Et les odeurs mêmes que nous mettons dans l’eau prennent, il nous semble, cette fade et nauséabonde odeur de cérat… Il nous faut nous arracher de l’hôpital et de ce qu’il laisse en vous, par quelque distraction violente. » 23 Cette réaction au contact de la réalité dolente, est surtout l’apanage des sincères, des vibrants, des profonds artistes… « Lorsqu’on est empoigné de cette façon, lorsqu’on sent ce dramatique vous remuer ainsi dans la tête, et les matériaux de votre œuvre vous faire si frissonnant, combien le petit succès du jour vous est inférieur, et comme ce n’est pas à cela que vous visez, mais bien à réaliser ce que vous avez perçu avec l’âme et les yeux. » 24 Ce dernier desideratum n’est plus du tout celui d’Hector Malot dont les procédés de documentation, évidemment du meilleur réalisme, s’accordent le plus joliment du monde avec un très avéré désir de publicité, de succès.
On a vu que la sensation proprement dite est un composé d’événements successifs et simultanés de même qualité, eux-mêmes composés de même ; qu’au terme de l’analyse, l’expérience indirecte et les analogies montrent encore des événements de même qualité, successifs et simultanés, tous soustraits à la conscience et à la fin infinitésimaux ; que les actions réflexes indiquent des événements rudimentaires analogues et qu’on les suit jusqu’au bas de la série animale, même en des animaux159, comme le polype d’eau douce, en qui l’on ne découvre aucune trace du système nerveux. — Mais on peut les suivre plus loin encore ; car chez plusieurs plantes comme la sensitive et le sainfoin oscillant du Bengale, chez les anthérozoïdes des cryptogames et chez les zoospores des algues, on rencontre des actions réflexes tout à fait semblables à celle que produit le tronçon d’une grenouille décapitée.
La nature, les arbres, les eaux, le clair soleil, lui donnaient du plaisir, et sous ses grandes phrases on sent la sincérité de la jouissance : il a vraiment aimé la campagne, il l’a préférée à la société.
Le Verre d’eau lui semble inspiré par « une vue supérieure des choses humaines » ; et il appelle enfin la « mixture Auber-Scribe » un « ferment divin où Scribe fournissait la magie des situations et Auber la magie de l’expression ».
A Lyon, où il fait souvent l’école buissonnière et passe des journées dans les bois ou le long de l’eau ; au collège de Sarlande, où il invente des histoires pour les « petits », à Paris même, où, fraîchement débarqué, de ses yeux de myope encore tout pleins de songerie, il s’essaye à regarder ce monde nouveau qu’il peindra si bien, le petit Chose, délicat et joli comme une fille, timide, fier, impressionnable, distrait, continue de rêver effrontément, fait des vers sur des cerises, des bottines et des prunes, chante le rouge-gorge et l’oiseau bleu, soupire le Miserere de l’amour, et adresse à Clairette et à Célimène des stances cavalières qui semblent d’un Musset mignard et où l’ironie, comme il convient, se mouille d’une petite larme.
Orgon a, de lui-même, remarqué ce saint homme qui ne lui demandait rien et se contentait de lui offrir discrètement de l’eau bénite à la sortie de l’église : Instruit par son garçon, qui dans tout l’imitait, Et de son indigence, et de ce qu’il était, Je lui faisais des dons ; mais avec modestie Il me voulait toujours en rendre une partie.
Regardez ces diamants d’une si belle eau, disposés en diadème, qu’on rêverait au front d’une jeune impératrice et qui ne serviront peut-être qu’à parer quelque tripière enrichie dont elles accentueront la vulgarité et la laideur.
Janin sentit aussitôt qu’il ne fallait pas porter l’eau, comme on dit, à la rivière, et faire concurrence par son livre avec la fin du monde qui semblait en train d’arriver tout de bon.
Mais au moins je me tenais propre ; j’avais du savon et de l’eau ; je balayais la chambre tous les jours ; j’avais fini à neuf heures que les gardes entraient pour m’apporter à déjeuner.
Le voilà au Jourdain : Arrivé sur les bords de ce fleuve témoin de tant de saints prodiges, je me plongeai, dit-il, dans ses eaux.
On la dirait imitée d’une tempête de l’Énéide, et faite de seconde main ; par exemple : Cependant l’horizon se chargeait au loin de vapeurs ardentes et sombres ; le soleil commençait à pâlir ; la surface des eaux, unie et sans mouvement, se couvrait de couleurs lugubres dont les teintes variaient sans cesse, etc.
Les romantiques vivent dans l’imagination comme le poisson dans l’eau et ont la crainte de la vérité comme le poisson de la paille.
On comprend que des métaphysiciens exacts et rigoureux aient craint de donner le nom de substance à cet être fuyant qui peut dire avec Héraclite : « Nous ne repassons jamais deux fois les eaux du même fleuve. » Il semble qu’une substance doive être quelque chose d’absolument fixe, et en ce sens un tel mot paraît ne pouvoir s’appliquer qu’à l’être infini.
Et pourquoi leurs têtes penchées sur l’orifice ne sembleraient-elles pas y chercher l’eau pour se désaltérer ?
Ce n’est point que je dispute aux peintres le droit qui leur est acquis de peindre des sirenes, des tritons, des néreïdes, des faunes et toutes les divinitez fabuleuses, nobles chimeres dont l’imagination des poëtes peupla les eaux et les forêts, et enrichit toute la nature.
La fluidité de l’eau, ses propriétés alimentaires et autres ne sont pas dans les deux gaz dont elle est composée, mais dans la substance complexe qu’ils forment par leur association.
Une arche mystérieuse, chargée des destinées nouvelles, vogue toujours au-dessus des grandes eaux.
Selon que vous dépouillerez une colline de ses arbres, ou que vous y ferez croître une forêt, vous priverez un terrain de la rosée du ciel, ou vous ferez couler du rocher aride d’abondantes eaux.
En âme et en génie, je ne sais pas si elle se croit, mais je sais bien qu’elle veut qu’on la croie naïve comme de l’eau !
La parcelle d’univers où nous vivons et que nous n’avons pas faite influe sur nous, et aussi l’entourage immédiat que nous nous sommes donné : notre maison, les objets dont elle est ornée, les ombres habituelles de ses murailles et les clartés de ses fenêtres, le bruit encore avec lequel la vie nous berce, bruit de la rue et de la place, murmure des eaux, murmure du vent, voix d’enfants, voix de femmes, voix chères dont les mots ne parviennent pas toujours à l’oreille, dont l’accent va toujours au cœur, bourdonnement du travail dans l’atelier voisin, silence même de la nuit, où passe l’accord de mille bruits apaisés et confus.
D’Henri de Régnier, ils n’admettent que ses vers réguliers, alors que les pages des Roseaux de la Flûte, d’Aréthuse, de Tel qu’en songe, de la Corbeille des heures et des poèmes comme le Sang de Marsyas et Pan, parmi bien d’autres de la Cité des Eaux, contiennent des strophes dans lesquelles le défaut de rythme classique ne diminue pas un instant l’harmonie et l’inspiration.
Paul Bonnetain, et quoique ces jeunes schismatiques, pour se purifier, aient sans doute besoin de se laver dans bien des eaux encore, ils ont raison.
L’or est de la dernière finesse, les diamants sont de la plus belle eau, vous n’en trouverez de pareils chez aucun orfèvre.
Me voilà tel que le Tout-Puissant m’a créé, souverain de la nature, porté triomphant sur les eaux, tandis que les habitants du fleuve accompagnent ma course, que les peuples de l’air m’enchantent de leurs hymnes, que les bêtes de la terre me saluent, que les forêts courbent leur cime sur mon passage. […] Tout à coup l’eau bouillonnait ; les poissons d’or fuyaient. […] La faim me dévorait ; j’étais brûlant, le sommeil m’avait fui ; je suçais des morceaux de linge que je trempais dans l’eau ; je mâchais de l’herbe et du papier. […] Chactas y consent et offre à René « la calebasse de l’hospitalité, où six générations avaient bu l’eau d’érable ». […] Chateaubriand sait très bien s’il a vu, ou non, Washington et s’il a bu, ou non, de l’eau du Mississipi (il n’y a même que lui qui le sache).
Il songe d’abord à se jeter à l’eau : il n’en fera rien. […] Ni le murmure de l’eau ? […] » Et si on ajoutait : « Aimez-vous le chant de la fauvette, le cri de l’alouette et le murmure de l’eau ? […] » Cependant, les premières gouttes d’eau obligent les passants à se réfugier « dans une galerie étroite, sous les voûtes d’un vieil édifice tombant en ruines » ; sur la muraille, on voit encore les traces d’une vieille peinture qui représentait l’enfer… Arrive Katerina avec sa belle-mère et son mari, revenu de voyage. […] Kabanov veut aussi se jeter à l’eau : « Se faire périr à cause d’elle !
S’il ne met pas, à la manière du Dante, les moines, les évêques et les papes sur le gril infernal dont leur pieux zèle menace les incrédules, il n’édifie pas sur leur bonne conduite, et se rit de leurs indulgences, de leurs bulles, et de leurs messes, autant que de l’eau bénite de cour. […] « Soumets-tu la baleine, épouvante des eaux, « Monstre qui sous ses flancs blanchit les mers profondes, « Ouvre une gueule armée et fume au sein des ondes ? […] « Sources de Siloé, que tes eaux sont amères « Depuis que d’Israël les princes insolents « En tes flots corrompus lavent leurs bras sanglants ! […] L’espérance du repos lui sourit : il part ; mais il semble n’échapper aux cruautés des hommes que pour tomber sous la fureur des éléments : son vaisseau fait naufrage ; le peu qui lui reste s’y engloutit, et, forcé de se dépouiller d’un dernier vêtement pour trouver son salut dans les eaux, son manuscrit est le seul bien qu’il sauve à la nage des horreurs de la tempête, qui le jette nu sur la côte de Camboja. […] « Neptune arme les mers, et poursuit sur les eaux, « De Pâris ravisseur le crime et les vaisseaux.
Aussi, comme tous ceux qui ont des idées contradictoires, cherche-t-il la synthèse et il sue sang et eau pour trouver une méthode de conciliation. […] Une jeune fille, pour échapper aux poursuites de son seigneur, s’est enfuie précipitamment et, en traversant le pont de la Vienne, près de l’Isle-Bouchard, en Touraine, est tombée à l’eau. […] Il mentait comme l’eau coule, par vocation ; il mentait par mouvement naturel d’imagination amusée. […] Thermidor finit par arriver, qui fut une douche d’eau froide, malgré la date. […] De l’autre côté de l’eau Décembre 1903.
Plus que jamais il se sentit disposé à aimer cette cité de Minerve, qu’il aimait, parce que le pain y était à bon marché, parce que la jeunesse était docile, et parce que l’eau des fontaines était intarissable et limpide. […] Un jour que Socrate passait sous les fenêtres de la maison d’Achélaüs, peinte par Zeuxis, il reçoit l’eau d’une amphore sur la tête. […] L’eau ruisselle de ses habits ; ses cheveux même sont tout mouillés ; nul ne se douterait, à la voir ainsi faite, que c’est là une riche héritière d’un million, un million, tout autant, pas un florin de moins, pt encore c’est bien peu. […] Le rire circule dans l’esprit comme le sang circule dans les veines, comme l’eau coule dans la prairie ; ainsi la clarté pénètre dans l’étoile ! […] La faim vint, plus tard qu’on ne l’eût espéré ; mais quand ils eurent mangé leur dernière bouchée, et vidé leur dernier verre d’eau fraîche (dans le même verre !)
Le docteur Costa fut conservateur des eaux et forêts en Corse. […] Tous les jours, l’usine a besoin des chemins de fer, de la poste, du service des eaux, du personnel forestier, douanier et voyer. […] Sur cette terre sans verdure, sans ombres, sans eau, on vit d’une existence absurde et féerique. « Au-dessous de ce Sahara peuplé de mirages, Valparaiso, Santiago, villes très bariolées, assemblent des populations indigènes qui n’ont plus que l’ambition de ne rien faire, — et des colonies cosmopolites qui n’ont d’autre souci que de s’enrichir promptement. […] Des kiosques aux fines colonnettes, aux toits retroussés et frangés de sonnettes, avec des couleurs vives, des fleurs, des dragons ou des scènes poétiques, se mirent dans l’eau des lacs. […] Les eaux du fleuve coulaient sans bruit entre deux berges plates, sous la lourdeur de l’été accablant.
Voyez dans le traité des Airs, des Eaux et des Lieux, avec quelle fierté le Grec triomphe du barbare, l’homme libre du sujet soumis à un maître, l’Européen vainqueur de l’Asiatique partout vaincu sur terre et sur mer. […] Il y a une belle remarque d’Hippocrate dans son Traité des Airs, des Eaux et des Lieux : « Ce sont, dit-il, les changements du tout au tout qui, éveillant l’intelligence humaine, la tirent de l’immobilité.
Glaces donc, tapisseries, écriture, imprimerie, moulin à vent, moulin à eau, pompes, écluses, ponts portatifs, automates de Vaucanson, machine de Marly, tout est passé en revue à l’occasion de ce bras artificiel. […] Je les crayonnai aussitôt avec du pastel, désirant colorer l’arc-en-ciel qui ornait ces belles chutes d’eau. » Ce mot me fait l’image de son talent, et de celui surtout du poëte son ami.
Le malade que la clarté d’une bougie délivre à l’instant de ses illusions, le malheureux dont les voix se taisent lorsque la conversation devient intéressante, l’aliéné qu’une brusque affusion d’eau froide ramène à son bon sens, sont guéris pour un temps plus ou moins long par l’énergie plus ou moins durable restituée au réducteur spécial. […] Il allait sur l’eau en boitant de la façon tout à fait particulière à laquelle auparavant on le reconnaissait, car une de ses jambes était plus courte que l’autre.
L’histoire de l’homme considéré simplement comme animal est complète dans son ouvrage ; et, dans le nombre des animaux de l’ancien monde, il n’en est presque aucun, depuis le cétacé jusqu’à l’insecte, soit qu’il se meuve sur la terre, qu’il s’élève dans les airs, ou qu’il demeure enseveli sous les eaux, dont Aristote ne nous apprenne quelque particularité. […] Il est d’abord comme de l’eau, et il demeure liquide pendant quelques jours.
XI Ossian pleure Oscar. « Bientôt, dit-il, s’élève dans la nuit un murmure triste et confus semblable au bruit du lac Lego, quand ses eaux resserrées par la gelée rompent au printemps toutes leurs chaînes et que les glaçons résonnent au loin. […] Les vents et la pluie ont cessé ; le milieu du jour est calme : les nuages volent dispersés dans les airs ; la lumière inconstante du soleil fuit sur les vertes collines ; le torrent de la montagne roule ses eaux rougeâtres dans les rocailles du vallon.
Absolution pour les vivants et eau bénite pour les morts ! […] Je n’ai jamais compris la sécurité dans un pays toujours menacé par l’invasion des eaux, ni le bonheur moral dans une société qui suppose l’avilissement d’une partie de la race humaine.
Même, pour ce tableau le plus antique, le retour du printemps, que l’on prenne, dans Anna Karénine, la sortie du propriétaire Lévine, allant, par la première journée douce de renouveau, inspecter les champs aux molles noires, les enclos où meuglent les bestiaux étourdis et ivres de leur sortie au grand air, puis sa course à cheval par ses bois, dans la brise molle et crue cependant de la fonte des neiges, dont l’eau claire court, à peine salie sur le sol gelé ; les faits familiers mais précisés, les sensations vives fraîchement remémorées d’une observation plus attentive et plus charmée, plus immédiatement vraie que dans la plupart des romans réalistes, s’y pressent comme pris à même avec de grosses et bonnes mains, sans qu’il y ait cependant à vrai dire de passages descriptifs, sans qu’on puisse séparer la série de traits formant tableau de la série des pensées du personnage dont la présence dans cette scène en cause le narré. […] Dans ce vaste drame, la vie même est jouée ; les spectateurs sont de la pièce ; ils ne sortent pas d’eux-mêmes, mais, pris à la magie de cet art, s’abandonnent à la belle et facile occasion de poursuivre leur existence quotidienne dans le fictif, dans un lieu sans peines, sans dégradants soucis de soi-même, mais baigné d’une atmosphère de rêve et de brume immense, complexe, obscur, fragmentaire, vaste, noire, et si immédiatement connu d’une vue si proche, que le lecteur s’y perd et s’y trouve comme un passant dans le large miroir des eaux profondes ou stagnent le ciel, le site et lui-même qui reconnaît son ombre dans la leur.
Comme l’eau qui, chauffée à cent degrés, n’est plus capable d’augmentation calorique et ne peut s’élever plus haut, la pensée humaine atteint dans certains hommes sa complète intensité. […] Lucrèce tord le vieux voile d’Isis trempé dans l’eau des ténèbres, et il en exprime, tantôt à flots, tantôt goutte à goutte, une poésie sombre.
Mais quelle confédération municipale que celle qui a pour municipalités des capitales, Milan, Turin au pied des Alpes, Gênes à droite, Venise à gauche, Florence, Livourne, Bologne au pied des Apennins, Rome au centre, Naples au sommet, Palerme et Messine dans ses eaux ? […] J’y fus logé dans une mansarde nue sous les toits, sans autre meuble qu’une couchette de fer, une table, une chaise et une cruche d’eau.
Ce détail, d’une simplicité naïve, qui serait charmant partout, comme le sont l’obscurité et les trois gouttes d’eau d’une source, sied mieux, selon nous, à Audin qu’à personne. […] Comme tous les artistes puissants, à force de creuser dans ce gypse, dans cette prose, dans cette réalité abaissée, il devait finir par retrouver cette poésie cachée dans les entrailles de toutes choses, même les plus antipoétiques à ce qu’il semble, et qui est la poésie tirée de sa gangue, — ce diamant d’une eau si pure, — le plus intime de la vérité !
Ce qui ressort des idées de Lotze, de Bain et de la conciliation que Wundt paraît en avoir tentée, c’est que les sensations par lesquelles nous arrivons à former la notion d’espace sont inétendues elles-mêmes et simplement qualitatives : l’étendue résulterait de leur synthèse, comme l’eau de la combinaison de deux gaz. […] Beaucoup flottent à la surface, comme des feuilles mortes sur l’eau d’un étang.
Un jour que la galère impériale passait tout près du rocher où la tradition place le sacrifice d’Iphigénie et comme on discutait ce point de mythologie historique, Catherine, se promenant sur le pont avec majesté, grâce et lenteur, étendit la main et dit : « Je vous donne, prince de Ligne, le territoire contesté. » On ajoute que le prince, se voyant assez près de terre, se jeta à l’eau comme il était, en uniforme, et alla prendre à l’instant possession du rocher, y gravant d’un côté, du côté apparent, le nom divin de Catherine, et de l’autre côté (assure-t-il), le nom tout humain de la dame de ses pensées, de la dame d’alors, car il en changeait souvent.
La maîtresse en était absente, et, en la remerciant de l’hospitalité donnée en son nom, il lui écrivait avec un vif sentiment de la nature italienne : Vous ne m’aviez point dit assez de bien de Bagnaia, madame ; c’est le plus aimable lieu du monde que j’aie jamais vu ; on y trouve en même temps une belle vue, de grands arbres aussi verts qu’en France et qu’il ne faut point aller chercher, et des quantités de fontaines qui vont quand les maîtres n’y sont point : jamais ordre n’a été plus inutile que celui que vous aviez donné au jardinier de les faire toutes aller ; elles n’attendent pas vos ordres pour jeter des torrents de la plus belle eau du monde.
Tu arrêtes cette eau d’un côté, elle pénètre de l’autre, elle bouillonne même par-dessous la terre… Après tout, Bossuet est un orateur ; si peu qu’il cherche son art, il en possède et en connaît toute la pratique comme un Démosthène ; ce beau morceau, qui a l’air d’être brusque et soudain, il sait bien qu’il est beau, il le garde et le met en réserve pour le répéter dans l’occasion. — On remarque aussi, jusque dans ses sermons de la grande époque, des expressions non pas surannées, mais d’une énergie propre et qui n’est pas de l’acception commune : « Notre siècle délicieux, qui ne peut souffrir la dureté de la croix » ; pour notre siècle ami des délices. — « C’est vouloir en quelque sorte déserter la Cour que de combattre l’ambition. » Déserter, c’est-à-dire dévaster, rendre déserte (solitudinem facere). — « Il y a cette différence entre la raison et les sens, que les sens font d’abord leur impression : leur opération est prompte, leur attaque brusque et surprenante. » Surprenante est pris ici au sens propre et physique, et non dans le sens plus réfléchi d’étonner et d’émerveiller.
J’aime bien ces vins qui ont corps, et condamne ceux qui ne cherchent que le coulant à boire de l’eau. » Tout en se piquant, et avec raison, de n’être point coulant de style et d’être plutôt rude et fort de choses, d’Aubigné ne s’interdisait pas d’être recherché et alambiqué au besoin en certaines de ses productions poétiques.
Montluc ne perd pas cette occasion d’exposer toute sa doctrine de stimulation militaire et ses moyens habituels d’agir sur le moral du soldat : « Ô capitaines, mes compagnons, combien et combien de fois, voyant les soldats las et recrus, ai-je mis pied à terre afin de cheminer avec eux, pour leur faire faire quelque grande traite ; combien de fois ai-je bu de l’eau avec eux, afin de leur montrer exemple pour pâtir !
L’eau claire, peu courante ; les canaux de toutes largeurs ; les bateaux de toutes grandeurs.
Il se renverse sur sa chaise, il tourne la cuiller dans le verre d’eau sucrée et le prend dix fois par quarts d’heure, avec lenteur, aisance, dégustation.
Ce jour-là Santeul fut près de se fâcher, et sa belle humeur hésita un peu ; mais Mme la Duchesse ayant pris un verre d’eau le lui jeta incontinent au visage en disant : « C’est la pluie après le tonnerre. » Le second outrage raccommoda le premier, et le tout finit par des rires et des chansons. — Il fut convenu que ce soufflet de Santeul, faisait pendant au baiser autrefois donné par une grande princesse à maître Alain endormi.
Il naviguait à fleur d’eau sur les courants du jour, s’amusant à y suivre ou à y précéder les autres, et à y faire mille jeux ; déroulant ses flatteries, dérobant ses malices.
L’ombrelle de soie gorge de pigeon, que traversait le soleil, éclairait de reflets mobiles la peau blanche de sa figure : elle souriait là-dessous à la chaleur tiède, et on entendait les gouttes d’eau, une à une, tomber sur la moire tendue.
Arrêté sur la hauteur d’où le pays se montre plus étendu et plus riche, il suit le cours des eaux qu’il a su maîtriser, il reconnaît ses ombrages, ses abris de prédilection, les champs fécondés par ses sueurs, des glands semés par lui devenus chênes ; le même soleil éclaire encore de ses rayons obliques et toujours amis la longue route qu’il a suivie, et les sentiers mystérieux par lesquels la bonne Providence l’a doucement conduit à elle… » Ce qui suit, et qu’il faut lire, sur les infirmités et l’usage moral qu’on en peut faire est fort beau, Dans ces termes adoucis, je cesse de contredire, et je m’efforcerais plutôt de m’associer aux affectueuses espérances de l’auteur.
Villemain ; il sue sang et eau à trouver des beautés dans les Clémentines ou dans le Pasteur d’Hermas.
Un voyage et un séjour que Mme de Staël fit aux eaux d’Aix en 1811, et dans lequel elle rencontra Mme la comtesse de Boigne, me rappelle une anecdote qui a été souvent racontée devant moi, et qui donne bien l’idée de ce qu’était cette improvisation prodigieuse d’esprit, cette conversation à la fois naturelle et extraordinaire.
C’était un coup d’épée dans l’eau, mais elle a pu le donner.
Une phrase polie adressée par lui à Condorcet ne saurait me le faire considérer comme le promoteur ingénu d’une révolution qui sera toute à l’eau rose.
C’est ainsi qu’au temps où se composait la Nouvelle Héloïse, lui parlant du prochain mariage d’une jeune fille, il la montrait dans sa pudeur, se désolant à l’approche d’un époux : « C’est, disait-il, une eau pure qui commence à se troubler au premier souffle du vent. » Et il ajoutait, comme pour le piquer au jeu : « Dites de belles choses là-dessus. » Rousseau, en effet, répondant à l’appel, s’emparait de cette pensée et de cette image virginale, et l’employait dans la Nouvelle Héloïse à l’occasion du mariage de Claire (deuxième partie, lettre XV) : « Et, en vérité, elle est si belle, disait-il, que j’aurais cru la gâter en y changeant autre chose que quelques termes. » Il aurait même mieux fait de n’y pas changer un seul mot.
Sept de ces vaisseaux étaient pour le moment rentrés à Portsmouth sous les ordres de l’amiral Montagu ; il en restait vingt-six avec les douze frégates dans les eaux de Brest.
Nous n’en pouvons parler, du reste, que d’après Lemontey qui avait lu la pièce et qui en reproduit indirectement les termes : « Ces mœurs naïves et pures, dit-il, ce mélange d’études graves et de gaieté innocente, ces devoirs pieux et domestiques, cette princesse qui, aussi simple que la fille d’Alcinoüs, ne connaît de fard que l’eau et la neige, et qui, entre sa mère et son aïeule, brode des ornements pour des autels ; tout retraçait dans la commanderie de Wissembourg l’ingénuité des temps héroïques. » L’idylle ici venait singulièrement en aide à la politique.
Comment les eaux, les mers et cette vie immense qui y flotte, plus aveugle, plus sourde, plus disséminée qu’ailleurs ?
Pour qui ne lirait que ces lettres de Marie-Thérèse à sa fille, il semblerait en ressortir clair comme le jour que le roi de Prusse, « ce mauvais voisin », ainsi qu’elle l’appelle, a tous les torts dans cette affaire de la succession bavaroise, qu’il se conduit en despote et en astucieux politique qui n’aspire qu’à semer la zizanie en Europe et à tout brouiller pour pêcher en eau trouble.
Je voulus le faire transporter au fort, il s’y refusa : il me dit que le bruit des eaux, dans leur chute, était pour lui une jouissance, et l’abondance de la pêche une ressource ; que puisque je lui assurais une ration de pain, de vin et de viande salée, il n’avait plus rien à désirer.
Mais avec lui les absents bientôt avaient tort : il aima mieux oublier l’Orient, laisser le conquérant lointain courir ses risques, et rester à Paris ministre d’une politique qui était sans doute beaucoup trop révolutionnaire et propagandiste pour qu’il l’acceptât sincèrement, mais à laquelle aussi, à travers les remaniements des petits États, il y avait beaucoup pour lui à gagner, à pêcher, comme on dit, en eau trouble.
Il ne tarda pas à en sortir ; et son père, en le mariant, lui transmit sa charge de maître des eaux et forêts.
Que d’efforts il a fallu pour s’en éloigner et remettre le navire dans d’autres eaux !
D’autres plongeaient leur corps délabré, tombant en loques, dans une eau du pays qui jouissait, disait-on, de vertus merveilleuses.
Il entre dans une Compagnie des eaux de Paris, affaire qui le met aux prises avec Mirabeau ; puis il se lance en chevalier généreux dans l’affaire Kornman, où il ne retrouve pas le succès des Mémoires contre Goëzman.
Partout il porte sa netteté de conception et la vigueur de son éloquence : Beaumarchais en apprend quelque chose, lorsqu’ils représentent des intérêts opposés dans l’affaire des eaux de Paris.
Les Hébreux supposaient le ciel semblable à un miroir d’airain (Job, XXXVII, 18), soutenu par des colonnes (Job, XXVI, 11); au-dessus sont les eaux supérieures, qui en tombent par des soupapes ou fenêtres munies de barreaux, pour former la pluie (Ps., LXXVIII, 23 ; Gen.
Elle en prend n’importe où, sans remords, dans la prostitution et dans l’adultère, comme on boit de l’eau à une mare lorsque l’on est altéré.
Il est peu de sujets de la vie, et surtout de ceux qui tiennent à l’habitude des choses de l’esprit, sur lesquels il ne nous offre quelque pensée ingénieuse, brillante et polie, une de ces expressions qui reluisent comme une pierre gravée antique, ou comme les blancs cailloux qu’il se plaît à nous montrer en nous décrivant les belles eaux de ses fontaines.
J’ai quelquefois pensé à ces liens charmants en voyait deux cygnes sur une eau limpide se laisser emporter au courant.
Les rhétoriques, inquiètes des contagions et des pestes qui sont dans le génie, recommandent avec une haute raison, que nous avons louée, la tempérance, la modération, le « bon sens », l’art de se borner, les écrivains expurgés, émondés, taillés, réglés, le culte des qualités que les malveillants appellent négatives, la continence, l’abstinence, Joseph, Scipion, les buveurs d’eau ; tout cela est excellent ; seulement il faut prévenir les jeunes élèves qu’à prendre ces sages préceptes trop au pied de la lettre on court risque de glorifier une chasteté d’eunuque.
Aristote, dit-on, s’est précipité dans les eaux de l’Europe, faute de pouvoir en comprendre le flux et le reflux.
« Vous pensez donc, mon cher enfant, me dit-il, qu’on décrit une méthode par occasion au bout d’un livre, en un chapitre, ou bien un soir entre un verre d’eau sucrée et une tasse de thé ?
La vallée où nous entrons appartient tout entière au versant français des Pyrénées : c’est Ibañeta, immédiatement avant Roncevaux, qui marque la ligne de séparation des eaux ; il semblerait donc naturel que la frontière suivît cette ligne, au lieu qu’elle la dépasse et forme une boucle qui s’allonge en descendant sur le versant septentrional. […] L’« eau courante », où Turpin va puiser dans son heaume pour donner à boire à Roland, ne manque pas non plus dans la plaine. […] Mais dès qu’on a mis les deux pieds sur le pont, il se trouve assez large, et plus on avance, plus il s’élargit et plus le bruit de l’eau s’apaise. […] Le point de départ de cette transformation a été sans doute le contraste qui l’a choqué, dans le conte de Pierre Alphonse, entre la beauté du jardin verdoyant, arrosé par des eaux fraîches, habité par des oiseaux au chant délicieux, et le paysan, le vilain (rusticus) qui le possède. […] L’oiseau simplement malicieux du conte indien devient ici un être surnaturel, sorte de génie ailé, dont le chant, pendant qu’il célèbre à la fois l’amour divin et l’amour terrestre, répand sur le verger qui l’entoure, sur les eaux, sur les pelouses, sur les arbres, sur les fleurs, un doux enchantement qui les fait avec une joie toujours nouvelle couler, verdoyer, croître et embaumer.
Très liée avec Flaubert, George Sand s’ébahissait de voir le malheureux auteur de Madame Bovary suer sang et eau, crier jour et nuit son martyre, « tourner et retourner deux jours entiers un paragraphe sans en venir à bout », et presser sa malheureuse cervelle pour trouver un mot. […] Vous ne saurez vraiment ce que c’est que la vie et l’observation, que le jour où vous aurez lu les Eaux printanières, Fumées, une Nichée de gentilshommes, Mémoires d’un chasseur, etc. […] Puis avec de l’eau et des éponges poreuses purifiez les beaux thrônes et les tables. […] Puis elles purifièrent les beaux thrônes et les tables avec de l’eau et des éponges poreuses. […] Et alors le prudent Telemakhos parla ainsi le premier : Puis ensuite elles purifiaient les sièges très-beaux et les tables avec de l’eau et des éponges aux-trous-nombreux.
Lorsque le Palais Mazarin fut inondé par la folle Seine, Frémiet prit une barque, voilà tout : il arriva, juste à l’heure, et s’étonna d’apprendre que plusieurs de ses collègues avaient redouté l’eau. […] Il suffit d’un arbre qui se mire sur l’eau ; il suffit des chaumières qui, le soir, s’endorment ; il suffit des labours qui boivent la pluie. […] Comme une eau limpide prendrait les souillures d’un vase où vous la verseriez, pareillement la vérité s’altérerait à entrer dans un esprit que des idées fausses encombrent. […] Tu désires de considérer les dosages divers de l’eau, de la terre, de l’air et du feu ! […] Il suppose que l’un des matelots, Euphorion, ôta la cire de ses oreilles et se jeta résolument à l’eau.
Les eaux du déluge commencent à tarir, et déposent sur les sommets des montagnes ou entraînent avec elles les cadavres des hommes et des animaux. […] Hercule les écrase de sa massue ; Vulcain, le dieu du feu, chasse devant lui la nuit et les vapeurs impures, tandis que Borée et les Zéphyrs sèchent les eaux de leur souffle et achèvent de dissiper les nuages. […] Cependant du haut des cieux la Victoire descend pour couronner Apollon vainqueur, et Iris, la messagère des dieux, déploie dans les airs son écharpe, symbole du triomphe de la lumière sur les ténèbres et sur la révolte des eaux. […] La foule est son domaine, comme l’air est celui de l’oiseau, comme l’eau celui du poisson. […] Non, c’est la voix de l’eau qui chante.
Du philosophisme assez vigoureux sous sa traduction symbolique : « Eau captée, vous êtes comme la sagesse des hommes. […] Narcisse, se mirant dans l’eau courante, ne saurait toucher son image sans en brouiller les contours et ne peut que la contempler à distance. […] André Gide avait au moins une notion de la lumière, puisqu’elle imaginait le chant des oiseaux comme un de ses effets, ainsi que la chaleur qui caressait ses joues, et puisqu’il lui paraissait tout naturel que l’air chaud se mît à chanter, de même que l’eau bout près du feu.
Il sera libéral de sa bourse, de ses peines, de sa souffrance, de son sang ; il ne s’en vantera pas ; il n’aura ni orgueil, ni vanité, ni affectation, ni dissimulation ; la bravoure et la bonté surabonderont dans son cœur, comme la bonne eau dans une bonne source. […] Ses filles aspirent à l’élégance et confectionnent des eaux de toilette dans la poêle à frire. […] Ces jolis minois fripons, ces fins corsages de guêpe, ces bras mignons plongés dans un nid de dentelles, ces nonchalantes promenades parmi des bosquets et des jets d’eau qui gazouillent, ces rêveries galantes dans un haut appartement festonné de guirlandes, tout ce monde délicat et coquet est encore charmant.
Malgré ses phrases sur la modération et sur la vertu, Diderot, aussi faux que Sénèque, dont il a écrit la vie, — car l’eau va toujours à la rivière et les menteurs vont aux menteurs, — Diderot, l’auteur des Bijoux indiscrets, cette saloperie, était, de nature, un cynique, qui cachait parfois son cynisme sous un grand geste de père noble ou sous une ronde bonhomie. […] Même les contemporains, vautrés dans ce matérialisme qui montait alors, comme l’eau du déluge, jusqu’aux frises du siècle, n’accueillirent point avec admiration ce livre, où, sous ces formes insupportablement déclamatoires qui ravissaient l’esprit faux du xviiie siècle, Diderot étale — il faut bien en convenir — la plus ambitieuse médiocrité. […] Il ressemblait à ces fontaines qui dégorgent incessamment et puissamment une eau violente par la bouche de quelque figure de lion rugissante, et toute oreille était pour lui une vasque qu’il inondait et qu’il remplissait, ce déclamateur, improvisateur, prédicateur, — car, chose étrange !
Il semble qu’en elle les immenses efforts de tout un siècle déraison pure échouent misérablement en d’infiniment petits raisonnements raisonnables, en de dérisoires recettes pratiques d’éducation, faible et fade cours d’eau tiède où elle tâchait d’endiguer le flot de l’avenir, juste quand ce vaste flot, épandu naguère en généreuses ondes, mais lassé maintenant d’user des graviers polis et stériles, allait longtemps stagner jusqu’à se corrompre dans ses profondeurs, pour franchir tout-à-coup, grossi goutte à goutte par le tribut des générations, ses limites trop étroites à cette heure terrible de la tempête. — Dès le commencement du xviiie siècle le christianisme catholique a perdu sa vitalité. […] L’un l’énerverait, lui ferait respirer sa capiteuse essence de parisine, l’autre le reposerait en un bain d’eau marine, parmi les senteurs du varech amer ; l’un serait la ville et l’autre la villégiature ; ou bien, si l’un l’assassinait, le tartarinait de rire à Tarascon ou sur les Alpes, l’autre, avec ses grands horizons et ses « légendes naïves », lui rendrait l’âme sereine, fraîche, — et de cette arrangement qui se fâcherait84 ?
L’écriture qui ne prend pas de près contact avec la parole se dessèche comme la plante sans eau. […] Mettons un aqueduc d’eau bourbeuse. […] Daudet défendait puissamment le vin contre les attaques insidieuses des buveurs d’eau. […] Daudet, et qualifierai-je le romanticophobe des Œuvres dans les Hommes de buveur d’eau ? […] Boulenger, prenait le nom de Cuisine-Club, les gastronomes de fibre française auraient vite fait de flairer dans ce nom la sauce en flacons et les légumes à l’eau.
Elle se composait de jeunes gens qui avaient nagé en pleine eau bourbeuse dans le canal universitaire. […] l’art simple, qui consiste à rendre ses idées sans les faire danser sur la phrase, comme disait Jean-Paul Richter, l’art qui se fait modeste, l’art qui dédaigne les vains ornements du style, l’art qui creuse et qui cherche la nature comme les ouvriers qui cherchent l’eau dans un puits artésien, cet art qui est une utile réaction contre les faiseurs de ronsardisme (ajoutez de ponsardisme), de gongorisme (connais pas !) […] Mettez le canard dans les eaux du cygne, il demandera à aller barboter de nouveau dans sa mare. […] Cet adorable et douloureux petit conte est une perle de l’eau la plus pure… Puis vient une histoire qui a fait grand bruit en France, celle de Chien-Caillou (1845).
Et, peintre fier de mon génie, Je savourais dans mon tableau L’enivrante mélancolie Du métal, du marbre et de l’eau... […] Il est fait enfin de la séduction qu’exerce sur un Français l’intelligence critique unie à la flamme poétique : comme Boileau, comme Voltaire, comme Musset, ce poète de Paris est un enfant de Paris, à qui certains torrents des montagnes, certaines eaux sacrées sont interdites, mais qui a reçu en partage le don de la lucidité ; qui, lorsqu’il a voulu faire le métier de critique, l’a fait supérieurement ; qui a tourné cette lumière critique sur lui-même, sur nous-mêmes, sur sa ville, sur la Ville, et dont la Muse malade, consciente et triste se lève, de la colline de Rastignac, au-dessus du peuple de quatre millions d’âmes, comme la figure de la poésie contraire, la Geneviève de la montagne opposée (de la rive gauche si on veut), lève la sienne au-dessus d’un paysage épuré et d’une nature pacifiée. […] Des brises chaudes montaient, avec je ne sais quelles odeurs confuses et quelle musique aérienne, du fond de ce village en fleurs ; les dattiers, agités doucement, ondoyaient avec des rayons d’or dans leurs palmes ; et l’on entendait courir, sous la forêt paisible, des bruits d’eau mêlés aux froissements légers du feuillage, à des chants d’oiseaux, à des sons de flûte. […] La partie critique de l’œuvre de Taine est également démodée : cette vaste machine de Marly ne nous amène plus d’eau. […] Ce style se développe avec quelque lourdeur et quelque lenteur, mais sa substance est saine, forme une épaisseur d’eau transparente où le regard aperçoit jusqu’au fond les créations délicates de la vie intérieure.
auprès d’elle aussi, Ada, belle fille pour les parties de campagne et les folies au bord de l’eau. […] Il a énergiquement lutté contre l’eau adverse ; son échine ployait et le tronçon de pin sur lequel il s’appuyait se courbait. […] Elle voudrait se mirer à la surface de l’eau, turbulente et qui s’échappe. Elle plonge ses doigts dans l’eau et ne la peut captiver. L’eau se sauve comme le temps.
Donc parions que Dieu est. — Mais je n’ai pas la foi. — La foi s’acquiert, crie Pascal, « prenez de l’eau bénite, abêtissez-vous ». […] Voilà l’envers du « prenez de l’eau bénite, abêtissez-vous ». […] Il a tout sacrifié à ce plaisir-là, et son œuvre littéraire et son œuvre politique, étrange prodigue qui aura dépensé ses plus belles heures à faire des ricochets sur l’eau, avec des pièces d’or ! […] Vraisemblablement la conversation d’alors était comme celle de Rivarol, un feu d’artifice tiré sur l’eau, — quelque chose de pétillant, d’étincelant, de rayonnant au regard, et puis, pour finir, la froideur glacée. […] Il vous a montré la source d’où jaillit le fleuve, la quantité d’eau épandue, la configuration du terrain.
Cette malice de Rosny, tout heureux ce jour-là de voir son maître marié et pouvant désormais espérer des héritiers légitimes, ç’avait été de faire verser aux filles de la reine du vin blanc en guise d’eau, ce qui les avait grisées.
Victor Le Clerc et dont était le spirituel Ampère, Beyle, qui était de la partie pour la campagne romaine, égayait les autres, à chaque pas, de ses saillies, et excellait surtout à mettre ses doctes compagnons en rapport avec l’esprit des gens du pays : « Le ciel, disait-il, m’a donné le talent de me faire bien venir des paysans. » Sa prompte et gaillarde accortise, sa taille déjà ronde et à la Silène, je ne sais quel air satyresque qui relevait son propos, tout cela réussissait à merveille auprès des vendangeurs, des moissonneurs, des jeunes filles qui allaient puiser l’eau aux fontaines de Tivoli comme du temps d’Horace.
Le marchand qui va à deux pas de la capitale respirer la poussière de la grande route, et qui se croit dans une Tempé ; les belles qui chaque année courent aux eaux, aux bains de mer, et y portent avec elles leur frivole tourbillon, passent et posent devant lui tour à tour.
L’orateur ne montrait pas seulement la maison d’Autriche abaissée et réduite aux abois, mais encore les éléments soumis et assujettis par ce génie supérieur des quatre éléments, toutefois, un seul était pris au propre, l’eau de la mer retenue par la digue de La Rochelle ; les autres éléments ne figuraient qu’à l’état métaphorique : c’était le feu de la rébellion éteint avec celui de l’hérésie ; c’était l’air devenu plus serein, et la terre étonnée de tant de prodiges.
Quelle illusion dans cette gloire qu’on prétend éterniser, dans ce bâtiment de quarante mille écus élevé à l’une des extrémités de la pièce d’eau, vraie pagode où se lisaient gravés sur le marbre tous les noms des visiteurs en ces quatre années, avec cette inscription de la façon de l’abbé Barthélemy : « Étienne-François, duc de Choiseul, pénétré des témoignages d’amitié, de bonté, d’attention dont il fut honoré pendant son exil par un grand nombre de personnes empressées à se rendre en ces lieux, a fait élever ce monument pour éterniser sa reconnaissance. » Que cet obélisque ministériel, inauguré dix ans avant la Révolution française, à quelques pas du volcan qui va engloutir la monarchie, est petit, vu de loin, et qu’il manque son effet dans la perspective !
L’eau, comme on dit, va à la rivière.
« Le mérite de Manzoni (en 1819) est d’avoir saisi la saveur de l’eau dont le public italien avait soif. » Usons du libre conseil pour la France.
Il est bien convenu que nous ne verrons ni statues, ni bronze, ni marbre ; je bouche tous les jets d’eau de notre parc ; je me voue, pour vous plaire, aux arbres sauvages, aux fontaines rustiques : placeant ante omnia sylvae !
C’est, redirai-je d’après lui à mon tour, c’est être ou avoir été amis, avoir eu, à une certaine heure de jeunesse, des sentiments vifs et purs en commun ; avoir eu volontiers mêmes vues à l’horizon, mêmes perspectives et mêmes vœux, par le seul fait de cohabitation morale dans un même navire ; ou, dans des navires différents, avoir fait route quelque temps de conserve sous les mêmes astres, avoir jeté l’ancre un moment côte à côte dans de belles eaux ; s’être connus et goûtés dans des saisons meilleures ; sentir, même en s’éloignant, qu’on est, malgré tout, de la même escadre, qu’on flotte ensemble, qu’on est à bord d’une même expédition, qui s’appelle pompeusement le siècle, qui comprend environ un quart, de siècle et qui, pour la plupart, n’ira guère au-delà.
Son eau bénite de Cour opéra souvent des merveilles : c’était au point qu’on aimait mieux être refusé par lui qu’agréé par un autre.
Vous ajournez un jugement que vous avez déjà l’un des premiers énoncé, mais vous en ajournez le développement : c’est que vous voulez vous ménager et nager entre deux eaux.
Forçé de se tenir sur la défensive, il la rendit aussi active et aussi nuisible à l’ennemi que possible, soit qu’il attaquât des camps isolés, des partis de fourrageurs, soit qu’il comblât des cours d’eau et coupât la navigation des rivières.
Il a les intentions tout à fait bonnes pour le service du roi ; mais comme ses manières ne sont pas tout à fait polies, Sa Majesté vous recommande de bien vivre avec lui et de ne pas relever de petites choses dont un homme moins sage que vous aurait peine à s’accommoder. » Catinat devait se concerter avec M. de Quincy pour tout ce qui pourrait incommoder Mons, et pour empêcher qu’il n’y entrât rien ; il dut démolir des moulins à eau qui étaient dans les dehors et qui servaient à alimenter la place de farines.
Il y a d’affreux détails dans ce que l’auteur raconte de la charité d’Élisabeth, notamment lorsqu’elle boit cette eau (p. 213), pour se punir d’un dégoût.
La bonne vieille Jeanne, diseuse de bonne aventure, que la noce rencontre, jette un moment quelque nuage à ces fronts sereins, par des paroles obscures et funèbres ; mais « sur un petit ruisseau clair comme de l’argent, que peuvent deux gouttes d’eau trouble ?
La rose en rendant son odeur, Le soleil donnant son ardeur, Diane et le char qui la traîne, Une Naïade dedans l’eau, Et les Grâces dans un tableau, Font plus de bruit que ton haleine.
Il avait gravé au fond du cœur l’antique programme d’Horace : « Quem tu, Melpomene, semel… Celui, ô Melpomène, que tu as regardé d’un œil d’amour au berceau, celui-là, il ne sera ni lutteur aux jeux de Corinthe, ni vainqueur aux courses d’Élide, ni général triomphateur au Capitole ; mais il aimera les belles eaux de Tibur, et il trouvera la gloire par des vers nés à l’ombre des bois. » Et dans le cas présent d’ailleurs, il y avait mieux, il y avait de quoi tenter et retenir toute l’ambition d’une âme de poëte.
Que de fois on passe dans la vie, sans le deviner, à côté de ce qui en ferait le charme, comme le navigateur franchit les eaux d’une terre aimée du ciel qu’il n’a manquée que d’un horizon et d’un jour de voile26 !
Il est encore, disent les intendants, « le premier habitant » ; c’est un prince qu’ils ont peu à peu dépouillé de ses fonctions publiques et relégué dans ses droits honorifiques et utiles, mais qui demeure prince40 À l’église il a son banc et droit de sépulture dans le chœur ; les tentures portent ses armoiries ; on lui donne l’encens, « l’eau bénite par distinction ».
Il lui apprend le patriotisme par le récit des exploits de ses héros, qui quittent leur royaume paternel, qui s’arrachent des bras de leurs mères et de leurs épouses pour aller sacrifier leur sang dans des expéditions nationales, comme la guerre de Troie, pour illustrer leur commune patrie ; il lui apprend les calamités de ces guerres dans les assauts et les incendies de Troie ; il lui apprend l’amitié dans Achille et Patrocle, la sagesse dans Mentor, la fidélité conjugale dans Andromaque ; la piété pour la vieillesse dans le vieux Priam, à qui Achille rend en pleurant le corps de son fils Hector ; l’horreur pour l’outrage des morts dans ce cadavre d’Hector traîné sept fois autour des murs de sa patrie ; la piété dans Astyanax, son fils, emmené en esclavage dans le sein de sa mère par les Grecs ; la vengeance des dieux dans la mort précoce d’Achille ; les suites de l’infidélité dans Hélène ; le mépris pour la trahison du foyer domestique dans Ménélas ; la sainteté des lois, l’utilité des métiers, l’invention et la beauté des arts ; partout, enfin, l’interprétation des images de la nature, contenant toutes un sens moral, révélé dans chacun de ses phénomènes sur la terre, sur la mer, dans le ciel ; sorte d’alphabet entre Dieu et l’homme, si complet, et si bien épelé dans les vers d’Homère, que le monde moral, le monde matériel, réfléchis l’un dans l’autre comme le firmament dans l’eau, semblent n’être plus qu’une seule pensée et ne parler qu’une seule et même langue à l’intelligence de l’aveugle divin !
Il y a un sentiment fin et juste de la couleur, si l’on peut dire, des expressions et des langues dans la démonstration que Boileau entreprend ; mais la gaucherie de la forme est plus sensible que la vérité du fond, et l’on ne peut s’empêcher de sourire, quand on voit Boileau alléguer Thalès, Empédocle et Lucrèce, pour faire valoir la dignité de l’eau dans l’antiquité, quand il ne veut pas qu’Homère ait parlé du « boudin » : un « ventre de truie », à la bonne heure, voilà qui est noble ; ou quand enfin il aime mieux mettre aux pieds de Télémaque une « magnifique chaussure » que de « beaux souliers », et maintient obstinément qu’il ne faut pas appeler « cochons » ou « pourceaux » les animaux de nom « fort noble », en grec, dont avait soin le « sage vieillard » Eumée, qui n’était pas un « porcher ».
« Au bord de l’eau » (le début), dans Des vers, 894.
Claude, cette nuit-là, a passé une heure à regarder l’eau du haut du pont des Saints-Pères ; il est enfin rentré ; mais, à peine couché, il s’est échappé du lit.
Ça croit avoir une âme, l’auteur des Chiens de faïence, et que son âme c’est de l’eau.
c’est un flacon d’eau de Cologne qui verse ce poison mortel !
Elle se décida à aller aux eaux du Mont-Dore dans l’été de 1803, et, de là, à partir pour Rome, où elle rejoignit M. de Chateaubriand ; peu après son arrivée, elle y mourut.
Dans un voyage de santé qu’elle fit aux eaux de Forges pendant l’été de 1742, elle écrivit plusieurs lettres au président Hénault et en reçut bon nombre de lui.
Je plongeai mes mains dans la mer ; je portai à ma bouche son eau sacrée sans en sentir l’amertume. » Oh !
Ainsi, sans prétendre éclaircir quelques obscurités d’allusion, nous tenons l’aveu essentiel : quand M. de Chateaubriand s’en allait au tombeau de Jésus-Christ pour y honorer le berceau de sa foi, pour y puiser de l’eau du Jourdain, et, en réalité, pour y chercher des couleurs nécessaires à son poème des Martyrs, le voilà qui confesse ici qu’il allait dans un autre but encore.
Il surabonde, il nage, il semble en plein dans ses eaux.
Il était grand jour : mes yeux, en s’ouvrant, virent l’eau, la verdure, un paysage admirable.
Femme, elle avait des mots énergiques pour peindre cette satiété de tourments et d’angoisses qu’elle s’était donnés et qu’il lui fallait dissimuler par le sourire : « J’en ai quelquefois, comme l’on dit, jusqu’à la gorge. » On sait son mot, un jour qu’elle regardait de petits poissons bien malheureux et bien agités dans leur bassin propre et dans leur eau claire : « Ils sont comme moi, ils regrettent leur bourbe. » Mais c’est à Saint-Cyr que Mme de Maintenon aimait surtout à se réfugier dès qu’elle avait un moment, à se cacher, à s’épancher, à se plaindre, à se faire plaindre, à rêver sur son incompréhensible élévation, à se montrer en victime portant en elle seule tous les chagrins du royaume : « Oh !
Sous le tranquille azur du plus doux des climats, Une humble maisonnette aux bords de la Dumas ; Une humble maisonnette aux persiennes blanches, Sous un réseau fleuri de liane et de branches, Où je puisse, à midi, rêvant au bruit des eaux, Mêler ma poésie aux rimes des oiseaux ; À droite, une rizière où le bengali chante ; D’un vieil arbre à mon seuil l’attitude penchante, Où, tous les ans, viendront les martins au bec d’or Suspendre leurs doux nids et couver leur trésor ; Un jardin clos d’un mur où rampe la raquette ; Une ruche, et des fleurs dont l’oiseau vert becquette La poudreuse étamine et l’odorant émail ; Des buissons d’orangine aux perles de corail ; Un parterre où toujours j’aurai de préférence Des roses du Bengale et des muguets de France ; Une verte tonnelle à l’ombre des lilas, Dont la fleur m’est si douce et meurt si vite, hélas !
Et d’abord, dans le courant de l’été de 1707, Mme de Montespan mourut aux eaux de Bourbon.
Elle nous a montré et décrit son salon à Aix-la-Chapelle, pendant un voyage qu’y fit Joséphine en revenant des eaux de Plombières, dans l’été de 1804.
À propos d’un changement de lune et d’un redoublement de pluie au mois de mai, il lui écrit : « Cette abondance d’eau accélère la pousse des végétaux ; elle est nécessaire à leurs progrès et à leurs besoins : le mois de mai est un enfant qui veut toujours téter. — Je t’embrasse, mes amours, mes délices, mon mois de mai. » Ce mois de mai, qui est un enfant qui veut toujours téter, n’est-il pas la plus gracieuse et la plus parlante image, surtout adressée à une jeune femme, à une jeune mère ?
L’extinction de voix, qui l’envoya aux eaux de Bourbon dans l’été de 1687, fit paraître l’intérêt que les plus grands du royaume prenaient à lui.
Venise et son originalité de site et de mœurs, le sang si doux de ses heureux habitants, cette vie molle et de volupté silencieuse qui se berce et glisse sur les eaux, y est délicieusement retracée.
Néanmoins ils demeurent à l’état naissant, toujours près de reparaître et aussitôt disparaissant, comme une légère ondulation qui agite la surface des eaux calmes.
Voir aussi le conte du làri reconnaissant, fidèle à son maître dans le malheur, conformément au proverbe bambara que l’on doit boire de l’infusion amère de cailcédrat avec celui qui vous a fait boire jadis de son eau miellée.
V Le premier volume, en effet, ne nous avait pas mis simplement l’eau à la bouche pour le second.
On est content de voir cette belle source jaillir abondamment, à flots clairs et rapides, et lancer son eau impétueuse entre les rives solides du lit le plus régulier et le mieux construit.
Il serait absurde que la vapeur d’eau ayant poussé le piston une première fois, elle ne pût le pousser une seconde fois, toutes les conditions étant exactement les mêmes.
« Telle qu’une fleur solitaire est née dans l’enclos d’un jardin, à l’abri des troupeaux, loin du soc de la charrue, caressée par les souffles de l’air, fortifiée par le soleil, nourrie des eaux du ciel, objet d’envie qu’ont souhaité bien des enfants et des jeunes filles ; et puis, s’est-elle fanée sous le doigt léger qui la cueille, nuls enfants, nulles jeunes filles ne l’ont plus souhaitée : telle la vierge, tant qu’elle reste pure, est chérie des siens.
Autant vaudrait soutenir qu’il a créé le jour pour blesser nos regards, la nuit pour nous tourmenter de visions sinistres, les fleurs pour répandre des miasmes, les fruits pour se changer en poisons, les animaux pour nous dévorer, les prairies, les futaies, les vallons, les eaux jaillissantes, pour nous apprendre à le renier et à le maudire. […] Dans quelle eau bénite noircie à la fumée des encensoirs avait-il trempé sa plume ? […] En effet, il nous semble difficile, en fait de réalisme, qu’il y ait quelque chose au-delà des Parents pauvres ; et, par une coïncidence significative, il s’est trouvé que ces deux romans, publiés en 1847, ont été le dernier ouvrage complet de l’auteur, et le dernier succès du roman-feuilleton, que la Révolution de février, en fille aussi ingrate que celles de Goriot, allait mettre au pain et à l’eau. […] Dans les ténèbres des berceaux, Son effrayant doigt invisible Écrit sous leur crâne la Bible Des arbres, des monts et des eaux. […] Il semblait que ces impalpables germes de doctrine et de loi, déposés dans quelques intelligences grossières, au bord d’un lac inconnu, dussent se disperser à tous les vents, comme le sable de ces déserts, comme l’écume de ces eaux.
Les eaux s’épuisèrent et le soleil darda quelques rayons. […] D’ailleurs, il lui faut pour cela épouser une vieille veuve, assommer, jeter à l’eau son rival, puis le tirer de l’eau et chaparder une médaille de sauvetage. […] Il épouse Mme Bolomey, renonce à la police municipale, et recommence du bonheur dans sa maison du bord de l’eau. […] Le soleil que nous voyons éclaire l’eau, l’air et la terre d’un même rayon. […] Cette contrainte eut pour conséquence une maladresse : il renversa son verre et fit sur la nappe une longue tache d’eau rougie.
Il fut un des premiers qui entreprit de graver à l’eau forte les sujets d’une certaine étendue. […] Au milieu du bassin est une Néréïde(b) Qui tâche d’essuyer son poil toujours humide, Et qui semblant presser ce poil & long & beau, En fait toujours sortir de l’écume & de l’eau. […] Le cours des eaux de l’hypocrène Du Cygne & de la Canne un jour fixa les vœux ; Mais l’un, pour se baigner, fit choix de la Fontaine ; L’autre de ses marais fangeux a-10. […] Ce n’était point un torrent impétueux qui renverse, qui entraîne avec violence tout ce qu’il rencontre : c’était un fleuve majestueux, mais tranquille, dont le cours serpentait à travers une prairie émaillée de fleurs, & dont les eaux transparentes roulaient sur un sable d’or. […] Repoussée au siege de Paris qu’elle avait promis de prendre en trois jours, chassée honteusement par le Roi qu’elle a secouru, elle se réfugie au sein d’une épaisse forêt pour y vivre de gland & d’eau.
La « vallée boisée » d’aujourd’hui était une tourbière ; le cours d’eau limpide et lent, une rivière rapide et dangereuse ; forêts immenses, peu de cultures, une vie étroite et bloquée, une population énergique, dévote et un peu sombre. […] Certes le petit Racine jouit vivement du charme des eaux, des arbres, des prairies. […] À cause, vous entendez bien, des feuillages qui se reflètent dans l’eau. […] Lorsque, chez les Phéaciens, Ulysse demande son chemin à une jeune fille qui porte une cruche d’eau : Il ne se peut rien de plus beau, dit Racine, que la justesse et l’exactitude d’Homère. […] Dans les déserts de l’Oxus, après une longue marche à pied, mourant de soif, il refuse un peu d’eau qu’un des siens vient de trouver, et la répand par terre, parce qu’il ne peut la partager avec ses soldats.
Dans ce val solitaire et sombre Le cerf qui brame au bruit de l’eau, Penchant ses yeux dans un ruisseau. […] Ils ont voulu secouer le joug de cette Providence qui veille sur nous, afin d’entretenir dans l’indépendance une liberté indocile qui les porte à vivre à leur fantaisie, sans crainte, sans retenue et sans discipline. » Mais, comme une eau qui sort en bouillonnant d’une source trop pleine, les idées de Bossuet se pressent ici les unes les autres, et si leur abondance ne le détourne pas lui-même de son principal dessein, cependant l’ensemble du discours a quelque chose encore de confus ou d’irrégulier. […] Il fallait ajouter que, comme ces grands fleuves qui roulent majestueusement leurs eaux dans un large et profond canal… ne sont qu’un filet d’eau dans leur origine, de même les fameuses expéditions qui tiennent en suspens une partie du monde ne sont quelquefois qu’une bagatelle dans leur première cause. » C’est ce que Voltaire a également retenu. Sur les traces de Bayle, il a comme élevé à la hauteur d’un principe de critique générale la philosophie des petites causes, et tandis que Montesquieu, pour n’avoir été curieux que de ce qu’il appelait « l’allure générale des choses », réduisait l’histoire à un problème de mécanique ou tout au plus de physiologie, Voltaire, en y réintroduisant les « maîtresses du prince Eugène » ou le « verre d’eau de la duchesse de Marlborough », y a fait vraiment rentrer du même coup la diversité, l‘animation, et la vie, — d’ailleurs, aussi sagement défiant que l’auteur de l’Esprit des lois est crédule. […] Désespéré, le marquis s’en allait se noyer, quand, « en arrachant ses habits pour se jeter à l’eau, il brisa un ruban que La Force lui avait donné sous prétexte de sa santé — c’est Madame qui parle, — et aussitôt qu’il ne l’eut plus sur lui, il se trouva tout autre et très indifférent à l’égard de La Force ».
De même pour la taille des métaux, le tissage des vêtements, les textes législatifs, les routes et conduites d’eau, et autres connaissances, devenues essentielles et consubstantielles à l’existence civilisée. […] Car le génie poétique contracte avec l’eau les mêmes rapports mystérieux que la civilisation. […] Les gens boivent une eau plate ou bourbeuse, ou des liqueurs de goût incertain, et de composition suspecte, qu’ils prennent pour d’exquis élixirs. […] Prenez un révolutionnaire, trempez-le, pendant plusieurs années, dans l’eau tiède des honneurs et de la fortune, et vous obtenez un libéral. […] L’avantage assez bref de cabinets avec chasse d’eau et siège hyperciré, de cuvettes de porcelaine à bascule et de la circulation d’eau chaude (d’ailleurs souvent bouchée) est amplement compensé par l’infamie de la cuisine dite « européenne » et de ses sauces toutes préparées, de ses vins fabriqués et nocifs.
Naudé ne boit naturellement que de l’eau et n’a jamais goûté vin. […] « Les eaux de Sainte-Reine ne font point de miracles.
Que la source soit maudite, et que tous ceux dont son eau touchera les lèvres, soient épris, comme lui, de l’amour d’eux-mêmes165. » Les courtisans et les dames y boivent, et voici venir une sorte de revue des ridicules du temps, arrangée, comme chez Aristophane, en farce invraisemblable, en parade brillante. […] Puis quand il a bu l’eau de la fontaine, devenu tout à coup impertinent, téméraire, il propose à tous venants un tournoi de belles manières.
Ainsi, le christianisme, et toute la poésie, et toute la sagesse, tiennent dans quelques mots virgiliens, comme un champ de roses dans un flacon, le bruit de l’océan dans un coquillage, ou le ciel dans une goutte d’eau. […] Elle faisait la chronique de la cour, la chronique de la ville, la chronique de la littérature et du théâtre, la chronique de la province, la chronique de la campagne, la chronique des villes d’eaux, la chronique de la guerre, la chronique des crimes célèbres, la chronique de la mode, la chronique familière et de confidences personnelles— toutes les chroniques qu’on fait encore.
Avec la tempête du Vaisseau Fantôme, qui dure tout un acte, tour de force inouï réussi avec un bonheur insolent, avec le pélerinage de Tannhaeuser, avec les torrents d’eau du Rheingold, les torrents de feu de la Walkyrie, les bruits de la forge et les murmures de la forêt dans Siegfried, c’est, dans toute son œuvre un véritable envahissement de musique descriptive ; ce qui n’empêche pas les wagnériens de combattre au premier rang des ennemis du genre pittoresque. […] Oui, il y a des torrents d’eau dans le Rheingold, et des torrents de feu dans la la Walkure, et des bruits de forge, et des murmures de forêt dans Siegfried, et, dans tous les drames, des peintures prodigieuses, donnant, comme le veut M.
Selon la théorie des créations distinctes pour chaque espèce, il faudrait admettre, par exemple, que tel mollusque a été créé avec de brillantes couleurs pour habiter une mer chaude ; mais que tel autre est devenu plus vivement coloré, par suite de variations, quand il s’est étendu dans des eaux moins froides ou moins profondes. […] Une espèce de Canard de l’Amérique du Sud, le Microptère d’Eyton (Anas brachyptera ou Micropterus brachypterus) ne peut que battre la surface de l’eau avec ses ailes, qui sont presque réduites au même état que celles du Canard domestique d’Aylesbury.
Sans doute elle a été limitée dans ses effets tant qu’elle s’est bornée à utiliser des énergies actuelles et, en quelque sorte, visibles : effort musculaire, force du vent ou d’une chute d’eau. […] Tel, le Rhône entre dans le lac de Genève, paraît y mêler ses eaux, et montre à sa sortie qu’il avait conservé son indépendance.
Puissé-je avoir un petit foyer, un toit simple et qui a ne craigne point la fumée, une source d’eau vive auprès, et l’herbe de la prairie !
Les visites de nuit que tu faisais dans ma chambre pour savoir si j’étais sain et sauf et chaudement couché ; tes largesses du matin avant le départ pour l’école, le biscuit ou la prune confite ; l’eau odorante que ta main prodiguait à mes joues jusqu’à ce qu’elles fussent brillantes de fraîcheur et luisantes, tout cela, et ce qui fait plus chérir que tout encore, ce courant continu d’amour que rien en toi n’interrompait, que ne troublèrent jamais ces débordements et ces sécheresses que crée une humeur inégale ; tous ces souvenirs, toujours lisibles dans les pages de ma mémoire et qui le seront jusqu’à mon dernier âge, ajoutent le plaisir au devoir, me font une joie de te rendre de tels honneurs que le peuvent mes vers ; un bien fragile témoignage peut-être, mais sincère, et qui ne sera point méprisé au ciel, quand il passerait inaperçu ici-bas… Si le Temps pouvait, retournant son vol, ramener les heures où jouant avec les fleurs brodées sur ta robe, — violette, œillet et jasmin, — je les dessinais sur le papier avec des piqûres d’épingle (et toi, pendant ce temps-là, tu étais encore plus heureuse que moi, tu me parlais d’une voix douce et tu me passais la main dans les cheveux, et tu me souriais) ; si ces jours rares et fortunés pouvaient renaître, s’il suffisait d’un souhait pour les ramener, en souhaiterais-je le retour ?
« Ce n’est pas là de la science, ce n’est que ce qu’il en faut pour donner envie de la science, et en faire venir l’eau à la bouche… » — Je crois que j’ai là montré Costar en l’un de ses plus beaux jour ?
Du sein même de ses études, de ses méditations économiques, dans un séjour au château de ses pères, où il s’est retiré pour une saison, Mirabeau confesse le vice qui est celui de tout son temps et qui lui gâtera sa vie, d’ailleurs intègre : « La volupté, mon cher ami, est devenue le bourreau de mon imagination, et je payerai bien cher mes folies et le dérangement de mœurs qui m’est devenu une seconde nature ; hors de là, je suis maintenant comme un poisson dans l’eau. » À côté de cet aveu que justifieront trop les futurs scandales et les éclats de sa vie domestique, mettez la sagesse et la sobriété de Vauvenargues, à qui son peu de santé interdirait sans doute les plaisirs, mais qui en est éloigné encore plus par la haute et pure idée qu’il se fait de l’amour, par le peu de goût qu’il a pour les femmes, « celles du moins qu’il connaît ». — « Je hais le jeu comme la fièvre, et le commerce des femmes comme je n’ose pas dire ; celles qui pourraient me toucher, ne voudraient seulement pas jeter un regard sur moi. » Vauvenargues avait toujours pris l’amour au sérieux : « Pour moi, je n’ai jamais été amoureux, que je ne crusse l’être pour toute ma vie ; et, si je le redevenais, j’aurais encore la même persuasion. » C’est pour cela qu’il recommençait rarement.
La rivière traverse le tableau ; le cerf s’enfuit à la nage, poursuivi par une meute de chiens qui se sont tous jetés à l’eau et qui vont gagner l’autre rive.
Une absence, un voyage qu’elle avait fait vers ce temps aux eaux de Pougues retarda encore l’heure de l’explication.
Elle dut se borner à aller, dans l’été de 1780, aux eaux de Spa, où le roi de Suède arriva bientôt de son côté ; elle l’y attendait.
En quelque lieu qu’il s’arrête, sur quelque métairie qu’il porte ses regards, il voit tout ensemble devant lui, la vigne qui, élégamment suspendue en contre-espalier autour de chaque champ, l’environne de ses festons ; les peupliers, rapprochés les uns des autres, qui lui prêtent l’appui de leur tronc, et dont les cimes s’élèvent au-dessus d’elles ; l’herbe, qui croît au pied de ces élégants contre-espaliers et qui gazonne les bords des nombreux fossés, destinés à l’écoulement des eaux ; les mûriers qui, plantés sur deux lignes au milieu des champs, et à une distance assez grande pour ne pas les offusquer de leur ombre, dominent les moissons ; les arbres fruitiers qui, çà et là, sont entremêlés aux peupliers et à la vigne ; les blés de Turquie qui, s’élevant à six ou huit pieds au-dessus de terre, entourent leurs magnifiques épis de la plus riche verdure ; les trèfles annuels dont les fleurs incarnates se penchent sur leur épais feuillage ; les lupins dont le coup d’œil noirâtre et l’abondante végétation contraste avec la souplesse, l’élégance et la légèreté des seigles non moins vigoureux qu’eux et qui s’élèvent au-dessus de la tête des moissonneurs ; enfin, les blés dont les longs épis dorés sont agités par les vents et rappellent par leurs ondulations le doux mouvement des vagues d’un beau lac. » Le second morceau consacré aux Collines est comme un pendant au tableau des plaines ; celles-ci, dans aucun pays, ne peuvent plaire aux yeux que par l’abondance et la fertilité qui les caractérise.
Aussi toutes les lettres que nous trouvons sur eux ne sont-elles remplies que d’exhortations dont le texte est pris sur les Machabées. » M. de Chaulnay, qui était venu en mission à l’armée de Piémont, écrivait au roi le 4 mars 1692 : « Il faudra que M. de Catinat fasse encore donner une bonne touche aux Barbets, rompre les eaux et détruire les vignes et les arbres fruitiers, afin de tâcher d’extirper entièrement cette canaille… » Sachons, pour être juste, ce que les Barbets aussi étaient devenus.
Il viendra chez moi celle après-dînée, et je ne le quitterai point que je ne l’aie coule à fond. » Napoléon disait : Je connais le tirant d’eau de chacun de mes généraux, et Frédéric aussi aimait à couler à fond ses philosophes. — Ici il y a une pause dans sa lettre ; le roi reçoit la visite de Raynal et ne reprend la plume qu’après : « Enfin, j’ai vu l’auteur du Stathoudéral et du Commerce de l’Europe.
Il nous force de lever en haut les yeux, et de les attacher uniquement sur cette montagne qu’il nous faut gravir par des sentiers différents, mais aboutissant tous au même point, et qui elle-même nous fournit, dans l’abondance des eaux qu’elle fait couler de son sein fécond, tous les secours nécessaires pour parvenir à son sommet… Oh !
Ne montre pas l’eau vive à qui ne peut la boire.
Sa santé, qui ne fut jamais robuste, avait souffert dans cette campagne d’hiver, et le 8 mars 1807, du quartier général d’Osterode, Berthier avisait le ministre directeur de l’administration de la guerre « d’un congé de quatre mois pour raison de santé, accordé par l’Empereur au colonel Jomini, attaché à l’état-major impérial. » Le 9 avril, il était dans son pays natal, à Payerne, hésitant entre les eaux de Baden et celles de Schinznach.
Comme je ne me pique pas le moins du monde d’être agréable aujourd’hui, je dirai, même aux dames, toute ma pensée : « Tout le monde (c’est La Bruyère qui parle)185 connoît cette longue levée qui borne et qui resserre le lit de la Seine, du côté où elle entre à Paris avec la Marne qu’elle vient de recevoir : les hommes s’y baignent au pied pendant les chaleurs de la canicule ; on les voit de fort près se jeter dans l’eau, on les en voit sortir, c’est un amusement.
Il ne voyait pas enfin qu’entre l’idéal de la Renaissance, et l’idéal classique, ce qu’il exprimait était seulement l’idéal de sa génération, l’idéal de Bertaut et de François de Sales : Rien que le naturel sa grâce n’accompagne ; Son front lavé d’eau claire éclate d’un beau teint… Les nonchalances sont ses plus grands artifices.
Il n’y a création qu’au sens chimique où l’on dit qu’avec de l’oxygène et de l’hydrogène est créée de l’eau.
Il n’y a création qu’au sens chimique où l’on dit qu’avec de l’oxygène et de l’hydrogène est créée de l’eau.
Des yeux de la jeune fille une larme tombe, aussi précieuse, dans cette comédie implacable, que le serait un verre d’eau au milieu d’un brûlant désert.
Salomon a dit quelque part dans le livre des Proverbes : « Comme on voit se réfléchir dans l’eau le visage de ceux qui s’y regardent, ainsi les cœurs des hommes sont à découvert aux yeux des sages. » Mais il est difficile de rester prudent et sage quand on lit à ce degré jusqu’au fond dans l’âme des autres hommes ; il est difficile, même lorsqu’on n’en abuserait point pour des fins intéressées et sordides, de ne point haïr, de ne point mépriser, de ne point marquer ses propres antipathies et ses instincts ; et le faible de Saint-Simon comme homme, de même qu’une partie de sa gloire comme peintre, est de s’être livré avec passion et flamme à tous les mouvements de réaction que cette seconde vue, dont il était doué, excitait en lui.
C’est ce que se demande un jour la muse de Jasmin, à une heure de rêverie où l’image de cette pauvre fille, avec sa grâce de vierge sous les haillons, lui revenait en pensée, et, après avoir bien quêté de ses nouvelles à travers champs, s’être bien enquis « à travers vignes et pâquerettes », voici ce qu’elle a trouvé : Un jour, près des bords que la rivière du Lot baise fraîchement de son eau claire et fine, dans une maisonnette cachée sous les ormes touffus, tandis qu’à la ville prochaine les jeunes garçons tiraient au sort, une jeune fille pensait, puis priait Dieu, puis se levait et ne savait tenir en place.
Arrivé à cette première grande division, animal, végétal et minéral, il en viendra à distinguer dans le règne animal les animaux qui vivent sur la terre d’avec ceux qui demeurent dans l’eau ou ceux qui s’élèvent dans l’air : Ensuite mettons-nous à la place de cet homme, continue Buffon, ou supposons qu’il ait acquis autant de connaissance et qu’il ait autant d’expérience que nous en avons, il viendra à juger des objets de l’histoire naturelle par les rapports qu’ils auront avec lui ; ceux qui lui seront les plus nécessaires, les plus utiles, tiendront le premier rang ; par exemple, il donnera la préférence dans l’ordre des animaux au cheval, au chien, au bœuf, etc.
Semblable à une eau qui se perd dans le sable si elle n’est arrêtée par une digue, l’homme n’est fort qu’autant qu’il est retenu. » Se croyant déjà revenu à Lycurgue ou à Moïse, il proposait sérieusement à l’administration de faire faire des éditions châtiées et exemplaires des auteurs célèbres : on extrairait de chaque auteur ce qui est grave, sérieux, élevé, noblement touchant, et on supprimerait le reste : « Tout ce qui serait de l’écrivain social serait conservé, tout ce qui serait de l’homme serait supprimé ; et si je ne pouvais faire le triage, dit-il, je n’hésiterais pas à tout sacrifier. » Telle est la pensée que M. de Bonald énonçait en 1796, qu’il continuera d’énoncer et d’exprimer pendant toute la Restauration, et qu’il voudra réaliser tant bien que mal en 1827, comme président du dernier Comité de censure : peut-on s’étonner de la suite d’après le début ?
Après ces quatre premières années de la régence, durant lesquelles le mouvement d’impulsion donné par le cardinal de Richelieu continua de pousser le vaisseau de l’État sans qu’il fût besoin d’imprimer de secousse nouvelle, après ces quatre années de calme parfait, de sourire et d’indulgence, on entre, sans s’en apercevoir d’abord, dans de nouvelles eaux, et un nouveau souffle peu à peu se fait sentir : c’est le souffle des réformes, des révolutions.
Un crachement de sang, un voyage aux eaux, la mort de son beau-père, M.
Grimm, présent au récit, lui avait dit en riant : Illustre citoyen et cosouverain de Genève (puisqu’il réside en vous une part de la souveraineté de la république), me permettez-vous de vous représenter que, malgré la sévérité de vos principes, vous ne sauriez refuser à un prince souverain les égards dus à un porteur d’eau, et que, si vous aviez opposé à un mot de bienveillance de ce dernier une réponse aussi brusque, aussi brutale, vous auriez à vous reprocher une impertinence des plus déplacées ?
Il n’y a pas d’analyste plus profond des ravages et des périls de l’amour que l’auteur de Fumée et Eaux printanières ; il n’y eu a pas qui sache mieux toutes les nuances de dégradation par où passent les âmes faibles, intelligentes et lasses de ces infamies de la vie spirituelle, les ratés ; ses âmes féminines, avec leurs bontés d’enfants et leurs vues de captives, leurs variations, leurs perfidies, leurs candeurs et leurs infinies douleurs, sont pénétrées et décrites par Tourguénef avec un charme, une intimité qu’on ne se lasse ni de goûter ni d’admirer.
L’étal de la Sarriette, la vitrine de la belle Lisa, la fromagerie, les poissons d’eau douce de Claire Méhudin, les gibiers et les volailles, sont décrits en des paragraphes pleins de faits, que résume une phrase-thème, de volupté, d’obscénité, de perfidie, de grâce, de fermentante chaleur.
Ces ondes, ce flux et ce reflux, ce va-et-vient terrible, ce bruit de tous les souffles, ces noirceurs et ces transparences, ces végétations propres au gouffre, cette démagogie des nuées en plein ouragan, ces aigles dans l’écume, ces merveilleux levers, d’astres répercutés dans on ne sait quel mystérieux tumulte par des millions de cimes lumineuses, têtes confuses de l’innombrable, ces grandes foudres errantes qui semblent guetter, ces sanglots énormes, ces monstres entrevus, ces nuits de ténèbres coupées de rugissements, ces furies, ces frénésies, ces tourmentes, ces roches, ces naufrages, ces flottes qui se heurtent, ces tonnerres humains mêlés aux tonnerres divins, ce sang dans l’abîme ; puis ces grâces, ces douceurs, ces fêtes, ces gaies voiles blanches, ces bateaux de pêche, ces chants dans le fracas, ces ports splendides, ces fumées de la terre, ces villes à l’horizon, ce bleu profond de l’eau et du ciel, cette âcreté utile, cette amertume qui fait l’assainissement de l’univers, cet âpre sel sans lequel tout pourrirait ; ces colères et ces apaisements, ce tout dans un, cet inattendu dans l’immuable, ce vaste prodige de la monotonie inépuisablement variée, ce niveau après ce bouleversement, ces enfers et ces paradis de l’immensité éternellement émue, cet infini, cet insondable, tout cela peut être dans un esprit, et alors cet esprit s’appelle génie, et vous avez Eschyle, vous avez Isaïe, vous avez Juvénal, vous avez Dante, vous avez Michel-Ange, vous avez Shakespeare, et c’est la même chose de regarder ces âmes ou de regarder l’Océan.
Le silence n’en est pas troublé. » « Le martin-pêcheur, dit-elle encore, rase l’eau de son aile ; éclair bleuissant, il en suit le cours. » Le livre entier est de ce style, de ce pinceau, sans défaillance.
Voltaire ravi la comparait à un feu d’artifice perpétuel tiré sur l’eau, et Chênedollé, qui en a parlé quarante ans après l’avoir entendue, à une cascade inépuisable, éclatante et sonore, qui a ses courbes et ses arcs-en-ciel, et qui jaillit pour retomber et pour rejaillir.
Pierrot passe devant une femme qui lave le carreau de sa porte : après lui avoir dévalisé les poches, il veut faire passer dans les siennes l’éponge, le balai, le baquet et l’eau elle-même. — Quant à la manière dont il essayait de lui exprimer son amour, chacun peut se le figurer par les souvenirs qu’il a gardés de la contemplation des mœurs phanérogamiques des singes, dans la célèbre cage du Jardin-des-Plantes.
Si cette maxime vous jette à l’eau pour sauver un homme, vous êtes vertueux.
Edmond Scherer m’a paru représenter assez exactement cette catégorie d’esprits qui s’en allèrent au fil de l’eau, tourmentés du désir de le remonter. […] La Palestine s’empare de lui : sans doute, la Galilée, ravagée par l’islamisme, est devenue navrante et morne ; mais derrière ses paysages désolés, le voyageur retrouve en imagination la belle contrée qu’elle fut autrefois, sa campagne abondante, ses fruits, ses eaux fraîches, ses fermes ombragées de figuiers, ses jardins en fleurs sous des noyers et des grenadiers. […] Le moraliste, sans doute, reste dans les mêmes eaux que le psychologue ; mais il y nage autrement. […] « Se sauvant d’une bête féroce, ce voyageur saute dans un puits sans eau ; mais, au fond de ce puits, il voit un dragon, la gueule ouverte pour le dévorer. […] Et combien d’autres flottent derrière eux, combien se sont jetés à l’eau pour les imiter, qui, plus faibles, seront engloutis au premier tournant !
Soyons convaincus que, là où le crocodile est régulièrement dangereux, l’indigène s’abstient comme nous d’entrer dans l’eau : l’animal lui fait alors peur, avec ou sans maléfice. […] Mais il trouvera plus simple de se supposer presque redescendu à terre, et de verser alors un peu d’eau : cette minime partie de l’événement le reproduira tout entier, si l’effort qu’il eût fallu lancer de la terre au ciel trouve moyen de se faire suppléer et si la matière intermédiaire est plus ou moins chargée — comme elle pourrait l’être d’électricité positive ou négative — d’une disposition semi-physique et semi-morale à servir ou à contrarier l’homme. […] Les gestes du nageur paraîtraient aussi ineptes et ridicules à celui qui oublierait qu’il y a de l’eau, que cette eau soutient le nageur, et que les mouvements de l’homme, la résistance du liquide, le courant du fleuve, doivent être pris ensemble comme un tout indivisé.
Une âme si pure qu’on voit jusqu’au fond d’elle et qu’elle ressemble à une eau où il y a des débris et des feuilles, mais point de vase : débris et feuilles sont dans l’eau et ne l’ont pas salie. […] marquer sur ses deux joues mes doigts encore humides d’eau carminée ? […] Un pétale tournoie à la surface d’une eau orageuse. […] Il fait froid : le gel gagne sur l’eau vivante. […] Un châle gris aux genoux, les pieds sur un coussin d’eau chaude, il trempe ses mains dans un bain de sable que chauffe une lampe.
Il dit que le coupable ainsi purgé, s’il a compris les choses ainsi, s’il a accepté l’expiation comme une eau lustrale, devient un saint, et si saint que de posséder ses os, sa dépouille mortelle, son sépulcre, la terre où il sera mort et où il aura voulu être enterré sera éternellement agréable aux dieux et protégée par eux. […] Il a encore le temps d’attendre. — René Benoist. » V. — « Permettez à l’un de vos plus fidèles lecteurs de joindre sa petite goutte d’eau à l’océan de littérature qui va déferler sur votre table de travail… A mon avis, Philaminte, dans les vers dont on se met en peine, ne me paraît ni sérieuse ni ironique, mais seulement inquiète et dépitée. […] A tel endroit (Acte I, scène VI) le manuscrit portait : J’ai craint au bord de l’eau vos visions cornues ; Que, cherchant quelque rime et lisant dans les nues, Vous n’eussiez, à vos pieds, de faux pas en faux pas Trouvé quelque impromptu que vous ne cherchiez pas. Le texte imprimé a donné : J’ai craint au bord de l’eau vos visions cornues ; Que, cherchant quelque rime et lisant dans les nues, Pégase imprudemment la bride sur le cou N’eût voituré la muse aux filets de Saint-Cloud. […] C’est Delavigne qui avait opéré la rencontre et le mélange des eaux (Casimir Delavigne a été considéré comme romantique jusqu’en 1830 et dans son discours de réception à l’Académie française (1825), il se réclame très nettement de l’école nouvelle).
Demain viendra le jour, demain, désabusée, La trop fidèle Noun, par la douleur brisée, Rejoindra sous les eaux l’ombre d’Ophélia. […] Même sans en boire, si, jeune, vous vous regardez dans son limpide miroir, vous vous voyez vieux ; si, vieux, vous vous regardez dans ses eaux fantastiques, vous vous voyez jeune. […] En buvant de l’eau de cette source, je deviens quinquagénaire immédiatement. […] Et voilà seulement une petite partie des belles choses qu’Émile Veyrin avait tirées de ce sujet : une dame qui était malade, qui ne voulait pas se soigner et qui est morte en partant pour les eaux d’Aix. […] Le quatrième acte sera intitulé dans les théâtres de province, qui aiment à donner des titres aux actes : « La Goutte d’eau ».
C’est que je n’aime pas à porter de l’eau à la rivière, ni ne me soucie des gens bien portants. […] dit Dupin, on ne se sert pas de l’eau du baptême pour les usages domestiques. […] Il dormait, s’agitant dans un lourd cauchemar, Ainsi qu’une eau bouillante au fond d’un coquemar. […] Moi je suis l’âne au vrai, l’âne qui, sur son dos, Porte où l’on veut qui veut, au bois, aux villes d’eaux, Au marché ; de l’enfant le souffre-douleur morne, Qu’on croît dur comme bois et têtu comme borne, Le jouet de la fable, enfin l’une baudet, De tous les ignorants l’éternel sobriquet, Concierge, âne, est-ce assez29 ? […] Nul état, nous dit-on, en soi ne déshonore, Et puisque pour office, on me fait « balayer « Ce ruisseau, le bon goût », nettoyer ses eaux pures De ce que le mauvais y vient jeter d’ordures.
Comme l’éloquence de réunion publique (tous les arts de la parole sont frères), elle n’a d’influence sur le public que si elle porte de l’eau à la rivière, je veux dire si elle dit ce que pense déjà le public. […] Saintsbury, ni à aller chercher les origines de la critique chez les Grecs, à distinguer le visage qu’elle prend dans les humanistes de la Renaissance, à suivre le genre au cours d’une évolution qui a beaucoup plus la figure de méandres indécis que celle de ce Grand Canal aperçu par Brunetière, et sur lequel on a fait jouer, de Villemain à Brunetière lui-même, tant de grandes eaux oratoires. […] Songez qu’il cite avec complaisance ces lignes de Victor Cousin où apparaît en un jour si cru la tare du génie oratoire : « Oui, messieurs, donnez-moi la carte d’un pays, sa configuration, ses climats, ses eaux, ses vents et toute sa géographie physique ; donnez-moi ses productions naturelles, sa flore, sa zoologie et je me charge de vous dire a priori quel sera l’homme de ce pays, et quel rôle le pays jouera dans l’histoire, non pas accidentellement, mais nécessairement ; non pas à telle époque, mais dans toutes ; enfin l’idée qu’il est appelé à représenter. » Cela était déclamé et gesticulé vers 1827 dans une chaire de Sorbonne, au milieu d’un enthousiasme qui renouvelait autour de Cousin, sur la montagne Sainte-Geneviève, les jours d’Abélard : mais vraiment Gaultier-Garguille sur le Pont-Neuf et Mangin devant sa boîte à crayons ont-ils jamais fait montre d’un charlatanisme plus effronté ? […] Un artiste de trop de goût risquera même de ne pas oser assez, de ne pas savoir se lancer en pleine eau pour nager. […] Ronsard et Du Bellay se veulent avec fierté Vendômois et Angevin, mais ensuite, pour trouver un homme qui se dise joyeusement et amoureusement d’un certain pays, qui accorde sa phrase à certaines inflexions locales et maternelles de ciels, de montagnes et d’eaux, comme Racine accorda ses vers sur des visages et des corps d’actrices, il faut attendre Jean-Jacques Rousseau, citoyen de Genève.
Comme l’on voit les étourneaux Tournoyant aux rives des eaux, Lorsque la première froidure Commence à ternir la verdure, Leur nombre, qui surprend les yeux, Noircit l’air et couvre les cieux ; Tels, ou plus épais, ce me semble, Se pressant, cheminoient ensemble Tous les Amours de l’Univers. […] Quoique je nage en pleine eau, comme vous voyez, et qu’après avoir traversé les plus beaux fleuves d’Allemagne, j’aie presque aujourd’hui toute la mer Baltique pour me promener, je me trouve loin de la Brévone comme un vrai poisson hors de l’eau ; car, de nous autres Tritons à un poisson, il y a peu de différence… Vous croyez bien que pas une des Muses n’a voulu me faire compagnie dans le Nord, et que des demoiselles nourries au doux climat de la Grèce ne s’embarquent pas volontiers pour la mer Glaciale… Les intérêts du Nord, de l’Allemagne, de l’Angleterre et de la Hollande sont les plus galantes choses dont je m’entretienne.
Lorsque je vis le fils jeter de l’eau bénite sur le cercueil, je fus frappé jusqu’au vif du tableau de cette chaîne de bénédictions tantôt douces, tantôt déchirantes, qui lie toute la famille humaine et qui la liera jusqu’à la fin des choses.
Il oubliait que le nombre et la mesure plaisent naturellement aux hommes, que la cadence est aussi un rythme intérieur de la pensée ; que le chant, dans quelques organisations prédestinées, est un don facile, involontaire, une source qui jaillit d’elle-même et se renouvelle sans cesse : Je chantais, mes amis, comme l’homme respire, Comme l’oiseau gémit, comme le vent soupire, Comme l’eau murmure en coulant.
MM. de Goncourt sont deux frères jeunes encore, qui ont débuté dans les lettres il y a une douzaine d’années ; qui se sont dès le premier jour jetés en pleine eau pour être plus sûrs d’apprendre à nager ; qui y ont très-bien réussi ; qui ne se sont jamais séparés, qui ont étudié, écrit, vécu ensemble ; qui ont mis tout en commun, y compris leur amour-propre d’auteur ; que cette union si étroite et qui leur semble si facile distingue et honore ; qui ont fait chaque jour de mieux en mieux ; qui, adonnés aux arts, aux curiosités, aux collections tant de livres que d’estampes, ont acquis du xviiie siècle en particulier une connaissance intime, approfondie, secrète, aussi délicate et bien sentie que détaillée.
Les sources de l’amour, sous nos lèvres avides, Comme une eau fugitive au printemps ont tari.
Un jour, passant dans la rue, un peu d’eau lui tomba sur la tête de la fenêtre d’une maison : il commanda qu’on brûlât la maison et qu’on mît à mort tous les habitants.
Leur visage est lavé à l’eau rose.
Corneille, en resserrant le Cid, en a fait saillir plus nettement quelques-unes des beautés un peu contraintes et les a lancées en gerbe au soleil comme par un jet d’eau nerveux et rapide.
. — La Bruyère a fait une remarque où, sans avoir l’air d’y toucher, il dit leur fait aux bourgeoises de son temps : « Tout le monde connaît cette longue levée qui borne et qui resserre le lit de la Seine, du côté où elle entre à Paris avec la Marne qu’elle vient de recevoir : les hommes s’y baignent au pied pendant les chaleurs de la canicule ; on les voit de fort près se je ter dans l’eau, on les en voit sortir : c’est un amusement.
83 On parvint enfin à l’embarquer, ainsi que d’autres compagnons d’infortune, pour Carthagène, sur un mauvais bâtiment marchand qui n’était pas même lesté et qui faisait eau de toutes parts.
Ce n’était pas seulement, comme on disait, un coup d’épée dans l’eau que sa malencontreuse Lettre, c’était pis par rapport à lui : comme il avait 77 ans et pas de lendemain, ses amis lui avaient fait faire, pour fin de carrière, une désastreuse campagne98.
Du Bellay veut encore qu’on use de l’adjectif substantivé, comme le « liquide des eaux, le vide de l’air, le frais des ombres, l’épais des forêts ».
Les soirées de cette belle saison des Orientales se passaient innocemment à aller voir coucher le soleil dans la plaine, à contempler du haut des tours de Notre-Dame les reflets sanglants de l’astre sur les eaux du fleuve ; puis, au retour, à se lire les vers qu’on avait composés.
Doux ornement de la nature, Viens me retracer sa beauté ; Parle-moi de la liberté, Des eaux, des fleurs, de la verdure ; Parle-moi du bruit des torrents, Des lacs profonds, des frais ombrages Et du murmure des feuillages Qu’agite l’haleine des vents.
Joubert, dans une de ses plus vraies et de ses plus ingénieuses pensées, a dit : « Les savants fabriqués sont les eaux de Baréges faites à Tivoli.
En Grèce, en Italie, telle bourgade, telle petite ville, étaient déjà chrétiennes ; la foule se rendait dans les basiliques transformées en églises ; les préaux, les chemins, étaient semés de croix ; pourtant, au fond du bois, au détour d’un angle caché par les chênes verts, sur le bord du ruisseau ou du lac, on voyait se mirer paisiblement dans l’eau la grotte des Nymphes, grande et grosse roche, ronde par le dehors, au dedans de laquelle se cachaient quelques statuettes en pierre de Naïades ou de Napées, les bras nus,… les cheveux épars sans tresses,… le visage riant et la contenance telle comme si elles eussent ballé ensemble 6.
Dans le courant même des idées du moment et de celles de l’avenir, quelques esprits eurent l’honneur, les premiers, de noter avec précision ce qu’on appelle en mer le changement des eaux, de signaler ce qui devait se poursuivre et ce qui devait se modifier, de marquer, en un mot, la transition sans rupture entre les idées du xviiie siècle et les pensées de l’âge commençant.
Mme de Krüdner s’inquiète ; les heures s’avancent, l’orage ne cesse pas ; sa tête se monte : elle se figure le sentier qui longe la Brenta envahi par les eaux, son mari luttant avec le péril ; elle veut l’en arracher.
est comme ces sortes d’arbres qui ne donnent leur baume pour les blessures des hommes, que lorsque le fer les a blessés eux-mêmes. » Et encore, pour exprimer qu’il n’est point de cœur mortel qui n’ait au fond sa plaie cachée : « Le cœur le plus serein en apparence ressemble au puits naturel de la savane Alachua : la surface en paraît calme et pure ; mais, quand vous regardez au fond du bassin, vous apercevez un large crocodile, que le puits nourrit dans ses eaux. » Les funérailles d’Atala sont d’une rare beauté et d’une expression idéale.
Je donnerais mille vies comme une goutte d’eau, pour vous voir tel que Dieu vous veut. » XXXIII Le duc de Bourgogne en allant prendre le commandement de l’armée de Flandre, dans la campagne de 1708, passa par Cambrai.
Et rappelez-vous avec quelle franchise hardie d’expressions Boileau nous présente tous ces plats qui défilent : le potage où paraît un coq, les deux assiettes, … Dont l’une était ornée D’une langue en ragoût de persil couronnée, L’autre d’un godiveau tout brûlé par dehors Dont un beurre gluant inondait tous les bords ; le rôt où trois lapins de chou s’élevaient Sur un lièvre flanqué de six poulets étiques ; et le cordon d’alouettes, et les six pigeons étalés sur les bords du plat, Présentant pour renfort leurs squelettes brûlés ; et les salades : L’une de pourpier jaune et l’autre d’herbes fades, Dont l’huile de fort loin saisissait l’odorat, Et nageait dans des flots de vinaigre rosat ; et le jambon de Mayence, avec les deux assiettes qui l’accompagnent, L’une de champignons avec des ris de veau, Et l’autre de pois verts qui se noyaient dans l’eau.
Pierre Corneille, né le 6 juin 1606, à Rouen, était d’une famille de robe ; il étudia le droit, fut reçu avocat, et acquit une charge d’avocat général à la table de marbre du Palais (eaux et forêts, et navigation).
Ses petits mots perfides n’amoindrirent pas l’Histoire naturelle, et il ne parut pas à son avantage quand il entreprit une lutte ouverte : il essaya de contredire une des plus belles hypothèses de Buffon, qui voyait dans les coquillages et les poissons trouvés au haut des Alpes une preuve du séjour des eaux de la mer en des temps reculés ; Voltaire soutenait que les coquillages étaient tombés des chapeaux des pèlerins qui revenaient de la Terre Sainte, et que les arêtes de poissons étaient les restes de leur déjeuner.
Mlle Sibylle de Férias, élevée au milieu des bruyères de Bretagne par un grand-père et une grand’mère qui ressemblent à deux pastels fanés et très anciens, veut, à cinq ans, chevaucher un cygne pour aller sur l’eau, apprivoise un fou, catéchise son vieux curé et l’amène à un sentiment plus élevé de sa profession, vient à Paris et, amoureuse d’un beau jeune homme qui s’appelle Raoul, tombe en syncope le jour où il déclare « qu’il a le malheur de ne pas croire ».
Quelques seigneurs, venus aux Pyrénées pour y prendre les eaux, s’y voient retenus par le débordement du gave béarnais.
À ce compte, un poète qui suera sang et eau pour faire de mauvais vers sera sacré grand poète de préférence à un poète heureusement doué, dont le génie et la facilité diminueront le mérite.
Si je dis, pour faire de l’hydrogène, faites agir un acide sur du zinc, je formule une règle qui réussit ; j’aurais pu dire, faites agir de l’eau distillée sur de l’or ; cela aurait été aussi une règle, seulement elle n’aurait pas réussi.
Ce qu’elle veut c’est se voir belle, et peu lui importe, pourvu qu’elle y mire sa beauté, la source naturelle des bois ou le miroir par lequel un artifice subtil lui montre son visage divin dans la limpidité cristalline d’une eau fictive et imaginaire.
L’air, la terre et les eaux sont des champs de destruction.
que de fois j’ai vu, par pensée, le chevalier et son fidèle cygne sur les eaux.
Les idoles antiques, dont les dieux nouveaux procédaient, furent comme jetées dans les eaux dormantes du Léthé.
Mais voilà que ce dialogue nous rappelle, comme un air, joué sur un piano de salon bourgeois, pourrait rappeler quelque idéale mélodie de harpe éolienne suspendue aux branches d’un pin d’Italie dans l’Isola bella, le duo virginal de la Ninon et de la Ninette d’Alfred de Musset : Ninon L’eau, la terre et les vents, tout s’emplit d’harmonies Un jeune rossignol chante au fond de mon cœur.
Mais l’humanité aime mieux se débarrasser et jeter à l’eau de temps en temps une bonne partie de son bagage ; elle aime mieux oublier, sauf à se donner la peine ou plutôt le plaisir de réinventer, de refaire et de redire, dût-elle redire et refaire moins bien ; mais elle veut, avant tout, avoir à exercer son activité.
L’écriture, l’orthographe, la danse, à dessiner, à peindre, à travailler de l’aiguille, elle apprit tout, nous dit Conrart, et elle devinait d’elle-même ce qu’on ne lui enseignait pas : Comme elle avait dès lors une imagination prodigieuse, une mémoire excellente, un jugement exquis, une humeur vive et naturellement portée à savoir tout ce qu’elle voyait faire de curieux et tout ce qu’elle entendait dire de louable, elle apprit d’elle-même les choses qui dépendent de l’agriculture, du jardinage, du ménage, de la campagne, de la cuisine ; les causes et les effets des maladies, la composition d’une infinité de remèdes, de parfums, d’eaux de senteur, et de distillations utiles ou galantes pour la nécessité ou pour le plaisir.
Je ne sais pas quel mets nous eût paru meilleur que nos raves et nos châtaignes ; et en hiver, lorsque ces belles raves grillaient le soir à l’entour du foyer, ou que nous entendions bouillonner l’eau du vase où cuisaient ces châtaignes si savoureuses et si douces, le cœur nous palpitait de joie.
Le style le plus décharné est parfois vivant ; une goutte d’eau ressuscite le rotifère desséché ; une lueur d’imagination restitue aux mots glacés leur valeur émotionnelle.
Desdemona chante la chanson du saule sous lequel l’eau entraîne Ophélia.
Pendant que ceci se passe à Londres, le percement de l’isthme de Panama est remplacé par une guerre, la coupure de l’isthme de Suez dépend d’un Ismaïl-Pacha quelconque ; une commandite entreprend la vente de l’eau du Jourdain à un louis la bouteille ; on invente des murailles qui résistent à tous les boulets, après quoi on invente des boulets qui détruisent toutes les murailles ; un coup de canon Armstrong coûte douze cents francs ; Byzance contemple Abdul-Azis, Rome va à confesse ; les grenouilles, mises en goût par la grue, demandent un héron ; la Grèce, après Othon, reveut un roi ; le Mexique, après Iturbide, reveut un empereur ; la Chine en veut deux, le Roi du Milieu, tartare, et le Roi du Ciel (Tien-Wang), chinois… — Ô terre !
Qui doute que la chasse sur l’eau, l’enchantement de la Table, 1 la merveille2 du Labyrinthe ne soient encore de leur invention ?
Rien ne berce mon cœur oppressé ni l’abri presque inespéré de ce manoir de Brestenbergw qui vous accueille avec ses fenêtres d’idylle et ses délicatesses de boiseries anciennes, ni au bout du lac cet antique fief prodigieux qui sommeille sur les eaux comme la Silhouette intacte d’un Géant-Chevalier ni tout près de moi la présence d’une amie attentive, née au pays des tulipes et qui portant au bout d’une longue tige un peu raide le délicieux calice de son visage, semble la sœur même de ces fleurs maladroites et belles.
Peut-on rien lire de plus ridicule que le commentaire de Despréaux sur la première ode de cet auteur, et ses efforts pour travestir en sublime le mélange bizarre que le poète grec fait dans la même strophe, de l’eau, de l’or, et du soleil avec les jeux olympiques ?
……………………………………………… Je lus dans leur regard, j’écoutai leur parole, ……………………………………………… Tel qu’un enfant, au pied d’une haie et d’un mur, Entendant les passants vanter un figuier mûr, Une rose, un oiseau qu’on aperçoit derrière, Se parler de bosquets, de jets d’eau, de volière, Et de cygnes nageant dans un plein réservoir, Je leur dis : « Prenez-moi dans vos bras, je veux voir !
Son imagination de poète marque cette tradition comme les lignes de peupliers marquent la nappe d’eau souterraine. […] Personne plus qu’elle ne s’est inspiré d’autrui, et cependant le problème de ses « sources » ne se posera jamais, car elles sont remplacées par des filets innombrables, par une eau à fleur de terre, par le reflet des hommes et le passage de leurs propos. […] Si le puritanisme de la Vieille-Genève n’avait pas infligé à la fille de Necker une longue quarantaine, on imaginerait, sur la rive du lac, le monument un peu déclamatoire d’une femme emphatique et puissante, le front ceint de son turban, comme à la place de la Concorde une statue de Pradier, sous sa couronne de tours, et parmi les eaux jaillissantes qui se rafraîchiraient de dialogue et de vie, quatre figures qui, à des titres divers, représentent dans les lettres la compagnie (on l’entendrait presque aussi au sens militaire) de Mme de Staël : Constant, Sismondi, Bonstetten et Barante. […] Ce nocturne de Lamartine a la mollesse de l’écharpe lactée sur la terre et les eaux, il est une vision déroulée dans une moiteur élyséenne et tendre, la sensation de la poussière cosmique où nous flottons, de l’espace vivant où vogue la planète. […] La Bénédiction de Dieu dans la solitude, écrite à Saint-Point, est peut-être la poésie la plus pleine, la plus ubéreuse de Lamartine, du propriétaire, du chef de famille et du poète, et dont on touche les profondeurs de santé et de tradition : de grosses racines humaines sous un feuillage qui vibre avec la présence des siècles, le simple tableau d’une journée patriarcale à la campagne, l’acte de vivre solennisé longuement par une musique sans fin, et l’épaisseur ici bien sentie des milliers d’Harmonies non écrites sous l’Harmonie chantée. — L’Occident, strophes de bronze et d’or, paix du jour sur la terre et dans l’âme, — l’Hymne à la Douleur, chef-d’œuvre de la poésie morale et des beaux vers gnomiques, — Jehovah ou l’Idée de Dieu, oratorio qui s’émeut lentement jusqu’à l’épanouissement d’une fin splendide. — Le Chêne où la poésie suit la vie végétative, cachée, lente et longue de l’arbre, — l’Humanité morceau de grande peinture bolonaise, avec son merveilleux portrait de vierge, ses vers suaves et caressés, l’hymne à la Vierge-Mère d’où naît l’homme-esprit, — l’Idée de Dieu et son finale de lumière et de foi, le Souvenir d’enfance ou la Vie cachée, confidence abondante et pleine comme l’eau qui coule, apogée, dans toute la poésie française, de l’épître familière, poésie d’arrière-saison qui est notre Vieillard du Galèse et où tient toute cette poésie des racines terriennes, cette gentilhomie (comme on dit prudhomie) de campagne, qui repassera dans Mistral et aussi dans Barrès, Éternité de la Nature, Brièveté de l’homme, ode pure qui n’est surpassée en France par aucune autre, roseau pensant de Pascal agrandi par le lyrisme jusqu’à l’ampleur du chêne et de l’olivier
C’est une âme que l’eau scie dans le rocher du rivage, c’est une âme que ce jus de raisin qui jaillit sous le pressoir. […] Comme l’eau caressait doucement le rivage ! […] Le vent ride, sous l’yeuse, Le sombre miroir des eaux. […] J’ai souvent dit que la raison n’était bonne qu’à nous faire noyer quand nous tombions à l’eau. […] De ses invisibles réseaux Nul ne suit la trame azurée, Nul ne s’informe où vont ses eaux Dans la forêt désaltérée.
… Mais le Destin s’y oppose, et l’eau pâle du Styx les emprisonne de ses neuf replis. » Imaginez ce que ferait de cela le pinceau de M. […] À cause de l’eau qui a passé sous les ponts. […] Ophélie ne tomberait plus dans l’eau en faisant des bouquets, mais peut-être s’immolerait avec le poignard des princesses grecques. […] Il est vrai que, de son côté, l’auteur de Hernani est quelque peu parent de l’auteur du Cid, — et que le romantisme lui-même a quelque rapport avec la littérature du temps de Louis XIII, — autant que cela est possible à travers deux siècles et après qu’il a coulé tant d’eau sous les ponts. […] Enfin, Anissia découvre le magot dans les vêtements du mourant… Maintenant, Marfa peut venir… Petr meurt ; les commères arrivent. « Il faut appeler les anciennes ; il faut apprêter le corps… Y a-t-il de l’eau dans le chaudron ?
Chacun de ses vers « frémit, pleure et s’épand comme les cascatelles d’eau vive qui tremblent et bondissent dans les forêts ». […] Et l’on aurait tort de croire qu’ils versent de l’eau dans le tonneau des Danaïdes : ils n’ont point offensé Némésis et, pour un crime, ne sont pas condamnés à un effort inutile. […] Claudel croit deviner que son lecteur sue sang et eau pour déchiffrer ses vains rébus, inutile sueur ! […] La troisième, « le cœur lourd d’amour comme une rose pleine d’eau, laisse aller au pas le grison, et la grâce d’un de ses genoux remonté cache avec pudeur la gêne de l’autre ». […] L’assassinat s’est fait, comme une espèce de duel immonde, sur les berges de la Seine : et l’on a jeté le cadavre dans l’eau du fleuve.
Un cygne se lamente, attaché par l’aile à la surface d’un lac dont les eaux sont gelées éternellement. […] Les jeux des nuages, les mouvements des eaux, les agitations humaines, ce sont maintes scènes variées du seul Drame éternel. […] Dans l’Eau de Jouvence, Prospero, après qu’il a comparé la nature à un aveugle semeur, montre le progrès réalisé par la modification des organes. […] L’Eau de Jouvence est l’éloge de la science, le symbole du changement que seule la science peut réaliser. […] J’inspectai la chambre, j’examinai les fermetures, je me plongeai la tête dans un baquet d’eau froide — toujours contre les hallucinations — et j’invitai mes hôtes à faire comme moi.
Elle n’avait rien sur elle, pas même un gant ou une pantoufle qui ne fût marqué de ce signe ; bien plus, elle en paraissait si superstitieusement éprise, qu’elle était assise les jambes croisées… Un peu plus loin était la figure d’un homme qui regardait avec des yeux pleins d’horreur un bassin d’argent rempli d’eau. […] J’y pus distinguer des personnages revêtus d’habits glorieux avec des couronnes sur leurs têtes, les uns passant parmi les arbres, d’autres couchés au bord des fontaines, d’autres reposant sur des lits de fleurs, et j’entendis une harmonie confuse de chants d’oiseaux, d’eaux murmurantes, de voix humaines et d’instruments mélodieux. — La joie entra dans mon cœur à la vue d’une apparition si délicieuse.
Sous sa lumière, la terre réfléchit les objets comme l’eau. […] Il est fouetté, enfermé au pain et à l’eau dans une chambre écartée.
Mais ni les malheurs futurs des Troyens, de ma mère Hécube elle-même, ni ceux du roi Priam et de mes frères ne me touchent autant que ton propre sort, quand un Grec féroce t’entraînera tout en pleurs, privée de ta douce liberté ; quand dans Argos tu tisseras la toile sous les ordres d’une femme étrangère, et que, forcée par l’inflexible nécessité, tu iras chercher l’eau des fontaines de Messéide ou d’Hypérée. […] Le sang coule comme l’eau du Simoïs et du Scamandre.
Mille infortunes avaient traversé ses jours remplis de durs labeurs… Personne, durant cinquante ans, ne s’était occupé de son âme… Il avait toujours eu des maîtres pour lui vendre l’eau, le sel et l’air, pour lever la dîme de ses sueurs, pour lui demander le sang de ses fils ; jamais un protecteur, jamais un guide… Au fond, que lui avait dit la société ? […] Ainsi ce corps de l’Église nous apparaît divinement humain… Le dogme des Indulgences n’est pas l’abri de la paresse : il est le dogme des douces condescendances envers la fragilité humaine… Quand nos mains sont pures, elles sont magnifiquement transformées ; elles deviennent le vase qui peut répandre à larges ondes l’eau du rafraîchissement… Ainsi nous pouvons, par la prière et les bonnes œuvres, descendre dans ce formidable purgatoire, etc.
. — Car il s’en faut que tous les états de conscience viennent se mêler à leurs congénères, comme des gouttes de pluie à l’eau d’un étang. […] Mais le plus souvent cette impression, au lieu d’ébranler ma conscience entière comme une pierre qui tombe dans l’eau d’un bassin, se borne à remuer une idée pour ainsi dire solidifiée à la surface, l’idée de me lever et de vaquer à mes occupations habituelles.
Et ce qu’il y a derrière la charmille qui tremble, l’eau qui chante, le nuage qui passe ? […] Voici sa phrase : « Elle est (la nature) l’incarnation d’une pensée et redevient pensée, de même que la glace devient eau et vapeur.
Il serait chez lui sur terre comme dans l’air et dans l’eau. » Et c’était à qui rirait de ces êtres manqués, à qui décréterait quelque réforme. […] Le cheval fut muni de magnifiques nageoires ; mais ses poumons ne lui permettaient pas de respirer dans l’eau ; cet appendice inutile ne fit que l’enlaidir. […] Il lui arrive de se laisser envahir par la vie de la nature environnante, au point qu’il lui semble vibrer avec le rayon de soleil, frémir avec la feuille du tremble, courir avec l’eau de la rivière. […] Il aperçoit un lac bleu et gris, qu’un souffle de vent effleure et moire ; ce lac devient vivant pour lui et fait aussitôt surgir en son esprit des réminiscences de la vie de l’âme : « À peine un frisson, le frisson tendre qu’éveillerait une bouche invisible, court sur cette eau pâmée, dont la félicité mélancolique touche le cœur comme un sentiment humain42. » À chaque instant le songeur saisit ou imagine ainsi de secrètes correspondances entre les hommes et les choses. […] Pourquoi faut-il encore qu’à propos d’arbres reflétés dans une rivière, l’auteur, en véritable abstracteur de quintessence, nous oblige à chercher le mot de cette énigme : « Ne paraît-il pas qu’un esprit de tendresse unisse à l’eau qui passe cette image des arbres qui ne passent pas, et que cette image soit reçue comme une caresse en même temps qu’elle est donnée comme un désir46 ?
Elle représente la ligne de partage des âmes, de même qu’au point de vue du relief du sol se dessine une ligne de partage des eaux. […] En dehors du plein air, les moyens principaux mis en œuvre dans cette pédagogie seraient la gymnastique et l’eau froide. Sur des organismes ataviquement prédisposés à la neurasthénie, l’eau froide, appliquée méthodiquement, habituerait les nerfs au calme et fortifierait les chairs, tandis que la gymnastique constituerait une charpente et des muscles solides — sans parler du caractère, de l’endurance et de l’activité augmentés et endurcis. […] Celles-ci, par exemple : la terre tourne, la graine germe, la plante croît, l’animal vit et meurt, le soleil brille et chauffe, la pierre est un solide, l’eau est un liquide, l’air est un gaz, le père procrée l’enfant, etc., etc. […] L’eau rit, Manger est bon.
Non satisfait d’enseigner les langues les plus savantes et de répandre sur nos têtes des torrents de philosophie et d’histoire, il dévoile l’origine du langage, réforme l’esprit et les mœurs, éclaire les littératures, écrit même pour le théâtre des sphères, des drames tels que Caliban et l’Eau de Jouvence, et, du promontoire d’Épicure, contemple avec sérénité l’océan de la politique dont les fureurs et les inconstances n’ont plus d’étonnements ni de secrets pour lui. […] Une vapeur, une goutte d’eau, disait Pascal, suffit pour tuer le roseau qui pense. […] C’est avec un attendrissement tout symbolique qu’il a remplacé le langage français par l’argot de la secte, argot inouï et inqualifiable qui veut que le pain soit appelé pierre brute ; le vin, poudre forte (blanche ou rouge) ; les bouteilles et carafes, barriques ; les verres, canons ; l’eau, poudre faible ; les liqueurs, poudre fulminante ; les bougies allumées, étoiles ; les serviettes, drapeaux ; les assiettes, tuiles ; les plats, plateaux ; les cuillers, truelles ; les fourchettes, pioches ; les couteaux, glaives ; le sel, sable ; le poivre, sable jaune ; les aliments, matériaux ; les chaises, stalles. […] Il ne demande qu’une goutte d’eau et il la demande à la nature. […] Tandis que dans l’air pur, grisant comme l’alcool Montent l’acre fraîcheur de la mare bleuie Et les hennissements des poulains sans licol, Le suprême sanglot de la nature enfuie Va s’exhaler au fond de la nue éblouie, Et sur l’eau que le saule a l’air de supplier, Du cerisier sanglant à l’ocreux peuplier, Dans une paix mystique et que rien ne dérange, On voit s’effacer l’arc impossible à plier, Bleu, rouge, indigo, vert, violet, jaune, orange !
Au bout, on apercevait une petite scène, avec une petite rampe éclairée ; — dans le fond de la scène se dressait un orgue qui laissait supposer qu’on y faisait de la musique ; plus près, au premier plan, une petite table, avec son petit verre d’eau classique, attendait un conférencier. […] C’est dans cette salle, à cette table et devant ce verre d’eau sucrée que J. […] Au début, une méchante femme tourmente un pauvre diable à tel point qu’il faudra qu’il aille se jeter à l’eau ; au terme, une énumération de fléaux pires encore, si toutefois il en est de pires pour un homme qu’une méchante femme telle que la conçoit et la peint Molière ; et, au terme comme au début, le comique est tiré de la même image, de la même idée, du même mot affreux : tuer ! […] Ce qui est effrayant dans cette perversité, c’est qu’elle est toute simple, tout unie ; il n’y a pas moyen de la bien voir à la scène ; mais dans le silence du cabinet, quand nous lisons Molière, nous la voyons chez ces femmes qui, à peine entrées dans la vie, savent être absolument insensibles pour ceux qui doivent être leurs victimes, ou ne s’apercevoir de leurs souffrances que quand il n’est plus temps, quand le meurtre est irréparable, quand il n’y a plus, comme dit George Dandin, qu’à se jeter à l’eau. […] Les derniers échelons trempaient dans l’eau fangeuse, tandis que les premiers, fièrement appuyés au tronc d’un magnifique palmier, étaient caressés de ses fruits et défendus par son ombrage contre les ardeurs du soleil : « Vil peuple », disaient les échelons d’en haut à ceux d’en bas, « rampe dans la poussière tandis que nous touchons au ciel ».
On signale, parmi les additions, une conversation pleine de terreur entre le pauvre aquafortiste qui n’a pas mangé depuis quarante-huit heures et un peintre qui, en trois jours, a pris de l’eau pour toute nourriture. […] Champfleury travaille de six heures à midi, s’interrompant de temps à autre pour boire une gorgée d’eau pure. […] Lève-toi donc à cinq heures du matin, mets sur ta table une grande carafe d’eau fraîche, tu verras comme l’eau fera couler des idées claires dans ta plume. » (Aventures de Mademoiselle Mariette.) […] elles remonteront sur l’eau ; elles reviendront aux neiges prochaines, comme elles reviennent depuis vingt ans, insulter à l’esprit, au goût, à la langue française : C’est leur mission, à laquelle elles ne failliront jamais, les vaudevillistes en ont fait le serment !
Et ils ont cette « inexpression hallucinante » qu’on remarque aux yeux des fous et de certains mineurs, aux reflets « d’eau, de ciel, de feu, de foules, de chairs maquillées et de cheveux teints qui composent la surface des pierres précieuses : inexpression formidable qui, avec un peu d’imagination neurasthénique, contient et projette sur nous, en rayons multicolores, avec toutes les expressions de la vie visible, toutes les expressions centuplées de la vie qui se cache dans l’inconnu ». […] — Mes prairies, mes rivières… — Éloi : Je voudrais que ma main fût assez légère pour écrire sur les eaux. — Et mes brumes fragiles… — Éloi : Elles naissent le soir, vivent la nuit et meurent au matin, comme mes rêves. » La nature n’a-t-elle rien à lui pardonner ? […] Mais l’éducatrice de Tito, ce fut sa ville natale, Vicence belle et charmante avec les deux rivières qui lui sont « une ceinture d’eaux vives et fraîches », avec ses vergers et ses vignes, avec les dômes de ses églises, avec sa basilique palladienne et avec toute la parure de pierre dont l’a ornée le génie de son divin Palladio, avec la dignité gracieuse que la nature et l’art ensemble ont accomplie en elle comme un chef-d’œuvre. […] Non loin de ce réduit, le paysage est le plus beau du monde, la Corne d’Or et les collines de Scutari, les merveilles de la lumière qui joue avec l’air et l’eau. […] À propos de Louise qui sera bientôt la maîtresse de Barnavaux et qui ajourne l’échéance, il note que, l’on a beau dire, nulle femme ni même un homme ne tombe à n’être exactement qu’un animal : « Nous le saurions mieux, si nous n’étions gâtés par cent ans de littérature antihumaine. » Et, à propos d’un petit garçon qu’il mène au bord de la mer et qu’il s’attend qui soit bien étonné devant cette infinité bleue, il note : « Cent ans de littérature romantique nous ont fait l’esprit assez faux… » Mais le petit garçon qui n’est pas étonné remarque seulement que cette eau est une rivière qui n’a qu’un bord.
Quelle légèreté fluide, celle de l’eau, dans le Tombe en frange effilée… de l’avant-dernier vers ! […] A quel puits de douleur tes yeux puisent-ils l’eau ? […] Le romancier nous la montre approvisionnant d’eau la toilette du locataire, tandis que sa grand’mère apporte des draps frais ; puis déménageant le mannequin qui lui sert à ses travaux de couture. […] Vous étiez devenu dessinateur et constructeur de ponts, comme La Fontaine, votre grand-oncle à la mode du Parnasse, était devenu maître des eaux et forêts, sans le savoir. […] Dépenser votre prestigieux esprit dans le sabbat quotidien de ce cénacle, c’était vraiment exécuter des ricochets sur l’eau avec des pièces d’or.
Trois efforts successifs avaient été faits par la Constituante, la Législative et la Convention pour réorganiser l’instruction publique, trois efforts inutiles ; les grandes eaux qui montaient toujours emportaient ces commencements prématurés d’une reconstruction encore impossible. […] Un jour, par un grand otage, là tante de Pierre-Jean, qui était pieuse, jetait de l’eau bénite dans l’appartement ; l’enfant, placé sur le seuil de la porte, ricanait tout bas, comme il convient à un esprit fort ; lorsque tout à coup la foudre, tombant à côté de lui, le jeta dans une paralysie complète. […] à quoi sert donc ton eau bénite ? […] Sa mère lui avait appris à lire dans la Bible et l’Évangile ; ses maîtres du collège de Belley, auxquels il adressait de si doux adieux, avaient continué à désaltérer son âme dans les mêmes eaux, et il trempait toutes ses inspirations dans ces deux sources sacrées. […] il ressemble à ces magnifiques lacs qui s’étendent si frais et si purs dans ses vers, et, comme eux, il reflète le ciel qui plane au-dessus des eaux, les oiseaux mélodieux qui les effleurent en se jouant, et les coteaux et les forêts d’alentour.
Et quand l’écuyer a tout dit, et la soumission inattendue des quatre rois, et leurs façons étranges, et la peine qu’il eut, lui Henri Crystède, qui savait leur langue et avait été attaché à leurs personnes, à leur enseigner les belles manières et les bienséances indispensables ; quand il les a montrés apprivoisés peu à peu et amenés à se laisser faire chevaliers de la main du roi Richard en l’église cathédrale de Dublin, puis dînant ce jour-là avec le roi ; et après qu’il a ajouté que c’était chose très intéressante et qui eût été pour Froissart tout à fait neuve à regarder : « Henri, répond Froissart, à qui l’eau est venue à la bouche d’un tel récit, je le crois bien et voudrois qu’il m’eût coûté du mien et que j’eusse été là. » C’est absolument comme quand Saint-Simon, à une certaine scène de cour (le mariage de Mlle d’Orléans avec le duc de Berry), en un moment où toutes les intrigues et les cabales étaient en jeu, nous dit : « Je n’ai point su ce qui se passa chez elle (la duchesse de Bourbon, une des ennemies) dans ces étranges moments, où j’aurais acheté cher une cache derrière la tapisserie. » Pour Froissart, qui est d’une curiosité moins compliquée et moins dévorante, ce n’est jamais derrière la tapisserie qu’il désirerait se cacher, mais bien être dans quelque coin d’où il pût voir à l’aise le devant du spectacle et de la cérémonie.
Les décorations de mes idées étaient changées… » Il observa la contrée en géologue amateur ; il prêta grande attention aux pierres, aux blocs erratiques dont le sol est régulièrement semé, et qui semblent avoir été versés par les courants uniformes d’une mer profonde dans le dernier grand déplacement des eaux.
Je fais tout ce que je puis pour lui rendre un peu de force et d’espérance, mais j’ai des idées et une façon de voir si différentes des siennes, que je m’y prends sans doute fort mal ; et puis on ne calme pas l’eau agitée en y trempant la main.
Cet article a soulevé des récriminations diverses et animées : peut-être, en effet, pour qu’on pût en écrire alors, la mémoire de Carrel était trop incandescente ; le biographe a eu beau y employer beaucoup de phrases et mêler beaucoup d’eau dans son encre, il n’a pas réussi.
En mécanique, on avait d’abord trouvé la machine de Marly, qui, avec des frais énormes, élevait l’eau sur le sommet d’une montagne ; après cette machine on a découvert des pompes qui produisent le même effet avec infiniment moins de moyens : sans vouloir faire d’une comparaison une preuve, peut-être que lorsqu’il y a cent ans en Angleterre, l’idée de la liberté reparut sur la terre ; l’organisation combinée du gouvernement Anglais était le plus haut point de perfection où l’on put atteindre alors ; mais aujourd’hui des bases plus simples peuvent donner en France, après la révolution, des résultats pareils à quelques égards, et supérieurs à d’autres.
« Le lendemain, toute la compagnie, après l’accomplissement des devoirs religieux, se rendit, à travers les bois, sur le sommet d’une colline, et arriva bientôt dans un lieu solitaire, où les branches étendues d’un hêtre touffu ombrageaient une source d’eau transparente.
La gravitation universelle est dans la chute d’une pomme ; la pesanteur de l’air se révèle par l’ascension de l’eau dans un corps de pompe : mais il faut être Newton ou Torricelli pour voir ce que, depuis eux, tout le monde voit.
Entrées pompeuses de seigneurs par des rues jonchées et tendues comme pour des processions de Fête-Dieu, indications de mobiliers, de tentures, mentions de larges et plantureux soupers, mais surtout bien ordonnés, courtoisement servis, avec eau pour laver les mains avant et après, mentions répétées des bains que prennent les chevaliers délicats ou amoureux, description de riches costumes, surtout de toilettes féminines, qui parfois prennent le pas sur la figure : tout ceci nous représente un romancier du grand monde, un Bourget du xiie siècle, très au courant des habitudes du high life, et qui flatte par là son public.
Celui-là a aimé la lumière, les eaux, les fleurs, les ombrages ; il a noté quelque part, sans ombre de libertinage, les blancheurs de « la chair lisse ».
Assuré d’aimer tout en Dieu et comme œuvre de Dieu, il ouvre son âme ; et toute beauté le séduit, la beauté de la nature, les arbres, les eaux, les vallées, les jours sereins, les soleils éclatants, la beauté de la poésie païenne aussi, où toute nature se reflète, Homère, Horace, Virgile.
Rapprochez, par ouï-dire, des collèges de tout style en une telle communion, l’étude, qu’à leur milieu rien de discordant, moyen-âge, Tudorien, aéré de prairies à vaches et à cerfs, avec eaux vives, propres à l’entraînement : la Grande-Bretagne s’adonne à l’élevage athlétique de ses générations.
Des personnes dénoncées pour avoir, à un sermon de Calvin, ri d’un homme qui s’était laissé choir de sa chaise étaient condamnées à la prison, au pain et à l’eau.
La morale est aussi absente du monde d’insectes qui s’agite dans une pièce d’eau, et pourtant quel ravissant intérêt à voir ces gyrins dorés, qui tournent au soleil, ces salamandres qui courent au fond, ces petits vers qui s’enfoncent dans la vase pour y chercher leur proie.
Pour peu, vous-même, que vous fussiez Médecin, vous diriez sûrement, sage Lecteur : Il faut d’abord lier l’Energumene, le plonger ensuite dans l’eau froide, &, pendant le bain, lui mettre un bâillon, de crainte qu’il ne crie encore plus haut, & ne murmure contre son Médecin.
Elle se vengea bientôt en soufflant sur la flotte hellène les vents qui l’enchaînèrent dans les eaux d’Aulis.
Ses eaux fortes, d’ailleurs, ont été retouchées au burin.
Le Génie de la Connaissance utilise à son profit, comme une force de la nature, le mécontentement humain, de la même façon que l’homme utilise à son profit ces autres forces naturelles, le vent, la vapeur ou le flux de l’eau pour faire mouvoir ses machines.
Le voyez-vous suant sang et eau pour emboîter la tête d’un accusé dans le plus fatal article du code ?
« Vous voulez de l’argent, ô mesdames les Eaux ?
On ne circule que dans des boyaux étroits et profonds, remplis de boue, de flaques d’eau, séparées par de gros cailloux qui nous font trébucher.
Quand nous sommes assis au bord d’une rivière, l’écoulement de l’eau, le glissement d’un bateau ou le vol d’un oiseau, le murmure ininterrompu de notre vie profonde sont pour nous trois choses différentes ou une seule, à volonté.
Retirés au sommet des monts, ils y trouvèrent, pour fixer leur vie errante, des lieux salubres, forts de situation, et pourvus d’eau, trois circonstances indispensables pour élever des cités.
— Vous prenez deux brocs ; vous emplissez l’un d’eau claire ; vous allez au cabaret de la Pomme du Pin, et vous y faites remplir l’autre broc de vin blanc. Puis vous faites semblant de vous raviser, vous demandez du vin rouge, et vous rendez le broc d’eau claire à la place du broc de vin blanc. […] « Tant va la cruche à l’eau… », dit Bazile. — Ah ! […] que dit la sagesse des nations : Tant va la cruche à l’eau qu’à la fin ? […] Richepin, car, enfin, Pierre n’est pas seulement le vrai fiancé, le seul authentique, de Mlle Janik ; il est fort riche, il a des terres et de l’or… Mais qu’est-ce que la richesse, pour des cœurs vraiment maritimes et pour des âmes d’eau salée ?
Délicatesse, sensibilité, éloquence du cœur, finesse dans l’expression des sentiments qui s’ignorent encore et déjà se découvrent eux-mêmes, composition libre et aisée, mais surveillée cependant et habile, style quelquefois un peu froid mais souvent exquis, le Mariage de Victorine est une perle dramatique de la plus belle eau. […] Moïse sauvé des eaux, Joas sauvé du carnage, Jésus sauvé du massacre. […] Même sans en boire, si, jeune, vous vous regardez dans son limpide miroir, vous vous voyez vieux ; si, vieux, vous vous regardez dans ses eaux fantastiques, vous vous voyez jeune. […] En buvant l’eau de cette source, je deviens quinquagénaire immédiatement. […] Sur ce, Archis rencontre Néère (faites bien attention) et Télamon rencontre Daméta ; et, un peu aidés, du reste, par Zeus déguisé en berger, mais cette aide serait presque inutile, Archis, devant Néère, croit qu’il a affaire à Daméta qui s’est rajeunie en buvant de l’eau de la source ; et Télamon, en face de Daméta, croit qu’il a affaire à Néère qui s’est vieillie en buvant la liqueur magique.
Et, après bien des péripéties où le personnage sympathique ne fléchit pas, arrive jusque sur le point de commettre une faiblesse et ne la commet pas, reste fidèle à ces deux sentiments nobles : son amour maternel et son amour conjugal ; le tyran féroce est tué, le traître devient fou, la traîtresse se poignarde et le personnage sympathique devient reine de France en compagnie de son petit garçon sauvé des eaux. […] Un capitaine, capitaine de vaisseau, sur la mer, comme il va sombrer, la jette dans l’eau. […] Toujours son eau sucrée était auprès de lui. […] Cette comédie historique a, du reste, produit de véritables chefs-d’œuvre, comme Le Verre d’eau et Don Juan d’Autriche et Mademoiselle de Belle-Isle.
et veut-il que, silencieux et privés d’intelligence comme aux premiers jours où nous sommes nés, nous allions nous courber de nouveau pour le gland sauvage et l’eau pure des fontaines28 ! […] mon âme, change-toi en quelque goutte d’eau, et tombe dans l’Océan, pour n’être jamais retrouvée ! […] Ils me donnent du pain et de l’eau, à moi qui suis roi ! […] que mon sang ne peut-il sortir goutte à goutte de chacune de mes veines, comme cette eau tombe de mes vêtements souillés ! […] Doux cygne de l’Avon, quel spectacle ce fut de te voir apparaître dans nos eaux, et prendre sur les bords de la Tamise cet essor qui charmait Elisa et notre roi Jacques !
Ceux qu’il laissa derrière furent, trois jours après, tellement battus par un vent d’est qu’ils se brisèrent les uns contre les autres et s’enfoncèrent dans la mer, dans un lieu appelé les sables de Drownelow, où ils sont encore aujourd’hui (1574), dit la chronique, « au grand danger des vaisseaux qui viennent sur la côte, la mer les couvrant entièrement pendant le flux, tandis que le reflux en laisse paraître quelques parties au-dessus de l’eau ». […] Ils entrèrent dans la chambre de Duffe, le tuèrent, emportèrent son corps hors du château par une poterne, et, le mettant sur un cheval préparé à cet effet, le transportèrent à deux milles de là, près d’une petite rivière qu’ils détournèrent avec l’aide de quelques paysans ; puis, creusant une fosse dans le fond du lit de la rivière, ils y enterrèrent le cadavre et firent repasser les eaux par-dessus, dans la crainte que s’il venait à être découvert, ses blessures ne saignassent lorsque Donwald en approcherait, et ne le fissent ainsi reconnaître comme l’auteur du meurtre. […] Si tu avais en horreur les regrets de notre douleur, si tu méprisais ces gouttes d’eau que la nature avait laissé couler de nos yeux, une sublime idée t’inspira de faire pleurer à jamais le grand Neptune sur ta tombe. » C’est ainsi que Timon fait des vents l’hymne de ses funérailles ; que le murmure de l’Océan est une voix de douleur sur ses dépouilles mortelles, et qu’il cherche enfin dans les éternelles solennités de la nature l’oubli de la splendeur passagère de la vie. […] L’opinion la plus généralement répandue, c’est qu’Hubert de Bourg, qui ne s’était chargé de faire périr Arthur que pour le sauver, ayant en effet trompé la cruauté de son oncle par de faux rapports et par un simulacre d’enterrement, Jean, qui fut instruit de la vérité, tira d’abord Arthur du château de Falaise où il était sous la garde d’Hubert, se rendit lui-même de nuit et par eau à Rouen, où il l’avait fait renfermer, le fit amener dans son bateau, le poignarda de sa main, puis attacha une pierre à son corps et le jeta dans la rivière. […] La faiblesse générale de ces trois compositions, où l’on ne trouve qu’un petit nombre de scènes qui rappellent la touche du maître, ne serait pas non plus un motif suffisant pour les attribuer à une autre main que la sienne ; car, dans le cas où elles lui appartiendraient, ce seraient ses premiers ouvrages : circonstance qui expliquerait assez leur infériorité, du moins en ce qui regarde la conduite du drame, la liaison des scènes, l’art de soutenir et d’augmenter progressivement l’intérêt, en ramenant toutes les diverses parties de la composition à une impression unique qui s’avance et s’accroît, comme le fleuve grossit à chaque pas des eaux que lui envoient les divers points de l’horizon.
Les uns étoient fort étonnés, & croyoient à peine ce qu’ils avoient entendu ; les autres rioient beaucoup ; d’autres étoient d’avis qu’on jettât, dans l’eau, le moine, la mère & l’enfant, & qu’on appaisât la colère céleste. […] (*) Le bruit ayant couru que Santeuil s’étoit noyé dans la Seine, Commire fit cette épigramme(**) : Jaloux de se mêler aux cignes de la Seine, Santeuil fait le plongeon au milieu de ses flots ; Mais, fidèle toujours à l’instinct qui l’entraîne, Notre oison, du Léthé, s’en va troubler les eaux. […] Il quitte ces cahiers pour d’autres, dans lesquels il ne voit encore que des termes propres aux eaux & forêts. […] Celui ci l’attaqua au sujet de la différence du bois en grume & du bois marmenteau, & lui reprocha de ne la pas sçavoir, quoiqu’il eût été officier des eaux & forêts. […] Elles sont subordonnées les unes aux autres ; mais il y en a trois principales : la divinité du feu, la divinité de l’eau & celle de la terre.
Voyez donc les arbres, les montagnes, le ciel et l’eau, là-bas, tout cela n’a-t-il pas l’air d’une peinture ? […] Mais tous ces personnages romantiques qui se trémoussent en dix volumes on ne sait pourquoi, qui n’ont ni vraie passion, ni vraie vie, tous ces batailleurs, qui vivent de sang, d’amour et d’eau fraîche, m’ennuient, je veux la vérité avant tout, « Rien n’est beau que le vrai, etc. » dit Boileau, et c’est une des rares fois qu’il a raison. […] — Dans Shakespeare, à ce sentiment naïf viennent s’ajouter des images abondantes comme des étoiles ; c’est vrai, mais ce sentiment y est bien complet et c’est pourquoi ces images singulières se supportent et peuvent plaire ; elles ne sont pas cherchées, car il y en a des milliers qui tombent comme d’une source, tandis qu’eux et par eux, j’entends de plus célèbres, leurs pensées cherchées sont de petits filets d’eau qui font du bruit en tombant sur le cuivre de leurs rimes, et c’est là le bruit qu’on appelle musique. […] L’eau pure aussi, pour ceux qui l’aiment, a des teintes impalpables et des nuances de goût exquises, pour les autres elle est fade et incolore.
Ne frissonnez point à l’aspect de ce grand abîme d’eaux, puisque celui qui marche à pied sec sur les ondes, comme sur un plancher ferme et solide, vous doit lui-même tenir et guider par la main. […] Alberoni s’ingénie, met un tiers d’eau dans le vin de la reine, essaye des coupages, achète du raisin et fabrique du vin. […] Il ne boit que de l’eau. […] À Madrid, le boucher vend de la charogne ; l’épicier met de l’eau dans son huile ; les marchands trompent sur le poids. […] » et le chanoine qui meurt épuisé de saignées, noyé d’eau chaude, ce qui prouve que le plus habile médecin ne saurait prolonger nos jours, quand leur terme fatal est arrivé !
Ce n’est qu’un filet d’eau, mais qu’il est limpide ! […] Poitou, qui ne jurent entre elles comme le feu et l’eau. […] Des ouvriers, accroupis au bord, lavaient leurs bras dans l’eau. […] Tel paraît entraîné par le torrent, il donne déjà de la tête contre un roc à fleur d’eau, et il n’aura pas même besoin d’un effort pour regagner la rive. […] Positivement, l’eau en vient à la bouche.
Il n’avait pas besoin de crimes ni de vices comme de tremplins pour rebondir vers Dieu, ni de bains de boue pour se préparer à un nettoyage d’eau bénite. […] Le duc de Bouillon était seigneur de Château-Thierry, où La Fontaine fut maître des eaux et forêts. […] « Ponchon, dit-il, n’est pas un subjectif : l’eau romantique — l’eau-de-vie — qui entre pour quelques gouttes dans son vin classique, ne l’a pas incité au moi haïssable. » Pourquoi l’y aurait-elle incité ? […] Bien entendu, il se convainquit peu à peu de sa mission civique, comme le catéchumène de Pascal commence par l’eau bénite et arrive à la foi. […] Où mieux que dans cette ville d’illusion, où tout est mirage et reflets, où la plus massive architecture repose sur de pauvres pilotis, où la terre n’est que de l’eau épaissie et de la vase solidifiée, sentir que nous ne sommes nous-mêmes qu’un assemblage d’artifices mentaux et de perspectives spirituelles, et que nous avons en nous, comme la cité fraternelle, des palais qu’habite le souvenir, des façades décrépites et mutilées, des dédales et des impasses qu’entourent, comme sur sa lagune, de vastes étendues de rêverie que sillonnent des barques noires ?
« Il avait pour l’eau une horreur qui ne lui permettait pas de passer, sans une crise de nerfs, sur la Seine ou devant le bassin d’une place ». […] Elle n’eût pas plus tôt disparu que le séjour de son île devint insupportable à Bernardin de Saint-Pierre : « Les vergers qu’il avait plantés, cette petite rivière qui les environnait de ses eaux limpides, ces îles collatérales couvertes de grands saules et d’aulnes touffus, — raconte Aimé Martin, — tout ce qu’il avait aimé autrefois faisait alors couler ses larmes en lui rappelant celle qu’il avait perdue. » Il revint donc à Paris, et à soixante-trois ans sonnés, plus avide que jamais d’hommages féminins, il fit sa principale distraction de fréquenter un pensionnat de demoiselles. […] Du haut d’une fontaine, sur la place publique du chef-lieu de son arrondissement, si cet ancien ministre ne présidait pas aux commérages des ménagères, en seraient-elles par hasard moins bavardes, ou l’eau de la fontaine plus limpide ? […] L’homme, pour eux, avait reçu l’univers comme en fief, et les oiseaux du ciel, comme les poissons des eaux, n’avaient en quelque sorte été créés qu’à son usage. […] Si vous versez dans une eau pure quelques gouttes seulement d’une essence rare, subtile et concentrée, toute la masse du liquide en est aussitôt comme changée de nature.
L’histoire complète du Don Juan de la connaissance serait celle-ci : « Il lui manque l’amour des choses qu’il découvre ; mais il a de l’esprit et de la sensualité et il jouit des chasses et des intrigues de la connaissance, qu’il poursuit jusqu’aux étoiles les plus hautes et les plus lointaines [c’est ici que s’arrête l’histoire de Montaigne, de Sainte-Beuve et de Renan] — jusqu’à ce qu’enfin il ne lui reste plus rien à chasser, si ce n’est ce qu’il y a d’absolument douloureux dans la connaissance, comme l’ivrogne qui finit par boire de l’absinthe et de l’eau forte. […] Le tort des poissons n’est pas de vouloir vivre dans l’eau ; il serait de vouloir contraindre à y vivre les aigles, ces conquérants, et les rossignols, ces artistes. […] Par exemple il y a trois degrés dans l’acte dit héroïque ou simplement généreux : 1° Impulsion : se jeter à l’eau, sans la moindre réflexion, pour sauver quelqu’un. 2° Décision accompagnée d’un extrême plaisir : faire la même chose très délibérément, après délibération et considération du sujet ; mais la faire par volonté, avec une joie héroïque provenant de la conscience que l’on a de cette volonté souveraine. 3° Décision non accompagnée de plaisir : faire la même chose après délibération et considération du danger, et la faire par volonté, mais sans éprouver un plaisir qui est à la fois impulsion, lui aussi, et récompense. […] Croire que de cette façon on n’entre pas dans les profondeurs, on ne va pas assez au fond, c’est la superstition de ceux qui craignent l’eau, des ennemis de l’eau froide. […] Ce serait là placer les poètes sur la tête, les poètes qui, surtout comme Shakespeare, sont amoureux de la passion en soi, et non, aucunement, de la disposition à la mort qu’elle engendre, cette disposition où le cœur ne tient pas plus à la vie qu’une goutte d’eau au verre.
L’eau était si noire et si profonde112, que la certitude d’un prompt repos me tentait beaucoup ; mais j’étais avec deux matelots qui m’auraient repêché, et je ne veux pas me noyer comme je me suis empoisonné, pour rien. […] Sur mon grabat je célébrais Glycère, Le jus divin d’un vin mousseux ou grec, Buvant de l’eau dans un vieux pot à bière. […] « La roche est escarpée, l’eau est profonde, et je suis au désespoir !
Elle ne s’applique pas plus au devenir, dans ce qu’Il a de mouvant, que les ponts jetés de loin en loin sur le fleuve ne suivent l’eau qui coule sous leurs arches. […] J’en reviens toujours à mon verre d’eau sucrée 105 : pourquoi dois-je attendre que le sucre fonde ? […] Plus j’approfondis ce point, plus il m’apparaît que, si l’avenir est condamné à succéder au présent au lieu d’être donné à côté de lui, c’est qu’il n’est pas tout à fait déterminé au moment présent, et que, si le temps occupé par cette succession est autre chose qu’un nombre, s’il a, pour la conscience qui y est installée, une valeur et une réalité absolues, c’est qu’il s’y crée sans cesse, non pas sans doute dans tel ou tel système artificiellement isolé, comme un verre d’eau sucrée, mais dans le tout concret avec lequel ce système fait corps, de l’imprévisible et du nouveau.
Robin et Mme Pauline… Je les ai accompagnés tous jusqu’à une barrière située entre celle du bord de l’eau et celle de Chaillot.
Puisque vous avez renoncé à lui faire prendre les eaux dont la cure lui avait fait tant de bien l’année dernière, du moins courez au plus vite vers le soleil, et ne sacrifiez pas à quelques convenances de société l’existence qui vous doit le jour et dont vous devez compte à la mémoire de sa malheureuse mère.
Toute main est bonne pour nous donner le verre d’eau dont nous pouvons avoir besoin dans la fièvre de la mort.
Confucius semble avoir été illuminé divinement par un reflet, par un crépuscule de cette divine révélation sociale qui précéda le siècle des grandes eaux.
On les voyait glisser sur les eaux comme des fumées transparentes, puis se condenser au-dessus, et s’arrêter immobiles à la moitié des collines du détroit ; de sorte que par-dessous leur couche épaisse j’apercevais en Asie la base de la montagne du Géant, dont la cime semblait s’unir à l’Europe par un pont de nuages argentés.
Ledru-Rollin avait, de son côté, chez lui un conciliabule de républicains extrêmes qui tâchaient de l’engager dans un parti opposé au mien, je sentis l’inconvenance de faire partie d’un cénacle confidentiel dans lequel le feu et l’eau délibéreraient ensemble l’un contre l’autre.
On se rappelle que pour justifier Homère et Pindare, Boileau ne trouvait rien, sinon qu’en grec les mots âne et eau sont très nobles.
Robert Scheffer Je remarque surtout ceci : À mesure que la marée bleue envahissait le marché littéraire, nos dames de plume, qui ont l’esprit pratique, s’avisèrent que, pour assurer à leurs bas un indigo bon teint, il convenait de les tremper au préalable dans les eaux Tibériennes : ce pourquoi, les jeunes filles actuelles réclament l’enseignement du latin dont sont privés nos garçons, qui ignorent l’orthographe, pataugent dans la grammaire et méprisent la propriété des termes, hormis les vocables qui, sportifs, nous arrivent tout vifs de l’Angleterre.
Mais quelque lassitude se mêle à cette ivresse quasi physique ; et après toute cette débauche de gentillesses fondantes, de strophes musquées, d’odelettes glacées à la framboise, on aspire violemment après le verre d’eau pure d’une simple émotion.
En effet, à la différence d’Horace qui buvait peu et à petits coups, et qui, tout en chantant le vin, fut souvent forcé de s’en tenir à l’eau, les éloges que Rabelais fait du Piot et de la Dive Bouteille sont d’un buveur effectif, et de l’homme qui déclarait mieux aimer boire frais que d’être papimane ou papefigue.
C’était une frivolité de dire que « les malades se guérissaient à la vue des lettres de Balzac » ; que « son livre n’était guère moins connu que l’eau et le feu » ; que « c’était le philtre qui faisait aimer le français aux nations qui habitent les bords de la mer Glaciale » ; que Sénèque, auprès de Balzac, n’était que monotonie, et Cicéron que vide ; qu’il était l’empereur des orateurs, comme si le titre d’orateur, objecte judicieusement un de ses critiques, pouvait appartenir à qui n’a jamais parlé en public.
Des croyances étranges, qui révoltent le sens critique, ne sont-elles pas encore avalées comme de l’eau par des intelligences même distinguées ?
Il a remarqué en Afrique les fils des Numides étendus à terre tout de leur long : presque tous les acteurs de son récit se vautrent sur le sol ; ils mangent à plat ventre, ils boivent à plat ventre, à moins que, pour se désaltérer plus à l’aise, et sans craindre l’asphyxie, ils ne plongent la tête tout entière dans des jarres d’eau miellée.
Confondus au hasard, les dons de la terre sont emportés par les eaux fangeuses. » — Rencontre étrangement imprévue que celle de ces commères aristophanesques attroupées au coin d’une tragédie d’Eschyle, et pleurant, entre un nouveau-né qui râle et une captive qu’on emmène, leurs figues et leurs olives roulées au ruisseau.
Au premier, un interminable corridor avec des chambres de chaque côté, des cellules grandes comme rien, fermées par les persiennes démantelées d’une petite fenêtre et contenant pour tout mobilier, un lit, une commode, une chaise, et par terre, un pot à l’eau et une cuvette.
. — Un glissement, un bruissement d’êtres silencieux, dans la mort du jour, allant aux kiosques illuminés du rouge transparent des annonces de l’eau de Botot, et s’accumulant en un coin du boulevard. — Puis, tout à coup, de ces tas d’hommes sous les arbres, dont le gaz se met à éclairer le feuillage poussiéreux, s’élève un murmure de phrases, en une langue inintelligible, qui devient un braillement énorme.
Chez lui, le reptile est caméléon… Nier, du reste, la philosophie n’empêche pas cet esprit fuyant comme l’eau d’écrire à la tête de son présent volume : Dialogues et fragments philosophiques, car le fond même de cette intelligence sans muscle et sans vertèbre, c’est la contradiction, et non pas la contradiction affirmative, osée, coupante, à angles aigus, comme elle l’est toujours sous les plumes de quelque vigueur quand elles ont le malheur de se contredire, mais la contradiction sans hardiesse, noyée, dissoute, presque imperceptible ; le propre de ce lâche esprit étant de dissoudre tout, non comme un mordant, mais comme un liquide !
Bon an, mal an, cet écrivain, la veine sans déveine, — et qui ne s’ouvre pas les veines pour faire un livre, comme les affreux passionnés du génie, — pond et lèche son petit roman, mondain et moral, à travers la minceur transparente duquel on voit, comme le poisson dans un filet d’eau, la pièce de théâtre qu’il en tirera.
Le sentimentalisme coule à pleins bords, et l’on boit le nectar de la divinité dans une coupe de pierreries, tandis que l’eau de rose enivre chastement les sens.
« Les uns ont-ils été baptisés avec de l’eau et les autres avec du malvoisie100 ?
« Ce superbe tyran, plein de confiance en l’appareil de ses navires, qui tient courbées les têtes de nos frères et fait travailler leurs mains au service injuste de sa puissance, abat de ses bras redoutables les cèdres à la plus haute cime et l’arbre qui se dresse le plus droit, buvant des eaux étrangères et foulant avec audace notre territoire inviolable.
Edouard Rod, dans sa préface, nous fait un joli tableau des mœurs et de la société de ces lointains pays du Nord. « … Nous entrevoyons là-bas une vie extrêmement régulière et paisible, une vie de petits pays heureux qui n’ont pas d’histoire, de petites villes où tout le monde se connaît et dont seuls quelques commérages troublent le calme d’eaux dormantes, de familles patriarcales que gouvernent des mœurs d’un autre âge, faites de douceur et de respect. » Un ciel qui conseille le recueillement, le repliement sur soi ; un cercle d’habitudes tournant autour d’un poêle de faïence ; une belle lenteur à se mouvoir et à sentir ; la sécurité dans la tradition acceptée ; un grand sérieux et un grand calme… Il y a là peu de place pour le plaisir extérieur et le divertissement. […] Il envoie l’impératrice lui chercher de l’eau pour apaiser la soif qui le dévore ; et, quand Zabina s’est éloignée, il se livre à un monologue impétueux : « Maintenant, Bajazet, abrège tes jours empoisonnés et brise la cervelle de ta tête vaincue, puisque tous les autres moyens me sont interdits, qui pourraient être les ministres de ma mort. […] Et nous adorons la pureté, — même quand nous ne la pratiquons guère, — parce que l’impureté nous semble la plus grande ennemie de l’action bienfaisante et désintéressée, parce que nous sentons l’affreux égoïsme des amours charnelles, même de celles qui s’absolvent par leur folie même et par la douleur qui les suit, et enfin parce que c’est en ne donnant son corps à personne qu’on peut donner son âme à tous, et que la chasteté nous semble une des conditions et même une des formes de la charité universelle… Et ainsi, lorsque je songe à Jeanne d’Arc, je la vois comme Dante Rossetti voyait la « demoiselle bénie » : « La demoiselle bénie se penchait en dehors, Appuyée sur la barrière durée du ciel ; Ses yeux étaient plus profonds que l’abîme Des eaux apaisées, au soir ; Elle avait trois lis à la main, Et sept étoiles dans les cheveux… » Je regrette que les vers de M.
En se promenant sur le bord de la mer, on n’entend pas les bruits élémentaires formés par les chocs de chaque molécule d’eau contre les autres ou contre la plage. […] « On peut imaginer, dit-il, que la même pierre enfonce 99 fois dans l’eau et surnage la centième, bien que l’expérience ne nous montre que le premier phénomène. […] L’eau monte dans le vide à 10 m 33. […] La réalité est que l’ascension de l’eau dans le vide ne dépasse pas 10 m 33 : on la dépassait en prêtant à la nature un sentiment qu’elle ne peut avoir : là était l’erreur, toute erreur n’est donc pas une privation de vérité. […] Par exemple, en voyant l’eau monter toujours dans le vide, on avait cru que la nature avait horreur du vide ; on avait négligé le cas où la hauteur du vide est supérieure à 32 pieds, et où l’eau ne monte plus.
se font sans y penser, Semblables à ces eaux si pures et si belles Qui coulent sans effort des sources naturelles. […] C’est aussi à un retour par eau de la maison d’Auteuil qu’eut lieu entre Molière et Chapelle l’aventure du minime.
. — La même chose arrive, si l’on plonge le coude dans un mélange d’eau et de glace pilée. — Ce sont aussi les parties antérieures du membre qui semblent éprouver les sensations de picotement et d’engourdissement lorsqu’on comprime le nerf cubital et le nerf sciatique. […] Sans doute on peut déjà reconnaître un objet par la couleur, la vivacité, les caractères de sa tache, dire, comme la dame de Waldrop, que ceci est de l’eau, ceci un gazon ; mais on n’en sait pas la situation.
Songez que chaque acte se termine de la même façon, par des excuses solennelles que ce brave homme de paysan est obligé de faire d’abord à l’amant de sa femme, puis à sa carogne de femme elle-même, et à son beau-père, à genoux, le bonnet à la main, et que la comédie finit sur ce mot navrant : Quand on a comme moi épousé une méchante femme, il ne reste plus qu’à s’aller jeter dans l’eau la tête la première. […] « Je me représente à toute heure, dit Élise à Valère, ce péril étonnant qui commença de nous offrir aux regards l’un de l’autre ; cette générosité surprenante qui vous fit risquer votre vie pour dérober la mienne à la fureur des ondes ; ces soins pleins de tendresse que vous fîtes éclater après m’avoir tirée de l’eau, et les hommages assidus de cet ardent amour, que ni le temps, ni les obstacles n’ont rebuté, et qui, vous faisant négliger, et parents et patrie, arrête vos pas en ces lieux, y tient en ma faveur votre fortune déguisée, et vous a réduit pour me voir à vous revêtir de l’emploi de domestique de mon père. » Ah ! […] Et le voilà qui conte, comme des merveilles, les quelques menus faits qui lui reviennent à la mémoire : Tartuffe lui a donné de l’eau bénite à la porte ! […] Ce bonhomme a une femme jalouse ; on ira chez lui pour brouiller son ménage et pêcher en eau trouble quelque bonne occasion de scandale. […] Un suisse à barbe torse, et nombre de valets, Intendants, cuisiniers rempliront mon palais : Mon buffet ne sera qu’or et que porcelaine ; Le vin y coulera comme l’eau dans la Seine ; Table ouverte à diner ; et les jours libertins, Quand je voudrai donner des soupers clandestins, J’aurai, vers le rempart, quelque réduit commode Où je régalerai les beautés à la mode, Un jour l’une, un jour l’autre ; et je veux à ton tour, Et devant qu’il soit peu, t’y régaler un jour.
glace, dans le sens propre, c’est de l’eau gelée : ce mot signifie ensuite par imitation, par extension, un verre poli, une glace de miroir, une glace de carosse. […] l’onde, dans le sens propre signifie une vague, un flot ; cependant les poètes prènent ce mot ou pour la mer, ou pour l’eau d’une rivière, ou pour la rivière même. […] Les proverbes allégoriques ont d’abord un sens propre qui est vrai, mais qui n’est pas ce qu’on veut principalement faire entendre : on dit familièrement tant va la cruche à l’eau, qu’à la fin elle se brise ; c’est-à-dire, que, quand on afronte trop souvent les dangers, à la fin on y périt ; ou que, quand on s’expose fréquenment aux ocasions de pécher, on finit par y succomber. […] Virgile l’a pris dans un sens actif lorsqu’il a dit : (…) : les fleuves changés, c’est-à-dire, contre leur usage, contre leur nature, arêtèrent le cours de leurs eaux, (…).
Un flot de mélancolie, jaillissant soudain, viendra troubler de son eau amère chacun des sentiments qu’il éprouvera ; il restera triste en face de ses joies les plus désirées, sans qu’il puisse dire pourquoi. […] Plus d’un qui était heureux s’en est retourné le cœur gros d’angoisses ; ceux qui avaient besoin d’oublier se sont souvenus et ont senti se rouvrir leurs blessures ; ceux qui avaient besoin de se souvenir au contraire ont bu l’eau du Léthé et se sont endormis dans un coupable oubli. […] Les orages de cette passion sont des orages secs et sans eau, tout à fait comparables aux tourbillons des plaines arides et brûlées, si bien que les sentiments de l’homme semblent s’être formés sur le modèle des phénomènes du climat. […] Les bois et les retraites où hommes et troupeaux fuient les ardeurs meurtrières de ce soleil voisin de l’Afrique lui ont livré tous les secrets de la transparence de leur atmosphère, de la fraîcheur de leurs eaux, du crépuscule de leurs ombres. […] Notre vie tout entière baigne dans ce mystique élément du passé, et y fleurit à la manière de ces larges plantes qui s’épanouissent à la surface des fleuves et trempent leurs racines dans la fraîcheur des eaux toujours mobiles.
On se figure peu, et dans quelques années on ne se figurera plus du tout ce qu’était la Bibliothèque du roi dans sa première et tranquille beauté, avec la morne tristesse de sa cour rectangulaire, avec le jardin austère, fermé d’une clôture, qui en occupait une moitié et où l’on n’entrait pas, la vasque de pierre verdâtre au milieu, d’où un maigre filet d’eau jaillissait à peine ; puis les escaliers solennels, les salles antiques et les galeries de ce beau palais Mazarin, conservées presque comme aux jours où s’y promenait M. le Cardinal et où il s’y faisait rouler dans son fauteuil déjà mortuaire entre deux rangées de chefs-d’œuvre et de magnificences.
« Mais je m’aperçois que je porte de l’eau à la fontaine, tandis que je ne veux que vous offrir tous mes sentiments empressés de bon et dévoué collègue.
« À Saint-Laurent, en Normandie, la cure ne vaut pas plus de 400 livres que le curé partage avec un obitier, et il y a 500 habitants, dont les trois quarts à l’aumône. » — Comme les réparations du presbytère et de l’église sont d’ordinaire à la charge d’un seigneur ou d’un bénéficier souvent éloigné, obéré ou indifférent, il arrive parfois que le prêtre ne sait ni où loger, ni où dire la messe. « J’arrivai, dit un curé de Touraine, au mois de juin 1788… Le presbytère ressemblerait à un souterrain hideux s’il n’était ouvert à tous les frimas et à tous les vents » : en bas, deux chambres carrelées sans portes ni fenêtres, hautes de quatre pieds et demi, une troisième haute de six pieds, carrelée, servant de salon, de salle, de cuisine, de buanderie, de boulangerie et d’égout pour les eaux de la cour et du jardin ; au-dessus trois pièces semblables, « le tout absolument lézardé, crevé, menaçant ruine, sans portes ni croisées qui tiennent », et, en 1790, les réparations ne sont pas encore faites
À la chute du jour, il but de l’eau glacée pour apaiser sa soif ; ensuite il se fit apporter deux glaives, et, après les avoir examinés tous les deux, il en plaça un sous sa tête.
Ses cheveux blond-cendré étaient longs et soyeux ; son front haut et un peu bombé venait se joindre aux tempes par ces courbes qui donnent tant de délicatesse et tant de sensibilité à ce siège de la pensée ou de l’âme chez les femmes ; les yeux de ce bleu clair qui rappelle le ciel du Nord ou l’eau du Danube ; le nez aquilin, les narines bien ouvertes et légèrement renflées, où les émotions palpitaient, signe du courage ; une bouche grande, des dents éclatantes, des lèvres autrichiennes, c’est-à-dire saillantes et découpées ; le tour du visage ovale, la physionomie mobile, expressive, passionnée ; sur l’ensemble de ces traits, cet éclat qui ne se peut décrire, qui jaillit du regard, de l’ombre, des reflets du visage, qui l’enveloppe d’un rayonnement semblable à la vapeur chaude et colorée où nagent les objets frappés du soleil : dernière expression de la beauté qui lui donne l’idéal, qui la rend vivante et qui la change en attrait.
Relisons-le pour en contempler la puissance souvent colossale, pour en admirer la verve plus bouillante encore que dans la jeunesse, dans cette nature qui a déjà bouillonné soixante ans, tant il y a d’eau dans ce vase et de combustible dans ce foyer.
Venez toujours ; je ne vous fais point inviter comme diplomate, mais comme ami. » XVII Indépendamment de ces deux visites de chaque jour chez la duchesse, le peu d’instants qu’il pouvait dérober aux affaires étaient consacrés à la culture d’un petit jardin d’Alcinoüs qu’il avait acheté sur la rive du Tibre, auprès des ruines de Pont-Riltoa ; il y cultivait, comme un chartreux, quelques fruits et quelques fleurs : ainsi la culture de ses devoirs assidus auprès du Pape, la culture de l’amitié auprès d’une femme respectée et aimée, et la culture des orangers et des œillets de Rome arrosés des eaux du Tibre, étaient les seuls délassements de cet homme de la nature et de la religion.
De grands cours d’eau navigables ouvrent des routes naturelles à travers les bois.
Il nous détaille sans se lasser toutes les opérations professionnelles par lesquelles un individu révèle son tempérament, et fait son bonheur ou son malheur : le parfumeur Popinot lance une eau pour les cheveux, voici les prospectus, et voilà les réclames, et voilà le compte des débours.
Son âme, comprimée par les doigts de la vie, laisse jaillir des rêves comme des jets d’eau vers l’azur.
Lui aussi a senti, comme Pierre Lebrun136, Pour l’eau bleue et profonde un indicible amour.
« Comme un violent cours d’eau qui, rencontrant un obstacle infranchissable, renonce à son cours direct et se détourne, la pauvre fille, n’ayant aucun moyen de dire son amour à celui qu’elle aimait, se rabattait sur des riens : obtenir un instant son attention, ne pas être pour lui la première venue, être admise, à lui rendre de petits services, pouvoir s’imaginer qu’elle lui était utile, cela lui suffisait. « Mon Dieu, qui sait ?
Tout à coup, comme elle regardait l’eau claire de la fontaine, elle vit le roi Marc’h se reflétant en un miroir au milieu du chêne.
Si vous ne pouvez encore l’aider qu’un peu, il vous dédiera — promesse qui doit vous mettre l’eau à la bouche — les éloges zézayés sur un autre.
Imaginez, à la place de cette froide poupée, une femme ardente et nerveuse, altérée des eaux furtives, affamée des fruits défendus, rôdant autour du monde interlope, finissant par enjamber la frontière ; et la moralité du drame croîtrait autant que son intérêt.
Les comparaisons tirées de la chimie sont supérieures : si vous combinez l’oxygène et l’hydrogène pour former de l’eau, vous ne reconnaissez plus dans le résultat ni l’oxygène ni l’hydrogène ; toutes les propriétés ont changé, au moins en apparence165.
Vendredi 31 août Asnières : l’eau dans la nuit : de l’obscurité fluide et remuante.
Une nuit étoilée vue aux heures où tous dorment, le ciel bas d’une soirée d’hiver, L’air sanglote et le vent râle, Et sous l’obscur firmament, La nuit sombre et la mort pâle Le regardent fixement, le bois sombre plein de souffles froids où Cosette, la nuit, va pour chercher un seau d’eau, pénètrent d’une horreur sacrée.
Le mouvement et le courant de son esprit empêchèrent l’ennui de germer dans les eaux vives de l’intelligence française.
Quelque terme où nous pensions nous attacher et nous affermir, il branle et nous quitte ; et, si nous le suivons, il échappe à nos prises, nous glisse et fuit d’une fuite éternelle, … » plus heureux que Pascal, dont on a reconnu les fortes paroles, ils ont, eux, trouvé « le terme où s’attacher », le roc inébranlable dans l’océan de nos perplexités, et ce roc ou ce terme, c’est la « Science. » Ils savent que deux et deux font quatre, que la terre tourne autour du soleil, que les pierres vont au fond de l’eau, que le coke est le produit de la distillation de la houille, que la peste et le choléra sont d’origine microbienne, quoi encore ?
Mais, il faut bien le reconnaître, c’est la charcuterie, cette spécialité de la charcuterie, qui trône sur toutes les autres mangeailles étalées ici avec un luxe de couleurs qui fait venir vraiment par trop d’eau à la bouche… Oui !
» Le 26 juin, à son père : Nous avons eu hier une journée terrible : ouragan de fer et de l’eau à se noyer.
Corollaires relatifs aux caractères poétiques employés comme signes du langage par les premières nations Le langage poétique fut encore employé longtemps dans l’âge historique, à peu près comme les fleuves larges et rapides qui s’étendent bien loin dans la mer, et préservent, par leur impétuosité, la douceur naturelle de leurs eaux.
Quand on veut préparer un verre d’eau sucrée, avons-nous dit, force est bien d’attendre que le sucre fonde. […] Il peut plaider nonchalamment sa cause, tandis que l’autre sue sang et eau pour la sienne. […] Les conceptions des plus anciens penseurs de la Grèce étaient, certes, très voisines de la perception, puisque c’est par les transformations d’un élément sensible, comme l’eau, l’air ou le feu, qu’elles complétaient la sensation immédiate. […] La philosophie ne va-t-elle pas consister à se regarder simplement vivre, « comme un pâtre assoupi regarde l’eau couler » ? […] La philosophie grecque, dit-il, expliqua d’abord toutes choses par un élément matériel, l’eau, l’air, le feu, ou quelque matière indéfinie.
Si vous voulez pourtant que je dise quelque chose pour la justifier auprès de vous, nous passions la rivière, l’eau était fort émue, et Mlle votre fille l’était encore davantage. […] Ce n’est pas l’avoir vue que de l’avoir vue sur terre ; l’eau agitée est bien plus favorable à sa beauté. Je tâchai pourtant de la rassurer et de diminuer ses charmes en lui disant que bien des personnes qui ne la valaient pas avaient été reçues par des tritons et des naïades quand elles étaient tombées à l’eau. […] Ce sont celles d’un homme qui vient de recouvrer son indépendance, et qui ne voit rien au-dessus de l’agréable vie que l’on mène aux eaux de Tumbridge, à moins que ce ne soit la vie des eaux de Bath : « Si ces aimables lieux avaient existé du temps des anciens, ils n’auraient pas dit que Vénus et les Grâces faisaient leur résidence à Cythère. » Malheureusement ce train, qui lui convenait fort, ne pouvait pas durer longtemps. […] Le troisième et le quatrième parurent ensemble à Paris à la fin de 1728 ou au commencement de 1729 : c’est avec l’argent qu’ils produisirent que Prévost put sortir de France et faire, comme on l’a vu, les eaux de Tunbridge et de Bath.
On raconte que, le lendemain de son arrivée à Paris, déjeunant en tête-à-tête avec son père, qui le regardait fixement et en silence, tout à coup le naïf savant s’échappa à dire : « C’est drôle, Jean-Jacques, j’aurais cru que ça m’aurait fait plus de plaisir de te revoir. » Un verre d’eau fraîche, jeté brusquement au visage, ne ferait pas, convenons-en, un autre effet. […] Leroux, cet esprit des plus idéalistes, si on se le figure à Weimar, eût paru par trop porter, comme on dit, l’eau à la rivière, le fleuve à la mer, porter l’Allemagne dans l’Allemagne même.
Au chant XXI de l’Iliade, Achille est représenté s’enfuyant à toutes jambes devant le Scamandre furieux et débordé : « Comme lorsqu’un irrigateur, remontant sur la colline à une source aux eaux noires, en veut amener le courant à travers les jeunes plants et les enclos : tenant la houe en main, il aplanit l’obstacle et ouvre la rigole où l’eau court à l’instant : tous les cailloux s’entre-choquent et s’agitent, le flot précipité résonne sur la pente, et devance celui même qui le veut conduire. » Tels les chefs du peuple dans les révolutions : qu’on aille au fond de cette comparaison gracieuse, on a là leur image et comme leur devise.
Si vous injuriez les crocodiles, prenez garde : je vous accablerai de la ridicule démarche du cygne quand il sort de l’eau, et qu’il ressemble à nos classiques français dès qu’ils s’écartent du style noble, et je vous jetterai à la tête les jambes de fuseau de l’antilope, aussi minces, aussi ténues, aussi grêles, aussi sèches que notre mesquine poésie de salon, qui n’est, a dit Jean-Paul, qu’une épigramme prolongée. […] Brayer dit que la rate est gâtée, Guénaut dit que c’est le foie, Valot dit que c’est le poumon, et qu’il y a de l’eau dans la poitrine, Des Fougerais dit que c’est un abcès du mésentère… Ne voilà pas d’habiles gens !
Comme l’eau qui bouillonne et brûle, et, à la fin, refoule tout à coup le poids de l’atmosphère, et s’élance en souffle insensé : ainsi l’esprit humain, après avoir bien bouillonné, a brisé les limites qu’il s’était données à lui-même : le ciel qui comprimait la société, et la maintenait, et l’éclairait, et réchauffait, et la fécondait de rosées, ce ciel est vaincu ; mais la société est détruite, et le doute, le doute insensé, parcourt et sillonne la terre en tous sens. […] Ne voyez-vous pas qu’au seul signal de cette tyrannie, tout le désordre de votre société retombe de tout son poids sur le cœur de la sainte, et, comme la goutte d’eau jetée sur un métal précieux que le feu a rougi, produit une explosion qui détruit et renverse ?
On connaît, sans pouvoir presque s’en rendre compte, le caractère de ce style au mouvement sinueux, continu, et doux, dont les parties unies par des liens délicats, s’enchaînent moins qu’elles ne se fondent les unes dans les autres, où l’image s’élève paisiblement et sans ressaut sur la trame du discours, se rejoignant à la ligne plane du style propre, comme à l’eau du lac la courbe insensible de son flot ; où la phraséologie, nouvelle sans doute, mais où, mais comment, on ne peut le dire, multiplie avec aisance les combinaisons de la période française ; où l’harmonie, nouvelle aussi, refuse de se perdre et dans le rythme des vers et dans le nombre oratoire, et ne semble jamais distincte de la coupe de la pensée et de son tour le plus naturel. […] Terre, ciel, eaux, nuées, tout ce qui entre dans la coquille, voilà l’univers ; tout ce qui n’y peut pas entrer, voilà le néant. […] … Allons voir si nous nous sommes trompés quand nous buvions notre sang comme l’eau, quand nous poussions la roue de notre chariot de guerre, et quand nous faisions depuis mille ans la sentinelle sur le bord de la haute tour que le genre humain s’était bâtie. […] 133 Rachel l’entraîne par ses douces paroles vers la fontaine qui désaltère à jamais, vers la foi. « La terre n’a plus d’eau, dit-elle ; mais mes larmes te baptiseront.
… Imaginez que je l’aimais, que je m’en souviens, que je le vois seul entre le crime et le remords avec des eaux profondes à côté de lui.… Il sera souvent le tourment de ma pensée ; nos amis communs ont jugé entre lui et moi ; je les ai tous conservés, et il ne lui en reste aucun. […] Un morceau de pain, noir ou blanc peu importe, un pot d’eau claire, quelques livres, un ami, et de temps en temps les charmes d’un petit entretien féminin ; voilà, avec une conscience tranquille, tout ce qu’il me faut. […] La néva est la diarrhée que donnent les eaux de cette rivière, comme les eaux de la Seine à Paris ; quelques jours avant mon départ, une violente attaque de poitrine dont on a cru que je mourrais, et qui s’est dissipée presque aussi promptement qu’elle est venue. […] Des glaces crevassées de tous côtés ; un fracas enragé à chaque tour de roue de la voiture pesante ; de l’eau qui jaillit de droite et de gauche ; un pont de cristal qui s’enfonce et qui se relève en craquant.
Mais voici qui indique un sentiment plus vrai : Fanie était dans l’île de Cos, et Méléagre, absent, s’en était allé du côté de l’Hellespont ; il s’adresse ainsi aux voiles qu’il aperçoit du rivage ; « Navires bien frétés, légers sur les eaux, qui traversez le passage d’Hellé recevant au sein des voiles un Borée favorable, si quelque part vous apercevez sur le rivage dans l’île de Cos la petite Fanie regardant vers la mer bleue, annoncez-lui cette parole : « Belle épousée, ce n’est point sur un vaisseau qu’il reviendra ; il est homme à venir à pied, tant il t’aime128 !
L’infirmité de l’esprit humain est telle que les impressions reçues des mêmes objets diffèrent selon les personnes, selon les âges et les moments : la forme ou le fond du vase fait la couleur de l’eau.
La critique de nos jours a trouvé à s’évertuer sur Villon ; en général, elle aime les auteurs à moitié obscurs, elle n’est pas fâchée d’avoir à pêcher en eau trouble.
Tous les mécontentements accumulés, la fatigue du présent, l’ennui, le dégoût vague, une multitude de désirs enfouis jaillissent, pareils à des eaux souterraines sous le coup de sonde qui pour la première fois les appelle au jour.
Rousseau en était sorti pour étonner la société de ses invectives, et pour peindre la nature de couleurs neuves empruntées aux aspects, aux forêts, aux neiges, aux eaux de cette Tempé de l’Helvétie.