Mme Suard, qui lui avait voulu du bien dans un temps, a dit de lui : « Il avait une belle tête et d’une expression aimable ; mais sa taille était petite et sans aucune élégance. » Certaine inégalité d’épaule semblait même indiquer une vague intention première de la nature de pousser plus loin l’irrégularité ; mais cette velléité primitive s’était arrêtée à temps. […] Ses articles nous semblent assez froids aujourd’hui ; mais les plaignants et les blessés appelaient cela des satires pleines de fiel, et si on le lui reprochait, comme l’honnête Dorat le fit un jour, il répondait naïvement : « Je ne puis m’en empêcher, cela est plus fort que moi. » Voilà le critique, celui à qui Voltaire n’avait pas besoin de crier Macte animo , comme il fit tant de fois, celui dont il a eu tort de dire que « son courage était égal à son génie », mais égal, et même supérieur à son goût, c’est ce qu’il eût fallu dire. […] Mais ses animosités surtout n’avaient fait, ce semble, que changer de direction et de sens, en s’exaspérant. […] Il semblait que l’expérience ne lui eût pas appris « que ce qui nous a paru vrai dans un temps, peut ensuite nous sembler faux dans un autre15 ».
Lamartine, dans sa prose, est revenu à ce dernier qui semble plus directement son maître ; il reprend volontiers ce même train des épithètes un peu molles et faciles : Chateaubriand les cherchait et les trouvait plus neuves. […] Il renchérissait sur Le Vicaire savoyard, et semblait avoir pris à tâche de le développer dans mille voies nouvelles, et où se mêlait l’attrait du mystère. […] Quelle émotion grave et presque terrible dans l’assemblée, lorsque le mélodieux orateur, comme le Nestor d’une autre Iliade, mais Nestor qui flattait au lieu d’avertir, avec sa voix encore si accentuée sous la faiblesse de l’âge, abordant le sujet inévitable, retraça les derniers prodiges du Conquérant, qu’il nommait le Libérateur… Puis est venue une citation du discours de Bernardin de Saint-Pierre sur l’aigle, — l’aigle impériale d’alors ; — et là-dessus l’habile orateur, toujours ému et comme entraîné par ses souvenirs, s’est de nouveau écrié : « À cette image hardie, nouvelle, qui semblait suspendre la foudre sur toutes les têtes, l’auditoire se souleva tout entier d’enthousiasme, et ces voûtes parurent s’abîmer au bruit des applaudissements. » — Le morceau achevé, avec tous ses contrastes et ses ironies, M. Villemain est rentré dans son sujet de rapporteur en disant : « Vous pardonnez, Messieurs, l’exactitude de ces souvenirs, un de ces privilèges du temps, que le talent seul des jeunes candidats ne suppléerait pas. » Il y a, à toute cette éloquence moins foudroyante qu’il ne semble, et plus épigrammatique que sérieuse, un seul malheur, c’est que les choses ne se sont point passées tout à fait ainsi, c’est que M. […] De cette étude bien imparfaite, mais qui repose sur plus de lectures et de comparaisons que je n’ai pu en apporter ici, il me semble résulter que Bernardin de Saint-Pierre, dans sa vie, n’a été qu’à demi un sage, et que, dans ses écrits, il a presque aussi souvent erré que rencontré avec bonheur : mais, une fois, il a eu une inspiration simple et complète, il y a obéi avec docilité et l’a mise tout entière au jour comme sous le rayon ; il a mérité par là que son souvenir reste à jamais distinct et toujours renouvelé dans la mémoire humaine, et qu’autour de ce chef-d’œuvre de Paul et Virginie, la curiosité littéraire rassemble, sans en rien perdre, les grâces éparses de l’écrivain.
C’est même ainsi qu’elle se laissa prendre et gagner insensiblement aux doctrines des réformés qui se présentèrent d’abord à elle sous la forme savante et littéraire : traducteurs des Écritures, ils ne voulaient, ce semble, qu’en propager l’esprit et en faire mieux entendre le sens aux âmes pieuses ; elle les goûtait et les favorisait à titre de savants, les accueillait comme hommes aimant à la fois « les bonnes lettres et le Christ », ne voulait croire chez eux à aucune arrière-pensée factieuse ; et, lors même qu’elle parut détrompée sur l’ensemble, elle continua jusqu’à la fin de plaider pour les individus avec zèle et humanité auprès du roi son frère. […] Item, ce jour même 13 septembre 1515, entre sept et huit heures du soir, fut vu en plusieurs lieux en Flandres un flambeau de feu de la longueur d’une lance, et semblait qu’il dût tomber sur les maisons ; mais il était si clair que cent torches n’eussent rendu si grande lumière. […] Et en ce qui est d’elle, voyant cela, il lui semblait que le travail des grandes journées d’Espagne lui était plus supportable que le repos de France, « où la fantaisie, dit-elle, me tourmente plus que la peine ». […] Je ne sais pourquoi Brantôme ajoute qu’à son avis la princesse avait tenu tout ce propos plus par bonne grâce et par manière de conversation que par créance : il me semble, au contraire, qu’il y a ici croyance à la fois et bonne grâce, convenance de la femme délicate et de l’âme pieuse, et que tout y est concilié. […] Cette veine de licence et de gaillardise qui n’avait cessé de courir dès l’origine, mais qui, aux heures brillantes et dans les belles compagnies, avait dû se recouvrir sous le chevaleresque, se démasqua au commencement du xvie siècle, et elle sembla emprunter de la Renaissance latine une audace de plus.
Il semblait dans les mœurs comme dans la destinée de la nation : elle ne tendait plus au grand ; elle n’aimait plus ni la religion, ni la gloire, sans doute pour avoir abusé de l’une et de l’autre. […] C’était là sans doute pour la poésie un arrêt fatal ; et, dans l’alternative du scepticisme ou du faux zèle, la licence hardie de l’abbé de Chaulieu devait parfois sembler plus lyrique peut-être que la pompe religieuse de Rousseau. […] Et lorsque, pour calmer mon âme qui espérait et qui tremblait, la discorde cessait, et que tout semblait paisible et brillant, lorsque la France couvrait son front cicatrisé et sanglant sous des palmes de gloire, et qu’avançant irrésistible, son bras se jouait des guerriers en ligne, à l’heure où, jetant de timides regards de haine, la trahison domestique effaçait, en l’écrasant, sa trace fatale, et, comme un dragon blessé, se repliait dans son sang, alors j’accusais mes craintes qui ne voulaient pas se dissiper. […] Pendant que sur le bocage, le bétel si sauvage et si beau agite sa cime dans l’air, le faisan magnifique, avec sa queue traînante et ses ailes étendues, s’élance d’un rapide essor, et aussi le volatile aux cent couleurs, dont les dames d’Ava prisent tant le plumage. » Peut-être, lecteur français, ces noms étrangers, cet amas de vives couleurs, vous semblent-ils monotones, comme les cieux qu’ils rappellent ; mais l’âme du poëte va reparaître dans quelques vers tout anglais de sentiment et de paysage : « Jamais si riches ombrages et pelouses, si verdoyantes n’ont tressailli aux pas de nos danses britanniques. […] Mais ce zèle même, si consumant pour la faiblesse du corps, cette ferveur ingénue qui semblait un don de l’Église primitive, s’alliaient en lui aux vues les plus hautes sur le mouvement de la race humaine ici-bas et le progrès nécessaire de l’Évangile.
Quand je vois, depuis le commencement de ce récit, le grand-duc, le futur Pierre III, ne pas faire un seul pas qui ne l’achemine à l’abîme et à la ruine profonde, il me semble constamment voir dans le même temps, derrière lui et au-dessus de lui, debout et voltigeant, ce fantôme fatal qui, le pied sur la tête des mortels, les pousse aux actes insensés, et qu’Homère appelle l’Imprudence. […] La disgrâce de Bestoucheff, avec qui elle se trouvait, à quelque degré en liaison et en intelligence, fit redoubler autour d’elle les précautions, les entraves, et la porta un moment à un parti qui semblait désespéré : c’était de demander tout net à l’Impératrice son renvoi de Russie et de mettre en quelque sorte le marché à la main à ceux qui la persécutaient. […] Une question des plus délicates au sujet de ce fils de Catherine, qui fut Paul Ier, semble tranchée et résolue dans les Mémoires de sa mère et d’après l’aveu même qu’elle ne craint pas de faire tout en faveur de Soltikoff. Et cependant il reste toujours très-singulier et très-peu explicable que de ce Soltikoff « beau comme le jour » soit sorti Paul Ier, cet autre grotesque, d’une ressemblance si frappante avec Pierre III, espèce de Lapon camus, rabougri, maniaque, violent, puéril, une sorte de caporal prussien qui semble taillé et calqué sur le modèle de son père putatif et officiel.
Chacun à l’envi semblait dire : « Cela ne me regarde pas. » Et alors, si à quelqu’un des ministres bienveillants que l’on connaissait, dans une conversation de rencontre, pendant un rare quart d’heure, dans l’embrasure d’une croisée, si l’on s’échappait à dire : « Mais prenez garde ! […] A le prendre ainsi, et vu l’urgence, vu la prorogation du Corps législatif, qui a pu être nécessaire, mais qui est survenue irrégulièrement et qui a choqué et interloqué ce Corps, vu bien d’autres circonstances que chacun sent assez sans qu’on les dise, il me semblait que le Sénat aurait pu procéder plus vite, motiver son empressement même par la condition fâcheuse qui était faite au Corps législatif, resté en l’air et en suspens, se mettre dès le premier jour avec ce Corps dans des relations d’égards et de bons procédés et, en vérité, quand je vois les modifications apportées au sénatus-consulte après une discussion si laborieuse, je trouve qu’il eût été mieux de l’accepter et de l’acclamer sous sa première forme. […] Et la meilleure preuve, c’est que parmi ces hommes distingués et d’un si bon esprit, qui ont assisté à la naissance et participé à la rédaction de ce sénatus-consulte, pas un ne s’est avancé jusqu’à dire à l’empereur : « Sire, je vous supplie de ne pas laisser subsister ces mots malencontreux en eux-mêmes, qui semblent en contradiction ouverte avec ce qui suit, et qui gâtent jusqu’à un certain point votre sénatus-consulte, qui y font tache en commençant. » Car c’était là le langage direct à tenir à l’empereur. […] Pourquoi accuser tout exprès une double responsabilité, dont l’une semble exclure l’autre ?
Il me semble que j’entends l’Auteur de la Nature qui lui crie : Je t’ai doué de ce qui t’étoit nécessaire pour la mesure de ton bonheur. […] Vous pleurez en voyant ces mêmes Loix qui sembloient devoir arrêter le cours de tant de maux, devenir terribles & écraser d’un double poids, le foible qu’elles devoient protéger. […] Cette étendue d’esprit, cette force d’imagination, cette activité d’ame, ne donnent-elles pas plus de prise à ce feu qui semble d’autant plus redoutable qu’on ose le combattre, & ne voila-t-il pas cet homme si orgueil, leux de sa sagesse, esclave comme un autre ; non. […] Ils semblent vouloir jouir de sa défaite, ou tirer de lui quelque aveu favorable à leur puissance, mais si cet homme opulent n’est qu’un protecteur ou un être ennuyé, qui veut tenter le dernier remede à ses maux, l’homme de génie n’est pas longtems sans se délier, & il le laisse avec ses statues, son parc immense, & les cordons qui le chamarrent.
La famille de David était, a ce qu’il semble, éteinte depuis longtemps 677 ; les Asmonéens, d’origine sacerdotale, ne pouvaient chercher à s’attribuer une telle descendance ; ni Hérode, ni les Romains ne songent un moment qu’il existe autour d’eux un représentant quelconque des droits de l’antique dynastie. […] Il finit, ce semble, par y prendre plaisir, car il faisait de la meilleure grâce les miracles qu’on lui demandait en l’interpellant ainsi 679. […] Parfois même Jésus semble prendre des précautions pour repousser une telle doctrine 693. […] Le titre de « Fils de Dieu », ou simplement de « Fils 704 », devint ainsi pour Jésus un titre analogue à « Fils de l’homme » et, comme celui-ci, synonyme de « Messie », à la seule différence qu’il s’appelait lui-même « Fils de l’homme » et qu’il ne semble pas avoir fait le même usage du mot « Fils de Dieu 705. » Le titre de Fils de l’homme exprimait sa qualité de juge ; celui de Fils de Dieu sa participation aux desseins suprêmes et sa puissance.
Peut-être était-ce là une opinion tardive, produite vers la fin du premier siècle par l’âge avancé où Jean semble être parvenu, cet âge ayant donné occasion de croire que Dieu voulait le garder indéfiniment jusqu’au grand jour, afin de réaliser la parole de Jésus. […] Quelquefois il semble ne promettre la résurrection qu’aux justes 806, le châtiment des impies consistant à mourir tout entiers et à rester dans le néant 807. […] De nos jours même, jours troublés où Jésus n’a pas de plus authentiques continuateurs que ceux qui semblent le répudier, les rêves d’organisation idéale de la société, qui ont tant d’analogie avec les aspirations des sectes chrétiennes primitives, ne sont en un sens que l’épanouissement de la même idée, une des branches de cet arbre immense où germe toute pensée d’avenir, et dont le « royaume de Dieu » sera éternellement la tige et la racine. […] Une sorte de divination grandiose semble l’avoir tenu dans un vague sublime embrassant à la fois divers ordres de vérités.
Toujours en quête d’expériences, préoccupé avant tout d’être complet, il éclaire de ses remarques fines et ingénieuses un grand nombre de faits curieux ou vulgaires que la métaphysique, perdue dans ses hauteurs, ne semblait pas même voir. […] Il semble qu’on pourrait l’appeler surtout le sens de nos mouvements et de ce qui s’y rattache. […] Bain est de leur avis ; nous avons même vu qu’il semble mettre le toucher au-dessous de l’ouïe. […] Bain nous semble ici s’être montrée insuffisante.
Ce crachat nobilaire semble reprendre son synonyme injurieux à la façon dont il le lui laisse ; il le blasonne comme il le marquerait. […] Une virago future semble s’esquisser, en elle, dans la jeune fille. […] Pour rentrer dans le mouvement même de la pièce, à partir du second acte, l’action semble visiblement épuisée. […] Il a cinquante ans, mais il porte haut sa tête grisonnante, que l’âge semble poudrer plutôt que blanchir.
Je sais les difficultés d’en parler convenablement : le temps des illusions et des complaisances est passé ; il faut absolument dire des vérités, et cela peut sembler cruel, tant le moment est bien choisi. […] M. de Lamartine loue beaucoup sa mère ; rien de plus naturel au premier abord ; il semble qu’un père et qu’une mère soient de ces êtres qu’on ne puisse trop louer ou du moins trop aimer. […] C’est ainsi qu’il a dépensé continuellement les plus riches dons, sans être averti de les ménager, jusqu’à ce qu’il les ait dissipés à peu près tous, — oui, tous, excepté ce don de la parole qui semble chez lui intarissable, et dont il jouera jusqu’à la fin comme d’une flûte enchantée. […] Il semble avoir complètement oublié qu’il est fils, et qu’il s’agit de ses père et mère.
Guizot L’un des plus nobles spectacles que présente notre temps si décrié est celui de l’indomptable vitalité de quelques hommes illustres qui, sur des théâtres et à des titres divers, occupent encore le premier rang, quoique par leur âge ils semblent appartenir à une autre époque. […] Une existence patriarcale, la vie domestique la plus noble, des amis fidèles, un corps merveilleusement sain qui semble ne rien connaître des infirmités humaines, surtout l’étude, le travail, une ardeur inépuisable pour les grandes choses, ont fait à cet homme illustre une vieillesse respectée et presque enviée de ceux qui l’ont vaincu. […] Guizot adhère à cette parole, qui semble n’être sous une autre forme que sa propre doctrine, lorsqu’il nous dit que l’infini est objet de croyance, non de science ; mais il ne consent point à nommer instinct cette intuition de la réalité intérieure et extérieure qui est le fait primitif de la connaissance. […] Il semble fâcheux qu’une doctrine qui doit résoudre tous les problèmes commence par s’appuyer sur des faits contestés, et qu’après avoir d’abord déclaré que la science est ici absolument impuissante, on fasse maintenant reposer tout l’édifice sur ce qu’il y a de plus controversé dans la science.
Il lui semble qu’elle est à la fois la France et le monde, ou plutôt que le monde se borne à la suivre et à l’imiter. […] Voici trois textes qui ont été écrits presque simultanément, sous l’empire de la même impression pourrait-on dire, et qui semblent révéler de la part de leurs auteurs, une certaine tendance momentanée à l’esprit de comparaison et au sentiment de la réalité. […] Néanmoins je trouve quelque peu stupéfiante l’attitude du Français, qui écoute les « trouble-fête », hoche la tête en signe d’approbation, semble se ranger de leur avis, et en même temps conserve au fond de lui-même le plus inaltérable sentiment de sécurité nationale. […] La France semble encore posséder en elle des ressources suffisantes pour prendre ce dernier parti ; il est temps toutefois qu’elle se décide, car le manque de décision équivaut lui-même à la ruine.
La philosophie de l’un semblait née avec lui. […] La philosophie de l’autre semblait moins un sentiment qu’un système ; elle était plus ardente que soutenue ; elle tenait à ses lectures, et avait besoin d’être remontée. […] Son extérieur était simple, son caractère ne l’était pas ; ses discours, ses actions avaient de l’appareil et semblaient avertir qu’il était grand ; suivez-le, sa passion pour la gloire perce partout ; il lui faut un théâtre et des battements de mains ; il s’indigne quand on les refuse ; il se venge, il est vrai, plus en homme d’esprit qu’en prince irrité qui commandait à cent mille hommes, mais il se venge ; il court à la renommée, il l’appelle ; il flatte pour être flatté : il veut être tout à la fois Platon, Marc-Aurèle et Alexandre57. […] Passionné pour les Grecs, nourri jour et nuit de la lecture de leurs écrivains, enthousiaste d’Homère, fanatique de Platon, avide et insatiable de connaissances ; né avec ce genre d’imagination qui s’enflamme pour tout ce qui est extraordinaire ; ayant de plus une âme ardente, et cette force qui sait plus se précipiter en avant que s’arrêter ; d’ailleurs, accoutumé dès son enfance à voir dans un empereur chrétien le meurtrier de sa famille, et, dans le fond de son cœur, rendant peut-être la religion complice des crimes qu’elle condamne ; placé entre l’ambition et la crainte, inquiet sur le présent, incertain sur l’avenir ; ses goûts, son imagination, son âme, les malheurs de sa famille, les siens, tout semblait le préparer d’avance à ce changement qui éclata dans la suite.
Ce qu’il imita le moins sans doute, et ce qui semble avoir été un des caractères originaux d’Alcée, c’était une hardiesse non plus de mouvement et d’images, mais d’invention dans les hymnes religieux. […] Par là même, sa vie réelle est peu connue ; et son histoire semble une légende mythologique. […] Il semble qu’avec ou après la passion de l’amour, Sapho avait eu celle de la gloire. L’espérance de cette gloire, l’orgueil, non plus de la beauté, mais du génie, éclate dans quelques vers d’une pièce perdue71 : « Morte, tu seras gisante », dit la Muse lesbienne à quelque femme ennemie ou rivale ; « il ne restera de toi nulle mémoire dans l’avenir ; car tu ne touches pas aux roses de la montagne des Piérides ; mais tu iras, obscure, visiter les demeures d’Adès, t’envolant sur le sol des aveugles morts. » Une autre fois, devant des femmes qui, riches et belles, semblaient enivrées de leur destinée, elle parut plus fière encore, en disant « que les Muses lui donnaient, à elle, le vrai bonheur et le seul digne d’envie ; car, même dans la mort, elle ne serait jamais oubliée ».
La littérature au contraire semble offrir à l’examen plutôt une collection d’ouvrages, que de lois méthodiques, et moins de règles à l’esprit qu’au sentiment. […] Revenons aux vrais modèles, et de leur examen découleront les lois du goût, qui ne semblent arbitraires qu’aux esprits qui les méconnaissent. […] La vérité la plus assurée semble incertaine, lorsqu’elle est trop subtilement mise en doute. […] Tout cela me semble ridicule et affecté. […] Cette manie me semble nuisible à la création d’une multitude de beaux sujets dramatiques, et tient plus de la pédanterie que du savoir.
Le livre, dans sa destinée matérielle, sembla lui-même atteint de cette espèce de malheur qu’il décrit. […] Une existence agitée est un suicide, si elle fait perdre le souvenir du monde meilleur ; et, quand on a conscience de sa dignité, il me semble que c’est une profanation d’employer son énergie et de ne pas lui laisser toute la sublimité des possibles… J’aime à vivre retiré, à faire les mêmes choses, à passer par les mêmes chemins : il me semble qu’ainsi je me mêle moins à la terre, et que je conserve toute ma pureté.
Le Chat d’Hoffmann semble tout à fait un cadre familier dérobé à la fantaisie de notre grand peintre, et M. […] J’ai relu les Mémoires de la vie de Racine par son fils ; on me dira que Racine fils n’avait pas connu son père, qu’il n’en parlait que par ouï-dire, par tradition, d’après M. de Valincour ou tel autre : c’est trop vrai, et je regrette qu’il n’y ait pas de Mémoires plus directs sur cette vie illustre ; mais nous en savons encore moins là-dessus, ce me semble, que Racine fils ou que ceux d’alors dont aucun n’a tenu un tel langage, Oh ! […] Quand, au contraire, il nous a semblé que la reproduction de fragments précédemment recueillis ne pourrait que faire double emploi, dans le cours de certains articles, nous nous sommes contentés de renvoyer le lecteur au passage même, déjà cité par M.
Il n’y manque qu’une chose : l’ordre, et faute de ce mérite, presque négatif, semble-t-il, tout ce qu’ils ont d’excellent et de rare manque son effet et périt en pure perte. […] Qu’on prenne le genre qu’on voudra, discours, histoires, romans, comédies, on verra qu’il y a peu d’œuvres qui réussissent, encore moins qui durent à travers les siècles, sans une bonne économie : et pour peu qu’on ait de curiosité, on découvrira dans la multitude innombrable des écrits oubliés, pour peu qu’on ait d’attention, on notera dans le passage incessant des écrits qui ne naissent que pour mourir, plus d’une œuvre que les plus hautes qualités, que des morceaux admirables, des beautés singulières, semblaient adresser à l’immortalité. […] Dans ce siècle, le plus vraiment riche et fécond de notre littérature, nul ne semble se soucier d’inventer sa matière.
Il me semble aujourd’hui que je fus un peu ridicule, que j’excusai beaucoup trop Maupassant, du moins dans mon « exorde ». […] La grivoiserie implique la conscience d’un manquement à la pudeur : or il semble que Maupassant ait toujours aussi complètement ignoré cette vertu-là qu’un faune dans les grands bois. […] Mont-Oriol me semble, dans l’œuvre de Maupassant, un roman de transition.
Son dernier effort de l’Aiglon semble l’avoir épuisé. […] Il a pignon sur rue, mais il semble assagi et comme gêné par ses fonctions nouvelles. […] La Terre semble flotter dans l’espace, baignée des nuances tendres de l’Arc-en-ciel.
Jésus avait des frères et des sœurs 111, dont il semble avoir été l’aîné 112. […] Les maisons, à ce qu’il semble, ne différaient pas beaucoup de ces cubes de pierre, sans élégance extérieure ni intérieure, qui couvrent aujourd’hui les parties les plus riches du Liban, et qui, mêlés aux vignes et aux figuiers, ne laissent pas d’être fort agréables. […] À l’ouest, se déploient les belles lignes du Carmel, terminées par une pointe abrupte qui semble se plonger dans la mer.
La Galilée contenait un grand nombre de païens, mais non à ce qu’il semble, un culte des faux dieux public et organisé 646. […] Souvent, il est vrai, on croit trouver dans les ordres qu’il donne à ses disciples une tendance toute contraire : il semble leur recommander de ne prêcher le salut qu’aux seuls Juifs orthodoxes 654 ; il parle des païens d’une manière conforme aux préjugés des Juifs 655. […] Si, dans d’autres cas, il semble défendre à ses disciples d’aller les prêcher, réservant son Évangile pour les Israélites purs 664, c’est là encore, sans doute, un précepte de circonstance, auquel les apôtres auront donné un sens trop absolu.
Un ciel transparent abaisse le cercle de ses horizons sur la terre et sur les mers, et semble enfermer l’édifice de la religion sous un globe de cristal. […] Il redouble la paix qui m’attache en ces lieux ; Son jour mélancolique, et si doux à nos yeux, Son vert plus rembruni, son grave caractère, Semblent se conformer au deuil du monastère. […] L’astre touchant des nuits verse du haut des cieux, Sur les tombes du cloître un jour mystérieux, Et semble y réfléchir cette douce lumière Qui des morts bienheureux doit charmer la paupière.
Elles sont composées, il me semble ainsi quand j’y songe, de plusieurs éléments divers. […] Par jeu, je disais dans ma jeunesse : « Je n’admire que ce que je ne comprends pas, que ce que je me sens incapable de comprendre, et il me semble que c’est tout naturel. Ce que je comprends, il me semble que moins le style, moins un certain tour de main, que je n’ai pas, je le ferais.
On n’a pas assez de temps pour se bien expliquer et, même quand on parle trop, il semble toujours que l’on n’a rien dit ! […] Brunetière déclare le conseil sans portée, et, pour montrer qu’une métaphore suivie peut être ridicule, il cite celle que Molière met plaisamment dans la bouche de Trissotin : Pour cette grande faim qu’à mes yeux on expose, Un seul plat de huit vers me semble peu de chose, Et je pense qu’ici je ne ferai pas mal De joindre à l’épigramme ou bien au madrigal Le ragoût d’un sonnet, qui, chez une princesse, A passé pour avoir quelque délicatesse. […] Le travail ne lui semble pas une essentielle condition de l’art d’écrire !
Les tuniques bleues de 1830 semblaient suspendues au clou, éternel et immobile ! […] Il semble avoir un œil qui grossit l’infiniment presque rien et un œil qui réduit à presque rien l’infiniment grand. […] Toujours est-il qu’il n’a pas répondu comme au père Félix… et qu’il semble, lui et ses amis, recommencer un nouveau silence… En sortira-t-il encore une fois ?
Paul Bourget ne semble pas fait pour jouer aux petites difficultés vaincues du sonnet, à ce sertissage du bijou ou du joujou poétique. […] En vain avait-il enflammé la tête et fait battre le cœur à toute une génération, et à une génération autrement vigoureuse que celle qui lui a succédé, on comparait ses poèmes, pour l’effet, à de vieux sujets de pendule, et le Sélim de La Fiancée d’Abydos, par exemple, semblait presque aussi faux et aussi ridicule que le Malek-Adel de madame Cottin, Ces outrageantes sottises ont été dites ; Baudelaire a partagé l’opinion de Gautier, qu’il a nommé « l’impeccable ». […] Osons nous plaindre, à l’heure où le peuple qui monte Semble nous refuser jusqu’au droit de souffrir.
De même, à Rome, les premiers historiens semblent avoir été des poètes, et la primitive histoire semble s’y être constituée d’une sorte d’agglomération et d’arrangement des fragments dispersés de l’épopée populaire. […] Puisque la veine de l’invention semble tarie chez nous, qu’ils fouillent donc ce passé : rien de mieux. […] L’induction me semble hasardeuse. […] Pocquelin pouvait promettre, à ce qu’il semble, pour son fils absent. […] Tout son corps se porte en avant et semble provoquer la lutte.
Le talent de Laprade me semble une sorte de composé d’André Chénier, de De Vigny et de Ballanche : combiner trois maîtres, c’est une façon encore d’être original. — Vous voyez que je baguenaude et mâche à vide. […] Et Alexandre Dumas, et ce talent réel, mais presque physique ; cet esprit qui semble résider dans les esprits animaux, comme on disait autrefois !
Maxime Du Camp Parmi les poetæ minores, il arrive en tête ; certaines de ses pièces de vers subsisteront, il aura place dans tous les Selectæ ; Melænis est une œuvre très remarquable, de longue haleine, savante, bien conduite et de forte poésie, mais, dans le défilé des poètes de ce temps, il me semble qu’il ne marche qu’après Alfred de Musset, Victor Hugo, Lamartine, Victor de Laprade, Auguste Barbier, Théophile Gautier. […] Quand on aura pris son parti de deux ou trois mots dont la sonorité chinoise semble bien un peu barbare à nos oreilles accoutumées à de moins rudes syllabes, on goûtera délicieusement la délicatesse et la tendresse de l’humble fabliau où l’on ne sait Si c’est la fleur qui chante ou l’oiseau qui fleurit.
Ce jeune homme semble avoir des atouts pas à dédaigner. […] Il n’est pas tant de manières d’éjouir le sexe, et vous semblez bon drille à le chatouiller.
Ne semble-t-il pas voir dans la Strophe suivante, le temps s’écouler tacito pede, comme dit Ovide ? […] Tant de douceur & d’harmonie dans le style, ne semblent pas devoir annoncer un caractere naturellement brusque & caustique : celui de Malherbe étoit cependant l’un & l’autre.