Nous avons vû des peintres sans génie, mais devenus célebres pour un temps, par l’art de se faire valoir, travailler plus mal durant l’âge viril qu’ils ne l’avoient fait durant la jeunesse.
Des entretiens sans cesse interrompus et recommencés, plus mélancoliques chez les hommes d’un certain âge, joyeux jusqu’à la gaminerie dans les jeunes classes et chez les petits officiers, remplissent les jours et les nuits.
Son ridicule entêtement à soutenir qu’elle se sait aimée et qu’elle pardonne l’aveu d’une passion qu’elle encourage, n’est pas sans exemple parmi les femmes de son âge. […] Pour atteindre à l’ignorance d’Agnès, après avoir traversé les années tumultueuses, il faudrait un grand savoir ; à l’âge de mademoiselle Plessy, il ne faut qu’être soi-même. […] Placé à l’âge de quinze ans chez un homme de loi, il profita des loisirs que son maître lui laissait pour déchiffrer ou inventer de vieilles poésies. […] Il respecte les illusions qui ne sont plus de son âge. […] Les âges héroïques de la Grèce n’offrent-ils pas à la fantaisie du poète une carrière plus large et plus libre que les générations auxquelles nous touchons de si près ?
Je l’avais connue ainsi, comme une grand’mère dont vous ignorez l’âge. […] La conversation des lettrés dure depuis de beaux âges. […] D’autant plus qu’Horace, ayant ses quarante ans, écoutait le conseil de l’âge. […] Passera-t-il les âges ? […] Parmi les romantiques, Musset est le plus jeune, par l’âge et par le génie.
Chanson galante, chanson satirique, chanson de table, ils en ont eu de toutes les sortes et dans tous les âges. […] La gaieté est avant tout quelque chose qui échappe et qui circule ; mais elle eut aussi ses rendez-vous réguliers, ses coteries et foyers de réunion, ses institutions pour ainsi dire, aux divers âges. […] Dans un dîner du 2 fructidor an iv (1796), dix-sept gens d’esprit dont on a les noms, et parmi lesquels on distingue les deux Ségur, Deschamps, père des poëtes Deschamps d’aujourd’hui, Piis, Radet, Barré, Després, etc., posèrent entre eux les bases d’un projet de réunion mensuelle qu’ils rédigèrent le mois suivant en couplets ; c’était l’ère des constitutions nouvelles et des décrets de toutes sortes ; on ne manqua pas ici d’en parodier la formule : En joyeuse société, Quelques amis du Vaudeville, Considérant que la gaieté Sommeille un peu dans cette ville, Sous les auspices de Panard, Vadé, Piron, Collé, Favart, Ont regretté du bon vieux âge Le badinage Qui s’enfuit ; Et, pour en rétablir l’usage, Sont convenus de ce qui suit : et, après la rédaction rimée-de divers articles du règlement, la commission signait en bonne forme : Au nom de l’Assemblée entière, Paraphé, ne varietur.
ces aspirations l’ont tué avant l’âge ; il est mort de la mort de Léopold Robert, de la mort de ceux qui ont trop aspiré. […] Et puis le cœur s’amollit avec l’âge, vous aimerez un père, une mère, une amante, une femme, des enfants. […] On eût dit d’un Ossian jeune, avant que l’âge eût blanchi sa barbe et aveuglé ses yeux inspirés.
je poursuis seul notre pèlerinage Aux grands maîtres vivants ou morts que nous aimons ; Guidé par un poète, un ami de mon âge, J’ai pris l’âpre chemin des pâtres sur les monts. […] Ils avaient laissé huit ou dix paires de sabots très petits sur la place : la petitesse des sabots disait l’âge des enfants par la mesure des pieds qu’ils avaient chaussés. […] De question en question j’arrachai à cette jeune fille, modeste autant qu’universelle, le secret de tout ce qu’elle savait à l’âge où l’on ignore tout.
Quoique encore dans l’âge où rien ne décline dans l’homme, sa tête intelligente a déjà perdu quelques-uns de ces fins cheveux blonds qui, comme des feuilles inutiles, se dispersent avant l’été pour mieux laisser mûrir dans le front découvert ce fruit précoce, la pensée, dans les hommes qui le portent. […] Il ne s’en fallut que de quelques voix pour qu’il fût le représentant de la jeunesse de la Franche-Comté, comme son père l’avait été de l’âge mûr. […] Le poète et l’antiquaire contractent sur leur physionomie cette impression d’éternité qui méprise la terre fugitive, parce qu’elle vit dans tous les âges.
À l’âge où les impressions sont si vives, je n’en ai eu que de pieuses. […] XX Mais vous qui vivez à la campagne, soit dans le château démantelé de vos pères, non loin de l’église du village et des pauvres du hameau, soit dans la maison modeste, château nivelé de l’honnête bourgeoisie du dix-neuvième siècle, élevant là des fils, des filles, des sœurs étagées par rang d’âge dans la vie, qui vous demandent des livres à la fois intéressants et sains, où respirent dans un style enchanteur toutes les vertus que vous cherchez à nourrir dans votre jeune tribu ; vous qui, après une existence laborieuse, vous êtes retirés à moitié de la vie active dans le verger de vos pères pour y soigner les plantes naissantes destinées à vous remplacer sur la terre, et qui voulez les saturer de bonne heure de ce bon air vital plein des délicieuses senteurs de l’air ; enfin vous qui, déjà vieillis et désintéressés de votre propre existence prête à finir, voulez cependant jeter un dernier regard consolant sur les péripéties intérieures de ceux qui traversent les sentiers que vous avez traversés, afin d’y retrouver vos propres traces et de vous dire : « Voilà ce que j’ai éprouvé, pensé, senti, prié dans mes moments de tristesse ou de consolation ici-bas ; voilà la moisson en gerbes odorantes que j’emporte à l’autre vie » ; mettez à part, ou plutôt gardez jour et nuit sur votre cheminée, comme un calendrier du cœur, non pas ce livre confus où l’on a entassé pêle-mêle les œuvres du frère et de la sœur pour que le génie de l’une fit passer sur la médiocrité de l’autre, mais le volume de Mlle de Guérin, cette sainte Thérèse de la famille, qui n’a écrit que pour elle seule, et dont une amitié longtemps distraite n’a recueilli que bien tard les chefs-d’œuvre involontaires qu’elle oublia de brûler au dernier moment. […] Après le repas, on cause un moment, puis le père rentre dans sa chambre, les filles au salon, les fils courent à leurs jeux dans les prairies ou dans le ruisseau du moulin avec les petits paysans de leur âge, et reviennent le soir chargés du poisson de l’étang ou de la tonte des peupliers.
C’est là que je vivais à quinze ans entre un père militaire, une mère jeune encore et belle comme la mémoire mal voilée de son matin, et cinq sœurs groupées autour d’elle selon leurs âges différents comme des anges échelonnés sur les degrés de l’échelle de Jacob. […] Son génie survécut à toutes ces douleurs et la soutint jusqu’à l’âge de quatre-vingt-dix ans. […] IX Qu’on juge de l’intérêt de curiosité que ces récits de M. de Davayé étaient de nature à inspirer à toute la famille : les âges, les lieux, les circonstances politiques ont des similitudes, des prédispositions, des impressions, des inspirations analogues.
Et voici que son tâtonnement épeuré a « pénétré dans les régions inviolables où repose, majestueux et néfaste, le souvenir des âges perdus ». […] Elle était si petite et si courbée par l’âge et les labeurs que le bas portail d’ogive se dressait bien au-dessus d’elle, couronné de l’or des giroflées. — Elle pleurait : sa joue était comme une muraille lavée par la pluie ; sa bouche, à cause des sanglots infinis, faisait une grimace triste qui ressemblait au sourire d’un mort blafard et ironique ; son cou était comme une grosse corde amollie et détressée ; son petit buste court tenait dans un maigre corsage, aussi étroit que celui d’une fille de dix ans. […] La nature saura voiler de son feuillage Mes timides baisers sur tes yeux ingénus ; Nous n’aurons pas de nom et nous n’aurons pas d’âge, Car tu seras la Vie impersonnelle et sage Qui berce la Douleur entre ses deux bras nus.
Sur ce, la dame se lève, lui fait part de la fin de leur amour, qui vient de mourir, à la fleur de l’âge, et elle sort. […] Je le crois bien : elle sait son métier, madame la baronne d’Ange ; elle se défie de la boîte aux lettres comme d’une souricière à secrets, et, lorsqu’elle va en bonne fortune, elle déguise tout, son nom, son âge, son âme et son cœur, jusqu’à son écriture. […] Sur quoi, Suzanne lui fait part de la fin de leur amour, qui vient d’expirer à la fleur de l’âge.
Quel âge avez-vous ? […] Ce petit commerce, dont nous leur laissons les gros sous pour eux, servira pour leur acheter des habits, du linge et une armoire quand ils seront en âge et en idée de se marier. […] J’ai relu, pour ainsi dire, ma vie tout entière sur ce livre de pierre composé de trois sépulcres : enfance, jeunesse, aubes de la pensée, années en fleurs, années en fruits, années en chaume ou en cendres, joies innocentes, piétés saintes, attachements naturels, études ardentes, égarements pardonnés d’adolescence, passions naissantes, attachements sérieux, voyages, fautes, repentirs, bonheurs ensevelis, chaînes brisées, chaînes renouées de la vie, peines, efforts, labeurs, agitations, périls, combats, victoires, élévations et écroulements de l’âge mûr sur les grandes vagues de l’océan des révolutions, pour faire avancer d’un degré de plus l’esprit humain dans sa navigation vers l’infini !
, cette gradation inflexible de l’âge mûr, de la vieillesse et de la caducité qu’on remarque dans l’homme. Un peuple ne dépérit pas ainsi… S’il prévient, au contraire, la décadence par le travail continu des esprits, par le sentiment élevé du devoir, par quelque grandeur dans la vie publique, il ne subit pas la loi du temps et il peut compter indéfiniment sur de nouveaux âges virils. » Villemain, évidemment, a trop l’expérience de la vie pour croire à cette plaisanterie de jeunesses successives. […] Singulier essai, par un homme qui devait savoir par état la valeur des termes qu’il employait, et dont le talent n’était pas d’ailleurs à l’âge timide où l’on essaye !
Il disait avec orgueil : « Je porte l’uniforme depuis l’âge de neuf ans ! […] Il avait vu, en son jeune âge, M. de Vergennes. […] L’air salubre des grands espaces leur a nettoyé l’âme et les a prédisposés à des occupations dignes de leur âge. […] Et quand arrive l’âge de l’éducation, ils les envoient en Hollande respirer le patriotisme et l’esprit national. À quel âge cette séparation ?
Tous les âges de la société, tous les états de la civilisation ne permettent pas également d’appeler le peuple au secours de la poésie dramatique, et de la faire fleurir sous son influence. […] Rien ne manqua donc à cette époque des biens qu’elle était capable de désirer ; rien ne troubla les esprits dans cette première ivresse de la pensée parvenue à l’âge du développement ; âge des folies et des miracles, où l’imagination se déploie dans ses plus puérils comme dans ses plus nobles emportements. […] La vieillesse indignement abandonnée, livrée à la démence par la faiblesse de l’âge et la violence de la douleur, se répandit-elle jamais en lamentations plus pathétiques que dans le Roi Lear ? […] Il déclare l’avoir écrit en parfaite santé ; mais cette précaution prise si fort à propos dans un âge encore si éloigné de la vieillesse fait présumer que quelque fâcheux symptôme avait éveillé en lui l’idée du danger. […] Près des monuments des siècles écoulés, commencent maintenant à s’élever les monuments d’un autre âge.
Elles se reproduiront avec de faibles variantes dans la suite des âges, indéfiniment. […] Il remonte avec lui le cours des âges. […] Il est un âge où la sensibilité, en pleine exaltation, sera bouleversée par tel spectacle, telle lecture qui, plus tard, survenant à l’âge où les abstractions surtout séduisent, n’aura plus qu’une influence faible. […] Nous n’avons plus l’admirable vision déformante des vieux âges. […] Après l’âge d’or voici l’âge de fer et la légende cède au récit.
Si son travail et sa conduite sont méritoires, il passera dans les grands, où l’appelle son âge. […] Mais le vieux marquis de Pierrerue est mis, par son âge, à l’abri du séduisant écueil. […] C’est pourquoi elle empiète de bonne heure sur un domaine jadis réservé à l’âge avancé. […] Il approche du point où l’on commence à descendre la pente de l’âge. […] Sans doute, nous rappelant ce qu’ils ont fait dans leur jeunesse, nous nous intéressons davantage encore à leurs actes de l’âge mûr.
Royer-Collard, quelle plaisanterie faites-vous là à un homme de mon âge ! […] Tel j’étais dès mon arrivée, et ces idées que la nature m’avait données toutes faites, l’âge n’a fait que me les confirmer chaque jour. » En parlant de Corneille, il demande pardon à son ami Cousin qui vient de sortir : « … Mais mon ami Cousin, ajoute-t-il, dit souvent bien des folies ; il ferme les yeux, et il s’imagine qu’il voit des statues. […] CLXXVI Dans l’âge mûr, on arrive naturellement à être moins superficiel, mais en même temps il devient plus difficile d’être léger. […] Va, deviens grand ; conquiers l’autorité parmi les âges ; que tes paroles gagnent en poids chaque jour, et qu’une fois, tout à la fin, un mot de toi, sorti lentement, n’ait qu’à tomber sur cette race des abjects Mévius pour qualifier leur nom dans l’avenir… Mais alors, ce mot, vieillard auguste et clément, tu ne le prononceras pas ! […] Fould qui le voyait depuis une heure se démener et gesticuler sans être écouté ni entendu, est-il possible qu’un homme, à son âge, se donne tout ce mal inutilement ?”
Nous savons cependant que la Jeunesse française n’a pas hésité à le faire, et, récemment, nous avons vu les jeunes hommes les plus distingués de notre âge se grouper avec enthousiasme autour de la bannière naturiste. […] Peut-être fus-je trop exclusif à l’égard de certaines personnalités qui ne possédaient souvent de charmes que ceux que leur conférait leur âge juvénile. […] Mais ce sont là, paraît-il, des préjugés d’un autre âge et la gloire de nos jeunes arrivistes se mesure maintenant au nombre de scalps ravis aux têtes de leurs aînés ; au moins faudrait-il respecter les morts, selon les usages des Peaux-rouges à qui nous devons ce sport d’un nouveau genre, et M. […] Ses yeux ont conservé l’innocence des premiers âges où se transfigurent et s’ordonnent les plus éphémères réalités. […] L’Âge d’or semble y régner encore ; l’adultère, le meurtre y paraissent méconnus.
Il s’éteignit à l’âge de 80 ans entre les bras du « chef de la prière », le 4 juillet 1848. […] Vers l’âge d’onze ans, il vint s’établir avec sa mère, séparée, à cette époque, du général, à Paris, dans le quartier, presque désert alors, du Val-de Grâce. […] A travers quelques écarts de jeunesse égarés dans son âge mûr, il a bien travaillé, tous les jours, constamment, sans relâche, comme un bon ouvrier de l’art. […] En avançant en âge, c’est celui-ci qu’Hugo a fait dominer dans ses œuvres. […] L’âge vient, l’homme ne voit plus rien où se prendre.
Alexandre de Humboldt, dans ses dernières années, et quand on sut que l’âge commençait à peser enfin à cette organisation si longtemps verte et vigoureuse, recevait de tous côtés des offres de dévouement, de service ; on lui demandait par grâce de le venir soigner, entourer d’attentions, d’être sa lectrice, sa garde-malade. […] Après l’avoir étudiée de si près et dans ses propres confidences, je crois quelquefois, en vérité, qu’elle est là devant moi, intelligente et parlante ; je me la représente en personne, avec cette physionomie pétrie de tendresse, de finesse, de douce malice et de bonté : l’amour a passé par là, on le sent, non point précisément celui qui enflamme et qui ravage, mais celui qui brûle à petit feu et qui, toutes peines éteintes, laisse après lui une réflexion légèrement mélancolique et attendrie ; arrivée à cet âge où l’on n’espère plus et où l’on a renoncé à plaire, sans pour cela se négliger, dans sa mise de bon goût et simple, tout en elle est d’accord, tout se nuance, et s’assortit ; elle ne craint pas de laisser voir à son front et à ses tempes la racine argentée de ses cheveux où il a neigé un peu avant l’heure ; elle ne cherche pas à prolonger une jeunesse inutile et qui ne lui a donné que des regrets ; elle est aussi loin de l’illusion sentimentale et de l’éternelle bergerie d’une d’Houdetot, que de la sécheresse mordante et polie d’une Luxembourg ; elle a gardé la seule jeunesse du regard, l’étincelle aimante ; elle continue de sourire à cette vie qu’elle n’a guère connue que triste et amère ; elle rêve fidèlement à ce passé qui lui a valu si peu de douceurs, elle a le culte d’un souvenir, et si elle tient encore dans ses mains un livre à couverture bleue usée (comme dans ce portrait de femme attribué à Chardin), je suis bien sûr que c’est un volume de la Nouvelle Héloïse. […] Aussi lorsque le marquis de Verdelin demanda au comte d’Ars, son cousin, la main de Mlle d’Ars, alors âgée de vingt-deux ans, fut-il agréé malgré la grande disproportion d’âge. […] On y trouvera les états de service fort honorables du jeune et brillant officier de marine, frère de Mme de Verdelin, emporté par un boulet de canon à l’âge de vingt-trois ans. — C’est encore Rousseau et ses méchants propos qu’on tient à réfuter dans ce petit écrit.
Elle quitta ce monde le 23 avril 1792, à l’âge de soixante-dix ans accomplis. […] Nous eûmes beaucoup plus de peine à obtenir de notre section (c’était celle du Mont-Blanc) les autres passeports qui nous étaient nécessaires, un par personne, tant les maîtres que les valets et les femmes de chambre, avec le signalement de chacun, la taille, les cheveux, l’âge, le sexe, que sais-je, moi ? […] « Ayant ainsi avisé à ma renommée, ou du moins au moyen de la sauver de l’infamie, je voulus aussi pourvoir à mes études, et corriger, copier, séparer ce qui était achevé de ce qui ne l’était pas, abandonner enfin ce qui ne convenait plus à mon âge ni à mes desseins. […] C’est ainsi que, le samedi 8 octobre 1803, au matin, ce grand homme nous fut enlevé, ayant à peine dépassé la moitié de la cinquante-cinquième année de son âge.
Le Joueur de Regnard n’est qu’un de ces jeunes étourdis qui jouent par imitation et que l’âge corrige. […] Le début promettait ; mais à l’âge de plus de quarante ans, une actrice charmante, Mlle Quinault, le jeta lui-même dans des nouveautés qui n’eurent guère moins d’éclat ni une fin plus heureuse que celles dont il avait ri. […] Au lieu de deux hommes de caractères opposés dont l’un est sacrifié à l’autre, et dont le dialogue, selon Diderot, n’est qu’un tissu de petites idées et d’antithèses, vous avez deux personnes qui diffèrent d’intérêt, d’âge, de passion, et dont l’entretien est grave, aisé, naturel ; témoin, dans le Père de famille, le père et le commandeur. […] Qui donc peut supporter Almaviva en époux trompé, Rosine en mère coupable d’un bâtard en âge de se marier, Figaro en vieux serviteur vertueux et chenu ?
Notre siècle enfin, qui a fouillé l’histoire avec tant de zèle et de patience, qui a pris tant de plaisir à ressusciter les âges disparus, a eu les plus habiles restaurateurs de monuments anciens, si bien qu’à force de reproduire tous les styles il a presque oublié d’avoir le sien propre. […] Mais il veut dire aussi que les Eglises sont des livres de pierre où les générations d’autrefois écrivaient leur pensée pour l’éternité ; qu’elles ont été des symboles compliqués, où le plan, les sculptures, les plus minces détails exprimaient des idées ; que, parlant ainsi aux initiés un langage mystérieux, elles parlaient en même temps aux yeux de la foule par leurs vitraux, leurs fresques, leur peuple de statues ; qu’elles ont matérialisé durant des siècles le génie poétique et les aspirations populaires ; que les cathédrales gothiques en particulier, par leur élan vers le ciel, par la hardiesse de leurs lignes verticales, ont rendu à merveille les espérances et les envolées mystiques d’un âge de foi tourné presque tout entier vers l’au-delà ; seulement que, l’imprimerie étant inventée, la pensée, au lieu de se pétrifier, devient oiseau, vole d’un bout du monde à l’autre, se rit du temps et de l’espace, sûre qu’elle est de pouvoir se multiplier à l’infini ; que désormais la Bible de marbre et de granit est vaincue et destinée à être remplacée par la Bible de papier, plus claire, plus mobile et, malgré l’apparence, plus durable. […] La femme qui par son âge ou par sa volonté de rester jeune représente la nouvelle génération est éprise de poésie, de rêve. […] Racine, à ses débuts, fut peut-être jeté dans la voie où il devait trouver la gloire par le succès de son ode sur le mariage du roi et le traité des Pyrénées ; Casimir Delavigne, Pierre Lebrun (poetæ minores) réussirent, presque au sortir de l’enfance ; dans des poèmes ayant une origine semblable, qui leur valurent des encouragements précieux à cet âge.
Antony Deschamps, esprit dantesque de notre âge ; celle de M. […] Sur les marches de l’oratoire, une femme jeune et belle encore est agenouillée entre deux petites filles d’âge inégal. […] « L’aspect de mon visage le soutint quelque temps », dit-elle aux âmes attentives, « et, en laissant briller sur lui mes jeunes yeux, je le guidai dans le droit chemin. — Mais si tôt que je fus au seuil de mon second âge et que j’eus changé de vie en ces lieux, — celui-ci », ajoute-t-elle avec un geste de reproche, « se détacha de moi pour se donner à d’autres. » — (Allusion poignante aux nombreux amours profanes que Boccace et les autres historiens reprochent au Dante après la mort de Béatrice.) […] ” « Je levai, à son ordre, le menton ; et, quand elle avait désigné mon visage par la barbe, j’avais bien compris la malignité vénéneuse de l’intention. » (Elle voulait signifier par là qu’il n’était plus un enfant, mais un homme d’âge mûr, quand il avait commis ces fautes.)
On ne sait pas bien la date de sa naissance, ni par conséquent l’âge qu’elle avait lorsqu’elle mourut si subitement à la fleur encore de la jeunesse et dans tout l’éclat de sa beauté. […] Au-dedans du royaume, il cherche encore parmi les princesses ; il nomme sa nièce de Guise, sa cousine de Rohan, la fille de sa cousine de Conti ; à toutes il trouve des inconvénients encore, et conclut à la normande en disant : Mais quand elles m’agréeraient toutes, qui est-ce qui m’assurera que j’y rencontrerai conjointement les trois principales conditions que j’y désire, et sans lesquelles je ne voudrais point de femme : à savoir qu’elles me feront des fils, qu’elles seront d’humeur douce et complaisante, et d’esprit habile pour me soulager aux affaires sédentaires et pour bien régir mon État et mes enfants, s’il venait faute de moi avant qu’ils eussent âge ?
La vie que Madame menait à la cour de France varia nécessairement un peu durant les cinquante et un ans qu’elle y passa ; elle n’y vivait pas tout à fait à l’âge de vingt-cinq ans comme elle faisait à soixante. […] Dites naturellement que c’est la paresse qui vous empêche de vous habiller ; ce qui ne convient ni à votre âge ni à votre rang.
Il y avait, du temps de Buffon et de son âge, un homme avant lui illustre, un homme né naturaliste comme d’autres naissent musiciens, peintres ou géomètres, un homme dont le nom est devenu celui de la science même, le Suédois Linné. […] Moi qui ai lu toute une correspondance de lui, des lettres de sa jeunesse et de son âge mûr, j’en ai reçu une impression indélébile.
Il était orateur complet dès l’âge de trente-quatre ans. […] Il est très vrai que, lus de suite, sans avertissement, sans qu’on se dise l’âge, le lieu, les circonstances dans lesquelles ils ont été composés, quelques-uns de ces discours de Bossuet peuvent rebuter ou surprendre des esprits qui aiment à s’appuyer sur la continuité plus égale et plus exacte de Bourdaloue et de Massillon.
Malgré l’accident funeste qui brisa sa carrière et qui l’arrêta dans son développement, et quoique son dernier tableau (celui des Pêcheurs) ait pu paraître empreint de quelque affectation mélancolique, il est certain, à lire ses lettres nombreuses, que sa pensée s’élevait et aspirait chaque jour plus haut avec l’âge ; il devenait plus hardi, ou du moins d’un horizon plus agrandi, en vieillissant ; il avait commencé par copier la nature, il ne cessait de vouloir s’y conformer, et il visait en même temps à un idéal, impossible peut-être à concilier avec cette reproduction sévère et scrupuleuse, mais que, dans son ardeur opiniâtre, il concevait toutefois en accord avec l’exacte vérité. […] Il me pardonnera dans tous les cas, je l’espère, d’avoir laissé trace de ce léger et si passager froissement, en faveur de l’hommage qui lui est ici rendu par un noble artiste près de tomber au milieu de sa course, et qui, même au moment où il cueillait sa dernière palme, le saluait du fond de l’âme comme le premier maître de notre âge et comme un ami.
On parla insensiblement de son règne comme d’un âge d’or. […] Plutarque me sourit toujours d’une fraîche nouveauté ; l’aimer c’est m’aimer, car il a été l’instituteur de mon bas âge.
Vaincu, évincé des premiers et des seconds objets de son ambition, rejeté dans son fauteuil par l’âge, par la goutte, par l’attrait de la douceur sociale et de la vie privée, il trouve à raisonner sur le passé, à en tirer des leçons ou plutôt des remarques, des maximes, qui s’appliquent aux autres comme à lui. […] Mais, sous cette forme où il la présente, à l’usage d’une société élégante et d’une civilisation consommée, que de vérités sur les passions, sur l’amour, sur les femmes, sur les différents âges, sur la mort !
Or, c’est précisément de cet éminent degré de condition et de fortune qu’elle va partir, à cet âge, pour désirer au-delà et pour concevoir de plus hautes espérances. […] Le côté femme (car il faut bien qu’il se retrouve toujours) paraît avoir été dans une certaine vanité de pompe, dans cette chimère de la souveraineté (ayant été si longtemps sujette, et glorieuse de cesser de l’être), et dans des illusions sur son âge.
Le jeune Louis XIV donne, durant cette maladie, des marques de son courage et de sa constance, ce qu’on ne cessa de voir en lui à tous les âges. […] Il est un peu dur, l’humeur dédaigneuse et méprisante avec les hommes, un peu de vanité, un peu d’envie, et fort (peu) commode s’il n’était roi : gardant sa parole avec une fidélité extrême, reconnaissant, plein de probité, haïssant ceux qui en manquent, ferme en tout ce qu’il entreprend59. » Dès l’âge de quinze ans, Louis XIV, qui fait les campagnes de 1653, 1654, 1655, montre une grande ardeur à se distinguer, à faire exactement son métier de roi, dût-il manquer aux prescriptions de son médecin.