qu’il faille craindre pour lui un détournement de cette force dominatrice, peut-être faut-il penser que s’exagérant et agissant sans trêve, elle risquerait de le briser. Peut-être faut-il penser que les fausses vocations, où il prend le change sur lui-même, sont un dérivatif et qu’appliquant son énergie à des tâches moins dispendieuses, elles procurent à celle-ci une détente favorable. […] Son souci est de ne point penser selon les modes ordinaires car il ignore que les hommes ne diffèrent pas entre eux par leurs opinions qui sont marchandises communes, mais par les raisons, selon qu’elles sont superficielles ou profondes, ’grossières ou délicates, qui les persuadent de ces opinions. Il va donc tenir pour suspectes les manières de penser les plus générales.
Sans avoir jamais su l’allemand, il pense et écrit en philosophie comme un Allemand. […] Tous deux pensaient qu’il devait y avoir un terme moyen entre la chose en soi, inaccessible à l’expérience, et le phénomène, additionné et juxtaposé dans le temps et dans l’espace ; tous deux s’entendirent encore en cherchant dans le sujet pensant ce terme moyen, cette racine d’une métaphysique nouvelle. […] Je ne peux pas plus percevoir intérieurement la chose extérieure que je ne puis penser la pensée d’un autre. […] Si nous passons maintenant à l’être qui se connaît lui-même, on peut se demander d’abord s’il existe un tel être ; mais la réponse est donnée dans la question même, car celui qui demande cela sait bien qu’il le demande, il sait donc qu’il pense, il sait donc qu’il est. […] Le moi qui pense est-il de roc et d’argile selon l’expression de Descartes ?
Mme George Sand prend, les uns après les autres, la plus grande partie de ses romans et sur tous elle écrit, quelquefois avec une brièveté d’oracle, ce qu’il faut penser littérairement ou moralement (moralement surtout !) […] L’opinion a pensé toujours tout le contraire de ce que Mme Sand nous apprend sur sa pauvre petite âme, ignorante, involontaire, enfantine, et voilà pourquoi elle essaye aujourd’hui de l’éclairer, cette opinion, en se confessant ! […] Théophile Gauthier, qui était un grammairien, ce qu’il pensait de la grammaire de Mme Sand ? […] Je n’ai point à reprocher de prudhommisme d’idées à Mme Sand qui n’a point d’idées ou du moins très peu ; qui, quand elle en a, ne les a point bêtes, mais fausses plutôt… D’ailleurs, Mme Sand, dont on a fait une femme de génie, personne n’a jamais pensé à en faire une femme d’esprit. […] Elle n’est, si vous Técoatez, qu’une aimable rêveuse, vierge de tout ce qu’on lui reproche ; qui a commencé par pondre, sans rime ni raison, des romans pour ces vilains hommes, et qui berquinant sur le tard de la vie, pond pour ses enfants des comédies que ces vilains hommes incorrigibles trouvent charmantes ] Elle n’a jamais pensé qu’à l’Art et au plaisir de faire des contes, et ce n’en est pas un qu’elle nous fait là !
Tous ont pensé sincèrement que M. […] Vous pensez si les gendelettres — ah ! […] — Vous pensiez déjà à l’Académie ? […] … C’est à quoi vous pensiez, je suis sûr ? […] plus prochain que vous ne pensez… Grand Inquisiteur de France !
Il a pensé avec des images plus qu’avec des idées, avec des mots plus qu’avec des phrases. […] La logique usuelle figurait à Mallarmé la banalité, le prévu, le fait d’être pensé au lieu de penser. […] Il ne s’agit pas de convaincre autrui, mais de penser, de faire éprouver à autrui que l’On a pensé, et de l’inviter à penser. […] Ce qui me paraît signifier que, bien qu’admirable créateur d’images, il ne pensait pas par images. […] Bergson, développant que, contrairement à une théorie très commune, ce n’est pas par images que l’on pense profondément.
Je ne puis y penser sans attendrissement. […] « C’est le sort qui m’a conduit », pensa-t-il. […] pensait-il. […] Il avait vraiment cessé de penser à son bonheur, à son intérêt. […] Que pensèrent, qu’éprouvèrent-ils tous deux ?
— Et que pensez-vous, mon cher maître, de la nouvelle et libre formule poétique ? […] — Et que pensez-vous de l’irrespect envers vous et vos contemporains qu’ont montré les jeunes ? — Je pense d’abord que cet irrespect n’est pas aussi général qu’on le dit. […] Je pense qu’il faut tenir M. […] Rostand pense que l’influence « technique » du Maître de Maillane est nulle.
Quand nous lisons, et même quand nous pensons, nous n’apercevons pas sous chaque mot l’image correspondante : le mot est seul dans notre esprit, notation sèche, algébrique, et qui nous suffit parce qu’elle est familière et connue, et que nous nous sentons le pouvoir de la remplacer à chaque moment par l’image. […] Nos yeux lisent, nos oreilles écoutent : nous pensons les formes et les sons des mots ; rien ne va à l’imagination ni au cœur, et rien par conséquent n’en sortira, si nous n’insistons et ne forçons le mot à céder sa place à la sensation même de l’objet, réveillée et rafraîchie.
Il a donc pensé que si l’on plaçait le mouvement de l’Ode dans les idées plutôt que dans les mots, si de plus on en asseyait la composition sur une idée fondamentale quelconque qui fût appropriée au sujet, et dont le développement s’appuyât dans toutes ses parties sur le développement de l’événement qu’elle raconterait, en substituant aux couleurs usées et fausses de la mythologie païenne les couleurs neuves et vraies de la théogonie chrétienne, on pourrait jeter dans l’Ode quelque chose de l’intérêt du drame, et lui faire parler en outre ce langage austère, consolant et religieux, dont a besoin une vieille société qui sort, encore toute chancelante, des saturnales de l’athéisme et de l’anarchie. […] Nous arrêterons ici ces observations préliminaires qui exigeraient un volume de développements, et auxquelles on ne fera peut-être pas attention ; mais il faut toujours parler comme si l’on devait être entendu, écrire comme si l’on devait être lu, et penser comme si l’on devait être médité.
J’avais d’abord pensé avec eux et dirigé mes travaux vers la poésie. […] Je ne le pense pas. […] Ce morceau fait penser aux toiles historiques de MM. […] À quoi pensait-il ? […] Je ne puis guérir, il n’y a plus à y penser.
Aussi certes, aux actions présentes, c’est le prince du monde qui a fait le moins de fautes, que je pense. De joindre une longue délibération avec un fait pressé, cela lui est malaisé, et c’est pourquoi, au contraire, aux effets de la guerre il est admirable, parce que le faire et le délibérer se rencontrent en un même temps, et qu’à l’un et à l’autre il apporte toute la présence de son jugement ; mais aux conseils qui ont trait de temps, à la vérité il a besoin d’être soulagé… Il a cela néanmoins qui doit fort contenter ses conseillers : c’est qu’encore qu’il n’ait nullement pensé ni été disposé à une affaire, si ses serviteurs, après l’avoir bien ruminée et bien digérée, la lui viennent représenter, il est si prompt à toucher au point et à y remarquer ce qu’on peut y avoir ou trop ou trop peu mis, qu’on jugerait qu’il y était déjà tout préparé. […] Car là, encore qu’il tâte tous ses capitaines l’un après l’autre, il est bien aise néanmoins que l’on pense que son opinion est des bonnes. Mais en toutes les autres choses, aux affaires de la justice, aux affaires des finances, aux négociations étrangères, aux dépêches, à la police de l’État, reconnaissant bien que ce n’est pas là où en ce temps il s’applique tout, il croit entièrement ceux des siens qu’il voit s’y être occupés et y avoir bien pensé… Henri IV ne sera pas toujours ainsi ; mais à cette heure il laisse encore beaucoup faire et s’en remet de bien des choses d’État à ses serviteurs, notamment à du Plessis ; il est capitaine avant tout et ne se pique d’honneur que dans cette partie. […] Le mal ne va jamais plus outre, on n’en est point pis pour cela ; je parle de ceux qui ont cet honneur de pouvoir et devoir parler à lui… Quoi que ce soit, il sera loisible aux gens de bien, sous ce roi-ci, de penser librement ce qu’ils voudront, et de dire librement ce qu’ils auront pensé.
Ils ont peur de Wagner, parce qu’ils pensent que le jour où la fanfare de l’Épée aura jailli de nos orchestres, où toute une salle aura frémi d’admiration au cantique énamouré d’Iseult, quelques-uns de leurs produits deviendront peut-être d’un placement plus difficile. […] — Mon art, c’est ma prière : et, croyez-moi, nul véritable artiste ne chante que ce qu’il croit, ne parle que de ce qu’il aime, n’écrit que ce qu’il pense ; car ceux-là, qui mentent, se trahissent, en leur œuvre dès lors stérile et de peu de valeur, nul ne pouvant accomplir œuvre d’Art-véritable sans désintéressement, sans sincérité. […] Tel fut le sens exact de la réponse que me fît, ce soir là, Richard Wagner — et je ne pense pas que Madame Cosima Wagner, qui se trouvait présente, l’ait oublié. […] Et ce monde que je n’ai jamais aimé fait que je me retire toujours plus en moi-même et dans le petit centre de ceux qui pensent comme moi, par la façon dont il juge cette amitié. […] Vous pensez en tremblant à l’influence de Wagner sur moi et plus encore à l’effet que me produisait la fin de notre amitié.
Peut-être n’est-il pas aussi éloigné de penser à son salut que sa cour le croit. […] Cette lettre disait entre autres choses : « Le roi commence à penser sérieusement à son salut et à celui de ses sujets. […] On voit que madame de Maintenon n’y était pour rien : c’est ce que pensaient le duc de Saint-Simon et Voltaire ; l’un, détracteur impitoyable de cette femme illustre, l’autre, ennemi juré de toute persécution, ardent ennemi du fanatisme religieux. […] Laissons aux âmes communes (et madame de Montespan était du nombre, malgré la distinction de son esprit la satisfaction de penser, ou de le dire, que madame de Maintenon mit en œuvre tous les manèges de la coquetterie pour se faire aimer du roi, et elle qui, pouvant devenir sa maîtresse, le ramène à ses devoirs de mari. […] Enfin elle avait encore tant de charmes que tout le monde pensa qu’il était impossible que le roi la vit si souvent et dans une telle intimité sans en être passionnément amoureux.
Turgot ne s’en tient pas, en fait de morale, à une pure impression mobile de sensibilité physique, il a des principes plus fixes : « Je suis en morale, dit-il d’une manière charmante, grand ennemi de l’indifférence et grand ami de l’indulgence, dont j’ai souvent autant besoin qu’un autre. » Condorcet, dans son besoin d’activité et de propagation extérieure, paraît croire qu’on ne peut éviter certains vices peu dangereux sans risquer de perdre de plus grandes vertus : « En général, les gens scrupuleux, pense-t-il, ne sont pas propres aux grandes choses. » Turgot ici l’arrête tout court ; il semble deviner l’homme de parti et de propagande qui perce déjà, et il lui dit : « La morale roule encore plus sur les devoirs que sur les vertus actives… Tous les devoirs sont d’accord entre eux. […] Voltaire lui avait dit encore, en lui pronostiquant le plus bel avenir pour la philosophie : « Laissez faire, il est impossible d’empêcher de penser ; et plus on pensera, moins les hommes seront malheureux. […] Quelques patriotes pensent, il est vrai, qu’il importe de laisser l’esprit public développer toute son énergie… ; qu’il n’est pas temps encore de douter du pouvoir de la raison. » Dans ses attaques contre les ministres, il en est qu’il excepte avec un soin particulier et qu’il ménage, notamment M. de Narbonne. […] Joubert, mais il a l’air de ne les dire qu’après y avoir bien pensé. » Ce cachet de réfléchi dans le commun (littéralement parlant) est ce qui le distingue. […] Il est possible que cela ne les convainque pas encore : permis à elles de croire que Condorcet écrivait et signait ce qu’il ne pensait pas.
Mme Du Deffand, juge si sévère et si redoutable, et qui se lia plus tard avec les Necker, goûtait fort le mari et reconnaissait à la femme de l’esprit et du mérite ; elle disait de lui pourtant qu’au milieu de toutes ses qualités il lui en manquait une, et celle qui rend le plus agréable, « une certaine facilité qui donne, pour ainsi dire, de l’esprit à ceux avec qui l’on cause ; il n’aide point à développer ce que l’on pense, et l’on est plus bête avec lui qu’on ne l’est tout seul ou avec d’autres ». […] Dans une lettre où elle s’excuse de ne pouvoir leur présenter deux jeunes Zurichois, elle nous les montre ne pouvant se contraindre dans leurs propos, travaillant le matin dans leur cabinet, puis causant tout le reste du jour : Le matin est consacré à l’étude, et ils ont une si grande liberté de penser, qu’ils ne peuvent se résoudre à rencontrer un visage inconnu dans les maisons qu’ils fréquentent ; car qui dit liberté de penser, sous-entend un désir violent de parler ; j’en vois quelques-uns, et heureusement leurs mœurs, qui sont très honnêtes, corrigent l’impression de leurs principes, sans quoi il vaudrait mieux renoncer à ce genre de société. […] L’avenir et Vivre dans autrui, voilà celles que je voudrais adopter. » Elle a pensé de bonne heure au déclin de la vie et au moment où les charmes extérieurs se flétrissent. […] Aussi vive et aussi impétueuse que sa mère était contenue et prudente, s’agitant à tous les souffles du siècle, et possédée d’un génie qui allait s’aventurer dans bien des voies, elle étonnait, elle inquiétait cette mère si sage, et elle lui suggérait cette pensée involontaire : « Les enfants nous savent ordinairement peu de gré de nos sollicitudes : ce sont de jeunes branches qui s’impatientent contre la tige qui les enchaîne, sans penser qu’elles se flétriraient si elles en étaient détachées. » M. […] Forte de son exemple, des vertus et de la religion de toute sa vie, elle vient plaider pour l’indissolubilité du mariage ; elle ne conçoit pas qu’on livre ainsi une institution fondamentale à la merci des caprices humains et des attraits : Car le premier attrait de la jeunesse n’est, dit-elle, qu’un premier lien qui soutient deux plantes nouvellement rapprochées jusqu’à ce qu’ayant pris racine l’une à côté de l’autre, elles ne vivent plus que de la même substance. — Dans l’âge mûr, pense-t-elle délicatement, la femme qui doit plaire le plus est celle qui nous a consacré sa jeunesse.
Nous ne le considérons différemment que parce que nous avons pensé que la critique pourrait rentrer en lutte avec la réclame déguisée — et nous avons tort. […] L’intérêt de l’homme qui pense peut être d’avoir beaucoup d’or, mais l’intérêt de la pensée est de se rattacher à une patrie libre, telle que la peut seule maintenir l’héréditaire vertu du sang. […] Quand donc, l’homme qui pense aura sacrifié les commodités et les plaisirs qu’il pourrait acheter à la passion de l’ordre et de la patrie, non seulement il aura bien mérité de ses dieux, mais il sera honoré devant les autres hommes, il aura relevé son titre et sa condition. […] Ernest-Charles manie une ironie terrible et il est difficile de penser qu’il la manie sans méchanceté. […] Ils sont socialistes mais pensent-ils qu’il y ait dans la cité future une place pour les écrivains souvent précieux, toujours élégants, parfois compliqués qu’ils ont voulu être ?
Penser autrement, ce serait ressembler à ce mathématicien sévère, qui après avoir lu la scène admirable du délire de Phèdre, demandait froidement, qu’est-ce que cela prouve ? […] L’homme de génie ne doit craindre de tomber dans un style faible et négligé, que lorsqu’il n’est point soutenu par sa matière ; c’est alors qu’il doit songer à l’élocution et s’en occuper ; dès qu’il aura de grandes choses à dire, son élocution sera telle qu’elle doit être sans qu’il y pense. […] Comme dans la musique l’agrément de la mélodie vient non seulement du rapport des sons, mais de celui que les phrases de chant doivent avoir entre elles, de même l’harmonie oratoire (plus analogue qu’on ne pense à l’harmonie musicale) consiste à ne pas mettre trop d’inégalité entre les membres d’une même phrase, et surtout à ne pas faire ses derniers membres trop courts par rapport aux premiers ; à éviter également les périodes trop longues, et les phrases trop étranglées et pour ainsi dire à demi closes ; le style qui fait perdre haleine, et celui qui oblige à chaque instant de la reprendre, et qui ressemble à une sorte de marqueterie ; à savoir enfin entremêler les périodes arrondies et soutenues, avec d’autres qui le soient moins, et qui servent comme de repos à l’oreille. […] L’orateur, l’historien et le philosophe (car on peut réduire tous les écrivains à ces trois genres) diffèrent principalement entre eux par la nature des sujets qu’ils traitent ; et c’est la différence dans les sujets qui doit en mettre dans leur style : l’historien doit penser et peindre, le philosophe sentir et penser, l’orateur penser, peindre, et sentir.
Il est prêtre un jour, non sans s’être « senti agité d’une terreur secrète, d’un regret indéterminé et immense94 », mais « espérant qu’il suffisait de vouloir pour ne pas penser. » Bientôt la crise s’annonce : la sourde et d’abord vague conscience du mensonge où il git, commence à poindre en lui. […] La lumière pénétrait Paul Allain, l’échauffait, le refaisait l’être franc et simple, aux pieds fermes dans le sol où il puise sa sève, en communion avec tout ce qui végète et fleurit et rayonne, avec tout ce qui pense et rêve, avec tout ce qui, dans le pullulant infini des mondes, vit sa divine vie naturelle. » La lumière va bientôt surgir pour le désespéré, après les tortures, les luttes et les prostrations. […] Le futur prêtre doit être avant tout un dé-cérébré : avoir un cerveau, c’est posséder le moyen de penser, et penser c’est vouloir vivre. […] On l’a châtré de toute énergie, de tout désir, de toute initiative, de toute volonté, de toute pensée ; on lui a enseigné que l’obéissance était la vertu suprême, et la pensée libre le vice suprême ; on a fait de lui une machine, un organisme muet et soumis, dont la raison d’être est de ne pas penser pour croire. […] Ne penses-tu pas que ce rôle de courtier du mensonge que l’on veut te faire remplir, va te diminuer à tes propres yeux ?
quelle horreur seulement d’y penser ! […] » Il ne pense nullement que ce soit lui. […] Les vrais traducteurs de l’allemand en français ne seront donc pas des Allemands qui pensent en allemand, mais des Français qui pensent en français. […] Celui qui avait pensé devenir un Saint-Preux fait une cure d’anti-romantisme. […] Écrire est un acte, implique une technique de l’exposition, mais penser n’est pas un acte, n’implique aucune technique : la logique, l’« art de penser » permet de reconnaître, une fois qu’ils sont faits, les raisonnements faux ; elle ne permet pas de faire des raisonnements justes, car on ne pense pas en, vertu d’un art.
vous avez pensé à cette misère ? […] Un autre s’en est occupé aussi, il en pense quelque chose, il en écrira ? […] Je ris encore en pensant que j’ai passé, il y a quelque temps, deux heures avec vous sans vous rien dire de votre bel article sur Racine, et je venais d’en parler toute la matinée à quatre personnes de différentes opinions, à qui je disais ce que j’en pense.
Il eût pu, à la vérité, emprunter d’autres couleurs sur la même palette, et jeter ici quelques bonnes pages bien philanthropiques, dans lesquelles — en côtoyant toutefois avec prudence un banc dangereux, caché sous les mers de la philosophie, qu’on nomme le banc du tribunal correctionnel — il eût avancé quelques-unes de ces vérités découvertes par nos sages pour la gloire de l’homme et la consolation du mourant ; savoir : que l’homme n’est qu’une brute, que l’âme n’est qu’un peu de gaz plus ou moins dense, et que Dieu n’est rien ; mais il a pensé que ces vérités incontestables étaient déjà bien triviales et bien usées, et qu’il ajouterait à peine une goutte d’eau à ce déluge de morales raisonnables, de religions athées, de maximes, de doctrines, de principes qui nous inondent pour notre bonheur, depuis trente ans, d’une si prodigieuse façon qu’on pourrait — s’il n’y avait irrévérence — leur appliquer les vers de Regnier sur une averse : Des nuages en eau tombait un tel degoust, Que les chiens altérés pouvaient boire debout. […] On pense avec quelle indignation l’auteur a reçu cet insidieux avis. Il a instamment prié le mauvais plaisant d’apprendre que tous les journalistes, indistinctement, sont des soleils d’urbanité, de savoir et de bonne foi, et de ne pas lui faire l’injure de croire qu’il fût du nombre de ces citoyens ingrats, toujours prêts à adresser aux dictateurs du goût et du génie ce méchant vers d’un vieux poëte : Tenez-vous dans vos peaux et ne jugez personne ; que pour lui, enfin, il était loin de penser que la peau du lion ne fût pas la peau véritable de ces populaires seigneurs.
La plupart de ceux dont le métier est de penser ne se jugent nettement qu’à l’impression. […] Le fameux Vingt fois sur le métier remettez votre ouvrage semble un conseil de Boileau adressé à Balzac : il est d’une exécution facile pour un poète qui laisse un volume à la postérité ; mais qu’on pense à cette recommandation prise au pied de la lettre et appliquée aux deux ou trois cent mille pages de l’œuvre du peintre de la Comédie humaine. […] La pensée éclate en paraboles qui se projetant en tous sens, font penser à des batteries vomissant des obus et des grenades.
Il n’y a pas entre elles de liens internes qui permettent de penser les unes à l’aide et en fonction des autres. […] Mais les schèmes qu’il construit ainsi ne correspondent à rien dans le réel ; ils ne peuvent même pas être pensés en tant que tels, mais seulement à l’aide des mots. […] Puisque le monde est une pensé, la pensée, par ses seules forces, doit pouvoir le reconstruire.
En traitant de ce sujet, nous ne pouvons omettre une observation importante qui jette beaucoup de jour sur celle que nous avons faite dans la Méthode (il nous est aujourd’hui difficile de comprendre, impossible d’imaginer la manière de penser des premiers hommes qui fondèrent l’humanité païenne 80). […] Ces hommes encore stupides ne pensaient aux choses qu’ils avaient à faire, que lorsqu’ils étaient agités par les passions. […] Toutes les pensées (sentenze) devaient en conséquence être particularisées par celui qui les pensait, ou plutôt qui les sentait.
Jamais vous ne pleurerez à une tragédie, ni n’en aurez envie, je pense. […] Shakespeare y a-t-il bien pensé ? […] La forme de cette comédie élégante m’a donné beaucoup à penser sur ce que c’est que le romantisme, et le fond m’a donné beaucoup à penser sur ce que c’est que l’amour. […] Vacquerie me fait penser : il me le pardonnera. […] Mais je ne le pense pas encore.
Il est dans l’histoire intellectuelle de notre pays certains épisodes auxquels on ne peut penser sans une impression de surprise et de tristesse. […] Je ne le pense pas, et M. Flaubert, j’en suis sûr, aiguillonné par ce sentiment d’artiste qu’il est impossible de méconnaître en lui, ne le pense pas davantage. […] « Notre auteur, dit-il, passe un peu trop légèrement sur une si prodigieuse défaite, comme si c’était une bagatelle, et cependant c’est une affaire si complète et si décisive que je ne pense pas qu’on en ait vu de semblable. […] Ces traits empruntés à des écrivains que sépare un long intervalle de siècles, ces traits disséminés, sans lien, sans cohésion vivante, qui se rencontrent celui-ci chez Hérodote, celui-là chez Pline, l’un chez Sanchoniaton, l’autre chez Ammien Marcellin, pense-t-on qu’on puisse les réunir violemment sans produire autre chose qu’un monstre ?
La foule est grossière ; sa psychologie se réduit à des éléments par trop simples pour être curieux ; elle pense à peine ; elle ne rêve pas ; elle ressemble à une pierre rugueuse, que tout l’effort de l’artiste ne rendra pas agréable à l’œil. […] En regardant, aux Champs-Élysées ou au Parc Monceau, ces théories de nourrices arrivées à Paris avec une chemise et une robe, à présent superbes, béates, tout enchâssées et ruchées de broderies, comment ne pas penser à ce contraste si dangereux, et au nombre des ménages pauvres qu’il a troublés et rompus à jamais ? […] J’en connais une autre, plus vagabonde, plus paresseuse et plus lente : c’est de ne point hâter l’œuvre à venir, de n’y penser que rarement avec application, et d’y songer toujours. […] Supposez un taillis de jeunes chênes qui auraient conscience du développement graduel et de l’épanouissement de leurs bourgeons ; qui sentiraient grandir en eux la feuille, la branche, l’arbre que personne n’aperçoit, et qui penseraient : « Ah ! […] Mais une idée survient, et aussitôt le héros de roman auquel on ne pensait pas, s’écrie : « Elle est mienne, je l’exprimerai !
Nous n’oublions pas que ces « unités sociales » sont des hommes, — des êtres vivants, bien plus, des êtres pensants, — et que leurs façons d’être, de vivre et de penser, ne sauraient être indifférentes aux sociétés qu’ils composent. […] On pourrait dire qu’une seule âme les mène, tant leurs âmes particulières pensent à l’unisson. […] Il faut, pour que nous pensions à équilibrer leurs prétentions qui s’opposent, que par leurs différences mêmes les personnalités se soient posées les unes en face des autres. […] Après avoir longtemps contesté, les hommes finissent par reconnaître cette nécessité sociale et par céder à chacun sa part, plus ou moins généreusement mesurée, de liberté de penser, de croire, d’écrire, de vivre et de s’élever à sa guise. […] ou au contraire, comme le pense M.
Les poèmes de Fernand Séverin font penser aux Champs-Élysées du chevalier Glück. […] L’élégance et la pureté de la versification, la tendresse et la sincérité du fonds séduiront les intelligences distinguées de notre époque, beaucoup plus nombreuses qu’on le pense, et qui sont avides de beauté virginale et de radieuse sensibilité.