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270. (1887) Revue wagnérienne. Tome II « Paris, le 8 novembre 1886. »

Wagner entame la question de Tannhaeuser à l’Opéra, et, loin de se plaindre de sa mésaventure, de déplorer la catastrophe, se demande, l’ironie et l’amertume aux lèvres, s’il ne vaut pas mieux, après tout, que les choses se soient ainsi passées, « car, dit-il, d’un grand succès, s’il eût été possible, en vérité je n’aurais su que faire. » C’est l’histoire de ce joueur qui, ne gagnant pas, aime mieux perdre. […] Elles ne sont possibles que par l’union de tous les exécutants en une seule pensée et par la puissance de l’enthousiasme. […] Madame Tharber, dont le capital a rendu possible la fondation de notre école nationale d’opéra, a de nombreuses relations avec les musiciens de France, surtout avec Massenet et Delibes, dont certaines œuvres ont été interprétées à New-York l’année dernière. […] Dupont et Lapissida se proposent de monter l’œuvre de Wagner avec tout le soin désirable ; la chevauchée des Valkyries et la scène du feu seront rendues avec autant de réalisme que possible. […] Il écrivait un jour : « Le chromatique procède par plusieurs semi-tons consécutifs, ce qui produit une musique efféminée, très convenable à l’amour. » Voltaire, aussi peu musicien que possible et souverainement rebelle à la musique, avait-il donc prévu, deviné, pressenti Tristan et Iseult ?

271. (1878) La poésie scientifique au XIXe siècle. Revue des deux mondes pp. 511-537

Tout le monde est d’accord sur ce point, que l’exemple de Lucrèce ne résout rien ; à ce degré de la science naissante qui n’était encore qu’un amas d’hypothèses et où la formule exacte des lois n’était ni trouvée ni pressentie, le mélange, l’union était possible : la science n’était à ce moment qu’une sorte de poésie abstraite. Mais aujourd’hui, avec la rigueur inflexible des méthodes, avec l’instrument de précision appliqué aux phénomènes et cette chaîne serrée des lois où chaque anneau, soutenu par le précédent, soutient ceux qui le suivent, dans ce vaste déterminisme qui exclut le hasard et n’admet l’hypothèse qu’à titre provisoire, un Lucrèce est-il possible ? […] Que dire encore, à ce point de vue du rajeunissement possible de la poésie, des ressources sans nombre que lui offrent les applications de la science et ces découvertes qui transforment si prodigieusement autour de nous les conditions de l’existence humaine et de la vie sociale ? […] Cela était possible avec les ressources abondantes que lui offrait l’humanité telle que l’imaginent les naturalistes de cette école, l’histoire avant l’histoire. […] Je persiste pourtant à croire que le poème scientifique est possible et qu’il se fera.

272. (1875) Premiers lundis. Tome III « Sur le sénatus-consulte »

On se comportait exactement des deux parts comme si l’on s’était dit : « L’empereur vient de faire une imprudence ; tâchons qu’elle soit la moins forte possible. » Ici du moins rien d’ambigu ; l’opportunité est claire, manifeste, impérative : la Chambre a donné le signal, l’empereur y a répondu ; tout le monde est préparé et averti ; il importe que rien ne soit éludé d’un grand acte ; qu’il trouve ses exécuteurs convaincus et sincères, et qu’il sorte pleinement tous ses effets. […] Tous avaient leur spécialité, et ce qui se rapportait à ce souci continu et perpétuel de l’opinion, à cette observation de la température morale, si je puis dire, et à l’action qu’il eût été possible d’y exercer en temps utile, cette partie vague et flottante de la politique, et si essentielle pourtant, ne rentrait dans la sphère ni dans le département de personne. […] Puisqu’on se donnait le temps de discuter si au long et de remanier sur quelques points le sénatus-consulte, j’aurais aimé qu’on tînt plus compte de l’amendement de M. de Sartiges et de la première partie du plan proposé par M. le président Bonjean, qui, l’un et l’autre, tendaient à ménager et à résoudre les conflits possibles entre le Corps législatif et le Sénat.

273. (1925) Méthodes de l’histoire littéraire « III. Quelques mots sur l’explication de textes »

Là même où domine l’idée, où la vérité plus que la beauté a été l’objet de l’écrivain, l’impression et l’interprétation personnelle sont à leur place : tout le monde ne voit pas tout ; les œuvres fortes ne se livrent qu’aux forts esprits ; et l’on se propose précisément, par l’exercice dont nous parlons, de former chez les jeunes gens une habitude d’aller au-delà du sens grossier que nul ne manque d’apercevoir, et un art de rassembler — dirai-je de mobiliser   rapidement toutes leurs facultés, pour arracher au texte le plus possible de son secret. […] Par l’explication, on s’habitue à se mettre dans une certaine attitude d’esprit, dans un certain état d’activité en face des textes ; on acquiert l’art de les interroger rapidement, de les presser, d’en voir et résoudre les difficultés, d’en saisir et d’en suivre les suggestions, de leur faire rendre tout ce qu’il nous est possible de leur arracher de leur contenu. […] Une conception relativiste de l’étude des textes est parfaitement possible.

274. (1913) Les antinomies entre l’individu et la société « Chapitre XIII. Conclusions » pp. 271-291

Durkheim admet un conflit possible entre l’individu et le groupe ; une résistance possible de la part de l’individu. […] L’individualisme uniciste revêt d’ailleurs autant d’aspects particuliers qu’il y a de modes possibles de différenciation pour les individus. — Un homme ne peut voir le monde, un homme ne peut penser exactement comme un autre homme ; de là un individualisme intellectuel. — Un homme ne peut sentir exactement comme un autre ; de là un individualisme sentimental. — Un homme ne peut avoir exactement les mêmes raisons d’agir qu’un autre ; de là un individualisme moral. — Un homme ne peut avoir exactement la même manière de sentir la beauté qu’un autre ; de là un individualisme esthétique. — Un homme ne peut avoir exactement les mêmes intérêts qu’un autre ; de là un individualisme économique. — Un homme ne peut avoir exactement la même puissance, ni par conséquent le même droit qu’un autre ; de là un individualisme juridique ou antijuridique, comme on voudra. — Ainsi dans les différents ordres de pensée et d’activité, l’individualisme uniciste nie tout idéal collectif : idéal intellectuel, sentimental, moral, esthétique, économique, juridique, politique.

275. (1881) La psychologie anglaise contemporaine « M. Bain — Chapitre IV : La Volonté »

Quand la connexion entre une fonction organique et les organes volontaires manque ou est très éloignée, alors l’influence volontaire n’est plus possible, comme dans le mouvement du cœur, la sécrétion du suc gastrique, l’acte de rougir ; ou, quand elle s’exerce comme chez les fakirs hindous et les faux épileptiques, on la regarde comme exceptionnelle. […] Ce que le charbon en combustion est à la machine, la nourriture et l’air inspiré le sont à l’organisme vivant ; et la conscience qui se produit du pouvoir dépensé n’est pas plus la cause de ce pouvoir, que l’illumination, projetée par le fourneau de la machine, n’est la source des mouvements engendrés. » N’est-il pas d’ailleurs étrange de penser que la conscience de l’effort est la cause du mouvement volontaire, quand on voit que si le pouvoir est aussi grand que possible, l’effort est nul, et que si l’effort est aussi grand que possible, le pouvoir est nul ?

276. (1885) Préfaces tirées des Œuvres complètes de Victor Hugo « Préfaces des pièces de théâtre — Préface du « Roi s’amuse » (1832) »

Le pouvoir avait ses raisons cachées, et nous les indiquerons tout à l’heure, pour ameuter contre le Roi s’amuse le plus de préjugés possible. […] Nous épargnerons autant que possible à une personne haut placée les conséquences de cette étourderie de courtisans. […] C’est un de ces instants de fatigue générale où tous les actes despotiques sont possibles dans la société même la plus infiltrée d’idées d’émancipation et de liberté.

277. (1872) Les problèmes du XIXe siècle. La politique, la littérature, la science, la philosophie, la religion « Livre V : La religion — Chapitre I : Philosophie religieuse de M. Guizot »

La tentation d’une victoire possible peut entraîner quelques imaginations égarées ; mais cette tentation est décevante. […] Tant qu’il peut croire que c’est sa ruine que l’on exige, il peut se refuser à tout entendre, comme un peuple ne peut pas consentir à traiter avec qui ne commence point par reconnaître son indépendance ; mais dès que l’on accepte de part et d’autre les droits de la discussion et de la pensée, le débat est possible, il est légitime, il est nécessaire. […] L’incarnation est donc possible.

278. (1861) Les œuvres et les hommes. Les historiens politiques et littéraires. II. « XV. M. Dargaud » pp. 323-339

Au xvie  siècle, dont il vient de nous donner l’histoire, il aurait été protestant, comme il est aujourd’hui, nous dit-il, purement théiste, comme il sera demain, si c’est possible, quelque chose de plus dégagé encore de la forme religieuse qu’un théiste, le progrès pour lui étant de briser de plus en plus la forme religieuse, comme l’oiseau qui, en croissant, briserait sa cage avec ses ailes : c’est enfin (je le regrette assez) un soldat sans chef, sans uniforme et sans discipline, de ce bataillon débandé et maraudeur du progrès indéfini, qui ne sait où il va, et qui prétend aller toujours ; mais malgré la fausse philosophie, malgré l’empoisonnement des théories modernes, malgré les amitiés d’idées et les prétentions candides d’une imagination bien assez poétique pour s’égarer, M.  […] pour nous, avec notre faiblesse, notre seule espèce possible d’impartialité11. […] J’ai déjà parlé de Coligny, ce sage d’épée, et de François de Guise, ce César de moins de gloire que l’autre César, mais qui avait la corruption en moins et le catholicisme en plus : mais Catherine de Médicis, Charles IX, Henri III, Machiavel, Rabelais, Montaigne, sont des figures sur lesquelles il n’y a plus désormais de méprises possibles pour l’histoire, et sur la plupart, jusqu’à ce jour, il y en avait !

279. (1894) Dégénérescence. Fin de siècle, le mysticisme. L’égotisme, le réalisme, le vingtième siècle

C’est ici le lieu de prévenir un malentendu possible. […] Parfois il est possible de les guérir de ces délires transmis, en les séparant de ceux qui les ont provoqués ; mais souvent aussi le trouble mental survit à la séparation même. […] Dans la dégénérescence moins complète, — l’imbécillité, — l’attention est possible, mais excessivement faible et fugitive. […] Or, la peinture a pour objet, d’après son essence, le visible et non le conjectural, le réel et non le possible et le vraisemblable, le concret et non l’abstrait. […] Comme ils ne poursuivent pas consciemment une tendance artistique déterminée, il n’est pas non plus possible de leur démontrer que cette tendance est fausse.

280. (1870) De l’intelligence. Deuxième partie : Les diverses sortes de connaissances « Livre quatrième. La connaissance des choses générales — Chapitre III. Le lien des caractères généraux ou la raison explicative des choses » pp. 387-464

Quand nous fabriquons par la pensée tel nombre, tel polygone ou tel cylindre, nous n’avons pas à expliquer son origine ; il n’existe pas en fait dans la nature ; il n’est que possible et non réel. Peut-être même, avec une nature arrangée comme celle que nous observons, n’est-il pas possible ; mais cela est indifférent. […] Et quels motifs pouvons-nous alléguer pour autoriser une supposition qui anticipe non seulement sur toute expérience future, mais sur toute expérience possible, et enveloppe dans l’immensité de sa prophétie l’immensité de l’univers ? […] Dans son cas, cet intermédiaire est une propriété des deux triangles élémentaires dont le quadrilatère est la somme possible. […] Ne pourrait-on pas admettre de même que l’existence réelle n’est qu’un cas de l’existence possible, cas particulier et singulier, où les éléments de l’existence possible présentent certaines conditions qui manquent dans les autres cas ?

281. (1890) L’avenir de la science « XV » pp. 296-320

Il croit plus au possible, parce qu’il connaît moins le réel. […] Sous un tel régime, la lutte n’est pas possible. […] Une carte de géographie n’est possible que quand le pays qu’il s’agit de représenter a été exploré dans tous les sens. […] Or comment une telle théorie serait-elle possible sans l’érudition ? […] Ne serait-il pas possible de réaliser ce prodige par un progrès de l’esprit scientifique, qui rendrait profondément sympathique à tout ce qu’a fait l’humanité ?

282. (1909) De la poésie scientifique

L’apport poétique qui se trouve maintenant consacré sous le nom de « Poésie scientifique », représente  de son principe philosophique à sa technique prosodique et rythmique, — une Doctrine continue… Je me suis simplement appliqué à moi-même la règle morale qui ressort de cette doctrine, d’avoir tendu, selon toutes les puissances accrues de culture qui étaient en moi, à l’art le plus complexe et le plus complet lié en la plus solide unité qui m’était possible : en le plus de volonté, en le plus d’effort. […] Mais, comme il n’était pas possible de supprimer pourtant le vivace acquis du double mouvement que nous avons rappelé : « Symboliste », d’une part, et « Scientifique », d’autre part  d’un tacite pacte entre gardiens du dogme et divers poètes nouveaux (ou retardataires, avons-nous dit), l’on parut discuter les théories émises, surtout techniques, sans les exposer d’ailleurs, et de manière assez habile pour, du mélange, créer le plus d’incertitude dans l’esprit du lecteur non averti, et donc, les amoindrir toutes, les dénaturer, les disperser s’il eût été possible ! […] Et tous deux, donc, exprimeront le moment palpitant où la cérébralité du poète s’unit tout à coup, en commotion de certitude, à l’essence même des choses qui sont sous sa méditation… Mais encore est-il prudent de préciser ce que nous avons entendu, poétiquement, par « Intuition », et dire que, nécessaire et motrice, elle ne nous peut cependant contenter en ses aperceptions soudaines et espacées, ou qu’il est possible de l’atteindre par successives approches. […] Car, si, dans le phénomène universel, dans le processus vital, nous constatons que tout organisme tende, par adaptation, à accomplir avec le moins de résistance possible, son acte  veut-on en même temps concevoir quel long, quel patient, quel tenace et total effort, cette adaptation a demandé ? […] Il n’est pas possible d’entrer au détail de cette Œuvre : œuvre-une et composée harmoniquement dont toutes les parties, tous les livres et tous les poèmes se commandent  Elle se compose de douze à quinze volumes venant en leur ordre préconçu, dont un tiers environ est maintenant paru : toute la première partie (dont une Édition nouvelle, revue et mise au plan exact d’expression vient d’être publiée)31, et les deux premiers livres de la seconde partie.

283. (1889) Essai sur les données immédiates de la conscience « Chapitre II. De la multiplicité des états de conscience. L’idée de durée »

Certes, il est possible d’apercevoir dans le temps, et dans le temps seulement, une succession pure et simple, mais non pas une addition, c’est-à-dire une succession qui aboutisse à une somme. […] Car il n’y a guère d’autre définition possible de l’espace : c’est ce qui nous permet de distinguer l’une de l’autre plusieurs sensations identiques et simultanées : c’est donc un principe de différenciation autre que celui de la différenciation qualitative, et, par suite, une réalité sans qualité. […] Il y a en effet, comme nous le montrerons en détail un peu plus loin, deux conceptions possibles de la durée, l’une pure de tout mélange, l’autre où intervient subrepticement l’idée d’espace. […] Pour définir la vitesse du mobile A au point M, il suffira d’imaginer un nombre indéfini de mobiles A₁, A₂, A₃, … tous animés de mouvements uniformes, et dont les vitesses v₁, v₂ v₃, …, disposées en ordre croissant par exemple, correspondent à toutes les grandeurs possibles. […] Bref, il faudrait admettre deux espèces de multiplicité, deux sens possibles du mot distinguer, deux conceptions, l’une qualitative et l’autre quantitative, de la différence entre le même et l’autre.

284. (1896) Le livre des masques

Les renseignements bibliographiques de l’Appendice, aussi précis que possible, sont là pour ajouter à ce tome de littérature, qui se glorifie d’abord des insignes masques de M.  […] Mais on a écrit tout le possible sur ce poète très aimé et providentiel. […] Voilà un possible arbre de Jessé, mais que je déclare inauthentique, car la perversité tragique de M.  […] Aphrodite a signalé par sa vogue le retour possible à des mœurs où il y aurait un peu de liberté : venu à sa date, ce livre a la valeur d’un contrepoison. […] Après avoir compulsé des dictionnaires et des manuels, je ne voyais de possibles Sophocles que les deux Robert Garnier, nés à la Ferté-Bernard, quand je songeai à Racine.

285. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Le cardinal de Bernis. (Fin.) » pp. 44-66

Vous me souhaitez des indigestions ; cela n’est guère possible aujourd’hui ; il y a douze ans que je suis fort sobre ; mais j’ai une humeur goutteuse dans le corps, qui n’est pas encore bien fixée aux extrémités, et qui pourrait bien m’obliger d’aller consulter l’oracle de Genève (le docteur Tronchin). […] Que Bernis eût réellement cette tranquillité et ce contentement dont il parle, et que ce soit chez lui l’état fondamental en ces années d’inaction et d’exil, je n’oserais en répondre : il suffit qu’il y tende, qu’il y revienne le plus possible par la réflexion, et que son humeur ne jure pas avec son désir. […] Quant aux moyens, il les désire et il les conseille lents, modérés, aussi humains et aussi conciliants qu’il est possible dans un acte de cette vigueur. […] [NdA] Un témoignage qu’il faut joindre à ceux du président Dupaty, de Mme de Genlis et de tous les voyageurs, au sujet de l’état que tenait à Rome le cardinal de Bernis, c’est le passage des Lettres écrites de Suisse, d’Italie, etc., en 1776, 1777 et 1778, et adressées à Mlle Phelipon par Roland, le futur ministre Girondin ; il est sous le charme comme tous les autres, et même il les surpasse encore par son expression presque enthousiaste ; il vient de parler des tables et des bonnes maisons de Rome, il ajoute : Mais il n’y a guère que la table du ministre de France qui donne l’idée des possibles.

286. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Marivaux. — I. » pp. 342-363

C’est en ce sens qu’il y a vraiment des grands hommes, toujours rares, toujours possibles, reconnus et salués bientôt (malgré les contradictions) quand ils apparaissent. […] À chaque époque il y a donc de nouvelles façons de penser possibles et nécessaires, et toutes ne sont pas épuisées, pas plus que les airs que la nature trouve à varier à l’infini dans le composé des physionomies et des visages. […] » Ici, dans une petite dissertation très juste et très bien déduite, Marivaux montre que pour la nuance de pensée de La Rochefoucauld, il n’y avait pourtant pas d’autre expression possible, et que les équivalents proposés n’y répondent pas : Cet esprit, simplement trompé par le cœur, ne me dit pas qu’il est souvent trompé comme un sot, ne me dit pas même qu’il se laisse tromper. […] Marivaux a, sur les portraits, une théorie comme sur tout ; il est d’avis qu’on ne saurait jamais rendre en entier ce que sont les personnes : Du moins, cela ne me serait pas possible, nous dit-il par la bouche de Marianne ; je connais bien mieux les gens avec qui je vis que je ne les définirais ; il y a des choses en eux que je ne saisis point assez pour les dire, et que je n’aperçois que pour moi et non pas pour les autres… N’êtes-vous pas de même ?

287. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « La marquise de Créqui — II » pp. 454-475

Selon lui, elle n’était nullement nécessaire avant d’éclater, elle était évitable ; elle a été purement accidentelle, en ce sens que « le caractère de ceux qui ont eu part à l’ancien gouvernement (à commencer par le caractère du roi, ennemi de toute résistance) a été le seul principe de la totale subversion de ce gouvernement » ; mais ce caractère de quelques personnes étant donné, et la faiblesse de l’opposition qu’elle rencontrera étant admise au point de départ, M. de Meilhan est bien d’avis que la Révolution en devenait un effet presque nécessaire : « Sa marche, dit-il, a été déterminée et hâtée par cette faiblesse ; le défaut de résistance a rendu tout possible, et, semblable à un torrent qui ne trouve aucune digue, elle a tout dévasté. » Il ne croit donc pas que la Révolution soit directement sortie des écrits de Rousseau ni de ceux des encyclopédistes, comme on le répète souvent, ni qu’elle découle de causes aussi générales : Si l’on suit attentivement la marche de la Révolution, il sera facile de voir que les écrivains appelés philosophes ont pu la fortifier, mais ne l’ont pas déterminée ; parce qu’une maison a été bâtie avec les pierres d’une carrière voisine, serait-on fondé à dire qu’elle n’a été construite qu’en raison de ce voisinage ? […] Il appelle à son aide les différents faits analogues dans l’histoire ; il discute les divers cas, le possible et le vraisemblable ; il est bien résolu en ceci, qu’il pense que la contre-révolution ne peut se faire qu’en France : mais de quelle manière y arriver ? […] Il prédit, il dessine à l’avance un futur rival romantique de Racine et de Corneille ; nous aussi nous le croyons possible, mais nous l’attendons toujours : Les tragédies de Corneille, de Racine, de Voltaire (en nommant Voltaire à côté des précédents, il paie tribut au siècle) semblent devoir durer éternellement ; mais si un homme de génie donnait plus de mouvement à ses drames, s’il agrandissait la scène, mettait en action la plupart des choses qui ne sont qu’en récit, s’il cessait de s’assujettir à l’unité de lieu, ce qui ne serait pas aussi choquant que cela paraît devoir l’être, ces hommes auraient un jour dans cet auteur un rival dangereux pour leur gloire. […] Le souvenir de la liaison de Mme du Deffand et d’Horace Walpole se présente aussitôt à l’esprit, et l’on se demande involontairement : « N’y eut-il rien, chez Mme de Créqui, de ce sentiment possible à tout âge chez une femme, et qui la porte avec un intérêt tendre vers un homme dont quelques qualités la séduisent ?

288. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Le maréchal de Villars — III » pp. 81-102

  Il s’agissait pour Villars de joindre l’électeur de Bavière le plus promptement possible ; mais en attendant qu’il eût fait reconnaître les chemins et qu’ils fussent praticables, il résolut d’attaquer le prince de Bade dans ses lignes de Bühl et de Stollhofen, lignes en renom qui fermaient l’entrée de l’Allemagne, et qu’il emporta quelques années plus tard sans difficulté, mais après la mort du prince. […] Bien préparé, bien fixé sur le poste à prendre, et s’attendant d’un jour à l’autre à avoir affaire à Marlborough, il tient à savoir les intentions du roi touchant une bataille ; ce n’est pas un batailleur à tout prix que l’audacieux Villars : « Il y a des occasions, écrit-il à Chamillart, où c’est prudence de la chercher, quand même on la donnerait avec désavantage : il y en a d’autres où, paraissant toujours chercher le combat, il faut cependant manquer plutôt une occasion que de ne se la pas donner la plus favorable qu’il est possible. » Dans le cas présent, si l’ennemi prête flanc par quelque fausse démarche, il en profitera, c’est tout simple ; mais à chances égales, là où il n’y aurait ni avantage ni désavantage évident à l’attaque, il tient à savoir l’intention du roi. […] Villars va s’appliquer à remplir de tout point le programme : confiant avec raison dans la position qu’il s’est choisie à Haute-Sierck, il a l’œil à tout ; observe les moindres mouvements des ennemis, et cherche à deviner ce qu’il ne voit pas : « Enfin, Sire, je tâche d’imaginer tout ce que peuvent faire les ennemis, et Votre Majesté doit être persuadée que l’on fera humainement tout ce qui sera possible. » Marlborough s’ébranle avec une armée composée d’Anglais, de Hollandais et d’Allemands, qu’il disait être de cent dix mille hommes, et que Villars estimait de quatre-vingt mille, et publiant bien haut qu’il allait attaquer les Français. […] J’ai renchéri autant qu’il m’a été possible.

289. (1863) Nouveaux lundis. Tome I « Benjamin Constant. Son cours de politique constitutionnelle, ou collection de ses divers écrits et brochures avec une introduction et des notes, par M. Laboulaye »

Pour les Daunou, pour les Tracy, tout gouvernement était un mal ; la question ainsi posée, il s’agissait pour la société de subir le moindre mal possible, et pour cela, d’avoir le moins de gouvernement possible, le plus de décentralisation et de dissémination de pouvoir à tous les degrés, et, à chaque pas, des barrières et des garanties contre les gouvernants. […] Mais, après tout, ce prétexte, qui a fourni quelques armes à la jalouse médiocrité, ou plutôt à la mauvaise foi, pour les cas où il s’agit de la France et de ses intérêts secrets, devient ici sans application possible, puisqu’il est question d’une organisation étrangère. […] Il est besoin de le rapprendre à ceux qui aujourd’hui croient possible de les ressusciter, tous ses écrits sont nés fanés et sans flamme.

290. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « Œuvres de Louise Labé, la Belle Cordière. »

On fit encore d’autres couplets satiriques, et plus compromettants, s’il est possible. […] Est-il possible de mieux parer une tête que les dames font et feront à jamais ? […]   Enfin, il y a ce dernier sonnet d’elle, qui est également un vœu de mort, non plus de mort au sein du bonheur, mais de mort plus triste et plus terne, quand il n’y a plus pour le cœur de bonheur possible, plus un seul reste de jeunesse et de flamme : Tant que mes yeux pourront larmes épandre, A l’heur65 ; passé avec toi regretter, Et qu’aux sanglots et soupirs résister Pourra ma voix, et un peu faire entendre ; Tant que ma main pourra les cordes tendre Du mignard luth pour tes grâces chanter ; Tant que l’esprit se voudra contenter De ne vouloir rien fors que toi comprendre ; Je ne souhaite encore point mourir : Mais quand mes yeux je sentirai tarir, Ma voix cassée et ma main impuissante, Et mon esprit en ce mortel séjour Ne pouvant plus montrer signe d’amante, Prierai la mort noircir mon plus clair jour. […] … Est-il donc possible, ô misérables, que cette cruelle envie vous prenne de revoir la lumière !

291. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Catinat (suite.) »

Je crois que M. de Feuquières pourra bien jouer des siennes et faire valoir des sentiments fondés sur des raisons bonnes pour ceux qui ne voient pas les choses… » Je ne me fais pas juge entre Catinat et Feuquières, ce serait une grande impertinence ; je ne me fais point le défenseur de Feuquières, ce n’est point mon rôle, et il y aurait à ceci de l’impertinence encore et, qui plus est, de l’injustice ; mais enfin, pour voir le double côté de la question, pour l’envisager à sa juste hauteur et la dégager autant que possible des personnalités dont elle est restée masquée jusqu’à ce jour, qu’on veuille supposer un instant ceci : il y a dans l’armée de Catinat un militaire, incomplet dans la pratique, mais d’un génie élevé, qui a, dès 1690, l’instinct et le pressentiment des grandes opérations possibles sur cet admirable échiquier de la haute Italie ; ce militaire, à tout moment, conçoit ce qu’on pourrait faire et ce qu’on ne fait pas ; il blâme, il critique, il raille même, il hausse les épaules, il est ce qu’on appelle un coucheur, et ce qu’on appelait alors être incompatible : tel était Feuquières, qui à des vues supérieures joignait, il faut en convenir, une malignité particulière. […] C’est ainsi que la forteresse de Montmélian, seule place du duché de Savoie qui ne fût pas encore en notre pouvoir, lui parut une conquête possible malgré la saison avancée et la forte position qui était « hideuse pour un assiégeant » ; il s’en rendit maître le 21 décembre de cette année 1691 si remplie. […] Louis XIV se refusa de ce côté aux dépenses nécessaires, et l’on se borna au statu quo comme si c’était possible.

292. (1872) Nouveaux lundis. Tome XIII « Le général Jomini. [II] »

Berthier, dans ses hautes fonctions et dans son aptitude limitée, flaira de bonne heure en Jomini un talent supérieur, un rival possible auprès de Napoléon ; les missions de confiance que Jomini va remplir au quartier général impérial dans les campagnes de 1806-1807 éveilleront surtout la jalousie du major général, qui ne perdra aucune occasion dès lors de rabaisser, de retarder, s’il était possible, et finalement de décourager, d’ulcérer et d’outrer, jusqu’à le jeter hors des gonds, un étranger de mérite, et de l’ordre de mérite le plus fait pour lui porter ombrage. […] Napoléon, dans cette étonnante et rapide campagne, « ne fit qu’appliquer presque constamment les principes qui l’avaient guidé jusque-là, et, grâce à la confiante inexpérience des adversaires, il put donner à cette application toute l’étendue du possible. […] Napoléon penchait vers ce dernier parti, et il commençait dès lors à entrer sans retour possible dans le système d’exagération qui devait forcer tous les ressorts, ceux de la guerre comme ceux de la politique.

293. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « MADAME DE PONTIVY » pp. 492-514

lui disait-il, est-il possible ? est-ce bien possible que ce soit là en effet la fin d’un amour comme le nôtre ? […] Et celle-ci, de ce ton de gaieté, pourtant sensible, où elle excellait : « En fait d’amour et de cœur, je ne sais qu’une maxime, répliqua-t-elle ; le contraire de ce qu’on en affirme est possible toujours. » A un quart d’heure de là, M. de Murçay et Mme de Pontivy, qui avaient le besoin de se voir seuls, se rencontrèrent, par un instinct secret, en un endroit couvert du jardin. […] Ce fut une grande douleur, et leur lien encore, s’il était possible, se resserra.

294. (1895) Histoire de la littérature française « Cinquième partie. Le dix-huitième siècle — Livre IV. Les tempéraments et les idées (suite) — Chapitre IV. Le patriarche de Ferney »

C’est là par excellence la polémique voltairienne ; c’est à celle-là, non sans raison, que les générations suivantes, comme les contemporains, ont attaché le nom de l’homme ; c’est par elle qu’il a fait école, ou qu’il a été haï ; et c’est elle qui a été mise hors d’usage par une critique plus scientifique, plus impartiale, qu’elle avait rendue possible. […] Sauf la religion qu’il combat à outrance, parce qu’il ne voit pas de compromis possible entre l’Église et la raison, il ne prétend pas changer les bases actuelles de la société. […] Il n’avait pas l’imagination scientifique, l’ouverture de pensée qui forme ou qui embrasse les hypothèses fécondes, le détachement de soi qui fait accepter au savant tous les démentis, toutes les surprises des faits, et les plus incroyables résultats de l’expérience ; il n’a pas senti suffisamment l’infinité de ses ignorances, et il a témérairement fixé les limites du possible. […] Il a pris la société telle quelle, et il a voulu y loger tout le monde le mieux possible.

295. (1887) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Troisième série « La jeunesse du grand Condé d’après M. le duc d’Aumale »

Mais cela même ne leur est guère possible, et le plus souvent les convenances impérieuses de leur position façonnent jusqu’à leurs pensées intimes. […] Mais ce voyage philosophique à travers les compartiments de la société humaine n’est possible, comme j’ai dit, que si l’on part du plus bas. […] Il n’était point possible de séparer leur histoire de celle de notre pays, car ils y ont tous été mêlés en vertu même de leur naissance ; mais ils y ont été mêlés à des degrés et avec des mérites fort inégaux. […] Rien que pour mettre en branle un régiment, que de choses dont il faut tenir compte : le nombre des hommes, leur état physique et moral, la vitesse de leur marche, la forme des terrains, la nature du sol, les chemins, la température, les mouvements possibles de l’ennemi !

296. (1911) La valeur de la science « Troisième partie : La valeur objective de la science — Chapitre X. La Science est-elle artificielle ? »

Au premier de nos six échelons, le fait, encore complètement brut, est pour ainsi dire individuel, il est complètement distinct de tous les autres faits possibles. […] Bien qu’une infinité de faits possibles soient susceptibles de ce même énoncé : il fait noir, je saurai toujours si le fait réalisé rentre ou ne rentre pas parmi ceux qui répondent à cet énoncé. […] C’est possible, mais s’il en était ainsi, la loi n’aurait pas de valeur, non pas parce qu’elle se réduirait à une convention, mais parce qu’elle serait fausse. […] C’est possible, mais j’observerai d’abord que ce peu d’humanité qui resterait chez les non-euclidiens, suffirait non seulement pour qu’on pût traduire un peu de leur langage, mais pour qu’on pût traduire tout leur langage.

297. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Lettres et opuscules inédits du comte Joseph de Maistre. (1851, 2 vol. in-8º.) » pp. 192-216

Pour faire comprendre aussi brièvement que possible l’esprit politique de M. de Maistre et ses jugements historiques, je dirai que c’était un homme tout à fait religieux, une intelligence profondément religieuse, et qui croyait réellement et en toute chose au gouvernement de la Providence sur la terre. […] Cette monarchie religieuse et aristocratique de M. de Maistre, loin de pouvoir en aucun moment s’imposer à la France, n’allait bientôt plus être possible même dans son Piémont. […] Vous y voyez l’établissement définitif, la consolidation du mal ; moi, je persiste à le regarder comme un événement heureux dans toutes les suppositions possibles. […] Mais l’esprit chez lui n’est pas tout, il n’est pas de ceux qu’une demi-heure d’étude et de lecture console de tout chagrin : Je lis, j’écris, dit-il, je tâche de m’étourdir, de me fatiguer s’il était possible.

298. (1889) L’art au point de vue sociologique « Introduction »

C’est dans la négation de l’égoïsme négation compatible avec la vie même, que l’esthétique, comme la morale, doit chercher ce qui ne périra pas3. » En second lieu, l’identité des sensations et des sentiments supérieurs, c’est-à-dire la sympathie sociale que l’art produit, doit s’étendre au groupe d’hommes le plus vaste possible. […] Vie intense, en effet, sera celle de l’artiste, car « on ne donne après tout la vie qu’en empruntant à son propre fonds… Produire par le don de sa seule vie personnelle une vie autre et originale, tel est le problème que doit résoudre tout créateur5. » La caractéristique du génie est donc, pour Guyau, « une sorte de vision intérieure des formes possibles de la vie », vision qui fera reculer au rang d’accident la vie réelle. […] Taine, nous donnent, selon Guyau, le spectacle de trois sociétés liées par une relation de dépendance mutuelle : 1° la société réelle préexistante, qui conditionne et en partie suscite le génie ; 2° la société idéalement modifiée que conçoit le génie même, le monde de volontés, de passions, d’intelligences qu’il crée dans son esprit et qui est une spéculation sur le possible ; 3° la formation consécutive d’une société nouvelle, celle des admirateurs du génie, qui, plus ou moins, réalisent en eux par imitation son innovation. […] La vie, dans sa réalité immédiate, c’est l’individualité : « on ne sympathise donc qu’avec ce qui est ou semble individuel ; de là, pour l’art, l’absolue nécessité, en même temps que la difficulté de donner à ses créations la marque de l’individuation 8. » Une restriction cependant, ou plutôt une condition d’élargissement toujours possible, c’est que l’individualité, en tant que telle, sera assez parfaite pour atteindre à la hauteur du type : « ce qui ne serait qu’individuel et n’exprimerait rien de typique ne saurait produire un intérêt durable.

299. (1889) L’art au point de vue sociologique « Chapitre premier. La solidarité sociale, principe de l’émotion esthétique la plus complexe »

Plus on augmente l’utilité d’une chose, plus on restreint en général sa beauté possible, eu la circonscrivant pour ainsi dire dans les côtés uniques par où cette chose peut être utile ; cette beauté, quelque restreinte, quelque consente qu’elle soit, peut encore exister sans doute, mais à une condition : c’est que l’objet où elle existe ne devienne pas le siège d’associations franchement désagréables. […] Ce sont pour ainsi : dire des arts inorganiques, aussi peu expressifs de la vie qu’il est possible. […] Vous regarderez, vous écouterez, et, dans la mesure du possible, vous-même vous aimerez. […] Par cette fiction dont se servent les arts, nous devenons accessibles non seulement à toutes les souffrances et à toutes les joies des êtres réels vivant autour de nous, mais à toutes celles d’êtres possibles.

300. (1874) Premiers lundis. Tome I « M. Mignet : Histoire de la Révolution française, depuis 1789 jusqu’en 1814. 3e édition. »

Il serait pourtant téméraire d’affirmer que la face des choses n’eût pas pu devenir différente ; mais ce qu’il y a de certain, c’est que la Révolution, avec les causes qui l’ont amenée et les passions qu’elle a employées ou soulevées, devait avoir cette marche et cette issue. » Sans doute, répondrai-je, cette marche, dans son ensemble, a dû être à peu près ce qu’elle a été, cette issue a dû être possible, et j’avouerai même qu’elle était fort probable. […] Mignet a fait beaucoup, et au-delà il ne lui restait rien de possible à faire.

301. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Première partie. De la littérature chez les anciens et chez les modernes — Chapitre VII. De la littérature latine, depuis la mort d’Auguste jusqu’au règne des Antonins » pp. 176-187

Sous la tyrannie des empereurs, il n’était ni permis ni possible de remuer le peuple par l’éloquence ; les ouvrages philosophiques et littéraires n’avaient point d’influence sur les événements publics. […] On peut aussi manquer de goût, comme Juvénal, lorsqu’on essaie, par tous les moyens possibles, de réveiller l’horreur du crime dans une nation engourdie.

302. (1860) Ceci n’est pas un livre « Les arrière-petits-fils. Sotie parisienne — Premier tableau » pp. 180-195

Possible, monsieur. […] Pas de détail ; votre total, simplement, — en deux chiffres, si c’est possible ?

303. (1888) Épidémie naturaliste ; suivi de : Émile Zola et la science : discours prononcé au profit d’une société pour l’enseignement en 1880 pp. 4-93

La trouver est possible, en surpasser la vigueur, l’éclat et la finesse paraît invraisemblable. […] Il n’y a plus ni mérite, ni vertu, ni force d’âme, ni lutte possible. […] Possédant la connaissance du bien et du mal, il nous est toujours possible de réagir contre nos propres tendances. […] Concevoir l’idéal, c’est avoir la faculté d’abstraire des choses et des êtres les qualités supérieures, de les grouper sur un seul sujet et de cette manière approcher le plus possible de la perfection. C’est cette notion de perfection possible qui nous pousse vers l’amélioration et le progrès.

304. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « M. Charles Magnin ou un érudit écrivain. »

Magnin ; nous ne le ferons pas plus grand qu’il n’a été, mais nous le montrerons, autant qu’il nous sera possible, dans la juste et nette application de ses facultés de critique et d’écrivain. […] Magnin, appliquant ce procédé d’extension possible, mais peu désirable, à la jolie pièce le Mariage de raison, s’attachait à montrer « qu’élevé aux proportions de la comédie le Mariage de raison eût vraisemblablement échoué, tandis que le Mariage d’argent, réduit aux dimensions d’une comédie-vaudeville, aurait peut-être eu la vogue. » Il ne voyait dans ce dernier « qu’un vaudeville dilaté, bulle brillante, soufflée avec effort et lancée sur le Théâtre-Français. » Certes M.  […] Il fit part à quelques-uns de ses amis les plus intimes de cette véritable conversion : « Mes amis, leur dit-il (ce furent à peu près les termes qu’il employa), je vous préviens que je ne veux pas d’objections ; je vous prierai autant que possible de conformer votre conversation à ma nouvelle croyance. Je n’afficherai pas mon christianisme, et autant que possible j’éviterai d’en parler, mais aussi je n’en rougirai pas. » Il tint parole. […] A le voir passer dans ces grandes salles et glisser légèrement à pas menus et discrets le long des boiseries sombres et des armoires grillées, il semblait qu’il craignît d’y faire bruit lui-même et d’y éveiller l’écho de tant de générations d’auteurs endormis : c’était un des leurs, un peu en retard, un ami qui, même quand il avait à les consulter, semblait ne vouloir troubler que le moins possible leur repos.

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