La question de la vérité des Mémoires de Saint-Simon n’est pas et ne saurait être circonscrite dans le cercle des observations de ce genre, même quand les erreurs se trouveraient cent fois plus nombreuses. […] Avec Saint-Simon on a vécu en plein siècle de Louis XIV ; là est sa grande vérité. […] Est-ce à dire que son portrait par Saint-Simon en sera moins vrai, de cette vérité qui saisit, et qui d’ailleurs, se rapporte bien à ce que disent les contemporains, mais en serrant l’homme de plus près qu’ils n’ont fait ? […] Cette grandeur qui, nonobstant tout accroc de détail, allait à revêtir d’une imposante majesté l’époque entière de Louis XIV, et qui était la première vérité du tableau, ne pouvait se dévoiler que par la considération des ensembles et dans la suite même de ce corps incomparable d’annales. […] L’exactitude dans certains faits particuliers est moins ce qui importe et ce qu’on doit chercher qu’une vérité d’impression dans laquelle il convient de faire une large part à la sensibilité et aux affections de celui qui regarde et qui exprime.
Il est juste en effet que personne n’admet le réalisme de la description d’un objet imaginaire, si cette description ne lui paraît pas correspondre à la vérité ; mais cette vérité est variable, elle est une idée, et résulte de l’expérience, exacte, chimérique ou volontairement illusoire, que l’on se fait des choses et des gens. Que l’on examine la nature des détails propres à convaincre une personne du monde de la vérité d’un type de gentilhomme, et ceux qu’il faut pour persuader de même dans un feuilleton destiné à des ouvriers. […] La Dame aux Camélias a passé pour une merveille de réalisme auprès du public théâtral du temps ; les ouvriers ne croient guère à la vérité de l’Assommoir, tandis qu’ils admettent facilement le maçon ou le forgeron idéal des romanciers populaires. Il faut donc qu’un roman, pour être cru d’une certaine personne et, par conséquent, pour l’émouvoir, pour lui plaire, reproduise les lieux et les gens sous l’aspect qu’elle leur prête ; et le roman sera goûté, non à cause de la vérité objective qu’il exprime, mais en raison du nombre de gens dont il réalisera la vérité subjective, dont il rend les idées, dont il ne contredit pas l’imaginationds. […] Cette distinction entre « vérité objective » et « vérité subjective » de l’œuvre, qui introduit le point de vue de la réception, n’est pas sans annoncer les analyses fameuses de Jakobson consacrées au « réalisme artistiques ».
Mais rien n’y fit, ni bulles, ni cachots, ni bûchers : la vérité est comme le soleil, il faut qu’elle brille. […] » Ouvrons-le donc sans crainte ; feuilletons-le, lisons-le à chaque page, commentons-le à chaque mot, déchiffrons-y la vérité, dût-elle nous éblouir pour toujours, et ne reculons jamais devant notre tâche. […] Elle doit chercher la vérité par tous les moyens mis en son pouvoir. […] N’oublions pas cette sainte vérité. […] Ô gens de lettres, ne me blâmez pas d’avoir le courage de vous dire ces vérités cruelles dont je mérite ma part, plus que tout autre.
Vous démêlerez dans la religion les hautes vérités que les dogmes offusquent et les généreux instincts que la superstition recouvre. […] Mais, dans les sujets prosaïques, quelle vérité et quelle force ! […] C’est pourquoi ce conte est la satire de toute science et de toute vérité. […] Un homme de loi est un menteur à gages, habitué par vingt ans de chicanes à tordre la vérité s’il est avocat, à la vendre s’il est juge. […] La vérité chrétienne.
Il revint de là en soldat de la foi et en missionnaire, décidé à propager et à enfoncer la vérité, coûte que coûte, parmi les infidèles, parmi les fils de Voltaire. […] Il parle de vérité ; mais est-ce qu’il se figure que parce que nous sommes polis et que nous nous exprimons sur certains grands sujets d’un air de doute et de défiance pour nos propres opinions, nous ne croyons pas aussi à la vérité ? […] Autrement, vous vous exposez à ce qu’on vous accuse, comme on l’a fait, d’être encore moins un cœur et un esprit qui se soucie de la vérité, qu’un tempérament quise satisfait, un talent puissant et à jeun qui cherchepartout sa pâture. […] Savez-vous qu’il a devancé Madame Bovary pour certaines peintures étonnantes de vérité locale ?
Voici l’exacte vérité : j’ai gagné, dans l’espace de deux mois, non dans des maisons de jeu, mais dans la société et au Club des Échecs, regardé presque en tout temps, par la nature même de ses institutions, comme une maison particulière, environ 30,000 francs. […] Je me condamne donc, et je me fais un devoir de l’avouer ; car depuis que le règne de la vérité est arrivé, en renonçant à l’impossible honneur de n’avoir aucun tort, le moyen le plus honnête de réparer ses erreurs est d’avoir le courage de les reconnaître11. » Voilà un Talleyrand bien humble, bien exemplaire, bien soucieux du qu’en dira-t-on. […] Dumont, qui le vit beaucoup à ce moment, nous l’a peint au physique et au moral avec vérité : « Je ne sais s’il n’avait pas un peu trop l’ambition d’imposer par un air de réserve et de profondeur. […] En racontant l’historiette de cette façon bouffonne aux dépens des autres, Talleyrand ne disait que la moitié de la vérité. […] » Mais selon une autre version qui m’est affirmée, le général Bertrand racontant une scène terrible dont il avait été témoin, et dans laquelle Napoléon lança à Talleyrand les plus sanglants reproches, ajoutait que les derniers mots de cette explosion furent : « Tenez, monsieur, vous n’êtes que de la m… dans un bas de soie. » Le mot, sous cette dernière forme, sent tout à fait sa vérité.
L’homme éclairé, qui d’abord adopta la cause des principes, parce que sa pensée n’avait pu s’astreindre à respecter des préjugés absurdes, alors qu’il embrasse une vérité avec l’esprit de parti, perd la faculté de raisonner, ainsi que le partisan de l’erreur, et bientôt emploie des moyens semblables. […] Il faut que les moyens soient de la nature de la cause, parce que cette cause paraissant la vérité même, doit triompher seulement par l’évidence et la force. […] Cette manière de ne considérer qu’un seul côté dans tous les objets, et de les présenter toujours dans le même sens, est ce que l’on peut imaginer de plus fatigant, dès qu’on n’est pas susceptible de l’esprit de parti ; et l’homme le plus impartial, témoin d’une révolution, finit par ne plus savoir comment retrouver le vrai, au milieu des tableaux imaginaires où chaque parti croit montrer la vérité avec évidence. […] L’injustice décourage de la recherche de la vérité ; la gloire est rarement contemporaine, et la renommée elle-même est tellement investie par l’esprit de parti, que l’homme vertueux et grand peut ne pas obtenir son recours sur les siècles. Cette passion étouffe dans les hommes supérieurs les facultés qu’ils tenaient de la nature, et cette carrière de vérité, indéfinie comme l’espace et le temps, dans laquelle l’homme qui pense jouit d’un avenir sans bornes, atteint un but toujours renaissant ; cette carrière se referme à la voix de l’esprit de parti, et tous les désirs, comme toutes les craintes, vouent à la servitude de la foi les têtes formées pour concevoir, découvrir et juger.
Entre ces émotions particulières de l’individu et ces conditions essentielles de l’humanité, qui, réunies, forment l’objet du lyrisme romantique, restent l’intelligence avec la réflexion et les facultés discursives, et les vérités universelles d’ordre rationnel : deux choses que le romantisme laisse de côté. […] Il porte ce goût dans des sujets plus lointains, et la vérité familière, avec l’histoire de France, fait son entrée dans la Visite de Charles-Quint et de François Ier à Saint-Denis. […] Il établissait que « tout ce qui est dans la nature est dans l’art » : ainsi le romantisme devenait un retour à la vérité, à la vie. […] Mais il n’en restait pas moins dans sa doctrine une grande part de vérité : surtout prise comme conseil et leçon, elle était excellente. […] Il y a un fond de vérité dans ce qu’ont dit Vigny (Servitude militaire, ch. 1) et Musset (Confessions d’un enfant du siècle).
La fréquence des suicides au sein de la fortune et des plaisirs est une démonstration évidente de cette vérité. […] Wagner est venu annoncer que la synthèse de l’Art, c’était « le Rêve joyeux de la vérité belle ». […] Schuré oppose au parti pris de stagnation de l’Église contemporaine la parole de Saint Thomas : « La foi est le courage de l’esprit qui s’élance en avant, sûr de trouver la vérité. » Il estime avec Charles Morice que l’ère des révélations n’est pas close et que, seuls, les poètes ont le privilège d’ouïr et d’interpréter les voix du Mystère. Ainsi ceux que ne satisfont point les conclusions matérialistes de la science officielle se voient astreints à continuer leur recherche de la vérité en dehors de l’Église. […] « Je dis la vérité.
Pascal était un grand esprit et un grand cœur, ce que ne sont pas toujours les grands esprits : et tout ce qu’il a fait dans l’ordre de l’esprit et dans l’ordre du cœur, porte un cachet d’invention et d’originalité qui atteste la force, la profondeur, une poursuite ardente et comme acharnée de la vérité. […] Bossuet ne repousse point les lueurs ni les secours de l’antique philosophie, il n’y insulte point ; selon lui, tout ce qui achemine à l’idée de la vie intellectuelle et spirituelle, tout ce qui aide à l’exercice et au développement de cette partie élevée de nous-mêmes, par laquelle nous sommes conformes au premier Être, tout cela est bon, et toutes les fois qu’une vérité illustre nous apparaît, nous avons un avant-goût de cette existence supérieure à laquelle la créature raisonnable est primitivement destinée. […] Il faut citer ce passage d’une souveraine beauté : Qui voit Pythagore ravi d’avoir trouvé les carrés des côtés d’un certain triangle, avec le carré de sa base, sacrifier une hécatombe en actions de grâces ; qui voit Archimède attentif à quelque nouvelle découverte, en oublier le boire et le manger ; qui voit Platon célébrer la félicité de ceux qui contemplent le beau et le bon, premièrement dans les arts, secondement dans la nature, et enfin dans leur source et dans leur principe, qui est Dieu ; qui voit Aristote louer ces heureux moments où l’âme n’est possédée que de l’intelligence de la vérité, et juger une telle vie seule digne d’être éternelle, et d’être la vie de Dieu ; mais (surtout) qui voit les saints tellement ravis de ce divin exercice de connaître, d’aimer et de louer Dieu, qu’ils ne le quittent jamais, et qu’ils éteignent, pour le continuer durant tout le cours de leur vie, tous les désirs sensuels : qui voit, dis-je, toutes ces choses, reconnaît dans les opérations intellectuelles un principe et un exercice de vie éternellement heureuse. […] Il a une contemplation qui s’élève graduellement de vérité en vérité, et qui n’a pas à se pencher sans cesse d’abîme en abîme. […] que de vérités sensibles à tous ceux qui ont souffert, qui ont désiré, perdu, puis retrouvé la voie, et qui n’ont jamais voulu désespérer !
Il semble que tout d’un coup on se soit trouvé des ailes ; sur ces ailes nouvelles, on s’élance à travers l’histoire et la nature ; on touche à tout, on ne doute de rien, on croit à sa force, on n’est point inquiété par la réflexion, on n’est pas attristé par l’expérience ; on se porte et on s’élance tout entier, de tout son cœur et de toute sa force, à la conquête de la vérité. […] Combattre, en philosophie, c’est, pour parler en jeune homme, mettre la couronne de la Victoire sur la tête de la Vérité. […] Quoique les bluets qui le manifestent se succèdent dans le temps et soient placés dans l’espace, il est, comme le triangle abstrait et comme les vérités géométriques, en dehors du temps et de l’espace. […] Un philosophe cherche à trouver et à prouver des vérités générales, rien de plus. […] Le double sens du mot vérité.
D’ailleurs, un goût de vérité général s’est répandu ; moins il y en a dans nos mœurs, plus on en exige dans les écrits. […] Ils sont persuadés que l’écrivain, borné au rôle d’historien-philosophe, doit mieux voir et mieux peindre ce qu’il voit ; qu’en cherchant moins à en imposer aux autres, il en impose moins à lui-même ; que celui qui veut embellir, exagère ; qu’on perd du côté de l’exacte vérité tout ce qu’on gagne du côté de la chaleur ; que pour être vraiment utile, il faut présenter les faiblesses à côté des vertus ; que nous avons plus de confiance dans des portraits qui nous ressemblent ; que toute éloquence est une espèce d’art dont on se défie ; et que l’orateur, en se passionnant, met en garde contre lui les esprits sages qui aiment mieux raisonner que sentir. […] On le lit en silence : chaque homme avec qui il converse est isolé : le sentiment est solitaire, l’orateur lui-même est absent ; ni les inflexions de sa voix, ni les traits de son visage, ne vous attestent la vérité de ce qu’il dit. […] Osez mêler un ton mâle aux chansons de votre siècle ; mais surtout ne vous abaissez point à d’indignes panégyriques : il est temps de respecter la vérité ; il y a deux mille ans que l’on écrit, et deux mille ans que l’on flatte ; poètes, orateurs, historiens, tout a été complice de ce crime ; il y a peu d’écrivains pour qui l’on n’ait à rougir : il n’y a presque pas un livre où il n’y ait des mensonges à effacer. […] Qu’il en naisse un cinquième, et qu’il le soit de la vérité !
Le portrait du célèbre sculpteur Le Moyne est surprenant pour la vie et la vérité qui y sont. […] Il prétend qu’il ne va à la cour que pour leur dire leurs vérités, et à Versailles il passe pour un fou dont les propos ne tirent point à conséquence ; ce qui lui conserve son franc-parler.
Pour retrouver l’astronomie poétique, nous ferons usage de trois vérités philologiques : I. […] Les Phéniciens, instruits par les mêmes Chaldéens, portèrent aux Grecs la connaissance des divinités qu’ils plaçaient dans les étoiles. — Avec ces trois vérités philologiques s’accordent deux principes philosophiques : le premier est tiré de la nature sociale des peuples ; ils admettent difficilement les dieux étrangers, à moins qu’ils ne soient parvenus au dernier degré de liberté religieuse, ce qui n’arrive que dans une extrême décadence.
Les passions sont la plus grande difficulté des gouvernements ; cette vérité n’a pas besoin d’être développée, on voit aisément que toutes les combinaisons sociales les plus despotiques, conviendraient également à des hommes inertes qui seraient contents de rester à la place que le sort leur aurait fixée, et que la théorie démocratique la plus abstraite serait praticable au milieu d’hommes sages uniquement conduits par leur raison. […] Ces diverses réflexions ne pourraient avoir de prix qu’en les appuyant sur des faits, sur une connaissance détaillée de l’histoire, qui présente toujours des considérations nouvelles, quand on l’étudie avec un but déterminé, et que guidé, par l’éternelle ressemblance de l’homme avec l’homme, on recherche une même vérité à travers la diversité des lieux et des siècles. […] En examinant la vérité, séparément des hommes et des temps, on arrive à une démonstration, qui se reporte ensuite avec moins de peine sur les circonstances présentes. […] On se confie d’autant plus à leur durée que l’on est soi-même plus incapable d’ingratitude ; on se sait des droits à la reconnaissance, on croit à l’amitié ainsi fondée plus qu’à aucun autre lien de la terre, tout est moyen, elle seule est le but ; l’on veut aussi de l’estime publique, mais il semble que vos amis vous en sont les garants, on n’a rien fait que pour eux, ils le savent, ils le diront ; comment la vérité, et la vérité du sentiment ne persuaderait-elle pas ? […] En suivant ce plan, je crois de même avoir prouvé qu’il n’est point de bonheur sans la vertu ; revenir à ce résultat par toutes les routes, est une nouvelle preuve de sa vérité.
La Passion de Gréban nous offrirait quelques accents vrais et touchants dans le rôle de la Vierge, ou dans le couplet de la mère de l’enfant mort, de la vérité encore dans le reniement de saint Pierre et dans le suicide de Judas, un réquisitoire d’Anne contre Jésus qui amuse comme l’involontaire expression de l’effarement irrité du bourgeois devant le socialisme révolutionnaire du fils de Dieu. […] Dans la Cornette, un vieux mari cajolé, berné, prévenu par sa femme, n’entend pas le mal que ses neveux viennent lui en dire, et, grâce à un stratagème de la rusée coquine, prend pour railleries sur sa cornette toutes les vérités qu’ils lui content de sa moitié ; dans le Cuvier, un faible mari, opprimé par sa femme et sa belle-mère, a accepté de faire le ménage, la lessive, balayer, cuire le pain, soigner le marmot, etc. ; mais une bonne occasion s’offre de s’insurger sans péril, et de redevenir maître chez lui du consentement de sa femme. Dans l’une et l’autre farce, la fantaisie bouffonne de l’action et du dialogue enveloppe une certaine vérité d’observation, qui n’est pas même dénuée de finesse. […] Dans ce sujet si simple — un marchand fripon, dupé par un avocat fripon, que dupe à son tour un rustre fripon, auquel il avait donné secours pour duper encore le marchand — dans ce sujet si mince, il y a un tel jaillissement de gaieté, tant de finesse, tant d’exactitude dans l’expression des caractères, une si délicate et puissante intuition de la convenance dramatique et psychologique des sentiments, une vie si intense, et un style si dru, si vert, si mordant, ici une si exubérante fantaisie et là une si saisissante vérité, souvent un si délicieux mélange de la fantaisie au dehors et de la vérité au dedans, qu’en vérité la farce de maître Pierre Patelin est le chef-d’œuvre de notre ancien théâtre, et l’un des chefs-d’œuvre de l’ancienne littérature. […] Pour celui qui l’a écrite, pour ceux qui la voyaient, l’action de Patelin était une folie, et l’esprit de Patelin était la vérité même, la raison et la vie.
Bussy tient à honneur de nous faire entrer dans l’esprit de cette campagne, l’une des plus glorieuses pour Turenne, quoiqu’il y en ait eu de bien plus brillantes : Il ne tiendrait qu’à moi de ne rien dire de cette action, écrit-il au sujet d’une des affaires de cette campagne ; et peut-être que les flatteurs du maréchal ne l’ont pas sue ou n’ont pas été assez habiles pour la remarquer ; mais ni l’amitié ni la haine ne me feront jamais manquer à ce que je dois à la vérité. En général, Bussy peut être frondeur et imprudent, mais il n’est pas menteur : « Et pour faire voir, dit-il encore, que c’est plutôt par amour pour la vérité que je parle, que par aucune malignité de naturel, je dis du bien, quand j’en trouve, de la même personne de qui j’ai dit du mal. » C’est en ce point que le jugement de Bussy vaut mieux que son caractère. Ce même amour de la vérité, de la réalité historique et humaine ; lui fait retrancher toutes ces exagérations auxquelles on se laisse emporter si aisément en racontant les grandes actions où l’on a été témoin ou acteur. […] Après qu’on m’eut éveillé, je ne pus me rendormir… On saisit bien en quoi le Turenne de Bussy ne ressemble point au Condé de l’Oraison funèbre, duquel Bossuet a dit avant Rocroi : « On sait que le lendemain, à l’heure marquée, il fallut réveiller d’un profond sommeil cet autre Alexandre. » Je laisse à ceux qui ont eu l’honneur de se trouver à pareille fête à côté des héros, le soin de décider lequel des deux récits leur paraît le plus voisin de la vérité. […] , même en le traduisant, il a pu paraître ne raconter que des vérités et des particularités contemporaines.
« Ce ne sont là que des aperçus ; ils ont leur vraisemblance, et je ne les crois pas dénués de vérité. […] Il est bien vrai qu’on peut l’être à divers degrés, et que les vérités progressives semblent se succéder, comme dit Pascal, du pour au contre1. […] Il leur demande non d’être justes, mais d’être frappantes ; non d’exprimer une vérité, mais de produire une belle page. […] Cette église est pacifique et tolérante, comme la vérité qu’elle possède et recherche. […] La vérité est toujours sainte ; elle sanctifie tout ce qu’elle touche.
La rencontre des mêmes notions dans l’homme atteste, non pas une transmission unique et directe, mais l’identité des âmes et leur affinité naturelle avec la vérité divine. […] Irons-nous plus loin encore, et supposerons-nous que l’éloquent Athénien, en Égypte ou ailleurs, a connu quelques parties des livres saints d’Israël, qu’il en a recueilli des vérités, emprunté des couleurs, qu’il est poëte à leur exemple ? […] Et, chose extraordinaire, en même temps qu’elle conserve au plus haut degré l’empreinte d’une race particulière et séparée, elle est, par la force et la vérité des mouvements, par l’abondance de la passion, le langage qui parle le mieux au plus grand nombre des âmes humaines. […] « Comprenez aujourd’hui ces vérités, vous qui oubliez Dieu ; et craignez que je ne vous saisisse, et qu’il n’y ait personne pour vous délivrer. […] Humainement parlant, on ne peut expliquer d’autre sorte ces écoles perpétuées dans Israël, ces prophètes, voix du peuple et conseils du souverain, accusateurs publics de toute violence et de toute fraude, hérauts et messagers, scellant de leur sang la vérité de leurs reproches et de leurs prédictions.
Ou encore ils font comme ces seigneurs voleurs, ces Burgraves du Rhin qui barraient le fleuve ; aucune vérité ne passe. » C'est une raison de plus pour la Revue suisse de donner à son public ce qui lui arrive de ces vérités non scandaleuses et désintéressées.
mais c’est la nature et la vérité de ce temps-là. […] Je ne veux défendre que la vérité. […] » Sentiment féroce, à la vérité, mais d’une extrême énergie et d’une expression sublime. […] Dans les opéras mêmes de Quinault, il n’y a ni caractère, ni invention, ni vérité. […] Boursault, à l’aide de ses fables, avait dit des vérités hardies ; on en retrancha quelques-unes à la représentation.
Uranie répond qu’à la vérité ces mots ne sont pas du tout plaisants en eux-mêmes, mais qu’ils le deviennent par réflexion à Arnolphe, et que l’auteur ne les a pas donnés, comme des traits d’esprit, mais comme des traits de caractère. […] Lysidas, d’erreur ou de vérité, elle n’en croit, ni plus ni moins, ce qu’elle a senti par elle-même. […] Il est vrai qu’elle s’y résigne, en considérant que les vérités les plus simples, comme les vérités les plus hautes, ne sont pas susceptibles d’une démonstration rationnelle, et que, pour prouver qu’il fait jour, comme pour prouver Dieu, il ne faut point raisonner, mais ouvrir les yeux et sentir. […] Mais, si le poète fait tristement, courageusement, le sacrifice des espérances les plus chères au cœur de l’homme à ce qu’il croit être la vérité, quoi de plus beau ? […] On n’a pas votre culture et votre esprit sans être sensible à tant de vérité, de délicatesse, de force, d’élévation et de profondeur.
Pleines de vie et de vérité pour les peuples qui les ont créées, elles ne sont pour nous qu’un objet d’analyse et de dissection. […] De petites naïvetés, des traits qui font sourire, non ce qui est véritablement admirable, le tableau d’un âge de l’humanité dans son inimitable vérité. […] Voilà, certes, une formule qui renferme une très grande part de vérité ; mais comment croire qu’elle explique toute chose ? […] S’il se fût écarté de la vérité, les journaux auraient réclamé. […] Boileau a raison : donner l’air de la fable à de saintes vérités, c’est un péché.
La nature nous départit à tous, par l’entremise de sens, une multitude de petits cartons sur lesquels elle a tracés le profil de la vérité. […] Le clergé ou la religion qui converse avec la vérité. […] Devant elle, une vérité, son aînée de quelques années, toute nue, sèche, blafarde, sans tétons, le corps homasse, le bras et l’index de la main droite dirigés vers le ciel et ce bras dont le racourci n’est pas assez senti de trois ou quatre ans plus jeune que le reste de la figure ; derrière cette vérité, un petit génie renversé sur un nuage. […] Celui de la religion et de la vérité est seulement, je ne puis pas dire sale, mais bien un peu gris. […] Il est gras, empâté, séduisant ; mais en sortira-t-il jamais une vérité forte ?
Il y a une vérité dogmatique, et, à son défaut, il y aurait une vérité psychologique dans cette idée chrétienne que les fils ont à payer pour leurs pères. […] Édouard Schuré a d’autres ambitions : il prétend à la vérité. […] Mais voilà de la vérité humaine. Constatez-la ; puis expliquez-la : tout se passe comme si les dogmes chrétiens étaient la vérité supérieure aux vérités partielles, la vérité suprême. […] Si telle est, au bout du compte, la vérité, un Maurice Barrès l’agrée : M.
La vérité est qu’un idéal ne peut devenir obligatoire s’il n’est déjà agissant ; et ce n’est pas alors son idée qui oblige, c’est son action. […] Mais, nous venons de le dire, la vérité est tout autre. […] La vérité est que si une aristocratie croit naturellement, religieusement, à sa supériorité native, le respect qu’elle inspire est non moins religieux, non moins naturel. […] La vérité est que les deux principes sont au fond de l’idée qu’on s’est toujours faite du bonheur. […] Mais la vérité est que la science a donné ce qu’on lui demandait et qu’elle n’a pas pris ici l’initiative ; c’est l’esprit d’invention qui ne s’est pas toujours exercé au mieux des intérêts de l’humanité.
Pour les figures, ceux qui ne cherchent que la vérité, ne leur sont pas favorables ; et ils les regardent comme des piéges que l’on tend à l’esprit pour le séduire. […] Mais ces vérités se sentent peut-être mieux dans la simple exposition que j’en fais, que dans l’iliade et l’odissée entiéres, où elles me paroissent noyées dans une variété infinie d’événemens et d’images. […] On pouvoit loüer les dieux en prose, et se servir du langage ordinaire pour enseigner la vérité. […] Je ne cherche à faire honneur à mon art, qu’en l’employant à mettre en jour la vérité et la vertu. […] J’oserai donc exposer là-dessus ma conjecture, qui ne peut être qu’utile, quand elle ne feroit qu’exciter quelqu’un à en trouver le faux, et à lui opposer la vérité.
La vérité est que l’homme parle parce qu’il pense, c’est-à-dire abstrait, généralise, juge, raisonne, tandis que l’animal ne pense pas, dans la véritable acception du mot, étant incapable de ces diverses opérations. […] « Les déterministes affirment comme une vérité d’expérience que, dans le fait, es volitions sont consécutives à des antécédents moraux avec la même uniformité, et quand nous avons une connaissance suffisante des circonstances, avec la même certitude que les effets physiques sont consécutifs à leurs causes physiques. […] D’une part, l’école dite rationaliste, l’école de l’a priori, ainsi que l’appelle Stuart Mill, avait abusé des idées innées, des vérités soi-disant indépendantes de l’expérience, produit d’une sorte de faculté révélatrice qu’elle nomme raison. […] De son côté, l’école de Reid, bien que plus circonspecte et se rapprochant davantage de la méthode de Bacon, avait étendu outre mesure la liste des principes primitifs et inexplicables de la nature humaine, soit dans l’ordre des vérités métaphysiques, soit dans l’ordre des vérités morales. […] Nous voyons, nous touchons, nous possédons la vérité sur nos facultés et nos capacités, sur la spontanéité réelle de notre volonté, sur le secret mécanisme de notre vie morale, sur la nature même de notre être.
En effet, elle consiste dans un mensonge réfléchi qui prend le masque de la vérité. […] Pour résoudre ce problème, établissons d’abord une grande vérité : par un effet de la diversité des climats, les peuples ont diverses natures. […] Ainsi le chant uni aux vers devint de plus en plus rapide, en suivant exactement le progrès du langage et des idées. — Ces vérités philosophiques sont appuyées par la tradition suivante : l’histoire ne nous présente rien de plus ancien que les oracles et les sibylles ; l’antiquité de ces dernières a passé en proverbe. […] Les fondateurs de la civilisation humaine se livrèrent à une topique sensible, dans laquelle ils unissaient les propriétés, les qualités ou rapports des individus ou des espèces, et les employaient tout concrets à former leurs genres poétiques ; de sorte qu’on peut dire avec vérité que le premier âge du monde s’occupa de la première opération de l’esprit. […] Platon a deviné plutôt que découvert cette vérité.
La vérité des relations et des intrigues de cour et de société sous l’Empire, sous la Restauration, sous Louis-Philippe, on la raconte, on en cause avec quelques-uns des demeurants et des bien informés, on ne l’a pas encore écrite ou du moins mise au jour. […] C’était pour lui l’enluminure et, par conséquent, l’altération de la vérité ; c’était la pompe et la vanité, substituées à la raison et à la logique ; c’était le succès de la cause, sacrifié au succès de l’orateur ; enfin, la déplorable phrase, au lieu du mouvement du cœur et de l’esprit. […] Les lettres qu’il nous produit sont vraiment touchantes et belles de simplicité, de vérité. […] En politique, il a bien plus fondé de doctrines que ceux qu’on a nommés doctrinaires ; en philosophie, son ouvrage sur les religions contient plus de vérités neuves et mères qu’aucune des trois écoles opposées de Lamennais, de Cousin et de Tracy. […] Il a quelques bons portraits, notamment celui de M. de Salvandy, son ami particulier, dont il retrace avec vérité la physionomie animée, ardente, et les belles qualités au service desquelles étaient, pour ainsi dire, attelés de légers ridicules qui avançaient leur homme plutôt qu’ils ne le retardaient.
Forcé de la quitter et expulsé par les menaces du Directoire, il n’eut de refuge qu’en Angleterre : il y reprit sa plume indépendante, disant des vérités à tous, et aux incorrigibles émigrés tout les premiers. […] Écrivain, ne lui demandez ni les grâces, ni le brillant, ni le coulant : mais dans sa rudesse de plume et à travers le heurté de sa diction, quand la vérité le saisit, il rencontre des traits énergiques, pittoresques même, et qui, pour flétrir des misères sociales et des opinions vicieuses, ont ce genre d’exactitude qu’aurait un physicien passionné. […] C’est un républicain de naissance et d’affection, ne l’oublions pas, un vrai citoyen de Genève, que cet homme qui, par bon sens et par la force de la vérité, est obligé de déclarer à la France de 89 et de 92 qu’elle n’est pas faite pour la république, et qu’il faut trente ans encore d’éducation préliminaire pour que les Français s’accoutument à quelque pratique de la liberté ; c’est un républicain qui n’est royaliste que parce que l’évidence de la raison l’y oblige et qu’il ne peut écrire contre sa conscience. […] Tous mes soins se portaient donc à présenter la vérité, mais sans la rendre effrayante ; de ce qui n’avait été qu’un tumulte, j’en faisais un tableau ; je cherchais et je saisissais, dans la confusion de ces bouleversements du sanctuaire des lois, les traits qui avaient un caractère et un intérêt pour l’imagination. […] On retrouve quelques-unes de ces pensées et de ces expressions tout à fait poignantes dans la brochure qu’il publia à Bruxelles en mars 1793 (Considérations sur la nature de la Révolution de France, et sur les Causes qui en prolongent la durée), et dans laquelle il dit à tous de grandes vérités.
Nous lui dirons mieux la vérité toute entière. […] Or l’activité du cœur et l’ardeur de la foi poussent au prosélytisme ; et c’est ce prosélytisme embrasé d’une croyante qui voudrait partager le pain de sa vérité avec l’univers, qu’on respire dans ce petit livre, offert aux imaginations désoccupées dans un but que l’auteur est trop habile pour ne pas cacher ! […] Elle écrit pour entraîner les âmes du côté où elle croit la vérité. Pour nous, la vérité n’est certainement pas du même côté que pour elle ; mais les protestants ont encore de beaux fragments de ce que, hélas ! […] ce que l’Église nous permet à nous, une femme qui n’est pas de notre communion, — une glaneuse libre de vérités ; privée, hélas !
L’autre espece de public, qui par son petit nombre à peine en mérite le nom, ne cherche dans les contestations littéraires que l’éclaircissement de la vérité. […] Nous n’avons en vûë l’un et l’autre que la vérité, et l’avantage du public. […] Tous les égards sont dûs à ceux avec qui nous vivons, et nous ne devons rien aux autres que la vérité. […] Toutes nos assemblées ne se passent que dans ces contradictions utiles d’où resulte la vérité. […] Pourquoi nous faire une longue énigme d’une vérité simple ?
« Mais, s’écrieraient-ils, vous présentez la vérité sous forme bien paradoxale ; votre style, à vous-même, est trop pensé ; vous frappez à tout coup ; vous parlez Quintilien, mais en traits à la Sénèque. » Et moi je l’en louerai et je lui dirai : « Vous nous réveillez sur ces vieilles questions ; vous avez trouvé moyen de nous promener dans la terre de la patrie par des chemins imprévus. […] La vérité, au lieu de s’imposer, se donne comme un plaisir d’esprit dont Voltaire nous invite à essayer. […] Cicéron, tendre père d’une fille charmante, père désespéré quand il perdit Tullie, en est meilleur citoyen, plus attaché à ses amis, plus épris de la vérité, laquelle devient plus chère à l’homme chez qui la tendresse de cœur se communique à l’esprit, et qui aime la vérité à la fois comme une lumière et comme un sentiment. — J’ai peur que Voltaire n’ait aimé que son esprit… Il ne serait pas besoin d’avoir beaucoup vu M.