Alors nous n’y gagnons pas seulement de rejoindre la science, qui nous montre chaque chose exerçant son influence sur toutes les autres, occupant par conséquent en un certain sens la totalité de l’étendue (bien que nous n’apercevions de cette chose que son centre et que nous en arrêtions les limites au point où notre corps cesserait d’avoir prise sur elle). […] Tandis, en effet, qu’on posait d’un côté une réalité extérieure multiple et divisée, de l’autre des sensations étrangères à l’étendue et sans contact possible avec elle, nous nous apercevons que l’étendue concrète n’est pas divisée réellement, pas plus que la perception immédiate n’est véritablement inextensive. […] Entre le plan de l’action, — le plan où notre corps a contracté son passé en habitudes motrices, — et le plan de la mémoire pure, où notre esprit conserve dans tous ses détails le tableau de notre vie écoulée, nous avons cru apercevoir au contraire mille et mille plans de conscience différents, mille répétitions intégrales et pourtant diverses de la totalité de notre expérience vécue.
Il est vrai que sous l’Empire, au moment même où s’élabore la notion d’un Droit égal pour tous, nous apercevons d’abord les efforts de l’État pour restreindre le nombre des associations partielles. […] « Sous l’action combinée de la jurisprudence et des lois récentes, la concession de la personnalité civile s’étend peu à peu à toutes les associations ; il sera bientôt évident que le vieux principe est usé, et qu’il faut lui substituer le principe opposé de la personnalité de plein droit162 », — Ainsi nos institutions mêmes, malgré leurs tendances premières, laissent apercevoir le progrès des forces sociales contre lesquelles elles ne peuvent lutter. […] Par la complication sociale, « l’individu passe au premier plan de la scène, tandis que les anciennes personnes morales dont il était englobé naguère se dissipent comme des ombres derrière cette unique figure en vif relief. » Comment, d’ailleurs, la complication sociale combat directement cette notion de classe, ennemie née de l’égalitarisme, c’est chose aisée à apercevoir.
Il y connut la jeune créole qu’il a célébrée sous le nom d’Éléonore ; il commença par lui donner des leçons de musique ; mais le professeur amateur devint vite autre chose pour son Héloïse ; les obstacles ne s’aperçurent que trop tard, après la faute, après l’imprudence commise ; l’heure de la séparation sonna ; il y eut ensuite un retour, suivi bientôt de refroidissement, d’inconstance. […] à un certain moment, si vous la lisez avec attention, un étrange sentiment se laisse apercevoir : Elle me confondait avec sa propre vie, Voyait tout dans mon âme ; et je faisais partie De ce monde enchanté qui flottait sous ses yeux… Avant moi cette vie était sans souvenir… Et la comparaison développée du beau cygne qui trouble une onde pure dans un bassin, ne voyez-vous pas comme il la caresse ?
Mais le génie, en tout, a devancé la méthode ; il a eu des aperçus, des lueurs perçantes : le hasard a présidé aux plus beaux ouvrages. […] On vit dans un temps où les journaux sont tout et où seuls, presque seuls, ils rétribuent convenablement leur homme : on est journaliste ; on l’est, fut-on romancier, car c’est en feuilletons que paraissent vos livres même, et l’on s’en aperçoit ; ils se ressentent à tout moment des coupures, des attentes et des suspensions d’intérêt du feuilleton ; ils en portent la marque et le pli.
C’est un cerveau très affiné, un cerveau supérieur depuis qu’il est malade. » Et Xaxier Aubryet, en temps ordinaire strictement homme d’esprit42, atteignait au plus terrible pittoresque dès qu’il peignait ses douleurs : « Je deviens aveugle, disait-il, de jour en jour, je descends dans l’ombre ; j’ai vu, tour à tour, disparaître les barreaux de ma fenêtre puis la vitre elle-même ; et maintenant je n’aperçois plus qu’une tache de lumière lorsqu’elle m’arrive à bout portant ! […] Pierret tentait d’illuminer la vieille trame romanesque des aperçus si ingénieux cités plus haut, et, textuellement, intercalait des courbes d’exacerbation amoureuse.
En examinant les trois différentes époques de la littérature des Grecs, on y aperçoit très distinctement la marche naturelle de l’esprit humain. […] La privation absolue d’une telle affection se fait apercevoir, non seulement dans la peinture de l’amour, mais dans tout ce qui tient à la délicatesse du cœur.
Une grosse toile vulgaire, uniforme, sur laquelle de loin en loin on aperçoit une belle fleur délicatement peinte, voilà l’image de notre condition ; celui-là seul est à envier qui peut montrer sur sa trame beaucoup de fleurs pareilles. […] En ce moment, on n’aperçoit plus sa basse condition, ses moeurs irrégulières ; bien des gens ne changeraient pas son coeur ni sa vie contre le coeur ou la vie du grand roi.
Ils y saisiront surtout avec plus de facilité le rapport du livre et de la vie, l’étroite liaison de l’idée et de la réalité : ils sentiront que ce ne sont point des fantaisies en l’air dont on les entretient ; ils apercevront dans ces mots, ces éternels mots, dont tant de siècles ont fatigué leurs oreilles, toute la vie de l’humanité et leur propre vie. […] Ce mélange continuel de vérité et d’erreur, cette délicatesse de vue brouillée à chaque instant par le parti pris, vous contraindront à une réflexion attentive : il faut prendre le morceau phrase par phrase pour démêler cet écheveau de vérités entrevues et d’erreurs systématiques ; il faut regarder de près les jointures des idées pour apercevoir par quelle fausse liaison l’injustice et l’inexactitude s’insinuent dans cet assemblage si logique et si serré.
Taine, à l’analyse, n’aperçoit plus, dans l’univers moral et physique, que des sensations et des mouvements : chaque être est « une ligne d’événements dont rien ne dure que la forme » ; selon notre perception des choses, « un écoulement universel, une succession intarissable de météores qui ne flamboient que pour s’éteindre et se rallumer et s’éteindre encore sans trêve ni fin, tels sont les caractères du monde », et la nature est « comme une grande aurore boréale863 ». […] Mais il aperçoit surtout ce qui les distingue, la singularité personnelle de leur œuvre.
C’est une détestable poésie, inane, sans souffle intérieur ; ces phrases-là n’ont ni muscles ni sang, et quel singulier aperçu de l’existence humaine ! […] Il en écoutait l’harmonie qui, volontiers, lui paraissait divine ; il en notait les avis, sans efforts, tantôt comme « le roseau qui soupire », tantôt comme le chêne qui crie dans la tempête, allant du doute à la foi, de la mélancolie à la joie, ballotté entre tous les extrêmes, sans seulement s’en apercevoir.
On y apercevrait aujourd’hui des intentions satiriques passablement audacieuses. […] Il y trouva le valet de chambre, qui se montra encore plus inflexible que les deux autres, et ne se relâcha que difficilement à la promesse du troisième tiers ; de sorte qu’il ne resta plus rien au pauvre Mezzetin qui, dès qu’il aperçut le duc, courut à lui et lui dit : « — Ah !
Tantôt ses traits sont si délicats, ses yeux noirs ont un regard si candide et si pénétrant ; sa peau transparente laisse tellement apercevoir sous son tissu un peu pâle le bleu des veines et la mobile rougeur de ses moindres émotions ; ses cheveux très noirs, mais très fins, tombent avec tant d’ondoiements et des courbes si soyeuses le long de ses joues jusque sur ses épaules, qu’il est impossible de dire si elle a dix-huit ou trente ans. […] M. de Lamartine, sans s’en apercevoir, a pris également l’habitude de couper sa pensée, sa phrase par trois membres, de procéder trois par trois.
on peut affirmer que les pauvretés d’opinion et les superficialités d’aperçu ne manquent pas à cet homme de l’esprit le plus retors depuis Voltaire et qui a vu Napoléon ! […] On le voit, nous ne transigeons pas sur les nombreux défauts de fond et de forme qu’une étude sévère nous a fait apercevoir dans les œuvres d’un homme qui, littérairement, pour se faire remarquer, aurait mangé des araignées comme l’athée Lalande et, religieusement, qui niait Dieu comme lui.
Madame Récamier, la modeste Madame Récamier, qui n’eut jamais rien de superbe, même dans sa beauté, forme le contraste le plus hardi, le plus étonnant et le plus facile à apercevoir avec les mœurs, les attitudes et les passions de son époque. […] », qui n’est, après tout, qu’un mot gai, il n’y a pas un seul trait qu’on puisse retenir, et pourtant cette haute société, dont l’âme peut être usée, se venge à vivre sur la plaisanterie et sur la finesse d’aperçu.
Quand un homme, en effet, arrivé à peu près à la moitié du xixe siècle, jure par Cabanis en philosophie, en législation par Destutt de Tracy, et par Bentham en économie sociale ; quand cet homme, de l’esprit le plus mystificateur, semble se mystifier lui-même, en admirant politiquement M. de La Fayette, et ne se moque nullement de nous en nous disant que l’Amérique serait assurément un grand pays, si elle avait un Opéra, certes, on peut affirmer que les pauvretés d’opinion et les superficialités d’aperçu ne manquent pas à cet homme, de l’esprit le plus retors depuis Voltaire, et qui a vu Napoléon ! […] On le voit, nous ne transigeons pas sur les nombreux défauts de fond et de forme qu’une étude sévère nous a fait apercevoir dans les œuvres d’un homme qui, littérairement, pour se faire remarquer, aurait mangé des araignées, comme l’athée Lalande, et religieusement, qui niait Dieu comme lui.
Parmi le nombre infini de « documents humains » offerts par la nature à leurs investigations, les naturalistes 5 s’aperçurent bientôt que tous n’avaient pas une égale signification ni valeur expressive ; qu’il en existait une catégorie particulièrement féconde, les documents pathologiques, et s’y complurent.
Écoutez un moment cette conversation de tant d’éclat et de vivacité, abondant en traits et en aperçus, en images neuves et toujours merveilleusement appropriées ; où l’emphase et la familiarité, la subtilité et la violence se mêlent et s’entrelacent si originalement.
(À part, badins) : L’espiègle enfant en son tiroir Dissimule un polichinelle… Affectons de ne point nous en apercevoir.
Que vous vous développiez probe écrivain ou mauvais gâcheur, qui donc s’en apercevra ?
Non, je veux seulement donner un aperçu des conditions que l’édifice doit remplir et partant des grandes lignes qu’il aura nécessairement.
La politique et les choses de la terre ne lui sont point inconnues ; mais ces choses, qui faisaient les premiers motifs de l’éloquence antique, ne sont pour elle que des raisons secondaires ; elle les voit des hauteurs où elle domine, comme un aigle aperçoit, du sommet de la montagne, les objets abaissés de la plaine.
Psyche n’est point cette femme qui vient en tremblant sur la pointe du pied ; je n’aperçois point sur son visage ce mélange de crainte, de surprise d’amour, de désir et d’admiration qui devrait y être.
Tout à coup il aperçut l’étranger qui, de nouveau, venait à lui : « Vite !
Tantôt l’élévation des aperçus empêche le critique d’être biographe exact ; tantôt les efforts du biographe pour être précis et fidèle empêchent le critique d’être élevé. […] Molière passe, il aperçoit le rassemblement, s’approche et vient écouter et étudier les orateurs. […] Une de ces paysannes s’en aperçut, quitta ses compagnes et vint couvrir de la rotondité de ses jupes l’objet qu’elle voulait dérober. […] Bientôt après il s’aperçut que le mendiant suivait, en courant, la voilure et faisait tous ses efforts pour la rejoindre. […] Il ne s’aperçut de sa distraction qu’en entendant les éclats de rire de celui au secours duquel il était venu pour abréger la durée du voyage.
L’infini, que nous pouvons rêver, mais que nos yeux ne peuvent apercevoir, perd bientôt son prix, et nous rebute, comme une idée vulgaire, dès qu’on veut nous en parler à chaque page. […] Quelle armée assez téméraire, assez folle, pour s’aventurer dans ces gorges dont l’œil n’aperçoit pas le fond ? […] J’indique franchement ce que j’aperçois de poétique dans la vie de Toussaint Louverture, ce qui me semble convenir au théâtre. […] L’âme heureuse ou affligée, fière ou abattue, n’aperçoit pas l’idée divine sous le même aspect, et cela suffit pour faire de l’idée divine le thème de chants très différents. […] Il y a en Bretagne et en Auvergne des églises de lave et de granit, mais personne, que je sache, n’a jamais aperçu le granit de Notre-Dame.
Trépidans a de la sensibilité, de l’instruction, du sens : mais quelle crainte qu’on ne s’en aperçoive pas assez tôt ! […] Puis j’ai cru m’apercevoir qu’il ne s’agissait que de ses armes en peinture, de ses armoiries ; et alors c’est de la franche sottise, même à un poète, que de venir ainsi étaler son blason, — un blason tout fraîchement repeint. […] ) — Il s’aperçut alors de cette application manifeste et entra à l’instant dans un silence triste, grave et prolongé, que partagèrent tous les assistants. […] M. de Vaines si spirituel s’est tué pour elle ; il avait 76 ans environ ; amoureux et apparemment aimé, il s’aperçut qu’il n’était plus capable d’être heureux. […] Il ne s’aperçoit pas que cette brutalité et ce bavardage qu’il accorde à son poète sont des sottises ; Homère est naturel et n’est pas brutal, et c’est le critique qui l’est et qui manque à la délicatesse en employant un tel mot.
A travers le Primoli s’apercevait le Bonaparte. […] Ce qui me frappa tout d’abord en lui, ce fut un bouquet de fleurs qu’il tenait à la main, et ensuite le singulier gilet que laissait apercevoir son veston entr’ouvert. […] Cette admiration, ils la méritaient, ces contes, car ils étaient de Villiers de l’Isle-Adam, comme s’en aperçut plus tard Paul Adam. […] Alors on apercevait son visage, allongé encore par une barbe fine, ce visage aux traits réguliers qui lui donnait une vague ressemblance avec Alfred de Musset. […] A peine fut-elle achevée que je m’aperçus de l’avantage qu’il y a, même quand on n’improvise pas, à être un orateur.
Paul Verlaine ne considère plus la vie sous le même angle où il l’apercevait autrefois. […] Il aperçoit les détails, plutôt qu’il ne distingue l’ensemble. […] Tout cela fut fait en un instant, et si adroitement que ni Michonis, ni la femme de chambre, ni les gendarmes ne s’aperçurent de rien. […] Et enfin, après mille recherches, mille angoisses que j’abrège, il aperçoit, ô délices ! […] De temps à autre, ils aperçoivent au coin d’un bois quelques casques de uhlans qui, soudain, s’évanouissent.
Celui qui, par inquiétude de conscience, s’occupe à démêler les motifs bons ou mauvais de ses actions apparentes, qui aperçoit les vices et les vertus à leur naissance, qui suit le progrès insensible des pensées coupables et l’affermissement secret des résolutions honnêtes, qui peut marquer la force, l’espèce et le moment des tentations et des résistances, tient sous sa main presque toutes les cordes humaines, et n’a qu’à les faire vibrer avec ordre pour en tirer les plus puissants accords. […] Voilà le domaine de Fielding ; son art et son plaisir, comme celui de Molière, consistent à lever un coin du manteau ; ses personnages paradent d’un air raisonnable, et tout d’un coup, par une ouverture, le lecteur aperçoit le fourmillement intérieur des vanités, des folies, des concupiscences et des rancunes secrètes qui les font marcher. […] Il aperçoit l’infiniment petit et décrit l’imperceptible. […] Voilà certes un talent étrange, composé d’aveuglement et de clairvoyance, et qui ressemble à ces maladies de la rétine dans lesquelles le nerf surexcité devient à la fois obtus et perspicace, incapable d’apercevoir ce que les yeux les plus ordinaires atteignent, capable d’apercevoir ce que les yeux les plus perçants ne saisissent pas. […] Ce dada, à son gré, est comme une verrue, d’abord si petite qu’on l’aperçoit à peine, et seulement lorsqu’elle est sous un bon jour ; mais la voilà qui peu à peu grossit, se couvre de poils, rougit et bourgeonne tout alentour ; son propriétaire, qui en jouit et l’admire, la nourrit, jusqu’à ce qu’enfin elle se change en loupe énorme, et que le visage entier disparaisse sous l’excroissance parasite qui l’envahit.
À travers une porte, j’aperçois une cour silencieuse et verdie par l’humidité. […] Suivre comme un insensé la voiture où l’on a cru l’apercevoir ! […] Boulanger aimait à s’illusionner et semblait ne pas s’apercevoir de cet état maladif. […] À notre feu de bivouac j’aperçois Marbot mangeant des pommes de terre qu’il faisait cuire sous la cendre. […] Au premier aperçu, ils dirent : “Il faut faire l’amputation du bras.”
Nous l’apercevons chez le riche voisin. […] On s’apercevra que Goethe a été un homme comme nous ; qu’il a comme nous aimé ; qu’il a souffert autant et plus que beaucoup d’autres. […] Schmidt en deux pages ; et ces deux pages ne disent rien, quoiqu’on s’aperçoive très bien que l’auteur aurait eu beaucoup à dire. […] Le monde indifférent peut passer à côté de ses vertus sans les apercevoir ; le siècle peut ne lui laisser que dégoûts et amertumes. […] Je vous avais aperçu derrière le bouquet d’arbres ; je puis vous le dire maintenant, et je pensais en moi-même : « Le beau jeune homme !
La ville où l’on séjourne a beau être embrouillée, inégale, tortueuse, sans ordre et sans plan, pleine de carrefours, de tréteaux de charlatans, de passages et de ruelles, de monuments inachevés dont le pierres encombrent les places, d’arcs de triomphe sans chars ni statues de vainqueurs, de clochers et de coupoles sans croix : quand le soleil est couché, quand, du haut des collines prochaines, le voyageur qui n’est pas entré dans cette ville, et qui n’y a pas vécu, l’aperçoit à l’horizon dessinant sa silhouette déjà sombre sur le ciel encore rougi du couchant, il la voit toute différente ; il y distingue des étages naturels, des accidents dominants, des masses imposantes et combinées ; les édifices, que la distance et l’obscurité achèvent et idéalisent à ses yeux, lui apparaissent selon des hauteurs bien diverses.
Il n’est pas mal assurément, messieurs, que dès que quelqu’un se croit victime d’une injustice ou croit apercevoir un abus, il s’écrie : « J’en appellerai au Sénat. » Le Sénat ne saurait décourager un sentiment si honorable de confiance en sa justice.
Je m’en aperçus en lisant.
Vacquerie, ne s’aperçut pas tout de suite que cet amour pour lui n’était que de la haine pour Victor Hugo : …… Un jour n’étant pas bête, Il le vit, et le dit tout haut, étant honnête.