Certes un pareil conseil n’a rien de commun avec l’enseignement universitaire, car il ouvre une large voie à toutes les tentatives de l’intelligence, et les déclare d’avance légitimes, pourvu qu’elles demeurent fidèles aux lois éternelles de la beauté. […] Le poète a trouvé moyen de rajeunir l’éternelle opposition de l’espérance dans la liberté, et du désespoir dans la servitude. […] Si les passions n’étaient pas éternelles, si l’homme n’était pas amoureux du trouble et de l’inquiétude, nous dirions que Marianna est une leçon éloquente, et nous insisterions sur le mérite moral de cette œuvre, nous la recommanderions comme un excellent conseil.
Caché dans ces forêts dont l’ombre est éternelle.
À perte de vue, aux quatre coins de l’horizon, dans les prairies, sur les collines, s’étend la verdure éternelle, plantes fourragères et potagères, luzerne, houblon, admirables prairies toutes regorgeantes d’herbes hautes et serrées ; çà et là un bouquet de grands arbres ; des pâturages enclos de haies, où ruminent à genoux, paisiblement, des vaches alourdies.
Le quiétisme est une erreur de certains mystiques qui prétendent s’élever à un état de perfection indéfectible, dans lequel leur âme, unie à Dieu, ne fait plus d’actes distincts de foi ou d’amour, ne connaît plus les dogmes définis, n’emploie plus les prières formelles, ne désire plus le salut éternel, s’abandonne passivement à la volonté divine, à toutes les inspirations et suggestions de cette volonté : le pur amour des quiétistes aboutit, en théologie à l’indifférence aux dogmes, en discipline au mépris des autorités ecclésiastiques, en morale à l’abandon de tout l’esprit et de toute la chair aux suggestions de l’instinct intérieur.
Cette prédilection paraîtra même une originalité suffisante, si l’on considère que l’Art vit plus volontiers de choses éternelles ou de choses déjà passées, qu’il a souvent ignoré ce qui, à travers les âges, a successivement été « le moderne », ou que, s’il l’a connu quelquefois, il ne l’a jamais aimé avec cette passion jalouse.
Il s’agit en effet non de faire briller son esprit dans quelque matière spéculative, simplement curieuse ou d’une application éloignée, mais de faire prévaloir des vérités de foi quotidienne qu’il y a danger de mort éternelle à méconnaître.
De cruels jours pour le système nerveux des gens, et des jours éternels, que ces jours d’attente ; et je donne ici une note que je retrouve écrite sur un bout de papier : « Mercredi 21 octobre 1857. — Un mauvais sommeil et le matin la bouche sèche comme après une nuit de jeu.
Si le groupe est petit ou nul, l’œuvre n’a pour ce moment d’impopularité qui peut être passager ou éternel, qu’une importance minime.
VII Bientôt les premières études de langues commencées sans maître dans la maison paternelle, puis les leçons plus sérieuses et plus disciplinées des maîtres dans les écoles, m’apprirent qu’il existait un monde de paroles, de langues diverses ; les unes qu’on appelait mortes, et qu’on ressuscitait si laborieusement pour y chercher comme une moelle éternelle, dans des os desséchés par le temps ; les autres qu’on appelait vivantes, et que j’entendais vivre en effet autour de moi.
Le soleil et la lune, le feu et le vent, la terre et le firmament, et la vaste étendue des eaux, le jour et la nuit, les deux crépuscules du matin et du soir, tous les éléments sont les témoins des actions les plus secrètes de l’homme : s’il n’a point agi contre la voix intérieure de sa conscience, le juge incorruptible le fait jouir d’une félicité éternelle ; mais si en étouffant cette voix il s’adonne au crime, il est condamné aux plus terribles châtiments. » Un tel discours, dans un tel moment, est déplacé ; on voit que dans ces poèmes les situations les plus pathétiques servent moins au développement des passions qu’au développement de la haute morale qui domine dans l’âme des poètes les passions elles-mêmes.
Le contraste entre les deux rives de notre cité est éternel.
On pouvait espérer sauver du naufrage des théories métaphysiques certaines vérités d’expérience intime qui ont toujours fait la base des sciences morales, comme le libre arbitre, la responsabilité, le devoir, le droit ; mais il s’agit maintenant d’un débat tout autrement sérieux que le dialogue éternel entre le spiritualisme et le matérialisme.
MARTINE Et je te dis, moi, que je veux que tu vives à ma fantaisie et que je ne me suis point mariée avec toi pour souffrir tes fredaines etc… À propos de Corneille et de Racine, Péguy parlait du « départ en falaise », le souverain accent des premiers mots, abrupts, qui posent l’action et nous y font entrer dans la seconde : Impatients désirs d’une illustre vengeance… Ou bien : Oui, puisque je retrouve un ami si fidèle… Ou bien encore : Oui, je viens dans son temple adorer l’Éternel. […] La scène est un miroir où il se voit non dans son apparence passagère, mais dans son fonds permanent, éternel.
Consultons-nous sur ce point ; posons-nous la fameuse question : « que ferions-nous si nous apprenions que pour le salut du peuple, pour l’existence même de l’humanité, il y a quelque part un homme, un innocent, qui est condamné à subir des tortures éternelles ? […] à l’infini ; comme il est fait depuis longtemps, on supposera également faite, depuis aussi longtemps et même de toute éternité, la notion pourtant ouverte et de contenu indéterminé qu’il représente ; chacun des progrès acquis serait alors autant de pris sur cette entité préexistante ; le réel rongerait l’idéal, s’incorporant par morceaux le tout de la justice éternelle. — Et cela n’est pas seulement vrai de l’idée de justice, mais encore de celles qui lui sont coordonnées, égalité et liberté par exemple.
Après ma confiance en l’Éternel, dans le sein duquel j’espère que ce qui restera de moi sera porté, ma plus douce consolation est que tu chériras ma mémoire autant que tu m’as été chère.
L’éternelle objection qui éloigne du rationalisme certaines âmes très distinguées qui, par suite même de leur délicatesse, sont possédées d’un plus vif besoin de croire, c’est la brièveté de son symbole, la contradiction de ses systèmes, l’apparence de négation qui lui donne les airs du scepticisme.
Et l’éternelle Némésis continue son chemin et son œuvre.
… et dans l’indignation que je ressens encore du petit esprit superstitieux de cet auteur, vous me permettrez, s’il vous plaît d’ajouter : dom Richard, est-ce que tu t’imagines que ce tas d’impertinences qui forment ta mythologie obtiendra des hommes une croyance éternelle ?
Éternelle histoire, mais d’une variante toujours plus belle dans son inépuisable cruauté !
. — C’est qu’en effet tous ces paysages étaient poétiques, et donnaient l’envie de connaître ces éternelles et grasses verdures qu’ils exprimaient si bien — mais cette année l’application ne serait pas juste, car nous ne croyons pas que M.
Toutefois, et par cela seul que nous la comparons à l’existence humaine, cette existence historique des genres n’est pas éternelle. […] Et pour les moyens qu’il indique d’« enrichir » ou d’« ennoblir » la langue, de l’accroître et de l’amplifier, on en voudrait de plus précis que cette éternelle « imitation » où nous le voyons constamment revenir, sans en autrement définir l’objet et la limite que par la métaphore si souvent citée : qu’il ne faut pas « imiter » platement les anciens, mais « se les convertir en sang et en nourriture ». […] Cela veut dire, en second lieu, que nous n’imiterons la nature qu’en tant que nous la trouverons conforme ou identique à elle-même dans l’espace et le temps ; de Paris au Pérou, du Japon jusqu’à Rome ; en tant qu’universelle et en tant qu’éternelle. […] Chateaubriand avait dit : « Ce sont deux beaux poèmes que la Jérusalem et le Paradis perdu » ; et, pour le prouver, il avait montré qu’il s’y Rencontrait des « beautés » analogues à celles que l’on admire dans l’Énéide ou dans l’Iliade, c’est-à-dire, après tout, des beautés conformes à l’éternel bon goût. […] Lemaître, et Arnauld ou Nicole pas du tout de Pascal ; que l’on dirait d’eux tous des noms dépouillés de substance et des fantômes errants parmi les ruines éparses d’un cloître-abandonné ; tandis qu’à force d’être semblables entre eux dans l’insignifiance, ils nous désintéressent, pour ne pas dire qu’ils nous dégoûtent de leur propre histoire, ainsi réduite à celle d’une querelle de moines récalcitrants ; et tandis qu’enfin, étrangers à leur temps comme à l’humanité, ce ne sont pas même des fantômes, dont ils n’ont ni la mince consistance, ni l’apparente visibilité ; dans le Port-Royal de Sainte-Beuve au contraire, ils vivent, ils sont faits de chair et de sang ; la religion, en domptant leurs instincts, ne les a pas détruits, et nous retrouvons en eux des hommes de leur siècle, un mousquetaire, comme Tréville, un corsaire, comme Pontis, un docteur de Sorbonne, comme Arnauld, des avocats et des diplomates ; nous y reconnaissons nos vertus et nos vices, l’orgueil du rang, la vanité littéraire, la sourde ambition qui survivent au serment qu’on a fait de les abjurer, ou, inversement, le détachement du monde, l’esprit d’abnégation et de charité, l’héroïsme opiniâtre qui fit autrefois les martyrs ; et, pour tout dire en deux mots, nous y reconnaissons dans des personnes particulières, déterminées et agissantes, des exemplaires éternels de l’humanité.
Pour moi quand je verrais dans les célestes plaines Les astres s’écartant de leurs roules certaines, Dans les champs de l’éther l’un par l’autre heurtés, Parcourir au hasard les cieux épouvantés ; Quand j’entendrais gémir et se briser la terre ; Quand je verrais son globe errant et solitaire, Flottant loin des soleils, pleurant l’homme détruit, Se perdre dans les champs de l’éternelle nuit ; Et quand, dernier témoin de ces scènes funèbres, Entouré du chaos, de la mort, des ténèbres, Seul je serais debout, seul malgré mon effroi, Être infaillible et bon, j’espérerais en toi, Et, certain du retour de l’éternelle aurore, Sur les mondes détruits je t’attendrais encore ! […] Guyau, dans tous ses ouvrages, a fait une large place à la poésie (Voir par exemple, dans l’Irréligion de l’avenir, l’allégorie de la fiancée toujours déçue qui tous les matins revêt sa robe blanche, ou du voyageur épuisé de fièvre qui suit des yeux l’onduleuse caravane de ses frères en marche vers les pays inconnus ; dans la Morale, sans obligation ni sanction, la page vraiment sublime qui dans les flots en mouvement nous montre le symbole du roulis éternel qui berce les êtres).
Moi je suis l’âne au vrai, l’âne qui, sur son dos, Porte où l’on veut qui veut, au bois, aux villes d’eaux, Au marché ; de l’enfant le souffre-douleur morne, Qu’on croît dur comme bois et têtu comme borne, Le jouet de la fable, enfin l’une baudet, De tous les ignorants l’éternel sobriquet, Concierge, âne, est-ce assez29 ? […] qualifier d’âne un pauvre ignorant Malgré soi, qui, depuis soixante ans, s’étudie A lutter contre un mal qui, sans cesse empirant Par tout ce qu’on ignore et tout ce qu’on oublie, Ne prend fin qu’au séjour de l’éternelle vie, C’est trop fort ; pour de bon je me fâche, et dût-on Murmurer sur mes pas le vilain mot d’envie, Je vais dire pourquoi, le prenant sur ce ton, Il me traite, n’étant pas Voltaire, en Fréron : C’est qu’en son œuvre grande à la fois et difforme Où, pour lui prendre un mot qu’il a fort caressé, Tout, jusqu’à la chanson amoureuse, est énorme, Du détail ébloui, du tout je suis lassé ; Qu’une larme jamais par ses vers suscitée, De mon cœur frémissant à mes yeux n’est montée ; Qu’en aucun des sujets que résume l’humain, Dieu, l’âme, la douleur, la mort, son lendemain. […] Que le père qui a craint pour la vie d’un enfant se remette en mémoire les nuits passées au chevet du malade, l’agitation sans trêve des journées, les heures longues comme des jours, et certaines minutes éternelles ; qu’il se souvienne, s’il l’ose, de ses craintes insensées, de ses attentes insupportables, de l’impuissance de sa raison dans les angoisses de sa chair ; voilà l’image de mon douloureux amour pour mon pays.
J’avais envie de vous suivre jusqu’au bout, mais je n’en ai pas le temps, et grâce à votre lettre qui ne finit point, voici un bavardage éternel. […] En lui présentant mon respect, vous aurez la bonté de lui lire ce paragraphe de mon billet, de le remercier du mot obligeant qu’il a écrit de moi au prince de Galitzin, et de l’assurer de ma reconnaissance et de mon éternelle vénération. […] N’oubliez pas, monsieur le général, de renouveler à Sa Majesté Impériale les témoignages de mon respect, de mon entier dévouement et de la reconnaissance éternelle que je lui dois pour toutes les bontés dont elle a bien voulu m’honorer. […] Je désire passionnément de m’entretenir avec vous, soit que vous pensiez être un de ses ouvrages, soit que vous pensiez être une portion nécessairement organisée d’une manière éternelle et nécessaire.
s’écrie le poëte ; et, dans un élan plein de grandeur, il revendique le privilège immortel de la Muse ; il montre aux riches que sans elle leur orgueil d’un jour est frappé d’un long, d’un éternel oubli.
Si cela était vrai, même à Rome et aux portes de Rome, si, au premier siècle de notre ère, l’osque ou telle autre forme de langage italiote primitif étaient encore parlés dans des districts peu éloignés de la Ville éternelle, que devait-il donc arriver en Gaule, au cœur du pays, chez des populations qui avaient un fonds d’idiomes tout à fait différents de famille et réfractaires à la fusion ?
L’éternelle illusion, l’invincible expérience sont en lui côte à côte pour se combattre et le déchirer.
Il contenait pourtant pour les hommes une idée éternelle.
Il dit l’agonie sur la terre et le naufrage sur la mer, l’angoisse de la mort partout, l’éternelle séparation.
Le ciel d’Italie a des rayons qui font fleurir deux fois les femmes comme les citronniers de cette terre ; elles ont autant de printemps que d’années, jusqu’à l’âge où il n’y a plus de printemps que dans le ciel ; c’est alors qu’elles disparaissent du monde et qu’on ne revoit plus leurs charmants fantômes que dans les corridors des monastères ou sous les colonnades de leurs églises ; de là leurs rêves montent pieusement au paradis, qui n’est encore pour elles qu’une dernière floraison de leur éternelle jeunesse.
C’est là ce qui est propre à notre pays, et qui porte la marque éternelle de ce bon sens qui doit se fortifier et s’étendre, mais qui ne changera pas.
Mais il en est qui s’attaquent aux abus indestructibles : ceux-là ont gardé toutes leurs pointes ; ils font partie de cette morale éternelle qui tient les sociétés en défiance et les gouvernements en haleine.
À chacun son rôle : persécutés et persécuteurs poussent également à l’éternelle roue ; et après tout les persécutés doivent beaucoup de reconnaissance aux persécuteurs, car, sans eux, ils ne seraient pas parfaitement beaux !
Ce sentiment de la vanité infinie des choses, de l’abîme éternel qui nous engloutit tous, — « que nous ayons été berger ou que nous ayons été troupeau », — comme dit Firdousi, est particulier à la Perse ; ses poètes en ont toujours été pénétrés.
* * * — Un gouvernement serait éternel à la condition d’offrir, tous les jours, au peuple un feu d’artifice et à la bourgeoisie un procès scandaleux.