/ 1609
1021. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre quatrième. La propagation de la doctrine. — Chapitre II. Le public en France. »

Plus on est occupé, moins on rêve, et, pour des hommes d’affaires, la géométrie du Contrat social n’est qu’un pur jeu de l’esprit pur. […] Nous préférions un mot d’éloge de d’Alembert, de Diderot, à la faveur la plus signalée d’un prince… Il était impossible de passer la soirée chez d’Alembert, d’aller à l’hôtel de La Rochefoucauld chez les amis de Turgot, d’assister au déjeuner de l’abbé Raynal, d’être admis dans la société et la famille de M. de Malesherbes, enfin d’approcher de la reine la plus aimable et du roi le plus vertueux, sans croire que nous entrions dans une sorte d’âge d’or dont les siècles précédents ne nous donnaient aucune idée… Nous étions éblouis par le prisme des idées et des doctrines nouvelles, rayonnants d’espérance, brûlants d’ardeur pour toutes les gloires, d’enthousiasme pour tous les talents et bercés des rêves séduisants d’une philosophie qui voulait assurer le bonheur du genre humain.

1022. (1861) Cours familier de littérature. XI « LXIe entretien. Suite de la littérature diplomatique » pp. 5-79

Les Bourbons l’ont rêvée, mais c’était un rêve. […] unité destructive de tout équilibre et de toute paix, unité de l’extermination, unité mille fois plus mortelle à la France que le rêve antifrançais de l’unité de l’Italie à laquelle nous sommes assez aveugles pour concourir !

1023. (1895) Histoire de la littérature française « Quatrième partie. Le dix-septième siècle — Livre I. La préparations des chefs-d’œuvre — Chapitre II. Attardés et égarés »

La pastorale italienne est un rêve poétique ; l’idéalisme chimérique des sentiments se déroule dans l’irréalité charmante d’un paysage de fantaisie : avec Montemayor. […] D’Urfé fait pis : il veut du réel, et il épaissit, il alourdit le rêve.

1024. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — H — Hugo, Victor (1802-1885) »

Paul Meurice De l’œuvre qu’il conçoit à l’œuvre qu’il construit, Ensemble il rêve, atteint, accomplit le prodige ; L’oranger fait pousser à la fois sur sa tige La fleur, le bouton et le fruit. […] Dont l’acier clair et les éclairs Foudroient la nuit impure ; Doux chevalier pour les très doux enfants Dont vous baisiez les têtes De cette bouche au loin tonnante aux ouragans Et aux tempêtes ; Noir chevalier songeur par les soirs merveilleux Dont les feux immobiles Brûlaient dans la parole et dans les yeux Des soudaines Sybilles ; Clair chevalier et moissonneur d’azur Tantôt sur terre ou bien là-bas parmi les nues Où vous glaniez des phrases inconnues Pour définir te Dieu futur ; De par ton œuvre ouverte ainsi qu’une arche Devant l’humanité tragique ou triomphante, Poète en qui songeait l’hiérophante, Tu fus le rêve autour d’un monde en marche… [La Plume (1898).]

1025. (1883) Souvenirs d’enfance et de jeunesse « Chapitre IV. Le Séminaire d’Issy (1881) »

  Les sombres rêves de Calvin sont presque de l’optimisme pélagien auprès des affreux cauchemars que le péché originel cause à notre pieux contemplatif. […] Reid fut de la sorte longtemps mon idéal ; mon rêve eût été la vie paisible d’un ecclésiastique laborieux, attaché à ses devoirs, dispensé du ministère ordinaire pour ses recherches.

1026. (1887) Revue wagnérienne. Tome II « Paris, le 8 novembre 1886. »

Remarquez le rôle du Motif de réminiscence, confié à plusieurs thèmes, surtout au motif en ré bémol des harpes qui ouvre la célébré ouverture, et qui réapparaît, comme thème caractéristique — Andantino religioso — du pasteur Struensée, entre autres dans le premier Mélodrame, dans le Rêve de Struensée, et au dernier moment, pendant que le pasteur bénit son fils et qu’ils se jettent silencieusement dans les bras l’un de l’autre. N’oublions pas la suave mélodie qui caractérise l’amour du ministre pour la Reine Mathilde ; voir le premier Mélodrame, le premier entracte, et le rêve de Struensée ; pendant que celui-ci murmure dans son sommeil le nom de la bien-aimée, et plus tard, au moment où il est réveillé.

1027. (1888) Revue wagnérienne. Tome III « IV »

Après une légère défaillance vocale au début du rêve, Mme Fidès-Devriès se montre la grande cantatrice que l’on sait. […] Attendri par le grave spectacle de notre misère, préoccupé par l’affirmation vaillante qui consola tant de foules disparues, il a spontanément exprimé, dans ses œuvres, le rêve séculaire de la souffrante humanité.

1028. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Parny poète élégiaque. » pp. 285-300

Je prends Musset comme le plus voisin de nous et à notre portée : croyez-vous qu’en aimant sa maîtresse, celle qu’il a tant célébrée, il n’aimât pas surtout le génie en elle, autre chose que la femme, l’idéalisation d’un rêve ?

1029. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « LA REVUE EN 1845. » pp. 257-274

Un tel moment de crise est-il donc arrivé pour la littérature, et ce qui devrait être la source et le refuge des idées élevées, des nobles rêves ou des travaux studieux, n’est-il donc plus dorénavant que le plus envahi, le plus éhonté des carrefours ?

1030. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « Le Brun »

On devine pourtant et l’on rêve à plaisir ce petit monde heureux, d’après quelques épîtres réciproques et quelques vers épars : Abel, mon jeune Abel, et Trudaine et son frère, Ces vieilles amitiés de l’enfance première, Quand tous quatre muets, sous un maître inhumain, Jadis au châtiment nous présentions la main ; Et mon frère, et Le Brun, les Muses elles-mêmes ; De Pange fugitif de ces neuf Sœurs qu’il aime : Voilà le cercle entier qui, le soir quelquefois, A des vers, non sans peine obtenus de ma voix, Prête une oreille amie et cependant sévère.

1031. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « M. Rodolphe Topffer »

Topffer venait à peu près de terminer le roman de Rosa et Gertrude, dont la donnée et les situations lui avaient été suggérées par un rêve, et qu’il composa d’abord tout d’une haleine.

1032. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre premier. La structure de la société. — Chapitre I. Origine des privilèges. »

Au pain du corps ajoutez celui de l’âme, non moins nécessaire ; car, avec les aliments, il fallait encore donner à l’homme la volonté de vivre, ou tout au moins la résignation qui lui fait tolérer la vie, et le rêve touchant ou poétique qui lui tient lieu du bonheur absent.

1033. (1895) Histoire de la littérature française « Troisième partie. Le seizième siècle — Livre III. Poésie érudite et artistique (depuis 1550) — Chapitre I. Les théories de la Pléiade »

La défense et illustration de la langue française Un jeune gentilhomme vendomois, Pierre de Ronsard192, obligé, dit-on, par une surdité précoce, de renoncer à la cour, se remet à l’étude : pendant sept ans, avec un de ses amis, Antoine de Baïf, il travaille le grec et pratique les écrivains anciens sous la direction de l’hélléniste Daurat ; il rêve de fabriquer à sa patrie une littérature égale aux chefs-d’œuvre qu’il admire : il rencontre dans une hôtellerie Joachim du Bellay, le doux Angevin, plein des mêmes ambitions et des mêmes espérances.

1034. (1887) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Troisième série «  Les femmes de France : poètes et prosateurs  »

Les rêves les plus généreux de ce siècle, les chimères sociales des bons utopistes et leurs philosophies mystiques se réfléchissent toutes dans vos livres, un peu pêle-mêle quelquefois, car vous aviez souci de les refléter plus que de les éclaircir, chère âme grande ouverte !

1035. (1899) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Septième série « « L’amour » selon Michelet » pp. 47-66

Aussi est-ce un rêve.

1036. (1766) Le bonheur des gens de lettres : discours [graphies originales] « Le Bonheur des gens de lettres. — Premiere partie. » pp. 12-34

Que l’ignorance confonde l’homme de Lettres avec ces hommes livrés à la paresse sous le nom de repos, qui se dérobent à l’agitation générale pour vivre dans le desœuvrement, qui dorment mollement sur des fleurs, en s’abandonnant au cours enchanteur d’une riante imagination ennemie du travail, & amie de la paix, dont la longue carrière peut être considerée comme un doux rêve, & qui tombent dans les bras de la mort, sans avoir daigné graver sur la terre le souvenir de leur existence ; cette injustice ne m’étonnera point, elle sera digne d’elle : mais l’œil qui aura suivi les travaux de l’homme de Lettres jugera différemment, il le verra souvent insensiblement miné par de longues études, périr victime de son amour pour les Arts, tomber en poursuivant avec trop d’ardeur la vérité, comme l’oiseau harmonieux des bois tombe de la branche au milieu de ses chants, ou plutôt comme ces illustres Artistes dont la main intrépide interrogeant dans la région enflammée de l’air le phénomene électrique, couronnent tout à coup leur vie par une mort fatale & glorieuse.

1037. (1913) Les antinomies entre l’individu et la société « Chapitre V. L’antinomie esthétique » pp. 109-129

Elle substitue au monde réel et à la vie pratique ou nous devons déployer notre activité utile et remplir notre tâche d’êtres moraux, une image de rêve, un mirage qui nous abuse et nous égare.

1038. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre VI. Jean-Baptiste  Voyage de Jésus vers Jean et son séjour au désert de Judée  Il adopte le baptême de Jean. »

Le féroce Abdallah, pacha de Saint-Jean-d’Acre, pensa mourir de frayeur pour l’avoir vu en rêve, dressé debout sur sa montagne.

1039. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre XV. Commencement de la légende de Jésus  Idée qu’il a lui-même de son rôle surnaturel. »

Mais depuis la fin des Asmonéens, le rêve d’un descendant inconnu des anciens rois, qui vengerait la nation de ses ennemis, travaillait toutes les têtes.

1040. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre XIII. Dernière semaine de Jésus. »

A chaque pas, de la route fatale, le royaume de Dieu s’approchait ou s’éloignait dans le mirage de leurs rêves.

1041. (1881) La psychologie anglaise contemporaine « M. Bain — Chapitre IV : La Volonté »

Je regrette, pour ma part, que l’auteur ait été si sommaire sur les phénomènes qui font la transition de la psychologie normale à la psychologie morbide (rêves, sommeil magnétique, etc.), et qu’il semblait si bien en état d’étudier.

1042. (1872) Les problèmes du XIXe siècle. La politique, la littérature, la science, la philosophie, la religion « Livre V : La religion — Chapitre I : Philosophie religieuse de M. Guizot »

Son rêve, c’est l’unité universelle.

1043. (1765) Essais sur la peinture pour faire suite au salon de 1765 « Ce que tout le monde sait sur l’expression, et quelque chose que tout le monde ne sait pas » pp. 39-53

Attendez, mon ami : peut-être que ce qui suit donnera quelque vraisemblance à des idées qui ne vous ont amusé jusqu’à présent que comme un rêve agréable, que comme un système ingénieux.

1044. (1861) Les œuvres et les hommes. Les historiens politiques et littéraires. II. « XV. M. Dargaud » pp. 323-339

C’est une espèce de marquis de Posa historique, mais qui ne rêve plus, quand il a congédié l’avenir et circonscrit son regard aux hommes et aux choses qu’il veut peindre.

1045. (1908) Les œuvres et les hommes XXIV. Voyageurs et romanciers « Eugène Fromentin ; Maxime du Camp »

La mauresque Haouâ est comme le rêve corporisé de ce voluptueux de contemplation qui s’appelle Fromentin.

1046. (1908) Les œuvres et les hommes XXIV. Voyageurs et romanciers « Madame Paul de Molènes »

ce rêve de Satin qui est une création, comme l’Hermaphrodite antique ; Satin, ce type doué d’un épicurisme et d’un platonisme qui ne savent pas plus où ils commencent et où ils finissent que ne le savent les teintes de l’arc-en-ciel ; Satin, le sigisbée incomparable, le sigisbée sans amour, mais non sans plaisanterie, et comme l’Italie, dans sa vie séculaire, n’en a jamais produit un.

1047. (1898) L’esprit nouveau dans la vie artistique, sociale et religieuse « II — Se connaître »

Perdue dans son rêve de suprématie, au milieu des nuages d’encens dont elle s’entoure, « l’âme idéaliste de la France », pour répéter une expression typique récemment employée à la tribune de la Chambre, ne laisse apercevoir qu’une pitié dédaigneuse à l’égard des « barbares » qui avoisinent son territoire sacré.

1048. (1929) Les livres du Temps. Deuxième série pp. 2-509

Il vit désormais dans son rêve. […] Et comment émanciperait-il les femmes, quand il ne rêve que d’asservir les hommes ? […] Le poète prolongeait la vie de son enfant dans le rêve et se la représentait égale aux circonstances qui réclament le plus de sacrifices. […] Dès l’enfance, j’ai pressenti et partagé vos rêves. […] En dehors de tout ce néfaste bric-à-brac, devant quoi se pâme la masse des médiocres et qui mène aux finales désespérances, il y a aussi le calme qu’il faudrait nous conserver quelque part, il y a le recueillement et le rêve.

1049. (1876) Romanciers contemporains

C’est un amour désespéré, sans issue possible, parce qu’il rêve la perfection. […] Il exècre le nuage et le rêve, et recherche seulement le vrai. […] Il a un pied dans la réalité, l’autre dans le rêve. […] Elle avait des aspirations, des désirs, des rêves, tout un monde de chimères dans la tête, et toute une colonne de calculs dans le cœur. […] Qu’est-ce après tout que l’œuvre incomparable de Mme de Sévigné, si ce n’est l’amour maternel entrevu en rêve ?

1050. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre V. Les contemporains. — Chapitre IV. La philosophie et l’histoire. Carlyle. »

Les idées, changées en hallucinations, perdent leur solidité ; les êtres semblent des rêves ; le monde apparaissant dans un cauchemar ne semble plus qu’un cauchemar ; l’attestation des sens corporels perd son autorité devant des visions intérieures aussi lucides qu’elle-même. […] Shakspeare y arrivait par la prodigieuse tension de son rêve poétique, et Carlyle répète sans cesse d’après lui « que nous sommes faits de la même étoffe que nos songes. » Ce monde réel, ces événements si âprement poursuivis, circonscrits et palpés, ne sont pour lui que des apparitions ; cet univers est divin. « Ton pain, tes habits, tout y est miracle, la nature est surnaturelle. » — « Oui, il y a un sens divin, ineffable, plein de splendeur, d’étonnement et de terreur, dans l’être de chaque homme et de chaque chose ; je veux dire la présence de Dieu qui a fait tout homme et toute chose1415. » Délivrons-nous de « ces pauvres enveloppes impies, de ces nomenclatures, de ces ouï-dire scientifiques » qui nous empêchent d’ouvrir les yeux et de voir tel qu’il est le redoutable mystère des choses. « La science athée bavarde misérablement du monde, avec ses classifications, ses expériences, et je ne sais quoi encore, comme si le monde était une misérable chose morte, bonne pour être fourrée en des bouteilles de Leyde et vendue sur des comptoirs. […] Vingt fois, cent fois dans l’histoire de la révolution française, on le voit qui abandonne son récit et qui rêve. […] C’est qu’ils n’étaient point des fous, mais des hommes d’affaires ; toute la différence entre eux et les gens pratiques que nous connaissons, c’est qu’ils avaient une conscience : cette conscience était leur flamme : le mysticisme et les rêves n’en étaient que la fumée.

1051. (1835) Critique littéraire pp. 3-118

Sa jeunesse s’exalte et se consume dans cette vie austère et monotone ; son imagination, « déjà fantasque et pervertie », rêve un bonheur qu’il ne trouve pas dans cet obscur manoir, sous l’œil du grand-père, dans ces effusions chastes et contenues d’une tendresse virginale. […] Ne rêve donc jamais en noir de moi. » C’est ainsi que Jacquemont joue avec l’idée de la mort. […] Là finit le beau rêve de Saint-Julien. […] Ce sont des êtres faussés, des énigmes sans mot, des figures comme on en voit dans les rêves d’une digestion pénible ou dans des élucubrations bachiques après souper.

1052. (1890) Impressions de théâtre. Quatrième série

Un jour, à la cour d’un prince du pays des rêves, on agite cette question : « Lequel, de l’homme ou de la femme, estle plusnaturollementinfidèle en amour ? […] Ils vivent d’un rêve. […] Elle vit dans un rêve, comme Rodion, — et comme, paraît-il, beaucoup de Russes… Le propre de l’âme russe, qui est, dit-on, éminemment idéaliste, c’est peut-être, qui sait ? […] Et quels rêves je faisais, Varia, quels rêves ! […] … » Montmorin l’interroge sur ses rêves d’avenir.

1053. (1878) Nos gens de lettres : leur caractère et leurs œuvres pp. -316

L’un rêve, l’autre regarde. […] on rêve, on pense, on combine, on compose en commun ! […] Les uns, fort nombreux, prétendent exprimer le Rêve et, partant, le circonscrivent, ce qui est une absurdité. […] Et je m’étonne qu’un écrivain révolutionnaire ait pu traiter aussi légèrement le poète-agitateur. « Il rêve », dites-vous. […] Mais il rêve avec le pays tout entier !

1054. (1922) Nouvelles pages de critique et de doctrine. Tome I

L’intensité du rêve où m’avait plongé Balzac produisit en moi des effets analogues à ceux de l’alcool ou de l’opium. […] Les villages parmi les platanes, les châteaux sur les crêtes, les causses, les vallées se développent, à perte de vue et de rêve. […] Que les faibles se nourrissent des plus nobles rêves. […] Poète délicat, prosateur aigu, passionné de musique, passionné également de métaphysique, son rêve d’existence eût été de recréer la nature, en la repensant par le dedans. […] Aussi l’enfant, sur les bancs du collège, rêve-t-il d’un métier qui suppose la paix.

1055. (1896) Journal des Goncourt. Tome IX (1892-1895 et index général) « Année 1895 » pp. 297-383

Puis le discours attendu de Clemenceau, le discours éloquent, où il montre le chevalier de Marie-Antoinette, arrivé par l’amour de la beauté, de la vérité, à devenir l’apologiste d’une Germinie Lacerteux, d’une fille Élisa, qui devaient être des femmes de la tourbe qui accompagnaient la reine à l’échafaud ; discours se terminant par ces hautes paroles : « Le paysan retourne le sol, l’ouvrier forge l’outil, le savant calcule, le philosophe rêve. […] À onze heures, Sarah Bernhardt accoudée sur le marbre de la cheminée du grand salon, lit nonchalamment, avec sa voix d’or, à travers une face-à-main, l’Hommage à Edmond de Goncourt de Robert de Montesquiou : Les paons blancs réveillés par la Faustin qui rêve, Glissent en notre esprit avec moins de douceurs Que la grâce de vos héroïnes sans trêve, Maître : Marthe, Renée, et Manette et leurs sœurs, ……………………………………………………… Les paons blancs évoqués par la Faustin qui songe. […] L’effet de cet homme au scaphandre, avec cet appareil sur la figure, ressemblant à un masque antique : ç’a été comme une apparition dans une vision, dans le rêve d’un buveur d’opium… et cet homme vous parlant la tête au-dessus de l’eau, de ce bateau au fond de l’eau, grand comme un navire de ligne, avec un revêtement entier d’émail à l’extérieur, et à l’intérieur de plaques de marbre vert, de marbre rouge… J’ai vu, une fois, le plongeur rapporter une tête de lion avec un anneau dans la gueule — l’attache des barques qui s’accotaient au navire… mais la merveille, jusqu’à ce jour retrouvée, est une tête de Méduse. » Jeudi 14 novembre Ce soir, chez Daudet, Larroumet cause curieusement du Maroc, qui est comme le dernier asile du vieil islamisme, et où les supplices auraient une qualité de férocité, dégotant ceux de la Chine.

/ 1609