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461. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « quelque temps après avoir parlé de casanova, et en abordant le livre des « pèlerins polonais » de mickiewicz. » pp. 512-524

Entre vous et le sentiment, au lieu du libre cours s’interpose cette glace (d’images) ininterrompue et peinte en mille tons, de smalt, d’outremer, que sais-je encore ? […] On n’est pas gagné à sa forme ; on ne sait plus s’il y a lieu le moins du monde d’être touché du fond.

462. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome II « Mémoires pour servir à l’histoire des gens-de-lettres ; et principalement de leurs querelles. Querelles particulières, ou querelles d’auteur à auteur. — Jean-Baptiste Rousseau, et Joseph Saurin. » pp. 28-46

Cette longue Histoire des couplets étoit presque ensevelie dans l’oubli, lorsqu’elle a tout à coup été réveillée en dernier lieu. […] On a fait ces vers : Ci gît Boindin, je ne sçais où ; Mais, en quelque lieu qu’il repose, Il fut ou bien sage, ou bien fou ; Je vous laisse à juger la chose *.

463. (1906) Les œuvres et les hommes. Poésie et poètes. XXIII « Maurice de Guérin »

Mais Guérin, lui, est vrai comme Claude Lorrain, et s’il nous avait peint le Midi comme il nous a peint l’Ouest, le pays du soleil au lieu du pays des nuages, il aurait eu la transparence orangée de Claude et l’or fusible de son incroyable lumière. […] Cette biographie d’un poète qui était plus la Poésie encore dans sa vie que dans son talent, ce n’est pas le fusain rapide de Sainte-Beuve qui en tiendra lieu, si je ne m’abuse, et un jour ou l’autre, soyez tranquille !

464. (1906) Les idées égalitaires. Étude sociologique « Introduction »

Pour que cette science fût totale, il y aurait lieu de chercher dans les sens les plus différents les antécédents de l’égalitarisme : seules des recherches multiples, poussées de tous les côtés, nous en livreraient l’explication « exhaustive » ; toutes les sciences qui, directement ou indirectement, touchent aux phénomènes sociaux auraient sans doute leur mot à dire. […] En un mot, indépendamment de leur matière, il y a lieu de classer les formes des sociétés, de déterminer les relations qu’elles peuvent soutenir avec les différents ordres de phénomènes historiques, de fixer ainsi les faits qui les précèdent ou ceux qui les suivent régulièrement : c’est-à-dire qu’il, y a place, à côté des différentes sciences sociales, pour une science de ce qui est spécialement social, la sociologie proprement dite.

465. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre XIX. Panégyriques ou éloges composés par l’empereur Julien. »

Tel est un autre endroit sur l’utilité de mettre de bonne heure un jeune prince en action ; de familiariser et ses yeux et son âme avec les périls, les combats, les peuples et les armées ; de lui faire connaître par lui-même, dans son empire, la situation des lieux, l’étendue des pays, la puissance des nations, la population des villes, le caractère des peuples, leur force, leur pauvreté, leur richesse. […] n’écris pas pour un homme, mais pour les hommes : attache ta réputation aux intérêts éternels du genre humain : alors la postérité reconnaissante démêlera tes écrits dans les bibliothèques ; alors ton buste sera honoré et peut-être baigné de larmes chez des peuples qui ne t’auront jamais vu, et ton génie, toujours utile, selon la belle expression d’un de nos poètes, sera contemporain de tous les âges, et citoyen de tous les lieux.

466. (1765) Articles de l’Encyclopédie pp. 5482-9849

L’idée d’agrément est exclue du mot fantasque, au lieu qu’il y a des fantaisies agréables. […] La force du raisonnement a sur-tout lieu dans les questions problématiques. […] L’art de l’Imprimerie, & la restauration des sciences, font qu’enfin on a des histoires assez fideles, au lieu des chroniques ridicules renfermées dans les cloîtres depuis Grégoire de Tours. […] N’a-t-on pas, en dernier lieu, pendant la guerre de 1740 des Anglois contre le roi d’Espagne, frappé une médaille qui attestoit la prise de Carthagene par l’amiral Vernon, tandis que cet amiral levoit le siége ? […] Au lieu que dans S.

467. (1865) Cours familier de littérature. XIX « CXIIIe entretien. La Science ou Le Cosmos, par M. de Humboldt (2e partie). Littérature de l’Allemagne. » pp. 289-364

Environ 2 500 de ces nébuleuses, que les plus puissants télescopes n’ont pu résoudre en étoiles, sont maintenant classées et déterminées, quant aux lieux qu’elles occupent dans le ciel. […] Pour la description de Cicéron, elle est tellement fidèle, comme l’a remarqué récemment un observateur ingénieux, qu’aujourd’hui encore on en peut retrouver sur les lieux mêmes tous les traits… À travers les terribles orages de l’an 708, Cicéron trouva quelques adoucissements dans ses villas, se rendant tour à tour de Tusculum à Arpinum, des environs d’Antium à ceux de Cumes. […] Nulle part on ne remarque que l’auteur se soit attaché à décrire des lieux déterminés ; mais les couleurs harmonieuses de ses tableaux révèlent une profonde intelligence de la nature. […] Le lieu où fut relégué Ovide était une lande marécageuse ; accablé par une disgrâce au-dessus de ses forces, il était plus disposé à se reporter en souvenir aux jouissances du monde et aux événements politiques de Rome, qu’à contempler les vastes déserts qui l’entouraient. […] Les eaux coulent du haut des montagnes dans les vallons, aux lieux qui leur ont été assignés, afin que jamais elles ne passent les bornes prescrites, mais qu’elles abreuvent tous les animaux des champs.

468. (1883) Souvenirs d’enfance et de jeunesse « Chapitre II. Prière sur l’Acropole. — Saint-Renan. — Mon oncle Pierre. — Le Bonhomme Système et la Petite Noémi (1876) »

Il y a un lieu où la perfection existe ; il n’y en a pas deux : c’est celui-là. […] On comprit ; on enterra le saint et on bâtit son église en ce lieu. […] Elle me montra, dans mon enfance, les lieux où tout s’était passé. […] Il sortait tous les jours pour aller acheter ses petites provisions ; le soir, il se promenait dans quelque lieu retiré. […] La forme ancienne est Ronan, qui se retrouve dans les noms de lieu, Loc-Ronan, les eaux de Saint-Ronan (pays de Galles), etc.

469. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Introduction, où l’on traite principalement des sources de cette histoire. »

Écrivant hors de la Palestine, et certainement après le siège de Jérusalem 63, l’auteur indique les lieux avec moins de rigueur que les deux autres synoptiques ; il a une fausse idée du temple, qu’il se représente comme un oratoire, où l’on va faire ses dévotions 64 ; il émousse les détails pour tâcher d’amener une concordance entre les différents récits 65 ; il adoucit les passages qui étaient devenus embarrassants au point de vue d’une idée plus exaltée de la divinité de Jésus 66 ; il exagère le merveilleux 67 ; il commet des erreurs de chronologie 68 ; il omet les gloses hébraïques 69, ne cite aucune parole de Jésus en cette langue, nomme toutes les localités par leur nom grec. […] Les contradictions sur les temps, les lieux, les personnes étaient regardées comme insignifiantes ; car, autant on prêtait à la parole de Jésus un haut degré d’inspiration, autant on était loin d’accorder cette inspiration aux rédacteurs. […] À la lecture des textes, j’ai pu joindre une grande source de lumières, la vue des lieux où se sont passés les événements. […] L’accord frappant des textes et des lieux, la merveilleuse harmonie de l’idéal évangélique avec le paysage qui lui servit de cadre furent pour moi comme une révélation. […] Le livre a été, de la sorte, composé tout entier fort près des lieux mêmes où Jésus naquit et se développa.

470. (1893) La psychologie des idées-forces « Tome premier — Livre deuxième. L’émotion, dans son rapport à l’appétit et au mouvement — Chapitre quatrième. Les émotions proprement dites. L’appétit comme origine des émotions et de leurs signes expressifs. »

Il y a donc lieu de se demander si le fait de communication sociale ne commence pas dans l’organisme même avant de s’étendre à des organismes analogues ; s’il n’y a pas déjà une solidarité à la fois mécanique et mentale entre les parties associées d’un même organisme, — cerveau, cœur, muscles du visage, — avant que la passion ait rayonné d’un organisme à l’autre. […] Enfin, en troisième lieu, la volonté s’exprime toujours par le contentement ou le refus, soit spontané, soit réfléchi, dont les mouvements musculaires sont les signes ou plutôt l’exécution même. […] Les animaux les plus rudimentaires, voisins de la vie purement végétative, dépourvus de système nerveux et musculaire, n’avaient probablement pas la faculté de se mouvoir d’un point à l’autre dans leur lieu d’habitation ; mais il devait cependant exister, jusque chez ces espèces primitives, certaines tendances à une surexcitation ou à un affaissement de l’activité générale, selon l’approche ou le départ des objets avantageux ou nuisibles. […] Dans une foule compacte rassemblée au même lieu, les impressions se propagent avec une rapidité extrême et, en se communiquant, s’amplifient ; chacun reçoit de tous et tous reçoivent de chacun cette sorte d’électricité par influence à laquelle on a justement comparé l’émotion : de là les passions soudaines et les soudains emportements des foules. […] L’association des états de conscience n’a pas seulement lieu par analogie, elle a lieu aussi par contraste et antithèse : ce ne sont pas seulement les semblables, mais aussi les contraires qui s’associent entre eux, et cette loi psychologique se manifeste surtout dans le domaine des sentiments.

471. (1856) Cours familier de littérature. I « VIe entretien. Suite du poème et du drame de Sacountala » pp. 401-474

Que nous importent et ta parenté et le lieu de ta demeure ? […] Là où vous apercevez ce pieux solitaire, fixant, dans une immobilité parfaite, le disque radieux du soleil ; le corps déjà à moitié plongé dans un monticule de sable, que les termites amoncellent sans crainte autour de lui ; portant, au lieu du cordon brahmanique, la peau hideuse d’un énorme serpent : pour collier, les branches entrelacées d’arbrisseaux épineux, dont il ne ressent pas même les blessures, et recélant, parmi ses cheveux relevés en partie en un énorme faisceau sur le sommet de sa tête et flottant en partie sur ses larges épaules, une foule d’oiseaux qui, pleins de confiance, y ont construit leurs nids comme dans un arbre touffu. […] Le lieu de la scène était ordinairement, ou un site choisi en rase campagne, ou une cour du palais des princes. […] Le désespoir, comme une flèche cruelle enfoncée dans mon cœur, demeure attaché dans la blessure qu’il a faite et qu’il déchire sans relâche… Ne puis-je tromper le temps et perdre le souvenir de mes douleurs en fixant mes yeux sur ces lieux qui me sont chers ? […] Il sait que, quand le soleil lance ses rayons de feu, la pierre solaire les renvoie encore plus brûlants. » Son second fils, Cousa, paraît à son tour, revenant des lieux consacrés.

472. (1856) Cours familier de littérature. II « XIe entretien. Job lu dans le désert » pp. 329-408

Je vais maintenant vous exposer le lieu de la scène, la décoration du drame, le désert. […] Nous ne trouvons pas tous notre pain en tout lieu : Du barde voyageur le pain, c’est la pensée ;         Son cœur vit des œuvres de Dieu ! […] C’est que l’esprit y plane indépendant du lieu ; C’est que l’homme est plus homme et Dieu même plus Dieu. Moi-même, de mon âme y déposant la rouille, Je sens que j’y grandis de ce que j’y dépouille, Et que mon esprit, libre et clair comme les cieux, Y prend la solitude et la grandeur des lieux ! […] « Suis-je un lieu pour paraître à l’œil étroit ou court ?

473. (1870) De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés « De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés — Chapitre XII : Distribution géographique (suite) »

Mais une considération qu’il ne faut pas dédaigner, c’est que, selon toute probabilité, beaucoup d’îles aujourd’hui complétement submergées ont existé autrefois comme lieu de relâche164. […] Nous avons vu déjà que sur vingt-six oiseaux terrestres qu’on y trouve, vingt et un et peut-être vingt-trois sont rangés comme des espèces distinctes qu’on suppose créées dans le lieu même ; pourtant rien n’est plus manifeste que les affinités de la plupart de ces oiseaux avec des espèces américaines, dans leurs habitudes, leurs mouvements, leur son de voix et presque en chacun de leurs caractères. […] Résumé de ce chapitre et du précédent. — Dans ces deux chapitres, j’ai essayé de montrer que, si nous tenons compte de notre ignorance quant aux effets si divers que peuvent avoir produits les changements de climat ou les oscillations de niveau du sol qui ont certainement eu lieu depuis une période récente, et de tous les autres changements qui peuvent s’être opérés pendant le même temps ; si nous nous souvenons encore combien nous savons peu de chose des nombreux moyens de transports occasionnels, parfois si extraordinaires, qui existent, et qui offrent un sujet inépuisable d’investigations et d’expériences qui n’ont pas encore été convenablement tentées ; si nous songeons combien il peut être arrivé souvent qu’une espèce se soit étendue sur de vastes régions continues, et qu’elle se soit ensuite éteinte dans quelques stations intermédiaires ; il ne reste plus de difficulté insurmontable qui empêche d’admettre que tous les individus de la même espèce, en quelque lieu qu’ils vivent actuellement, ne soient descendus des mêmes parents. […] Lorsque enfin le pôle aura commencé à redescendre vers le lieu qu’il occupe actuellement, l’immigration sera venue du nord, substituant des formes tropicales aux formes tempérées, et des formes tempérées aux formes glaciaires. […] Mais chaque souche individuelle, tendant à se multiplier dans un même lieu, entra, par le fait, en concurrence avec toutes les autres, et la localisation des climats et des autres conditions physiques de la vie aidant, la sélection naturelle dut commencer à agir pour fixer, déterminer et limiter les espèces qui restèrent encore longtemps très variables.

474. (1876) Romanciers contemporains

C’est la Muse hospitalière et souriante du lieu qu’il visitait. […] Fabre, s’imposant une tâche fort difficile, a voulu écrire dans l’idiome populaire du lieu qu’il peignait. […] On lui pardonne d’être dans ces lieux étrangers, puisqu’il les a si bien décrits. […] La nuit surtout, ces lieux ont une horreur sacrée. […] Lecoq n’est pas un portrait, mais un maître qui fera des disciples, s’il a beaucoup de lecteurs en certains lieux.

475. (1938) Réflexions sur le roman pp. 9-257

C’est un « haut lieu ». « Il est des lieux qui tirent l’âme de sa léthargie, des lieux enveloppés, baignés de mystère, élus de toute éternité pour être le siège de l’émotion religieuse… Ce sont les temples du plein-air. […] Elle n’a point senti cette aura qui souffle dans les lieux inspirés. […] Voilà bien l’aventure et le lieu de l’aventure ramenés à leur schéma essentiel, à leur substance ou à leur loi. […] Henry Bataille étaient une pièce très faible, et aucun auteur dramatique n’eût pu de ce sujet rien tirer qui fût beaucoup mieux : les planches sont le lieu de la vie et non le lieu de l’intelligence.

476. (1782) Plan d’une université pour le gouvernement de Russie ou d’une éducation publique dans toutes les sciences « Plan d’une université, pour, le gouvernement de Russie, ou, d’une éducation publique dans toutes les sciences — Bâtiment. » p. 534

Un lieu vaste, en plein air, ombré et sablé pour les récréations générales.

477. (1875) Premiers lundis. Tome III «  Les fils  »

Il s’agissait uniquement, dans le cas particulier, de savoir si le prince de Broglie a un talent si extraordinaire qu’il doive aspirer à une nomination en quelque sorte extraordinaire et d’exception, qui le fasse siéger à l’Académie à côté du duc, son père ; s’il y a lieu, en un mot, à un cumul dans une même famille.

478. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — D. — article » pp. 102-104

Danchet l’arrêta au début, & lui dit, Maison est un mot trop foible ; il faudroit mettre Palais, Beau lieu, &c.

479. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Note préliminaire » pp. 5-6

Sainte-Beuve, en se chargeant de cette part de collaboration au Constitutionnel, a cru lui-même qu’il y avait lieu de ne pas désespérer de la littérature, et d’y exercer, concurremment avec ses autres confrères, une action utile.

480. (1767) Salon de 1767 « Dessin. Gravure — Demarteau » p. 335

Il ne me reste plus qu’à vous faire l’histoire de la distribution des prix de cette année, de l’injustice et de la honte de l’académie, et du ressentiment et de la vengeance des élèves ; ce sera pour le feuillet suivant, le seul que je voudrais que l’on publiât et qu’on affichât à la porte de l’académie et dans tous les carrefours, afin qu’un pareil événement n’eût jamais lieu.

481. (1842) Discours sur l’esprit positif

Quelque satisfaisantes, par exemple, que soient devenues nos prévisions astronomiques, leur précision est encore, et sera probablement toujours, inférieure à nos justes exigences pratiques, comme j’aurai souvent lieu de l’indiquer. […] C’est ici le lieu de compléter, à ce sujet, l’indispensable explication indiquée au début de ce Discours, où cette dissolution graduelle a été spécialement attribuée à l’état métaphysique proprement dit, qui, au fond, n’en pouvait être que le simple organe, et jamais le véritable agent. […] Il y a donc vraiment lieu de présumer, d’après l’ensemble d’une telle appréciation spéciale, que la formule employée ici pour qualifier habituellement cette philosophie définitive rappellera désormais, à tous les bons esprits, l’entière combinaison effective de ses diverses propriétés caractéristiques. […] L’ensemble de la nouvelle philosophie tendra toujours à faire ressortir, aussi bien dans la vie active que dans la vie spéculative, la liaison de chacun à tous, sous une foule d’aspects divers, de manière à rendre involontairement familier le sentiment intime de la solidarité sociale, convenablement étendue à tous les temps et à tous les lieux. […] Or, il n’est plus à craindre que désormais les hommes d’État s’écartent gravement, à cet égard, de l’impartiale modération de plus en plus inhérente à leur propre indifférence spéculative : l’école positive a même lieu de compter, sous ce rapport, sur la bienveillance habituelle des plus intelligents d’entre eux, non seulement en France, mais aussi dans tout notre Occident.

482. (1923) Paul Valéry

Son génie est un lieu de passage où se transfigurent ses intentions pour se méconnaître plutôt que se connaître, en œuvres qu’il a à peine voulues. […] Il y aurait lieu à discussion et je vois à peu près ce que répondraient les musiciens. […] Ce poème d’Aurore en tiendrait peut-être lieu chez Valéry. […] Les cimetières ont donné au pessimisme romantique ses lieux d’élection. […] Mais lui-même ne figure, répétons-le, que le lieu de passage.

483. (1859) Cours familier de littérature. VIII « XLVIe entretien. Examen critique de l’Histoire de l’Empire, par M. Thiers (3e partie) » pp. 249-336

L’historien dont la vive imagination a ressuscité sur les lieux ces deux armées n’est plus historien ; il est combattant, soldat, général, peintre de bataille. […] Les vainqueurs, disposant en maîtres de ces villes presque abandonnées, établissaient leurs magasins et leurs hôpitaux dans les églises et les lieux publics. […] Un ciel gris, fondant par intervalles en une neige épaisse ajoutait sa tristesse à celle des lieux, tristesse qui saisit les yeux et les cœurs dès que la naissance du jour, très tardive en cette saison, eut rendu les objets visibles. […] Napoléon, ayant emprunté le manteau d’un lancier polonais, alla, sous les coups de pistolet de quelques tirailleurs de cavalerie, reconnaître les lieux en compagnie du général Haxo, et, les ayant trouvés aussi favorables que le disait ce général, ordonna l’établissement des ponts pour la nuit même. […] Quel autre que lui pouvait établir les plans de campagne, étudier sur les cartes et sur les lieux la topographie des champs de bataille, faire mouvoir les masses au doigt même du général en chef, porter l’œil et le jour sur les innombrables accidents de la lutte, débrouiller la mêlée, donner la raison secrète de la victoire ou de la déroute ?

484. (1887) Revue wagnérienne. Tome II « Paris, le 8 juin 1886. »

Le lieu ne devait être ni une capitale ayant un théâtre permanent, ni une ville d’eau qui, justement en été, m’eût donné un public tout à fait différent du public que je souhaite ; ce doit être une ville du centre de l’Allemagne ; et une ville de Bavière, puisque je veux y transférer mon domicile et que je ne puis choisir nul autre pays … … Quant au choix et à l’acquisition du terrain destiné au théâtre, il y a à considérer si la ville de Bayreuth, vu les avantages que mon entreprise pourrait lui procurer, serait disposée à me céder la place nécessaire à la construction de mon théâtre. […] La Fontaine, en faisant une traduction rhythmique adaptée à la musique, a pris un système de transposition littéraire totale » il n’a point voulu reproduire en un équivalent français le vers allemand avec ses allitérations, cadences et rimes ; il a négligé la littéralité minutieuse ; et, au lieu du très spécial style Wagnérien, il a mis le style de notre langage courant. […] Et l’une, dont les cheveux blonds avaient la pâleur calme des soirs, lui dit qu’elle était la Vertu, qu’elle le conduirait aux lieux cruels hantés par les hydres, et qu’elle lui donnerait la victoire des luttes, les fatigues mortelles qui glorifient. […] Et voici le théâtre, au lieu des récits. […] La psychologie est nulle : les personnages sont des néants, égarés en des corps très vivants, et parmi des lieux bien décrits.

485. (1827) Principes de la philosophie de l’histoire (trad. Michelet) « Discours sur le système et la vie de Vico » pp. -

Mais Platon cherche dans la sagesse vulgaire d’Homère, un ornement plutôt qu’une base pour sa philosophie ; Tacite disperse la sienne à la suite des événements ; Bacon dans ce qui regarde les lois ne fait pas assez abstraction des temps et des lieux pour atteindre aux plus hautes généralités. […] Les nations les plus éloignées par les temps et par les lieux suivent dans leurs révolutions politiques, dans celles du langage, une marche singulièrement analogue. […] Qui ne ressentira un divin plaisir en ce corps mortel, lorsque nous contemplerons ce monde des nations, si varié de caractères, de temps et de lieux, dans l’uniformité des idées divines ? […] Pourquoi tant de lieux escarpés ou retirés portent-ils des noms de saints ? […] Son malheureux fils, l’âme navrée, s’adressa au chapitre de l’église métropolitaine, et le fit enterrer enfin dans l’église des pères de l’Oratoire (detta de’ Gerolamini), qu’il fréquentait de son vivant, et qu’il avait choisie lui-même pour le lieu de sa sépulture.

486. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « LOUISE LABÉ. » pp. 1-38

Collombet, mais débarrassée d’ailleurs de toute surcharge de notes qui ne sont bonnes qu’une fois, et qu’il faut laisser en leur lieu à l’usage des érudits. […] De telle sorte, la renaissance à Lyon s’était faite insensiblement par voie d’infusion successive, et il y eut bien moins lieu que partout ailleurs au coup de tocsin de 1550, qui ressemblait à une révolution. […] Cependant l’ode d’Olivier de Magny, publiée en 1559, et dans laquelle le gracieux poëte, un des adorateurs de Louise Labé, parle très-lestement de ce mari que jusque-là on n’avait vu nommé nulle part ailleurs6, donne à soupçonner qu’il n’y a peut-être pas lieu de se mettre tant en frais pour sauver le décorum. […] C’est là du Maurice Sève, pour le contourné et le rocailleux ; ce Sève, je l’ai dit, tenait lieu à Louise de Ronsard.

487. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre cinquième. Le peuple. — Chapitre II. Principale cause de la misère : l’impôt. »

En effet elle représente juste, et sans un sou de trop : en premier lieu, l’intérêt du capital primitif qu’il a mis dans son exploitation, bestiaux, meubles, outils, instruments aratoires ; en second lieu, l’entretien annuel de ce même capital, qui dépérit par la durée et par l’usage ; en troisième lieu, les avances qu’il a faites dans l’année courante, semences, salaires des ouvriers, nourriture des animaux et des hommes ; en dernier lieu, la compensation qui lui est due pour ses risques et ses pertes. […] Mais ces sortes de frais sont d’habitude, et ils y comptent, au lieu qu’ils craignent, s’ils devenaient plus exacts, d’être plus chargés l’année d’ensuite. » En effet, le receveur, qui paye ses garnisaires un franc par jour, les fait payer deux francs et gagne la différence. […] À force d’amis et de protection, il ne leur en a coûté que 48 livres. » — Défense de puiser de l’eau de la mer et des sources salées, à peine de 20 et 40 livres d’amende  Défense de mener les bestiaux dans les marais et autres lieux où il y a du sel, ou de les faire boire aux eaux de la mer, à peine de confiscation et de 300 livres d’amende. — Défense de mettre aucun sel dans le ventre des maquereaux au retour de la pêche, ni entre leurs lits superposés.

488. (1860) Cours familier de littérature. X « LVIIe entretien. Trois heureuses journées littéraires » pp. 161-221

La mémoire, c’est la lampe du soir de la vie : quand la nuit tombe autour de nous, quand les beaux soleils du printemps et de l’été se sont couchés derrière un horizon chargé de nuages, l’homme rallume en lui cette lampe nocturne de la mémoire ; il la porte d’une main tremblante tout autour des années aujourd’hui sombres qui composèrent son existence ; il en promène pieusement la lueur sur tous les jours, sur tous les lieux, sur tous les objets qui furent les dates de ses félicités du cœur ou de l’esprit dans de meilleurs temps, et il se console de vivre encore par le bonheur d’avoir vécu. […] Je veux me donner aujourd’hui cette délectation de cœur et d’esprit, en me rappelant minutieusement les lieux et les jours où je connus pour la première fois ce poète ami, Victor de Laprade, auteur digne d’être nommé à côté de Boccace et de Pétrarque, digne d’avoir vécu à Florence dans le temps des néo-platoniciens d’Italie, avec lesquels il a tant de ressemblance. […] Ces visiteurs ne connaissaient pas les lieux ; ils prirent, sur la piste des chiens, le sentier des chèvres qui descend dans le fond du pré, et qui remonte vers le bois où nous étions assis. […] Vous n’avez pas assez d’humain en vous pour la foule, vous serez mieux compris des anges que des hommes, vous sacrifierez sur les hauts lieux.

489. (1860) Cours familier de littérature. X « LVIIIe entretien » pp. 223-287

Il sera de plus un poète sérieux, ayant le respect de ceux qui l’écoutent, et non un de ces poètes moqueurs et siffleurs, tels que nous venons d’en voir vivre et mourir deux ou trois, qui mêlent le fifre au concert des anges, et qui soufflent la froide ironie dans l’âme de la jeunesse, au lieu du saint enthousiasme, seul thème véritable des chants immortels ! […] Il écrit, à ce que disent ses amis, un poème épique familier dont la vie privée, sans aventures et sans merveilleux, sera le sujet, poème qui ne prendra son intérêt que dans les lieux, les choses, les impressions qui nous enveloppent tous et tous les jours : l’épopée du coin du feu. […] Ici le poète change de ton, et, saisi de ces frissons lyriques qui sortent des sources et des bois sur les hauts lieux, il fait chanter un hymne à son cœur de philosophe de l’espérance. […] D’autres bergers peut-être, ainsi qu’au moyen âge, Sur la montagne iront faire un pèlerinage, Et quelque vieille femme en indiquant le lieu, Leur dira : C’est ici que le miracle eut lieu !

490. (1861) Cours familier de littérature. XII « LXXIIe entretien. Critique de l’Histoire des Girondins (3e partie) » pp. 369-430

D’abord le lieu, puis l’homme, puis les accessoires, les indices de l’événement qui va se passer. […] J’avais deux torts, en effet, que je ne cherche point à excuser : le premier, c’était de porter, quoique dans une intention très innocente et même très atténuante, le jour non pas de l’évidence, mais de la conjecture sur l’intérieur d’une femme qui ne doit compte qu’à Dieu et à son mari de la nature de ses intimités et de ses prédilections, intimités et prédilections que l’historien doit toujours présumer irréprochables ; le second, c’était de m’être servi du mot pudeur au lieu du mot convenance dans la dernière phrase de ce paragraphe. […] J’avais fait là ce que je fais toujours, j’avais pris le mot latin pudeur au lieu du mot moderne réserve ou convenance. […] Son journal, colporté le soir dans les lieux publics et crié avec des sarcasmes dans les rues, n’a pas été balayé avec ces immondices du jour.

491. (1865) Cours familier de littérature. XIX « CXIe entretien. Mémoires du cardinal Consalvi, ministre du pape Pie VII, par M. Crétineau-Joly (3e partie) » pp. 161-219

Ils lui proposèrent de souscrire aux volontés de l’empereur ou de partir immédiatement, sans désigner le lieu de l’exil. […] Au lieu donc de me montrer touché et reconnaissant de sa bonté et de cet aveu si extraordinaire et tellement significatif sur les lèvres d’un pareil homme, aveu fait en s’accusant d’avoir eu le tort de m’écarter du ministère, je me vis dans la dure nécessité de riposter à une assertion des plus obligeantes de sa part par une phrase des plus fortes et des plus énergiques. […] « Et d’abord je recommande humblement et chaleureusement mon âme au Seigneur très clément, en le priant, par les mérites de son divin Fils Notre-Seigneur Jésus-Christ, qui m’a racheté au prix immense de son très précieux sang, par l’intercession de la très sainte Vierge Marie et des Saints, mes patrons, de la conduire en un lieu de salut, et de me pardonner dans sa miséricorde infinie mes très graves péchés. […] « Ayant dans mon testament, écrit tout entier et de ma propre main et daté de ce même jour, nommé et institué mon héritier fiduciaire Mgr Alexandre Buttaoni, promoteur de la foi, avec charge de remettre en temps et lieu l’héritage à mon héritier propriétaire, je déclare par ce feuillet, qui fait partie de mon testament, ne rien posséder qui, en vigueur du motu proprio du 6 juillet de l’année 1816, ne soit parfaitement libre de toute charge et de tout fidéicommis ; et je nomme, institue, déclare mon héritier universel de tous et chacun de mes biens, crédits, droits, la Sacrée Congrégation de la Propagande de la foi, à laquelle néanmoins j’interdis formellement et de la manière la plus expresse, la détraction de la quatrième Falcidia, de quelque manière et à quelque titre que ce soit.

492. (1763) Salon de 1763 « Peintures — De Machy » pp. 242-243

Celui des Ruines de la foire Saint-Germain où le peintre a choisi le moment qui succède au danger ; où les braises ardentes éclairent les débris de l’édifice et les lieux circonvoisins ; où les hommes épuisés se reposent de leurs fatigues, et se remettent de leur effroi ; où les uns sont spectateurs oisifs, et les autres éteignent dans une mare d’eau des poutres, des solives à demi consumées ; où chacun travaille à reconnaître ses effets entassés pêle-mêle ; cette ruine, dis-je, a de l’effet.

493. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Œuvres de Vauvenargues tant anciennes qu’inédites avec notes et commentaires, par M. Gilbert. — II — Vauvenargues et le marquis de Mirabeau » pp. 17-37

Ces lettres de Vauvenargues sont datées d’Arras, de Besançon, de Reims, de Verdun, de tous les lieux de garnison où le promène son métier. […] Si Vauvenargues dit qu’il lit peu, c’est bien souvent aussi que ses yeux malades lui refusent le service, et qu’il ne trouvait point en tout lieu de lecteur à sa disposition pour le soulager. […] Mirabeau lui adresse de là, de ce lieu qu’il déteste, dit-il, par excellence, et où il est pour une affaire qui doit lui procurer de l’avancement ou amener sa démission du service, une lettre toute de conseils et d’excitations, et sur le même thème toujours ; « Vous êtes le premier raisonneur de France, mais le plus mauvais acteur » (acteur pour homme d’action) ; et en même temps il se représente, lui, comme un sage, un homme à principes fixes, et aussi un désabusé de l’ambition : Pour moi, dans les idées qui s’offrent à mon imagination, plusieurs se présentent avec empire, mais nulle avec agrément, que celle d’une solitude aimable et commode, quatre ou cinq personnes assorties de goût et de sentiment, de l’étude, de la musique, de la lecture, beau climat, agriculture, quelque commerce de lettres, voilà mon gîte !

494. (1866) Nouveaux lundis. Tome VI « Sismondi. Fragments de son journal et correspondance »

Rentré encore une fois à Genève, Sismondi y trouva pour le coup la Terreur, la vraie Terreur, fort hideuse et atroce là comme en tout lieu. […] Il publia en 1801 son Tableau de l’Agriculture toscane, dans lequel, à côté des détails précis, techniques et tels que les peut désirer tout lecteur propriétaire rural, se trouvent des peintures véritables inspirées par la beauté des lieux, et qui ne se rencontreront plus jamais ensuite sous sa plume. […] En quelque lieu qu’il s’arrête, sur quelque métairie qu’il porte ses regards, il voit tout ensemble devant lui, la vigne qui, élégamment suspendue en contre-espalier autour de chaque champ, l’environne de ses festons ; les peupliers, rapprochés les uns des autres, qui lui prêtent l’appui de leur tronc, et dont les cimes s’élèvent au-dessus d’elles ; l’herbe, qui croît au pied de ces élégants contre-espaliers et qui gazonne les bords des nombreux fossés, destinés à l’écoulement des eaux ; les mûriers qui, plantés sur deux lignes au milieu des champs, et à une distance assez grande pour ne pas les offusquer de leur ombre, dominent les moissons ; les arbres fruitiers qui, çà et là, sont entremêlés aux peupliers et à la vigne ; les blés de Turquie qui, s’élevant à six ou huit pieds au-dessus de terre, entourent leurs magnifiques épis de la plus riche verdure ; les trèfles annuels dont les fleurs incarnates se penchent sur leur épais feuillage ; les lupins dont le coup d’œil noirâtre et l’abondante végétation contraste avec la souplesse, l’élégance et la légèreté des seigles non moins vigoureux qu’eux et qui s’élèvent au-dessus de la tête des moissonneurs ; enfin, les blés dont les longs épis dorés sont agités par les vents et rappellent par leurs ondulations le doux mouvement des vagues d’un beau lac. » Le second morceau consacré aux Collines est comme un pendant au tableau des plaines ; celles-ci, dans aucun pays, ne peuvent plaire aux yeux que par l’abondance et la fertilité qui les caractérise.

495. (1867) Nouveaux lundis. Tome VII « Corneille. Le Cid(suite et fin.)  »

Dans l’auteur espagnol, c’est mieux : le père a indiqué un rendez-vous exact à son fils dans un lieu écarté : ce qui est tout naturel. […] Mais Corneille n’aurait jamais osé faire entendre ce galop de cheval, qui aurait trop averti les spectateurs du changement et de l’éloignement du lieu. […] « Je vais mourir, Madame, et vous viens en ce lieu, Avant le coup mortel, dire un dernier adieu… » « — Tu vas mourir ! 

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