Zola ou Anacréon à propos d’une opérette : c’est aussi et surtout parce qu’il a gardé dans ce qu’il a d’essentiel le goût classique. […] Brunetière et ses pareils le droit des penseurs à chercher et à dire librement la vérité, il a gardé de ses premières années certaines expressions du langage dévot. […] Ceux mêmes qui gardaient leur indépendance de jugement, qui regimbaient contre certaines de ses conclusions, ne pouvaient s’empêcher de rendre justice à la maestria avec laquelle il déroulait les replis des âmes les plus complexes. […] Scanderbeg répondit en souriant : « J’ai envoyé le sabre, mais j’ai gardé le bras. » II. […] Il offrait au public des œuvres qui gardaient de la littérature régnante assez de choses pour plaire aux amis des écrivains en vogue, et qui apportaient assez de nouveau pour charmer leurs adversaires : double condition pour être bien accueilli !
Notre Codex, encore hospitalier à la corne de cerf râpée, n’a pas gardé trace de la médecine de Porta, et la récente opothérapie est tout de même un peu moins déraisonnable. […] La matière dont ils sont composés est use matière sensibilisée à l’extrême et qui a déjà la propriété de garder les empreintes des excitations qu’elle reçoit. […] La part de la volonté est minime dans notre vie : nous gardons en nous la trace profonde de l’automatisme originaire. […] Il est observé par tous les Hindous soucieux de garder leur rang ; aussi peut-on dire, malgré les dérogations, qu’il est le fondement même de la vie sociale dans l’Inde. […] Ceux qui partent n’éprouvent pas plus de contentement que ceux qui restent, et tels, qui auraient vu le monde entier, garderaient en leur cœur troublé le désir d’un monde inconnu.
Il a gardé la belle orpheline pauvre et l’a appelée Hyacinthe. […] Pourquoi Viola a pris ce déguisement, et quel serment l’oblige à le garder, c’est ce que je n’ai pas à vous dire ici. […] Mais comme elle n’y vint qu’une fois ou deux, et qu’elle y apparut dans tout l’éclat de sa beauté, les Provençaux gardèrent d’elle un souvenir ineffaçable. […] Ce que cette piécette recommande aux maris qui veulent garder leur femme, c’est la débauche dans le mariage. […] Les hommes y gardent encore, çà et là, quelque conscience, quelque notion du bien et du mal, quelque sentiment de justice et de pitié.
Je me résignai sagement à garder le silence, et j’attendis un temps plus heureux dans la retraite : il me parut impossible de continuer une analyse que trop de précautions indispensables embarrassaient. […] Le poids du plus barbare despotisme nous aurait-il si peu pesé que quelques poètes européens n’en puissent plus garder la douleur ? […] Lebrun, autre ami de mes jeunes années, très rigoureux et très éclairé, fut de l’opinion de Delille ; je gardai donc ma fable et je n’en refondis que la versification. […] « Vois l’auguste univers, tranquille autour de moi, « Garder son équilibre et suivre en paix ma loi. […] Mais, en revanche, notre bon sens, dit l’Arioste, est si bien amoncelé là-haut, qu’à peine si les plus sages d’entre nous en ont gardé quelque dragme.
C’est pourquoi il a gardé, en une si grande révolution de sentiments et d’idées, le courage d’espérer et la force de sourire. […] Il se gardait de l’esprit de système. […] Le chevalier de la Triste Figure avait gardé, de ses lectures échauffantes, un goût immodéré pour l’action et pour le sacrifice. […] Nous n’avons pas gardé les mêmes manières d’exprimer nos sentiments et de déguiser nos faiblesses. […] Même au plus fort des calamités publiques, ce peuple de Florence gardait sa gaîté naturelle et son gracieux génie : ingegnoso e piacevole molto.
gardons-la précieusement, et aussi notre sage théologie qui damne les gens « cinq mille ans avant leur naissance. » Pour le mauvais chien appelé sens commun qui mord si ferme, bannissons-le au-delà des mers : « qu’il aille aboyer en France ! […] Ses autres personnages sont du même goût, un paillasse, une luronne coupeuse de bourses, un pauvre nain racleur de boyau, un chaudronnier ambulant, tous déguenillés, braillards et bohèmes, qui s’empoignent, se rossent, s’embrassent et font trembler les vitres des éclats de leur belle humeur. « Ils vident leurs havre-sacs, ils engagent leurs guenilles. — Ils gardent tout juste de quoi couvrir leur derrière », et leur chœur monte comme un tonnerre ébranlant les solives et les murs : Au diable ceux que la loi protége ! […] Autour de lui et après lui, le roman de mœurs, dégagé du roman historique, a fourni une littérature entière et gardé les caractères qu’il lui avait imprimés. […] Le propre de l’artiste est de couler les grandes idées dans des moules aussi grands qu’elles ; ceux de Wordsworth sont en mauvaise glaise vulgaire, ébréchés, incapables de garder le noble métal qu’ils doivent contenir. […] Celui-ci, un des plus grands poëtes du siècle, fils d’un riche baronnet, beau comme un ange, d’une précocité extraordinaire, doux, généreux1228, tendre, comblé de tous les dons du cœur, de l’esprit, de la naissance et de la fortune, gâta sa vie comme à plaisir, en portant dans sa conduite l’imagination enthousiaste qu’il eût dû garder pour ses vers.
Il leur oppose les Grecs, qui « ne haussaient pas le ton mal à propos et savaient garder la mesure ». […] Taine a gardé tous les ennemis qu’il s’est créés dans les diverses étapes de sa longue et glorieuse carrière. […] Mais sa préface ne pouvait que nous induire en erreur, et il s’est bien gardé, au cours du volume, d’indiquer la place et la dimension des coupures. […] Dingo avait gardé les saines allégresses de la nature, il était pur de tout contact humain, vierge de toute civilisation. […] « Jean-Paul se garda bien, dit M.
« Non, ce n’est pas que je songe à l’inimitié que M. le Doyen et M. le Recteur consentent à me garder. […] Jules Simon a gardé un bon et un grand souvenir de Guillaume II. […] On n’a que le nombre strictement nécessaire de marins pour garder le bateau. […] Mme de Velde gardait la maison avec une fidélité qui tenait de l’obstination : M. […] Celui qui a gardé son âme pure la garde jeune.
Si on l’avait écouté, l’Allemagne n’aurait pas gardé un seul ami dans le monde entier ! […] Un jour que je me trouvais en permission à Paris, j’eus l’occasion de rendre service à un journaliste qui, malade à son domicile et redoutant d’être soigné à l’infirmerie de son dépôt, s’était bien gardé de prévenir l’autorité militaire. […] Léon Daudet y habite ; c’est une maison bien gardée, et le Correspondant qui possède là ses bureaux et, dans la personne de Maurice Brillant, un secrétaire sans défaillance, évite du même coup les cambriolages. […] À la nuit, le chapeau sur les yeux, il repartait rapidement pour le Parc-Saint-Maur ; il était parfois trop tard, le train des théâtres était parti ; on le gardait à Montmartre, on le couchait chez l’un, chez l’autre. […] Comme Racine, dont il était le parent, comme beaucoup d’écrivains, d’un talent doux, affectueux, tendre, dit encore Sainte-Beuve à qui il faut toujours revenir, M. de Fontanes avait tout à côté l’épigramme facile, acérée ; chez lui, la goutte de miel lent et pur était gardée d’un aiguillon très vigilant.
Gardons qu’ils ne renaissent encore, et souvenons-nous toujours des derniers conseils du premier fondateur de la révolution. […] Il s’est bien gardé, malgré la différence des opinions, de traiter avec légèreté celles d’une femme aussi respectable, qui, dans sa prison, n’a d’autres consolateurs que Dieu et sa conscience. […] Gardons-nous donc bien de calculer les progrès de la raison humaine et des institutions sociales, sur ceux des mathématiques et de la physique. […] Les fils des pasteurs d’Orient gardaient les troupeaux comme les fils des rois d’Ilion. […] Racine s’est bien gardé de suivre en tout, les traditions connues.
Ainsi, selon la tradition la plus accréditée, la misère seule aurait déterminé le choix des premières occupations de Shakespeare à Londres, et le soin de garder les chevaux à la porte du spectacle aurait été son premier rapport avec le théâtre, son premier pas vers la vie dramatique. […] c’est une profanation de garder encore le logis, tandis qu’en ce jour, pour prendre mai, des milliers de jeunes filles se sont levées avant l’alouette. […] La mère de Hamlet n’a gardé, dans son incestueux amour, aucune mesure ; elle connaît son crime et le commet ; sa situation est celle d’une effrontée coupable ; son âme est celle d’une femme qui pourrait aimer la pudeur et se trouver heureuse dans les liens du devoir. […] Les théâtres de Londres avaient été construits sur ce modèle ; et ceux qu’on appelait théâtres publics, par opposition aux salles particulières, avaient gardé la coutume de représenter en plein jour et sans autre toit que le ciel. […] Il gardera courageusement sort poste malgré les huées du parterre, dût même la populace qui le remplit « lui cracher au nez et lui jeter de la boue au visage » ; ce qu’il convient au gentilhomme de supporter patiemment, en riant « de ces imbéciles animaux-là. » Cependant si la multitude se met à crier à pleine gorge : « Hors d’ici le sot !
Aujourd’hui que nous jugeons les choses à distance et par les résultats dégagés, Molière nous semble beaucoup plus radicalement agressif contre la société de son temps qu’il ne crut l’être ; c’est un écueil dont nous devons nous garder en le jugeant. […] Molière faisait si naturellement les vers que ses pièces en prose sont remplies de vers blancs ; on l’a remarqué pour le Festin de Pierre, et l’on a été jusqu’à conjecturer que la petite pièce du Sicilien avait été primitivement ébauchée en vers et que Molière avait ensuite brouillé le tout dans une prose qui en avait gardé trace. […] M. de Schlegel gardait-il rancune à Molière pour le trait innocent du pédant Caritidès sur les Allemands d’alors, grands inspectateurs d’inscriptions et enseignes ? […] Je veux parler du fameux souper où, pendant que l’amphitryon malade gardait la chambre, Chapelle fit si bien les honneurs de la cave et du festin, que tous les convives, Despréaux en tête, couraient se noyer à la Seine de gaieté de cœur, si Molière, amené par le bruit, ne les avait persuadés de remettre l’entreprise au lendemain, à la clarté des cieux.
Je lui demande ce qu’il fait dans le moment, il me répond qu’il écrit un roman, et un Traité de lapPrincesse, un livre donnant à la femme le moyen de garder ses captifs, un livre qui serait un traité de machiavélisme amoureux, à l’usage de la femme. […] … » Lui gardait parfaitement son secret. […] Si la marque de fabrique du Parisien intelligent est d’être dépossédé de l’étonnement, celui-ci par contre, en a gardé toute la virginité. […] Un jeune homme d’ici est mort ; il a laissé un chien, que la mère de ce jeune homme se faisait un bonheur de garder, comme un peu du souvenir de son fils.
Le ménage se décide, et le gras Chabouillet, dont j’ai gardé le souvenir, comme un Louis XVI, en pantalon de nankin, fait un trou dans le plafond, y conduit le serpentement d’un petit escalier tournant, et voilà installée la salle à manger ordinaire de Murger, de Bartet, de Scholl, de Monselet, etc., etc. […] Et avec Daudet, nous disons, qu’il faudrait renouveler la pantomime, jeter à l’eau tous les gestes rondouillards, tous les gestes qui racontent, et ne garder que les gestes de sentiment, les gestes de passion, auxquels Margueritte mettrait les grandes lignes de sa pantomime, — et nous parlions d’une pantomime sur la peur, dont ses traits savent si éloquemment rendre l’expression. […] Et il dit avec la voix et les expressions de caresse lui venant à la bouche, quand il parle de ses enfants, que le médecin lui ayant annoncé qu’il n’y avait plus d’espoir à garder, et qu’il fallait seulement songer à la soulager, il avait jeté les drogues dans la cheminée, et l’avait, ainsi qu’il le raconte dans un de ses romans, promenée, bercée dans ses bras vingt-quatre heures, et que le petit être intelligent s’était laissé faire, et avait eu soudain un sourire, dans l’aube du jour… Elle était guérie ! […] Songe-t-on, qu’à la veille de l’anniversaire de 89, un directeur de théâtre est obligé de batailler avec la commission de la censure, un gros quart d’heure, pour garder cette phrase de son auteur : « Je suis prête d’accoucher.
Gardons-nous d’être trop simpliste dans le choix d’une méthode pour nos études littéraires. […] … Ils violent des droits que tu n’as pas gardés ! […] Il faut nous garder des affirmations absolues et téméraires, quand la vérité psychologique des caractères dessinés par un auteur ne nous apparaît pas, quand ils choquent notre conception familière. […] Pouvait-il garder les mules moribondes, les deux carrosses en ruines, les livrées sordides de son prédécesseur ? […] Ce que fit en un mot Beaumarchais, qui se garda bien de rien mettre dans son Espagne qu’on ne pût voir à Paris : j’excepterai, si l’on veut, les guitares.
Poitou n’eût point gardé de ménagements, mais à condition de circonscrire ses attaques. […] Seulement Oronte gardait l’air de l’hôtel de Rambouillet où il ne se parlait guère de loques. […] Il n’a gardé d’oublier, à côté de l’esprit tranquille, « la chair contente ». […] Murger n’a gardé de le supposer, et ceux qui lisent M. […] Toute différence gardée entre la langue de Lesage et la langue de M.
Je veux le garder pour aimer.
Soubrany, noyé dans son sang, gardait, malgré sa douleur, le calme et l’attitude fière, qu’on avait toujours remarqués en lui.
. — Étranges recrues pour garder une société, toutes choisies dans la classe qui l’attaque, paysans foulés, vagabonds emprisonnés, gens déclassés, ; endettés, désespérés, pauvres diables aisément tentés et de cervelle chaude, qui, selon les circonstances, deviennent tantôt des révoltés et tantôt des soldats.
Il déterminait la position qu’en somme l’esprit classique gardera à l’égard de l’antiquité, quand il traduisait selon son jugement plutôt que selon le texte, déclarant qu’« il n’apprêtait pas de viandes pour les cuisiniers » : entendez qu’il écrivait pour les gens du monde et non pour les savants ; c’était soumettre l’antiquité au sens commun.
De ses éléments concrets, colorés, pittoresques, succulents : elle avait gardé, aiguisé, fortifié les éléments rationnels, abstraits et pour ainsi dire algébriques, tout ce qui sert à définir la pensée sans la figurer.
Ce que nous raconte le journal, c’est peut-être l’aventure d’un grand homme d’action paralysé peu à peu par un incomparable analyste, — lequel a gardé d’ailleurs, dans ses œuvres écrites, le goût le plus décidé pour l’énergie humaine.
Les exécuteurs, auxquels on abandonnait d’ordinaire les menues dépouilles (pannicularia) des suppliciés 1176, tirèrent au sort ses vêtements, et, assis au pied de la croix, le gardaient 1177.
Les danseurs pouvoient garder toute la décence possible dans leur maintien, en executant ces ballets, dont la danse n’étoit presque pas differente de celle des bals ordinaires.
Excepté Eugénie de Guérin, sa rivale d’émotion, mais sa supérieure de talent, personne n’avait une telle place dans la publicité de ce siècle… Pourquoi donc ne l’avoir pas gardée ?
Le Moyen Age a vécu des conceptions de ce grand esprit qui garda toute son autorité après sa mort.
Confusion et déplacement funestes, qui doivent troubler la limpidité du courant historique pour des siècles, car, si les hommes se trompent sur la nature des fautes qui ont produit les abaissements ou les calamités d’une époque, ils ne se trompent pas dans cet instinct qu’ils ont gardé depuis la Chute et qui leur fait mettre toujours des fautes partout où il y a du malheur !
., etc. », il écrit avec aplomb que le prêtre « peut garder les petites facultés d’intrigue et de manège, mais les grandes facultés viriles, surtout l’invention, ne se développent jamais dans cet état maladif… Depuis cent cinquante ans surtout, il s’est énervé et n’a plus rien produit ».
Et voici Alexandre Weill, qui n’est pas Allemand, mais qui ne doit pas être né très loin de l’Allemagne si j’en crois certains reflets gardés sur sa pensée, qui pense à son tour qu’en disant sans biaiser à mademoiselle sa fille ses idées, à lui, sur les femmes et sur le gendre qui doit lui agréer, il trouvera ce merle blanc, comme il l’appelle, qui n’est blanc souvent que parce qu’il s’est fourré de la poudre de riz quand il allait faire la cour à sa femme, mais qui finit toujours par redevenir l’autre merle que nous connaissons.
I J’attendais la nouvelle édition de ce livre pour parler de l’auteur de La Fille Élisa, — de cette production jalouse et désespérée, sur laquelle j’ai gardé le silence par respect pour l’homme qui l’a écrite.
Envahis, il nous avait gardés.
L’Histoire, cette harpe trop tendue, allait détendre ses cordes d’airain… Michelet reçut le coup de la fascination de Carlyle dans ses yeux charmés, qu’il aurait dû garder charmants, mais qui, plus tard, sont devenus obscènes.
Et ce muscle, il l’a gardé.
Il y a du talent dans ce livre passionné, entêté, ulcéré, aveugle de parti pris et gardé… Mais le fond de cela n’est vraiment pas digne de la forme.
Eh bien, ce que le philosophe furibond ne manqua pas certainement d’appeler une capucinade, n’a-t-il pas influé sur l’esprit de Sainte-Beuve, trop détaché des choses religieuses pour bien comprendre, dans ses sévérités comme dans ses indulgences, dans ses ombres comme dans ses lueurs, cette capucine de bonne volonté, qui abaissa de bonne heure sur ses yeux restés pénétrants la pointe de son bonnet de dévote et qui le garda, jusqu’à sa mort, comme le capuchon de sa vieillesse, sans que pour cela ses anciens yeux d’escarboucle brillassent moins fort et vissent moins clair ?