Le stoïcisme, le calvinisme, un certain catholicisme janséniste, sont contraires et mortels au sentiment de la nature ; l’épicuréisme, qui ne veut que les surfaces et la fleur ; le panthéisme, qui adore le fond ; le déisme, qui ne croit pas à la chute ni à la corruption de la matière, et qui ne voit qu’un magnifique théâtre, éclairé par un bienfaisant soleil ; un catholicisme non triste et farouche, mais confiant, plein d’allégresse, et accordant au bien la plus grande part en toutes choses depuis la Rédemption, le catholicisme des saint Basile, des saint François d’Assise, des saint François de Sales, des Fénelon ; un protestantisme et un luthéranisme modérés, que les idées de malédiction sur le monde ne préoccupent pas trop ; ce sont là des doctrines toutes, à certain degré, favorables au sentiment profond et aimable qu’inspire la nature, et aux tableaux qu’on en peut faire.
De l’autre côté la science, par ses découvertes grandioses et multipliées, construit pièce à pièce le fond de confiance et de déférence universelles qui, de l’état de curiosité intéressante, l’élève au rang de pouvoir public ; ainsi, par degrés, l’autorité de la raison grandit et prend toute la place. — Il arrive un moment où, la seconde autorité ayant dépossédé la première, les idées mères que la tradition se réservait tombent sous les prises de la raison.
Herman conduit la jeune étrangère le long des escaliers aux degrés rustiques et informes placés sous la treille qui les obscurcit ; elle s’avance à pas tremblants en appuyant sa main sur l’épaule d’Herman.
Ce système d’enseignement consiste dans une métaphysique tellement éthérée qu’elle échappe à l’intelligence ; c’est prétendre planer au sommet sans avoir gravi les degrés qui y montent.
Ce qu’il venait de dire l’avait rapproché de celui qui est dans la mort (sans doute Dieu) ; l’instant suprême arrivait. » « L’évêque, ajoute l’écrivain, le comprit ; le moment pressait ; c’était comme prêtre qu’il était venu ; de l’extrême froideur il était passé par degrés à l’émotion extrême, il regarda ces yeux fermés, il prit cette vieille main ridée et glacée, et se pencha vers le moribond.
Cette comparaison est d’autant plus juste qu’à beaucoup d’époques il semble reculer, et revient ensuite sur ses pas, en ayant gagné quelques degrés de plus.
Eh bien, voyez ce qu’advient souvent de monter au dernier degré, qui feroit croire que l’abîme est en haut.
» Pawlet l’aidant à monter les degrés de l’échafaud, elle jeta sur lui un regard plein de douceur : « Sir Amyas, dit-elle, je vous remercie de votre courtoisie ; c’est la dernière peine que je vous donnerai et le plus agréable service que vous puissiez me rendre. » Parvenue à l’échafaud, Marie Stuart prit place dans le fauteuil qui lui avait été préparé, le visage tourné vers les spectateurs.
Ces montagnes lui parurent les degrés de l’enthousiasme et les remparts de la liberté.
Il est vrai qu’à la différence des autres sceptiques, s’il veut nous prendre notre raison, c’est pour nous donner sa foi, et le don est inestimable, à voir à quel degré de pureté, de grandeur morale, la foi a élevé Pascal.
Ce n’est pas une question de degrés, c’est une question d’ordre.
Mes condisciples étaient pour la plupart de jeunes paysans des environs de Tréguier, vigoureux, bien portants, braves, et, comme tous les individus placés à un degré de civilisation inférieure, portés à une sorte d’affectation virile, à une estime exagérée de la force corporelle, à un certain mépris des femmes et de ce qui leur paraît féminin.
Dans la rénovation Wagnérienne il y a en effet deux degrés ; l’un, tout extérieur, est l’abandon du cadre de l’opéra, l’institution de la forme du drame lyrique ; un second, plus intime, est ce retour dont nous parlions à l’expression psychologique.
Un tel degré d’oubli du monde réel, un si complet abandon en scéne paraissent tout au plus acceptables en Allemagne, et seulement eNtre époux.
2e acte La ténébreuse introduction, avec son grondement de timbales, le motif sinistre des violoncelles, et la réapparition du thème de défense, est tragique au plus haut degré.
Chaque feuille qui tombe avec un lent bruit d’aile A l’air d’éparpiller un peu d’ombre autour d’elle, Et la tiédeur du parc, le charme agonisant De l’automne et la paix de la nuit qui descend Lui versent tant de trouble et de mélancolie Que, perdue en un rêve indicible, elle oublie… Le soir qui la remplit d’une molle torpeur S’incline lentement, par degrés, et, de peur D’interrompre le cours de son extase douce, On dirait qu’il s’applique à tomber sans secousse.
Mais il n’a pas pesé sur elle ; il a pesé sur d’autres fautes, qui ne furent peut-être que des conséquences de celle-là… Il a pesé sur les troubles des Flandres, sur les atroces et inutiles exécutions du duc d’Albe, sur les monstrueuses concussions d’une administration arrivée au dernier degré de la rapacité et de la corruption, sur l’effroyable indiscipline d’une armée qui abandonne son drapeau devant l’ennemi qu’elle sait vaincre encore, parce que cet ennemi, pillé par elle, n’a plus rien qu’elle puisse lui voler !
Voilà toute la donnée, et les combinaisons d’événements qu’il a arrangées autour d’une idée si pauvre ne l’enrichissent pas ; elles manquent toutes de vraisemblance au plus haut degré.
Les moyens de transposition sont si nombreux et si variés, le langage présente une si riche continuité de tons, le comique peut passer ici par un si grand nombre de degrés, depuis la plus plate bouffonnerie jusqu’aux formes les plus hautes de l’humour et de l’ironie, que nous renonçons à faire une énumération complète.
Charles Reynaud possède au plus haut degré cette qualité qui domine tout en Italie ; elle est sympathique. […] Les sophismes et les mensonges, inévitable cortège de ces crises funestes, descendirent d’un degré l’échelle sociale ; ils ne s’adressèrent plus aux habits noirs, mais aux blouses ; et, par une réaction naturelle, les habits noirs s’avisèrent, un peu tard, du côté dangereux de ces idées qui rendaient les blouses si inquiétantes. […] L’esprit de l’un éclate, jaillit, pétille et mousse sans cesse, comme un vin de Champagne qui se verserait toujours sans s’épuiser jamais ; l’esprit de l’autre brûle à froid comme le vin du Rhin, qu’on boit à petits coups, et dont on ne sent que par degrés la saveur vigoureuse et contenue. […] Edmond Texier est un esprit ferme et juste, sobre et fin, possédant à un haut degré le sentiment du vrai, voyant bien ce qu’il regarde, décrivant bien ce qu’il voit, et parfaitement préparé à tracer d’une plume élégante le commentaire animé, intelligent, pittoresque, des merveilles du crayon moderne, des charmants dessins chargés d’illustrer sa prose ou plutôt d’établir avec elle un échange de traits heureux, de vives silhouettes, d’amusantes figures, de types, de saillies, d’épigrammes, d’épisodes grotesques ou tristes, tour à tour racontés par le dessinateur et dessinés par l’écrivain.
L’autre jour, dans un journal, on annonçait qu’un mariage venait d’unir deux personnages étrangers illustres par leur naissance ; la femme descendait, je ne sais à quel degré, de la reine Marie Leckzinska, et l’homme avait aussi je ne sais quelle descendance ou parenté royale ; puis tout aussitôt on ajoutait : « M. de Balzac était l’un des témoins de ce mariage. » C’est bien, voilà un romaucier qui se décrasse, me disais-je ; il a la vanité aristocratique, il va chercher ses rois en Bohême, rien de plus innocent […] Elle manquait aussi de ce que j’appelle la moralité d’artiste et qu’avait à un si haut degré Talma.
Quarante poëtes, parmi eux dix hommes supérieurs, et le plus grand de tous les artistes qui avec des mots ont représenté des âmes ; plusieurs centaines de pièces et près de cinquante chefs-d’œuvre ; le drame promené à travers toutes les provinces de l’histoire, de l’imagination et de la fantaisie, élargi jusqu’à embrasser la comédie, la tragédie, la pastorale et le rêve ; jusqu’à représenter tous les degrés de la condition humaine et tous les caprices de l’invention humaine ; jusqu’à exprimer toutes les minuties sensibles de la vérité présente et toutes les grandeurs philosophiques de la réflexion générale ; la scène dégagée de tout précepte, affranchie de toute imitation, livrée et appropriée jusque dans ses moindres parties au goût régnant et à l’intelligence publique : il y avait là une œuvre énorme et multiple, capable par sa flexibilité, sa grandeur et sa forme, de recevoir et de garder l’empreinte exacte du siècle et de la nation1. […] Il n’est que profond et triste ; la source de la vie est tarie, voilà tout ; elle ne vit plus, parce qu’elle ne peut plus vivre ; tout s’en va par degrés, la santé, la raison, puis l’âme ; au dernier moment, elle délire, et on la voit venir échevelée, les yeux tout grands ouverts, avec des paroles entrecoupées.
Tous les autres ne lui en veulent-ils si fort que pour n’avoir pas donné les règles d’un art inférieur à celui de ces grands hommes, ni ménagé de degrés de l’excellent au pire ? […] Boileau est la plus exacte personnification, dans notre pays, de l’esprit de discipline et de choix, de la règle qui nous enjoint de nous proportionner, de nous approprier aux autres, de donner le plus haut degré de généralité à nos pensées.
Or, étant donné le milieu anglais, le dénouement est purement idéal, les Anglais, quels que soient le degré et la nature de leur intimité, ne se tutoyant jamais, comme tout le monde le sait, excepté l’auteur étourdi de ladite nouvelle. […] Croyances Les Turcs, qui n’ont pas le culte de la mort, font de leurs cimetières des lieux de promenade et d’agrément ; les Français, qui l’ont à un haut degré, obtiennent souvent le même résultat.
De même que la création, telle que nous la voyons, est le résultat de plusieurs créations dont les précédentes sont toujours complétées par la suivante ; ainsi un tableau conduit harmoniquement consiste en une série de tableaux superposés, chaque nouvelle couche donnant au rêve plus de réalité et le faisant monter d’un degré vers la perfection. […] Mais une faculté qui n’est certes pas féminine, et qu’il possède à un degré éminent, est de saisir les parcelles du beau égarées sur la terre, de suivre le beau à la piste partout où il a pu se glisser à travers les trivialités de la nature déchue.
Si j’avais le loisir d’apprendre en détail, comme je le voudrais, l’histoire du monde, je préférerais à la lecture, d’ailleurs si profitable, du Discours sur l’histoire universelle de Bossuet, un voyage avec Bonvalot, qui est le plus suggestif des guides, et qui excelle à noter, dans les pays innombrables qu’il a parcourus, les détails qui peuvent nous donner quelque idée de tel ou tel degré du développement humain. […] L’auteur a soin de la parer, tous les soirs, d’une riche toilette de nuit, et il la couvre d’or et de pierreries, avant de lui permettre de s’étendre sur le grand lit royal, auquel on monte par six degrés de marbre, recouverts de tapis de Sidon, et que « décorent des bas-reliefs sculptés dans l’or massif et représentant les différentes scènes de la vie terrestre d’Isis à la recherche des dépouilles d’Osiris, son frère et son époux, tombés dans les embûches de Typhon ». […] Il lui parut que l’amour, au moment où il atteint son plus haut degré d’exaltation, retire précisément ce qu’il a promis : « l’envolement de deux cœurs, vers un idéal inaccessible, l’enlacement de deux âmes, tout le factice et l’irréalisable mis par les poètes dans la passion ». […] De la coterie au cénacle, du groupe au syndicat, du nid au cloître, du comité au chapitre, du phalanstère au monastère, il n’y a que des différences de degré. […] Mais quand le vaillant pasteur quitte les sommets de l’histoire, qu’il parcourt, comme les dieux d’Homère, en quelques enjambées, il excelle à peindre ce qu’il a vu de ses propres yeux : les jeunes gens, qu’il connaît bien pour les avoir pratiqués dans des milieux différents, à tous les degrés de l’échelle sociale.
Mais, dans André, l’art se laisse saisir à tous les degrés de formation. […] Il remarque, avant le lever de la lune, « son aube qui s’épanouit par degrés devant elle ». […] « Or, le style pittoresque (à son plus haut degré et dans la plupart des cas) me paraît consister essentiellement à saisir et à fixer la perception au moment où elle éclôt, avant qu’elle ne se décompose et qu’elle ne devienne sentiment. […] ) Voici les excellents conseils que donne Rondelet sur le mécanisme de l’antithèse : « A quelque genre qu’appartienne une composition, qu’elle ressorte du familier ou du sublime, il n’en est pas moins absolument certain que personne jamais, dans la conversation véritable, ne s’est exprimé ainsi, et n’a cherché ou réussi à atteindre ce degré exact de précision ou de sobriété. […] Mais comme son abaissement n’est pas une chute, mais une condescendance : « Descendit ut levaret, non cecidit ut jaceret » ; et qu’il n’est descendu à nous que pour nous marquer les degrés par lesquels nous pouvons remonter à lui, tout l’ordre de sa descente fait celui de notre glorieuse éléva-tion ; et nous pouvons appuyer notre espérance abattue sur ces trois abaissements du Dieu-homme.
Émile Bergerat aura eu cet honneur, en ce moment de platitudes exactes et observées, d’avoir fait sciemment, avec préméditation et combinaisons longuement préparées, une œuvre artistique, curieusement écrite, bizarrement pensée, et dépourvue, à un degré rare, de toute espèce de sens commun. […] M. de Vogüé me charme surtout par les qualités de poète qui sont en lui, et qui complètent admirablement l’observateur et l’historien qu’il est à un haut degré. […] Cette force atteint un tel degré, en ce prodigieux génie, qu’elle sera, je crois, un fait unique dans l’histoire littéraire, politique et humaine. […] Émile Zola possède à un degré moindre, c’est l’intelligence de la vie interne de l’homme.
Pour la littérature, il me semble qu’elle avait déjà souffert à maintes reprises, bien qu’à des degrés moindres, d’une semblable folie. […] Cette forme d’expression pour l’imagination et pour le sentiment, lorsqu’on la possède à un haut degré, est tellement supérieure, d’une supériorité absolue, à l’autre forme, à la prose ; elle est si capable d’immortaliser avec simplicité ce qu’elle enferme, de fixer en quelque sorte l’élancement de l’âme dans une altitude éternelle, qu’à chaque retour d’un grand et vrai talent poétique vers cet idiome natal, il y a lieu à une attente empressée de toutes les âmes musicales et harmonieuses, à un joyeux éveil de la critique qui sent l’art, et peut-être, disons-le aussi, au petit dépit mal caché des gens d’esprit qui ne sont que cela », Après ce salut à Polymnie, Sainte-Beuve entreprend Victor Hugo sans se gêner. […] Songez qu’il y a des degrés même pour la perfection ; et je ne parle point de cette surprise qui frappe avec la violence et la promptitude de la foudre dans quelque rare ouvrage, qu’il soit humain ou divin. […] Les armées de la République et de l’Empire défilèrent dans la rue Longue, heurtant des roues de leurs affûts les seuils à degrés des portes.
Ce degré de difficulté dans le travail me paraît inconcevable, surnaturel, fantastique. […] Il eut la plus haute intelligence, et la plus aiguë : il était poète et écrivain à un degré éminent ; il était capable de traduire le songe de la vie de façon à embellir la vie des autres hommes et il est mort. […] Voilà qui vous indique, ma cousine, le degré de poésie où peuvent se hausser les cerveaux entre Chartres, Étampes et Orléans.
Ce n’est que lorsqu’il avance et que la douleur l’éprouve à son tour, qu’il s’élève par degrés et qu’il rencontre de ces accents dont toute âme sensible peut se ressouvenir, à tout âge, sans rougeur.
Ma fureur insensée s’augmentant par degrés, le désir de me détruire s’empara de moi, et fixa toutes mes pensées.
Au lieu que le génie de Molière n’est que les qualités françaises portées à un degré supérieur de puissance et de netteté.
Mais le style n’est original qu’à proportion de l’importance et du degré d’intérêt des idées.
Là, où elle se trouve à un degré supérieur, elle rend le cœur si grand, qu’il embrasse le monde entier, de façon qu’il contient maintenant le Tout, que rien n’est plus en dehors de lui, puisque tous les êtres s’identifient avec lui.