Ces deux existences désormais n’en font qu’une, tellement qu’il est impossible d’écrire l’histoire du génie de l’un sans toucher au génie de l’autre. […] Mais, pendant que nous touchons à la vie privée du grand homme, disons ce qui l’honore après avoir dit ce qui l’inculpe. […] Que le temps la touche à chaque heure dans son vol rapide ! […] Goethe se souvint de son âge, et se contenta du feu et de l’encens, sans toucher au vase fragile d’où cet enivrement montait à lui. […] Nous la possédons tout entière en deux volumes ; cette correspondance étincelle plus qu’elle ne touche ; c’est un feu éblouissant, mais c’est un feu d’artifice ; une lettre d’Héloïse à Abélard contient plus de chaleur de passion que ces deux volumes de lettres entre Bettina et l’auteur de Werther.
Quand l’Italie commença à vieillir, elle produisit les poèmes facétieux du Morgante, du Roland amoureux, du Roland furieux ; quand l’Espagne toucha à sa sénilité, elle produisit le Don Quichotte ; quand la France sentit les atteintes de l’âge après son dix-septième siècle, elle produisit Voltaire et la Pucelle ; quand l’Angleterre eut passé son âge de raison pour arriver à son âge de désillusion littéraire, elle produisit le Don Juan de Byron, ce poème de l’ironie de toute chose, même de l’amour et de la poésie. […] On redescendait alors pour se rencontrer sur les terrasses, et pour commencer nonchalamment une seconde matinée, jusqu’à l’heure où le soleil touchait presque à la mer, où la première rosée du soir mouillait l’herbe, et où l’on annonçait que la calèche était attelée pour la promenade du soir, aussi régulière que le coucher du soleil. […] Voltaire l’a essayé en vers et n’a pas réussi ; il y faudrait la touche d’un Claude Lorrain. […] Renaud, le roi, la cour, le peuple, touchés de sa générosité et de sa constance, avaient supplié Ginevra de récompenser tant d’amour par le don de sa main. […] — C’est vrai, répondit Léna, il serait moins artiste peut-être ainsi, mais il serait plus homme et par cela même plus pathétique ; et tenez, voulez-vous que je vous dise pourquoi son chant de Ginevra nous touche et nous ravit plus que toutes les amusantes folies que nous avons lues jusque-là ?
Elle est debout et attend ; mais Ulysse délibère : ira-t-il en suppliant toucher les genoux de la jeune fille aux beaux yeux, ou la suppliera-t-il de loin, par des paroles persuasives, de lui donner des vêtements et de lui montrer la ville ? […] Femme, c’est ainsi que je te contemple, t’admire et que j’ai tremblé de toucher tes genoux, car j’éprouve des douleurs cruelles. […] Je suis riche, très riche, ajouta-t-il ; regardez, j’ai plus de cent écus dans cette bourse ; j’ai ma pension de poète à toucher incessamment par quartiers ; c’est vous qui êtes pauvre, puisque vous avez employé vingt ans de politique à vous appauvrir, et que vous devez vos jours et vos nuits à vos créanciers, que le travail ne solde pas assez vite. […] Son pied était en effet retourné, mais il boitait toujours, et il éprouvait par intervalle des douleurs telles, qu’elles touchaient à la frénésie. […] Les soins pieux et féminins de ce frère, qui le soutenait de l’argent de sa bourse comme de son bras, nous touchèrent tous jusqu’aux larmes.
Quoique cette mort n’eût rien d’imprévu à cause des accidents qui pendant les derniers mois l’avaient frappé à plusieurs reprises, et bien que la veuve, désormais libre de sa personne, fût très loin d’avoir perdu un ami, je vis, à ma grande surprise, qu’elle n’en fut pas médiocrement touchée, non poco compunta .” […] ” Je n’en dis pas davantage, je n’en touchai même pas un mot dans ma réponse à mon amie, mais, sur-le-champ et avec la rapidité de l’éclair, je conçus à la fois les deux Brutus, tels que depuis je les ai exécutés. […] « Une seule inquiétude le poignait, dit-il ; c’étaient des transes d’esprit de tout genre que la révolution qu’il chantait ne vînt, de jour en jour, par ses mouvements insurrectionnels qui éclataient dans Paris depuis la convocation des états généraux et la prise de la Bastille, l’empêcher de terminer ses éditions qui touchaient à leur fin, soit à Paris chez Didot, soit à Kehl chez Beaumarchais, et qu’après tant de peines et de lourdes dépenses, il ne fallût échouer au port. […] Au moment du procès de Louis XVI, et touché de loin par sa mort, il avait écrit, dans son cabinet, une défense de ce roi. […] Je n’y savais qu’un moyen : si on ne me provoquait pas, je ferais le mort ; si l’on me touchait le moins du monde, je saurais donner signe de vie et me montrer en homme libre.
Enfin, le théâtre de Marivaux est plus aisé que son roman, et quoique là encore le fini y touche souvent au précieux, on se délasse et on se détend du Marivaux de Marianne dans le Marivaux des Jeux de l’amour et du hasard et des Fausses confidences. […] Où la pièce prétend toucher, il est lourd ; où elle veut faire rire, il n’est que grimaçant. […] La vraie comédie n’a pas la prétention de nous mettre de nos personnes sur la scène pour nous intéresser ou nous instruire ; mais la leçon, quoique indirecte et impersonnelle, n’en va pas moins toucher celui qui en a besoin. […] Selon lui la tragédie grecque et la tragédie française ne touchent point. « Enlever, agiter, transporter, bouleverser le spectateur », voilà le but de l’art. […] C’est en effet continuer Molière que nous montrer Philinte, si sec pour autrui, si tendre quand on le touche, qui s’écrie à la nouvelle d’un acte d’improbité dont il est victime : Je me perds, je m’égare.
* * * — Touchée de nos procédés gentilshommes, lors de la vente de sa maison, Mme de Tourbet a tourmenté Flaubert pour nous amener dîner chez elle. […] » blasphème le journaliste qui, à chaque article, touche le viager de sa courte gloire, et ne la veut pas plus longue pour les autres, non récompensés de leur vivant, — pas plus que pour les livres méconnus qui espèrent leur paye de la postérité. […] Nous acceptions du premier coup la proposition de Sainte-Beuve, très touchés et reconnaissants de cette courtoisie de la réponse. […] Ses gestes sont des gestes de rêve, et ses lèvres très souvent oublient de boire au verre, qui touche ses dents… On dirait que c’est un chef-d’œuvre du chagrin ! […] Qu’on imagine dans la nuit de la petite pièce, sur une feuille de papier — dont le rond d’une timbale de guerre du xviiie siècle peut donner l’idée — les montagnes, les torrents, les omnibus, les chevaux, les passants, peints et touchés, comme par les plus admirables petits maîtres qu’on pourrait rêver.
16 janvier Rien ne m’agace comme les gens qui viennent vous supplier de leur faire voir des choses d’art, qu’ils touchent avec des mains irrespectueuses, qu’ils regardent avec des yeux ennuyés. […] Il n’est frappé, n’est touché, n’est remué que par une chose : la sculpture. […] Théo, sortant de sa somnolence, dit : La fève est la plante qui touche le plus à l’humanité. […] » En descendant l’escalier, tout en étant touché de la grâce et de la politesse de ce grand esprit, il y avait, au fond de moi, une ironie pour cet argot mystique, creux et sonore, avec lequel pontifient des hommes comme Michelet, comme Hugo, cherchant à s’imposer à leur entourage, ainsi que des vaticinateurs ayant commerce avec les dieux. […] Enfin presque invisiblement descend sur lui, l’enveloppe, et touche à ses attitudes, à ses gestes, à son dire, sans qu’on puisse bien la définir par des mots, la triste humilité particulière à l’enfance des vieillards.
Job, après avoir touché le sommet du drame, remue le fond de la philosophie ; il montre, le premier, cette sublime démence de la sagesse qui, deux mille ans plus tard, de résignation se faisant sacrifice, sera la folie de la croix. […] Le voyageur qui obéissait à cet itinéraire parcourait les cinq satrapies du pays des Philistins, visitait les peuples charmeurs de serpents et suceurs de plaies, les Psylles, allait boire au torrent Bosor qui marque la frontière de l’Arabie déserte, puis touchait et maniait le carcan de bronze d’Andromède encore scellé au roche de Joppé. […] Dans tous les autres poètes, on devine cette communication ; dans Jean, on la voit, par moments on la touche, et l’on a le frisson de poser, pour ainsi dire, la main sur cette porte sombre. […] Le fond de l’enfer touché, Dante le perce, et remonte de l’autre côté de l’infini. […] À beauté égale, le Râmayana nous touche moins que Shakespeare.
Voilà ce qui me plaît, voilà ce qui me touche. […] En vérité c’est bien l’aveu qui devait toucher un bas-bleu. […] Voilà ce que virent, voilà ce que touchèrent les contemporains de Jean-Jacques ! […] Sa grâce pouvait toucher les cœurs les plus rudes. […] Et pourtant leur petite chanson à la lune me touche.
Par le Midi et le golfe de Lyon ne touche-t-elle pas à l’Italie, à la patrie du Dante ? […] De très courtes citations feront toucher au doigt ce que j’avance. […] que le génie et la folie se touchent de près ! […] On aimerait en lui des marques de génie, mais d’un génie qui ne peut guère nous toucher. […] Il est grand comme Homère, et, comme lui, « il anime d’un trait tout ce qu’il touche.
Il ne faut pas regarder ce qu’on ne veut pas toucher. […] Joseph crut alors toucher à une condition meilleure : c’était l’instant critique ; il rassembla les forces de sa raison et se résigna aux dernières épreuves. […] Bonne autant qu’ingénue, Elle me consolait du sort trop inhumain ; Je l’avais vue un jour rougir à ma venue, Et sa main par hasard avait touché ma main. […] C’est ce côté que je n’avais qu’atteint et touché dans Joseph Delorme, qui se trouve développé dans les Consolations. […] Aussi la plupart des chants que les âmes malades nous ont transmis sur elles-mêmes datent-ils déjà de l’époque de convalescence ; nous croyons le poète au plus mal, tandis que souvent il touche à sa guérison ; c’est comme le bruit que fait dans la plaine l’arme du chasseur, et qui ne nous arrive qu’un peu de temps après que le coup a porté.
Ici Fromentin fait le geste d’un peintre qui pose, une petite touche carrée à la Teniers, sur une toile. […] À mesure qu’il parle de ce pays, le blanc de ses yeux s’agrandit dans son exaltation, ou bien, les yeux fermés, la tête renversée en arrière, il se touche le front de l’index. […] Dans cette boutique aux étrangetés, si joliment façonnées et toujours caressées de soleil, les heures passent rapides, à regarder, à manier, à retourner, ces choses d’un art agréable au toucher, et cela, au milieu du babil, des rires, des pouffements fous de la joviale créature. […] Tout le monde aussitôt, rue Chauchat, où jusqu’à sept heures, nous touchons, nous manions, nous palpons des raretés, en un état de fatigue tout proche de l’évanouissement. […] Une autre voix. — Oh, la séductrice famille que cette famille Sarah Bernhardt… Vous n’avez pas connu la charmante petite Régina, morte à dix-neuf ans… Une autre voix. — Oui, on estime à quatre-vingts millions de rente, la fortune que les jésuites possèdent en France, et cela est établi par une enquête secrète, faite tout dernièrement… C’était assez difficile, ils n’ont que des actions au porteur… le gouvernement a fait des recherches, pour arriver à savoir quelles étaient les personnes qui touchaient ces titres.
Geoffroy développe ingénieusement les points qu’il vient de toucher. […] Il ne touchera personne. […] Je vais maintenant toucher un point plus délicat encore. […] Elle aura beau déployer des trésors de sensibilité ; je n’en serai touché que médiocrement. […] Si nous touchons terre un instant, cet instant suffit pour nous gâter le plaisir de ces inventions comiques.
Ce qui nous touche, c’est l’humain, et M. de Laprade s’est trop attardé dans les régions surhumaines. […] Tout ce qui le touche lui apparaît énorme, disproportionné. […] Je sais bien que l’art rend sacré tout ce qu’il touche ; n’abusons pas de cette excuse-là. […] Feuillet, n’a touché d’une main si légère ces petits mystères d’une psychologie délicate. […] Une main bienveillante touche la plaie, une parole attendrie la guérit.
J’en ai pesé chaque mot avec le plus grand soin ; c’est ma profession de foi en ce qui touche les choses humaines, et, quand la civilisation moderne aura sombré par suite de l’équivoque funeste de ces mots : nation, nationalité, race, je désire qu’on se souvienne de ces vingt pages-là.
Les Mariages assortis, la Coquette fixée, le Retour de l’Ombre de Moliere, sont d’une touche vraiment comique ; & avec une intrigue mieux combinée, mieux suivie, un dénouement mieux préparé, on pourroit le comparer à ce que nous avons eu de meilleur depuis Moliere & Regnard.
Des bacchanales, des fêtes de Vénus, des rapts, des métamorphoses, peuvent-ils toucher le cœur, comme les tableaux tirés de l’Écriture ?
Au-dessus, Mercure porté dans les airs, touche de son caducée cette sœur incommode.
Elles se toucheraient.
Renaud amoureux malgré lui, et parce qu’il est subjugué par les enchantemens d’Armide, m’interesse vivement à sa situation : je suis même touché de sa passion quand il ouvre la scene en disant à sa maîtresse qui le quitte pour un moment : Armide vous m’allez quitter, et lorsqu’il ne lui replique, après qu’elle lui a dit le motif important qui l’oblige à s’éloigner de lui, que les mêmes paroles qu’il lui avoit déja dites : Armide vous m’allez quitter, Renaud me paroît alors un homme livré tout entier à l’amour.
Tout se touche. […] Il n’en est point que ne touche le journal ou le livre. […] Ils nous toucheront toujours par quelque côté. […] Leur sort le touche. […] Ces nouveaux Thomas toucheront de la main.
Nous toucherons donc vivement au but de cette première étape. […] n’est-ce-pas toucher à une actualité brûlante comme le fer rouge ? […] Fiorentino et de Rovray sont en contradiction flagrante en ce qui touche l’apparition des Vêpres siciliennes. […] En ce qui touche Verdi, M. […] Tous deux encore se touchent par un point qui n’est pas précisément à leur louange : l’indigence du style.
Mathieu de Montmorency avait été aussi fort touché, quoiqu’elle n’eût jamais été belle.
Familière dès longtemps avec ces types qu’elle perfectionne en secret et qu’elle aime, la femme distinguée qui a écrit ce livre n’a pas songé qu’il y avait lieu à une composition, et, dans un grand nombre de cas, elle a raconté ce qui les touche de plus important et de plus intime, en peu de mots, avec une sorte de brève négligence, comme on fait à la fin d’une lettre, lorsque le jour baisse ou que le papier manque.
Max Elskamp a touché de plus près qu’aucun, dans son parler et dans ses gestes, le simple.
Cela ne m’a jamais beaucoup touché, je l’avoue.
On ne sauroit se dissimuler qu’il les défigure le plus souvent par une touche seulement nerveuse, lorsqu’elle devroit avoir ce moëlleux d’expression, cette douceur d’harmonie, cette vivacité de coloris, le vrai charme du Cygne de Mantoue : mais, comme l’a dit Horace, Ubi plura nitent in carmine, non ego paucis Offendar maculis.
Il y passe en revue la plupart des Auteurs de nos jours qui ont fait quelque sensation dans le Monde littéraire ; & si ses portraits n'ont pas toujours le mérite de la ressemblance, la touche en est du moins vigoureuse, hardie, & originale.
Nous exposons donc au public cet excellent morceau, tel que nous l’avons reçû de son illustre auteur : y pourrions-nous toucher sans lui faire tort ? […] Il touche, il intéresse s’il parle avec douleur de sa perte, s’il est plus occupé de son ami que de tout le reste. […] Il ne suffit pas pour le goût, de voir, de connoître la beauté d’un ouvrage ; il faut la sentir, en être touché. […] Je ne toucherai point à cette matiere respectable. […] Le Seigneur étend sa main & touche la bouche de Jérémie au chap.
ne touchez pas à la R… raine ! […] — Je n’y ai pas touché, dit le chanoine. […] Toussenel a soin de dire que s’ils le visent à la colère, ils ne le toucheront qu’à la pitié ! […] Vacquerie, et bientôt ils n’oseront pas plus toucher aux légumes qu’aux viandes, et même, ô douleur ! […] Il ne croit et ne comprend que ce qu’il touche ; il n’estime que ce qui l’améliore sensuellement.
Si Goethe ne pouvait relire son poème sans être touché, c’est que, pour l’écrire, il était en effet remonté à la source de toutes les émotions naturelles. […] Nous touchons ici à ce qu’il y a de plus haut et de plus hardi dans ce poème. […] Pierre de touche tant qu’il vous plaira ! Mais nous ne sommes pas de purs raisonneurs, sensibles seulement à l’idée et peu touchés du vêtement dont elle se pare. […] Tieck n’était que le fils d’un maître cordier, et avant même qu’il eût touché le seuil d’un gymnase, Goethe lui était devenu familier.
S’il touche aux autres, c’est pour résoudre celles-là. […] Les artistes grecs s’occupent moins de toucher fort que de toucher juste. […] Qui ne serait touché des anxiétés du pauvre petit voyageur, perdu dans les tempêtes de neige ? […] Ou bien l’empêche-t-elle de toucher à la navette et aux autres instruments du tissage ? […] Le Grec, l’Asiatique, touché de la baguette, est devenu citoyen.
Que les jours de confession me touchaient bien ! […] Elle la touche à peine ; et elle ne sait pas ce qu’elle en touche : au surplus, elle n’en touche rien. […] La débauche qui l’entoure ne la touche pas. […] Édouard Schuré n’est point touché de cette objection. […] Mais Euphorion, touché de quelque nostalgie, s’ennuie un peu.
Comment pourraient-ils être touchés d’un contraste qu’ils ont peine à concevoir ? […] J’ai toujours pensé que la tragédie ne doit pas être un simple spectacle qui touche le cœur sans le corriger. […] Cet assassinat est horrible ; c’est l’abus dm pathétique : il afflige plus qu’il ne touche. […] Mademoiselle Clairon n’a certainement pas besoin de cet indigne secours pour toucher et attendrir tous les cœurs. […] Seulement on peut observer qu’il n’y a qu’un fou qui puisse mettre toute sa maison dans la confidence d’un mystère qui touche de si près à son honneur.