Politiquement il semble que tout ait été dit sur lui, et que le pour et le contre soient épuisés : ce côté politique me tente peu ; mais il est une manière d’étudier M. […] Mais il semble, à la manière dont il en parle, qu’il ne l’avait observé que de haut. […] Là où l’opinion supprimait l’étiquette et affectait déjà de dire qu’il n’y avait plus de rangs, le grand art et le comble de l’habileté était de les maintenir et de les observer par une gradation de manières presque imperceptible : c’est ce que M. […] Elles ont, dès leur entrée dans un salon, une manière de saluer, une manière de s’asseoir, une manière de regarder autour d’elles, qui désigne déjà leur degré de confiance, et ce qu’elles pensent de leur proportion avec les autres. […] On vit la douce et jolie duchesse de Lauzun, celle même que nous avons vue précédemment (tome IV des Causeries) si timide de manières et si effarouchée, s’attaquer dans un jardin public à un inconnu qui parlait mal de M.
La manière dont nous avons vu recevoir le poëme de la Pucelle, n’est rien en comparaison de celle dont fut accueilli le roman de la Rose. […] Des actrices de l’Opéra-comique, voyant à l’amphithéatre un mauvais poëte qui les avoit chansonnées, députèrent une d’elles pour l’inviter, par des manières engageantes, à venir dans les coulisses. […] Sorel, ayant rapporté la manière dont les femmes se vengèrent de le Meun, s’appésantit là-dessus. […] On peut s’imaginer, ajoute-t-il, que cela fut capable de les adoucir. » De quelque manière qu’on interprète la chose, il est certain que le Meun agit & fit agir tous ses amis, pour désarmer la colère des femmes. […] On baissa les ponts-levis ; &, lorsque Richelet les eut passés, on les releva, de manière qu’il fut obligé de faire cinq quarts de lieue pour gagner une maison, n’y ayant point alors de fauxbourg de ce côté-là.
De même dans la science, les plus importantes découvertes sont souvent abordées d’une manière détournée, oblique, si j’ose le dire. […] Il n’y a pas de travail qui exige un savoir plus étendu, et toutes nos sommités scientifiques, examinant les manuscrits dans le cercle le plus borné de leur compétence, suffiraient à peine à le faire d’une manière irréprochable. Et pourtant les recherches érudites seront entravées et incomplètes, jusqu’à ce que ce travail soit fait d’une manière définitive. […] En résumé, il y a deux manières d’agir sur le monde, ou par sa force individuelle, ou par le corps dont on fait partie, par l’ensemble où l’on a sa place. […] La science, comme toutes les autres faces de la vie humaine, doit être représentée de cette large manière.
Combien de traductions, semblables à des beautés régulières sans âme et sans physionomie, représentent de la même manière les ouvrages les plus disparates ? […] Dans cette dernière classe d’auteurs, plus ingrats pour la traduction que toutes les autres, les moins rebelles sont ceux dont la principale qualité est de manier élégamment leur langue ; les plus intraitables, ceux dont la manière d’écrire est à eux. […] Dans les hommes de génie, les idées naissent sans efforts, et l’expression propre à les rendre naît avec elles ; exprimer d’une manière qui nous soit propre des idées qui ne sont pas à nous, c’est presque uniquement l’ouvrage de l’art, et cet art est d’autant plus grand qu’il ne doit point se laisser voir. […] C’est presque la seule manière d’innover qui soit permise en écrivant. […] De toutes les injustices dont les traducteurs ont droit de se plaindre et dont j’ai déjà marqué plusieurs, la principale est la manière dont on a coutume de les censurer.
Où est-elle donc, cette sensation informe, cette multiplicité, cette manière indéfinie, ἄπειρον, sinon dans l’imagination de Platon et de ses modernes disciples ? […] Je suis affecté par le contraste des objets, au moment même où il se produit, d’une autre manière que par la continuation d’un même sentiment. […] Concluons que tous les faits de conscience sont sensitifs par quelque côté, même ceux qu’idéalisent le plus les Platon et les Aristote, puisque ces faits contiennent toujours des manières spéciales d’être affecté, d’être modifié, de sentir, et entraînent des manières spéciales de réagir. […] La pensée, au sens le plus large de ce mot, indique seulement l’existence d’une chose pour la conscience et dans la conscience, existence saisie telle qu’elle est, représentée d’une manière identique à sa réalité. […] Ce ne sont pas des rapports intelligibles, mais au contraire quelque chose de fondamental, d’intérieur et de vivant : d’abord la sensation, qui est la manière spéciale dont la conscience est modifiée, puis l’émotion agréable ou pénible, enfin l’appétition aperceptive et motrice, qui est la manière originale dont la conscience réagit pour imprimer sa direction propre aux mouvements organiques.
Section 11, des ouvrages convenables aux gens de génie et de ceux qui contrefont la maniere des autres Les hommes de génie qui sont jaloux de leur réputation ne devroient du moins mettre au jour que de grands ouvrages, puisqu’il ne leur a pas été possible de dérober leur apprentissage aux yeux du public. […] Comme on peut sans génie faire quatre ou cinq vers heureux, ou peindre assez bien une vierge avec l’enfant sur ses genoux sans être grand peintre, la difference du simple ouvrier et de l’artisan divin, ne se fait pas sentir dans des ouvrages si bornez, de la même maniere qu’elle se fait sentir dans des ouvrages plus composez, et qui sont susceptibles d’un plus grand nombre de beautez. […] Les faiseurs de pastiches, ce sont ces tableaux peints dans la maniere d’un grand artisan, et qu’on expose sous son nom, bien qu’il ne les ait jamais vûs, les faiseurs de pastiches, dis-je, ne sçauroient contrefaire l’ordonnance, ni le coloris, ni l’expression des grands maîtres. […] On ne sçauroit donc contrefaire le génie des grands hommes, mais on réussit quelquefois à contrefaire leur main, c’est-à-dire, leur maniere de coucher la couleur et de tirer les traits, les airs de tête qu’ils repetoient et ce qui pouvoit être de vicieux dans leur pratique.
La manière bizarre, capricieuse, cruelle, dont il défait à plaisir son illusion et la félicité de son amie, est admirablement décrite ; cela sent son amère réalité. […] Mais ceci tient à un défaut de composition et à quelque chose de successif dans la manière de faire de M. de Musset, sur quoi je reviendrai. […] Si j’ai dit et redit de tant de manières le défaut qui me semble fondamental, j’ai trop peu loué le charme fréquent, la grâce, le pittoresque ou la profondeur des détails. […] S’il n’a nulle part atteint à une élévation plus soutenue et plus énergique que dans le discours de Desgenais, il n’a nulle part non plus faussé sa manière plus évidemment que dans le chapitre ii de la première partie, où l’histoire et la métaphysique se déguisent sous un incroyable abus de métaphores. […] Ils ont remarqué chacun à leur manière cet ennui né du plaisir.
N'est-il pas aisé de s'appercevoir qu'il a employé le merveilleux partout où il a pu, qu'il l'a même outré d'une maniere ridicule ? […] M. de Voltaire a tâché de fondre dans sa maniere le caractere dominant de ces trois Poëtes ? […] La maniere de raconter, quoique piquante, ne sauroit suppléer au fond des choses, ou justifier la malignité des réflexions. […] Quant aux autres Ecrivains qui ont eu le malheur de lui déplaire ou de le contredire, il a eu la bonté de se mettre au dessous d’eux, par la maniere dont il les a traités. […] Il a traité le Public de la même maniere.
Il ne s’ensuit pas qu’il faille croire à la perfection dans l’ordre social ; mais il est utile pour les législateurs de se proposer ce but, de quelque manière qu’ils conçoivent sa route. […] En effet, le moment le plus prospère dans tous ces gouvernements est celui où cette balance, subsistant d’une manière parfaite, donne le repos qui naît de deux efforts contenus l’un par l’autre, mais cet état ne peut être durable. […] Ces hommes, séparés pendant le cours de leurs magistratures, par les exercices divers du pouvoir public, se réuniraient ensuite dans la nation, parce qu’aucun intérêt contraire ne les séparerait d’une manière invincible. […] On ferait quelque bien, je crois, en traitant d’une manière purement abstraite, des questions dont les passions contraires se sont tour à tour emparées. […] Le public aussi, dont on avait éprouvé la faveur, perd toute son indulgence ; il aime les succès qu’il prévoit, il devient l’adversaire de ceux dont il est lui-même la cause ; ce qu’il a dit, il l’attaque ; ce qu’il encourageait, il veut le détruire : cette injustice de l’opinion fait souffrir aussi de mille manières en un jour.
Il a conté à la seconde des manières que j’indiquais plus haut, un peu, pas tout le temps, mais il a conté certainement à la seconde des manières que j’ai indiquées ; dans une certaine mesure il a introduit l’élément du conte psychologique. […] C’est la vérité sentimentale prise en elle-même et non pas sous forme exagérée jusqu’à une manière de burlesque, comme dans le vers de Victor Hugo. […] Surtout je ne veux pas l’être en ce moment-ci, non, je ne le voudrais pas, parce qu’il ne faut jamais être avec la majorité ; mais je ne suis pas fâché, en passant, de vous indiquer, par un exemple curieux, une des différences capitales, une différence essentielle qu’il y a entre ces deux écoles, non seulement dans la manière de penser, mais aussi dans la manière de sentir. […] En vérité, on dirait que la postérité a voulu lui faire amende honorable le jour où Musset s’est avisé de faire, lui aussi, des contes dans la manière de La Fontaine, pour montrer à quel point il admirait cette manière, et le charme de cette manière, et aussi un peu pour la corriger, pour la redresser, car, dans ses deux contes, Musset a été très loin des excès, des véritables culpabilités de La Fontaine. Simone et Sylvia sont des contes charmants où Musset imite la manière de La Fontaine, et de la façon suivante, qui est bien la manière de Musset.
Les déterministes s’empareront de cet argument : il prouve en effet que nous subissons parfois d’une manière irrésistible l’influence d’une volonté étrangère. […] Ainsi chacun de nous a sa manière d’aimer et de haïr, et cet amour, cette haine, reflètent sa personnalité tout entière. […] Il y a plusieurs manières de se représenter l’état d’une personne à un moment donné. […] Car il y a deux manières de s’assimiler ces antécédents, l’une dynamique, l’autre statique. […] Tantôt on se représente tous les phénomènes, physiques ou psychologiques, comme durant de la même manière, comme durant à notre manière par conséquent ; l’avenir n’existera alors dans le présent que sous forme d’idée, et le passage du présent à l’avenir prendra l’aspect d’un effort, qui n’aboutit pas toujours à la réalisation de l’idée conçue.
le Beau n’a pas, à la vérité, dans le style autant d’intérêt que le célebre Recteur de l’Université ; mais il écrit en général d’une maniere plus correcte & moins diffuse. […] Sa maniere est nette, agréable, & quelquefois élégante. C’est un Ecrivain sensé qui ne court pas après les ornemens ; qui, sans rien omettre d’intéressant, écarte les détails minutieux ; qui, ne prodiguant pas les portraits, les laisse, pour ainsi dire, se former sous la plume d’eux-mêmes, & sait sur-tout les arranger, de maniere que la confusion & la surcharge sont également proscrites de la galerie des tableaux qu’il présente aux yeux de son Lecteur.
Dans ces occasions, il vaut mieux que le crime s’exécute comme dans la première manière. […] Les premiers mots du principal personnage doivent peindre son caractère, et d’une manière attachante. […] L’art consiste à déployer le caractère d’un personnage et tous ses sentiments, par la manière dont on le fait parler, et non par la manière dont ce personnage parle de lui. […] La troisième manière de faire sortir le comique, est de faire contraster le décent avec le ridicule. […] Le sujet doit être rempli d’intérêt, et disposé de la manière la plus simple et la plus intéressante.
De la manière dont ce sujet est composé, il ne peut guère y avoir que le mérite du technique ; la figure principale tourne le dos, et un dos n’a pas beaucoup d’expression ; voyez pourtant ce dos, car il en vaut la peine, et la manière dont cette figure est assise sur son coussin, la vérité des chairs et du coussin. […] Je ne dis pas que Taraval vaille mieux que Fragonard, ni Fragonard mieux que Taraval, mais celui-ci me paraît plus voisin de la manière et du mauvais style. […] Il n’a pas assez regardé les grands maîtres de l’école d’Italie ; il a rapporté de Rome le goût, la négligence et la manière de Boucher qu’il y avait portés.
Mais bien des gens trouvoient qu’il n’avoit de modeste que le propos ; que ses manières ne l’étoient point ; que l’ambition de règner sur les esprits, étoit sa passion dominante ; que, gouvernant la république d’Athènes, il croyoit devoir être également obéi dans celle des lettres. […] Il instruisoit à la fripponerie un vieux père de famille accablé de dettes & qui le consultoit sur la manière de tromper ses créanciers & les juges. […] Les Espagnols manquent de naturel & de régularité : ils ont un Gracioso, manière d’Arlequin, qui ne les fait jamais tant rire que lorsqu’il jure par des saints d’un nom inconnu & bisarre. […] Si l’on retrouve quelque part ce dernier, son enjoûment, son aimable désordre, ses bouffonneries, ses transperçans & cyniques, c’est sur le théatre de notre comédie Italienne ou sur celui de la Foire ; théâtres de tout temps en possession de relever les ridicules célèbres, de contrefaire la figure, la voix, les gestes, les manières de ceux qu’on juge devoir être l’objet de l’amusement du public. […] La manière dont Socrate se comporta dans le temps qu’on annonça les Nuées, caractérise bien ce philosophe.
De spirituels modernes, grands lyriques à leur manière, ont trouvé moyen de surprendre, de ressaisir le même succès par la chanson : Casimir Delavigne venait de ravir le sien par ses Messéniennes. […] Si quelque chose pouvait ajouter à leur éclat, c’était la manière dont il le portait : aimable, naïf, rougissant, on aurait cru voir une jeune fille plutôt qu’un des héros de la popularité. […] En tout, c’était là je ne dirai pas un spectacle touchant (il n’y avait pas spectacle), mais une touchante manière de jouir de sa gloire et de la mériter d’autant mieux, en s’y dérobant. […] Il y a plus d’une manière de bien écrire, même de bien écrire en vers. […] Je ne veux pas tracer de cette seconde manière un trop long dessin, qui pourrait paraître à quelques-uns comme un portrait de fantaisie, et où s’inscrirait pourtant plus d’un nom : elle est d’autant plus vraie d’ailleurs qu’elle n’est pas précisément une manière, un procédé général, et qu’elle se décrit moins.
La Restauration lui causa une grande joie, mais elle la concevait à sa manière, et elle dut en souffrir bientôt et violemment, comme d’un objet qui échappe et qu’on aime. […] L’usage qu’elle fait des couvents et du prêtre la différencie surtout d’une manière bien tranchée d’avec Mme de Souza ; il y a entre elles deux, comme séparation sur ce point, tout le mouvement religieux qui a produit le Génie du Christianisme et les Méditations. […] Mais on se fera idée surtout de sa manière de moraliste chrétien et de cette subtilité tendre qui va jusqu’au dernier repli d’un sentiment, par la méditation sur l’indulgence : L’INDULGENCE. […] Il y a plusieurs manières de pardonner ; toutes sont bonnes, parce que toutes sont chrétiennes ; mais ces pardons diffèrent entre eux comme les vertus qui les ont produits. […] Le monde, même quand il n’est pas odieux ni tout a fait injuste, a une manière sèche de penser et de dire que le moraliste ne doit pas absolument ignorer, bien qu’elle puisse déplaire.
On dit de même aler à cheval sur un bâton, c’est-à-dire, se mettre sur un bâton de la même manière qu’on se place à cheval. (…). […] La plume est aussi une cause instrumentale de l’ecriture, et par conséquent de la composition ; ainsi plume se dit par métonymie de la manière de former les caractères de l’écriture et de la manière de composer. […] stile signifie aussi par figure la manière d’exprimer les pensées. […] Ce poinçon s’apeloit stilus, stile : tel est le sens propre de ce mot ; dans le sens figuré, il signifie la manière d’exprimer les pensées. […] Outre toutes ces manières diférentes d’exprimer les pensées, manières qui doivent convenir aux sujets dont on parle, et que pour cela on apèle stile de convenance ; il y a encore le stile personel ; c’est la manière particulière dont chacun exprime ses pensées.
Mais de quelle manière l’anatomie est-elle utile au physiologiste ? […] Examinons chacune de ces deux manières de procéder. […] Le troisième jour, les mêmes liquides se coloraient en rouge d’une manière plus énergique. […] Avec la bile de bœuf et de lapin, les choses se passèrent de la même manière. […] Rayer pour cette affection qui lui était survenue de la manière suivante.
Mais comme en françois l’effet que les terminaisons latines produisent dans l’esprit y est excité d’une autre maniere que par les terminaisons, il ne faut pas donner à la maniere françoise les noms de la maniere latine. […] est-ce le tems, ou la maniere, ou le prix, ou l’instrument, ou la cause, &c. […] Il y a des objets dont l’aspect nous affecte de maniere que nous les appellons beaux ; ensuite considérant à part cette maniere d’affecter, séparée de tout objet, de toute autre maniere, nous l’appellons la beauté. […] En un mot Dieu comme auteur de la nature, agit d’une maniere uniforme. […] s’est exprimé de la même maniere, coetera de genere hoc adeo sunt multa.
Le style, le ton, la manière de Voltaire lui paraissent choses aimables et charmantes ; souvent elle blâmera le fond, mais il lui semble difficile de critiquer le tour, et encore plus difficile de l’imiter. […] Elle a une manière de frapper la corde et de la faire résonner que d’autres n’ont pas. […] Mme de Sablé, retirée à l’ombre de Port-Royal, ne gardait que peu de marques de cette première manière ; Mme de Longueville ne s’en guérit jamais. […] Je n’oserais dire que Mme du Châtelet ou Mme de Staal de Launay n’eussent pas gardé, en écrivant, quelque chose de la science et des études qui les occupaient chacune dans son genre et à sa manière. […] C’est le moment où l’on a cessé de causer à loisir, à demi-voix, et de s’entretenir d’une manière désintéressée ; le bruit de l’Assemblée et celui de la rue absorbaient tout.
Si j’ai péri d’une manière infamante, voilà qu’en un instant j’obtiens plus que personne n’eût osé espérer de la faveur du grand Jupiter. […] Il produisit une grande révolution dans la politique… Je n’oserai accepter tout à fait cette manière d’expliquer l’histoire moderne et d’en rapporter le principal résultat à deux ou trois noms, à deux ou trois livres. […] Il y a pourtant du vrai dans cette manière d’envisager Rabelais le franc rieur, au sortir des terreurs du Moyen Âge et du labyrinthe de la scolastique, comme ayant consolé et rassuré le genre humain. […] Nul auteur n’a été plus admiré que Rabelais, mais il l’a été de deux manières et comme par deux races, très distinctes d’esprit et de procédé. […] Parlant de la manière dont il s’acquittait de ses devoirs de curé à Meudon, et persistant dans ce mode d’explication symbolique, le nouveau biographe s’écrie : Que j’aurais voulu l’entendre !
Mais comme on a su réduire à un petit nombre de sensations l’origine de nos connaissances, on peut de même réduire les principes de nos plaisirs en matière de goût, à un petit nombre d’observations incontestables sur notre manière de sentir. […] Comme il sait que c’est la première loi du style, d’être à l’unisson du sujet, rien ne lui inspire plus de dégoût que des idées communes exprimées avec recherche, et parées du vain coloris de la versification : une prose médiocre et naturelle lui paraît préférable à la poésie qui au mérite de l’harmonie ne joint point celui des choses : c’est parce qu’il est sensible aux beautés d’image, qu’il n’en veut que de neuves et de frappantes ; encore leur préfère-t-il les beautés de sentiment, et surtout celles qui ont l’avantage d’exprimer d’une manière noble et touchante des vérités utiles aux hommes. […] Tout ce qui appartient non seulement à notre manière de concevoir, mais encore à notre manière de sentir, est le vrai domaine de la philosophie : il serait aussi déraisonnable de la reléguer dans les cieux et de la restreindre au système du monde, que de vouloir borner la poésie à ne parler que des dieux et de l’amour. […] Quel écrivain, s’il n’est pas entièrement dépourvu de talent et de goût, n’a pas remarqué que dans la chaleur de la composition, une partie de son esprit reste en quelque manière à l’écart, pour observer celle qui compose et pour lui laisser un libre cours, et qu’elle marque d’avance ce qui doit être effacé ? Le vrai philosophe se conduit à peu près de la même manière pour juger que pour composer : il s’abandonne d’abord au plaisir vif et rapide de l’impression ; mais persuadé que les vraies beautés gagnent toujours à l’examen, il revient bientôt sur ses pas, il remonte aux causes de son plaisir, il les démêle, il distingue ce qui lui a fait illusion d’avec ce qui l’a profondément frappé, et se met en état par cette analyse de porter un jugement sain de tout l’ouvrage.
Il se préoccupe de la manière d’écrire, et je lui crois une grande culture intellectuelle. […] Il ne faut jamais tromper l’imagination, car elle s’en venge toujours d’une manière cruelle. […] Armand Pommier, qui a du conteur fantastique dans sa manière, n’est pas uniquement un conteur fantastique qui veut à tout prix impressionner l’imagination par le Surnaturel et par le Mystère. […] Du moment, en effet, où, au lieu de mêler la lumière ou le phénomène physiologique aux faits humains pour en éclairer la profondeur — comme Shakespeare, par exemple, avant tout le monde, l’a osé d’une si admirable manière et avec tant de bonheur dans sa fameuse scène de lady Macbeth somnambule, — on va plus loin dans le sens de la physiologie, quand on se circonscrit et qu’on enferme son sujet tout entier dans le phénomène, il faut prendre garde, car le passage est dangereux ! […] Le Génie a de si glorieuses manières de nous surprendre et de déconcerter nos prévisions !
Le vrai curare paraît conserver son activité d’une manière indéfinie, même à l’état de solution dans l’eau. […] L’élément sensitif vit et meurt à sa manière, il a ses poisons qui lui sont propres. […] Après ce temps on peut délier le membre sans danger, parce que le poison et la mort ont pu s’enfuir d’une manière imperceptible. […] Elle n’admet pas d’autorité personnelle ; elle repousse d’une manière absolue les systèmes et les doctrines. […] Les sources de la chaleur animale sont partout et nulle part d’une manière exclusive.
Or il auroit été inutile à Quintilien de dire, (…) et de défendre à son éleve d’imiter le chant des cantiques dans les circonstances où il le lui défend, si ce chant eut été un chant veritable, suivant notre maniere de parler. Ce même auteur dit encore dans un passage que j’ai déja cité, que ceux qui joüoient les comedies ne s’éloignoient point de la nature dans leur prononciation, du moins assez pour la faire méconnoître dans leur langage, mais qu’ils relevoient par les agrémens que l’art permet, la maniere de prononcer usitée dans les entretiens ordinaires. […] Je réponds en premier lieu, qu’il n’est pas bien certain en vertu de ce passage que les choeurs chantassent une musique à notre maniere. […] Ce n’est point certainement parce que cette maniere de representer les pieces dramatiques soit mauvaise.
D’une manière générale, les penseurs français du XVIIIe siècle ont fourni les éléments de certaines théories de la nature qui devaient se constituer au siècle suivant. […] Mais la plus puissante des influences qui se soient exercées sur l’esprit humain depuis Descartes, — de quelque manière d’ailleurs qu’on la juge, — est incontestablement celle de Jean-Jacques Rousseau 18. […] Par l’appel qu’il a lancé au sentiment, à l’intuition, à la conscience profonde, il a encouragé une certaine manière de penser que l’on trouvait déjà chez Pascal (dirigée, il est vrai, dans un sens tout différent), mais qui n’avait pas encore droit de cité en philosophie. […] Mais, à sa manière, et dans un sens assez différent, il a eu, lui aussi, cette religion de l’humanité qu’avait rêvée le fondateur du positivisme. […] Il y a bien des manières, en effet, de définir le positivisme ; mais nous croyons qu’il faut y voir, avant tout, une conception anthropocentrique de l’univers.
Il est, au contraire, certain qu’il leur est possible, suivant la manière dont ils se portent sur les conditions dont dépend un fait, d’en presser ou d’en contenir le développement. […] Étant donné un même milieu, chaque individu, suivant son humeur, s’y adapte à sa manière qu’il préfère à toute autre. […] Tous ces êtres, en dernière analyse, se résolvent en éléments de même nature ; mais ces éléments sont, ici, juxtaposés, là, associés ; ici, associés d’une manière, là, d’une autre. […] Tant donc qu’on ne sort pas de l’histoire, le fait de l’association présente le même caractère que les autres et, par conséquent, s’explique de la même manière. […] Notre définition du fait, social ne faisait, d’ailleurs, que marquer d’une autre manière cette ligne de démarcation.
& d’abord, nous ne craignons pas d’assurer, que, malgré la multitude des préceptes renfermés dans le Poëme de du Fresnoy, celui de l’Abbé de Marsy lui est très-supérieur, quant à l’instruction, & quant à la maniere de la présenter. […] La maniere de concevoir & de sentir, le mouvement & l’ordre des idées, la tournure de l’expression, une certaine forme d’exister & de vivre dans ses Ouvrages, qui lui est particuliere. On reconnoîtra facilement cette maniere dans l’Auteur du Poëme de la Peinture. […] D’ailleurs cette espece de vol ne prouveroit que mieux son génie ; on ne pourroit en conclure autre chose, sinon qu’il a su se rendre propres des richesses étrangeres, par la maniere dont il les a mises en œuvre. […] Sans assujettissement, sans plagiat, à peu près comme Virgile lui-même a imité Homere, comme Malebranche a marché sur les pas de Descartes, comme Despréaux a saisi la maniere d’Horace, & Rousseau celle de Pindare.
Si l’on veut que des étudiants reçoivent dans une faculté de médecine toute l’instruction qui leur est nécessaire pour exercer l’art de guérir d’une manière utile à leurs concitoyens, il faut se rappeler que la santé publique est peut-être le plus important de tous les objets. […] Il faut : 1° Créer un nombre suffisant de professeurs et les stipendier de manière qu’ils puissent se livrer tout entiers à l’enseignement ; 2° Établir à côté des écoles un hôpital où les élèves soient initiés à la pratique ; 3° Obliger les maîtres à suivre un ordre fixe et déterminé dans le cours des études. […] Ces deux professeurs s’arrangeront entre eux de manière que chaque année l’un fasse son cours de physiologie, l’autre son cours de pathologie. […] Le professeur de chirurgie traitera de toutes les maladies purement chirurgicales, comme les plaies, les tumeurs, les ulcères, les luxations et les fractions ; il décrira la nature et la manière curative. […] Us se partageront la besogne de manière que chaque année l’un des deux professeurs traite des maladies aiguës, l’autre des maladies chroniques.
Talent byzantin par l’or de sa manière, Méry est vraiment bien le peintre qui convenait à Byzance. […] Et nous disons : quand la fantaisie le prend d’écrire l’histoire… car, on le sait de reste, Méry, cette belle plume brillante et changeante, ce souple esprit qui a mille manières de s’enlever sur ses longues ailes, n’est qu’exceptionnellement historien. […] Mais ce que nous avons vu avec bonheur, et ce que la Critique marquera comme un affermissement de l’intelligence de Méry dans une voie où cette intelligence devait s’avancer hardiment en raison même de l’élévation de sa nature, c’est la mâle et saine manière de penser sur les choses religieuses qui sont le fond de cette grande histoire, que Gibbon, malgré un talent qui approchait du génie, n’a pas su juger parce qu’il n’était pas chrétien. […] La hauteur des opinions de Méry sur les hérésies, l’influence de l’hérésie sur les Barbares, le frappant vis-à-vis de l’apostasie d’Attila et de l’apostasie de Julien, — lequel appartient exclusivement au nouvel historien de Constantinople et qui a l’inattendu d’une révélation, — son bel épisode des Croisades, son mépris pour l’esprit des Grecs rebelles et disputeurs et pour ces protestants du xvie siècle qui renouvelèrent, à leur manière, l’esprit grec, et forcèrent les puissances chrétiennes à se détourner de la grande guerre traditionnelle de la chrétienté contre la barbarie musulmane pour brûler Rome et s’entre-déchirer entre elles au nom de la dernière hérésie sortie de la plume de Luther, enfin son jugement, d’une si noble pureté de justice, sur les grands calomniés de l’histoire, les jésuites, — puisqu’il faut dire ce nom si magnifiquement exécré, — et dont il nous raconte l’établissement et l’héroïsme, sous Murad III, à Constantinople, toutes ces choses et toutes ces pages, qui font de l’histoire de Méry une composition d’un mouvement d’idées égal pour le moins au mouvement de faits qu’elle retrace, n’ont pu être pensées et écrites que par un catholique carré de base déjà, mais qui va s’élargir encore.
Cette manière d’écrire et cette manière de causer étaient celles qui eurent la vogue dans le meilleur monde, sous un certain régime de goût, entre l’Astrée et la Clélie ; mais à quoi songeait-il de mener cela jusqu’après Mme de La Fayette et après Boileau ? […] Il n’y a pour cela qu’une manière, c’est de le citer avec choix, car on ferait un délicieux recueil de ses pensées et de quelques-unes de ses lettres. […] Au reste, ceux et surtout celles qui sont dignes d’avoir du goût y arrivent assez tôt, et de bien des manières. […] Il eut ce que j’appelle un succès de Hollande, lui à qui les manières de Hollande déplaisaient tant. […] Son style a de la manière ; mais, entre les styles maniérés d’alors, c’est un des plus distingués, des plus marqués au coin de la propriété et de la justesse des termes.
Les espèces de même genre varient d’une manière analogue ou reviennent à d’anciens caractères perdus. — XI. […] Nous avons les preuves de cette transformation des habitudes des animaux des cavernes, et Schiœdte adopte cette manière de voir. […] De même certaines corrélations qu’on peut constater dans des ordres entiers ne sont apparemment dues qu’à la manière dont la sélection naturelle peut agir. […] J’exposerai le fait d’une autre manière. […] Les parties homologues tendent à varier de la même manière.
Victorin Fabre subit, par malheur, tous les inconvénients de l’école à laquelle il se voua, et de la manière qu’il ne sut pas renouveler. […] J’expose et mets en regard ces deux manières sans avoir la prétention de les juger, ni d’assigner la préférence à l’une ou à l’autre. […] Ce n’est pas sa manière naturelle, à lui, d’entrer dans les choses par les épines ; il lui faut, pour y venir, être averti, poussé du dehors. […] Dans sa première manière, il s’est gardé soigneusement de faire rien passer de l’une dans l’autre. […] Toutefois, dans sa première manière, M.
M. de Régnier sait fréquemment éviter la manière d’allégorie dont je viens de parler, ou plutôt s’il marche constamment à son extrême limite, il a sa manière propre d’y échapper lorsqu’il s’y sent glisser. […] Mais sa manière d’allégoriser n’est jamais sans une gravité noble et sans des formes harmonieuses qui en dissimulent le défaut. […] De cette manière il y a encore symbole. […] Cette manière n’appartient pas en propre à M. […] L’emblème est une image admise de tous avec sa signification, et qui finit par se lier indissolublement à elle au point de paraître en quelque manière semblable au symbole.
Ce livre a plusieurs manières d’être excellent, et je les dirai toutes. […] Il y a, en effet, entre Caro, qui a fait ce livre que j’aime, et moi qui viens vous en parler, bien des différences de manière de sentir, de penser et d’être. […] Ces soixante pages, d’une beauté rare, et certainement les plus belles du livre, ont une froideur mélancolique du plus poignant effet, et que le livre n’a plus, quand il arrive à Renan, Taine et Vacherot, les représentants, selon Caro, chacun à sa manière, de ces idées qui marqueront la philosophie de cette minute du xixe siècle d’une si profonde insanité. […] IV Tel, en résumé, est ce premier volume de l’Idée de Dieu, que je voudrais faire lire par ma manière d’en parler. […] Avec cette charité et cette politesse qui drapent de si haut les coups… que l’on porte si bas, nous sommes plus libres, nous, les brutaux, de jeter à la porte, à notre manière, les réputations et les idées qui n’avaient pas le droit d’entrer !
Vous vous en souvenez, il a débuté, en littérature, par son gros livre d’Ahasverus, dans un temps où jeunes de toute manière, hélas ! […] Peu importe que le fond de ces deux ouvrages soit, sous deux noms différents, le même prétexte ou le même procédé pour nous faire voir le monde merveilleux ou historique des légendes et nous réverbérer, en le concentrant dans notre âme, ce prodigieux panorama ; mais il importe fort pour le mérite du poète et son progrès, pour l’intérêt et pour l’émotion du lecteur, que la forme et la manière de l’un ne soient pas par trop identiquement la forme et la manière de l’autre ! […] Si au moins, se dit-on, sous le coup de cette identité de manière, M. […] Plagiaire involontaire, et caméléon qui s’ignore ; ruisselant, comme un homme qui sort de l’eau, des lectures que tout le monde a faites et que dans son livre on peut aisément suivre à la trace, ce génie, à personnalité incertaine et confuse, ne vivrait même pas de sa pauvre manière d’exister, si des autres n’avaient pas existé avant lui… En dehors des fabulations qu’ils ont fécondées ou ornées, je peux bien concevoir les autres poètes, épiques ou non, que M. […] Je l’ai dit, mais il faut insister, puisque, pour une raison ou pour une autre, on vante une machine aussi grossière que ce poème, qui veut, à sa manière, être un Kosmos !
Quand même il seroit vrai que, dans ses Mémoires, M. de la Beaumelle n’a pas toujours eu l’exactitude historique & la discrétion convenable, on ne peut lui refuser une maniere de raconter vive, intéressante, pittoresque, énergique. […] Puisqu’il s’est rendu ainsi justice à lui-même, on ne doit pas le priver des louanges qu’il mérite, pour les vues profondes, les pensées vives, les critiques justes, & sur-tout pour la maniere nerveuse & précise avec laquelle il y exprime toutes ses idées. […] Nous pouvons prédire, d’après les différens morceaux qu’il nous en avoit lus, & d’après sa maniere d’écrire en François, qui approche beaucoup de celle de Tacite en latin, que cette Traduction sera digne de l’original.
On sait que dans ses Sermons il l’avoit rappelé à ses devoirs, en lui représentant, d’une maniere aussi respectueuse qu’énergique, le désordre des mœurs publiques, comme une suite de ses foiblesses. […] Sa maniere est plutôt d’attacher par les peintures, que par le raisonnement ; & l’on sent que l’élévation & le courage des pensées, la noblesse & l’énergie des expressions, la vigueur & la vérité des tableaux sont très-capables d’y suppléer. Ceux qui l’ont entendu ont donc raison de le regarder comme un Orateur dont la maniere n’appartient qu’à lui seul, qui, laissant aux autres le soin de prouver les dogmes de la Religion, se borne à un objet non moins estimable, & plus utile peut-être, celui d’en développer la morale, d’en faire aimer les devoirs & respecter l’autorité.
On érige parfois l’impénétrabilité en propriété fondamentale des corps, connue de la même manière et admise au même titre que la pesanteur ou la résistance par exemple. […] Nous l’accorderons sans peine, car si ces deux points nous affectaient de la même manière, il n’y aurait aucune raison pour placer l’un d’eux à droite plutôt qu’à gauche. […] De toute manière, on ne saurait admettre définitivement deux formes de l’homogène, temps et espace, sans rechercher d’abord si l’une d’elles ne serait pas réductible à l’autre. […] C’est parce que je dure de cette manière que je me représente ce que j’appelle les oscillations passées du pendule, en même temps que je perçois l’oscillation actuelle. […] Mais comme ce moi plus profond ne fait qu’une seule et même personne avec le moi superficiel, ils paraissent nécessairement durer de la même manière.
Ce sacrifice même leur est doux ; cette manière d’être, qui mène souvent à bien des renoncements et des dangers, leur est chère : c’est là leur idéal d’honneur et de bonheur, elles n’en veulent point d’autre. […] Que de choses dites d’une manière unique et définitive qu’on ne peut qu’à jamais répéter ! […] Indépendamment de ses Maximes, on a de lui des Réflexions diverses, qui y tiennent de près, mais qui portent moins sur le fond des sentiments que sur la manière d’être en société. […] Il met d’une certaine manière sa langue entre ses dents et s’écoute. […] Ce sont ces tons, ces airs et ces manières qui me choquent souvent chez M.
À un certain point la poussée manque, le ressort casse ou se retourne contre nous : d’autres déjà nous suivent, qui, à leur manière, recommenceront. […] Le volume actuel est précédé d’une lettre-préface, dans laquelle le poëte, écrivant familièrement à l’un de ses amis, lui explique sa manière de travailler durant les courtes heures des rares saisons qu’il accorde désormais à la poésie. […] Il s’ensuivrait formellement que la critique n’aurait plus rien désormais à faire avec lui ; c’est une manière complète de la récuser, de la déjouer. […] La nouvelle conclusion de Jocelyn, qui nous est donnée par manière de variante, a une ampleur et une sublimité merveilleuses : elle s’accorde dignement avec le souvenir de cet aimable poëme. […] Dans sa première manière, dans son plus jeune abandon, M. de Lamartine eût-il jamais proféré cela ?
» Or, si je me rends bien compte des vraies conditions de la méthode scientifique, que faudrait-il faire pour prouver ces propositions d’une manière absolument démonstrative ? […] Enfin, quand il peint la manière de travailler des hommes de génie, il ne les voit que sur le trépied : tout est pour lui élan, transport, effusion, intuitions prophétiques. […] Confondre tant de faits différents, les expliquer tous de la même manière et pour des analogies superficielles qui peuvent se trouver incidemment entre l’un de ces états et la folie, conclure que le génie pris en soi est essentiellement de même nature que la folie, c’est méconnaître toutes les lois de l’observation scientifique. […] Peut-être aussi Girodet avait-il trouvé plus commode cette manière de s’éclairer. […] Mais conclure de cela que le génie soit lié à l’hallucination, et que l’un de ces faits soit la cause de l’autre, c’est raisonner d’une manière très-peu rigoureuse.
Je pense qu’il n’y a pour l’esprit qu’une seule manière de raisonner, comme il n’y a pour le corps qu’une seule manière de marcher. […] Quant à moi, je pense qu’on a ce droit d’une manière entière et absolue. […] De cette manière, en effet, l’anatomie n’est que le premier pas de la physiologie. […] Nous en approchons toujours, mais la trouverons-nous jamais d’une manière complète ? […] Il paraît impossible même d’éviter d’une manière absolue ces sortes d’erreurs.
Un genre de délire moins sombre que la morgue dominante, mais aussi absurde dans sa maniere. […] Une telle manie n’a pas trouvé beaucoup d’Imitateurs, quoique des Iveteaux ait trouvé des Panégyristes : mais chacun a sa maniere de philosopher ; & qu’importe la maniere, si elles tendent toutes au même but ?
Section 21, de la maniere dont la réputation des poëtes et des peintres s’établit Je m’acquitte de la promesse que j’ai faite au commencement de cet ouvrage, d’examiner avant que de le finir la maniere dont la réputation des peintres et la réputation des poëtes s’établissent. […] Elles obscurcissent donc la verité, de maniere que le public reste durant un temps dans l’incertitude ou dans l’erreur.
Je crois pourtant que Gray va ici un peu loin : Froissart, à sa manière et selon sa mesure de jugement, s’était mis fort en peine de recueillir la vérité dans ce qu’il raconte. […] Au milieu de cette vaste trame un peu confuse, l’Angleterre et la France tiennent le premier plan ; et c’est dans les tableaux qu’il en retrace qu’on pourrait le mieux choisir pour donner idée de sa manière. […] Sur les côtés de la haie, parmi les vignes et les épines où l’on ne peut aller à cheval, sont disposés leurs gens d’armes tous à pied, et ils ont mis devant eux leurs archers « en manière de herse ». […] La manière dont est pris le roi Jean est bien contée. […] J’ai voulu insister un peu sur ce grand tableau de la bataille de Poitiers, et je l’ai choisi comme l’exemple le plus frappant et le plus en vue de la manière de l’historien.
Mais il y a une autre manière de commentateurs, et ceux-ci fort utiles et particulièrement agréables ; ils ont l’abondance des vues ; un développement naturel, et judicieux ou fin, ne les effraye pas : j’y mettrais en tête le bon Eustathe, le commentateur d’Homère. […] Benoist change aussi le texte à sa manière, mais il ne me paraît pas sûr d’avoir trouvé le mot de l’énigme. […] Je ne vois pas que ce sens, qui est assez fin, soit mal placé dans la bouche d’un vieillard un peu troubadour et maître, à sa manière, dans la gaie science. […] C’était une manière élégante de dire : « Nous prenez-vous pour des barbares ? […] Pour être juste avec Wagner qui, plus modeste et plus sobre que d’autres, n’a pas cru devoir accuser sa méthode d’une manière aussi tranchée, il faut avoir sous les yeux son Virgile dans la troisième édition, essentiellement améliorée (superioribus multo praestabilior), qui a paru eu 1861.
Théophile Gautier est un poète reconnu maintenant par toutes les opinions, un poète incontestable et incontesté de ceux-là mêmes qui n’aiment ni son inspiration, ni sa manière. […] selon nous, voilà un progrès, — relatif, il est vrai, — mais un progrès, pourtant, dont il faut tenir compte, car c’est un élargissement dans l’idée et dans la manière de l’auteur, la manière, cette cire dont l’idée est le sceau ! […] Il a concentré leurs deux manières allemande, espagnole et fantasque, dans une troisième qui est la sienne et qui les efface et les fait paraître… passées, comme l’hortensia devant un rose vif. […] Elle les relèvera bientôt, rassurée par l’idéalité de l’expression, qui est aussi, à sa manière, une chasteté !
cette merveilleuse histoire qui, exécutée d’une manière scientifique et définitive, révolutionnerait la pensée, avec quoi faudra-t-il la construire ? […] Un peu de bouse de vache et une poignée d’herbe kousa suffisent au brahmane pour le sacrifice et pour atteindre Dieu à sa manière. […] Cousin sur Santa-Rosa valent mieux pour notre manière de sentir qu’une oraison funèbre calquée sur celles de Bossuet. […] L’histoire de l’esprit humain est faite en général d’une manière beaucoup trop individuelle. […] Ce sera notre manière, à nous autres de la deuxième moitié du XIXe siècle.
Des Livres qui traitent de la Chronologie & de la maniere d’écrire l’Histoire. […] Quand on aura pris une teinture de Chronologie, il faut avoir une idée de la maniere d’étudier & d’écrire l’Histoire. […] Ce que Lucien & Rapin ont dit de plus utile & de plus important sur la meilleure maniere d’écrire l’Histoire, est reproduit dans ce livre curieux à bien des égards.
Ici, où vous n’apprenez pas seulement la langue avec facilité et rapidité, mais où vous pouvez aussi voir sur quels éléments elle repose ; notre sol, notre climat, notre manière de vivre, nos mœurs, nos relations sociales, notre constitution, votre esprit emportera tout cela en Angleterre. » C’était à un Anglais qu’il parlait. […] Ce ne fut que plus tard qu’il se rendit bien compte de la stérilité de cette admiration : c’est qu’il n’y avait nul rapport entre leur manière et ses dispositions naturelles, à lui-même. […] Un grand écrivain, observe à ce propos Eckermann, peut nous servir de deux manières : en nous révélant les mystères de nos propres âmes, ou en nous rendant sensibles les merveilles du monde extérieur. […] Le champ des généralités est bien vague ; la meilleure manière de se connaître est d’en venir au fait et de se donner rendez-vous sur un terrain déterminé, sur un sujet précis. […] C’était une manière de montrer le duc d’Albe insatiable de vengeance et de joies cruelles.
Enfin, vers la fin du siècle, Haller introduisit avec conscience et d’une manière régulière l’expérimentation physiologique. […] Dans la première hypothèse, on assimile entièrement l’une à l’autre les deux classes de phénomènes ; dans la seconde, on les lie ensemble d’une manière certaine et indissoluble, mais sans les confondre. […] Claude Bernard ces deux propositions fondamentales : — Tous les phénomènes vitaux sont liés entre eux d’une manière déterminée ; — ils sont liés aussi à des excitations physico-chimiques. […] Aussi la distinction objective des causes n’est jamais que relative à l’état de nos connaissances, et nul ne peut affirmer d’une manière absolue que deux ordres de causes ne se réduiront pas plus tard à un seul. […] Claude Bernard lui-même signale le fait caractéristique qui sépare d’une manière absolue les corps vivants des corps bruts, et il n’hésite pas à employer l’expression si discréditée de force vitale.
Le moyen qu’une copie, de quelque manière qu’elle se fasse, soit de grand effet, c’est qu’il y en ait dans l’original plus que moins. […] Voilà une première éducation gaie, j’aime cette manière d’éveiller les enfans. […] Sa touche est lourde, sa manière de faire est pénible et heurtée ; dans ses paysages, les feuilles des arbres sont pesantes, matérielles, et faites sans ragoût, sans verve ; il n’y a pas dans tout ce qu’il a exposé une étincelle de feu, bien moins un trait de verve. […] Si cet artiste n’eût pas pris ses sujets dans des mœurs et des coutumes dont la manière de se vêtir, les habillemens ont une noblesse que les autres n’ont pas, et sont aussi pittoresques que les nôtres sont gothiques et plats, son mérite s’évanouirait. Substituez aux figures de Le Prince des français ajustés à la mode de leur pays, et vous verrez combien les mêmes tableaux exécutés de la même manière perdront de leur prix, n’étant plus soutenus par des détails, des accessoires aussi favorables à l’artiste et à l’art. à la jolie petite femme du concert substituez une de nos élégantes avec ses rubans, ses pompons, ses falbalas, sa coëffure ; et vous verrez le Bel effet que cela produira, combien ce tableau deviendra pauvre et de petite manière.
Rien de si plaisant que la maniere dont il apprend à être plagiaire impunément, dans celui qu'il a intitulé, le Masque de l'Orateur, ou la maniere, &c. […] Voici celui d'un de ses derniers Ouvrages publiés en 1680 ; il donnera en même temps une idée de sa maniere d'écrire.
Je remarque partout dans l’iliade, les mêmes vûës et la même maniere de penser. […] Qu’est-ce que des dieux qui n’ont point fait l’homme, nés comme lui dans la succession des siecles, et multipliés par les mariages, à la maniere des races humaines ? […] Homere ne fait pas toujours agir ses héros d’une maniere conforme à la premiere idée qu’il en donne. […] La premiere maniere est trop lente, et laisse languir l’imagination qui commençoit à s’échauffer ; au lieu que la seconde entretient et augmente même l’émotion par la rapidité du dialogue. […] Il y a enfin une maniere de peindre les actions qui en renferme un jugement.
Contemporain par ses débuts de MM. de Lamartine et Victor Hugo, sa manière entièrement distincte de la leur, comme poëte, est notoire. […] … ») — Cette prétendue citation de Reynolds n’était qu’une manière d’insinuer mes critiques. […] C’est par manière de représailles et comme pour me punir que M. […] la bonne chose que d’être mort de cette manière ! […] J’avais produit ma manière de voir à son égard ; j’eusse été heureux d’être rectifié, s’il y avait lieu, et de m’éclairer.
Nous persistons à dire que la seule manière d’y marcher à coup sûr, c’est de débuter par y suivre Shakespeare, de même que Racine, pour traiter les sujets antiques, s’est inspiré d’Euripide et s’en est approché autant que son siècle le permettait. […] À quoi nous répondrons d’une manière assez banale aussi : nous avons traduit quelques tragédies de Shakespeare en vers français, précisément parce que nous en croyons la représentation nécessaire au public, à l’art et au Théâtre-Français lui-même. […] Une autre erreur, à laquelle sont même sujets certains hommes de lettres, c’est de croire qu’il n’y a qu’une manière de bien écrire, qu’un vrai type de style. […] Il n’y a au contraire qu’une manière de très mal écrire littérairement ; c’est d’écrire comme tout le monde ; car, il ne faut point compter ceux qui ne savent pas écrire du tout. […] Cette sorte de vers a le grand avantage d’avoir été beaucoup moins employée, et surtout d’offrir beaucoup plus de ressources et de variété ; le récit poétique ne nous paraît même possible que de cette manière.
La critique d’art, la manière dont il l’a exercée et comprise, constitue l’une des innovations et l’un des talents spéciaux de Théophile Gautier. […] Dans les nombreux Salons qu’il a faits et qu’il est loin d’avoir tous recueillis en volumes, je prendrai presque au hasard quelques exemples pour bien définir sa manière et expliquer son procédé. […] Chaque peinture, chaque fresque, on croit la voir à la manière dont il la décrit, et on la voit non-seulement dans son sujet et sa disposition, mais dans son effet et son ton ou sa ligne. […] Cette manière de sentir se répète en peinture. […] De toutes ses manières, de toutes ses notes poétiques, les Émaux et Camées sont la dernière, la plus marquée, et je ne serais pas étonné si l’on me disait que c’est celle qui lui tient le plus à cœur et qui lui est la plus chère.
Nous arriverions peut-être ainsi à saisir le secret de cette manière qui consiste à ne développer jamais l’idée morale, mais à lui substituer un emblème ou un symbole. […] En Angleterre les Lakistes, en Allemagne Jean Paul et ses imitateurs, ont affectionné cette manière. […] On sent combien cette manière, qui est le dernier degré du symbolisme de style, est compréhensive, poétique, précisément parce qu’elle est indéfinie, mais en même temps vague et obscure. […] On pourrait définir une partie de sa manière, la profusion du symbole. […] Pour saisir la différence qui existe entre la manière de M.
Un homme riche, qui représente, a force cuisiniers, force services d’entrées et d’entremets, des fruits montés d’une manière élégante (dont l’usage, par parenthèse, nous vient d’Italie). La profusion des mets doit toujours être au triple de ce qu’il en faut pour les convives… Un Italien ne fait rien de tout cela : sa manière de paraître, après avoir amassé par une vie frugale un grand argent comptant, est de le dépenser à la construction de quelque grand édifice public, qui serve à la décoration ou à l’utilité de sa patrie, et qui fasse passer à la postérité d’une manière durable son nom, sa magnificence et son goût. […] » Il propose lui-même une manière de faire copier avec éclat et durée les plus fameux ouvrages à fresque d’Italie. […] Qu’on se figure cette diversité de physionomies, d’esprits, et même de tailles : de Brosses plein de trait et gesticulant à sa manière, entre Diderot qui s’échauffe et Buffon qui écoute. […] Pourvu qu’il ne veuille pas nous mener d’une manière tranchante, par système encyclopédique !
On lui a détruit son grand empire, elle va en recommencer un tout petit avec les moyens dont elle dispose, mais de la même manière et dans le même ordre. […] Assurément la manière de M. […] Mais est-ce donc que cette manière de Tacite est la seule ou même la meilleure pour l’histoire ? […] Tacite, là où il est beau et où il se déploie, est un grand peintre ; il est même, a-t-on dit, le plus grand peintre de l’Antiquité ; mais j’ai tant de peine, je l’avoue, à comprendre chez lui certains contournements de pensée, qu’il m’est difficile de croire que ce soit là l’unique manière de bien dire, ou même l’unique manière de bien voir et de juger.
Les noms d’Hercule, d’Évandre et d’Énée passèrent donc de la Grèce dans le Latium, par l’effet de quatre causes que nous trouverons dans les mœurs et le caractère des nations : 1º les peuples encore barbares sont attachés aux coutumes de leur pays, mais à mesure qu’ils commencent à se civiliser, ils prennent du goût pour les façons de parler des étrangers, comme pour leurs marchandises et leurs manières ; c’est ce qui explique pourquoi les Latins changèrent leur Dius Fidius pour l’Hercule des Grecs, et leur jurement national Medius Fidius pour Mehercule, Mecastor, Edepol. 2º La vanité des nations, nous l’avons souvent répété, les porte à se donner l’illustration d’une origine étrangère, surtout lorsque les traditions de leurs âges barbares semblent favoriser cette croyance ; ainsi, au moyen âge, Jean Villani nous raconte que Fiesole fut fondé par Atlas, et qu’un roi troyen du nom de Priam régna en Germanie ; ainsi les Latins méconnurent sans peine leur véritable fondateur, pour lui substituer Hercule, fondateur de la société chez les Grecs, et changèrent le caractère de leurs bergers-poètes pour celui de l’Arcadien Évandre. 3º Lorsque les nations remarquent des choses étrangères, qu’elles ne peuvent bien expliquer avec des mots de leur langue, elles ont nécessairement recours aux mots des langues étrangères. 4º Enfin, les premiers peuples, incapables d’abstraire d’un sujet les qualités qui lui sont propres, nomment les sujets pour désigner les qualités, c’est ce que prouvent d’une manière certaine plusieurs expressions de la langue latine. […] C’est de cette manière que Numa et Ancus furent Sabins ; les Sabins étant remarquables par leur piété, les Romains dirent Sabin, faute de pouvoir exprimer religieux. […] Peut-être doit-on comprendre de cette manière les Arcadiens d’Évandre, et les Phrygiens d’Énée. […] C’est aussi de ce mot Ara, prononcé et entendu d’une manière si uniforme par tant de nations séparées par les temps, les lieux et les usages, que les Latins durent tirer le mot aratrum, charrue, dont la courbure se disait urbs (le sens le plus ordinaire de ce mot est celui de ville) ; du même mot vinrent enfin arx, forteresse, arceo, repousser (ager arcifinius, chez les auteurs qui ont écrit sur les limites des champs), et arma, arcus, armes, arc ; c’était une idée bien sage de faire ainsi consister le courage à arrêter et repousser l’injustice.
Au reste, elles n’en ont pas le privilège, et je sais, comme dit La Fontaine, Bon nombre d’hommes qui sont femmes, quand il s’agit d’écrire mal de certaines manières. […] C’est de cette manière, ajouta-t-elle, que je lui ai montré, et vous avez vu les jolies lettres qu’il a faites.” » Ainsi conduit et dirigé, en effet, l’enfant, après plusieurs épreuves, sentira, tirera lui-même cette conclusion, « que le principal, pour bien écrire, est d’exprimer clairement et simplement ce que l’on pense ». […] Tout traité sur l’art d’écrire, s’il est autre chose qu’un recueil de recettes et d’artifices, contient la manière de bien penser sur les ouvrages de l’esprit, comme disait le P. […] L’essentiel est de lire les réflexions développées dans ce volume, d’une manière désintéressée, sans le vulgaire désir d’y apprendre des procédés rapides et mécaniques ; si l’on y prend des points de départ, des matériaux, une direction, un stimulant, pour penser par soi-même, pour comprendre comment les écrivains bâtissent leurs ouvrages, ordonnent et expriment leurs conceptions, et comment on doit soi-même travailler, insensiblement l’esprit, familiarisé avec les grandes lois de l’art d’écrire, dont il aura pénétré la vérité et mesuré la portée, s’y conformera en composant, et il conduira, disposera, traduira ses pensées selon des règles qui ne seront plus logées dans la mémoire, mais feront partie de lui-même et auront passé dans sa substance.
Si son livre ne révèle aucune de ces manières éclatantes et familières au public qui disent, dès les premiers mots, les plumes dont elles sont sorties, il n’accuse pas non plus quelque grande manière nouvelle, — une initiative dans le fond ou la forme des choses ; il confirme assez modestement les bruits qui ont couru. […] Scott et Balzac (Balzac surtout, plus grand que Scott par ce côté) ont inventé des manières si supérieures de couper le jeu et de donner les cartes dans cette fameuse partie d’imagination, qu’après eux la difficulté a pris des proportions qui semblent la rendre invincible. […] Chateaubriand a tatoué tellement le talent de l’auteur du Blessé de Novare, qu’il ne lui est plus permis d’effacer ce tatouage qui défigure ses traits primitifs… Quant à la manière dont l’Inde est peinte dans ce roman où elle a remplacé l’Amérique, prendre la flore d’un pays et la renverser, plante par plante, à travers une nature qu’on ne comprend pas, tant les mots indiens y abondent !
Non-seulement elle montroit tout ce que la notre montre, mais elle enseignoit beaucoup de choses que la notre n’enseigne point, soit parce que l’on n’étudie plus aujourd’hui une partie de ces choses là, soit parce que l’art qui enseigne les autres n’est point reputé faire une partie de la musique, de maniere que l’on ne donne plus le nom de musicien à celui qui le professe. […] Elle n’est propre qu’à nous empêcher de concevoir jamais la maniere dont les pieces dramatiques étoient exécutées sur le théatre des anciens. […] Je ferai voir en second lieu que les anciens composoient et qu’ils écrivoient en notes leur déclamation theatrale, de maniere que ceux qui la récitoient, pouvoient être, comme ils l’étoient en effet, soutenus par un accompagnement.
Les meilleures démonstrations, les plus décisives et, ainsi qu’on dit, les plus « topiques », ne sont-elles pas celles qui se tirent, ou qui se dégagent, en quelque manière, de l’effort même qu’on avait entrepris avec le ferme propos de ruiner ce qu’elles établissent ? […] Et la manière dont il s’y est pris, ç’a été de substituer, dans l’idée qu’il nous faut nous former de la « Science », 1° le point de vue dynamique au point de vue statique ; et 2° la notion précise du relatif à l’hypothèse indéterminée de l’absolu. […] Un autre et non moindre avantage de cette manière de concevoir la science est de nous la représenter comme animée d’un mouvement qui modifie d’âge en âge, — et on pourrait dire de génération en génération, — le système de rapports qu’elle est. […] Et si L’Avenir de la science est une œuvre de sa jeunesse, qui ne sait que son âge mûr ne s’est on quelque manière employé qu’à essayer de réparer au moyen de la science les brèches que son exégèse croyait avoir faites dans l’édifice dix-huit fois séculaire de la morale et de la religion ? […] De la comparaison que nous ferons entre eux de leurs caractères, laquelle sans doute ne sera qu’une manière encore de penser « en relation », et de l’expérience que nous aurons des qualités des objets.
Leurs catachrèses expriment leurs états d’âme, et leurs manières d’être se trahissent dans leurs métonymies. […] d’une manière plus explicite ? […] Car en combien de manières la tradition ne peut-elle pas être altérée, déformée, corrompue ? […] ou celle de l’évêque de Gap, qui emploie les siennes d’une autre manière, et ses jours aussi, avec la demoiselle Loyson ? […] Ainsi, de toutes les manières, on le voit, l’idée du progrès chemine et se répand.
On doit encore observer qu’il usa de la langue d’une autre manière. […] Il a une manière simple de raconter. […] C’est de la manière dont elles affectent l’homme que dépend la manière dont il s’exprime. […] Celui qui se fait sa propre conscience ne saurait être vertueux d’une manière assurée. […] Aussi apprécia-t-il d’une manière très superficielle toute la littérature ancienne et étrangère.
Enfin, à force de revêtements l’un sur l’autre, voilà un seigneur, et qui en affectait toutes les manières à faire mourir de rire. […] Il y revient en toute occasion, et toujours avec jubilation et délices ; il l’appelle en un endroit une « espèce de personnage en détrempe » : « C’était un grand homme, fort bien fait, devenu gros avec l’âge, ayant toujours le visage agréable, mais qui promettait ce qu’il tenait, une fadeur à faire vomir. » Lui reconnaissant des qualités mondaines, des manières, de la douceur, de la probité même et de l’honneur, il cite de nouveau et commente ce mot de Mme de Montespan sur lui, qu’on ne pouvait s’empêcher de l’aimer ni de s’en moquer : Saint-Simon aimait donc assez Dangeau, mais quelle manière d’aimer ! […] Le même Saint-Simon, qu’on va trouver attaché, acharné sans trêve à Dangeau comme pour le mortifier, et qui annotera d’un bout à l’autre son journal, a jugé ce journal d’une manière à la fois bien sévère et singulièrement favorable : Dangeau, dit-il, écrivait depuis plus de trente ans tous les soirs jusqu’aux plus fades nouvelles de la journée. […] Fontenelle y explique, de cette manière distinguée et fine qui est la sienne, les sources de la fortune de Dangeau, sa bonne mine, son attention à plaire, son art et son savoir-faire au jeu sans jamais déroger à la probité. […] Il est très vrai que ces notes, prises sur quantité de faits et de points de régularité et d’étiquette, pouvaient lui être utiles, à lui courtisan, pour être prêt à répondre à tout, pour être bien informé sur tout ; mais je crois qu’il entrait aussi dans ce projet, exécuté d’une manière si constante et si suivie, de cette pensée plus longue et plus honorable d’être utile un jour à la postérité par une multitude d’informations qui aideraient à connaître la Cour et le monarque : et en cela il ne s’est point si fort trompé.
Janin s’est fait un genre et une manière à part, et qu’il a créé un feuilleton qui porte son cachet. […] Garat sortant de chez Diderot, Charles Nodier encore, contant quelqu’un de ses jolis contes où le fond se dérobe et où la façon est tout, ce sont presque les seuls auteurs, en français, qui me donnent quelque idée à l’avance de cette manière unique de M. […] Janin a une manière de s’en tirer en homme d’esprit et de marquer jusqu’à un certain point sa contrainte : il les loue trop. […] Elle aussi avait dit à sa manière, en prenant possession : L’État, c’est moi. […] Il y avait de la reine dans la manière dont Mme de Mondonville établissait cette domination à son usage : La Supérieure, disait-elle, donnera une fois le mois une audience à chacune des filles qui demandera de lui parler, les accueillera avec un visage serein, les écoutera paisiblement et charitablement, gardant un juste tempérament entre la familiarité et la pesanteur d’une trop tendue conversation… Enfin, elle se comportera de telle manière qu’elle ne les renvoie jamais mécontentes, s’il est possible.
Cette manière avait d’ailleurs été donnée à M. […] « Ainsi, la matière n’est pas : et en la perpétuelle diversité de sa manière de se manifester qui est mouvement, d’éternité et pour éternité et dans l’illimité ! […] ……………………………………………………………………………………………… « Ainsi, la matière n’est pas : et en la perpétuelle diversité de sa manière de se manifester qui est mouvement, d’éternité pour éternité et dans l’illimité ! […] Or, désormais deux rimes ne s’appelleront plus pour une simple consonnance, mais de manière que cette consonnance apporte une fixité plus grande encore de l’idée, ou autour de cette idée éveille un prolongement comme suggestif, etc. […] C’est au mois de mars 1888, qu’il me fut donné, sûr de ma pensée, à vingt-cinq ans (l’âge des autres dit plus haut, il m’est permis de dire le mien), d’écrire en son intégralité mon Traité du Verbe, en argument à mon Œuvre entière — édition où sont développées mes présentes méthode de Philosophie évolutive et manière d’art, l’Instrumentation poétique.
La logique spéculative avait jusqu’alors consisté à raisonner, d’une manière plus ou moins subtile, d’après des principes confus, qui, ne comportant aucune preuve suffisante, suscitaient toujours des débats sans issue. […] Pendant la longue enfance de l’Humanité, les conceptions théologico-métaphysiques pouvaient seules, suivant nos explications antérieures, satisfaire provisoirement à cette double condition fondamentale, quoique d’une manière extrêmement imparfaite. […] Mais cette aveugle disposition ne résulte que d’une manière fausse et étroite de concevoir la grande relation de la science, à l’art, faute d’avoir assez profondément apprécié l’une et l’autre. […] Elle se lie, d’une manière plus intime et plus durable, à l’esprit, fondamental de la philosophie positive, dans la relation générale entre la spéculation et l’action. […] Mais cette opposition est, malheureusement, beaucoup plus radicale ; car, elle résulte de l’incompatibilité nécessaire qui existe évidemment entre ces deux manières de systématiser la morale.
Quelque sujet qu’ils aient traité, la manière n’en a jamais appartenu qu’à eux. […] Allons plus loin ; il a une manière, et même, comme dans les Paroles d’un croyant, une manière dont on peut aisément démêler l’artifice ; et cependant… sa prose, en vérité, n’est pas signée. […] D’une manière générale, il a donné trop d’importance au personnage politique du poète. […] Bourget, lui, n’a pas traité la question tout à fait de la même manière. […] Elle l’outrage, en quelque manière, dans l’idée même qu’il se fait de la toute-puissance de son Dieu.
La Ville elle-même, Paris où tout s’adoucit volontiers et où les femmes aussi donnent le ton, venait à sa manière en aide à la Cour (sauf quelques cas revêches) pour mettre dans la langue plus de facilité usuelle et de coulant. […] Ainsi, pour le mot Fronde, Vaugelas se croyait encore obligé, en 1647, de bien fixer la manière de dire ; car beaucoup disaient Fonde, conformément à l’étymologie et à cause du latin Funda. […] Il y avait doute encore et débat sur la manière de dire Hirondelle, Arondelle, Hérondelle ; Vaugelas inclinait pour cette dernière forme et l’estimait, la meilleure, comme elle était aussi la plus usitée des trois. […] Il avait, à sa manière, des artifices de juge d’instruction ou de confesseur. […] Il les dirait presque avec la même matière ; mais de quelle manière différente, de quel tour, et avec quelle vivacité de plus !
Je l’avois assez connu pour le regretter et les ouvrages que son âge et sa santé pouvoient faire espérer de lui. » Boileau se montrait un peu plus difficile en fait de ton et de manières que le duc de Saint-Simon, quand il écrivait à Racine, 19 mai 1687 : « Maximilien (pourquoi ce sobriquet de Maximilien ?) […] A la manière énergique dont Saint-Simon nous parle de cette race des Condés, on voit comment par degrés en elle le héros en viendra à n’être plus que quelque chose tenant du chasseur ou du sanglier. […] A la manière dont il parle de l’amitié, de ce goût qu’elle a et auquel ne peuvent atteindre ceux qui sont nés médiocres, on croirait qu’il a renoncé pour elle à l’amour ; et, à la façon dont il pose certaines questions ravissantes, on jurerait qu’il a eu assez l’expérience d’un grand amour pour devoir négliger l’amitié. […] Après Pascal et La Rochefoucauld, il s’agissait pour lui d’avoir une grande, une délicate manière, et de ne pas leur ressembler. […] On sait enfin maintenant, après bien des tâtonnements, et d’une manière positive, que La Bruyère est né à Paris et y a été baptisé le 17 août 1645.
C’est un avertissement que je crois devoir à ces jeunes écrivains simples avec tant de recherche, naturels avec tant de manière, éloquents avec si peu d’idées. […] Mais cette supériorité est une chose si futile et si facilement anéantie par la moindre réflexion, qu’il faut que la vue nous en soit présentée d’une manière imprévue. […] C’est que je connais l’auteur de Josué et l’estime infiniment ; c’est un homme sage, de bonnes manières et même d’esprit, rempli de talent pour le commerce de la librairie. […] Si le conte est fait d’une manière trop prolixe, si le conteur emploie trop de paroles, et s’arrête à peindre trop de détails, l’esprit de l’auditeur devine la chute vers laquelle on le conduit trop lentement ; il n’y a plus de rire, parce qu’il n’y a plus d’imprévu. […] Enfin si l’on veut me faire rire malgré le sérieux profond que me donnent la bourse et la politique, et les haines des partis, il faut que des gens passionnés se trompent, sous mes yeux, d’une manière plaisante, sur le chemin qui les mène au bonheur.
— de manières, d’élégance, de ton (le ton qui sert bien plus que l’esprit dans la vie et qui cache l’absence de l’esprit, quand on a le malheur de n’en pas avoir !). […] À la manière dont elle est méconnue, on la reconnaît ! Les salons, c’est la rue qui a passé par le bain, la pâte d’amande, la grammaire et les bonnes manières, mais c’est toujours la rue, au fond des esprits et des cœurs ! […] Il n’y en a pas cinq, et les voici, ces quatre mots, qui ne sont ici encore qu’un pâle souvenir de sa manière à elle, quand elle n’est plus une femme du monde, mais la femme éloquente que naturellement elle était ! […] Enfin, elle est entrée, sans sortir de chez elle, chez M. de Loménie, qui a fait, nous dit-elle par manière de renseignement, une notice sur Gœthe, spirituelle et piquante.
Ils n’en sont que les peintres, et encore dans la manière des peintres de ce xviiie siècle qui les a faits ce qu’ils sont… Ils peignent comme Fragonard, ils peignent comme Chardin, ils peignent comme Boucher, ils peignent comme les deux frères Le Nain, ces deux frères de Goncourt ! […] Ce sont des merveilles de peinture que leurs livres sur le xviiie siècle, dans lesquels ils rappellent si bien, littérairement, les peintres de cette époque, dont ils fondent la couleur et la manière dans une couleur et une manière à eux. […] Pendant des années et jusqu’à la Révolution, qui a tué l’esprit comme elle a tué tant d’autres choses, elle régna par les mots, la plus jolie manière de régner en France, quand on y régnait ! […] Sophie Arnould n’est peut-être pas que le phénomène d’esprit que réellement elle était, mais un phénomène bien plus complexe ; car ils la font, dans leur livre, charmante de toutes les manières dont une femme puisse être charmante, comme ils l’ont faite spirituelle dans ces misérables lettres où elle ne l’est plus et qui inspirent à qui les lit, excepté eux, plus de dégoût encore que de pitié.
Les moralités délicates disaient qu’il allait tuer comme les tubéreuses tuent les femmes en couche, et il tue en effet de la même manière. […] dans le monde de la Chute, ce livre sera moral à sa manière ; et ne souriez pas ! cette manière n’est rien moins que celle de la Toute-Puissante Providence elle-même, qui envoie le châtiment après le crime, la maladie après l’excès, le remords, la tristesse, l’ennui, toutes les hontes et toutes les douleurs qui nous dégradent et nous dévorent, pour avoir transgressé ses lois. […] Dans ce livre, où tout est en vers, jusqu’à la préface, on trouve une note en prose qui ne peut laisser aucun doute non seulement sur la manière de procéder de l’auteur des Fleurs du mal, mais encore sur la notion qu’il s’est faite de l’art et de la poésie ; car M. […] Charles Baudelaire, appeler un art sa savante manière d’écrire en vers ne dirait point assez.
Il est bien vrai que la nature est immense, mais les organes de l’homme qui la voit, sont affectés d’une certaine manière dans chaque époque. Cette manière de voir et de sentir influe nécessairement et sur l’artiste et sur le juge. […] On peut lui reprocher de n’avoir pas assez imité la manière de Bossuet. […] Cet orateur, si connu par son éloquence, tantôt persuasive et douce, tantôt forte et imposante, qui développait si bien les faiblesses de l’homme et les devoirs des rois, et qui, à la cour d’un jeune prince, parlant au nom des peuples comme au nom de Dieu, fut digne également de servir à tous d’interprète ; cet orateur, qui sut peindre les vertus avec tant de charmes, et traça de la manière la plus touchante le code de la bienfaisance et de l’humanité pour les grands, n’a pas, à beaucoup près, le même caractère dans ses éloges funèbres. […] La manière est petite et froide ; l’orateur divise et subdivise : il a l’air d’un homme qui craint de s’égarer, et qui se tient sans cesse à un fil.
Paul, Jean et Jacques auront donc beau être en mouvement par rapport à lui : il verra en eux des esprits qui pensent et sentent à sa manière. […] Concluons de toute manière, en ce qui concerne l’universalité du Temps réel, que la théorie de la Relativité n’ébranle pas l’idée admise et tendrait plutôt à la consolider. […] Donc, à ses yeux, le réglage des deux horloges s’est opéré de telle manière qu’elles donnent la même indication là où il n’y a pas simultanéité, mais succession. […] Elle n’a d’ailleurs pas d’importance pour le physicien, puisque les deux conceptions se traduisent de la même manière en termes mathématiques. […] Mais, de toute manière, la solution donnée ci-dessus supprime le paradoxe et fait évanouir le problème.
Les dehors fleuris ne m’en imposent pas, et mes yeux, demi-fermés, ne sont jamais éblouis ; trop fixes, ils ne sont point surpris. » Il étudia avec une ardeur précoce : à sept ans il savait la géographie et les voyages d’une manière qui surprit beaucoup le bon et savant Mentelle. […] Il se maria donc en septembre 90, à l’âge de vingt ans ; et, dès ce jour, les devoirs nouveaux, qu’il acceptait par des motifs louables, ne cessèrent d’une manière ou d’une autre, quoique toujours noblement, de peser sur sa condition. […] Vieillard austère qui, après un chef-d’œuvre de ta jeunesse, t’es arrêté on ne sait pourquoi, qui t’es heurté à faux depuis ce temps sur d’ingrats labeurs, et qui, sans rien perdre assurément de ta valeur intrinsèque, n’as plus su aboutir d’une manière récréante, fructueuse et féconde ! […] Il en résulte que dans sa manière, particulièrement dans celle de ses derniers ouvrages, il devient en plusieurs endroits obscur et d’une lecture difficile, parce qu’il évite de spécialiser sa pensée en la revêtant d’exemples vifs, de citations ostensibles, en l’illustrant de détails et de rapprochements historiques. […] La forme littéraire et toute classique du développement, la lenteur égale de chaque paragraphe, se rapprochent beaucoup de la manière du moraliste Du Guet dans le traité si bien écrit et si peu lu de la Prière.
XIII Il importe donc de bien comprendre le rôle des travaux du savant et la manière dont il exerce son influence. […] Faire du torchon avec de la dentelle est de toute manière un mauvais calcul. […] Au moyen de ses connaissances person-nelles et des travaux déjà faits, il pourra peut-être traiter d’une manière définitive la partie ancienne. […] On avance une généralité que l’investigateur primitif ne se fût pas formulée de la même manière. […] La matière de l’érudition, en effet, va toujours croissant d’une manière si rapide, soit par des découvertes nouvelles, soit par la multiplication des siècles, qu’elle finira par dépasser de beaucoup la capacité des chercheurs.
Le sévère Johnson, qui d’ailleurs n’était pas impartial à l’égard de Chesterfield, et qui croyait avoir à se plaindre de lui, disait, au moment de la publication de ces Lettres, « qu’elles enseignaient la morale d’une courtisane et les manières d’un maître à danser ». Un tel jugement est souverainement injuste, et si Chesterfield, dans le cas particulier, insiste tant sur les grâces des manières et sur l’agrément à tout prix, c’est qu’il a déjà pourvu aux parties plus solides de l’éducation, et que son élève n’est pas en danger du tout de pécher par le côté qui rend l’homme respectable, mais bien par celui qui le rend aimable. […] Le petit Stanhope n’a pas encore huit ans, que son père lui dresse une petite rhétorique à sa portée, et essaie de lui insinuer le bon langage, la distinction dans la manière de s’exprimer. […] « Le plaisir est aujourd’hui la dernière branche de votre éducation, lui écrit ce père indulgent ; il adoucira et polira vos manières, il vous poussera à chercher et enfin à acquérir les grâces. » Mais, sur ce dernier point, il se montre exigeant et sans quartier. […] Il demande perpétuellement à l’esprit quelque chose de ferme et de délié, la douceur dans la manière, l’énergie au fond.
Ce droit de correction, elle se l’assurait à sa manière en plaçant de temps en temps sur votre tête quelque bonne petite rente viagère, sans oublier le cadeau annuel de la culotte de velours. […] Elle voulait faire du bien à sa manière, c’était sa qualité distinctive. […] Elle a surtout une manière de vous reprendre qui me charme. […] On peut croire que cette modestie, chez elle, n’était qu’une manière plus douce, et pleine de goût, de porter son amour-propre et sa gloire. Mais elle excellait à cette manière discrète et proportionnée.
Dans la préface qu’il mit à cette dernière traduction, il s’exprime en homme tout à fait maître du sujet, et il expose d’une manière claire, supérieure et presque piquante, les querelles qui s’étaient élevées à propos de l’invention de ce calcul de l’infini. […] Les botanistes particulièrement le pouvaient prendre en faute, en flagrant délit d’inexactitude et de légèreté sur la manière dont il jugeait Linné, et dont il appréciait les méthodes. […] Comme peintre d’animaux, il n’a rien fait de plus noble, de plus majestueux et de plus accompli que ses portraits du Cheval, du Cerf, du Cygne : ce sont des tableaux de nature vivante, de la plus grande manière et de la plus royale. […] Fontenelle, avant Buffon, avait beaucoup fait pour introduire parmi le monde, pour insinuer la science ; mais quelle différence entre cette démarche oblique et mince et la manière grande, ouverte et vraiment souveraine de Buffon ! […] Buffon n’y présente point son hypothèse comme réelle, mais comme un simple moyen de concevoir ce qui a dû se passer d’une manière plus ou moins analogue, et de fixer les idées sur les plus grands objets de la philosophie naturelle.
Moitié souvenir, moitié invention, il essayait ensuite de traiter à sa manière quelques-uns des mêmes sujets ; puis, en comparant avec l’original, il corrigeait ses fautes, et il lui semblait même quelquefois que, sur des points de détail, il n’était pas toujours battu. […] Il avait beaucoup réfléchi sur la manière de prendre les hommes dans leur propre intérêt, et il avait reconnu qu’il ne faut pas pour cela sembler trop certain et trop assuré de son opinion ; les hommes agréent plus aisément et consentent mieux à recevoir de vous ce qu’ils peuvent croire avoir trouvé en partie eux-mêmes. […] Benjamin, qui le voyait faire, qui entendait causer ceux qui y contribuaient de leur plume, et qui lui-même travaillait à l’imprimer, eut l’idée de donner quelques articles ; mais, sentant bien qu’on les refuserait avec dédain à cause de sa jeunesse, si on l’en savait l’auteur, il les fit arriver d’une manière anonyme et en déguisant son écriture. […] Il y reviendra, après ses premières licences, d’une manière sincère et touchante : je ne sais aucun déiste qui témoigne un sentiment de foi plus vif que Franklin ; il paraît croire, en toute occasion, à une Providence véritablement présente et sensible ; mais là encore, qu’est-ce qui a le plus contribué à le ramener ? […] « J’approuve, pour ma part, qu’on s’amuse de temps en temps à la poésie, dit-il, autant qu’il faut pour se perfectionner le style, mais pas au-delà. » Il a pourtant lui-même, sans y songer, des formes d’imagination et des manières de dire qui font de lui non seulement le philosophe, mais quelquefois le poète du sens commun.
— Avant d’aborder le sujet de ce chapitre, je dois faire quelques observations préliminaires sur la manière dont la concurrence vitale appuie le principe de sélection naturelle. […] En pareils cas, et l’on pourrait multiplier sans fin les exemples, nul n’a jamais supposé que la fécondité de ces plantes ou de ces animaux se fût soudainement et temporairement accrue d’une manière sensible. […] A l’état de nature il faudrait également que, d’une manière ou d’une autre, il en pérît un grand nombre. […] Newmann, qui a observé pendant longtemps les habitudes des Bourdons, croit que « plus des deux tiers d’entre eux sont détruits de cette manière en Angleterre. » Maintenant le nombre des Mulots dépend, comme chacun sait, du nombre des Chats ; et M. […] On peut déduire de là que, si une plante ou un animal est placé dans une nouvelle contrée parmi de nouveaux compétiteurs, lors même que le climat serait parfaitement identique, les conditions d’existence de l’espèce n’en sont pas moins généralement changées d’une manière essentielle.
Quoique les végétaux soient pourvus de chlorophylle, surtout pendant l’été, d’une manière incomparablement plus abondante que les animaux, on ne peut d’une manière absolue confondre le végétal avec la chlorophylle. […] Tout cela n’est pas nécessaire à la vie d’une manière absolue. […] Auerbach, Hoffmeister et Strassburger acceptent cette manière de voir. […] C’est la manière de se comporter du muscle. […] C’est la manière de se comporter des nerfs.
Il y a tel de ses plus anciens sermons où on le surprend comme en flagrant délit de sa première manière, quand il a en lui du novateur (en langage), du téméraire éloquent, un peu de Lacordaire, si j’ose m’exprimer ainsi. […] Tel est l’effet que vous font certaines de ces premières hardiesses de Bossuet, avant qu’on soit fait et aguerri à sa manière, et avant que lui-même il ait acquis toute sa gravité et son autorité. […] Je ne connais à Bossuet orateur que deux manières : celle de Metz où il s’essaye, celle de Paris où il excelle. […] Dans sa troisième manière, qui date de l’Oraison funèbre de la reine d’Angleterre (1669), ce sont les sujets qui sont plus en vue et plus glorieux ; mais, lui, il ne fera qu’y appliquer les puissances qu’il possédait déjà, et les magnificences dont bien souvent jusqu’alors il ne savait que faire.
Dans un siècle où la dévotion était de mise, au moins dans les manières, elle n’en a que l’indispensable ; son esprit purement ambitieux et humain croit à la vertu de M. de Vendôme bien plus qu’à celle d’une oraison, et juge les débats théologiques avec une supériorité tout à fait mondaine. […] Par principe de prudence, comme par principe d’humilité, elle affecta de se rapetisser et de s’effacer au milieu de tant de grandeurs ; les calamités de toutes sortes, qui affligeaient la France et la famille de Louis XIV, lui inspirèrent un découragement trop naturel pour ne pas être vrai, qu’il entrait dans ses vues et ses manières d’exagérer encore. […] « Le seul art dont j’oserais soupçonner madame de Sévigné, dit madame Necker, c’est d’employer souvent des termes généraux, et, par conséquent, un peu vagues, qu’elle fait rassembler, par la façon dont elle les place, à ces robes flottantes, dont une main habile change la forme à son gré. » La comparaison est ingénieuse ; mais il ne faut pas voir un artifice dans cette manière de madame de Sévigné, non plus que dans celle de mesdames des Ursins et de Maintenon : c’est la manière de l’époque et l’un des mérites inséparables de son style.
Cette science de la divination était la sagesse vulgaire de laquelle étaient sages les poètes théologiens, premiers sages du paganisme ; de cette théologie mystique, ils s’appelaient eux-mêmes mystæ, et Horace traduit ce mot d’une manière heureuse par interprètes des dieux… Cette sagesse ou jurisprudence plaçait la justice dans l’accomplissement des cérémonies solennelles de la religion ; c’est de là que les Romains conservèrent ce respect superstitieux pour les acta legitima ; chez eux les noces, le testament étaient dits justa lorsque les cérémonies requises avaient été accomplies. […] La réputation des jurisconsultes romains était fondée sur leur cavere ; répondre sur le droit, ce n’était pour eux autre chose que précautionner les consultants, et les préparer à circonstancier devant les tribunaux le cas contesté de manière que les formules d’action s’y rapportassent de point en point, et que le préteur ne pût refuser de les appliquer. […] Cette équité s’attachait religieusement aux paroles de la loi, les suivait avec une sorte de superstition, et les appliquait aux faits d’une manière inflexible, quelque dure, quelque cruelle même que pût se trouver la loi. […] En effet les gouvernements doivent être conformes à la nature des gouvernés (axiome 69) ; les gouvernements sont même un résultat de cette nature, et les lois doivent en conséquence être appliquées et interprétées d’une manière qui s’accorde avec la forme de ce gouvernement.
Rien de plus judicieux que le Chapitre qui concerne Hérodote ; celui qui est intitulé, de la nécessité de l’Histoire, de son usage, de la maniere dont il faut y mêler les sciences, en la faisant lire à un Prince, est rempli de préceptes sages, de réflexions saines, de critiques justes & bien présentées. […] Cordemoi annonce par-tout des idées saines sur la maniere d’écrire l’Histoire, & celle de France en particulier ; on peut en juger par quelques-unes de ses réflexions. « Il faut, dit-il, marquer, autant qu’on le peut, les temps & les lieux, la maniere dont on vivoit dans chacun des pays qu’on parcourt dans le récit ; ne raconter que les grands événemens, & n’écrire en détail que les causes des grands changemens.
Chacun des trois volumes des précédentes éditions représentait la manière de l’auteur à trois moments, et pour ainsi dire à trois âges différents ; car, sa méthode consistant à amender son esprit plutôt qu’à retravailler ses livres, et, comme il l’a dit ailleurs, à corriger un ouvrage dans un autre ouvrage, on conçoit que chacun des écrits qu’il publie peut, et c’est là sans doute leur seul mérite, offrir une physionomie particulière à ceux qui ont du goût pour certaines études de langue et de style, et qui aiment à relever, dans les œuvres d’un écrivain, les dates de sa pensée. […] Ainsi le petit nombre de personnes que ce genre d’études intéresse pourra comparer, et pour la forme et pour le fond, les trois manières de l’auteur à trois époques différentes, rapprochées, et en quelque sorte confrontées dans le même volume. […] Les Ballades complètent ce volume, qui, de cette manière, est, comme l’autre, divisé en trois sections.
Comme poëte, comme artiste, comme écrivain, on a souvent rabaissé sa qualité de sentiment, sa manière de faire ; il a eu peine à se pousser, à se classer plus haut que la vogue, et malgré son talent redoublé, malgré ses merveilleuses délicatesses d’observation, à monter dans l’estime de plusieurs jusqu’à un certain rang sérieux. […] Il a sa manière, mais vacillante, inquiète, cherchant souvent à se retrouver elle-même. On sent l’homme qui a écrit trente volumes avant d’acquérir une manière ; quand on a été si long à la trouver, on n’est pas bien certain de la garder toujours. […] Mais, à partir de 1809, les manières de Balthazar s’altèrent graduellement ; une passion secrète le saisit et l’arrache bientôt à tout, à la société, aux tulipes, même aux joies domestiques dont il se repaissait avec candeur. […] Cette figure de Mme Claës, où les hésitations magnétiques et les projections fluides des regards sont prodiguées, de même que le sont dans le portrait de Balthazar les idées dévorantes distillées par un front chauve, m’a bien fait concevoir le genre de portraits de Vanloo et des autres peintres chez qui des détails charmants et pleins de finesse s’allient à une flamboyante et détestable manière, à une manière sans précision, sans fermeté, sans chasteté. « Les personnes contrefaites qui ont de l’esprit ou une belle âme, dit M. de Balzac à propos de son héroïne peu régulière, apportent à leur toilette un goût exquis.
« Il est certain, mon Révérend Père, que je me suis conduit dans la Congrégation d’une manière irréprochable. […] J’ai d’ailleurs les manières honnêtes et l’humeur assez douce ; je rends volontiers service ; je hais les murmures et les détractions ; je suis porté d’inclination au travail, et je ne crois pas vous avoir déshonoré dans les petits emplois dont j’ai été chargé. […] « Je ne crois pas qu’on se plaigne de la manière dont je suis sorti de Saint-Germain. […] Au reste, Jordan n’est pas en défense contre l’éloquent abbé ; il se laisse gagner à ses manières civiles, au charme abondant de cette parole qu’on voit d’ici se dérouler ; et à quelques pages plus loin, on lit dans le courant du Journal : « J’eus une conversation fort agréable avec M. […] Ce supérieur général, grossier, sans naissance, sans mérite, aux manières dures, et qui ne fait nul cas des savants parce qu’il ignore jusqu’aux premiers éléments des sciences, n’est autre peut-être que celui à qui Prévost adressait cette lettre railleuse et à demi menaçante en partant ; je le soupçonne fort d’être le général de la Congrégation de Saint-Maur, dom Alidon en personne.
Un Fénelon gâté et sans aucun frein, une manière d’Ovide à demi mystique, parlant du ciel et s’occupant de la terre, vous êtes-vous jamais figuré une combinaison de ce genre-là ? […] La seule conséquence que je veuille tirer de cette date récente, est toute littéraire ; elle porte sur un défaut qui affecte désormais la manière de M. de Lamartine, même à ses meilleurs moments. […] Sa manière, que nous avons connue si noble d’abord, un peu vague, mais pure, s’est gâtée ; elle dément à chaque instant ses premiers exemples et ses modèles. […] Remarquez que ce n’est pas précisément tel ou tel mot qui me paraît grave, car alors on pourrait l’enlever aisément, c’est la veine elle-même, qui tient à une modification profonde dans la manière de voir et de sentir du poète. […] Il a fini, sans trop y penser peut-être, par opérer un singulier mélange, par adopter cette manière étrangère sans renoncer pour cela à la sienne propre, par faire entrer, en un mot, du Balzac dans du Bernardin.
Tassaert s’est préoccupé de la manière de Delacroix ; néanmoins il a su garder une couleur originale. […] La couleur en est terne et vulgaire, et le fantastique ne gît que dans la manière dont la scène est représentée. […] C’est surtout dans la race humaine que l’infini de la variété se manifeste d’une manière effrayante. […] Gautier cherche à amollir un peu sa manière. […] Il revient de temps à autre à sa manière naturelle, qui est celle de tout le monde.
., auxquels je dois ici témoigner publiquement ma reconnaissance pour la manière dont ils ont accueilli cette nouvelle tentative philosophique. […] Je me bornerai donc, dans cet avertissement, à déclarer que j’emploie le mot philosophie dans l’acception que lui donnaient les anciens, et particulièrement Aristote, comme désignant le système général des conceptions humaines ; et, en ajoutant le mot positive, j’annonce que je considère cette manière spéciale de philosopher qui consiste à envisager les théories, dans quelque ordre d’idées que ce soit, comme ayant pour objet la coordination des faits observés, ce qui constitue le troisième et dernier état de la philosophie générale, primitivement théologique et ensuite métaphysique, ainsi que je l’explique dès la première leçon. […] Mais je n’ai pas dû choisir cette dernière dénomination, non plus que celle de philosophie des sciences, qui serait peut-être encore plus précise, parce que l’une et l’autre ne s’entendent pas encore de tous les ordres de phénomènes, tandis que la philosophie positive, dans laquelle je comprends l’étude des phénomènes sociaux aussi bien que de tous les autres, désigne une manière uniforme de raisonner applicable à tous les sujets sur lesquels l’esprit humain peut s’exercer.
Ce serait un moyen d’éclairer ce morceau d’une manière bien piquante. […] Et puis une lumière douce, diffuse sur toute la composition comme on la voit dans la nature, large, s’affaiblissant ou se fortifiant d’une manière imperceptible. […] Ce n’est pas la manière de Rubens ; ce n’est pas le goût des écoles italiennes.
Il utilise à sa manière ces symboles consacrés. […] Leur symbolisme a pour but, d’une manière générale, de rendre le mystère saisissable en toutes choses. […] Il y a donc, si je ne me trompe, dans cette manière d’argumenter, quelque chose comme un cercle vicieux. […] De manières, il semblait plutôt anglais, par une sorte de correction voulue et d’humour flegmatique. […] S’il est idéaliste, d’une certaine manière, ce n’est pas pour transformer l’esprit en un absolu.
Enfin, monsieur, voyez si cette idée vous plaît : je n’y tiens qu’autant qu’elle vous agréera pleinement. » Et dans cette même lettre datée de Turin, 19 décembre 1819, on lit : « On ne saurait rien ajouter, monsieur, à la sagesse de toutes les observations que vous m’avez adressées, et j’y ai fait droit d’une manière qui a dû vous satisfaire, car toutes ont obtenu des efforts qui ont produit des améliorations sensibles sur chaque point. […] En vérité l’ouvrage est à vous autant qu’à moi, et je vous dois tout, puisque sans vous jamais il n’aurait vu le jour, du moins à son honneur. » M. de Maistre revient à tout propos sur cette obligation, et d’une manière trop formelle pour qu’on n’y voie qu’un remercîment de civilité obligée. […] Deplace refuse, comme on le pense bien, et d’une manière qui ne permet pas d’insister ; mais les termes mêmes de l’offre peuvent donner la mesure de l’obligation, telle que l’estimait M. de Maistre. […] Il en faut (j’entends de l’impertinence) dans certains ouvrages, comme du poivre dans les ragoûts. » Ceci rentre tout à fait dans la manière originale et propre, dans l’entrain de ce grand jouteur, qui disait encore qu’un peu d’exagération est le mensonge des honnêtes gens. — A un certain endroit, dans le portrait de quelque hérétique, il avait lâché le mot polisson ; prenant lui-même les devants et courant après : « C’est un mot que j’ai mis là uniquement pour tenter votre goût, écrivait-il. Vous ne m’en avez rien dit ; cependant des personnes en qui je dois avoir confiance prétendent qu’il ne passera pas, et je le crois de même. » Mais, de ces mots-là, quelques-uns ont passé par manière d’essai, pour tenter notre goût aussi, à nous lecteurs français, lecteurs de Paris : nous voilà bien prévenus.
Quelle que soit la manière dont elle doive le juger un jour, l’Histoire littéraire la lui conservera. […] En général, les poètes, et même les plus grands, restent asservis à l’inspiration qui fit leur gloire et continuent de vivre soumis au despotisme d’une manière, pratiquée longtemps. […] On le croyait enraciné dans sa manière ; il lui a poussé d’autres racines. […] C’est un romantique, et qui n’a jamais (sa seule manière d’être Vestale !) […] III Je viens, en effet, de les retrouver ici même, ces gambades, appelées un jour : Odes funambulesques ; je viens de les retrouver dans cette édition définitive, et malgré la préface très spirituelle dans laquelle l’auteur traduit à sa manière et à son profit les critiques qu’on en a faites autrefois, j’en pense, pour ma part, identiquement ce que j’en pensais à, l’époque où Malassis, séduit — comme dit M. de Banville — par le paroxisme de la chose, les publia dans une édition bigarrée comme la jaquette d’un saltimbanque et digne de ces arabesques de Rythme et de Rime d’un lyrisme si enivré qu’il en semblait fou6.
Pour que la vie soit possible, en effet, il faut deux conditions : d’abord, que la nature soit réellement intelligible, puis que l’être vivant réagisse d’une manière intelligente. […] D’autre part, la nature n’accorde le succès qu’à celui qui a su prévoir sa marche, qu’à l’être qui réagit d’une manière intelligente et raisonnable, qu’il en ait ou non conscience. […] Après le rôle actif et volitif du principe d’intelligibilité, voyons de quelle manière son rôle proprement intellectuel s’est de plus en plus développé. […] En outre, cette cause peut être conçue de deux manières : soit comme inférieure, soit comme supérieure à la pensée. […] Celle-ci est une manière de se représenter, à notre image, les raisons explicatives qui nécessitent et les phénomènes et leur ordre.
— Voyager, dit-il encore dans cette lettre, est une manière d’allonger la vie. […] Quincy (22 avril 1779), de ce que vous racontez de la politesse française et des manières honnêtes que montrent les officiers et l’équipage de la flotte. […] En envoyant ce portrait à ses amis d’Amérique, il faisait remarquer, par manière d’excuse, ce caractère propre à la nation française, de pousser l’éloge à l’extrême, tellement que la louange ordinaire, toute simple, devient presque une censure, et que la louange extrême finit, à son tour, par devenir insignifiante. […] En même temps, il faut ajouter (dût-on y trouver quelque contradiction) qu’il était difficile, à ceux qui l’entendaient, de ne pas prendre feu, et de ne pas être tentés de réformer radicalement la société ; car il était lui-même, dans ses manières générales de voir et de présenter les choses, un grand, un trop grand simplificateur. […] Ce ne sera pas tout à fait une nouveauté pour vous, car vous pouvez vous rappeler que nous jouions ensemble de cette manière durant l’hiver à Passy.
Si vous voulez exprimer sous forme toute littéraire cette distinction que je fais entre le ton du poète à ses débuts et sa manière ensuite perfectionnée, je dirai qu’il y a deux La Fontaine, l’un avant et l’autre après Boileau. […] Son originalité est toute dans la manière, et non dans la matière. […] Mais sa seconde manière commence plus distinctement et se déclare, ce me semble, avec son second recueil, au VIIe livre qui s’ouvre par la fable des Animaux malades de la peste. […] Réduisant l’opinion de M. de Lamartine à son véritable sens, j’y cherche moins encore une erreur de son jugement qu’une conséquence de sa manière d’être et de sentir. […] Mme de Staël et M. de Chateaubriand, en survenant à l’heure propice, éveillèrent, chacun à sa manière, le goût du mystérieux ou de l’infini ; il y eut une génération où plus d’un esprit ressentit de ces malaises et de ces désirs inconnus à nos pères.
Leur manière et leur talent ressemblent à cette « verge couverte d’yeux » à laquelle Amelot de la Houssaye comparait la République de Venise. […] C’est un balzacien qui tient à Balzac par la manière de peindre, et, par sa nature, à quelques-uns de ses héros. […] La manière rapide, mouvementée, colorée, très chaude et très connue de Fervaques, y domine. Il aura emporté Bachaumont dans son torrent, Bachaumont, dont la manière agrafante disparaît par trop dans la sienne. […] Fervaques, le balzacien, ne s’est donc pas rappelé la manière de son maître, cette pensée du profond Balzac, planant éternellement sur les drames qu’il raconte, en ses romans sublimes ?
Telle était donc cette manière de magistrat revêtu d’une double confiance : de celle du maître qui le laissait gouverner à sa manière, et de celle des élèves à qui il ne venait même pas dans l’idée que Grandin pût rien rapporter d’eux à David, hors ce qui regardait la rentrée exacte des fonds, ce qui se faisait régulièrement. […] Ainsi que Granet, Ingres n’a changé ni de physionomie ni de manières depuis son adolescence. […] Né au sein d’une des familles patriciennes de Genève, il joignait à l’élégance des manières cette modestie qui résulte d’une excellente éducation. […] Cette fois il a satisfait de la manière la plus heureuse à la condition d’unité si impérieuse dans les ouvrages d’art. […] Souvent le maître, au milieu de ses disciples, faisait allusion à la manière tendue et pénible du peintre d’Hippocrate.
Là est surtout l’originalité de Doré, là est la magie, mais aussi le danger de sa manière. Une telle manière (et si réussie !) […] Il a des manières de faire flotter des plumes sur la tête qui dispensent de la tête ! […] Ses Illustrations des Contes drolatiques sont un progrès dans sa manière et donnent un intérêt de plus à ce chef-d’œuvre, aux yeux de ceux pour qui la lutte d’un vigoureux talent avec un vigoureux génie est un spectacle digne d’attention, de sympathie et même de respect. […] Tout ce qui a plume en a écrit, attendu que le privilège du génie est de faire jaser les hommes qui pensent, ou qui ne pensent pas, comme des portières, et même sur la manière dont il prend sa clé pour aller se coucher !
Xavier de Maistre ; son frère, dans sa manière supérieure, s’en permet souvent, et laisse sentir la recherche. […] S’il appartient à la France par le langage, on peut dire qu’il tient déjà à l’Italie par la manière de conter. […] Pourquoi lui faire dire en termes exprès par manière d’enseignement au lecteur : « Tout le secret de ma patience est dans cette unique pensée : Dieu le veut. […] Ici je m’étais pris au nom de son aimable frère par manière de prélude et comme à de faciles et gracieuses prémices d’un sujet plus sévère. […] Le chapitre xix, où tombe cette larme de repentir, pour avoir brusqué Joannetti, et le chapitre xxviii, où tombe une autre larme, pour avoir brusqué le pauvre Jacques, sont tout à fait dans la manière de Sterne.
La Bacchante, pièce célèbre dans cette première manière, et qui vise déjà à l’ode, offre des défauts de style qui ne tiennent pas du tout au désordre de l’égarement ni à la flamme. […] Cette gaudriole qui, au fond et malgré les pensées sérieuses, lui est si naturelle, joue et circule dans toute sa première manière ; elle traverse la seconde ; elle se retrouve jusque dans sa dernière. […] Madame Grégoire est une chanson large et franche de la première manière. […] On pourrait continuer cette manière de critique sur la plupart des pièces, et je ne fais qu’indiquer la voie. […] Je suis trop poli pour dire ce que je pense de cette manière d’interpréter les écrits, d’user et d’abuser de quelques paroles plaintives, et après tout senties, de poète et d’artiste ; je croyais que M. de Pontmartin laissait ce procédé trop facile et trop simple à M.
Revenons et demandons-nous, quand on relit aujourd’hui ces poésies de la première manière de Mme de Girardin, ce qu’il en faut penser. […] Ce que je dis là, Mme de Girardin elle-même semble l’avoir senti, et elle l’a exprimé à sa manière bien mieux que moi. […] Mais, à la manière dont Mme de Girardin décrit les alentours, les personnages secondaires, et l’oncle fat, et la duchesse coquette, et l’héritière parée, il est évident qu’elle a déjà passé au portrait, à l’observation fine et satirique. […] L’auteur, dans l’ensemble du style, a changé, ou du moins modifié sa manière. […] Et pourtant, au fond, malgré ces déguisements, malgré ces greffes étrangères, je crois reconnaître encore beaucoup du même style d’autrefois, le vers sonore, spécieux, tout extérieur, se permettant parfois l’enflure et parfois la manière.
Ailleurs, dans un petit Traité de la vieillesse, elle parlera de la dévotion, non pas comme d’un faible, mais comme d’un soutien à mesure qu’on avance en âge : « C’est un sentiment décent et le seul nécessaire… La dévotion est un sentiment décent dans les femmes, et convenable à tous les sexes. » Cette manière d’envisager la religion est irréprochable au point de vue social et moral ; mais le vrai chrétien demande davantage, et je conçois que le digne M. de La Rivière n’ait pas été entièrement satisfait, à cet égard, des dispositions de son amie. […] Dès ce premier écrit adressé à son fils, on distingue aisément en elle et on lui reconnaît des qualités mâles, fières et fines, une manière de voir qui suppose beaucoup de discernement et d’analyse, et une manière de dire qui sort toujours du commun. […] Elle-même nous dit son secret en parlant à sa fille : « Contez peu ; narrez d’une manière fine et serrée : que ce que vous direz soit neuf, ou que le tour en soit nouveau. » C’est cette nouveauté qui paraissait du néologisme à quelques honnêtes contemporains, et qui faisait accuser Mme de Lambert de prétention. […] Parlant de son ami La Motte, et pour caractériser la facilité de ses dons naturels, elle dira : « Ces âmes à génie, si l’on peut parler ainsi, n’ont besoin d’aucun secours étranger. » Le comparant pour ses qualités de fabuliste à La Fontaine, et répondant à ceux qui ont sacrifié l’un à l’autre : « Ils ont cru, dit-elle, qu’il n’y avait pour la fable que le simple et le naïf de M. de La Fontaine ; le fin, le délicat et le pensé de M. de La Motte leur ont échappé. » Le pensé de M. de La Motte est curieux et bien trouvé, mais cela sent la manière. […] Ce ne sont pas toujours les fautes qui nous perdent, c’est la manière de se conduire après les avoir faites.
L’Assemblée constituante y est saluée la première assemblée d’hommes raisonnables : on a la séance du Jeu de paume, la nuit du 4 Août, résumées en manière d’allégorie, et vues dans une sorte de lanterne magique abstraite. […] Je n’ai point à discuter le fond des choses : il suffit que la majorité des hommes en ces matières sente autrement que Volney pour que sa manière de voir, qui tend à s’imposer, soit fausse moralement. […] « La France veut une religion », lui dit un jour le consul : Volney ne comprit pas ce mot simple et vrai ; il y répondit d’une manière irritante, faite pour enflammer la colère, et toute amitié cessa49. […] Je ne sais si je m’abuse, mais il me paraît être sa vivante image ; il rappelle son ton apprêté, sa manière sentencieuse et lente de s’exprimer. […] Au mot si vrai du consul : « La France veut une religion », il répondit par manière de défi : « La France veut les Bourbons !
Il est inspiré par un goût naturel, par la mobilité de l’âme, par la sensibilité, c’est l’image même de l’âme rendue par les inflexions de la voix, les nuances successives, les passages, les tons d’un discours accéléré, ralenti, éclatant, étouffé, tempéré en cent manières diverses. écoutez le défi énergique et bref de cet enfant qui provoque son camarade. écoutez ce malade qui traîne ses accents douloureux et longs. […] Je préfère cette manière ; elle demande plus de fécondité, elle fournit plus au génie, tout se déploie et se fait valoir, c’est un instant d’une action générale, c’est un poëme, les trois unités y sont ; au lieu qu’à la manière de Loutherbourg, deux ou trois objets principaux, un ou deux énormes chevaux couvrent le reste. […] L’ordonnance de ce combat de mer différera de peu de l’ordonnance du combat de terre ; tant ce technique ou la manière de pyramider du centre de la toile vers le fond est bornée. à droite, dans la demi-teinte, ainsi qu’à l’un des deux combats précédens, vaisseau et combattants dont les armes à feu sont dirigées vers un autre bâtiment qui fait le sommet de la pyramide et la masse principale. […] Ce projet n’a point eu lieu, parce qu’il était embarrassé de différentes difficultés qui disparaissent en suivant la manière simple dont je l’ai conçu. […] Il a de la couleur, il peint d’une manière ragoûtante et facile ; ses effets sont piquans.
Telle était aussi la belle et poétique manière de Platon ; tel est le secret du charme inimitable que l’usage demi-croyant, demi-sceptique des mythes populaires donne à sa philosophie. […] disent-elles, il n’y en a pas deux qui disent de la même manière 38. […] Il est certain que deux hommes qui auraient reçu exactement la même culture et fait les mêmes études verraient exactement de la même manière, bien qu’ils puissent sentir très différemment. […] C’est ce que Hegel entendait dire, quand il avance que chaque penseur est libre de créer le monde à sa manière. […] Leur bon sens est la manière de voir de leur siècle ou de leur province.
Tout se réduit toujours à des manières différentes de vibrer, et l’organisme tout entier pourrait être comparé à une lyre vivante dont les cordes, d’abord à l’unisson, finiraient par se tendre de diverses manières et par rendre des sons divers sous la diversité des ondes vibratoires qui viennent les ébranler du dehors. […] D’une manière plus ou moins analogue naît en nous la perception des qualités, qui répondent aux manières différentes dont les objets agissent et dont nous réagissons. […] Ne faut-il pas toujours en venir à quelque chose qui soit senti d’une manière immédiate, à quelque « marque » qui se laisse apercevoir en elle-même et par elle-même ? […] Tout au contraire, il faut dire que la sensation n’est pas raisonnée, ni d’une manière consciente, ni encore moins d’une manière inconsciente, mais qu’elle est sentie par un sentiment immédiat. […] Tout ne se passerait pas de la même manière dans le monde s’il n’y avait aucune sensation et seulement des mouvements non sentis.
Il a su également traiter la critique d’une maniere intéressante, pleine de sel, d’agrémens, de politesse, & de modération ; ce qui le rend supérieur à ses Adversaires, du moins par la maniere de combattre, sur-tout à Madame Dacier, qui, dans la dispute sur les Anciens, employa quelquefois le ton du pédantisme & de l’âcreté. « On vit paroître dans la lice, dit M. de Fontenelle, d’un côté le Savoir, sous la figure d’une Dame illustre ; de l’autre, l’Esprit, je ne veux pas dire la Raison, car je ne prétends pas toucher au fond de la dispute, mais seulement à la maniere dont elle fut traitée.
Mais voici la manière dont je suis parvenu à la connaissance de tout ce détail. […] On n’y voit nul vide ; tout est couvert de cette manière-là. […] Le portail est caché dans un détour, à côté d’une grande et haute tour ; de manière qu’on ne le saurait voir qu’en mettant le pied dessus. […] Il n’y a point d’endroit qui ne soit peint d’or et d’azur, et orné d’une manière à exciter aux plaisirs de l’amour. […] Elles sont faites de plâtre, peintes et dorées d’une manière fort agréable.
On souffre de mille manières, on souffre par des sentiments divers, opposés, contradictoires ; et nul n’a le droit de contester à qui que ce soit sa douleur. […] Il y a un singulier genre d’erreur dans la manière dont la plupart des hommes considèrent leur destinée. […] Mais ceux qui se représentent les Anglais comme des hommes d’un caractère froid, se laissent tout à·fait tromper par la réserve de leurs manières. […] Le génie est à plusieurs égards, populaire : c’est-à-dire, qu’il a des points de contact avec la manière de sentir du plus grand nombre. […] Leur esprit est plus enclin à l’action qu’à la réflexion, et cette manière d’être les distrait des peines de l’existence.
Sans doute pour ceux qui persistent, à la manière vulgaire, à ne contempler que les formes extrêmes des deux, cette assertion paraîtra incroyable. […] Qu’ils se suivent les uns les autres d’une manière particulière, l’existence même de l’intelligence en est un témoignage. […] Imaginez maintenant que ces innombrables expériences de positions relatives soient soudainement ravivées, qu’elles deviennent présentes à la conscience d’une manière distincte. […] Il n’y a pas trois manières de philosopher radicalement opposées, mais une méthode de philosopher qui reste en essence la même. […] Évidemment cela n’est possible que d’une manière.
Car, la plupart du temps, l’organisme ne réagit guère, du moins d’une manière apparente ; et pourtant nous érigeons encore en grandeur une hauteur de son, une intensité de lumière, une saturation de couleur. […] Il est aisé de voir que l’intensité de toute sensation représentative doit s’entendre de la même manière. […] Selon qu’on augmente ou qu’on diminue le nombre des sources de lumière, les arêtes des corps ne se détachent pas de la même manière, non plus que les ombres qu’ils projettent. […] En effet, si la cause extensive varie d’une manière continue, la sensation colorée change d’une manière discontinue, passant d’une nuance à une autre nuance. […] Supposez, en effet, que j’éprouve une sensation S, et que, faisant croître l’excitation d’une manière continue, je m’aperçoive de cet accroissement au bout d’un certain temps.
L’autre développe d’une manière un peu plus précise et plus circonstanciée le véritable sujet de la pièce. […] Racine a donné, dans Andromaque et dans Iphigénie, deux modèles admirables de la manière dont un épisode doit être lié à l’action. […] Voyez encore la manière dont Voltaire, dans Sémiramis, a lié à son sujet l’amour d’Arsace et d’Azéma ; et dans Mahomet, celui de Palmire et de Séide. […] Les anciens ne connaissaient point les pièces épisodiques ; mais ils avaient une autre manière d’attaquer en même temps plusieurs espèces de ridicules et de les immoler à la fois. […] C’est encore, ce me semble, une manière indirecte de manquer au dialogue, que de faire sortir des personnages qui devraient attendre qu’on leur répondît, ou de faire rester ceux qui devraient répondre.
Hugo laissent entre eux, pour le talent et la manière, de grandes inégalités, des lacunes que l’examen de ses autres ouvrages peut seul aider à combler ; ils n’offrent pas en eux-mêmes une continuité bien distincte, une loi de croissance aussi évidente, par exemple, que celle qui se manifeste dans la série de ses productions lyriques. […] Je ne dis pas que ce drame, fait à dix-huit ans, sera le meilleur et le plus mûr ; mais c’est celui par lequel le jeune homme débute, c’est la première manière de Schiller. […] Puis, lorsque plus tard encore il vit sans doute qu’illusions pour illusions il ne fallait pas être trop dédaigneux des premières, il revint à Bug, le remania, conserva le cadre, mais le redora en mille manières, enrichit le paysage de ces couleurs où la Muse lui avait récemment appris à puiser, compliqua les événements, introduisit entre ses personnages le seul sentiment qui ait un attrait souverain pour la jeunesse, et d’où sortent les rivalités, les perfidies, les sacrifices, les incurables blessures ; il mit l’amour, il montra la douce Marie. […] Cet autre roman étrange, moins brillant, moins haut en couleur que le Bug-Jargal définitif, et plus analogue à la manière sobre et précise des premières odes dont il forme le lien avec les secondes, fut compris de travers à sa naissance, et on y chercha je ne sais quelle inspiration désordonnée, au lieu de le classer parmi les romans chevaleresques dont il remplissait à la rigueur toutes les conditions. […] Durant toute cette portion finale de Notre-Dame, l’orchestre lyrique, l’orgue en quelque sorte, pourrait jouer, par manière d’accompagnement, Ce qu’on entend sur la Montagne, cette admirable et lugubre symphonie des Feuilles d’Automne.
Elle l’a été, cette fois, de la manière la plus heureuse, et d’autant mieux que la solution en a été toute pacifique. […] Il n’y aurait, après tout ce qui a été dit, qu’une manière de rajeunir le sujet, ce serait de le prendre d’un peu près et de l’étudier plus familièrement. […] Soumet a eu plus d’une manière : la première atteignit son plein développement dans Saül et dans Clytemnestre ; la seconde, de plus en plus vaste et qui se ressentait des exemples d’alentour, qui y puisait des redoublements d’émulation et des surcroîts de veine, ne se déclara en toute profusion que par la Divine Épopée. […] Malgré les différences extrêmes dans le degré de croissance et d’épanouissement, une même remarque s’appliquerait toutefois aux deux manières. […] Au-dessus de ces sept ou huit volumes qui tenaient sur un seul rayon, on voyait, en manière de trophée, une plume d’aigle donnée par Émile Deschamps, et avec laquelle Soumet était censé avoir écrit son poëme ; il vous la montrait sans sourire ; mais bientôt toutes ces solennités d’apparat ne tenaient pas, et quelque plaisanterie soudaine, quelque frivolité spirituelle venait plutôt trahir le trop peu de sérieux du fond.
J’ai cité, dans les notes ajoutées à cet ouvrage, les autorités sur lesquelles j’ai fondé les opinions littéraires qu’on a attaquées1 : je me bornerai donc, dans cette préface, à quelques réflexions générales sur les deux manières de voir en littérature, qui forment aujourd’hui comme deux partis différents, et sur l’éloignement qu’inspire à quelques personnes le système de la perfectibilité de l’espèce humaine. […] Mais cette manière d’être affectée n’a que des rapports très indirects avec le plan général de mon ouvrage ; et celui qui aurait des opinions tout à fait contraires aux miennes sur les plaisirs de l’imagination, pourrait encore être entièrement de mon avis sur les rapprochements que j’ai faits entre l’état politique des peuples et leur littérature ; il pourrait être entièrement de mon avis sur les observations philosophiques et l’enchaînement des idées qui m’ont servi à tracer l’histoire des progrès de la pensée depuis Homère jusqu’à nos jours. […] Il en est de même d’une manière d’écrire exagérée ; ce sont des expressions froides dont on fait des expressions fausses. […] J’ai répété néanmoins de diverses manières que la plupart des inventions poétiques nous venaient des Grecs, que la poésie des Grecs n’avait été ni surpassée ni même égalée par les modernes 4 : mais je n’ai pas dit, il est vrai, mais je n’ai pas dit, il est vrai, que depuis près de trois mille ans les hommes n’avaient pas acquis une pensée de plus ; et c’est un grand tort dans l’esprit de ceux qui condamnent l’espèce humaine au supplice de Sisyphe, à retomber toujours après s’être élevée. […] Je crois avoir essayé la première d’appliquer ce système à la littérature ; mais j’attache un grand prix à montrer combien de philosophes respectables ont, avant moi, soutenu victorieusement cette opinion, considérée d’une manière générale ; et je ne pense pas, comme un littérateur de nos jours, que ce soit la charmante pièce de vers de Voltaire, intitulée Le Mondain, qui ait donné l’idée de la perfectibilité de l’espèce humaine, et qui contienne l’extrait de tout ce qu’il y a de meilleur dans les longues théories sur cette perfectibilité.
Mais les autres danses des anciens, où l’on imitoit l’action des gens qui ne sautent pas, et, pour parler à notre maniere, qui ne dansent point, n’étoit qu’une imitation des démarches, des attitudes du corps, des gestes, en un mot de toutes les démonstrations dont les hommes accompagnent ordinairement leurs discours, où dont ils se servent quelquefois pour donner leurs sentimens à comprendre sans parler. […] Quelque peu sensé que fut élagabale, il ne dansoit point à notre maniere dans les circonstances où Dion dit que cet empereur dansoit. […] Rien ne convient moins qu’un habillement long à un homme qui danse à notre maniere. […] Dans l’Asie, les coutumes, la maniere de se vêtir, enfin les usages nationnaux, n’ont jamais été aussi sujets au changement qu’ils l’ont été, et qu’ils le sont encore dans les parties occidentales de l’Europe. […] On peut bien couper la viande en gesticulant, mais non pas en dansant à notre maniere.
c’est bien léger pour Vacquerie, qui a du Hun ou plutôt du han dans la manière, et qui peut passer pour le cosaque indiscipliné et toujours présent de son parti dispersé. […] L’auteur, — qui est poète à sa manière, qui a fait Tragaldabas, un drame qu’on aurait dit une parodie de Hugo et qui n’était qu’une caricature par adoration, — l’auteur a voulu, comme son maître, théoriser ses pratiques théâtrales, et comme il avait réverbéré la poésie de Hugo en la décomposant, il a voulu aussi réverbérer ses théories. […] Il vient de la faire vibrer d’une manière charmante. […] Shakespeare, traduit filialement par un fils de Hugo. » Et l’on admire cette douce manière, ces mignardises aimables, ce baissement de voix dans un homme dont le verbe est si haut quand il proclame ses adorations ! […] Il a telles pages qui, dans la manière de Hugo, sont plus brillantes que celles de son maître Hugo est vaincu par Vacquerie.
Ces Poètes, qui, du reste, se nomment eux-mêmes des artistes, et qui ont réellement plus d’art dans leur manière que de génie et d’inspiration, travaillent leur langue comme un sculpteur travaille son vase, comme un peintre lèche son tableau, et nous donnent au xixe siècle une seconde édition affaiblie de la Renaissance qui, elle aussi, avec le large bec, ouvert et niais, d’un Matérialisme affamé, happait la forme et s’imaginait tenir le fond, l’âme et la vie ! […] Lui, le byronien des anciens jours, n’a gardé de son byronisme que les nuances humaines qui appartiennent à toutes les âmes, car Byron, dont l’admiration a fait une manière, et à qui l’affectation en avait donné une, n’est plus qu’humain dans la partie vraiment supérieure de ses œuvres, dans la partie qui ne croulera pas. […] Roger de Beauvoir n’a pas cessé, comme il le dit dans une des strophes qui expriment le mieux la nuance caractéristique de sa manière ; « … De boire à la coupe rose Que lui tendait le Printemps ! […] Ce n’est pas tout que d’avoir, en beaucoup d’endroits, spiritualisé sa manière, il faut de plus spiritualiser son inspiration. […] À nos yeux c’est un livre charmant en beaucoup d’endroits et qu’on peut regarder comme un progrès dans la manière de l’auteur, mais nous espérons bien que ce progrès sera suivi d’un autre ; que là n’est pas le dernier effort du poète et son dernier résultat.
Les premiers regardent ces éloges comme une justice rendue à des citoyens utiles, ou qui ont voulu l’être ; comme une manière de plus d’honorer les arts ; comme un tribut de l’amitié entre les hommes qui ont été unis par le désir de s’instruire ; comme des matériaux pour l’histoire de l’esprit humain ; enfin, comme un encouragement et une leçon qui apprennent aux citoyens de toutes les classes que le mérite peut quelquefois tenir lieu de fortune et attirer aussi le respect. […] À l’égard de sa manière, car il en a une, la finesse et la grâce y dominent, comme on sait, bien plus que la force ; il n’est point éloquent, ne doit et ne veut point l’être, mais il attache et il plaît. D’autres relèvent les choses communes par des expressions nobles : lui, presque toujours, peint les grandes choses sous des images familières : cette manière peut être critiquée, mais elle est piquante. […] Il est aisé de voir en quoi l’auteur de ces nouveaux éloges diffère de Fontenelle ; la différence de leur manière vient de celle de leur âme. […] Ce mélange d’imagination et de philosophie, de sensibilité et de force, ces expressions, tantôt si énergiques et tantôt si simples, ces invocations si passionnées, ce désordre, ces élans, et ensuite ces silences, et, pour ainsi dire, ces repos ; enfin cette conversation avec son lecteur, quelquefois si douce, et d’autrefois si impétueuse, tout cela s’empare de l’imagination d’une manière puissante, et laisse l’âme à la fin dans une émotion vive et profonde.
On possède bien des observations de fausse reconnaissance : elles se ressemblent d’une manière frappante ; elles sont souvent formulées en termes identiques. […] Ils semblent introduire dans l’esprit certaines manières nouvelles de sentir et de penser. […] Il est douteux qu’on puisse les expliquer tous de la même manière. […] Le souvenir pur ne pourra dès lors être décrit que d’une manière vague, en termes métaphoriques. […] De là deux moi différents dont l’un, conscient de sa liberté, s’érige en spectateur indépendant d’une scène que l’autre jouerait d’une manière machinale.
Je n’en sais rien, mais je croirais aisément que Fanny a dû être conçue et écrite par manière de gageure comme Adolphe, c’est-à-dire « pour convaincre deux ou trois amis incrédules de la possibilité de donner une sorte d’intérêt à un roman dont les personnages se réduiraient à deux, et dont la situation serait toujours la même ». […] J’essayai donc de mille manières de fixer son attention : je ramenai la conversation sur des sujets que je savais l’intéresser ; nos voisins s’y mêlèrent : j’étais inspiré par sa présence ; je parvins à me faire écouter d’elle ; je la vis bientôt sourire : j’en ressentis une telle joie, mes regards exprimèrent tant de reconnaissance, qu’elle ne put s’empêcher d’en être touchée. […] Avec une politesse exquise qui excluait toute forme familière et nous tenait à distance l’un de l’autre comme il l’entendait, mais avec une tranquillité d’accent et une manière courtoise, il se mit immédiatement à conduire le discours, et je ne pus m’empêcher de le suivre. […] La différence des manières saute aux yeux. […] C’est une autre question qu’on ne peut s’empêcher de se poser d’abord après avoir lu Fanny, et qui tient surtout à la manière réelle, poignante et saignante, dont toutes choses y sont présentées. — À cette question, les réponses ne sont pas unanimes.
Feuillet à l’origine et dans sa première manière (car il en a eu deux, ou du moins sa première manière a pris, depuis, un second et très-grand développement), il faut voir où en était juste le roman lorsqu’il débuta, quels en étaient les sujets habituels et le ton dominant. […] Feuillet a eu l’art de faire du mariage une galanterie et une bonne fortune : piquante manière, et la seule peut-être à la lecture, de le remettre en bonne odeur, de le rafraîchir et de le raviver. […] Il a refait à sa manière, et en prétendant beaucoup, le Camp des Bourgeoises, il l’a refait orné, élégant, tout semé de surprises agréables, et de grandes dames n’ont pas dédaigné d’en être : elles ont voulu l’ennoblir en y passant3. Je me disais l’autre jour combien sa manière avait gagné en crédit, en voyant le Bout de l’an de l’amour de Théodore Barrière, un joli petit acte qui, par l’intention, pourrait être de M. […] Il baptise à merveille l’auteur des Scènes et Proverbes dans sa première manière. — Nos petits-neveux, pour apprécier le piquant du mot, devront savoir qu’il y avait en ce temps-là un journal utile et moral très-répandu, le Musée des Familles.
Ce séjour du digne monarque avec les légers embarras, avec les étonnements et les surprises qui l’accidentèrent, nous est raconté par M. de Senfft d’une manière agréable et fine. […] Je juge les événements avec calme, j’envisage les dangers sans les craindre ; mais je dois dire la vérité à Votre Majesté, et je désire qu’elle ait assez de confiance en moi pour s’en rapporter à ma manière de voir. […] Bignon, dans ses Souvenirs, a un avantage sur M. de Senfft dont il ne prévoyait pas les sévérités : il le réfute de la manière la plus propre à faire impression sur des lecteurs impartiaux ; il parle avec justice, et dans une parfaite mesure, de celui qui en a manqué à son égard : « M. de Sentit, dit-il, était en 1811 et est resté jusqu’à la fin de 1812 zélé partisan du système français (on le croyait, et il paraissait tel sans l’être au fond). […] Tout d’abord l’abbé de Pradt était intervenu d’une manière indiscrète et intempestive. […] Après le dîner, on le mit sur Mirabeau ; Victor Hugo venait précisément de publier sa brochure, et M. de Pradt partit de là pour caractériser à sa manière le grand tribun.
Les esprits désintéressés & connoisseurs l’ont déjà placé dans le très-petit nombre de nos Ecrivains qui ont un caractere à eux, & dont il est aisé de distinguer, au premier coup-d’œil, la maniere. […] Cet Auteur seroit-il moins estimable, en se montrant plus attentif à rejeter l’esprit de systême, qui lui fait envisager les choses du côté le plus singulier ; à éviter de certaines discussions, propres à faire briller l’éloquence, à la vérité, mais rarement d’accord avec l’exactitude & la solidité du jugement ; à interdire à son imagination quelques essors un peu trop libres ; & à retrancher de sa maniere d’écrire, des expressions, qui, pour être pittoresques & supposer la facilité la plus heureuse, n’en sont pas toujours, pour cela, conformes à la dignité du style & à la sévérité du goût ? […] On fait que, pendant qu’il étoit occupé à défendre son honneur & son état contre les principaux Membres du Corps des Avocats, dont l’amour-propre jaloux se croyoit intéressé à l’éloigner du Barreau, plusieurs Champions de la Secte Encyclopédique & Economique ont choisi ce moment pour se déchaîner contre lui d’une maniere aussi injuste que peu loyale.
En effet, cette manière d’écrire l’histoire d’une époque, en la tournant autour d’un livre considérable ou d’une œuvre justement exhumée, nous semble plus intéressante, plus concentrée et plus vivante que l’histoire qui se déploie d’elle-même, dans son ordre chronologique et dans le mouvement général de ses événements. […] « Le Roman bourgeois — dit avec raison Asselineau — est le premier roman d’observation qu’ait produit la littérature française. » La manière de l’auteur, ce vieux raillard, comme parlerait Rabelais (le père à tous de ces observateurs ricanants de la nature humaine et du monde), la manière de l’auteur, incisive, colorée, gauloise, étreignant la réalité, et quelquefois jusqu’au cynisme, est caractérisée avec beaucoup de bonheur par Charles Asselineau.
Il est bien entendu qu’en insistant à dessein et par manière d’exemple sur les mérites de Pope, je ne fais à l’ouvrage de M. […] La rime l’a conduit à des oppositions, à des redoublements d’antithèses dans des tours de phrases limités, ce qui est son fort à lui, mais ce qui est contraire à la large manière homérique et à ce plein fleuve naturel, courant à toutes ondes, continu, épandu et sonore. […] Pope, à la façon de La Bruyère, et avec la difficulté comme avec l’agrément de là rime en plus, y a resserré constamment « le plus de pensée dans le moindre espace » : c’est le principe de sa manière. […] Consistante dans nos folies et dans nos fautes, la nature, honnête en cela et sincère, finit comme elle a commencé. » Et je traduirai à ma manière les exemples qu’il varie agréablement, et qui seraient moins familiers pour nous. […] J’emprunte ces jugements à l’un des plus fins et des plus exacts critiques anglais. — Voir trois Leçons données à Oxford sur la manière de traduire Homère, par M.
Car, « pour se laisser tomber à plomb et de si haut, il faut que ce soit entre les bras d’une affection solide, vigoureuse et fortunée : elles sont rares, s’il y en a. » À cette manière dont il parle, on voit assez que La Boétie dès longtemps n’était plus. […] Le peuple surtout, le vrai peuple, celui qui est victime et non pillard, les paysans de ses environs le touchent par la manière dont ils supportent les mêmes maux que lui et pis encore. […] Il ne saurait y avoir au-dessus d’un tel chapitre, à titre de consolation dans les calamités publiques, qu’un chapitre de quelque autre livre non plus humain, mais véritablement divin, d’un livre qui ferait sentir la main de Dieu partout, et non point par manière d’acquit comme le fait Montaigne, mais la main réellement présente et vivante. […] Pour juger de sa manière, il suffit de l’ouvrir à toute page indifféremment et de l’écouter discourant sur n’importe quel sujet ; il n’en est aucun qu’il n’égaie et qu’il ne féconde. […] Son livre est un trésor d’observations morales et d’expérience ; à quelque page qu’on l’ouvre et dans quelque disposition d’esprit, on est assuré d’y trouver quelque pensée sage exprimée d’une manière vive et durable, qui se détache aussitôt et se grave, un beau sens dans un mot plein et frappant, dans une seule ligne forte, familière ou grande.
— si elles ont résisté, en raison d’une supériorité invincible, à des travaux scaligériens qui devaient les tuer après les avoir hébétées, elles y sont cependant nécessairement réduites ; car ne pas avoir employé des facultés comme elles devaient être employées constitue toujours, en plus ou en moins, une manière de les abolir. […] Dès les premières lignes de son ouvrage, en effet, Édelestand du Méril a classé, avec la prestesse du coup d’œil le plus net et le plus agile, les travaux insuffisants de ses devanciers sur la question de la comédie, et fait pressentir, par la manière dont il en parle, la supériorité des siens. […] Attachés, ils secouent leurs attaches, et c’est leur manière de les secouer qui prouve leur grandeur et leur force. […] Ceux qui le lurent furent surtout saisis, comme d’une charmante nouveauté, de la manière dont du Méril avait envisagé, pénétré et même peint la société chinoise, et ceux-là qui aiment toutes les formes de l’histoire convinrent qu’il avait mis la main sur la plus difficile et la plus piquante. […] Moraliste à la manière de Théophraste et de La Bruyère, mais peintre avec une tout autre manière, sur laquelle je veux insister.
nous avons une manière un peu plus mâle de concevoir l’impartialité, et nous sommes certain que Xavier Aubryet, qui a la pureté et la fierté du sens critique, la partage. […] Aussi individuel que qui que ce soit dans sa manière de caractériser les œuvres et les hommes, Aubryet est cette rareté de tous les temps, devenue presque introuvable dans le nôtre, le diamant bleu de Μ. […] c’est Alceste, mais Alceste mélancolique, nerveux, sentimental, rageur d’une toute autre manière : Alceste un peu romantisé… Il a quarante-deux ans, l’âge d’Alceste, l’âge des grands Séducteurs comme des grands Dégoûtés. […] Il les a peintes à la renverse… Il les a peintes hardiment, — cruellement pour elles, mais voluptueusement pour lui et pour tous ceux qui lui ressemblent, à ce distingué de sensation qui est aussi à sa manière un patricien. […] Raphaël, un simple et un mélodieux… En nous rabattant vers Aubryet, nous trouvons aussi un précieux à sa manière.
Chateaubriand a fait connaître au monde une nouvelle manière de sentir. […] Il a toutes les manières de bien composer une œuvre d’art pur. […] Il y a deux manières de bien écrire, dont la première est de bien penser. […] Mais encore, c’était d’une manière particulière. […] Toute langue humaine est une manière de mythologie.
J’ai dit que c’étaient deux petits Wouwermans, et cela est vrai pour les sujets, la manière, la couleur et l’effet. […] Mais la nature étant une, comment concevez-vous, mon ami, qu’il y ait tant de manières diverses de l’imiter et qu’on les approuve toutes ? […] Quoi donc, s’il arrivait que l’on me présentât un morceau si bien fait de tout point dans la manière de Raphaël, de Rubens, du Titien, du Dominiquin, que moi et tout autre s’y trompât, l’artiste n’aurait-il pas exécuté une belle chose ? […] Je le laissai dire, mais tout bas je lui répondais, au dedans de moi-même : oui, quand on est un pauvre diable comme toi, quand on ne se peint que des images triviales ; mais quand on a de la verve, des concepts rares, une manière d’appercevoir et de sentir originale et forte, le grand tourment est de trouver l’expression singulière, individuelle, unique, qui caractérise, qui distingue, qui attache et qui frappe.
Section 15, observations concernant la maniere dont les pieces dramatiques étoient représentées sur le théatre des anciens. […] J’ai vû en Italie des opera représentez de cette maniere, et personne ne les trouvoit un spectacle ridicule. Les opera qu’un cardinal illustre se plaisoit à faire executer de cette maniere-là, quand il étoit encore jeune, plaisoient même beaucoup, parce que les marionnettes qui avoient près de quatre pieds de hauteur approchoient du naturel. […] Lorsque les romains se déterminerent pour le genre de la déclamation, où le geste et la prononciation s’executoient souvent par des acteurs differens, ils connoissoient depuis plus de six vingt ans la maniere de réciter naturelle, qui est la nôtre.
il ne s’agissait que d’être un homme simple et droit, que la Philosophie n’aurait pas gauchi à l’avance, pour recevoir pleinement dans son âme l’impression de ces faits énormes, sans analogues dans l’histoire, et avec lesquels on se croit quitte quand on a prononcé d’une certaine manière les mots bien vite dits de Barbarie et de Féodalité. […] il est bien évident que de telles manières de s’exprimer et d’écrire impliquent des manières de regarder et de voir entièrement à l’envers du temps qu’on veut peindre. Et encore l’envers des choses les retourne, mais ne les brise pas, tandis que le masque de prose appliqué par les mains bourgeoises de Labutte sur le poétique et gigantesque facies du xe siècle fait bien plus que de le défigurer, il le diminue, et diminuer, en histoire, c’est la pire manière de travestir.
Du Bellay n’atteint le meilleur de sa manière que quand son système s’est détendu ; mais il ne lui a pas nui d’avoir passé par le système qui lui a donné la méthode et raffermi le ton. […] Il y aurait, si l’on voulait être complet, à ne point séparer, en Du Bellay à Rome, le poète latin du poète français : car, poète latin, il l’a été aussi à sa manière alors, et avec une véritable distinction. […] On savait déjà quelque chose de ces tracas nouveaux et opiniâtres qui accueillirent Du Bellay de retour en France : une lettre de lui adressée au cardinal, en manière de défense et d’apologie, n’en laisse plus rien ignorer. […] Le Recueil des Regrets porte un extrait de Privilège daté de Paris le 7 janvier 1557. — Je crois que ce 1557 revient à 1558, d’après la manière encore en usage dans les actes publics de commencer l’année : je pose la question plutôt que je ne la résous. […] Il contient les poésies de la seconde manière.
D’autres fois, ces personnages secondaires servent à développer d’une manière piquante et profonde les caractères principaux. […] Pour faire de Wallstein un personnage tragique à la manière française, il aurait suffi de fondre ensemble de l’ambition et des remords. […] L’admiration dont il est l’objet chez les Allemands tient à leur manière de considérer l’amour, et cette manière est très-différente de la nôtre. […] Il y a de la vérité dans ces deux manières de voir ; mais suivant qu’on adopte l’une ou l’autre, l’amour doit occuper, dans la poésie comme dans la morale, une place différente. […] Cette manière de voir se fait remarquer dans leurs institutions et dans leurs mœurs, comme dans leurs productions littéraires.
M. de Marivaux, enfin, eut une maniere de voir à lui, & une maniere d’écrire qui répondoit à sa maniere de voir. […] La maniere des deux Auteurs n’est pas la même. […] Combiner son sujet de maniere que l’instruction ne nuise point à l’agrément, ni l’agrément à l’instruction. […] Grace aux progrès de la raison, les temps & la maniere de voir sont changés. […] Chacun les éprouve & les rend à sa maniere.
Cette manière d’entendre la nature, la bonne nature, cette chambrière de Dieu, comme elle se qualifie (véritable chambrière en effet d’un Dieu des bonnes gens), a eu, depuis Jean de Meun, sa continuation par Rabelais, Regnier, La Fontaine lui-même, Chaulieu. […] Madame de Sévigné sentait la nature à sa manière, et la peignait au passage, en charmantes couleurs, quoique ayant une prédilection décidée pour la conversation et pour la société mondaine. […] Mais la nouveauté était aussi dans sa manière et dans son pinceau ; il mêlait aisément aux tableaux qu’il offrait des objets naturels, le charme des plus délicieux reflets ; il avait le pathétique, l’onction dans le pittoresque, la magie. […] Montesquieu, Bodin et Aristote n’étaient pas ses maîtres ; pour sa manière de concevoir et de régler la société, comme pour sa méthode d’étudier et d’interpréter la nature, il remontait vite par une sorte d’attrait filial dans l’échelle des âmes, jusqu’à la sagesse de Pythagore et de Numa. […] La manière dont Bernardin de Saint-Pierre envisageait la femme s’accorde à merveille avec sa façon de sentir la nature ; et c’est presque en effet (pour oser parler didactiquement) la même question.
On cherchera vainement une théorie du comique qui réponde d’une manière satisfaisante à cette question très simple. […] On pouvait être tenté de définir le comique de cette dernière manière. […] C’était là une manière empirique de procéder. […] Au sens le plus large du mot, il semble qu’on appelle esprit une certaine manière dramatique de penser. […] Parler des petites choses comme si elles étaient grandes, c’est, d’une manière générale, exagérer.
Dans la première, les termes se conditionnent d’une manière tout à fait déterminée, de sorte que l’apparition de chaque nouveau terme pouvait être prévue. […] Les mêmes raisons qui font que nos perceptions se disposent en continuité rigoureuse dans l’espace font donc que nos souvenirs s’éclairent d’une manière discontinue dans le temps. […] La sensation est instable ; elle peut prendre les nuances les plus variées ; au contraire le mécanisme moteur, une fois monté, fonctionnera invariablement de la même manière. […] Un mot d’une langue étrangère, prononcé à mon oreille, peut me faire penser à cette langue en général ou à une voix qui le prononçait autrefois d’une certaine manière. […] Et nous avons expliqué comment la lésion cérébrale pouvait occasionner cet affaiblissement, sans qu’il faille supposer en aucune manière une provision de souvenirs accumulée dans le cerveau.
Nous connoissons de lui plusieurs Satires, qui, sans annoncer un successeur à Boileau, prouvent que personne, jusqu’à présent, n’a plus approché de la maniere de ce Satirique, soit pour le fond des choses, soit pour la tournure des vers. […] Clément est moins gênée, plus flexible, plus variée ; elle fait enchaîner ses périodes d’une maniere différente, rouler son style avec autant de noblesse que de simplicité, & se ménager des repos qui contribuent à l’harmonie. […] C’est beaucoup, sans doute, de dire de bonnes choses ; pourquoi ne pas s’attacher à les dire d’une maniere piquante, qui leur donneroit un nouveau prix ?
Il a craint sans doute qu’on ne le soupçonnât d’avoir voulu lutter contre Horace, qui, dans une de ses Épîtres, a mis en vers cet Apologue d’une manière beaucoup plus piquante et plus agréable. […] Chacun d’eux résolut de vivre en gentilhomme, Sans rien faire… Voilà un trait de satyre qui porte sur le fond de nos mœurs, mais d’une manière bien adoucie. […] La Fontaine se plaît toujours à développer le caractère du renard, et il le fait sans cesse d’une manière gaie et comique.
Mais tandis qu’il y a tant de manières différentes d’écrire qui chacune ont leur mérite particulier, n’y aurait-il qu’une seule manière de bien peindre [?] […] Cet inconvénient tient à une manière de faire qui double l’effet du tableau pour le moment.
Il y avait même en lui quelque chose, comme style, manières et opinions, de Victor Jacquemont. […] Un homme, à qui on pourrait plus légitimement le comparer pour la tenue extérieure et pour les manières serait M. […] Elle s’inquiète peu, — trop peu, pensent quelques-uns, — de la manière dont M. […] Cette voix mystérieuse chante d’une manière permanente le remède universel dans l’œuvre de Dupont. […] Elle traduit à sa manière, et par les moyens qui lui sont propres.
Chacun le citait comme autorité & l’interprêtait à sa maniere. […] Un moderne le prouva encore d’une maniere plus étendue. […] Il peignait son héros d’une maniere aussi touchante que vraie. […] On y retrouvait le génie de Tacite, sa maniere de voir & sa maniere d’écrire. […] C’est une maniere qui n’appartient qu’à l’Auteur ; mais cette maniere est grande & digne de l’Epopée.
Boileau, dont cette pièce des Fâcheux devançait la manière en la surpassant, y songeait sans doute quand il demanda trois ans plus tard à Molière où il trouvait la rime. […] Non que j’admette que ce poëme du Val-de-Grâce soit bon et satisfaisant d’un bout à l’autre, ou que Molière ait modifié, ralenti sa manière en le composant. […] Comme Talma encore, Molière était grand et somptueux en manière de vivre, riche à trente mille livres de revenu, qu’il dépensait amplement en libéralités, en réceptions, en bienfaits. […] Vauvenargues, dans son dialogue de Molière et d’un jeune homme, a fait exprimer au poëte-comédien, d’une manière touchante et grave, ce sentiment d’une position incomplète. […] Mais bientôt, en l’embrassant d’une plus équitable manière, en la comparant, selon la philosophie et l’art, avec d’autres renommées des nations voisines, il l’a mieux comprise encore et respectée.
Ceci se rattache à la remarque la plus essentielle dans une appréciation littéraire de Fléchier : il appartient, par le goût et par la manière à la société de l’hôtel de Rambouillet, et aux gens de lettres de la première Académie dont il était en quelque sorte l’élève ; c’est là, c’est dans ce double cercle qu’il prit son pli à l’heure où son talent se forma, et il le garda toujours, même en se développant par la suite et en s’élevant ; mais il ne se renouvela point. […] Il est une classe de femmes du monde qu’il ne conseille pas de voir, les coquettes, les joueuses, etc. ; mais, celles-là exceptées, il ne pense point que le commerce habituel avec des personnes du sexe qui ont du mérite puisse être blâmé et interdit ; bien au contraire : Il y a, dit-il, une certaine manière de vivre avec les femmes que l’on peut voir, qui en rend le commerce agréable : et quelle est cette manière, sinon celle de l’honnêteté et de la bienséance ? […] Fléchier, à sa manière, fit donc comme eux, il écrivit ses historiettes et son voyage, il tint son journal. […] De ces défauts il gardera les uns jusqu’à la fin85, et il les fondra dans cettes manière compassée et ornée, qui, s’appuyant d’une période nombreuse et d’une parfaite justesse de diction, composera son éloquence. […] Ce récit, en style de procès-verbal, vient contrôler utilement l’élégante chronique de Fléchier, et il la confirme de tout point. « Il en prouve, suivant moi, l’authenticité de la manière la plus évidente. » C’est la conclusion d’un magistrat exact et consciencieux, M.
Ont-ils cette grossièreté, ce regard émoussé, cette face dégradée qui, je le dis avec tristesse et sans l’idée d’un reproche, est la manière du peuple ? […] Dieu étant l’idéal de chacun, il en convient que chacun le façonne à sa manière et sur son propre modèle. […] Ni le polythéisme ancien, qui renfermait aussi une si grande part de vérité, ni l’Inde, si savante sur Dieu, ne comprirent les choses de cette manière. […] L’origine des jugements sévères que nous en portons est dans la ridicule manière dont la mythologie nous est présentée. […] Telle est ma manière : au village, je vais à la messe ; à la ville, je ris de ceux qui y vont.
D’abord, parce que l’effet de ce style, qui nous saute aux yeux, est connu, et que Flaubert ne peut plus bénéficier de la nouveauté de sa manière. […] Or, la vulgarité n’est jamais belle, et la manière dont on la peint ne l’ennoblissant point, ne peut pas l’embellir. […] Je dis, enfin, qu’il n’y a plus à s’occuper de Flaubert qu’au seul cas où il changerait de système et de manière, et il n’en changera pas. […] C’est la petite boîte ronde, impossible à ouvrir qu’elle lui donnera s’il l’embrasse, et sa manière de l’embrasser, elle ! […] Mais, dans une société qui n’a plus d’âme, qui est aussi incapable d’idéalisme que d’idéal, cette manière de voir et de rendre la nature devait avoir un grand succès, et Flaubert l’eut, et il l’a encore.
On n’a jamais eu à un plus haut degré que Saint-Évremond le sentiment vif des ridicules, ni une manière plus légère de les exprimer. […] Il écrit avec délicatesse, souvent avec recherche et manière, toujours avec esprit ; mais il ne grave rien, il ne creuse pas, il n’enfonce pas. […] La manière d’écrire de Saint-Évremond n’est pas tout à fait celle que célèbrent et préconisent les partisans déclarés du grand siècle : elle est distinguée, elle n’est pas simple. […] Les défauts premiers de la manière de Racine sont bien saisis : le poëte prête trop de tendresse aux anciens héros ; il les fait trop amoureux, trop galants, trop Français : Saint-Évremond a trouvé déjà toutes ces critiques, tant répétées depuis. […] Cette mort de la duchesse de Mazarin a fait une sorte de mystère, et la manière dont Saint-Évremond en parle dans une lettre à M. de Canaples n’est pas tout à fait en contradiction avec ce qu’une relation plus secrète est venue révéler.
Et si, par la délicatesse exquise de sa modestie, il sort un peu de la manière plus couramment démocratique des mœurs de son pays, il y rentre tout à fait par cette énergie et cette faculté de résistance, qui ne s’affiche pas, mais se retrouve toujours. […] Vinet, à Lausanne, sinon à Bâle, est à sa place ; il a une originalité qui reproduit et condense heureusement les qualités de la Suisse française, et, en même temps, il a une langue en général excellente, attique à sa manière, et qui sent nos meilleures fleurs. […] Je ne sais que la manière de M. […] Vinet, d’une manière moins éparse heureusement, représente et réalise, en écrivain de premier ordre, tout l’autre côté de prose ingénieuse, d’originale et savante culture. […] Il se rapprocherait beaucoup de Duguet pour la manière et le tour modéré, suivi, fin et rentré, si Duguet avait été plus littérateur.
Ce désir, qui lui était commun avec tous ses camarades, se montrait en lui d’une manière plus ridicule et plus grossière, parce qu’à la bassesse plate et vile qui, comme je le dis, était la base de son caractère, il joint une bêtise et une bonne opinion de lui qui en fait l’ornement. […] Cependant MM. les capitaines des gardes, et nommément M. de Beauvau et M. le duc d’Ayen, s’en formalisèrent d’une manière qui me parut ridicule ; car ce changement, en procurant plus de tranquillité au roi, n’attentait nullement à leurs droits, et ne les confondait pas avec plus de monde, puisque la chambre où l’on plaçait leurs entrées était interdite à tous ceux qui ne les avaient pas. […] Les médecins le rassuraient, caractérisant sa maladie de fièvre catarrheuse ; mais ils montraient plus d’inquiétude dans la manière dont ils le traitaient que dans leurs paroles. […] La manière dont les médecins avaient annoncé à Mesdames la petite vérole du roi leur parut, non pas un présage, mais une assurance de guérison. […] La manière de Bordeu est tranchante, assez franche, même quelquefois dure.
Telle fut la manière de Hamilton. […] Le poème des Bohémiens nous le fait voir plus confiant en lui-même et se frayant sa voie à sa manière. […] À mon avis, les Bohémiens offrent comme le résumé le plus fidèle de la manière et du génie de Pouchkine. […] Telle est aussi sa manière dans ses poésies lyriques, où il est peut-être le plus admirable. Bien qu’il soit impossible de traduire des vers et surtout des vers lyriques en vile prose, j’essayerai pourtant de donner un exemple de sa manière.
Manière et personnalité. […] Or, il faut distinguer la manière de la personnalité : elle est à celle-ci ce que le paraphe est à la signature. La manière tient à des particularités dans l’expression, à des habitudes du pinceau, de la plume ou de l’ébauchoir ; elle ne se confond pas toujours avec l’afféterie comme le suppose le langage courant, mais son défaut est d’arrêter un peu trop à des formes extérieures qu’elle disjoint ainsi de leur contenu ; elle signifie l’Individu au lieu de signifier l’Homme et n’est pas la conséquence nécessaire de la personnalité : Chopin, Grieg, Schumann ont une manière très visible ; le grand Bach n’en a point mais n’est-il pas plus personnel ? […] Le génie et le talent ont souvent leur manière, il est vrai, — Rembrandt, Hugo en sont la preuve aussi bien que M. […] La « manière » est d’ailleurs peu sensible chez M.
Les révolutions doivent se faire pour des principes acquis, et non pour des tendances qui ne sont point encore arrivées à se formuler d’une manière pratique. […] Mais cette manière de voir a vieilli ; l’esprit humain a passé de l’absolu à l’historique ; il envisage désormais toute chose sous la catégorie du devenir. […] Nous raisonnons de la même manière relativement à l’émancipation des noirs. […] Ce revirement s’opère ordinairement de la manière que voici. […] Nous sommes indignés de la manière dont l’homme est traité en Orient et dans les États barbares, et du peu de prix que l’on y fait de la vie humaine.
Cette maniere de procéder est si peu conforme à la droiture & à la décence, que les Esprits les plus bornés ont démêlé sans peine l'intention coupable de l'Auteur. […] Les Ecrits philosophiques se sont si fort multipliés de nos jours, la Philosophie ou l'Incrédulité est tellement devenue à la mode parmi nous, que la seule maniere aujourd'hui d'écrire avec fruit pour la Religion, est de chercher à diminuer, à détruire, s'il est possible, l'autorité que les prétendus Philosophes ont acquise sur l'opinion publique. […] D'ailleurs, M. l'Abbé Yvon & les autres Apologistes de la Religion, ne l'ont vengée de ces imputations, que d'une maniere foible & succincte. […] Ce qu’ils enseignent d’utile, la Religion nous l’avoit appris avant eux, & d’une maniere plus modeste & plus simple. […] Nous n’ignorons pas que les Philosophes incrédules traitent cette force, cette magnanimité, d’illusion & de fanatisme ; & c’est en quoi ils prouvent, de la maniere la plus évidente, la perversité de leurs sentimens.
On serait tenté de voir là une pointe de raillerie moqueuse, mais c’était sa manière. […] Dans la critique qu’il faisait de ces lettres qui lui plaisaient moins, il remarquait certaines manières de dire nouvelles, tout à côté d’autres locutions trop usées et trop communes, quelque chose qui n’était pas assez poli ni assez soigné, et qui, pour tout dire, n’était pas assez à la Balzac : « Et aliquid non satis politum et accuratum, et, ut ita dicam, non satis Balzacianum. […] Il supposa d’abord inexactement que M. de Girac avait blâmé Voiture de ce qu’il n’écrivait point du tout dans le goût de Balzac, nihil Balzacianum, ce que M. de Girac n’avait pas exprimé de la sorte ni dans ces termes absolus : Il dit (c’est Costar qui parle) que M. de Voiture n’écrit pas de votre manière ; qu’il ne parle pas Balzac ; qu’il ne tient rien de ce noble caractère qui relève si fort vos pensées et vos paroles. […] Boileau, qui de bonne heure en fut investi, devait rendre au procès son vrai caractère et y apporter la vraie conclusion : il mit les parties dos à dos, et prononça l’arrêt sans appel par un tour, et un procédé bien simple, en contrefaisant la manière de l’un et de l’autre écrivain dans deux lettres charmantes. C’est, en effet, la meilleure critique et la plus décisive : on ne contrefait dans les écrivains que la manière, on ne contrefait pas la pensée, et chez tous deux, pour qu’on les pût imiter si bien et à s’y méprendre, c’était évidemment la pensée qui faisait faute.
. — Elle est polie et facile de manières, mais Allemande et ordinaire. […] Vous jugez ce que c’est qu’une habitude de vingt-six ans, et de la manière dont nous vivions ensemble ! […] Sa parole suave, ses manières sans apprêt, sa familiarité rassurante, élevaient tout de suite ceux qui l’approchaient à son niveau. […] Elle avait « une manière judicieuse et tranquille d’envisager les choses. » Ne lui demandez plus rien de romanesque. […] Et quand les choses se sont ainsi passées d’une manière presque semblable, dans des circonstances analogues, c’est qu’il y avait raison, c’est qu’il y a excuse pour qu’il en soit ainsi.
Nisard à concevoir l’histoire de la littérature française d’une manière originale et féconde, et lui a inspiré une idée qui est comme la trame de tout son livre et qui lui assure une valeur philosophique. […] Cette pensée fondamentale de l’auteur donne à son livre une grande force et une grande unité ; on peut trouver sans doute que cette manière abstraite de juger les œuvres et les écrivains conviendrait mieux à un métaphysicien qu’à un critique. […] Et, d’ailleurs, cet amour du spéculatif, cet isolement de toute société, ce retranchement des intérêts et des sentiments humains, tout cela, n’est-ce pas aussi une sorte d’humeur, une manière d’être individuelle ? […] Est-il au monde une manière de penser plus personnelle, plus individuelle que celle de Pascal ? […] On est utopique en considérant comme un idéal absolu et éternel l’état de choses dans lequel on vit ; on l’est en rêvant un état nouveau : Bossuet est utopique de la première manière, Fénelon de la seconde.
C’était une description large, transparente et très significative, des divers degrés de décroissement dans la foi par où passent les antiques religions avant de finir, et il indiquait en même temps sa manière de concevoir les croyances recommençantes. […] Mignet a touché d’une manière juste le passage de Jouffroy dans la politique. […] Sa vraie supériorité est dans la manière dont il entend et dont il traite l’histoire, non pas celle de ce temps-ci et qui se passe sous nos yeux (elle est trop mobile et trop variable à chaque instant), mais l’histoire morte et telle qu’elle se refait après coup. […] Mignet a également une manière à lui, large, brillante, majestueuse, un peu carrée, éminemment faite pour la façade et le frontispice. Il l’a notablement ornée et même assouplie, cette manière, dans les derniers de ses discours.
Je n’aime point cette manière de recopier un mot heureux et de vivre à satiété sur le passé. […] La Popularité, quelles que soient les objections qu’on y puisse faire comme comédie, est de la meilleure manière de M. […] Aujourd’hui que l’opinion publique, soit littéraire, soit politique, se détend un peu, il a fait trêve à cette déviation toujours savante, mais sensiblement contrainte, de son talent ; il est rentré, avec ce soin qui ne se lasse pas, dans sa manière vraie, dans celle qu’il doit aimer, j’imagine, de préférence. […] Delavigne, en prenant son sujet plus au sérieux, a réussi également, à sa manière, dans la voie de comédie moyenne qu’il s’est choisie. […] Par la Popularité, il est rentré dans sa manière plutôt que dans ses sujets : il pourra mieux choisir.
Tout ce qu’on en voyoit au dehors inspiroit de la piété ; on admiroit la manière grave et touchante dont les louanges de Dieu y étoient chantées, la simplicité et en même temps la propreté de leur église, la modestie des domestiques, la solitude des parloirs, le peu d’empressement des religieuses à y soutenir la conversation, leur peu de curiosité pour savoir les choses du monde et même les affaires de leurs proches ; en un mot, une entière indifférence pour tout ce qui ne regardoit point Dieu. […] Est-ce à dire pourtant que le caractère dramatique manque entièrement à cette manière de faire parler des personnages ? […] C’est le cas de Racine lorsqu’on vient à lui en quittant Molière ou Shakspeare : il demande alors plus que jamais à être regardé de très-près et longtemps ; ainsi seulement on surprendra les secrets de sa manière : ainsi, dans l’atmosphère du sentiment principal qui fait le fond de chaque tragédie, on verra se dessiner et se mouvoir les divers caractères avec leurs traits personnels ; ainsi, les différences d’accentuation, fugitives et ténues, deviendront saisissables, et prêteront une sorte de vérité relative au langage de chacun ; on saura avec précision jusqu’à quel point Racine est dramatique, et dans quel sens il ne l’est pas. […] Mais en général il me paroît, jusque dans sa prose, ne parler point assez simplement pour exprimer toutes les passions. » Il faut se souvenir que l’auteur de cet étrange jugement avait la manière d’écrire la plus antipathique à Molière qui se puisse imaginer. […] D’où il résulte aussi que vouloir ériger ce style en style-modèle, le professer à tout propos et en toute occurrence, y rapporter toutes les autres manières comme à un type invariable, c’est bien peu le comprendre et l’admirer bien superficiellement, c’est le renfermer tout entier dans ses qualités de grammaire et de diction.
La protection des princes d’Italie a donc beaucoup contribué à la renaissance des lettres ; mais elle a dû mettre obstacle aux lumières de la philosophie ; et ces obstacles auraient subsisté, lors même que la superstition religieuse n’aurait pas altéré de plusieurs manières la recherche de la vérité. […] Ils se moquent de leur propre manière d’être. […] Une foule d’historiens en Italie, et même les deux meilleurs, Guichardin et Fra-Paolo, ne peuvent, en aucune manière, être comparés, ni à ceux de l’antiquité, ni, parmi les modernes, aux historiens anglais. […] L’affectation est de tous les défauts des caractères et des écrits celui qui tarit de la manière la plus irréparable la source de tout bien, car elle blase sur la vérité même dont elle imite l’accent. […] Pétrarque perdit sa mère lorsqu’elle n’avait encore que trente-huit ans ; il fit un sonnet sur sa mort, composé de trente-huit vers, pour rappeler, par l’exactitude de ce nombre, d’une manière assurément bien touchante et bien naturelle, le regret qu’il avait d’avoir perdu sa mère à cet âge.
Mais de quelque manière qu’on considère ces réflexions, je reviens aux considérations générales qui s’appliquent à tous les pays et à tous les temps sur les obstacles et les malheurs attachés à la passion de la gloire. Quand les difficultés des premiers pas sont vaincues, il se forme à l’instant deux partis sur une même réputation ; non, parce qu’il y a deux manières de la juger, mais parce que l’ambition parle pour ou contre : celui qui veut être l’adversaire des grands succès reste passif, tant que dure leur éclat, et c’est pendant ce temps, au contraire, que les amis ne cessent d’agir en votre faveur ; ils arrivent déjà fatigués à l’époque du malheur, lorsqu’il suffit au public du mobile seul de la curiosité, pour se lasser des mêmes éloges ; les ennemis paraissent avec des armes toutes nouvelles, tandis que les amis ont émoussé les leurs, en les faisant inutilement briller autour du char de triomphe. On se demande pourquoi l’amitié a moins de persistance que la haine ; c’est qu’il y a plusieurs manières de renoncer à l’une, et que pour l’autre le danger et la honte sont partout ailleurs que dans le succès. Les amis peuvent si aisément attribuer à la bonté de leur âme l’exagération de leur enthousiasme, à l’oubli qu’on a fait de leurs conseils, les derniers revers qu’on a éprouvés ; il y a tant de manières de se louer en abandonnant son ami, que les plus légères difficultés décident à prendre ce parti ; mais la haine, dès ses premiers pas, engagée sans retour, se livre à toutes les ressources des situations désespérées ; de ses situations dont les nations, comme les individus, échappent presque toujours, parce que l’homme faible même ne voit alors de secours possible que dans l’exercice du courage. […] Les soldats jugent leur général, la nation ses administrateurs : quiconque a besoin du suffrage des autres, a mis, tout à la fois, sa vie sous la puissance du calcul et du hasard, de manière que le travail du calcul, ne peut lui répondre des chances du hasard, et que les chances du hasard, ne peuvent le dispenser du travail du calcul.
Qui donc sait qu’un physicien illustre, dont le nom est marqué dans la science d’une manière ineffaçable, Ampère, a consacré plus de temps peut-être aux méditations philosophiques qu’à ses études de mathématiques et de physique, et qu’il a travaillé en commun avec Maine de Biran au renouvellement de la métaphysique ? […] Ainsi le problème était posé tout à fait de la même manière et par Kant et par Biran. […] Un être qui se connaît soi-même se connaît-il de la même manière que les choses externes, à savoir par des manifestations, par des apparences derrière lesquelles il y aurait une inconnue, un x, supposé et conclu par une induction soit directe, soit discursive, comme pour les choses externes ? […] Comment pourrais-je me les attribuer, me les imputer, si je me voyais du dehors au lieu de me voir du dedans, si, en un mot, dans la conscience du phénomène qui m’affecte n’était impliquée d’une manière indissoluble la conscience même de l’être affecté ? […] Elle a ou paraît avoir des intermittences, tout au moins des relâchements et des rémissions, tantôt d’une manière périodique et normale, comme dans le passage de la veille au sommeil, tantôt d’une manière accidentelle, comme dans l’évanouissement, l’extase, l’imbécillité.
Un honnête spectacle est la plus belle éducation qu’on puisse donner à la jeunesse, le plus noble délassement du travail, la meilleure instruction pour tous les ordres de citoyens ; c’est presque la seule manière d’assembler les hommes sociables. […] Sémiramis est encore un modèle admirable de la manière de triompher des difficultés d’un sujet. […] Cela fait, on divise son sujet par actes et les actes par scènes, de manière que chaque acte, quelque grandes situations qu’il amène, en fasse attendre encore de plus grandes, et laisse toujours le spectateur dans l’inquiétude de ce qui doit arriver jusqu’à l’entier dénouement. […] Il est donc bien essentiel, en crayonnant son dessin, de ménager les situations de manière qu’elles deviennent toujours plus frappantes, plus intéressantes, plus terribles. […] La fable tragique, selon Aristote, peut se combiner de quatre manières différentes : la première, lorsque le crime s’achève ; la seconde, lorsqu’il ne s’achève pas ; la troisième, quand il est commis sans connaissance et comme involontairement ; la quatrième enfin, quand il est commis de propos délibéré.
Il ne faut rien exclure ; mais on doit convenir que les livres philosophiques qui n’en appellent jamais ni au sentiment, ni à l’imagination, servent d’une manière beaucoup moins utile à la propagation des idées, et que les ouvrages de littérature qui ne sont point remplis d’idées philosophiques, ou de cette mélancolie sensible qui retrace les grandes pensées, captivent tous les jours moins le suffrage des hommes éclairés. […] Le style se perfectionnera nécessairement ; d’une manière très remarquable, si la philosophie fait de nouveaux progrès. […] Si l’homme du plus grand talent, comme orateur, était accusé devant un tribunal, il serait impossible de ne pas juger, à sa manière de se défendre, s’il est innocent ou coupable. Toutes les fois que les paroles sont appelées en témoignage, on ne peut dénaturer dans le langage le caractère de vérité que la nature y a gravé ; ce n’est plus un art mensonger, c’est un signe irrécusable ; et ce qu’on éprouve échappe, de mille manières, dans ce qu’on dit. […] Le laconisme des Spartiates, les mots énergiques de Phocion, réunissaient autant, et souvent mieux que les discours les plus soutenus, les attributs nécessaires à la puissance du langage ; cette manière de s’exprimer agissait sur l’imagination du peuple, caractérisait les motifs des actions du gouvernement, et faisait connaître avec force les sentiments des magistrats.
Je ne prétends certes pas que, d’une génération à une autre, des pères ou des aïeuls aux fils ou aux petits-fils, il n’y ait pas un legs de manières d’être corporelles ou mentales. […] » Un jour, il accompagne Mme d’Épinay dans une visite qu’elle rend au précepteur de son fils, et, comme on cause de la manière dont l’enfant doit être élevé, Duclos, avec sa brusquerie habituelle, lance tout à coup ces paroles : « N’allez pas faire la bêtise de lui dire du mal des passions et des plaisirs ; j’aimerais autant qu’il fût mort que condamné à n’en pas avoir. » Rousseau va plus loin encore. […] Sans doute, il y eut alors, comme toujours, bien des tempéraments divers et aussi, comme toujours, bien des hommes, singes d’autrui, qui affectaient les manières d’être à la mode. […] De même que ces crises tragiques, un changement dans la nourriture, dans la manière de vivre se répercute en sentiments et en idées que les écrivains expriment, sans en soupçonner souvent l’origine. « Savez-vous, disait Edmond de Goncourt à Taine50, si la tristesse anémique de ce siècle-ci ne vient pas de l’excès de son action, de ses prodigieux efforts, de son travail furieux, de ses forces cérébrales tendues à se rompre, de la débauche de sa production et de sa pensée dans tous les ordres ? […] Un peuple a non seulement ses maladies comme un individu ; mais sa constitution, suivant la manière dont il vit, peut se modifier de façon profonde.
Il est vrai que si quelque chose étoit capable de flatter notre amour-propre & d’ajouter la bonté de notre cause, ce seroit la maniere dont on a attaqué nos jugemens, & les moyens employés pour les décrier. […] Animés par ce succès, voyant que nos Adversaires nous critiquoient d’une si étrange maniere, nous avons pris le parti de nous critiquer nous-mêmes. […] Qu’on ne s’attende cependant point à trouver du changement dans la maniere dont nous nous exprimons sur les Auteurs ridicules ou sur les Ecrivains dangereux. […] On peut répondre à peu près de la même maniere à ceux qui se sont récriés sur nos fréquentes sorties contre la Philosophie & les attentats Philosophiques. […] Benoît qui nous a fait ce reproche, il eût dû être satisfait de la maniere dont nous avons parlé de ses Confreres distingués dans les Lettres.
Quiconque est susceptible d’écrire une noble églogue peut, d’une manière aussi aisée, entreprendre des conquêtes et bâtir des cités. […] Car nous avons précisément restitué à l’idée ethnique toute sa puissance, nous nous appliquons d’une manière constante à saisir le sens des réalités, et nous avons constitué l’éthique la plus sûre qu’ait connue la France. […] Lorsque des poètes chantent une chose quelconque, c’est d’une manière si juste et si belle en même temps, que nous croyons la voir soudain la première fois. […] Et en parlant de cette manière, je laisse encore bien loin de moi l’esthétique même. […] C’est en nous perfectionnant d’une manière stricte et implacable que nous deviendrons dignes de création.
En effet, ajoûte-t-il, le visage, et toute la tête étant renfermez sous la couverture du masque, de maniere que la voix ne sçauroit s’échapper que par une sortie qui est encore resserrée, il s’ensuit que la voix ainsi contrainte rend des sons plus forts et plus distincts. […] Il ajoûte, qu’il a vû deux comédiens célebres également applaudis, quoique leur maniere de déclamer fut bien differente, mais chacun avoit suivi son naturel dans la maniere de joüer la comédie qu’il avoit prise. […] Il falloit donc que les éclats de rire redoublez retentissent dans la bouche du masque, de maniere qu’il en sortit un son désagréable. […] Nous pouvons juger de l’attention que les anciens avoient pour tout ce qu’ils jugeoient capable de mettre de l’agrément ou de la facilité dans l’execution de leurs pieces de théatre, par ce que Vitruve nous dit sur la maniere d’y placer des echaea ou des vases d’airain propres à servir d’échos.
Le développement historique perd ainsi l’unité idéale et simpliste qu’on lui attribuait ; il se fragmente, pour ainsi dire, en une multitude de tronçons qui, parce qu’ils diffèrent spécifiquement les uns des autres, ne sauraient se relier d’une manière continue. […] I Il peut sembler, au premier abord, qu’il n’y ait pas d’autre manière de procéder que d’étudier chaque société en particulier, d’en faire une monographie aussi exacte et aussi complète que possible, puis de comparer toutes ces monographies entre elles, de voir par où elles concordent et par où elles divergent, et alors, suivant l’importance relative de ces similitudes et de ces divergences, de classer les peuples dans des groupes semblables ou différents. […] Sans même pousser les choses à cette rigueur, on peut prévoir que, plus les caractères qui serviront de base à la classification seront nombreux, plus aussi il sera difficile que les diverses manières dont ils se combinent dans les cas particuliers présentent des ressemblances assez franches et des différences assez tranchées pour permettre la constitution de groupes et de sous-groupes définis. […] Si donc nous connaissions la société la plus simple qui ait jamais existé, nous n’aurions, pour faire notre classification, qu’à suivre la manière dont cette société se compose avec elle-même et dont ses composés se composent entre eux. […] On distinguera autant de types fondamentaux qu’il y a de manières, pour la horde, de se combiner avec elle-même en donnant naissance à des sociétés nouvelles et, pour celles-ci, de se combiner entre elles.
Le comte d’Espagne était lui-même un petit homme trapu, crépu, râblé, taillé en garçon boucher, très actif, très cruel, très courtois, qui saluait d’un geste fanfaron chaque éclair des canons de la place, qu’on rencontrait partout tranchant du matamore et du capitan, toujours discourant, pérorant et secouant vivement son petit panache. » Et n’allez pas croire que l’historien qui écrit ainsi n’ait que ces deux manières de peindre ! […] » IV Les portraits abondent tellement dans ce livre qu’on se demande parfois si le sujet du livre n’est pas un prétexte, une manière de vous introduire dans une galerie très intéressante et très variée. […] À notre avis, le capitaine d’Arpentigny a fourvoyé, dans un livre paradoxal de donnée et scientifique de développement, des facultés qu’il pouvait appliquer d’une manière plus utile pour sa renommée à des sujets plus positifs et plus hauts ; mais, tout fourvoyé qu’il puisse être, il n’en est pas moins dans son livre un esprit piquant et même un penseur, — chez qui le détail vaut mieux que l’ensemble, il est vrai, — un penseur tout en étincelles ! […] Avec sa manière poétique et cavalière de porter une érudition qui étonne, d’étaler un luxe de lectures qui, pour un autre, serait un luxe lourd, le capitaine d’Arpentigny est au fond un écrivain de cape et d’épée. […] , mais tous les deux appartiennent à des opinions qui faussent leur nature et dépravent leur talent ; tous les deux ils étaient mieux faits que pour soutenir et défendre, chacun à sa manière, les doctrines avouées ou secrètes du matérialisme démocratique.
Ces considérations, qui résument d’une manière générale quelques-unes des observations particulières faites au sein de la Commission, ne paraîtront point déplacées ici : elles pourront servir à éclairer la route de l’avenir ; elles prouveront du moins que la Commission n’a point pris le change et n’a fait cette année que s’affermir de plus en plus dans le sens et l’esprit de l’institution qu’elle était appelée à servir et à interpréter. […] La Commission de l’année dernière pas plus que celle de cette année ne se l’était dissimulé : la grande difficulté littéraire que rencontre l’institution présente, c’est que le but moral qu’elle réclame avant tout puisse tomber d’accord, dans les ouvrages dramatiques d’un ordre élevé, avec toutes les autres conditions de grâce, d’élégance, d’émotion, de divertissement et de distinction légère que le monde proprement dit a droit de son côté d’exiger ; c’est que le but moral, si on l’y introduit, ne s’y affiche pas d’une manière contraire à la vérité des choses ni au goût, et qu’un genre prétendu honnête mais faux, comme en d’autres temps, n’aille pas en sortir. […] Mais il a été remarqué d’autre part que cette sorte d’exagération avait toujours été concédée aux moralistes, aux satiriques, aux auteurs de comédies ; que c’est un peu la condition de la scène ; que si la vérité peut manquer sur quelques points du tableau, cette vérité se fait sentir en d’autres endroits d’une manière vive, énergique et neuve : par exemple, lorsque le personnage principal au quatrième acte se voit presque amené, à force d’humiliations d’avanies et d’outrages, à se repentir de ce qu’il a fait de bien, et à apostropher le monde entier dans une sorte de délire : moment dramatique et lyrique tout ensemble, d’une vigueur poignante. […] Le séducteur, et qui l’a été bien antérieurement à l’action, n’est pas seulement puni d’une manière sensible, douloureuse et finalement tragique ; mais, ainsi qu’on l’a remarqué, il joue dans tout le cours de la pièce, pour un homme brave et fier comme il est, un très sot rôle, ce qui, en France, n’est pas le moindre des châtiments.
La définition que les anciens faisoient de la tragedie et de la comedie, et que nous avons rapportée en son lieu, suffiroit seule pour nous convaincre que leur maniere de reciter ces poëmes étoit très-differente. […] Il s’emporte contre les orateurs qui plaidoient au barreau de la même maniere. […] Quant à la maniere d’écrire cette déclamation, nous avons déja dit dans la quatriéme section de ce volume, qu’il est très vraisemblable qu’elle se notoit avec les caracteres des accens. […] Ainsi ce furent des comédiens qu’on avoit fait venir d’étrurie qu’on vit dans ce tems-là sur notre théatre, où ils représentoient suivant la maniere de leur païs, c’est-à-dire, en faisant assez bien les gestes à la cadence des instrumens à vent, et en récitant des vers qui n’avoient point encore aucune déclamation composée, à laquelle nos comédiens fussent obligez d’assujettir leur action.
Quand elle n’est pas contenue et soutenue par l’idée du public, son corset à elle, tout s’abaisse et s’en va de sa manière de parler et d’écrire dans un abandon sans grâce et surtout sans noblesse. […] Est-ce parce qu’elle avait de son vivant les yeux de Junon, qui sont des yeux de vache dans Homère, qu’elle dit qu’elle pleure, à chaque instant, comme un veau, quand elle ne pleure pas comme un âne, qui est sa manière de pleurer lorsqu’elle lit le Jocelyn de Lamartine ? […] III Ce n’est guère que vers les trois quarts de ce premier volume d’une Correspondance qui ressemble presque à une trahison de la part de ceux qui la publient, tant elle ravale de toutes manières Madame Sand, comme talent et comme caractère, qu’elle se met à raconter son embarquement sur cette mer orageuse, où, par parenthèse, elle n’a jamais eu, elle, que du beau temps. […] Madame Sand, que littérairement on déshonore par cette correspondance, honteuse pour la femme la plus vulgairement littéraire, n’y est point du moins déshonorée d’une autre manière, et les tableaux qu’on y rêvait dans des perspectives imaginaires ne s’y trouvent pas.
Seulement, par cela même, il est très-peu apte à manier cette grossièreté matérielle que l’on appelle le roman d’aventures, et, certes, il y a une manière de l’entendre, ce roman-là, qui n’est celle ni de l’auteur des Mousquetaires adoré des bourgeois, ni de ce Casanova, autre romancier d’aventures, quoiqu’il se soit donné comme un historien, et que le prince de Ligne avait appelé Aventuros. La manière de M. Deltuf se rapprocherait beaucoup plus de la manière de Marivaux, dont les grandes aventures sont, comme l’on sait, des battements de cœur, accélérés par une vanité plus ou moins piquante. Cette manière, que l’on croyait enterrée à cent pieds sous terre avec les frivolités et les parfilages du dix-huitième siècle, pourrait donc reparaître au dix-neuvième avec des choses de moins, il est vrai, mais aussi avec quelque chose de plus !
L’homme ne joue guère de rôle dans cette manière d’envisager les lieux et de les reproduire : le groupe d’usage n’y est pas ; la pastorale et l’élégie y sont sacrifiées ; point de ronde arcadienne autour d’un tombeau ; point de couples épars et de nymphes folâires et d’amours rebondis ; point de kermesse rustique, de concert en plein air ou de dîner sur l’herbette ; pas même de romance touchante, ni de chien du pauvre, ni de veuve du soldat : c’est la nature que le peintre embrasse et saisit ; c’est le symbole confus de ces arbres déjà rouillés par l’automne, de ces marais verdâtres et dormants, de ces collines qui froncent leurs plis à l’horizon, de ce ciel déchiré et nuageux, c’est l’harmonie de toutes ces couleurs et le sens flottant de cette pensée universelle qu’il interroge et qu’il traduit par son pinceau. […] Huet en a profité d’avance ; dans sa manière d’envisager et de peindre la nature, il serait tombé tout à fait d’accord avec Hoffmann et avec le petit Maltais ; voici le passage : « Saisir la nature dans l’expression la plus profonde, dans le sens le plus intime, dans cette pensée qui élève tous les êtres vers une vie plus sublime, c’est la sainte mission de tous les arts. […] J’ai toujours paru ne me préoccuper d’art qu’incidemment ; j’en ai rarement écrit, bien persuadé que, pour être tout à fait compétent en ces matières, il faut y passer sa vie ; mais je n’ai cessé tant que j’ai pu de voir et de regarder, et je n’ai pas laissé l’occasion de dire mon mot et de donner mon coup de collier à ma manière.
Techener a fait, à sa manière, des Petits traités un livre de chevet. […] Les petits traités de morale publiés aujourd’hui sont intitulés : De la faiblesse de l’homme ; De la soumission à la volonté de Dieu ; Des diverses manières dont on tente Dieu ; Des moyens de conserver la paix avec les hommes ; De la civilité chrétienne. […] Fénelon, qu’on a trop grandi de toutes manières, bel esprit bien plus que grand esprit, continuant la Renaissance sous Louis XIV, Fénelon, ce grec en français, mais dont la forme antique pâlit devant celle d’André Chénier comme un poncif pâlit devant la vie, Fénelon n’a vraiment de talent personnel et incontestable que dans son Existence de Dieu, le plus éloquent fragment de métaphysique qu’on ait écrit, et ses Lettres spirituelles, ses œuvres de conseil et de direction.
Cet arrangement naturel est indiqué, autant que possible, sur la figure, mais d’une manière beaucoup trop simplifiée. […] Il n’est pas inutile d’expliquer cette manière d’entendre la classification des êtres organisés, par un exemple tiré des diverses langues humaines. […] Classification des variétés. — Un regard jeté sur la classification des variétés qu’on croit ou qu’on sait descendues d’une espèce quelconque confirmera encore cette manière de voir. […] On peut étendre cette manière de voir à des familles ou même à des classes entières. […] Si nous regardons l’avenir, il nous est naturellement impossible de dire de quelle manière une partie quelconque de l’organisme se développera, et si elle est aujourd’hui naissante.
Si l’on essayait en effet de caractériser d’un mot la manière et le talent de M. […] Jules Claretie ne s’y prend pas tout à fait de la même manière. […] En aucune manière. […] Et devant vous aussi vous avez la manière de l’artiste. […] George Eliot s’y prend d’autre manière.
Pour en donner un seul exemple, il suffit de rappeler de quelle manière les fossiles du système devonien furent du premier coup reconnus par les paléontologistes comme intermédiaires en caractères entre ceux des terrains carbonifères qui les suivent et ceux du système silurien qui les précèdent. […] Même, en quelques cas, elle simplifie l’organisation par une métamorphose rétrogressive qui la fait descendre dans l’échelle naturelle ; mais cependant elle laisse l’être ainsi dégradé mieux adapté à sa nouvelle manière de vivre143. […] Pictet et Huxley, que cette manière de voir est très loin d’être prouvée. […] Si les habitants d’un continent ont autrefois beaucoup différé de ceux d’un autre continent, de même leurs descendants modifiés différeront presque de la même manière et en même degré. […] On demandera peut-être, par manière de raillerie, si je suppose que le Mégathérium et d’autres géants semblables ont laissé derrière eux dans l’Amérique du Sud, comme leurs descendants dégénérés, le Fourmilier timide et le Tatou indolent.
Bayle s’écrie là-dessus : « Quelle manière de convertir les hérétiques du bel-esprit ! […] Il étoit prêtre, possédoit quelque dignité dans l’église, & vivoit d’une manière toute opposée à son état. […] La manière dont il les rend est encore plus honteuse & plus grossière ; c’est le stile des halles.
Or, comment auroit-il été possible que ces deux acteurs eussent toujours été d’accord entr’eux, et que l’un et l’autre ils fussent en cadence avec l’accompagnement, si la déclamation n’avoit pas été concertée, de maniere que chacun sçut précisément ce que son compagnon devoit faire, et dans quel espace de temps il l’executeroit ? […] Les cantiques ou monologues sont les endroits d’une piece dans lesquels un acteur parle étant seul, ou dans lesquels, supposé qu’il y ait un second acteur sur la scéne, le second personnage ne dialogue point avec le premier, et cela de maniere que si ce second personnage dit quelque chose, il ne le dise qu’en forme d’ aparté, c’est-à-dire, sans adresser la parole au premier. […] Andronicus en joüant dans une de ses tragédies, fut obligé par les spectateurs à repeter tant de fois un endroit de la piece, qu’il s’enroüât de maniere qu’il fut obligé pour continuer à faire réciter les vers par un de ses esclaves accompagné du joüeur de flute, tandis que lui, Andronicus, il faisoit les gestes.
On sait qu’à force de volonté et de travail Taine changea sa manière d’écrire et réussit à se faire un style coloré et plastique. […] Faguet, se remettre à chicaner, philosopher, appeler à son aide science et philosophie pour aboutir à cette explication : Taine a changé de manière parce qu’il avait en lui la vocation de ce changement. « Il possédait en germe (certains passages de ses œuvres antérieures en font foi) un cerveau visuel et sensoriel, et ce mécanisme n’a fonctionné que lorsque l’objectif s’est trouvé braqué sur un milieu inhabituel, … les Pyrénées. » Ce qui veut dire que, si Taine s’est créé un style plastique, c’est qu’il avait des dispositions au style plastique. […] Je n’ai fait toute ma vie que des raisonnements, je suis habitué aux abstractions ; il faut que je sorte de moi-même, que je change toutes les allures de ma pensée, que j’apprenne le style descriptif23. » La question est donc tranchée, Taine lui-même nous le dit : son évolution a été réfléchie ; il a changé volontairement sa manière : cet effort lui a coûté ; il a peiné, travaillé, persisté, et le labeur a fini par développer ses dispositions naturelles, et c’est ainsi qu’il s’est assimilé le style descriptif, où il a, d’ailleurs, excellé.
On peut regarder la chose comme démontrée par la physiologie contemporaine : l’impression renouvelée occupe les mêmes parties profondes du cerveau auxquelles aboutissait l’impression primitive, et elle s’y reproduit d’une manière analogue. […] Il y a dans le cerveau, dit Wundt, non des empreintes, mais des dispositions à fonctionner d’une certaine manière, c’est-à-dire des « dispositions fonctionnelles ». […] Ces sensations consécutives sont un vrai remous mécanique des vibrations nerveuses, qui vont s’affaiblissant, mais d’une manière rythmique et avec des retours. […] Ce qui ne nous émeut en aucune manière, au contraire, passe à notre surface sans exciter notre attention et sans laisser de trace. […] Enfin, si je pense fortement à toutes ces circonstances, je finis par sentir d’une manière plus ou moins sourde le rudiment même de l’élancement.
Je veux au moins vous lire une de ces fables-contes, pour que vous l’ayez dans le souvenir ou pour que vous retrouviez dans vos souvenirs d’enfance et pour que vous voyiez aussi la manière tout à fait particulière qu’il y a apportée. Cette manière, je le répète, est absolument différente de la manière des contes proprement dits, et elle est à considérer comme on a considéré celle des contes proprement dits, pour en faire remarquer les défauts en même temps que les qualités. Certaine fille, un peu trop fière, Prétendait trouver un mari Jeune, bien fait et beau, d’agréable manière, Point froid et point jaloux : notez ces deux points-ci. […] Je vois La Fontaine faisant cela dans la manière d’un de ses contes. […] Qu’au lieu d’Amaryllis, de Diane et d’Aminte On ne trouve chez toi que vilains bûcherons, Charbonniers noirs comme démons, Qui t’accommodent de manière Que tu sois à tous les larrons Ce qu’on appelle un cimetière !
On voit qu’il pouvait y marcher d’une plus brave manière… Il y avait du chemin à côté. […] On sent qu’il est Titan à la manière dont il la remue quand il se retourne, à la manière dont il la soulève quand il se cambre sous elle ! […] Et moi-même, qui, comme critique, dans l’affadissante universelle inondation des mêmes choses, ai pris le parti de ne plus parler du talent que j’ai caractérisé une bonne fois s’il ne renouvelle pas sa manière, je ne parlerais point de ce poème du Pape dans lequel, comme manière, Hugo est toujours le même Hugo connu depuis cinquante ans, — le même Archevêque, comme disait plaisamment feu Cousin… mais dont il oubliait de dire le diocèse, qui est le diocèse de Grenade. […] Mais la vouloir chrétiennement pour le salut et l’honneur du Christianisme, la vouloir pour sa résurrection, venir, le cœur attendri et les yeux en larmes, présenter à la Papauté le sabre japonais en l’engageant avec suavité à s’ouvrir elle-même le ventre, ceci est une manière de vouloir la mort de la Papauté qui appartient en propre à Victor Hugo, et si, dans le cours de son poème, il n’a pas la moindre originalité d’idées, il a du moins eu celle-là, dans son hypocrite ou son ironique conception ! […] C’est cette manière raccourcie de comprendre l’Histoire religieuse, la même dans Hugo que dans Béranger, qui convient aux bourgeois, les dominateurs de l’opinion, je le crains, encore pour longtemps.
En aucune manière. […] Quant à la chose elle-même, selon la manière dont elle est entendue, nous ne croyons pas qu’elle soit à tel point méprisable et qu’elle doive entraîner des résultats néfastes. […] Il ne fut pas, comme Victor Hugo, comme Alfred de Musset, comme Théophile Gautier une âme évoluant à travers une série de manières différentes, et modifiant à chaque période ses pensées et leur forme. […] Considéré en tant qu’artiste pur, il modifie sans cesse son genre et sa manière. — Est-ce un adepte de l’antiquité grecque ? […] Que la tentative d’ailleurs ait réussi ou avorté d’une manière absolue, peu importe pour le moment.
Mais, 1°. il me semble que les jeunes gens, en sortant du collège, y gagneraient de toutes manières, s’ils en sortaient plus instruits. 2°. […] On est toujours court et clair quand on ne dit que ce qu’il faut et de la manière qu’il le faut ; autrement on est tout à la fois long et obscur. […] L’expression du sentiment est dictée par la nature et par le génie ; c’est ensuite à l’oreille et à l’art à disposer les mots de la manière la plus harmonieuse. […] La seule règle générale qu’on puisse donner sur ce sujet, c’est qu’on ne doit ni trop souvent sacrifier l’une à l’autre, ni jamais violer l’une ou l’autre d’une manière trop choquante. […] Voyez cet article traité d’une manière différente : page 274.
Fiévée commence par nous parler de lui, de ses articles au Temps, et pourquoi il a cessé d’en faire, et pourquoi il pourra bien reprendre, toutes particularités fort curieuses et fort agréablement assaisonnées sans doute, mais qui tiennent d’assez loin en apparence aux questions politiques tranchées ou soulevées par les événements de juillet, il y a des gens d’esprit qui ont une manière de causer à eux ; ils débutent à leur façon, ils parlent d’eux-mêmes, ils ont peine à se dégager de leur personnalité ; avant de vous exposer les résultats de leurs réflexions, ils ont besoin d’établir où et comment ces réflexions leur sont venues. […] « La monarchie est un système de gouvernement qu’il ne faut pas juger d’une manière générale ; cela n’est nécessaire dans aucun cas. […] Si cette minorité était arrivée d’une manière naturelle, peut-être aurait-elle été favorable au développement de nos libertés ; mais à travers deux abdications, toujours et nécessairement conditionnelles, avec le besoin cruel de séparer un enfant de ses parents-exilés, de ne pouvoir former sa raison sans lui apprendre à les juger au moins aussi sévèrement que l’histoire le fera, avec le danger de les voir un jour se rapprocher de lui, il n’aurait été qu’une cause de soupçons, d’agitation, que l’étendard d’un parti qui n’a que trop prouvé ses fureurs et son incapacité. […] La fermeture des ateliers décidait la question d’une manière prompte, sûre et avantageuse à ceux qu’elle provoquait à s’armer.
Avant de caractériser les écrivains anglais et les écrivains allemands, il me paraît nécessaire de considérer d’une manière générale les principales différences des deux hémisphères de la littérature. […] L’on ne peut décider d’une manière générale entre les deux genres de poésie dont Homère et Ossian sont comme les premiers modèles. […] La culture, l’industrie, le commerce ont varié de plusieurs manières les tableaux de la campagne ; néanmoins l’imagination septentrionale conservant toujours à peu près le même caractère, on doit trouver encore, même dans Young, Thomson, Klopstock, etc., une sorte d’uniformité. […] Le merveilleux étonne ; mais de quelque manière qu’on le combine, il n’égalera jamais l’impression d’un événement naturel, lorsque cet événement rassemble tout ce qui peut remuer les affections de l’âme, et les Euménides poursuivant Oreste, sont moins terribles que le sommeil de lady Macbeth.
Ils ont développé d’une manière supérieure la théorie métaphysique des facultés de l’homme ; mais ils connaissent et étudient moins les caractères et les passions. […] Tout était jeu d’esprit en France, hors les arrêts du conseil du roi : tandis qu’en Angleterre, chacun pouvant agir d’une manière quelconque sur les résolutions de ses représentants, l’on prend l’habitude de comparer la pensée avec l’action, et l’on s’accoutume à l’amour du bien public par l’espoir d’y contribuer. […] Burke, le plus violent ennemi de la France, a, dans son ouvrage contre elle, quelques rapports avec l’éloquence française ; mais quoiqu’il ait des admirateurs en Angleterre, on y est assez tenté d’accuser son style d’exagération autant que ses opinions, et de trouver sa manière d’écrire incompatible avec des idées justes. […] Elle favorise aussi quelquefois, d’une manière funeste, le succès des plus absurdes assertions.
Le fameux livre sur la manière d’enseigner & d’étudier les belles-lettres fut la pierre d’achoppement. […] Il écrivit contre la manière d’enseigner & d’étudier les belles-lettres. […] Il n’est rien de si sublime qu’on ne puisse & qu’on ne doive même exprimer dans un stile très-simple, c’est-à-dire, de la manière la moins détournée, & la plus sensible. […] D’ailleurs, peut-il y avoir plusieurs manières de s’exprimer ?
Marivaux a donné la dénomination à un genre, et son nom est devenu synonyme d’une certaine manière : cela seul prouverait à quel point il y a insisté et réussi. […] Louable ou non, il n’est pas mal de se rendre compte de cette manière et de ce genre de talent qui, avec ses défauts, a son prix, et dont quelques productions plaisent encore. […] Est-il du parti des modernes, il aura à peine commencé à parler que déjà on le tiendra pour suspect de manière et de trop de finesse. […] Marivaux n’a qu’un tort ou qu’un malheur, c’est qu’en étant en effet lui-même, et en usant à bon droit de sa manière de sentir pour s’exprimer avec une singularité souvent piquante, il dépasse sans s’en douter la mesure, tombe sensiblement dans le raffiné, et devient maniéré, minaudier, façonnier, le plus naturellement du monde. […] Le soin infini que met Marianne à ne pas donner son adresse au jeune homme, à Valville, non point par scrupule, mais par vanité, de peur qu’on ne sache qu’elle n’est que chez une marchande ; puis la manière toute simple en apparence dont elle se décide enfin à la donner, c’est encore un de ces sujets où l’auteur s’exerce à plaisir et plus volontiers même que sur la passion.
On arriverait naturellement à cette conséquence assez singulière, que, sous une telle forme sobre et dissimulée, l’esprit poétique, intime, précis, et en tant qu’il touche aux racines mêmes, existe plus peut-être que dans d’autres manières bien autrement brillantes et spécieuses, où le critique écrivain se rapproche et s’inspire davantage de l’orateur et du peintre. […] Tous les deux travaillent à leur manière philosophiquement ou historiquement, par les prévisions ou par les souvenirs, à orner sur de larges surfaces et à de grandes hauteurs le monument de la société présente qu’ils acceptent, qu’ils saluent non sans réserve, mais qu’ils sont surtout faits eux-mêmes pour honorer. […] De tous ces courants parallèles ou rivaux, de toutes ces lames redoublées (cette image physique et presque domestique est ici permise) il est résulté vraiment une manière de pile de Volta, un appareil littéraire considérable. — Je parlerai encore moins de ces autres influences incomparables qui ne se mesurent pas, et pour lesquelles il faudrait demander un nom aux muses. […] Ampère, dans lesquels il a su ressaisir la vie même des idées et des personnages qu’il exprime, Ausone, saint Paulin, Rutilius, la confession de l’autre Paulin, petit-fils d’Ausone, Sidoine Apollinaire, toutes pages à la fois graves et charmantes, qui suffiraient à caractériser dans la critique française cette manière sobre, délicate, profonde et sûre ! […] Aussi, leur œuvre patiente est illisible pour les gens du monde, je dirai même qu’elle l’est pour les savants, surtout d’une manière continue et dans le détail ; il faut en avoir besoin absolument sur un point pour s’y plonger.
On n’a qu’une manière encore d’en parler avec quelque à-propos, c’est de les bien connaître. […] Placé au point de transition des deux manières, elles se heurtaient plutôt encore qu’elles ne s’unissaient en lui. […] Le grand exemple présent de Walter Scott venait apporter des preuves vivantes à l’appui de cette manière, en dehors, il est vrai, du cercle régulier de l’histoire, mais si prés qu’il semblait qu’il n’y eût qu’un pas à faire pour y rentrer. […] Le sujet prend une sorte d’unité qu’il n’aurait pas si je l’avais traité à titre d’histoire générale. » Ainsi, dans ce choix des quatre ducs de Bourgogne, M. de Barante voyait surtout une manière ingénieuse de découper et de prendre de biais un large pan de l’histoire de France. […] sOn l’a très-bien remarqué, M. de Barante arrive, procède volontiers sur toute chose, avec une théorie mesurée, qu’il présente aussitôt d’une manière agréable et succincte ; il est bien fidèle en cela au vrai sens de ce mot doctrinaire dont on a tant abusé.
Le Roy, et il a même cité, à l’appui de sa manière de voir, divers passages de mes écrits que je ne suis nullement disposé à récuser. […] Mais je me plains d’abord que la frontière n’ait été tracée ni d’une manière exacte, ni d’une manière précise ; et ensuite que l’auteur ait semblé sous-entendre que le fait brut, n’étant pas scientifique, est en dehors de la science. […] Pour cela on procède toujours de la même manière. […] Et cela de bien des manières. […] Si ces êtres étaient ensuite brusquement transportés dans notre monde à nous, ils observeraient les mêmes lois que nous, mais ils les énonceraient d’une manière toute différente.
En prenant comme nécessaire le grand fait de l’invasion des barbares et le critiquant a priori, on trouve qu’il eût pu se passer de deux manières. […] Mais une autre manière eût été également possible. […] Comme Rome était trop faible pour s’assimiler immédiatement ces éléments nouveaux et violents, les choses se passèrent de cette seconde manière. […] Dans ma chambre nue et froide, abstène et vêtu pauvrement, je comprends, ce me semble, la beauté d’une manière assez élevée. […] Mais elle doit être parfaite à sa manière, et non en ressemblant à l’homme.
S’il était question de parler d’affaires importantes, on voyait les plus habiles et les plus éclairés étonnés de ses connaissances, persuadés qu’il en savait plus qu’eux, et charmés de la manière dont il s’exprimait. […] Mme de Caylus est maîtresse à sa manière dans l’art de cette ironie continuelle dont elle parle, et que les femmes étrangères les plus spirituelles et les mieux naturalisées chez nous ne saisissaient pas toujours. […] On était à la veille d’une Semaine sainte ou d’un jubilé, et le roi, qui avait de la religion, voulut se sevrer de Mme de Montespan qui, à sa manière, en avait aussi. […] Mais, dites, fut-il jamais une manière de conter plus vive, plus gaie, plus hardie, plus imprévue et plus naturelle ? […] Je n’insisterai pas pour démontrer plus longuement ces grâces légères de l’auteur dans le petit livre de Souvenirs inachevé, mais si agréable et si galamment tourné, que chacun peut relire ; on s’y rafraîchira la mémoire de choses connues, et surtout on s’y remettra en goût pour cette manière de tout dire en effleurant.
Volney a peur de tout ce qui est charme ; il semble craindre toujours de rien ajouter aux choses, et de présenter les objets d’une manière trop attachante : Je me suis interdit tout tableau d’imagination, dit-il, quoique je n’ignore pas les avantages de l’illusion auprès de la plupart des lecteurs ; mais j’ai pensé que le genre des voyages appartenait à l’histoire et non aux romans. […] Nous avons vu, depuis, les inconvénients de la manière opposée, le débordement des couleurs à tout propos, et le déluge des impressions personnelles. […] Ce que Volney, dans sa description, n’avait rendu que d’une manière pour ainsi dire géométrique et graphique, Decamps l’a revêtu de couleur, l’a mis en action, et y a versé de toutes parts la splendeur de la nature, l’éclat de la vie. […] Il semble, à la manière dont il débute, qu’il a senti toute la majesté du spectacle ; que, lui aussi, il va prendre l’essor, qu’il va embrasser de l’aile le champ de la nature, de la poésie et de la tradition, dût-il s’y mêler pour lui quelques nuages. […] À la manière dont il le nomme et dont il cherche à diminuer sa gloire partout où il la rencontre, on dirait qu’il jalouse Salomon.
Sa manière sert de transition entre la caricature telle que la concevait celui-ci et la caricature plus moderne de Charlet, par exemple, dont j’aurai à parler tout à l’heure. Charlet, qui est de la même époque que Pigal, est l’objet d’une observation analogue : le mot moderne s’applique à la manière et non au temps. […] Je suis assez embarrassé pour exprimer d’une manière convenable mon opinion sur Charlet. […] Il ne s’agit pas de peindre, de dessiner d’une manière originale les laideurs morales de la sacristie ; il faut plaire au soldat-laboureur : le soldat-laboureur mangeait du jésuite. […] La Satire Ménippée céda le terrain à Molière, et la grande épopée de Robert Macaire, racontée par Daumier d’une manière flambante, succéda aux colères révolutionnaires et aux dessins allusionnels.
Mais l’étude du système du monde et de la place que l’homme y occupe, sans renverser aucune de ces deux conceptions, défend de les prendre d’une manière trop absolue et trop exclusive. […] Mais je ne veux pas insister plus longtemps sur des choses que je ne connais pas d’une manière spéciale, et je reviens à mon idée fondamentale d’une philosophie critique. […] Est-on de mauvaise humeur contre Homère ou Valmiki, parce que leur manière n’est plus celle de notre âge ? […] Chaque œuvre est belle dans son milieu, et non parce qu’elle rentre dans l’un des casiers que l’on s’est formé d’une manière plus ou moins arbitraire. […] Toute manière de réaliser le beau est légitime, et le génie a toujours le même droit de créer.
Ajoutant ainsi continuellement à son acquis, à son fonds de comparaisons et d’idées, assouplissant et gouvernant avec une dignité de plus en plus aisée sa noble manière, semblant justifier en lui cette définition, que le génie (une haute intelligence étant supposée comme condition première), c’est la patience, il est arrivé, sur les plus grands sujets qu’il soit donné à l’œil humain d’embrasser, à la plénitude de son talent de peintre et d’écrivain. […] J’ai souvent, pour m’instruire, causé de Buffon avec des savants qui l’étaient dans la science même qu’il a illustrée, et j’ai cru remarquer des différences dans la manière dont plusieurs l’appréciaient. […] Cuvier une grave dissidence théorique sur la manière de concevoir l’organisation : là-dessus je n’ai pas un mot à dire, et pour cause d’incompétence. […] Henri Martin a donné sur Buffon un chapitre ferme, étudié, fort bon autant que j’en puis juger, s’il ne s’y mêlait un peu trop de cette dernière manière fougueuse de concevoir Buffon : Quelles prodigieuses visions durent l’assaillir, s’écrie l’historien, quand la nature se présenta à lui comme un seul être dont il avait à décrire les formes et à raconter les vicissitudes ! […] On devrait toujours se demander, quand on admire si fort un génie du passé : « Qu’aurait-il dit de cette manière d’être admiré12 ?
s’écriait-il à sa manière comme les exilés et comme les conquérants : Enfin, mon cher, écrivait-il le 30 avril 1818 à ce même Brandt qui lui avait préparé la voie, toutes mes inquiétudes se dissipent ; je vais partir. […] Ta manière élevée de voir se communique à moi, et, quoiqu’en ce moment il se trouve ici beaucoup d’ouvrage pour moi, je laisse tout pour ne suivre que tes conseils. […] Marcotte, son digne et incomparable ami de tous les temps, il lui exprimait, d’une manière un peu voilée, mais avec insistance, les regrets de l’homme du Nord, de l’homme plus intérieur et spiritualiste qui se sent jusqu’à un certain point exilé dans ce pays de la lumière et des sensations heureuses. […] Je ne peux m’expliquer autrement cette différence qu’en me persuadant qu’ils ont le moral et le physique en rapport parfait, et que chez nous le moral l’emporte beaucoup : ce qui fait qu’en ayant plus d’envie de faire le bien que de moyens de le faire, qu’ayant des idées qui nous sortent trop de notre sphère individuelle, et que, souffrant de mille manières inconnues aux hommes qui aiment trop leur personne, nous ne pouvons nous défaire d’un fonds de tristesse et de mécontentement intérieur qui perce plus ou moins. […] Ce premier tableau un peu grand, qui fut celui de Corinne, devenu plus tard L’Improvisateur, lui avait coûté bien de la peine ; ce devait être sa condition de faire et son élément : « D’ailleurs, disait-il, chacun a sa manière de jouir au monde : la mienne est de me donner beaucoup de peine, ce qui naturellement doit m’occuper beaucoup la tête, l’esprit et l’âme, avantage que j’ai toujours apprécié. » Malgré l’impression de sérieux et d’élévation que font à bon droit les œuvres de Léopold Robert et la lecture de ses lettres citées par M.
Sa grandeur d’âme, son habileté, son infatigable vigilance, sa supériorité sur ceux qui l’entouraient et dont il se servait utilement, tout cela était senti d’une manière directe et présente, bien autrement efficace qu’aujourd’hui l’histoire, à l’aide de ses pièces et de ses études, ne peut arriver à le reproduire et à le démontrer. […] De nos jours, en 1814, la Restauration des Bourbons n’était pas propre à diminuer cette manière sentimentale et paterne de présenter le bon Henri. […] Il faut donc prendre ces harangues pour de simples paroles assez exactement recueillies, où le maître (car Henri IV en est un) dit à sa manière à ceux dont il a besoin et qui lui résistent, qui lui viennent faire remontrance, des vérités parfois rudes, mais qu’il sait égayer d’un geste ou d’un sourire. […] Le roi tenait ce grave discours à ses officiers et gens de justice le 24 ; la veille, il avait écrit ces mots plus lestes à Gabrielle : « Ce sera dimanche (après demain) que je ferai le saut périlleux. » Ce mot a scandalisé à bon droit ; mais il ne faut jamais oublier que Henri IV, nonobstant les sentiments, avait une manière gaie involontaire de prendre et d’exprimer même ce qu’il avait de plus à cœur et de plus sérieux. […] Jung est de trop appliquer la méthode de Quintilien à Henri IV, de lui vouloir prendre la mesure comme à un ancien, de trop diviser et subdiviser son esprit, sa manière de penser et de dire, de séparer dans des compartiments divers ce qui n’a jamais fait qu’un, et ce qu’il vaudrait mieux accepter sous sa forme naturelle ; en un mot, de trop vouloir traiter comme un livre ce qui est un homme.
Louvois découvrait, à sa manière, dans certains articles, des beautés et vertus diplomatiques qu’il se chargeait ensuite de faire traduire en arrêts : les gros bataillons et les canons qu’il avait sous la main facilitaient singulièrement le commentaire. […] De cette manière, le roi paraîtra faire justice et la fera en effet, et la Chambre, en adjugeant à l’évêque ce qui lui appartient, réunira à la couronne de Sa Majesté la souveraineté des lieux que les évêques auront fait assigner… Afin de ne point faire trop de bruit, il ne faut comprendre dans une même requête que cinq ou six villages, et, de huitaine en huitaine, en faire présenter sous le nom de chacun desdits évêques, moyennant quoi, en peu de temps, l’on aura fait assigner tous les lieux qu’on peut prétendre avoir été autrefois desdits évêchés. » La tactique est assez nettement indiquée ; on voit la marche de cette politique rongeante qui bientôt ne se contenta point d’absorber les petits feudataires enclavés, mais qui s’essayait parfois à sortir du cercle et à pousser jusqu’en pays allemand, à la grande clameur des seigneurs, princes ou même rois qui se sentaient atteints. […] Je vous supplie d’examiner ce qui en est, observant de vous conduire de manière que personne ne puisse croire que le roi doute de son droit sur ledit Traerbach et sur le Mont-Royal. » Et quelques jours après, Louvois écrivait à l’intendant La Goupillière, qui avait dû lever des impositions sur ce lieu s’il avait été en effet réuni. […] Les soins de Mme de Chamilly sont louables, mais il faut qu’ils s’étendent à son domestique et rien davantage ; et puisqu’il (M. de Chamilly) connaît les raisons dont on s’est servi pour blâmer sa conduite, qu’il s’étudie de manière qu’il n’y donne aucun lieu. […] Quelques jours après et pendant le voyage que fit le roi en Alsace (octobre 1681), comme on visitait la fonderie de Brisach, où se voyaient certains mortiers formidables et d’invention nouvelle, il s’avisa de les faire tirer devant les députés de Strasbourg là présents, « pour leur faire connaître, disait-il agréablement, combien ils avaient été sages de se rendre. » Chacun fait ses gentillesses à sa manière.
Ce n’est pas qu’il n’accueille de son fait et n’autorise bien des erreurs, sur les songes, par exemple, sur les comètes, sur les présages dus à la foudre : dans l’ignorance où il est des explications naturelles, il regarde ces accidents singuliers, non pas comme la cause, mais comme le symptôme d’autres événements avec lesquels il les suppose liés d’une manière mystérieuse. […] Je n’ai pas à discuter ici cette manière de voir dont Pascal a si puissamment usé depuis. […] L’Antiquité aussi a eu son xviiie siècle, j’entends par là sa manière philosophique de penser. […] Cette manière de penser en grand leur a échappé, et Buffon seul l’a reconnue ; il a eu, en jugeant Pline, de ces mots qu’aucun autre que lui n’aurait trouvés. […] À chaque pas, et même à ne voir les choses qu’en profane, on rencontrerait des portraits pleins de vie et de talent (celui du Coq, du Rossignol, par exemple, au livre des Oiseaux) ; à chaque pas on trouve aussi des anecdotes plus ou moins authentiques, mais piquantes, et qui toutes, même dans leurs erreurs, jettent un grand jour sur les habitudes, les manières de voir et les superstitions de l’Antiquité.
Or, l’autorité ne vient jamais aux hommes que de deux manières : par la vérité des principes et la force des convictions. […] … Philarète Chasles, dès sa jeunesse et le long de toute sa vie, eut des fatuités de joli garçon (il l’était) qui devaient être abominablement désagréables aux affreux culs-de-jatte en fauteuil de ces Invalides de toutes manières. […] Il se vieillissait, geignait et se plaignotait avec une manière de dire : Je suis fâ-ti-gué, fâ-ti-gué que je crois entendre encore. […] Les deux premiers volumes de ces Mémoires, par convenance interrompus, ont, de toutes manières, trompé l’espoir qu’on pouvait avoir d’un beau massacre. […] Elle lui avait donné de ses manières de voir les choses, de les préjuger et de les méconnaître.
Les observations qui précèdent ne portent que sur la manière dont M. […] Cette manière de procéder fut à peu près celle de l’Espagne. […] Ses manières sont froides, franches et discrètes, souvent aussi pleines de laisser-aller et de sans-façon. […] Il a pour lui la plus haute ambition, et il tient pour lui école de manières nobles et polies. […] Les modernes ont rarement connu cette manière de philosopher qui était celle de l’antiquité.
Je ne puis cependant laisser échapper cette occasion d’exprimer ma profonde obligation au Dr Hooker, qui, pendant ces quinze dernières années, m’a aidé de toutes manières, soit par le fonds considérable de ses connaissances, soit par son excellent jugement. […] Comme il naît beaucoup plus d’individus qu’il n’en peut vivre, et comme, en conséquence, la lutte se renouvelle souvent entre eux au sujet des moyens d’existence, il s’ensuit que, si quelque être varie, si légèrement que ce puisse être, d’une manière qui lui soit personnellement utile sous des conditions de vie complexes, et quelquefois variables, il aura toute chance de survivre et sera ainsi naturellement élu ou choisi. […] Je suis pleinement convaincu que les espèces ne sont pas immuables, mais que toutes celles qui appartiennent à ce qu’on appelle le même genre, sont la postérité directe de quelque autre espèce généralement éteinte, de la même manière que les variétés reconnues d’une espèce quelconque descendent en droite ligne de cette espèce.
Philippe de Chennevières loue en bon style la manière de Prarond, « le tour délié de sa phrase, le ton net, gai, coloré de son mot, sa pointe comique ». […] Prarond s’est fait, depuis, une nouvelle manière, savante, compliquée, remarquablement originale.
Il était bien né de toute manière. […] Même dans les autres pièces où la mort de cet enfant vibre encore de temps en temps d’une manière délicieuse et touchante, l’exagération, le blasphème, la folie, la sottise, hélas ! […] Hugo les refait à sa manière. […] Hugo, apparaît surtout d’une manière éclatante dans la pièce de vers du second volume des Contemplations, intitulé Religio. […] et nous nous dîmes que ce serait là un triste spectacle, une triste chose à constater d’une manière définitive.
Les Travailleurs de la Mer ont marqué dans le génie de Victor Hugo non pas les qualités, mais les défauts de sa manière, et c’est des Travailleurs de la Mer que ressort son livre d’aujourd’hui. La conception de l’Homme qui rit, que j’ignore, mais qu’il n’est pas si difficile de deviner, est peut-être différente ; mais les mêmes manières ou les mêmes absences d’art s’y retrouvent. […] Je n’en pouvais juger que l’accent, le style, la manière… Accent, style, manière connus, antithétiques, défectueux souvent, mais aujourd’hui décadents, dégradés, dépravés, et d’une dépravation systématique et volontaire après laquelle le talent cesserait absolument d’exister… Il reste à examiner la composition de l’Homme qui rit, les caractères, l’action, l’intérêt, les entrailles mêmes du livre, et à conclure que le destin qu’il a est mérité. […] Je pourrais, comme on dit, chercher la petite bête dans un livre qui en est plein, de petites bêtes… Mais je dédaigne cette manière taquine de critiquer un homme, et je la laisse à mes pieds, par respect pour l’ancien talent d’Hugo. […] La puérilité fut toujours un des caractères de sa manière.
Quoique le point de départ et le sujet principal de ses études semblassent devoir circonscrire d’abord le cercle de son public et de ses lecteurs, il a su l’étendre, dès son entrée dans la carrière, par la supériorité et la variété de son coup d’œil, sa manière neuve d’envisager et de présenter chaque question, et la rare distinction de sa forme. […] Il y plonge par ses racines, il en a gardé le fond ; et parmi ceux qui sont habitués à reconnaître et à démêler ce qui subsiste d’essentiel à travers les transformations morales, je n’étonnerai personne en disant que, sous sa formephilosophique la plus consommée, il a encore de sa race première certains traits que lui-même a notés comme les plus profonds et les plus durables, « la foi, le sérieux, l’antipathie pour ce qui est vulgaire, le mépris de la légèreté » ; — oui, la foi, — une sorte de foi, non au surnaturel, mais au divin ; et l’on peut dire en effet que, dans sa manière d’envisager la nature, l’histoire et l’humanité, M. […] Il était timide, il était neuf de manières ; cet homme que nous entendons aujourd’hui s’exprimer avec tant de fermeté, de vigueur, de finesse, et sans jamais hésiter dans la nuance de son expression, avait alors à surmonter bien des hésitations de forme et des pudeurs ; il avait le front tendre, comme on le disait de Nicole. […] Voilà une singulière manière d’être conséquent et de pousser aux idées ! […] On a, d’après cette manière de voir, une sorte d’équivalent de l’immortalité, dont l’idée ne ferait ainsi que se déplacer et se traduire.
Passy n’y a mêlé aucune intention étrangère, et n’y a vu que son sujet, — bien assez riche, il est vrai, — qu’il a traité d’une manière toute sérieuse et approfondie. […] » Frochot ne fit jamais comme d’autres qui après coup s’en vantèrent, et qui, en manière de créanciers, vinrent revendiquer ensuite leur part de fourniture dans cette glorieuse éloquence : il ne parla jamais, pour son compte, de ces bons offices de secrétaire bénévole, de ces humbles prêts de copie à fonds perdu, qui lui semblaient une dette naturelle envers le génie, et son biographe qui les recherche avec soin a quelque peine aujourd’hui à en déterminer l’exacte mesure. […] La bonne foi, la candeur, la probité, constituent sa manière d’être. Il est loyal ; il n’est point de fonctions publiques qu’il ne puisse remplir d’une manière utile pour son pays. […] Frochot, à sa manière, faisait ainsi.
Ce qui rend l’âme de M. d’Aurevilly peu accessible à ma bonhomie, ce n’est pas qu’il soit aristocrate dans un siècle bourgeois, absolutiste dans un temps de démocratie, et catholique dans un temps de science athée (je vois très bien comment on peut être tout cela) ; mais c’est plutôt la manière dont il l’est. […] Les agréments extérieurs, l’élégance des habits, la politesse des manières, tout cela passe, non seulement aux yeux des sages, mais même aux yeux des gens du monde quand ils s’avisent d’être sérieux, pour des avantages très inférieurs à l’esprit, aux talents et à la valeur morale. […] Il réussit à faire croire à la partie oisive et riche de la société que d’innover en fait d’usages mondains, de conventions élégantes, d’habits, de manières et d’amusements, c’est aussi rare, aussi méritoire, aussi digne de considération que d’inventer et de créer en politique, en art, en littérature. […] Mais il y a plus : cette royauté des manières, qu’il élève à la hauteur des autres royautés humaines, il l’enlève aux femmes, qui seules semblaient faites pour l’exercer. […] Au reste, le dandy est très réellement un artiste à sa manière.
C’est que la grandeur ne vient ni des facultés, ni de leur emploi, ni de leur réussite, mais d’une imposante manière d’être, soit dans la vertu, soit dans le talent, soit même dans le vice ; et Mazarin manqua toujours de ce naturel et mystérieux ascendant. […] Il a un langage à lui, un tour à lui, une manière désabusée et presque languissante de dire les choses à travers laquelle on sent l’ironie : une des formes de ses condamnations. […] Elle se trouve heureuse cependant qu’il soit comme cela. » Et Renée ajoute un mot qui donnera aux esprits qui sentent, dans le moindre détail de style, toute la manière d’un écrivain : « Elle aimait donc pour aimer, — simplement : elle avait autant de désintéressement qu’elle avait d’imagination, la pauvre femme ! […] Au milieu de toutes les singularités que l’on raconte, il conserva les apparences de la gravité, les manières d’un grand seigneur, la conversation d’un honnête homme. […] Grâce à cette manière d’administrer, il se débarrassa en partie de cette immense fortune dont sa conscience était accablée. » Une telle page, que nous n’avons pas voulu mutiler et qui n’est pas la seule (il y en a plus de sept dans ces sept nièces de Mazarin !)
Que le système S, adopté comme système de référence, soit au repos absolu dans l’éther, ou qu’il soit en repos seulement par rapport à tous les systèmes auxquels on le comparera, dans les deux cas l’observateur placé en S traitera de la même manière les mesures du temps qui lui seront transmises de tous les systèmes tels que S′ ; dans les deux cas il leur appliquera les formules de transformation de Lorentz. […] Mais alors le premier ne se formulera plus de la même manière. […] Il n’en pouvait être ainsi, de toute manière, quand on croyait au caractère absolu du mouvement accéléré. […] Pourquoi tiendrait-elle compte d’une certaine manière tout humaine de percevoir et de concevoir les choses ? […] Nous devrons maintenant définir d’une manière générale certains termes dont le sens nous avait paru suffisamment indiqué jusqu’ici, dans chaque cas particulier, par l’usage même que nous en faisions.
Mais il y a diverses manières d’enterrer les gens, et celle qu’on employa pour les philosophes du dix-huitième siècle est singulière. […] Mais adieu ; trois de mes amis m’attendent ; nous devons discuter aujourd’hui la manière dont l’intelligence passe du moi au non-moi, et du subjectif à l’objectif. » Le pauvre disciple de Laromiguière, un peu confus et inquiet, monta à la bibliothèque de la Sorbonne, et pour se rassurer ouvrit le premier volume de son professeur. « Serait-il bien possible, disait-il, que la doctrine de mon cher maître renfermât de si étranges conséquences ? […] Les sensualistes seuls seraient-ils exclus du droit commun, et leur défendrait-on de prouver Dieu à leur manière ? D’autant plus que cette manière est claire, simple, exempte de grandes phrases et d’abstractions rébarbatives, pouvant être employée dans un fauteuil au coin de la cheminée, et n’ayant pas besoin d’être étalée en chaire, avec accompagnement de métaphores et d’éloquence. […] Ils ont observé le mouvement naturel de la pensée, et le reproduisent ; ils savent que ses premières opérations consistent dans la connaissance de faits particuliers, déterminés, et le plus souvent sensibles, que peu à peu elle se porte involontairement sur certaines parties détachées de ces faits, qu’elle les met à part, qu’aussitôt les signes apparaissent d’eux-mêmes, que les idées abstraites et les jugements généraux naissent avec eux ; ils suivent cet ordre dans les vérités qu’ils nous présentent, et en retrouvant la manière dont l’esprit invente, ils nous apprennent à inventer.
Il avait acquis une assez grande réputation à ce quart d’heure de 1823, et son nom faisait, au besoin, une manière d’autorité et quasi de patronage. […] On a beau jeu de parler après coup de la conséquence inévitable des principes, mais, dans le fait, ils auraient pu courir et se heurter de bien des manières. […] En y réfléchissant depuis, l’historien a cherché à se faire la théorie de sa manière. […] Il y a bien dés manières sans doute d’écrire dignement l’histoire ; mais, dans les manières plus curieuses de forme, il court risque de se glisser quelque imitation, quelque pastiche de l’antiquité. […] Arriver à être court en restant facile et sans cesser d’être abondant par le fond, ce résultat obtenu résumerait la perfection de sa manière.
Quelque soin que j’aie apporté dans cet écrit pour y dire la vérité de la manière la moins offensante qu’il m’a été possible, sans l’affaiblir, je doute qu’il ait le bonheur de plaire à tout le monde. […] Pour développer et apprécier en même temps cet avantage, il est nécessaire de remonter plus haut, et d’examiner d’abord sur quels principes, et de quelle manière on tâche de se procurer cette espèce de gloire qui est fondée sur les talents. […] Ayez de la hauteur dans les sentiments, votre manière d’écrire sera ferme et noble. […] Mais à voir la manière dont ils les traitent, on serait tenté de croire que le mot de république des lettres est bien mal imaginé ; rien n’est moins républicain que leur conduite et leur manière d’agir envers leurs semblables. […] Puissent, monseigneur, les sciences et les lettres, fidèles à conserver le souvenir de ceux qui les ont aimées, célébrer d’une manière digne de la France et de vous, tant d’établissements glorieux à votre ministère, qui laisseront à vos successeurs l’honneur de les faire fleurir !
Il faut que le morceau de fureur soit irréprochable pour le style, et qu’il soit dans la manière du Dante pour les images et pour la couleur. […] une existence douce, aimable, à ses foyers ; une grâce simple dans les manières, quelquefois une espèce d’enfance qui joue sérieusement : et tout à coup ensuite sur la scène une existence immense, extraordinaire, terrible, avec une figure grecque et pure et les fureurs d’un lion réveillé. […] Il faut que ma tête et que mon cœur soient en mouvement, mais de cette unique manière ; je ne veux plus me jouer à la vérité77. » C’était pour un poète tragique par trop abjurer les grandeurs de l’histoire. […] Elle est très attentive à tout ce qui peut faire plaisir à son mari, et semble toujours chercher à lire dans ses yeux ce qu’elle doit faire… M. de Saint-Pierre nous a accueillis de la manière la plus honnête et la plus affectueuse. […] Il nous a dépeint de la manière la plus énergique et la plus gaie tous les embarras que cela lui causait, et les inquiétudes qu’il ne pouvait s’empêcher d’avoir.
Est-ce d’après la manière dont l’un et l’autre affectent nos chances de survie ? […] Il n’y a, en effet, qu’une manière objective de prouver que des êtres, placés dans des conditions définies, ont moins de chances de survivre que d’autres, c’est de faire voir que, en fait, la plupart d’entre eux vivent moins longtemps. […] Les conditions de la santé et de la maladie ne peuvent être définies in abstracto et d’une manière absolue. […] S’ils expliquent cette morbidité de manières différentes, ils sont unanimes à la reconnaître. […] Il n’est donc pas de phénomène qui présente de la manière la plus irrécusée tous les symptômes de la normalité, puisqu’il apparaît comme étroitement lié aux conditions de toute vie collective.
Ils expriment, chacun à sa manière, et par leur contraste, ce développement fatal et suprême de la Libre Pensée, — la fantaisie, qui se joue de tout, à cette heure, dans les arts, la philosophie et les lettres ! […] Si Watteau, nous a-t-il dit encore, est le plus admirable des créateurs, dans son ordre d’idées et de faits, l’historien aspirera à devenir un Watteau à sa manière. » Et cela n’a pas manqué ! […] Capefigue que d’un parti qui semble lui avoir donné ses manières de sentir et de voir les choses. […] Telle est la curieuse manière dont M. […] À part l’admiration pour la femme et l’attendrissement continu pour sa destinée, il n’y a pas un fait ou une manière de regarder les faits qui puisse modifier d’un iota l’opinion générale sur une femmelette dont M.
« Il est un pays dans le monde, se dit-il, où la grande révolution sociale semble avoir à peu près atteint ses limites naturelles ; elle s’y est opérée d’une manière simple et facile, ou plutôt on peut dire que ce pays voit les résultats de la révolution démocratique qui s’opère parmi nous, sans avoir eu la révolution elle-même. » Il nous emmène donc avec lui en Amérique pour y étudier le principe dominateur et générateur des sociétés modernes, l’égalité des conditions ; pour l’y contempler en ce vaste espace, où ni les souvenirs historiques, ni les décombres d’anciennes institutions ne l’ont comprimé ; pour l’y voir en jeu et vivifié de toute sa moralité, grâce à l’esprit religieux qui, là, s’est trouvé uni dès le début à l’ardeur laborieuse. […] Telle n’est pas sa manière. […] Nous ferons remarquer, comme exemple de l’excellente manière à la fois expérimentale et philosophique de M. de Tocqueville, ce qu’il dit de la division du Corps législatif en deux branches aux États-Unis. […] Beaucoup de faits et de détails historiques rejetés dans les notes auraient pu, en se mêlant dans le texte, le rompre, le diversifier heureusement, comme il arrive dans cette grande manière de l’Esprit des lois.
Je m’attache à caractériser les principales différences que ces deux situations politiques doivent produire dans la destinée des femmes qui aspirent à la célébrité littéraire, et je considère ensuite d’une manière générale quel bonheur la gloire peut promettre aux femmes qui veulent y prétendre. […] Un grand talent triomphait de toutes ces considérations ; mais il était néanmoins difficile aux femmes de porter noblement la réputation d’auteur, de la concilier avec l’indépendance d’un rang élevé, et de ne perdre rien, par cette réputation, de la dignité, de la grâce, de l’aisance et du naturel qui devaient caractériser leur ton et leurs manières habituelles. […] S’il n’existait plus en France de femmes assez éclairées pour que leur jugement pût compter, assez nobles dans leurs manières pour inspirer un respect véritable, l’opinion de la société n’aurait plus aucun pouvoir sur les actions des hommes. […] Les femmes n’ont aucune manière de manifester la vérité ni d’éclairer leur vie.
Mais ces divers passages, qui donnent une idée fort nette du genre d’esprit de Fréron, de sa manière de penser et d’exprimer sa pensée ; ne donnent pas du tout la manière personnelle du critique… Le penseur y est. […] Et à cette manière de citer Fréron, il n’y a d’exception, dans ce livre, où je ne vois personne, bœuf ou taureau, pris aux cornes par ce rude toucheur qui était de force à les rompre, qu’en faveur de Voltaire. […] parent de Malherbe, un critique aussi à sa manière, qui ne voulait pas, en mourant, qu’on offensât devant lui la langue française.
L’auteur de ce travail, M. l’abbé Sauveur Gorini, ne peut pas passer pour un écrivain dans le sens littéraire du mot, quoiqu’il ait souvent ce qui fait le fond de l’écrivain, — une manière de dire personnelle, — mais c’est un érudit, et un érudit d’une nouvelle espèce, venu en pleine terre, à la campagne, comme une fleur sauvage ou comme un poëte… Jusqu’ici vous aviez cru, n’est-ce pas ? […] Les prêtres vraiment prêtres n’ont ni nos manières de juger, ni nos manières de sentir la vie ; ils ne se laissent pas conduire par l’influence de nos misérables sentimentalités, et d’ailleurs peut-il y avoir une solitude pour qui fait descendre son Dieu tous les matins dans sa poitrine ? […] Fauriel, et quand on l’a discutée, cette opinion, de recommencer avec une autre, présentée identiquement de la même manière.
Cantel n’en est pas à son premier mot poétique, il a déjà publié un volume ; mais il n’en débute pas moins encore, dans un sens plus profond que celui qu’entend le public, car il cherche, avec les souples articulations d’un talent qui doit grandir, une forme arrêtée, une manière définitive. […] ce n’est pas qu’il soit une imagination sans richesse ni une sensibilité sans accent ; mais il appartient par des amitiés, plus élevées que la camaraderie, je le sais, à ce milieu d’esprits qui ne mettent entre eux que l’amour du beau dans l’indépendance, et ce n’est point avec cela qu’on trouve (tout de suite, du moins,) sa manière, quand on n’est pas né avec elle. […] Il en a donc fait à son tour, non d’une manière impartiale, calculée et savante, comme un artiste qui se domine, car il est sincère, mais indécis et résistant quoique entraîné. […] Car le poète est naturaliste, et c’est sa manière d’être religieux.
Il était environ trois heures de l’après-midi, selon notre manière de compter 1192, quand Jésus expira. […] Si Jésus n’avait eu pour disciples que ses pauvres Galiléens, timides et sans crédit, la chose se serait passée de cette seconde manière. […] On n’avait pas encore choisi le lieu où on déposerait le corps d’une manière définitive.
Ce génie heureux ne fait qu’achever le premier et devancer avec éclat ce que plusieurs autres cherchaient tout bas et soupçonnaient à leur manière. […] Voilà une manière d’épicuréisme qu’il faut dénoncer. […] Le ministère Villèle, en venant, dès 1821, reprendre à sa manière l’œuvre de la Chambre de 1815 et en se prolongeant six ans, perdit tout ; il mit la méfiance et la désaffection dans tous les rangs. […] alors il n’a guère qu’une manière de s’en tirer : qu’il n’ait pas un talent seul, mais qu’il les ait tous, au moins en germe. […] Dans une circonstance autre qu’une solennité académique, il y aurait eu sans doute manière de prendre autrement le sujet, une manière plus expressive et plus réelle ; c’eût été de ne pas donner tant de place et de saillie aux considérations historiques, aux diverses époques de la Révolution, et de s’attacher plus uniquement d’abord à la figure de M.
Nous avons les mêmes organes, les mêmes instincts, à peu près un genre de vie semblable, et pourtant le paysage ne nous frappe pas de même manière. […] Ce qui différencie le grand poète du philosophe est donc moins le sujet traité que la manière de le traiter. […] Qui ne voit que ces deux manières de philosopher peuvent enfermer aussi deux esthétiques correspondant à celle des parnassiens et à celle des symbolistes. […] Une différence de nature dans la manière de percevoir le réel sépare à jamais l’esthétique parnassienne et celle des symbolistes. […] Le symboliste pense directement et le symbole ne devient qu’une manière détournée et pourtant nécessaire de se faire entendre.
Les Principes pour la lecture des Poëtes, forment une espece de Poétique, où se trouvent exposés, d’une maniere nette & facile, les préceptes des Grands Maîtres. […] L’Auteur y développe, d’une maniere assez lumineuse, les principales regles qu’en donnent Aristote, Cicéron & Quintilien.
Il est au contraire réel, croyons-nous, avec toute autre manière de philosopher. […] Difficultés et illusions tiennent d’ordinaire à ce qu’on accepte comme définitive une manière de s’exprimer essentiellement provisoire. […] Or, j’ai tout lieu de croire que les-autres mondes sont analogues au nôtre, que les choses s’y passent de la même manière. […] Ce double résultat a été obtenu d’une certaine manière sur notre planète. […] Ils disent, chacun à sa manière, le succès unique, exceptionnel, que la vie a remporté à un moment donné de son évolution.
Il a pris la manière d’Hegel. […] Cela tient à la manière dont il en partait. […] Les hommes ont très probablement commencé politiquement par une manière de république confuse, économiquement par une manière de vague communisme. […] Elle rétrécit en quelque manière l’intelligence elle-même. […] C’est une manière de sortir de soi.
Si les Muses plaintives ont été d’abord les objets de son culte ; s’il a débuté dans la carriere poétique par des Héroïdes peu propres à l’élever au dessus du commun des Poëtes de nos jours, il s’est livré dans la suite à des sujets plus agréables, qu’il a traités de maniere à dédommager ses Lecteurs de la foiblesse de ses premiers essais. Son Epître à Racine, celle à M. le Cardinal de Bernis, & la plupart de ses autres Pieces fugitives, annoncent de l’esprit, de l’imagination, & le talent de rendre, d’une maniere naturelle, & de revêtir d’une versification douce & variée, les différentes affections du cœur & de l’esprit.
Il auroit une maniere d’écrire agréable, pour peu qu’il eût réglé son imagination, & réprimé la manie de dire les choses tout autrement qu’il ne les sentoit. […] Ses Comédies sont encore gâtées, pour la plupart, par l’affectation, ou, pour mieux dire, par la singularité de sa maniere de rendre les choses.
Enfin l’idée de Dieu est partout, même quand elle est absente, car la taire est aussi une manière respectueuse mais redoutable de la nier. […] D’après cette manière de voir, la philosophie n’est plus une recherche, c’est une cause ; elle n’est plus une science, c’est une foi. […] Allons un peu plus loin, et voyons de quelle manière M. […] Comme il a horreur d’un fait trop déterminé, tout ce qui tend à circonscrire les choses d’une manière trop rigoureuse lui paraît faux. […] Vacherot soutient les doctrines spiritualistes, à sa manière à la vérité, mais sans qu’aucun grand principe soit mis en péril.
Nous allons voir qu’on s’y prend tout différemment pour retenir, selon la manière dont on devra se rappeler. […] L’étude expérimentale de la lecture et de l’audition des mots nous montre que les choses se passent d’une tout autre manière. […] Il faut donc que le temps d’attente soit rempli d’une certaine manière, c’est-à-dire qu’une diversité toute particulière d’états s’y succèdent. […] Ces lettres cherchent soit à se composer ensemble, soit à se substituer les unes aux autres, de toute manière à s’organiser selon les indications du schéma. […] Le problème que nous posons ici ne peut être résolu d’une manière satisfaisante dans l’état actuel de la science psychologique.
Mais cet art de Bourdaloue ne sera tout à fait sensible aux lecteurs d’aujourd’hui que quand j’aurai démontré, par un exemple déterminé et bien choisi, de quelle manière il s’y prenait pour mêler à la gravité morale de son enseignement une de ces intentions précises, et quelque allusion non équivoque à un incident ou à un personnage contemporain. […] Nul n’expliquait mieux que lui et d’une manière plus lumineuse (au moins pendant le temps où on l’entendait) ce que c’était que la grâce, que le quiétisme, et toutes ces subtilités et ces hérésies des oisifs et des doctes : il brillait à développer tous ces labyrinthes de l’esprit. […] Car La Bruyère, en parlant de Tréville d’une manière si serrée et si incisive, semble avoir quelque chose de particulier à venger sur lui : on dirait qu’il a appris que ce juge dégoûté des ouvrages de l’esprit a ouvert un jour une des premières éditions des Caractères et a jeté le livre après en avoir lu quelques pages, en disant : « N’est-ce que cela ? […] Il fait très bien remarquer que, par une triste fatalité, l’orgueil, « cette partie la plus subtile de l’amour de nous-même si profondément enracinée dans nos âmes, s’insinue, non seulement dans les choses où nous aurions lieu en quelque manière de nous rechercher, mais jusque dans la haine de nous-même, jusque dans le renoncement à nous-même, jusque dans les saintes rigueurs que Dieu nous inspire d’exercer sur nous-même : On veut pratiquer le christianisme dans sa sévérité, mais on en veut avoir l’honneur. […] En traçant si curieusement ce qu’il nomme un détail de mœurs, si Bourdaloue n’avait pas en vue Pascal dans Les Provinciales, et s’il ne le traduit pas trait pour trait à sa manière devant ses auditeurs, dont plusieurs durent être à la fois choqués et transportés, et ne purent s’empêcher d’admirer tout en protestant, il n’y a pas un seul portrait chez Saint-Simon ni chez La Bruyère.
Le premier volume a de l’intérêt, malgré la manière et les invraisemblances. […] La prompte introduction de ce jeune homme timide et honteux dans ce monde pour lequel il n’avait pas été élevé, mais qu’il convoitait de loin ; ce tour de vanité qui fausse en lui tous les sentiments, et qui lui fait voir, jusque dans la tendresse touchante d’une faible femme, bien moins cette tendresse même qu’une occasion offerte pour la prise de possession des élégances et des jouissances d’une caste supérieure ; cette tyrannie méprisante à laquelle il arrive si vite envers celle qu’il devrait servir et honorer ; l’illusion prolongée de cette fragile et intéressante victime, Mme de Rênal : tout cela est bien rendu ou du moins le serait, si l’auteur avait un peu moins d’inquiétude et d’épigramme dans la manière de raconter. […] Il se bat d’un manière assez ignoble sur la grande route avec un certain Giletti, comédien et protecteur de la Marietta dont Fabrice est l’ami de choix. […] La part de vérité de détail, qui peut y être mêlée, ne me fera jamais prendre ce monde-là pour autre chose que pour un monde de fantaisie, fabriqué tout autant qu’observé par un homme de beaucoup d’esprit qui fait, à sa manière, du marivaudage italien. […] Tous deux ne différaient pas moins par la manière dont ils concevaient la forme et le style, ou la façon de s’exprimer.
Saint-Lambert, qui était surtout fait pour la société, avait certainement du goût pour la nature, et il l’a chantée de la manière dont il l’aima. […] Un jour, la fille du poète Roucher, écrivant à son père alors sous les verrous, relevait avec une sagacité remarquable et un sentiment de préférence filiale bien permis les défauts de la traduction de Delille au début des Géorgiques : « Mais d’un autre côté, répondait à sa fille l’honnête Roucher, tu ne me parais pas rendre toute la justice qui est due à sa grâce, à son harmonie, à ce je ne sais quoi qui plaît, même dans sa manière française, aux amateurs impartiaux de l’Antiquité. » On voit que je tiens à accorder à Delille tout ce qui se peut raisonnablement. […] Son tort, à lui, est plutôt dans son style, dans sa manière de dire ; il est trop imbu des fadeurs sentimentales du siècle ; il a trop de Greuze en lui et sous sa plume, sans la couleur, mais avec le luxe de vertu et de sentimentalité qui s’épanche ; et surtout quand il mêle des vers à sa prose, cela se gâte aussitôt. […] De quelle manière le poète y envisageait-il ce besoin de retraite, de solitude et de campagne qui, à un certain moment, est le vœu de tous, de l’homme d’État, de l’homme de loi, du marchand comme du poète ? […] Comme le chèvrefeuille enlace l’arbre qu’il peut atteindre, aune rugueux, frêne à l’écorce unie ou hêtre luisant, enroule autour du tronc ses anneaux en spirale, et suspend aux branches feuillues ses glands dorés, mais il cause un dommage là où il prête une grâce, entravant la croissance par un embrassement trop étroit ; de même l’amour, lorsqu’il s’enlace aux plus fiers esprits, empêche le déploiement de l’âme qu’il subjugue : il adoucit, il est vrai, la démarche de l’amant, le forme au goût de celle qu’il aime, enseigne à ses yeux un langage, embellit son parler, et façonne ses manières ; mais adieu toute promesse de plus heureux fruits !
Ce n’est pas à dire qu’il négligeât absolument sa fortune en cour et le soin d’avancer ; il y aspirait à sa manière et par les voies qu’il estimait les meilleures et les plus solides. […] Il se citait lui-même en exemple, et lui disait de quelle manière il s’était conduit. […] Mon père prenait avec eux des manières cavalières ; il allait vite sur les formes afin d’aller grandement sur l’essentiel et le grand de la justice ; il accommodait des procès, il épargnait des épices ; il faisait le plus de bien qu’il pouvait au genre humain. […] Ce n’est pas un écrivain, il est vrai, mais il a sa manière de parler et de dire qui, pourvu qu’on la lui laisse et qu’on n’y fasse pas de demi-toilette, a son caractère et son originalité. […] On comprend maintenant ce que Grim a dit de la platitude de ton et de la manière de s’exprimer triviale et basse qui fit plus de tort à M. d’Argenson dans son ministère que n’auraient fait des fautes plus graves.
. — « Otez-nous, m’écrit à ce sujet quelqu’un qui l’a bien connu et qu’indigne cette prétention d’orthodoxie singulière en pareil cas, ôtez-nous ce Béranger cafard à sa manière, triste et bête, ennuyeux comme Grandisson ; rendez-nous ce malin, ce taquin, qui emportait la pièce et offensait tous ses amis, et se les attachait toutefois et leur restait fidèle ; cet homme capricieux, compliqué et faible aussi, plein des passions de la vie, timide par instants, ambitieux par éclairs, souvent redoutable, charmant presque toujours. […] Une des pensées les plus fausses de M. de Bonald, qui en a eu quelquefois de plus vraies, c’est « qu’un déiste est un homme qui, dans sa courte vie, n'a pas eu le temps de devenir athée. » Il y a, au contraire, chez le déiste sincère et convaincu, une impossibilité, une incapacité profonde d’entrer dans la manière de voir de l’athée, ou, pour mieux dire, du pur naturiste. […] Quand je dis critique, entendons-nous bien : il y a différentes manières de l’être, et Béranger, d’une certaine manière, l’était peu ou ne l’était pas du tout. […] Il faut le voir en présence de cette intelligente enfant qui devient peu à peu une personne ; comme il s’y prend bonnement et gentiment pour lui donner une idée du style, de la manière d’écrire et de lire ! […] » On ne saurait mieux dire. — Tout ce qui a touché au romantisme, du temps des belles ardeurs, doit lui savoir gré de la manière dont il remet au pas une de ses plus vieilles connaissances, un classique maussade et saugrenu, à qui l’envie était venue un peu tard d’entrer en lice, satire ou comédie en main, et de pulvériser les modernes.
Il a fait des découvertes réelles, bien qu’il les ait un peu exagérées dans le principe ; mais à lui tout est permis, et il a, par son talent d’écrivain et par ses retouches successives, des manières de compenser ou de réparer, et, une fois averti, des empressements à rentier dans le vrai, qui ne retirent rien aux effets d’un premier éclat. […] Il y a tant d’autres manières d’employer son temps, quand on est jeune, beau, riche, noble, un pied, je le crois, dans les fonctions publiques, que j’ai peine à m’expliquer, chez quelqu’un qui n’y est pas condamné par le sort, cette précipitation à écrire, à compiler, à copier, à éditer sans prendre même la peine de se relire. […] Écrire de telles pages en tête d’une édition de La Rochefoucauld, c’est donner à juger son propre goût : c’est l’étaler et l’encadrer d’une manière fâcheuse. […] n’eut en son temps aucun effet littéraire ni autre, aucun retentissement ni aucune sorte d’influence : aujourd’hui c’est un simple témoignage de la manière dont écrivaient les grands seigneurs quand ils s’en donnaient la peine, vers 165090. […] messieurs les gens d’esprit, que cette manière d’appliquer la doctrine de l’amour-propre aux Lettres est donc brutale et, autant qu’il me semble, injuste, à force de frapper à bout portant !
Guadet, écrivant la Vie de ce girondin, et se trouvant en face de la difficulté, c’est-à-dire de la tendre liaison présumée entre Mme Roland et Buzot, s’en tirait d’une manière évasive et sauvait la situation dans les termes suivants : « On a dit que des relations d’un autre genre avaient existé entre Buzot et Mme Roland. Mme Roland parle souvent de Buzot dans ses Mémoires, mais la manière même dont elle en parle me semble repousser cette idée. […] Laissons Tacite avec sa manière à lui et son génie. […] Moins de talent, moins d’art, et plus de largeur et d’impersonnalité : c’est là aussi une belle manière de talent. […] En maint endroit de cette libre et charmante Correspondance elle a des gaietés, des élans et des entrains à ravir, — quand elle parle de la vie des champs, de ses occupations au Clos, de ses différentes manières d’être à Villefranche, à Lyon, à la campagne : « A la campagne, je pardonne tout…, à Lyon, je me moque de tout…, à Villefranche, je pèse tout… » La campagne surtout l’inspire : « Pends-toi, friand Crillon, nous faisons des confitures, du raisiné et du vin cuit, des poires tapées et du bonbon, et tu n’es pas ici pour les goûter !
je m’aperçois, à ma manière de penser, que je deviens de jour en jour plus manant et plus trouble-fête. » — C’est le résumé de ce que j’ai eu à répondre depuis une quinzaine à plus d’un contradicteur, homme du monde et de bon ton. […] Cependant je n’y ajoute aucune foi, et je crois qu’à part ses amours et une certaine manière de voir un peu trop large pour un ecclésiastique, l’accusation est injuste ou au moins exagérée24. » Exagérée, soit ; mais la suite n’a que trop prouvé que dès lors le pli était pris. […] Cependant le comte de Senfft, qui lui-même et à la suite de sa femme, était resté un peu sous le charme, nous édifie très-bien, et en termes polis, sur la manière dont se menaient avec lui les transactions diplomatiques et sur les moyens par lesquels on parvenait à l’intéresser. […] Jamais il n’aura d’entretien particulier avec moi ; il ne pourra plus dire qu’il m’a conseillé ou déconseillé une chose ou une autre… » — Ce jugement de Napoléon, tout à huis clos, où il n’entre aucun emportement, où Talleyrand ne vient que comme incident et par manière d’exemple, doit être la vérité. […] La manière de dormir de M. de Talleyrand était très particulière comme d’autres articles de son hygiène et de son régime.
On sent que, par tournure d’esprit comme par position, ils sont bien plus voisins de la France d’avant Louis XIV, de la vieille langue et du vieil esprit français ; qu’ils y ont été bien plus mêlés par leur éducation et leurs lectures, et que, s’ils sont moins appréciés des étrangers que certains écrivains postérieurs, ils le doivent précisément à ce qu’il y a de plus intime, de plus indéfinissable et de plus charmant pour nous dans leur accent et leur manière. […] La Fontaine et Mme de Sévigné, sur une scène moins large, ont eu un sentiment si fin et si vrai des choses et de la vie de leur temps, chacun à sa manière, La Fontaine, plus rapproché de la nature, Mme de Sévigné plus mêlée à la société ; et ce sentiment exquis, ils l’ont tellement exprimé au vif dans leurs écrits, qu’ils se trouvent placés sans effort à côté et fort peu au-dessous de leur illustre contemporain. […] Les plus petites choses tiraient du prix de la manière et de la forme ; c’était de l’art que, sans s’en apercevoir et négligemment, l’on mettait jusque dans la vie. […] Une seule observation générale nous suffira : c’est qu’on peut rattacher les grands et beaux styles du siècle de Louis XIV à deux procédés différents, à deux manières opposées. […] « Le seul art dont j’oserais soupçonner Mme de Sévigné, dit Mme Necker, c’est d’employer souvent des termes généraux, et par conséquent un peu vagues, qu’elle fait ressembler, par la façon dont elle les place, à ces robes flottantes dont une main habile change la forme à son gré. » La comparaison est ingénieuse ; mais il ne faut pas voir un artifice d’auteur dans cette manière commune à l’époque.
Ce grand-père s’était ruiné de toutes les manières, avec les femmes, avec les maçons, et finalement il se ruinait en procès. […] La première question qu’il me fit fut si je savais beaucoup de choses. — « Oui, monsieur, lui dis-je, je sais l’Iliade et le blason. » — Lope se mit à rire, et me raconta la fable du marchand, du gentilhomme, du pâtre et du fils de roi ; cette fable et la manière charmante dont elle fut racontée me persuadèrent que le blason n’était pas la plus utile des sciences, et je résolus d’apprendre autre chose. […] Après une critique judicieuse du sujet, de la fable et de la composition, Rivarol y relevait la monotonie de la manière, le défaut absolu de mouvement et de variété : « On a dit que la pureté et l’élégance ne suffisaient pas dans un ouvrage de cette nature : il n’y a que les expressions créées qui portent un écrivain à la postérité. […] Dans une étude détaillée sur La Fontaine, cela se prouverait aisément : on le verrait, dans sa première manière, s’appliquer à la fable proprement dite, et en atteindre la perfection dès la fin de son premier livre, dans Le Chêne et le Roseau ; mais bientôt il est maître et il se joue ; il agrandit son cadre, il le laisse souvent, il l’oublie. […] L’invention dernière, l’idée de la sarcelle remorquant à la nage le lapin assis sur un radeau qu’elle a construit exprès pour lui faire passer la rivière, est exprimée d’une manière tout à fait pittoresque et gracieuse : Ah !
Ravaisson, une notion se présentant à elle, conçoit immédiatement ce qui, d’une manière ou d’une autre, la complète, ce qui lui est ou semblable ou contraire, ce qui dépend d’elle ou dont elle dépend, en un mot, les rapports rationnels. » Soit ; mais M. […] Comme la synthèse doit être à la fois cérébrale et mentale, il faut en chercher la vraie explication 1° dans la manière dont le cerveau agit, 2° dans la manière dont la conscience agit. […] Tout mouvement produit tend à se dépenser d’une manière ou d’une autre ; il ne peut donc s’arrêter dans un groupe de cellules cérébrales, il passe nécessairement aux groupes voisins pour retentir de proche en proche jusqu’à des groupes plus éloignés. […] Au contraire, une partie du cerveau peut très bien être occupée d’une manière tandis que l’autre est occupée d’une autre manière.
Les moralités délicates disaient qu’il allait tuer comme les tubéreuses tuent les femmes en couche, et il tue, en effet, de la même manière. […] dans le monde de la Chute, ce livre sera moral à sa manière ; et ne souriez pas ! cette manière n’est rien moins que celle de la Toute-Puissante Providence elle-même, qui envoie le châtiment après le crime, la maladie après l’excès, le remords, la tristesse, l’ennui, toutes les hontes et toutes les douleurs qui nous dégradent et nous dévorent, pour avoir transgressé ses lois. […] Car, pour Charles Baudelaire, appeler un art sa savante manière d’écrire en vers ne dirait point assez. […] Les effets se ressemblent beaucoup cependant, mais les hommes diffèrent… Monographe obstiné de l’ivresse, qui doit la peindre dramatiquement après l’avoir scientifiquement décrite, Baudelaire peut en devenir le Hogarth à sa manière ; mais un Hogarth littéraire, plus fort et plus fin que l’autre Hogarth.
Il seroit difficile de présenter sous un jour plus frappant le Charlatanisme, les intrigues, les manéges & tous les travers de la Philosophie moderne, qu’ils ne le sont dans ces Mémoires ; Production vraiment originale, où la critique est mise en action de la maniere la plus piquante & la plus capable de faire impression sur les esprits mêmes prévenus. […] Préférable aux Provinciales de Pascal, par son objet, cet Ouvrage n’est pas moins digne d’admiration par son plan & par la maniere dont il est exécuté.
Voyez, il semble avoir quelque chose de tout particulier dans l’esprit, à en juger par la manière dont il regarde le bleu du ciel. » C’est là Hoffmann, et lui-même nous a donné la clef de son génie. En un temps où on est las de toutes les sensations et où il semble qu’on ait épuisé les manières les plus ordinaires de peindre et d’émouvoir, en un temps où les larges sentiers de la nature et de la vie sont battus, et où les troupeaux d’imitateurs qui se précipitent sur les traces des maîtres ne savent que soulever des flots de poussière suffocante, lorsqu’on avait tout lieu de croire que le tour du monde était achevé dans l’art, et qu’il restait beaucoup à transformer et à remanier sans doute, mais rien de bien nouveau à découvrir, Hoffmann s’en est venu qui, aux limites des choses visibles et sur la lisière de l’univers réel, a trouvé je ne sais quel coin obscur, mystérieux et jusque-là inaperçu, dans lequel il nous a appris à discerner des reflets particuliers de la lumière d’ici-bas, des ombres étranges projetées et des rouages subtils, et tout un revers imprévu des perspectives naturelles et des destinées humaines auxquelles nous étions le plus accoutumés. […] c’est ce que nous ne saurions décider en aucune manière ; mais que la conquête existe, que la limite de l’art et des effets qu’il produit ait été reculée, c’est ce qui nous paraît hors de doute dans un cas comme dans l’autre, et ce qui le paraîtra à tous les lecteursiIntelligents d’Hoffmann, comme à tous les observateurs impartiaux du magnétisme animal.
M. de Voltaire est presque inimitable dans cette dernière partie : il a pris une manière toute nouvelle. […] Le pensionnaire se présente de la meilleur grace du monde, embrasse Rousseau, & répond, d’une manière vive & spirituelle, à toutes les questions qu’on lui fait. […] Il est bien difficile, en effet, qu’un long séjour hors de sa patrie, que les infirmités & les années ne changent la manière d’un écrivain.
Section 42, de notre maniere de réciter la tragédie et la comedie Puisque le but de la tragedie est d’exciter la terreur et la compassion, puisque le merveilleux est de l’essence de ce poëme ; il faut donner toute la dignité possible aux personnages qui la representent. […] Cette maniere de réciter est plus pénible à la verité que ne le seroit une prononciation approchante de celles des conversations ordinaires ; mais outre qu’elle a plus de dignité, elle est encore plus avantageuse pour les spectateurs, qui par son moïen entendent mieux les vers. […] Chaque païs doit avoir sa maniere propre de réciter la comédie.
Ce sont, non des manières de participer à la vie nationale, mais des tendances à s’en détacher. […] La loi les immobilise et les parque, ce qui est une manière de les enchaîner. […] Personne n’a été plus systématique, et personne n’a composé ses livres d’une manière plus discursive […] C’est une manière de coquetterie dialectique ; mais on peut trouver que de Maistre en a trop mis. […] On sent qu’elles « ont du vrai », et la pire manière d’être faux, c’est d’avoir du vrai.
J’ai tant couru à pied, à cheval et de toutes les manières, que je n’ai pu que penser à vous. […] Je suis toujours en compte ouvert de cette manière avec vous. […] Vous venez me faire semblant de croire que votre manière d’écrire m’ennuie. […] alors je ne vous écrirai plus si souvent, parce que les vifs plaisirs de votre manière de vivre vous tiendront lieu de mon amitié. […] Il est vrai qu’il ne se rendait pas trop compte de la manière de l’opérer.
La plaisanterie était, du temps de Voltaire, comme les apologues dans l’Orient, une manière allégorique de faire entendre la vérité sous l’empire de l’erreur. […] Les pensées qui rappellent, de quelque manière, aux hommes ce qui leur est commun à tous, cause toujours une émotion profonde ; et c’est encore sous ce point de vue que les réflexions philosophiques introduites par Voltaire dans ses tragédies, lorsque ces réflexions ne sont pas trop prodiguées, rallient l’intérêt universel aux diverses situations qu’il met en scène. […] Racine lui-même fait à la rime, à l’hémistiche, au nombre des syllabes, des sacrifices de style ; et s’il est vrai que l’expression juste, celle qui rend jusqu’à la plus délicate nuance, jusqu’à la trace la plus fugitive de la liaison de nos idées ; s’il est vrai que cette expression soit unique dans la langue, qu’elle n’ait point d’équivalent, que jusqu’au choix des transitions grammaticales, des articles entre les mots, tout puisse servir à éclaircir une idée, à réveiller un souvenir, à écarter un rapprochement inutile, à transmettre un mouvement comme il est éprouvé, à perfectionner enfin ce talent sublime qui fait communiquer la vie avec la vie, et révèle à l’âme solitaire les secrets d’un autre cœur et les impressions intimes d’un autre être ; s’il est vrai qu’une grande délicatesse de style ne permettrait pas, dans les périodes éloquentes, le plus léger changement sans en être blessé, s’il n’est qu’une manière d’écrire le mieux possible, se peut-il qu’avec les règles des vers, cette manière unique puisse toujours se rencontrer ?
La manière de traduire les auteurs en général, & les poëtes en particulier, a été un double sujet de dispute chez la nation laborieuse, pesante, mais souvent utile des traducteurs. […] Le comte de Roscommont, dans son poëme sur la manière de traduire, reproche aux traducteurs de notre nation d’être d’ennuyeux & froids paraphrastes ; « un trait, dit-il, une pensée, que nous renfermons dans une ligne, suffiroit à un François pour briller dans des pages entières. » Les circonlocutions & les paraphrases sont des défauts communs à tous les traducteurs. […] Passons à la dispute sur la manière de rendre les poëtes. […] Enfin toutes les manières possibles de traduire doivent aboutir à un seul objet, qui est de se faire lire de suite, avec plaisir, sans égard au texte, de ressembler à un excellent original.
Cette manière de concevoir la religion, qui a été celle des esprits les plus éclairés et les plus élevés, Lessing, Schleiermacher, Benjamin Constant, Mme de Staël, ne laisse pas que de soulever des difficultés considérables, lorsqu’au lieu de l’appliquer au passé on l’applique à l’avenir, et qu’on cherche à se faire une idée de la destinée religieuse de l’humanité. […] Non, mais je pense qu’elles saisissent un seul et même objet, l’infini, de deux manières différentes : l’une par le sentiment, l’autre par le raisonnement. […] C’est lui qui, dans notre Occident, a consommé dans son cœur de la manière la plus intime l’union du fini et de l’infini. […] Ce qu’il y a de fécond et de vivant dans le christianisme progressif de la nouvelle église, c’est précisément d’avoir résolu le problème religieux d’une manière toute différente de celle que l’on proposait il y a une trentaine d’années.
Si, à défaut d’une identité impossible, continuation implique ressemblance ; si finir un livre commencé est, de rigueur, se substituer plus ou moins à l’auteur dans l’esprit et la manière de son ouvrage, l’honneur qu’on fit à Renée dut tout d’abord lui causer beaucoup d’embarras. […] C’est, en effet, un frappant contraste avec la manière de Sismondi que le dernier volume de cette longue histoire. […] Ce n’est pas uniquement, du reste, par la manière et le talent de l’expression qu’Amédée Renée diffère de ce Sismondi auquel il a succédé bien plus qu’il ne le continue. […] Sismondi, qui n’était pas peintre et qui était économiste et philosophe, n’eût pas conçu de cette façon le règne de Louis XVI, et, s’il avait eu le temps de l’écrire, ne l’aurait pas concentré sous ce titre, qui est une manière de voir très entière et très accusée : Louis XVI et sa Cour.
Voilà ce qui saute aux yeux tout d’abord dans Carlyle, et ce qui y sauta d’une si étrange manière lorsque son livre sur la Révolution française fut révélé à la France. […] pas l’étendue de ce Rabelais qui est aussi un historien à sa manière, et qui, à force de génie, est parfois aussi beau sur son fumier que Sardanapale sur ses fleurs ; mais il en a pourtant quelque chose. […] C’est Hogarth le moraliste, Hogarth pour l’inspiration, le jet, la manière de regarder les hommes et les choses ; car pour le détail, pour l’appuyé du trait, pour la netteté, pour l’ordre de la composition, ce n’est plus Hogarth, le positif et réaliste Hogarth, brutal, mais réfléchi, profondément réfléchi, et froid dans sa brutalité. […] … Mais quoi qu’il soit de ces défauts que je relève et de quelque manière qu’on les juge, Carlyle est un peintre d’histoire, qui a créé je ne dirai pas un genre en peinture historique, — je ne crois pas aux genres et je méprise les Écoles : pour moi, les imitateurs les plus forts ne sont jamais que les assassins de ceux qu’ils imitent et les frappent, comme Néron Agrippine, au ventre qui les a portés, — mais Carlyle a fait le premier une chose qu’avant lui on n’avait pas faite.
C’est sa manière de voir et de juger la vie. C’est sa manière de sentir et surtout de dire, qui fait l’intérêt d’une pareille publication. […] Les idées et la manière qu’on trouve dans ce dernier fragment ne sont pas nouvelles. […] Seulement, cet agrément qui vient des circonstances du voyage, celui qui les raconte ne le gâte point par sa manière de les raconter.
A côté de son individualité, il y a celle de son traducteur, qui — en dehors de sa traduction — a fait œuvre d’histoire pour son propre compte et à sa manière, et cette manière est telle qu’elle mérite que la Critique s’y arrête, pour la bien caractériser. […] Les ruffians de Séville, dit Ambrosio de Salazar, dans son Miroir général de la Grammaire, ont toujours été réputés vaillants mâles, plus lestes qu’aucun moine à expédier un chrétien avec le viatique d’un blasphème et du sang frais en guise d’huiles saintes. » Voilà la manière de José-Maria de Heredia, — de ce peintre qui ne porte pas pour rien, comme vous voyez, un nom espagnol. […] Quand, parmi les touches vivantes et palpitantes de son style, une réflexion ou une ironie lui échappe, comme, par exemple, « ces couteaux qui cherchent des gaines neuves », ou encore « ce viatique du blasphème et ces saintes huiles d’un sang frais », ce sont bien là des ironies ou des manières de dire de ces gens du peuple de 1514 en Espagne.
Il paraîtrait que c’est une loi : les réalistes, comme les ours, viendraient mieux et seraient plus forts vers les pôles… Cette locution d’Ames mortes, qu’on pense tout d’abord être une manière de dire poétique et funèbre, toute pleine d’attirants mystères, n’est qu’un terme usuel en Russie, un terme vulgaire et légal… Vous saurez tout à l’heure ce que c’est… M. […] Le talent de Nicolas Gogol, on ne saurait le nier, mais la critique est une mesure, et elle n’a fait que la moitié de sa tâche quand elle s’est contentée de dire : « Cet homme a du talent, ou il n’en a pas. » Assurément, l’auteur des Ames mortes est un talent à sa manière, mais c’est un talent russe, et peut-être le plus russe de tous les talents de son pays. […] Manière de travailler qui, seule, le classerait à un rang presque subalterne, car l’Inspiration n’a pas pour procédé de tendre la main, quand cette main est celle du talent, ou le chapeau, qui est plus grand que la main, quand cette main est celle du génie ! […] Insupportable, nous l’avons dit déjà, par le sujet et la manière ; insupportable par la monotonie de son trait, qui est toujours le même ; insupportable par la vulgarité de son observation, qui ne s’élève jamais, quoiqu’il ait essayé, dans la seconde partie des Ames mortes, de peindre des gens qui ne sont pas simplement des radoteurs ou des imbéciles ; insupportable enfin par sa description de la nature, qui nous reposerait du moins de cette indigne société de crétins nuancés dans laquelle il nous fait vivre, et qu’il nous peint toujours à l’aide du même procédé : la comparaison de l’objet naturel avec le premier engin de civilisation venu.
Elle explique la pensée, la volonté, la moralité à sa manière, c’est-à-dire en altérant les caractères essentiels de toutes ces choses et en les ramenant aux lois de la nature. […] De tout temps, l’homme a été étudié de deux manières, par les sens extérieurs et par le sens intime. […] Ce travail de composition des idées se fait d’une manière analogue à celui des éléments organiques. […] Si l’on ne peut plus agir directement sur la volonté, qui n’est jamais libre, on peut développer et perfectionner l’intelligence, de manière que la volonté ne puisse se déterminer que par cette espèce de motifs qui ont pour conséquence des actions utiles. […] Elles établissent d’une manière irréfragable que tous les actes de la vie psychique, depuis les simples sensations jusqu’aux pensées et aux volitions, c’est-à-dire jusqu’aux actes proprement humains, ont pour condition le jeu des organes.
Je ne reviendrai pas sur ce qui vient d’être si bien dit, et dit de telle manière, avec tant de pénétration d’analyse, tant de bonheur d’expression et de vigueur d’accent, que l’étude semble faite : j’allais oublier que mon devancier, en me comblant, m’a interdit à son égard l’éloge. […] Et le poète, prenant la parole, décrit avec feu, avec rapidité, les différentes manières de le chercher ; mais, trop jeune sans doute et trop pur pour être censeur impitoyable, il s’arrête, il considère le bien à côté du mal, tant de charité, de dévouement, de patriotisme, de vertus militaires et de sacrifices, de poésie encore, tout ce trésor moral subsistant dans de belles âmes. […] Mentionner cette pièce et dire qu’elle a compté longtemps dans la balance du jury, c’est montrer au moins qu’on n’a fait exclusion d’aucune manière et qu’on ne s’est enfermé dans aucune école. […] Cette difficulté tenait au grand nombre des concurrents, à la diversité des sujets ou à la manière très diverse dont le même sujet était envisagé, et, je le dirai aussi, au grand nombre des juges. […] Il y a aussi un second jugement, plus réfléchi, plus méritoire, dans lequel on sacrifie quelque chose du sien et l’on se met au point de vue des autres ; oh, sans se départir de sa propre impression, l’on accorde quelque chose à d’autres manières de voir et de faire.
« Avec une santé généralement bonne en un sens et constante, mais un corps fatigué de tant d’ennuis et de tant de manières de vivre diverses et le plus souvent contraires, je suis découragé par cette incurable faiblesse des membres qui, en m’ôtant les ressources qu’un autre homme trouverait dans le malheur, me prive de cette résignation, de cette heureuse sécurité que je trouverais dans mes dispositions naturelles, dans les résultats de ma pensée, dans l’habitude d’être ou de me maintenir exempt de passions, de prestiges. […] J’étais destiné de toutes manières à voir la vie sans prestige, mais non sans goût et sans entraînement. […] Son économie lui permet de se conduire avec ses amis selon sa manière de voir en cela, quand les circonstances le demandent ; et ses simples connaissances le trouvent prompt à rendre… » (Ici une lacune.) […] À plus forte raison des livres dont le sujet et la manière conviennent très-peu au xixe siècle français ne peuvent-ils faire sensation dans le public… « S’il me survient assez tôt des circonstances qui me mettent en état de vivre, je me féliciterai fort d’être resté étranger au commérage du monde ; de n’avoir point eu de rapport en général avec ceux pour qui vivre, c’est être en place ; de n’avoir vu que de loin les meneurs :de n’avoir pas ajouté à mes misères leurs vaines passions et de n’avoir pas mis la main à leur petit feu d’artifice… (Ici une lacune.) […] « Après avoir passé une partie de la vie d’une manière indécise, ne devient-il pas plus difficile de sortir de ce vague ?
Dans le détail de la comparaison, toutefois, je regrette de trouver un peu trop de manière moderne, un peu de mignardise, un caillou qui le ride, et ce mot frôler, par exemple, que j’aimerais mieux dans quelque ballade à un sylphe lutin, que dans cette largeur de ton homérique. […] Je n’essayerai pas, comme un juge très-spirituel et infiniment agréable jusqu’en ses chicanes153, de faire dans ces vers double part, celle de la manière nouvelle et celle de l’ancienne la nouvelle ainsi porte le mauvais lot. Tous les vers de ce volume me semblent tenir de cette manière nouvelle ; seulement, les uns ont mieux réussi. […] A la manière dont le corps de bataille m’apparaît rangé et comme en si bel ordre après la lutte, il est évident que je ne considère point la bataille elle-même comme perdue. […] Moi aussi, j’aimerais de grand cœur à croire à un dix-septième siècle futur plutôt qu’à un Du Bartas ; mais il n’est pas en nous que cela finisse de telle ou telle manière.
Cette diversité me rappelle le charmant conte des Trois Manières, dont chacune, auprès des Athéniens de Voltaire, réussit à son tour ; et s’il y avait une quatrième manière de plaire, il ne faudrait pas lui chercher querelle. […] Villemain de cette manière et de cette nuance de style dont Mme de Staal nous offre la perfection ? […] Je trouve les préceptes ridicules sur cette matière, et j’aimerois presque autant qu’on voulût mettre en règle la manière dont les frénétiques doivent extravaguer. » J’ai dit de Mme de Staal qu’elle était comme le premier élève de La Bruyère, mais un élève devenu l’égal du maître ; nul écrivain ne fournirait autant qu’elle de pensées neuves, vraies, irrécusables, à ajouter au chapitre des Femmes, de même qu’elle a passé plus de trente ans de sa vie à pratiquer et à commenter le chapitre des Grands. […] Après les lettres à Mme du Deffand, celles de Mme de Staal à M. d’Héricourt, moins traversées de saillies, donnent une idée peut-être plus triste encore et plus vraie de sa manière finale d’exister.
La thèse de l’éducationnisme entraîne un certain nombre de thèses secondaires : dépréciation de l’intelligence naturelle et d’une manière générale de tous les dons innés que l’éducation est impuissante à suppléer ; dépréciation des influences physiologiques ; en particulier dépréciation de l’hérédité physiologique au profit de l’hérédité sociale (éducation, transmission des connaissances d’une génération à l’autre), en résumé dépréciation de tous les facteurs humains irréductibles au déterminisme éthico-pédagogique. […] Il y a une manière d’enseigner l’esprit critique qui donne un pli à l’intelligence et tout aussi difficile à détruire que celui que donne l’enseignement dogmatique. […] Ce qu’il y a de plus clair dans les différents systèmes d’éducation que nous venons de passer en revue, c’est que l’école est un moyen d’imposer plus ou moins sournoisement certaines croyances, certaines manières de penser et d’agir à la jeune génération. […] Ce philosophe définit de la manière suivante le rôle de l’école : « On va à l’école pour chaque jour assimiler une quantité donnée d’idées dont la liaison même, dite logique, est déterminée rigoureusement d’une certaine manière.
C’est là, sans doute, l’idée chrétienne de la corruption originelle et de la Chute ; mais, à la manière dont Pascal s’en empare, il la fait sienne en quelque sorte, tant il la pousse à bout et la mène loin : il fait de l’homme tout d’abord un monstre, une chimère, quelque chose d’incompréhensible. Il fait le nœud et le noue d’une manière insoluble, afin que plus tard il n’y ait qu’un Dieu tombant comme un glaive, qui puisse le trancher. […] Il est bien vrai qu’au moment où il se demande si la nature entière n’est pas un fantôme, une illusion des sens, et où, pour être logique, il se place dans cette supposition d’un doute absolu, il est bien vrai qu’il se dit : « Cet état de suspension m’étonne et m’effraie ; il me jette au-dedans de moi dans une solitude profonde et pleine d’horreur ; il me gêne, il me tient comme en l’air : il ne saurait durer, j’en conviens ; mais il est le seul état raisonnable. » Au moment où il dit cela, on sent très bien, à la manière même dont il parle et à la légèreté de l’expression, qu’il n’est pas sérieusement effrayé. […] Pascal ne procède point ainsi : il tient à marquer davantage et d’une manière infranchissable la différence des sphères. […] La manière émue dont ce grand esprit souffrant et en prière nous parle de ce qu’il y a de plus particulier dans la religion, de Jésus-Christ en personne, est faite pour gagner tous les cœurs, pour leur inspirer je ne sais quoi de profond et leur imprimer à jamais un respect attendri.
On voit que chacune de leurs réponses est une satire très-forte de l’homme en société ; et l’auteur italien développe, d’une manière encore plus satirique, les raisons de leur refus. […] Si ces principes, connus ensuite de Louis XIV, plus de quinze ans après, occasionnèrent la disgrâce de Fénélon, on peut juger de la manière dont La Fontaine aurait été reçu, s’il se fût avisé d’imiter jusqu’au bout l’original italien. […] La manière dont le renard répète sa leçon, la comparaison de Patrocle revêtu des armes d’Achille, sont des détails très-agréables, et du ton auquel La Fontaine nous a accoutumés. […] Ce vers aurait pu donner l’idée de la petite comédie intitulée le Procureur arbitre, dont le héros se conduit de la même manière. […] Manière bien plaisante d’expliquer pourquoi les malades d’alors étaient insupportables.
L’Ouvrage est divisé en différentes époques ; & l’Auteur a placé à la suite de chaque époque des réflexions où il développe, d’une maniere aussi sage que succincte, la principale cause de la destruction de chacun des Etats qui ont paru tour à tour sur la scene du monde, sans jamais confondre dans les événemens l’ouvrage de la politique avec celui du hasard. […] Nous devons à cet Auteur un Essai sur le récit ou sur la maniere de raconter, qu’on peut regarder comme un Traité complet de la Narration, & où l’on trouve d’excellens préceptes sur l’Apologue, le Conte, le Poëme épique, la Poésie dramatique, & le Roman.
L’unique maniere de M. l’Abbé Coyer, pour traiter les sujets graves, est l’ironie, maniere toujours sûre de manquer son effet, si elle est trop continue & trop uniforme, comme dans ses Ouvrages.
A cette occasion, on doit lui savoir plus de gré d’avoir compris que c’étoit la vraie maniere de traduire les Poëtes, qu’on ne doit lui reprocher son imprudence d’avoir entrepris un pareil Ouvrage avec aussi peu de talent pour la versisication. […] Il avoit encore traduit Martial d’une maniere si maussade, que Ménage mit sur l’exemplaire dont l’Abbé de Marolles lui avoit fait présent, Epigramme contre Martial.
Pour revenir à cette étrange Callipédie, on peut dire que ce sujet bizarre est traité d’une maniere très-agréable. […] A ces défauts près, qui ne sont pas excusables, on reconnoît dans ce Poëme quelques empreintes du goût de Virgile, & de la maniere de Lucrece.
Il ne cessa d’y travailler dans les années suivantes, essayant de se remettre sur pied et n’y parvenant qu’imparfaitement et toujours d’une manière boiteuse. […] Il me déplaît de voir Lassay se servir de cette ancienne affection sacrée comme d’une amorce ou d’un aiguillon dans ses conquêtes nouvelles, et d’une manière d’ingrédient pour se faire aimer. […] On ne sait rien de la personne à laquelle il s’adressait alors, sinon qu’elle était bien plus jeune que lui ; il l’appelle une enfant : La vivacité de vos sentiments, des manières simples et naturelles, et un air de vérité, m’avaient fait croire que vous ne ressembliez point aux autres femmes, et je me flattais de retrouver en vous cette personne que j’ai tant aimée, et qui, toute morte qu’elle est depuis longtemps, n’a rien à me reprocher que la passion que j’ai eue pour vous ; je vois que je me suis trompé. […] En vieillissant, il était, il est vrai, fort las du monde, ou du moins il le disait volontiers, mais il y revenait sans cesse : « On méprise le monde, et on ne saurait s’en passer. » Il reconnaissait que, pour un homme qui en a pris le train et l’habitude, c’était encore la meilleure manière d’être que de ne pas s’en séparer trop longtemps. […] » Voilà bien la manière marquée du xixe siècle, en regard de l’expression vive et légère du xxe .
Les quelques grands seigneurs qu’il est à même d’interroger ne le tiennent pas au courant d’une manière suivie ; il attrape ce qu’il peut et ne sait la politique que de raccroc. […] Avec tous les défauts de sa manière, Fontenelle est un grand esprit, une haute intelligence. […] Fontenelle, dans sa seconde et plus grave manière, ne se bornait pas aux Éloges des Académiciens ; sa plume fut plus d’une fois employée à des manifestes politiques et à des pièces d’État. […] Il ne changea rien d’ailleurs à sa manière. […] À toutes les attaques, en partie justes et fondées, dirigées contre votre tour d’esprit et votre manière, écrivains de tous les temps, à quelque genre que vous apparteniez, vous n’avez qu’une réponse à faire : renouvelez de mérite, fortifiez-vous dans la partie déjà forte de votre talent.
Excepté l’agriculture qui soutire un peu, tout le reste prospère d’une manière surprenante ; l’idée de la stabilité pénètre pour la première fois depuis cinq ans dans les esprits, et avec elle le goût des entreprises. […] Il avait raison, et je traduirai, si Ton veut bien, la même observation à mon tour et à ma manière. […] Nous avons eu l’occasion dans ces temps derniers d’étudier un homme, une organisation éminente aussi à sa manière, un pur prolétaire, lui (Proudhon), et qui n’avait pas eu dans son enfance de précepteur à domicile, puis plus tard l’éducation des voyages, puis une vie publique tout ouverte et toute tracée ; qui n’habitait pas parmi des laboureurs, mais parmi des ouvriers ; qui n’avait pas, à ses heures d’angoisses, les vieux murs d’un château pour refuge, mais un atelier obéré, hypothéqué : combien aussitôt le point de vue change ! […] C’est un peu présomptueux, c’est un contre-pied un peu choquant. — Il en vient ainsi par degrés, et d’élimination en élimination, à définir son mode de composition préféré, la manière combinée et construite qui est la sienne, et qui serait peut-être à rapprocher, pour le moment, de celle d’Edgar Quinet, à mettre en contraste et en parallèle avec ce procédé également réfléchi, diversement lumineux. […] Ma première pensée avait été de refaire à ma manière le livre de M.
Je distinguerai différentes manières, différents temps très-marqués dans la critique littéraire s’appliquant aux chefs-d’œuvre de notre xviie siècle. […] Il y a une manière très-usitée de prendre Pascal et de le présenter à grands traits dans son ensemble ; nous tous plus ou moins, écrivains de ce siècle, lorsque nous avons parlé de lui à la rencontre, nous sommes tombés dans cette manière-là. […] Cette manière d’envisager Pascal n’est pas fausse, elle est au point de la perspective, approximative à distance, légèrement figurative. […] On pourrait presque affirmer de même que de nos jours, non point absolument chacun, mais tout esprit sérieux et réfléchi, tout cœur troublé, qui conçoit le doute et qui en triomphe ou qui le combat, porte son Pascal en lui, et, selon les manières diverses de souffrir et de lutter, on conçoit ce Pascal diversement : chacun de nous fait le sien. […] Si l’on peut dire qu’il revint à la charge et se logea toujours plus ou moins au sein de sa foi, c’était là une manière, après tout, d’être assez mal logé et mal à l’aise ; et Pascal ne lui laissa, jour et nuit, ni paix ni trêve.
Que si par hasard on les ouvre, on ne va presque jamais jusqu’à la fin, pas plus que pour l’Astrée ou pour Clélie ; la manière en est déjà trop loin de notre goût, et rebute par son développement, au lieu de prendre ; il n’y a que Manon Lescaut qui réussisse toujours dans son accorte négligence, et dont la fraîcheur sans fard soit immortelle. […] Tandis que, dans ses romans postérieurs, il se perd en des espaces de lieu considérables et se prend à des personnages d’outre-mer, qu’il affuble de caractères hybrides et dont la vraisemblance, contestable dès lors, ne supporte pas un coup d’œil aujourd’hui, dans ces Mémoires au contraire il nous retrace en perfection, et sans y songer, les manières et les sentiments de la bonne société vers la fin du règne de Louis XIV. […] C’est l’espèce du gentilhomme poli de ce temps-là que le romancier nous a quelque peu arrangée à sa manière. […] Au reste, le Doyen de Killerine est peut-être de tous les romans de Prévost celui où se décèle le mieux sa manière de faire un livre. […] Antérieur par sa manière au règne de l’analyse et de la philosophie, il ne copie pourtant pas, en l’affaiblissant, quelque genre illustré par un formidable prédécesseur ; son genre est une invention aussi originale que naturelle, et dans cet entre-deux des groupes imposants de l’un et de l’autre siècle, la gloire qu’il se développe ne rappelle que lui.
Pour commenter en quelque sorte, et démontrer cette supériorité distinctive du talent de Turenne, qui consistait à tirer bon parti d’une affaire déjà compromise, et à la rétablir à force d’habileté de détail, de ténacité et de prudence, Bussy, dans ses Mémoires, se plaît à exposer en ce sens les opérations de la campagne de Flandre de 1656, pendant laquelle Turenne fit preuve de toutes ces qualités combinées qui caractérisent sa première manière militaire. […] Il pouvait avoir sa force et son cachet marqué de virilité dans l’observation et dans cette manière, qu’on a louée en lui, de laisser voir tout d’un coup sa pensée, et de ne laisser voir qu’elle uniquement ; mais il n’avait pas cette source vive de grâce et d’imagination qui rafraîchit et fertilise à jamais le fonds d’où elle sort. […] Le duc de Saint-Aignan avait perdu son fils, et Louis XIV lui avait fait je ne sais quelle faveur pour le consoler : J’ai su si bon gré au roi, écrit Bussy au duc, de la manière dont Sa Majesté vous a consolé, que ce maître-là m’a paru digne du service de toute la terre. […] Il tient tête à Mme de Sévigné dans sa première manière ; il la provoque avec bonheur. […] VIII (3e éd.), p. 546-547] Je ne suis pas content de la manière dont j’ai apprécié son portrait de Turenne.
Nous avons déjà indiqué dans les axiomes, d’une manière générale, que les serviteurs avaient fait violence aux héros dans l’état de famille, et que cette révolution avait occasionné la naissance des républiques. […] De cette manière, on peut dire avec Pomponius, rebus ipsis dictantibus regna condita ; pensée profonde, qui s’accorde bien avec le principe établi par la jurisprudence romaine : le droit naturel des gens a été fondé par la Providence divine ( jus naturale gentium divinâ Providentiâ constitutum ). […] Or les serviteurs ne jouissant d’abord de la vie que d’une manière précaire dans les asiles ouverts par les héros, il était conforme au droit et à la raison qu’ils eussent aussi un domaine précaire, et qu’ils en jouissent tant qu’il plairait aux héros de leur conserver la possession des champs qu’ils leur avaient assignés. […] Demander le droit des mariages, c’était donc demander le droit de cité, dont ils étaient le principe naturel ; cela est si vrai, que le jurisconsulte Modestinus définit le mariage de la manière suivante : omnis divini et humani juris communicatio . […] De cette manière, le droit des gens qui s’observe maintenant entre les nations, fut, à l’origine des sociétés, une sorte de privilège pour les puissances souveraines.
De quelle manière y vécut-il ? […] Les éditeurs des Pensées, d’une manière générale, et les biographes de Pascal ne l’ont peut-être pas assez approfondie. […] La meilleure manière alors serait peut-être de les traiter chacun à part, et chacun pour soi, selon les proportions d’une modeste brochure ou d’un article de revue. […] Comme si ce n’était pas une manière de la prendre, et qui peut-être en vaut bien une autre. […] L’abbé Prévost ne rouvrit les yeux que pour voir l’appareil cruel qui l’environnait, et de quelle manière horrible on lui arrachait la vie.
Je n’oublierai jamais la manière dont il s’est conduit pour moi. — Comment sont les ministres ensemble ? […] Suard n’avait indiqué cette vue que pour la faire avorter, au lieu que vous l’avez fécondée et développée d’une manière qui ne laisse rien à désirer. […] Oserai-je noter un inconvénient de cette manière si calme, si désintéressée et si profonde ? […] Nous aurons occasion surtout de le remarquer lorsqu’il abordera l’histoire ; il eut son procédé à lui et sa manière. […] Je vous exprime ici d’une manière bien vague et bien incomplète un sentiment réel et pénible.
Mais, d’une manière générale, sous l’influence des précieuses, la littérature, les mœurs même s’épurent, ou si l’on veut, se polissent. […] Le Père Bouhours publie ses Dialogues sur la manière de bien penser dans les ouvrages de l’esprit. […] Ces choses, mêlées ensemble en mille manières différentes et compensées l’une par l’autre, forment aussi les différents états et les différentes conditions. […] C’est une manière de comprendre la littérature, et nous venons d’en voir les avantages. […] Les trois manières de Bossuet. — La première est surtout « théologique et didactique » [Cf.
Comme d’ailleurs sans doute dans la réalité, les deux choses se mêlent de manière inextricable. […] Et s’ils existent de la même manière, qui s’impose, c’est pour la même raison. […] L’inverse ici et en cela, de Balzac, qui fut doué, de toutes manières, d’un appétit effréné. […] Et elles le sont d’une certaine manière. […] Prenez l’un après l’autre tous les romans de Wells, première manière.
Nous sentons donc non seulement des manières d’être, mais des manières de changer. […] La succession est donc le mode d’interprétation d’un certain ensemble de représentations coexistantes, une manière de les ordonner et de les classer. […] Il en est tout autrement chez l’homme, qui conçoit d’une manière précise le temps futur et le soumet même au calcul. […] Ayant toujours eu des successions de représentations, nous ne pouvons pas concevoir une autre manière de nous représenter les phénomènes, car cette manière ne nous est donnée dans aucune expérience. […] Or, « la capacité de recevoir des objets par la manière dont ils nous affectent s’appelle sensibilité ».
Ce n’est point de ces diverses manières qu’il entend le roman et qu’il est romancier. […] que Paul Féval ne craigne pas d’étoffer sa manière ! […] Dans tous les cas, ce qui reste acquis au débat, c’est que cette conversion n’est pas inventée, et qu’on le sent à la manière émue et pénétrante dont elle est racontée. […] L’orgueil se glisse partout, jusque dans la sainte passion d’expier l’orgueil. » Que vous savez bien dire, au contraire, et que j’aime cette manière de peindre ! […] Paul Féval, en ses Étapes d’une conversion, nous a révélé, par des qualités neuves, une manière pensive, intime, recueillie et profonde, que je ne lui connaissais pas, du moins au même degré où je la lui vois maintenant.
Ce serait pourtant se tromper beaucoup que de le juger un artiste si désintéressé ; et l’Hermès nous le montre aussi pleinement et aussi chaudement de son siècle, à sa manière, que pouvaient l’être Haynal ou Diderot. […] Affecté d’une telle manière, il appelle un accident un bien ; affecté de telle autre manière, il l’appellera un mal. […] Ce qu’on y gagne surtout, c’est de ne conserver aucun doute sur la manière de travailler d’André ; c’est d’assister à la suite de ses projets, de ses lectures, et de saisir les moindres fils de la riche trame qu’en tous sens il préparait. […] Entre autres manières dont cela peut être placé, écrit Chénier, en voici une : Un voyageur, en passant sur un chemin, entend des pleurs et des gémissements. […] Je trouve, en effet, sans sortir du résidu que nous possédons, les diverses manières des trois prétendus portefeuilles : par exemple, l’idylle intitulée la Liberté s’y trouve d’abord dans un simple canevas de prose, puis en vers, avec la date précise du jour et de l’heure où elle fut commencée et achevée.
Et en la perpétuelle diversité de sa manière de se produire qui est mouvement, d’éternité et pour éternité et dans l’illimité, — elle devient. […] Manière d’art. […] Et en la perpétuelle diversité de sa manière de se produire qui est mouvement, d’éternité et pour éternité et dans l’illimité, — elle devient. Diverse et perpétuelle, en vérité, pour de la Matière en mouvement exprimée, l’adéquat Poème, s’impose la manière d’art qui soit elle-même mouvement, — de mouvements pensants. […] La manière et la puissance de percevoir évoluent et progressent, doit-on en induire.
Le début est tout à fait épique, tout à fait mythologique à la grande manière des poèmes épiques anciens. […] Ce théâtre se compose d’une tragédie qu’il n’a pas achevée, dont il n’a écrit que deux actes, de plusieurs opéras et de comédies dans la manière italienne. […] Ce sont des vers tout à fait dans la manière de Molière jeune, de Molière faisant le récit de l’Etourdi, par exemple, ou aussi dans la manière de Corneille faisant le récit du Menteur, des vers de récit comiques ; je n’ai pas besoin de vous dire qu’un très grand poète moderne a introduit d’excellents récits comiques dans des pièces du reste fort intéressantes et même admirables. Ces récits comiques étaient tout à fait dans la manière du dix-huitième siècle, et vous voyez comme La Fontaine y réussit. […] Et il y a là les plus beaux vers de conte — je ne dis pas de fable — les plus beaux vers dans la manière des Contes, que La Fontaine ait écrits.
De cette manière, on rapporta aux auteurs de la sagesse vulgaire les découvertes de la sagesse philosophique. […] De même, les patriciens de Rome sont définis dans Tite-Live de la manière suivante, qui possunt nomine ciere patrem . […] J’ai connu un excellent musicien qui avait ce défaut de prononciation ; lorsqu’il se trouvait arrêté, il se mettait à chanter d’une manière fort agréable, et parvenait ainsi à articuler. […] Cette histoire des idées humaines est confirmée d’une manière singulière par l’histoire de la philosophie elle-même. […] Ainsi les Grecs et les Français qui ont passé d’une manière prématurée de la barbarie à la civilisation ont conservé beaucoup de diphthongues.
Mérimée avait à louer Charles Nodier, et l’on attendait beaucoup d’un tel sujet ; il s’en est tiré en étant très-simple, très-fidèle historien, et en serrant du plus près qu’il a pu le modèle un peu fantastique ; ç'a été une autre manière d’être charmant ; mais M. Mérimée l’a certainement été ; on n’a jamais mieux réussi à l’Académie, en étant moins académique ; il n’a fait aucune concession au genre et il en a triomphé ; il est resté dans sa propre manière, avec son genre d’esquisse précise, voisine du fait, son ironie contenue, sa fine raillerie qui ne sourit pas, mais dont le public n’a rien laissé échapper.
Comme il s’est, dans la suite, prononcé en toute occasion contre les inconvénients de l’éducation publique, telle surtout qu’elle existait alors, on a cherché dans les circonstances de ses premières années à expliquer cette opinion qui s’accorde si bien d’ailleurs avec toute sa manière de sentir et de craindre. […] Il a décrit dans une lettre à une parente la manière dont ses journées étaient ordonnées dans les premiers temps de cette réunion, et comment la vie s’y passait en commun presque ainsi que dans un couvent : le déjeuner entre huit et neuf heures ; de là, jusqu’à onze, lecture de l’Écriture ou de quelque sermon ; à onze heures, le service divin, qui se faisait deux fois chaque jour. […] Nulle créature ne saurait se montrer plus reconnaissante que mon pauvre malade après sa guérison : il exprimait sa gratitude de la manière la plus significative en me léchant la main, le dos de la main d’abord, puis la paume, puis chaque doigt séparément, comme s’il s’était inquiété de ne laisser aucune partie sans remerciement ; cérémonie qu’il ne renouvela jamais qu’une seule fois depuis et dans une occasion toute semblable. […] Cependant il était fort amusant à sa manière ; ses maussaderies mêmes étaient un sujet de divertissement, et, dans ses jeux, il gardait un tel air de gravité, et il s’acquittait de ses repas avec une telle solennité de manières, qu’en lui aussi j’avais un agréable compagnon. […] D’abord il ne faisait des vers que par manière d’amusement, comme il faisait des cages, comme il soignait des fleurs, comme il dessinait le paysage, cependant avec feu toujours ; il avait des veines pour chacun de ses goûts, et quand l’un le tenait, les autres devaient céder le pas pour quelque temps.
Grâce aux lettres qui vont être aujourd’hui publiées, on a d’ailleurs à ajouter aux preuves qu’il donne des preuves nouvelles, non moins décisives, et qui parlent plus sensiblement aux esprits et d’une manière peut-être plus animée que de simples dates. […] Celui-ci lui envoie en manière d’hommage les livres qu’il publie, même quand ils sont pleins de chiffres : « Ce qui est à ma portée, dit-elle, me paraît dolent et plein de désir. » Là s’arrête son épigramme. […] Une telle manière de sentir vaut mieux et honore plus les grandes dames sensées de l’ancien régime que les impertinences que leur prête M. de Courchamps, et que notre âge, envieux à la fois et copiste des aristocraties, est trop disposé à admirer. […] Ce qui la rapproche surtout de cet homme de grand esprit et qui avait laissé jusqu à présent trop peu de souvenir, c’est une certaine conformité dans la manière de juger les choses et les personnes, le besoin de causer à cœur ouvert, d’être entendue de quelqu’un. […] De qui sont-ils donc, et de quelle manière peut-on se rendre un compte vraisemblable de ce singulier livre ?
C’est que le père de Sismondi, pendant la révolution, s’était conduit d’une manière qui avait choqué ; « il allait vendre lui-même son lait à la ville ! […] Mme d’Albany elle-même le goûtait peu, surtout depuis qu’il eut parlé d’Alfieri et des défauts de sa manière tragique : « J’aime votre vivacité sur Schlegel, lui répondait Sismondi ; c’est, en effet, un pédant présomptueux, et sa manière de porter ses jugements est presque toujours d’une extrême insolence. […] Je crois même que la remarque qui vous a frappée était faite à l’avantage du comte Alfieri8… Mais Schlegel a une manière si âpre et si dédaigneuse en même temps de parler et d’écrire, que bien souvent il blesse alors même qu’il voudrait louer. » Schlegel n’avait pourtant pas tort, quand il parlait de la tragédie d’Alfieri ; il peut sembler plus rigoureux dans ses sévérités pour celle de Racine. […] C’est une manière de se fuir eux-mêmes que de fuir ce qui leur ressemble ; mais cette manière ne peut leur réussir longtemps. » Je continuerai cette suite d’extraits, en les dirigeant le plus que je pourrai, la prochaine fois, du côté de la France et des personnes ou des idées qui nous touchent.
Les ouvrages d’imagination agissent sur les hommes de deux manières : en leur présentant des tableaux piquants qui font naître la gaieté, ou en excitant les émotions de l’âme. […] Plus de simplicité dans les manières et dans les situations fournirait aux écrivains, sous la république, beaucoup moins de scènes de comédies. […] Ce qui pervertit la moralité en France, c’est le besoin de faire effet d’une manière quelconque, et surtout par son esprit. […] Toutes les splendeurs qui dérivent des rangs suprêmes introduisent dans les sujets tragiques une sorte de respect qui ne permet pas à l’homme de lutter corps à corps avec l’homme ; ce respect doit jeter quelquefois du vague dans la manière de caractériser les mouvements de l’âme. […] On n’est donc curieux que des ouvrages qui peignent les caractères, qui les mettent en action de quelque manière, et l’on n’admire que les écrits qui développent dans notre cœur la puissance de l’exaltation.
Et à lui, il lui était réservé de le dire et de l’imprimer pour la postérité d’une manière unique. […] Si M. le duc de Noailles n’a voulu qu’exercer contre Saint-Simon des représailles sévères pour la manière injurieuse et haineuse dont celui-ci a parlé du maréchal de Noailles son ancêtre et de Mme de Maintenon, il n’y a rien là-dedans que d’excusable et de légitime jusqu’à un certain point : ce sont des querelles de famille où nous n’avons pas à entrer. […] Mais il y a, pour ces derniers, une autre manière bien autrement vraie de saisir les gens et les personnages en scène, de les fouiller et de les sonder quoi qu’ils en aient, de les mettre à jour et de les démasquer impitoyablement. […] S’il se trompe et s’abuse en faisant de lui une manière de dernier grand seigneur féodal, en le donnant comme issu du plus noble sang et, au moins par les femmes, de la lignée de Charlemagne, cette illusion devient un principe de générosité et de vertu. […] Le peintre est déjà dans le plein de sa veine et dans la largeur de sa manière.
Barbey d’Aurevilly, prend hautement le parti de ceux qu’il appelle les Prophètes du passé, et nous retrace, à côté de la grande figure de Joseph de Maistre, la figure ingénieuse et forte de Bonald, pour dire mon mot sur ce dernier, et pour assigner les principaux traits de sa manière. […] M. de Bonald, qui est le premier dans sa préface à reconnaître les défauts de sa manière, pense pourtant que les livres sont faits pour exercer de l’influence, et c’est pour cela qu’il écrit. […] Il a, même dans les choses vraies qu’il énonce, de ces expressions et de ces manières de dire qui sont le contraire de l’insinuant. […] Il croit donc que Dieu a fait l’homme à son image, et M. de Bonald a une manière de presser le sens des mots qui le mène à en tirer de longues et précises conséquences. […] Ses lettres à Joseph de Maistre, récemment publiées, nous le montrent simple en effet, suivant de tout point ses idées et les pratiquant, très occupé des détails, et revenant souvent d’une manière naturelle, mais cependant marquée, à ses soucis de famille et d’intérêts domestiques.
Necker intervient dans la guerre ouverte entre les incrédules et les intolérants de tout genre dont il était environné, comme un médiateur honnête, sensé, sincère, éloquent même à la longue, si l’on consent à l’écouter ; il dira de toutes les manières à ceux qu’il s’efforce de ramener : Un homme sage ne se permet jamais de semer la tristesse et le découragement, pour la ridicule vanité de se montrer un peu élevé au-dessus des opinions communes, ou pour le plaisir de faire des distinctions plus ou moins ingénieuses sur quelques parties de la religion établie. Il dira encore : Je souhaiterais que les hommes d’un esprit étendu, et qui découvrent mieux que personne comment tout se tient dans l’ordre moral, n’attaquassent jamais qu’avec prudence, et dans un temps opportun, tout ce qui communique de quelque manière avec les opinions les plus essentielles au bonheur. […] Il avait toujours été désintéressé en pareille matière ; il avait refusé durant ses divers ministères les appointements de ministre des Finances et tous les avantages qui étaient attachés à cette place ; il ne craignait pas de le rappeler avec un faste qui compensait, certes, le désintéressement : « Ainsi, s’écriait-il, l’Assemblée nationale peut à son aise me montrer de l’indifférence, je n’en resterai pas moins créancier de l’État de plusieurs manières, et jamais je n’ai tant joui de cet avantage, jamais je n’y ai tenu plus superbement. » Ces cris d’orgueil sont fréquents chez M. […] Une seule réflexion se présentera, comme une conséquence presque littéraire : il serait singulier que l’homme qui a vu bien des choses d’une manière distinguée, mais si peu conforme au génie français, eût vu juste précisément sur le point le plus difficile de tous, sur la forme de gouvernement la mieux appropriée au génie de la France41. […] Le fameux Necker, qui était dans cette ville, brigua l’honneur d’être présenté au Premier consul de la République française : il s’entretint une heure avec lui, parla beaucoup du crédit public, de la moralité nécessaire à un ministre des Finances ; il laissa percer dans tout son discours le désir et l’espoir d’arriver à la direction des finances de la France, et il ne connaissait pas même de quelle manière on faisait le service avec des obligations du Trésor.
Enfin on peut aller plus loin encore et se demander s’il n’y a pas une réalité inconnaissable non seulement pour nous, mais en soi et pour toute intelligence, une réalité qui existerait parce qu’elle existerait, sans qu’on en pût donner aucune raison, sans qu’on pût en aucune manière rendre son existence intelligible. […] Cette supposition, à son tour, vient de ce que l’expérience nous montre des choses autres que notre pensée, existant sans notre pensée et existant d’une autre manière que nous ne l’avions pensé. […] Spencer, d’ailleurs, ne sait lui-même ce qu’il entend par la persistance de la force : il interprète ce postulat de diverses manières qui sont contradictoires entre elles. […] Il y a une expérience en quelque sorte radicale et constante, qui est la conscience même de ce qu’il y a de permanent dans notre manière d’agir et de réagir, dans notre volonté intelligente. […] La raison n’est que la conscience se projetant en toutes choses, imposant à toutes choses ses propres manières d’être et trouvant dans l’expérience extérieure la confirmation de cette induction instinctive.
Ce malade a je ne sais quoi d’égaré dans les yeux, il sourit d’une manière effrayante, c’est sur son visage un mélange d’espérance, de douleur et de joie qui me confond. […] Cette grande suivante que je vois par le dos et qui la soutient, est tournée, contournée de la manière la plus déplaisante ; le bras dont elle embrasse sa maîtresse est gourd ; on ne sait sur quoi elle pose. […] Ce groupe avançant excessivement, chasse la mère de son plan, de manière qu’on doute qu’elle puisse appercevoir la sainte à laquelle elle s’adresse ; et cette mère avec ses suivantes chassées en avant, font paraître les figures d’en bas colossales. […] Je ne sais ce qu’ils entendent par une manière de faire lourde, qu’ils appellent allemande ; faciuntne nimis intelligendo, … etc. . […] Il y a donc un art inspiré par le bon goût dans la manière de distribuer les images dans le discours et de sauver leurs effets, un art de fixer l’œil de l’imagination à l’endroit où l’on veut.
Mais cette manière d’agir, au moins nette, au moins vaillante et qui semble au moins convaincue, n’est pas celle que M. […] Manière de se retrouver prêtre quand on a jeté sa soutane aux buissons du chemin ! […] Ernest Renan est un de ceux qu’elle a conduits à tout de cette manière. […] Steinthal, qui a travaillé énormément pour arriver à dire que le langage naît dans l’âme d’une manière aveugle. […] Ce fut là son état, le dessus de porte de sa pensée et de sa vie, mais l’étude des langues par laquelle il voulait faire son chemin n’en fut pas moins sa manière spéciale de prouver cette non-existence de Dieu, qui est la grande affaire de la philosophie du temps, l’Essai sur le langage, réimprimé aujourd’hui, est le premier essai de cette preuve qu’ait faite M.
La théorie de la Relativité, même « restreinte », n’est pas précisément fondée sur l’expérience Michelson-Morley, puisqu’elle exprime d’une manière générale la nécessité de conserver aux lois de l’électro-magnétisme une forme invariable quand on passe d’un système de référence à un autre. […] C’est ce qu’on verrait encore, sans considérer directement la composition des vitesses, de la manière suivante. […] Nous venons de voir que les zéros des deux horloges ont été placés de telle manière qu’un rayon de lumière parût toujours, à qui tiendra les horloges pour concordantes, mettre le même temps à aller de O en A et à en revenir. […] Considérons alors dans le système S′ une horloge H₁′, placée de telle manière que la droite équation indique la direction du mouvement du système, et appelons l la longueur de cette droite. […] La vérité est que le groupe de transformation découvert par Lorentz assure, d’une manière générale, l’invariance des équations de l’électro-magnétisme.
de la maniere de critiquer les auteurs. la critique est sans doute permise dans la république des lettres. […] C’est un fleuve qui se déborde en un instant, et qui, le moment d’après, est embrasé de maniere que les poissons mêmes y grillent. […] Il suffit, pour prouver ma pensée, de faire attention à la maniere dont nous apprenons nôtre langue et les langues étrangeres par un commerce habituel avec ceux qui les parlent, et à la maniere dont nous apprenons les langues mortes par les livres. […] La plûpart des gens n’en ont que des idées confuses, et leur principe n’étant pas stable, ils n’en raisonnent que d’une maniere chancelante. […] Il s’offre une maniere bien courte, et neanmoins bien solide de lui répondre.
Je regrette presque pour elle qu’elle n’ait pas gardé ce premier nom qui, en la spécifiant d’une manière moins distinctive, la définissait pourtant avec largeur et vérité. […] Selon moi, au moment où nous entrons sur la scène de la vie, c’est surtout l’instinct et le sentiment des facultés que nous portons en nous qui détermine, à notre insu, la manière dont nous voyons et dont nous entamons les choses. […] Les premiers Fragments philosophiques n’étaient pas entièrement exempts de cette manière. […] Pourquoi ne dirai-je pas que, tout à côté d’ici263, la plume excellente de notre ami M. de Sacy est, à sa manière, douée de qualités littéraires également fermes et sûres ?
Dans la discussion brillante, mais un peu confuse, à laquelle elle a donné lieu, ce qui nous a paru le plus intéressant, ce sont les faits psychologiques mis en lumière par les divers observateurs, et qui ont révélé une indépendance remarquable entre diverses opérations de l’esprit, que l’on serait tenté de croire liées ensemble d’une manière indissoluble. […] Il est bien difficile de juger d’une manière exacte du degré d’intelligence d’une personne qui a perdu le moyen de s’exprimer. […] Dax, qui se contente d’affirmer que le langage a son siège dans l’hémisphère gauche du cerveau, sans indiquer la place d’une manière plus précise. […] Je m’étonne que les médecins n’aient pas vérifié ce fait d’une manière plus précise, en demandant aux malades qui ont conservé, par exemple, la faculté de l’écriture, s’ils ont conscience de penser par le moyen des mots, et si l’impuissance de trouver ces mois est intérieure aussi bien qu’extérieure.
Tout à coup, elle devint, un matin, de George Sand, Mme George Sand, et même parfois Mme Dudevant… Mme Gustave Haller qui dédie ses livres à George Sand, la Présidente, en son vivant, de la République féminine des lettres, et dont les moindres billets sont pour les femmes des décorations qu’elles pendent au cou des livres qu’elles écrivent, Mme Gustave Haller suivra certainement l’exemple de celle qui l’a décorée… Et de cette façon, comme tout bas-bleu, du reste, elle ne montrera pas plus d’originalité dans sa manière de faire que dans sa manière de penser. […] Seulement, un jour, cette amitié consolatrice et sufficiente est, tout à coup, brisée — et je ne dirai pas de quelle sotte manière ; je vous l’épargnerai. — Alors, le pauvre ami, aussi malheureux que le pauvre amant, meurt d’un désespoir, compliqué, il est vrai, d’un fort anévrisme, et c’est ainsi que Mme Gustave Haller prouve du même coup la puissance de l’amitié chez son héros, et chez elle, la puissance de l’invention et de la pensée ! […] Ce livre de « Vertu » dont le titre est un titre à la manière anglaise (les Anglais seuls ont de ces livres abstraits qui disent l’idée de leurs livres), ce livre dont les mœurs sont anglaises, semble avoir été écrit par un bas-bleu anglais.
Je ne la connais pas personnellement ; et, d’ailleurs, on peut douter de tout, quand on pense que Mme de Sévigné n’aimait sa fille que dans l’absence et qu’elle n’était rien de plus qu’une grande artiste en sentiment maternel… Grande artiste, Mme André Léo ne l’est d’aucune manière ; mais elle n’en a pas moins l’accent maternel, bien plus que Mme Sand, qui a un autre accent moins pur… Mme André Léo, qui a failli (j’en ai vu l’heure) détrôner Mme Sand dans l’opinion, qui l’a sacrée la première femme de son temps, est un bas-bleu foncé, trop conglutiné dans son indigo, pour être jamais la créature, enflammée et inspirée, qu’on appelle une grande artiste. […] Les reins de son esprit sont soudés, et c’est l’institutrice qui se dégage avec le plus de netteté de tout l’ensemble de ses livres, à cette Enseignante, — il faut bien le dire, un peu cuistre, — qui professe l’instruction obligatoire et la morale indépendante et qui écrit des romans pour élargir, à la mesure d’un plus grand cercle, la petite classe qu’elle faisait peut-être autrefois, et pour, de cette manière, continuer son ancien et rogue plaisir de professer. […] Mme Sand rappelle le marquis de Lafayette, qui, platement révolutionnaire, et voulant s’aplatir encore davantage, est toujours resté, de manière et d’esprit, un grand seigneur. […] Mme de Staël l’a touchée un jour, avec l’éclat d’esprit qui caractérise sa manière ; mais bas-bleu ce jour-là, car, malheureusement, cette adorable femme avait des jours de bas-bleuisme, elle avait montré que nulle créature de son sexe n’a la pensée assez mâle pour résoudre une question à la taille du grand Bonald, puisqu’elle-même, Mme de Staël, ne le pouvait pas !
Il paraîtrait que c’est une loi : les réalistes, comme les ours, viendraient mieux et seraient plus forts vers les pôles… Cette locution d’Âmes mortes, qu’on pense tout d’abord être une manière de dire poétique et funèbre, toute pleine d’attirants mystères, n’est qu’un terme usuel en Russie, un terme vulgaire et légal. […] Assurément, l’auteur des Âmes mortes est un talent à sa manière, mais c’est un talent russe, et peut-être le plus russe de tous les talents de son pays. […] Manière de travailler qui, seule, le classerait à un rang presque subalterne ; car l’Inspiration n’a pas pour procédé de tendre la main, quand cette main est celle du talent, ou le chapeau, qui est plus grand que la main, quand cette main est celle du Génie ! […] Insupportable, nous l’avons dit déjà, par le sujet et la manière ; insupportable par la monotonie de son trait, qui est toujours le même ; insupportable par la vulgarité de son observation, qui ne s’élève jamais, quoiqu’il ait essayé, dans la seconde partie des Âmes mortes, de peindre des gens qui ne sont pas simplement des radoteurs ou des imbécilles ; insupportable enfin par sa description de la nature, qui nous reposerait du moins de cette indigne société de crétins nuancés dans laquelle il nous fait vivre, et qu’il nous peint toujours à l’aide du même procédé : la comparaison de l’objet naturel avec le premier engin de civilisation venu.
Qu’on nous permette de l’affirmer, il n’y avait que deux manières de traiter l’immense et difficile sujet qui a tenté M. […] Et nous disons deux seules manières et non pas trois ! […] Il raconte à sa manière ce que la Genèse raconte mieux que lui ; mais arrivé à l’homme, il brise la Genèse, et l’erreur monstrueuse monte sur les débris de l’hypothèse. […] L’erreur a des manières d’attacher le collier de force aux plus généreux esprits et de les traîner après elle !
Sans doute, en le lisant, il est bien vrai qu’on sent naître en soi une idée de nécessité qui subjugue ; dans l’entraînement du récit on a peine à concevoir que les événements aient pu tourner d’une autre façon, et à leur imaginer un cours plus vraisemblable, ou même des catastrophes mieux motivées ; la nature humaine, ce semble, voulait que les choses se passassent dans cet ordre, que les partis se succédassent dans cette génération ; étant donnée chaque crise nouvelle, on dirait qu’on en déduit presque irrésistiblement la suivante, et qu’on procède à chaque instant par voie de conclusion, du présent à l’avenir : non pas, au moins, que dans sa manière purement narrative ; M. […] Il fallait bien pour l’historien, sous peine de se traîner, en pure perte, dans les détails des plus dégoûtantes atrocités, en venir à reconnaître les lois générales qui régissent les partis dans les temps de violence, sinon les énoncer en doctrine, du moins les sous-entendre dans l’exposition des faits, et en révéler le sens au lecteur par cette manière de traduction vivante et lumineuse. […] C’est à cette manière si naïve de voir et de peindre qu’on doit tant de figures originales, piquantes ou, pour mieux dire, effrayantes de contrastes, et jusqu’ici envisagées trop absolument d’un seul côté : Danton, Desmoulins, Chaumette, Clootz, Saint-Just, Robespierre lui-même : un roman de Walter Scott n’offre pas des personnages plus vivants.
S’il n’était dans l’existence de l’homme qu’une seule époque, la jeunesse, peut-être, pourrait-on la vouer aux grandes chances des passions ; mais à l’instant où la vieillesse commande une nouvelle manière d’exister, le philosophe seul sait supporter cette transition sans douleur. […] Par une sorte d’abstraction, dont la jouissance est cependant réelle, on s’élève à quelque distance de soi-même pour se regarder penser et vivre ; et comme on ne veut dominer aucun événement, on les considère tous comme des modifications de notre être qui exercent ses facultés et hâtent de diverses manières l’action de sa perfectibilité. […] L’idée qui la domine, laissée stationnaire par les événements, se diversifie de mille manières par le travail de la pensée, la tête s’enflamme et la raison devient moins puissante que jamais.
Cet esprit, malgré l’appareil de réflexion & de dignité qu’il s’efforce de se donner, n’a jamais pu se débarrasser d’un je ne sais quel air de petitesse qui en décrédite les créations ; ces connoissances, pour être annoncées d’une maniere affectée & présomptueuse, tombent inévitablement dans les disgraces attachées â l’ignorance & au pédantisme ; ce talent, pour n’avoir pas été sagement cultivé, pour afficher trop de confiance, décele continuellement sa foiblesse, & révolte plus qu’il n’attache ; en deux mots, on peut, d’après l’expression de son premier Maître, M. de Voltaire, comparer l’esprit de M. de la Harpe, à un four qui ne cuit point. […] C’est sur-tout à ce défaut de modestie & de bienséance, dans la maniere de présenter ses idées, que M. de la Harpe doit attribuer le peu de succès de ses Ouvrages, & le peu d’estime dont il jouit parmi les Littérateurs, parmi les Gens du monde, & même parmi les Philosophes, ses Protecteurs. […] Ce qui n’a pas peu contribué encore à indisposer le Public contre M. de la Harpe, c’est la maniere impérieuse avec laquelle il a exercé les fonctions de Journaliste, soit dans le Journal de Politique & de Littérature, mort entre ses mains, soit dans le Mercure de France, auquel il travaille aujourd’hui pour la seconde fois.
Oui, ces raisons subsisteraient encore dans toute leur force, lors même que la physiologie viendrait à bout d’établir avec précision et d’une manière infaillible certaines relations rigoureuses entre l’intelligence et le cerveau. […] Hésite-t-on, entre mille circonstances diverses, choisissant tantôt l’une, tantôt l’autre, à volonté, et même d’une manière contradictoire ? […] En un mot, s’il n’y avait pas d’autres faits que ceux que nous venons de signaler, on pourrait conclure d’une manière à peu près sûre de l’instrument au musicien, comme du cerveau à la pensée, mesurer le génie musical par la valeur de l’instrument, comme les matérialistes mesurent le génie intellectuel par le poids, la forme, la qualité des fibres du cerveau.
Chaque âge écrit et lit à sa manière : la jeunesse aime les événements ; la vieillesse, les réflexions. […] D’ailleurs cette manière s’accommodait mieux avec ma nonchalance. […] Si nous interrogions Sénèque, et qu’il pût nous répondre, il nous dirait : « Voilà la vraie manière de louer mes écrits, et d’honorer ma mémoire. » 9.
Il n’est au-dessus d’aucune manière. […] C’est là une intuition, une contemplation, une manière de voir, et pas davantage ! Or, les intuitions, les contemplations, les manières de voir sont indiscutables, et nous avons précisément toutes les contraires à celles de M.
Cette investiture était donnée avec la formule que nous a laissée Tite-Live, savoir, que le roi allié servaret majestatem populi Romani ; précisément de la même manière que le jurisconsulte Paulus dit que le préteur rend la justice servatâ majestate populi Romani . […] On y retrouve aussi les biens ex jure optimo que les feudistes érudits définissent de la manière suivante : biens allodiaux, libres de toute charge publique et privée. […] Lorsque les universités d’Italie commencèrent à enseigner les lois romaines d’après les livres de Justinien, qui les présente d’une manière conforme au droit naturel des peuples civilisés, les esprits déjà plus ouverts s’attachèrent aux règles de l’équité naturelle dans l’étude de la jurisprudence, cette équité égale les nobles et les plébéiens dans la société, comme ils sont égaux dans la nature.
L’honneur du duc de Nivernais, son originalité mémorable sera dans cette fin, dans la manière unique et douce dont il supporta la ruine, la prison et le complet dépouillement. […] Ses manières sont douces et féminines, et, quoique savante, elle n’affiche aucunes prétentions. […] M. de Maurepas, son beau-frère, l’avait évalué d’une manière peu favorable, puisqu’il n’avait pas voulu qu’il eût même les apparences du crédit et qu’il lui parlât d’autres choses que de frivolités littéraires. […] Il y a plus d’une manière de tomber d’une position élevée avec dignité, avec décence ; mais il n’en est certes pas de plus douce, de plus accorte et de plus humaine que celle-là. À sa manière, ce petit-neveu de Mazarin n’a pas fait honte au courage d’esprit de son grand-oncle, et il a montré que, s’il aima de tout temps les muses légères, il avait bien réellement en lui une parcelle de l’âme d’Horace.
Ce bien, vous l’entendiez d’une manière un peu étroite. […] La religion était pour lui inséparable des bonnes manières et de la dose de bon sens relatif que donnent les études classiques. […] La jeunesse destinée à l’état ecclésiastique et la jeunesse destinée au premier rang social lui paraissaient devoir être élevées de la même manière. […] Sa manière d’agir, impérieuse à la façon d’un général d’armée, ne tenait pas compte des morts et des malades parmi ses jeunes recrues. […] On m’a dit que, plus tard, dans son diocèse, les choses se passèrent de la même manière, qu’il fut toujours plus aimé de ses laïques que de ses prêtres.
Toute cette conversation se fesait d’une manière fort interrompue. […] Ce monde n’est qu’un amas de molécules pipées en une infinité de manières diverses. […] La raison s’occupe des choses, le goût de leur manière d’être. […] Notre vie se partage ainsi en deux manières diverses de veiller et de sommeiller. […] La clarté, de quelque manière qu’on l’entende, nuit à l’enthousiasme.
Je passe mes diverses affections en revue : il me semble que chacune d’elles contient à sa manière une invitation à agir, avec, en même temps, l’autorisation d’attendre et même de ne rien faire. […] En général, une image quelconque influence les autres images d’une manière déterminée, calculable même, conformément à ce qu’on appelle les lois de la nature. […] Voici d’autre part les mêmes images, mais rapportées chacune à elle-même ; influant sans doute les unes sur les autres, mais de manière que l’effet reste toujours proportionné à la cause : c’est ce que j’appelle l’univers. […] Réalistes et idéalistes s’accordent à raisonner de cette manière. […] Une fois cette traduction établie, l’original pâlit, mais elle n’aurait jamais pu se faire si l’original n’avait été posé d’abord, et si la sensation affective n’avait pas été, dès le début, localisée par sa seule force et à sa manière.
C’est la nouvelle manière d’entendre aujourd’hui la critique. […] Disons-le d’une autre manière : il y a peut-être trop de « pensée » dans les vers de M. […] Ils n’ont qu’une manière de le représenter, comme une espèce d’exaspération ou de délire des sens. […] Spronck les a dites ici d’une manière assez ingénieuse. […] D’une manière si simple qu’elle en parut ce soir-là puérile, ou écolière.
Ils ont donc ainsi créé ce roman, psychologique à la fois et lyrique, dont les effusions ne sont en quelque manière que le trop-plein d’une âme qui se déborde, et en se débordant, se révèle. […] Joseph de Maistre, lui, s’est « chargé » de Bacon et de Voltaire, comme autrefois Voltaire s’était « chargé » de Pascal et de Bossuet ; et, là même est la raison de plus d’une analogie que l’on peut signaler entre sa manière et celle de Bossuet. […] Goethe, qui les lisait de près, avec une attention et une assiduité que soutenait la manière dont ils parlaient de lui, les trouvait « hardis au suprême degré ! […] Quelque fortune qu’il ait faite par la suite et de quelque manière qu’on en ait corrompu le sens, il n’a d’abord désigné que l’intention de réagir contre les excès de l’individualisme. […] Le Vieux Drapeau, Le Cinq mai, Les Souvenirs du peuple]. — Mais, d’une manière générale, il a manqué de force [Cf.
Je me figure aisément les femmes introduisant une manière nouvelle dans notre littérature. […] Sladen lui-même, il a fait son travail d’une manière très consciencieuse. […] Certainement l’emprisonnement fut pour lui une manière de purification. […] Comme il n’a pas de génie, il se conduit, ainsi qu’il est naturel, d’une manière admirable en toute circonstance. […] Nous pouvons donc saluer les essais que fait d’une manière magistrale M.
Le premier écrit d’une maniere élégante & ingénieuse, le second est encore plus fleuri que lui. […] La distribution en chapitres a paru d’une petite maniere. […] Turpin, leur successeur, n’a pris la maniere d’aucun d’eux ; il suit l’impulsion de son génie. […] Rapin de Thoyras est le premier qui ait traité ce sujet en notre langue d’une maniere distinguée. […] Lacombe en parle d’une maniere plus favorable dans son histoire de Christine, Reine de Suede, 1762.
Il avoit, outre cela, un esprit naïf & judicieux, un style simple, quelquefois énergique, & sur-tout une manière de concevoir & de présenter les choses, qui en fait un Auteur original. […] Il est vrai que la manière de procéder de Charron peut présenter d’abord l’idée de Scepticisme aux esprits superficiels ou intéressés ; mais il est aisé de prouver qu’il n’a jamais douté de la Religion qu’il professoit ; qu’au contraire son intention a toujours été de la défendre.
Les faits qu’il raconte sont appuyés sur des preuves incontestables, présentés sans enthousiasme, & dirigés d’une maniere très-utile pour instruire & édifier. Sa maniere d’écrire & les connoissances qu’elles supposent, prouvent combien il seroit capable d’ajouter à sa réputation littéraire, s’il n’en faisoit le sacrifice à des occupations plus importantes & non moins utiles à la Religion.
Mais comment avec une maniere de s’exprimer presque toujours insipide, grossiere, dégoûtante, inintelligible, Rabelais a-t-il pu passer pour un Ecrivain ingénieux, plaisant, agréable, & rempli d’allusions aussi fines que profondes ? […] Et pour cela, il faut en revenir à la nature du cœur humain : la gaieté le captive, la malignité a toujours su lui plaire, & la licence n’est pas toujours propre à le révolter, parce qu’elle flatte en quelque maniere un fond de corruption qui en est inséparable.
Rœderer a complétement raison contre ces manières de dire ; mais il s’abuse lui-même assurément quand il fait de cet hôtel le berceau légitime du bon goût, quand il nous montre Mlle de Scudéry comme y étant plutôt tolérée qu’exaltée et admirée. […] Deux mois avant la malheureuse mort de Madame, Mme de Montmorency écrivait à M. de Bussy, en manière de plaisanterie (1er mai 1670) : « Mme de La Fayette, favorite de Madame, a eu la tête cassée par une corniche de cheminée qui n’a pas respecté une tête si brillante de la gloire que lui donnent les faveurs d’une si grande princesse. […] Zayde est encore dans l’ancien et pur genre romanesque, quoiqu’elle en soit le plus fin joyau ; et si la réforme y commence, c’est uniquement dans les détails et la suite du récit, dans la manière de dire plutôt que dans la conception même. […] Elle avait, nous l’avons dit, avec Boileau plus d’un rapport de droiture d’esprit et de critique irréfragable, et était à sa manière un oracle de bon sens dans son beau monde. […] … Elle a eu raison pendant sa vie, et elle a eu raison après sa mort, et jamais elle n’a été sans cette divine raison, qui étoit sa qualité principale… Elle n’a eu aucune connoissance pendant les quatre jours qu’elle a été malade… Pour notre consolation, Dieu lui a fait une grâce toute particulière, et qui marque une vraie prédestination : c’est qu’elle se confessa le jour de la petite Fête-Dieu, avec une exactitude et un sentiment qui ne pouvoient venir que de lui, et reçut Notre-Seigneur de la même manière.
Cette nécessité qu’il maudit, il l’aime plus qu’il ne se l’avoue : dans son imprévu, souvent elle lui demande ce qu’il n’eût pas donné d’une autre manière ; elle supplée par accès et fait émulation en quelque sorte à son imagination même. […] Nul écrivain de nos jours ne saurait mieux prêter à nous définir d’une manière vivante le littérateur indéfini, comme je l’entends, que ce riche, aimable et presque insaisissable polygraphe, — Charles Nodier. […] Il a lu aussi les dernières Aventures du jeune d’Olban, publiées en 1777, et il s’en ressent d’une manière sensible. […] Si de tout temps il y eut en sa manière quelque chose qui est le contraire de la condensation, ces qualités élargies n’ont pas dépassé la mesure en se continuant, et elles ont rencontré, pour y jouer, des cadres de mieux en mieux assortis. […] Séraphine, Amélie, la fleur de ces récits heureux, l’ont assez prouvé : qu’on y ajoute la première partie d’Inès, on aura le plus parfait et le dernier mot de sa manière.
Ce pape opulent, magnifique, prodigue envers ses neveux, les Braschi, expia dans l’indigence et la captivité le luxe de sa vie et l’amabilité de ses manières. […] « Je ne rencontrai toutefois », dit-il, « chez le ministre du grand-duc que les manières les plus dures et le plus impoli des refus. […] J’affirmai que je ne concourrais en aucune manière pour obtenir cette place. […] Il conclut en demandant à Son Éminence si, sachant la manière de penser de ceux de son parti, elle croyait ces craintes tellement fondées qu’il ne fût pas possible de réussir. […] Il voulut donc aller le visiter sous quelque prétexte, — comme il était allé chez Calcagnini, — afin de juger si ses manières lui plaisaient, et pour s’entretenir un peu avec lui.
C’est déjà beaucoup, à son époque, qu’il nous ait transmis une telle idée de lui et de sa manière de sentir en écrivant ou en dictant. […] Le quatrième jour donc, qui leur avait été assigné, ils se rendirent au magnifique palais du doge, où ils le trouvèrent réuni à son Conseil, et là ils lui exposèrent leur demande : Sire duc, nous sommes à vous venus de par les barons de France qui ont pris le signe de la croix pour venger la honte de Jésus-Christ et pour conquérir Jérusalem si Notre-Seigneur y veut consentir ; et parce qu’ils savent certainement que nulle nation n’a si grand pouvoir par mer comme vous avez, vous prient-ils que vous vouliez vous occuper comment ils pourront avoir des vaisseaux pour accomplir leur pèlerinage, en toutes les manières et conditions que vous leur saurez indiquer et proposer, pourvu qu’ils les puissent tenir85. […] Alors, Geoffroy de Villehardouin, le maréchal de Champagne, prit la parole par l’accord et par la volonté des autres, et commença à dire en telle manière : « Seigneurs, les barons de France les plus hauts et les plus puissants nous ont vers vous envoyés, et vous crient merci pour qu’il vous prenne pitié de la cité de Jérusalem, qui est en servage des mécréants, et pour que vous vouliez, en honneur de Dieu, les aider à venger la honte de Jésus-Christ ; et par ce motif vous ont-ils choisis qu’ils savent bien que nulle nation, ni gent qui soit sur mer, n’ont si grand pouvoir comme vous avez, et en partant nous commandèrent que nous eussions à en tomber à vos pieds, et de ne point nous en relever que vous ne l’ayez accordé. » « Et alors les six députés s’agenouillèrent, pleurant beaucoup ; et le doge et tous les autres commencèrent à pleurer de la pitié qu’ils en eurent, et s’écrièrent tous d’une voix, et tendant les mains en haut : « Nous l’octroyons ! […] Virgile a imité cela pour Énée, mais déjà avec moins de vraisemblance et par manière d’archaïsme. […] Daru, que cette quatrième croisade n’eut guère pour résultat définitif que d’agrandir la suprématie maritime de Venise : « Le reste de l’Europe y perdit beaucoup de vaillants hommes et de monuments précieux, et n’y gagna que l’introduction de la culture du millet, dont le marquis de Montferrat envoya des graines en Italie. » S’il était vrai que la prise de Constantinople par les croisés et le sac de cette ville eussent fait périr, comme il est trop probable, des monuments de l’ancienne littérature grecque qui avaient échappé précédemment, il faudrait, nous les lettrés et les disciples des doctes, le déplorer avec regret, avec amertume : mais vouloir que toute une époque soit heureuse de la manière dont nous l’entendons, et que les chevaliers du siècle de Villehardouin conçoivent l’emploi de leurs facultés et de leur temps comme les hommes de cabinet de nos jours, c’est demander beaucoup trop.
Les deux écrits que nous annonçons ne font, chacun à sa manière, que les exposer et les développer. […] Dès aujourd’hui donc, nous pouvons étudier avec certitude Bossuet dans sa première manière ; nous pouvons, comme pour le grand Corneille, suivre les progrès et la marche de ce génie qui est allé grandissant et se perfectionnant, mais qui n’a pas eu de déclin et de décadence. J’essaierai de donner idée de cette première manière par quelques exemples. […] que mon Sauveur a parcouru la Judée d’une manière bien plus aimable ! […] Je puis dire que, dans sa mâle et virile pudeur, il aurait rougi, même enfant, de cette manière d’être regardé pour être peint.
et ne voit-on pas, en revanche, des sujets admirables par une pensée noble et élevée, qui sont rendus d’une manière triviale ? […] Au reste, il a tracé un premier aperçu de ce tableau des Vendanges dans une page qui découvre bien sa manière à la fois philosophique et précise de composer : Je vous ai parlé de la Toscane pour y placer le sujet de mon troisième tableau, qui est Les Vendanges. […] Il y a une petite ville extrêmement pittoresque (San Geminiano) qui n’est pas éloignée de Volterra, et où la manière de recueillir le raisin est très originale. […] Il n’y a que les ouvrages de Michel-Ange qui se distinguent d’une manière particulière ; mais son génie était si supérieur qu’il a presque inventé la représentation d’une force, d’un caractère et d’une énergie qu’il n’a pu trouver dans la nature qu’avec de grandes difficultés et une observation continuelle. […] Quand, au contraire, je suis content, je suis autant occupé, mais d’une autre manière. » Ainsi se passa, tant qu’il fut maître de lui et que sa volonté tint les rênes, cette vie laborieuse et exemplaire.
Thiers, en tête de ce tome xiie , que les circonstances avaient retardé et qui sera suivi rapidement de trois autres, a mis une préface vive, animée, dans laquelle il expose sa manière d’entendre et d’écrire l’histoire, et où il parle aussi de lui-même et des choses présentes avec dignité et convenance. […] Mais j’ai lu trop attentivement ces derniers volumes, et je me suis remis par là trop avant dans le train du récit et dans le procédé de l’historien pour n’en pas dire encore une fois ma pensée et d’une manière directe. […] Ce vieux guerrier simple, rude, opiniâtre, qu’on vient de voir dans toute sa grandeur militaire à Essling et à Wagram, mais qui par ses manières fait déjà contraste avec les généraux plus jeunes formés à l’école de Napoléon, est dessiné par l’historien, dans cette campagne de Portugal, en traits naturels et ineffaçables. […] Il veut savoir, il veut s’expliquer le mouvement des choses humaines, mais se l’expliquer d’une manière si particulière, si précise, si appropriée à chaque ordre de faits et à chaque branche d’affaires, que cette seule connaissance, pourvu qu’on y atteigne, lui paraît constituer la condition fondamentale, l’essence même de l’histoire ; il appelle cela l’intelligence. […] Thiers a songé à faire la critique de tant de fausses manières historiques du jour, de tant de figures d’historiens à nous connues ; mais en les voyant de toutes parts, à droite et à gauche de la rive, se réfléchir dans sa parole limpide comme dans un ruisseau, elles ne m’ont jamais paru plus contournées ni plus grimaçantes.
Pour écrire des lettres excellentes et durables en tant que pièces littéraires, je ne sais que deux manières et deux moyens : avoir un génie vif, éveillé, prompt, à bride abattue, et de tous les instants, comme Mme de Sévigné, comme Voltaire ; ou se donner du temps et prendre du soin, écrire à main reposée, comme Pline, Bussy, Rousseau, Paul-Louis Courier : — en deux mots, improviser ou composer. (On vient de publier un recueil très amusant de lettres qui sont entre les deux manières, qui tiennent à la fois de l’étude et de la libre causerie, de la préméditation et de la verve, celles de Béranger.) […] Aussi cette Correspondance nous rend-elle le plus sincère et le plus véridique témoignage de ses mœurs, de ses habitudes d’esprit, de sa manière d’être et de sentir. […] Lorsqu’on lui érigea de son vivant cette statue à laquelle il consentit sans l’avoir désirée, et qu’il aurait souhaité qu’on ne fît placer qu’après sa mort : « J’ai toujours pensé, écrivait-il à son vieil ami le président de Ruffey, qu’un homme sage doit plus craindre l’envie que faire cas de la gloire, et tout cela s’est fait sans qu’on m’ait consulté. » Cette statue, notez-le bien, lui fut érigée en manière de consolation et de dédommagement honorifique par ceux qui lui avaient fait un tort réel en obtenant sous main la survivance de sa charge d’intendant du Jardin du roi. […] Buffon, grand écrivain et homme de génie, a son genre, sa manière, ses disciples.
Quand il écrit à son maître ou à quelque ministre, il ne peut se contenir davantage, il dit tout, il dit trop, c’est sa manière de s’exprimer et de marquer sa pensée. […] M. de Maistre n’a rien de l’émigré en cela ; il voit l’ennemi en plein, dans toute sa grandeur : « Jamais, écrit-il en 1813, Napoléon n’a été plus grand militaire que dans la manière dont il s’est tiré de la catastrophe de 1812. » Mais ce qui le préoccupe le plus, c’est le tour et la trempe de l’esprit français : il revient à diverses reprises sur ce qu’il a dit tout à l’heure et qu’il a peine à s’expliquer. […] Il avait, d’ailleurs, des manières de l’exprimer qui étaient piquantes. […] pourquoi ne pas s’emparer de ce qui se passe sous nos yeux, pour se rendre compte de la manière dont les choses ont dû se passer dans des temps hors de notre portée et qui nous fuient ? […] Albert Blanc, joint et entremêlé à cette première publication des lettres diplomatiques de De Maistre, a été accepté et loué dans les journaux plutôt que discuté, il y a eu une critique qui a institué cette discussion à sa manière : c’est M.
Non pas qu’il étudie moins, qu’il possède et pénètre moins ses sujets ; mais, dans les nombreux volumes qui se succèdent, sa manière est non-seulement rapide » mais hachée, saccadée ; sa marche est haletante et comme fébrile. […] Je ne ferai ici ni la critique ni l’éloge de cette manière historique, la plus éloignée, je l’avoue, de mes goûts et de mes habitudes : qu’il me suffise de dire que M. […] L’historien reconnaît, en effet, ses bonnes intentions, sa tendre pitié pour le peuple et toutes ses vertus chrétiennes, mais il marque en même temps les étroitesses et les limites d’esprit de ce vénérable enfant, et il trouve, pour peindre le contraste de cette manière d’être individuelle avec les vertus publiques et les lumières étendues si nécessaires à un souverain, des expressions qui se fixent dans la mémoire et des couleurs qui demeurent dans les yeux. […] Il était fougueux jusqu’à vouloir briser ses pendules lorsqu’elles sonnaient l’heure qui l’appelait à ce qu’il ne voulait pas, et jusqu’à s’emporter de la plus étrange manière contre la pluie quand elle s’opposait à ce qu’il voulait faire. […] Et une autre fois, pendant une bonne veine, lorsque le duc de Bourgogne gagnait depuis quelque temps, d’une manière sensible, en douceur, en amour des lettres, en humanité, Fénelon écrivait sa fable enchanteresse : Le Rossignol et la Fauvette, la plus exquise de ses Fables, comme le dialogue d’Horace et de Virgile est le plus parfait de ses Dialogues.
Je tâcherai de le suivre, à ma manière, dans cette agréable promenade, et d’en faire profiter nos lecteurs. […] Le comte d’Albany, surpris et indigné, fut obligé de se retirer, la rage dans le cœur d’avoir été joué de cette manière… » Ce n’était là qu’un premier pas vers la délivrance, et ce premier pas, ce premier degré était une prison. […] Quelqu’un, qui la rencontra alors dans un de ces cercles brillants, nous la montre ainsi, moins en peintre qu’en observateur et en moraliste : « La comtesse d’Albany était, par sa figure, ses manières, son esprit, son caractère et son sort, la femme la plus généralement intéressante. […] Puis je lui parle, et il me semble qu’à sa manière elle m’entende et me sourie, et me dise : « Ne te rassasie pas de me couvrir de baisers ; tu en seras récompensé par ta douce amie, parce qu’autant que j’en ai reçu, elle t’en peut donner, s’il arrive que tu le lui redises en pleurant. » Ainsi parlait l’âpre poète devenu presque suave au moment le plus attendri : Et dans les années suivantes, quand il a été forcé de quitter Rome et de fuir son amie, et qu’il ne l’a pu rejoindre encore dans ce rendez-vous d’Alsace, mais lorsqu’il espère et prévoit que l’heure approche, il s’écrie dans un sentiment savoureux de vengeance et de prochain triomphe : Contre ceux qui l’ont séparé de sa dame (1783) « Qui donc ose m’éloigner de sa vue gracieuse, de la beauté réunie à la modestie, qui, avec son simple et délicieux sourire, nous fait à la fois l’aimer et la révérer ! Qui donc, d’une si barbare manière, m’a séparé de la douce source de ma vie, des beaux yeux noirs qui m’ont conquis le cœur, et qui ont guéri de toute erreur mon esprit ?
Mais tous ceux-ci impliquent, en quelque manière, le « procédé de dénommer. » Il faut donc voir d’abord en quoi consiste cet « artifice. » Il consiste à « inventer » des signes ou marques que nous imposons aux sensations et aux idées. […] Il nous faut en outre une manière particulière de considérer l’agrégat (phrase que M. […] Cette grande loi de notre nature nous montre immédiatement de quelle manière notre idée du futur est produite. […] Je réponds que non-seulement vous avez l’idée de demain, mais que vous l’avez d’une manière inséparable. […] Ainsi, sensations, idées, associations d’idées ; le tout varié, compliqué, agrégé, croisé, groupé de mille manières : voilà tout le mécanisme de l’esprit humain.