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702. (1895) Les œuvres et les hommes. Journalistes et polémistes, chroniqueurs et pamphlétaires. XV « Philarète Chasles » pp. 147-177

« L’époque où la foi et l’amour se fondront sur l’examen est encore éloignée, — dit-il. — Mais on y viendra. » C’est avec ces bourdes qu’il s’est tricoté le gilet de flanelle de sa vieillesse, ce dandy — car il l’était !  […] Il a eu cette bienfaisance, tant il se fond d’amour, tout à l’heure, pour l’humanité, ce diable de Chasles ! Jusqu’ici, l’amour attendri pour les hommes n’était pas le caractère des soixante volumes sortis de sa plume, de cette plume féconde, positive et brillante, qui s’attendrissait à peu près comme le diamant s’attendrit quand il brille ; mais c’est là le caractère inattendu de cette Psychologie sociale, qui doit sauver l’Europe et le monde par l’amour. […] quaker sans être chrétien, sans être le chrétien armé de la croix qui est le seul être ayant le droit de prêcher l’amour aux hommes et la puissance de s’en faire écouter, — Philarète Chasles, qui n’est point saint Paul, qui n’est pas saint Jean, pour nous répéter de nous aimer les uns les autres, mais un professeur de morale indépendante et d’instruction obligatoire attendri, ne voit plus la beauté, — cette entité par elle-même !  […] Il manque donc à Balzac, conclut Chasles, comme à Alexandre Dumas, comme à Süe, la charité, la bonté, l’amour, et c’est pourquoi Balzac — tant pis pour lui ! 

703. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — P — Pigeon, Amédée (1851-1905) »

Pigeon, Amédée (1851-1905) [Bibliographie] Les Deux Amours (1876). — L’Allemagne de M. de Bismarck (1885). — La Confession de Mme de Weyre (1886). — Une femme jalouse (1888). — Un ami du peuple (1896). […] Jules Tellier Le livre, à la fois très pur et très maladif (Les Deux Amours) où M. 

704. (1887) Journal des Goncourt. Tome I (1851-1861) « Année 1857 » pp. 163-222

La fille de l’heure présente n’est plus même cette lorette de Gavarni qui avait gardé au fond d’elle un petit rien de grisette, et consacrait un peu de son temps à amuser son cœur… Du reste, le bas monde de l’amour ne fait que refléter le haut monde de l’amour, ce monde où les femmes de la société commencent à prendre l’habitude de se faire entretenir. […] La femme qu’il aimait lui a écrit que, fatiguée des tyrannies de son amour, son amour à elle était mort, bien mort, et pour lui ôter tout espoir de raccommodement, elle lui a fait entendre qu’elle a pris un autre amant. […] Le tout est de savoir, si un homme qui meurt de male amour ou de male ambition, souffre plus qu’un homme qui meurt de faim. […] Elle la prédispose à l’amour idéal, et à toutes les choses romanesques et élancées de la passion, qu’elle n’est pas destinée à trouver dans son mari. […] ce qu’il a mangé, celui-là, en bêtes de somme… et en bêtes d’amour !

705. (1862) Portraits littéraires. Tome II (nouv. éd.) « Molière »

Le prince, enchanté, voulut se l’attacher comme secrétaire et le faire succéder au poëte Sarasin qui venait de mourir ; Molière refusa par attachement pour sa troupe, par amour de son métier et de la vie indépendante. […] Tout parle dans l’amour, et sur cette matière Le moindre jour doit être une grande lumière. […] Tout meurtri de sa disgrâce, notre poète se remit à aimer mademoiselle de Brie, ou plutôt il venait s’entretenir près d’elle des injures de l’autre amour ; Alceste est ramené à Éliante par les rebuts de Célimène. […] Oui, lui répondit Chapelle, je l’ai été comme un homme de bon sens doit l’être ; mais je ne me serois jamais fait une si grande peine pour une chose que mon honneur m’auroit conseillé de faire, et je rougis pour vous de vous trouver si incertain. — Je vois bien que vous n’avez encore rien aimé, répondit Molière, et vous avez pris la figure de l’amour pour l’amour même. […] Vous me direz sans doute qu’il faut être poëte pour aimer de cette manière ; mais, pour moi, je crois qu’il n’y a qu’une sorte d’amour, et que les gens qui n’ont point senti de semblables délicatesses n’ont jamais aimé véritablement.

706. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Maucroix, l’ami de La Fontaine. Ses Œuvres diverses publiées par M. Louis Paris. » pp. 217-234

Aussi son amour et sa douleur, dans les élégies qu’il composa d’abord, prennent-ils un caractère de regret, de résignation et de sacrifice auquel nos bons aïeux ne nous ont pas accoutumés, et qui ne sera guère dans l’habitude de Maucroix lui-même. […] Jaloux, de mon bonheur si bien persuadés, Voyez si vos soupçons ne sont pas mal fondés, Si l’on peut m’accuser de la moindre licence, Et si jamais Amour fut si plein d’innocence. […] Je ne me charge pas de répéter ici l’historiette de cet amour de Maucroix, raconté au long par Tallemant jusque dans ses circonstances les plus naïves. […] Il a été plus de quatre ans à s’en consoler, et il n’y a eu qu’une nouvelle amour qui l’ait pu guérir… La preuve n’est pas la plus forte qu’on puisse alléguer en fait de fidélité, mais il faut prendre ces natures naïves et de la famille de La Fontaine comme elles sont. Après des années, un jour qu’il était accusé d’être volage et peu profond dans ses sentiments, Maucroix en convient d’assez bonne grâce : À propos, écrivait-il à une femme d’esprit qui l’attaquait là-dessus, vous me reprochez que bien souvent ç’ont été les sens qui ont emporté mon cœur ; pour cette fois-là (Il parle d’une liaison nouvelle), vous ne devinez pas trop mal, ma chère ; quand il y a un peu d’amour en campagne, cela arrive assez souvent : car, quoi !

707. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « Préface pour les Maximes de La Rochefoucauld, (Édition elzévirienne de P. Jannet) 1853. » pp. 404-421

Né en 1613, entré dans le monde à seize ans, toute sa première jeunesse se passe sous Louis XIII ; c’est là qu’il est chevaleresque et romanesque, c’est là qu’il est dévoué, c’est là que son ambition première et généreuse se déguise à elle-même en pur amour, en sacrifice pour la reine persécutée, et se prodigue en mille beaux actes imprudents que Richelieu sut rabattre sans les trop punir. […] Son amour pour Mme de Longueville n’est plus un amour de jeunesse, c’est une intrigue de politique autant et plus qu’un intérêt de cœur. […] Venir après deux siècles s’interposer entre une maîtresse aussi subtile et aussi coquette d’esprit, aussi versatile de cœur que la sœur des Condé et des Conti, et un amant aussi fin, aussi délié, aussi roué si l’on veut, que M. de La Rochefoucauld ; prétendre sérieusement faire entre les deux la part exacte des raisons ou des torts ; déclarer que tout le mal est uniquement d’un côté, et que de l’autre sont toutes les excuses ; poser en ces termes la question et s’imaginer de bonne foi qu’on l’a résolue, c’est montrer par cela même qu’on porte en ces matières la ferveur d’un néophyte, qu’on est un casuiste de Sorbonne ou de cour d’amour peut-être, mais un moraliste très peu. […] Celui-ci eut des torts, cela nous suffit ; il en eut en amour et en politique ; il manqua cette partie importante de sa vie, et, quand même la Fronde aurait obtenu quelque succès et aurait amené quelque résultat, il n’aurait encore donné de lui que l’idée d’un personnage brillant, mais équivoque et secondaire, dont la pensée, les vues et la capacité ne se seraient point dégagées aux yeux de tous. […] Mais, sous cette forme où il la présente, à l’usage d’une société élégante et d’une civilisation consommée, que de vérités sur les passions, sur l’amour, sur les femmes, sur les différents âges, sur la mort !

708. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Le Palais Mazarin, par M. le comte de Laborde, de l’Institut. » pp. 247-265

Si on me demande comment l’aima la reine et de quelle nature fut son affection, je répondrai qu’il reste quelque doute à cet égard ; non pas sur la question de l’amour, ce fut bien de l’amour assurément, amour réel de sa part à elle, amour plus ou moins simulé de la part de Mazarin, et tant qu’il eut besoin d’un appui. Les lettres qu’on a de lui à la reine ne laissent aucun doute sur la vivacité des démonstrations passionnées qu’il se permettait ou peut-être qu’il se commandait en lui écrivant ; mais il paraîtrait, si l’on s’en rapportait au témoignage de Brienne et de sa vertueuse mère, que cet amour se contint d’ailleurs en des termes assez platoniques, que l’esprit de la reine s’avouait surtout charmé de la beauté de l’esprit du cardinal, et que c’était un amour enfin dont on pouvait parler à une confidente jusque dans l’oratoire et sur les reliques des saints, sans trop avoir à en rougir et à s’en accuser.

709. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Regnard. » pp. 1-19

Elle voit Zelmis, et, dès le premier instant, elle est touchée pour lui, comme lui pour elle : « Elle disait les choses avec un accent si tendre et un air si aisé, qu’il semblait toujours qu’elle demandât le cœur, quelque indifférente chose qu’elle pût dire ; cela acheva de perdre le cavalier. » Cette jolie phrase : Il semblait toujours qu’elle demandât le cœur, est prise textuellement d’un petit libelle romanesque du temps sur les amours de Madame et du comte de Guiche. […] Pourtant il lui en restera le sentiment vif de l’amour, de ses charmes et de ses tendresses, et, jusqu’en ses plus grandes gaietés, il aura de ces vers tout riants de fraîcheur : La jeunesse toujours eut des droits sur les belles ; L’Amour est un enfant qui badine avec elles… Regnard n’a que vingt-six ans. […] Dans Le Joueur, le caractère principal a beaucoup de vérité : cet homme, qui a joué, qui joue et qui jouera, qui, toutes les fois qu’il perd, sent revenir sur l’eau son amour, mais qui, au moindre retour de fortune, lui refait banqueroute de plus belle, cet homme est incurable ; il a beau s’écrier dans sa détresse : Ah ! […] Mais une femme me fait remarquer qu’à ce dénouement du Joueur, lorsque Angélique a trouvé son portrait aux mains de la revendeuse, il y a quelque chose dans son âme qui domine à bon droit l’amour, c’est l’amour-propre. […] On n’analyse pas les causes du rire, et il en est de lui comme de l’amour : le meilleur est encore celui dont on ne peut dire la cause.

710. (1885) Les œuvres et les hommes. Les critiques, ou les juges jugés. VI. « Philarète Chasles » pp. 111-136

Il avait la chaleur, l’enthousiasme, la poitrine, l’amour sacré de la chose littéraire, que Sainte-Beuve, ce froid serpent, n’avait pas. […] Je sais où sont ses préférences, ses passions, ses amours intellectuels, mais ses convictions ? […] Si cette passion finit par s’exprimer comme la haine, en ses derniers jours, c’est que la haine n’était que la fureur de l’amour de toute sa vie méprisé. […] Le lion s’est laissé rogner les ongles, par son amour de l’Angleterre, dans cette suite d’articles de revue ou de journal, réunis sous un titre commun après avoir été écrits et dispersés à des dates différentes. […] Il en connaissait les indigences… Ce sont de vagues discussions sur la presse, inspirées par l’amour de la liberté, qu’il avait, ce protestant de Chasles !

711. (1868) Curiosités esthétiques « II. Salon de 1846 » pp. 77-198

L’amour de l’air, le choix des sujets à mouvement, veulent l’usage des lignes flottantes et noyées. […] Ce paysage circulaire, qui embrasse un espace énorme, est peint avec l’aplomb d’un peintre d’histoire, et la finesse et l’amour d’un paysagiste. […] Et toutes ces corporations réunies devant un Horace Vernet par l’amour commun de la gloire ! […] Quelque habile que soit un éclectique, c’est un homme faible ; car c’est un homme sans amour. […] Voici encore quelques exemples de tableaux de sentiment : l’Amour à la campagne, bonheur, calme, repos, et l’Amour à la ville, cris, désordre, chaises et livres renversés : c’est une métaphysique à la portée des simples.

712. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — L — Lavergne, Antonin (1863-1941) »

Lavergne, Antonin (1863-1941) [Bibliographie] Les Paroles d’amour, avec préface de Frédéric Bataille (1893). […] Émile Faguet Les Paroles d’amour, de M. 

713. (1873) Molière, sa vie et ses œuvres pp. 1-196

Molière avait passé des amusements que l’on se fait avec un enfant à l’amour le plus violent qu’une maîtresse puisse inspirer. […] L’amour dont il brûlait pour l’indigne Béjart, c’est l’amour du misanthrope pour Célimène. […] Sganarelle dans L’Amour médecin. […] Dom Pèdre dans Le Sicilien, ou l’Amour peintre. […] Le beau petit baron, comme on disait, avait aussi représenté l’Amour dans Psyché.

714. (1927) Les écrivains. Deuxième série (1895-1910)

Il ne sait pas lequel est en lui du meurtre ou de l’amour. Il va le savoir ; il va bientôt connaître que le meurtre et l’amour ce sont deux instincts pareils. […] … De la fantaisie, du lyrisme et de l’amour, comme dans Banville ! […] … Rêves de gloire, de fortune, d’amour ! […] C’est une œuvre d’amour et de pacification… Et elle rayonne de lumière.

715. (1910) Rousseau contre Molière

Eliante aime Alceste d’amour ; elle aime Philinte d’amitié, Philinte aime Eliante d’amitié amoureuse. […] Je mets de côté absolument, parce que ce n’est qu’une hypothèse invérifiable, l’opinion que, par les amours de Jupiter et d’AIcmène, Molière a figuré les amours adultères de Louis XIV et a voulu les excuser. […] Cela est si vrai qu’au passage même où il proclame l’amour du beau moral comme éternel dans le cœur de l’homme (« l’amour du beau est un sentiment aussi naturel au cœur humain que l’amour de soi-même… », à ce passage même, il ajoute une note qui est celle-ci : « C’est du beau moral qu’il est ici question. […] Ne sachant plus nourrir la force du comique et des caractères, on a renforcé l’intérêt de l’amour. […] Ce n’est pas ici la loi de l’amour, j’en conviens, mais c’est celle de la nature, antérieure à l’amour même ».

716. (1874) Histoire du romantisme pp. -399

Jules Vabre aimait Shakespeare, mais d’un amour excessif, même dans un cénacle romantique. […] Quel chaste amour ! […] comme elle manégeait maternellement les deux babies, purs intermédiaires d’un amour inavoué ! […] et comme dans cet amour éperdu, à travers cet enivrement coupable, elle restait encore honnête femme et dame ! […] Jamais compositeur n’eut pour son art un amour plus furibond et plus enthousiaste ; nul ne se ménageait moins.

717. (1897) La vie et les livres. Quatrième série pp. 3-401

Attendons, pour flétrir l’amour et pour maudire la femme, de savoir si ce que nous avons appelé la femme et l’amour n’en étaient pas précisément le fantôme et la parodie. […] L’amour est plus fort que la vie. […] Les excès du féminisme systématique finiront par supprimer l’amour. […] L’Amour, plus expérimenté, se tourna vers d’autres misères. […] Cet Amour doit détruire autant que fonder.

718. (1769) Les deux âges du goût et du génie français sous Louis XIV et sous Louis XV pp. -532

Auguste, son successeur, eut le même amour pour elles, & leur prêta le même appui. […] L’Amour & le guide & l’éclaire. […] L’amour le rendit Peintre. […] & que son amour est bien exprimé ! […] Apollon placera l’un dans sa galerie ; l’Amour gardera soigneusement l’autre dans son cabinet.

719. (1858) Du vrai, du beau et du bien (7e éd.) pp. -492

Au premier rayon de la lampe fatale, l’amour s’éveille et s’envole. […] Voilà le sublime de l’amour, voilà l’amour digne d’une noble et généreuse créature, et non pas l’amour ignorant et aveugle. […] L’amour tend à s’unir à son objet : le mysticisme l’y absorbe. […] Cette unité vide sera-t-elle l’objet de l’amour ? […] Comment lui attribuerait-elle la justice et l’amour, j’entends l’amour désintéressé, dont elle n’a pas la moindre idée ?

720. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — V — Villiers de L'Isle-Adam, Auguste de (1838-1889) »

. — L’Amour suprême (1886). — L’Ève future (1886). — Tribulat Bonhomet (1887) […] Tu pars, âme chrétienne, on m’a dit résignée, Parce que tu savais que ton Dieu préparait Une fête enfin claire à ton cœur sans secret, Une amour toute flamme à ton amour ignée.

721. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XXXIV » pp. 394-401

L’on qui suit regarde le roi : « On (le roi) joue fort gaîment, quoique la belle garde sa chambre. » Le 30 septembre, madame de Sévigné écrit à sa fille : « Tout le monde croit que l’ami (le roi) n’a plus d’amour, et que Quanto (madame de Montespan) est embarrassée entre les conséquences qui suivraient le retour des faveurs, et le danger de n’en plus faire, crainte qu’on n’en cherche ailleurs. […] Je prends trop sur moi pour que l’esprit et le corps n’y succombent pas, peut-être tous les deux. » Vous avez l’explication de cette mélancolie dans un mouvement de jalousie dont ne se défend pas l’amour le plus chaste. Les présents que madame de Montespan faisait trouver chaque jour à Maintenon, prouvaient un retour de sécurité sur l’amour dont le roi lui redonnait des marques.

722. (1893) La psychologie des idées-forces « Tome second — Livre cinquième. Principales idées-forces, leur genèse et leur influence — Chapitre septième. Les sentiments attachés aux idées. Leurs rapports avec l’appétition et la motion »

Notre amour de la vérité est un amour de notre moi pensant et voulant. L’idée de l’universel, la plus haute de toutes, puise sa force dans notre amour même de notre individualité en tant qu’intelligente ou, comme on dit, raisonnable.

723. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Première partie — Section 20, de quelques circonstances qu’il faut observer en traitant des sujets tragiques » pp. 147-156

Or les foiblesses de l’amour déparent beaucoup de caracteres heroïques qui nous inspireroient de la veneration, s’ils n’étoient point avilis par ces foiblesses. La même raison qui doit obliger les poëtes à ne pas laisser prendre à l’amour un trop grand empire sur leurs heros, doit les engager aussi à choisir leurs heros dans des tems éloignez d’une certaine distance du nôtre. […] Cependant les regles de notre théatre et les usages de notre scene tragique, qui veulent que les femmes aïent toujours beaucoup de part dans l’intrigue, et que l’amour y soit traité suivant nos manieres, empêchent que nous ne puissions nous conformer aux moeurs et aux coûtumes des nations étrangeres.

724. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — B — Buffenoir, Hippolyte (1847-1928) »

. — Cris d’amour et d’orgueil (1887). — Pour la gloire (1892). […] Maxime Gaucher Le poète de Cris d’amour admire les grands lutteurs qui ne se sont pas laissés terrasser dans le combat de la vie.

725. (1834) Des destinées de la poésie pp. 4-75

C’était de l’amour et de la religion, des pressentiments de la vie future délicieux et tristes comme elle, des extases et des découragemens, des horizons de lumière et des abîmes de ténèbres, de la joie et des larmes, de l’avenir et du désespoir ! […] que de secrets de l’amour et de la douleur ! […] et j’en appelle à ce siècle naissant qui déborde de tout ce qui est la poésie même, amour, religion, liberté, et je me demande s’il y eut jamais dans les époques littéraires un moment si remarquable en talents éclos, et en promesses qui écloront à leur tour ? […] C’est à populariser des vérités, de l’amour, de la raison, des sentiments exaltés de religion et d’enthousiasme, que ces génies populaires doivent consacrer leur puissance à l’avenir. […] Elles auront été le soupir modulé de mon âme en traversant cette vallée d’exil et de larmes, ma prière chantée au grand être ; et aussi quelquefois l’hymne de mon enthousiasme, de mon amitié ou de mon amour pour ce que j’ai vu, connu, admiré ou aimé de bon et de beau parmi les hommes.

726. (1908) Dix années de roman français. Revue des deux mondes pp. 159-190

C’est aussi l’amour de la France qui leur a donné l’inébranlable conviction d’un relèvement futur. […] Cette opposition est tragique lorsque les époux sont dans le divorce, qu’ils n’ont pas cessé de se chérir, et que le réveil de la foi chez l’un d’eux lui donne le remords quotidien de cet amour sans le détruire. […] L’amour entravé par les prescriptions morales éternelles, ou la passion aux prises avec les difficultés de l’existence matérielle si fréquemment hostile aux vœux du cœur, tel est le grand élément sentimental de son œuvre. […] Bientôt, en dépit de la Leçon d’amour dans un parc, — essai de roman leste assez longuet, — M.  […] L’émouvante tristesse de l’amour, les souffrances de la passion dans ses égarements, voilà ce qu’elle traduit le plus volontiers avec une harmonie pessimiste un peu obscure et dépourvue, elle aussi, de tout procédé artificiel quelconque.

727. (1902) L’observation médicale chez les écrivains naturalistes « Chapitre III »

L’« Amour du mal », suivant la forte expression de Paulhan, se substitua peu à peu au culte rigoureux et poncif qui jusque là prônait le bien. […] Car l’amour, a très finement indiqué M. le docteur Maurice de Fleury, a toute l’allure d’une intoxication. Nous entendons parler ici de l’amour « triste, plaintif, dolent », de l’amour tel qu’il évolue chez les affinés ou exaspérés, et non du sentiment « joyeux, alerte, sain, sans remords, sans amertume », assez peu efficace et fécond, vraiment, comme matière esthétique. […] Paulhan, L’amour du mal.

728. (1796) De l’influence des passions sur le bonheur des individus et des nations « Section première. Des passions. — Chapitre III. De la vanité. »

L’amour de la gloire se fonde sur ce qu’il y a de plus élevé dans la nature de l’homme ; l’ambition tient à ce qu’il y a de plus positif dans les relations des hommes entre eux ; la vanité s’attache à ce qui n’a de valeur réelle, ni dans soi, ni dans les autres, à des avantages apparents, à des effets passagers, elle vit du rebut des deux autres passions ; quelquefois cependant elle se réunit à leur empire ; l’homme atteint aux extrêmes par sa force et sa faiblesse, mais plus habituellement la vanité l’emporte surtout dans les caractères qui l’éprouvent. […] Cette passion qui n’est grande que par la peine qu’elle cause, et ne peut, qu’à ce seul titre marcher de pair avec les autres, se développe parfaitement dans les mouvements des femmes : tout en elles, est amour ou vanité. […] La véritable valeur reste, mais l’amour est plus épris de ce qu’il donne que de ce qu’il trouve. […] Enfin, si l’éclat de la célébrité d’une femme attire des hommages sur ses pas, c’est par un sentiment peut-être étranger à l’amour ; Il en prend les formes, mais c’est comme un moyen d’avoir accès auprès de la nouvelle sorte de puissance qu’on veut flatter. […] La vanité est l’ennemie de l’ambition ; elle aime à renverser ce qu’elle ne peut obtenir ; la vanité fait naître une sorte de prétentions disséminées dans toutes les classes, dans tous les individus, qui arrête la puissance de la gloire, comme les brins de paille repoussent la mer des côtes de la Hollande : enfin, la vanité de tous sème de tels obstacles, de telles peines dans la carrière publique de chacun, qu’au bout d’un certain temps le grand inconvénient des républiques, le besoin qu’elles donnent de jouer un rôle n’existera, peut-être, plus en France : la haine, l’envie, les soupçons, tout ce qu’enfante la vanité, dégoûtera pour jamais l’ambition des places et des affaires ; on ne s’en approchera plus que par amour pour la patrie, par dévouement à l’humanité, et ces sentiments généreux et philosophiques rendent les hommes impassibles, comme les lois qu’ils sont chargé d’exécuter.

729. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — G — Gautier, Théophile (1811-1872) »

Charles Baudelaire Gautier, c’est l’amour exclusif du Beau, avec toutes ses subdivisions, exprimé dans le langage le mieux approprié… Or, par son amour du Beau, amour immense, fécond, sans cesse rajeuni (mettez, par exemple, en parallèle les derniers feuilletons sur Pétersbourg et la Néva avec Italia ou Tra les montes), Théophile Gautier est un écrivain d’un mérite à la fois nouveau et unique. […] Il a beau écrire Diamant du cœur, pour dire une larme et vouloir pétrifier tous ses pleurs pour en faire jaillir un rayon plus vif, dans son amour de l’étincelle, l’émotion est plus forte que sa volonté. […] Celui qui dort dans ce tombeau Aima d’un noble amour les vierges et les roses.

730. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — L — Lamartine, Alphonse de (1790-1869) »

C’est une sensibilité reposée, méditative, avec le goût des mouvements et des spectacles de la vie, le génie de la solitude avec l’amour des hommes, une ravissante volupté sous les dogmes de la morale universelle. […] C’était le ciel rouvert sur la poésie, la flamme rallumée sur les autels de l’Amour ; la source des larmes si longtemps glacée se remettait à jaillir. […] La pensée novice, la croyance indécise, les premières amours rencontraient, dans la vague même des douleurs chantées, la plus caressante expression de leur inquiétude confuse. […] Homère, ce qu’il exprimait sans effort, c’étaient tous les beaux sentiments tristes et doux accumulés dans l’âme humaine depuis trois mille ans : l’amour chaste et rêveur, la sympathie pour la vie universelle, un désir de communion avec la nature, l’inquiétude devant son mystère, l’espoir ou la bonté du Dieu qu’elle révèle confusément ; je ne sais quoi encore, un suave mélange de piété chrétienne, de songe […] Cette imagination des états de l’âme, si exclusivement dominatrice dans cette tête de songeur, est la cause que ces poèmes expriment non pas une âme individuelle et spéciale, mais l’Âme elle-même, la Psyché vagabonde et nostalgique et son dialogue immortel avec Dieu, avec l’Amour, avec la Nature.

731. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XXVI » pp. 279-297

Des amours du roi et de madame de Montespan, commencés, comme nous l’avons vu, en 1667, était née, en 1669, une fille, que le duc de Saint-Simon appelle madame la Duchesse, et qui ne vécut que trois ans. […] Je vois donc, de ce moment, l’amour pour le roi s’unir en elle à son autre besoin, celui de la considération : je vois ses deux idoles se confondre en une seule dans son cœur et dans son imagination : je vois ses deux affections dominantes se réduire à une seule passion, celle d’obtenir l’estime du roi et sa confiance. […] Un amour sage, élevé, éclairé, est d’une autre puissance que les amours fougueux, délirants, convulsifs ; le foyer d’une passion élevée éclaire en même temps qu’il échauffe : elle mesure sa marche sur celle des circonstances qui assurent les espérances de succès. […] Elle avait besoin de cette garantie contre le reproche de s’être dévouée à la maîtresse du roi, et d’être entrée en quelque sorte au service de ses amours.

732. (1885) Les œuvres et les hommes. Les critiques, ou les juges jugés. VI. « Jules Janin » pp. 137-154

Cuvillier-Fleury qui parle), — c’est le Roi de la phrase sonore, colorée, aérienne, — c’est le Roi de la phrase pour la phrase, du style pour le style, pour l’amour de la langue française qu’il adorait et qui le lui rendait bien, — le Roi du coloris, mettant sur des riens des touches d’Albane », eh bien, à la bonne heure ! […] Et peut-être n’eut-il pas d’amour plus grand que celui qu’il eut pour sa traduction d’Horace, si ce n’est son amour fou pour l’Académie. Ce fut là son amour de la fin. L’amour de la fin, chez les hommes, est toujours terrible.

733. (1927) André Gide pp. 8-126

En revanche, l’amour des âmes continue après la mort. Bien mieux, « tant que le corps vivra, l’amour sera contraint, mais sitôt la mort venue, l’amour triomphera de toutes les entraves ». […] La joie est brève, et l’attrait de la vie immense ne permet point de s’attarder à l’amour. […] Ce Gitanjali est une suite de petits poèmes, de lieds, tout embrasés de l’amour divin. […] Vous le savez du reste et l’avez dit : l’amour de la littérature n’a que très peu de chose à voir avec celui des livres rares.

734. (1887) Journal des Goncourt. Tome II (1862-1865) « Année 1865 » pp. 239-332

Elles tiennent étrangement du fantôme et de l’animal, — se faisant tentantes par un caractère d’apparition, par l’aspect cadavéreux, par l’enluminure macabre, enfin par un renversement de nature parlant à des appétits d’amour viciés. […] Et voilà Sainte-Beuve exposant sa théorie, qui est de ne point demander l’amour d’une femme jeune, mais la charité de cet amour, et de faire en sorte que cette femme vous tolère, ne vous prenne point en haine… « C’est là, oui, tout ce qu’on peut demander, finit-il par dire dans un soupir. […] moi, princesse, jamais un seul amour. […] Toutes les fins de repas où il y a des femmes, vont à des causeries sur le sentiment, sur l’amour. […] Edmond se voit parfaitement militaire dans un autre siècle, avec la non-déplaisance des coups et l’amour de la rêverie.

735. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — G — Gaubert, Ernest (1880-1945) »

Et je détache, avec plaisir, des Poèmes de légende et d’amour, ces quelques vers : Et notre barque, aux flots menteurs de l’Avenir, Sous le ciel fastueux connue un dais de parade, Flottera, s’attardant et lente, vers la rade Où s’égrènent les chansons grêles des cigales, Où l’ombre des palmiers frêles, sur l’eau tranquille, Tisse au soir glorieux un manteau de silence Comme un rêve d’amour épandu sur les lies, Plein d’un chant nostalgique et doux de fiancées Dont les ailes du soir ont pris la douceur blanche.

736. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — G — Ginisty, Paul (1855-1932) »

. — L’Amour à trois (1884). — Quand l’amour va, tout va, nouvelles (1885). — Le Dieu bibelot, articles (1888). — De Paris à Paris (1888). — L’Année littéraire (depuis 1885). — Crime et châtiment, drame, en collaboration avec Hugues Le Roux (1888). — De Paris au cap Nord (1892).

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