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519. (1874) Premiers lundis. Tome I « Espoir et vœu du mouvement littéraire et poétique après la Révolution de 1830. »

Rousseau nous semble un admirable et savant écrivain, un vigoureux philosophe, plutôt qu’un grand poète ; Voltaire, comme artiste, ne triomphe plus que dans la moquerie, c’est-à-dire dans un genre de poésie qui est antipoétique par excellence. […] Ce qu’il y avait de démesuré et de vaguement instinctif dans son œuvre d’art empêcha madame de Staël d’être comprise alors et d’être appréciée à sa valeur comme artiste et poète. […] Ces jeunes poètes pourtant n’étaient pas étrangers du tout à cette société dont ils méconnaissaient alors l’impulsion profonde et invincible ; ils avaient prise sur elle, dans un certain cercle, parce qu’ils s’adressaient à des passions qui étaient encore flagrantes, à des sympathies rétrogrades qu’une classe d’élite partageait avec eux. […] C’est à peu près aussi ce qui arriva aux poètes dont nous parlons. […] Aujourd’hui que la Restauration n’est plus, que la terrasse si laborieusement construite a croulé, et que peuple et poètes vont marcher ensemble, une période nouvelle s’ouvre pour la poésie ; l’art est désormais sur le pied commun, dans l’arène avec tous, côte à côte avec l’infatigable humanité.

520. (1908) Les œuvres et les hommes XXIV. Voyageurs et romanciers « Victor Hugo »

Je croyais véritablement que l’esprit de parti, la badauderie et la bassesse devant toute puissance reconnue, ces trois choses malheureusement françaises, tambourineraient, une fois de plus, avec fureur, la gloire et le génie du grand poète dont on dit : le Poète, comme on dit : le Pape. […] Poète, et poète dramatique, il a le sentiment de l’Histoire à peu près autant que son vieux complice, Alexandre Dumas, qui, lui aussi, s’est enfoncé jusqu’aux oreilles dans les Borgia, et s’est occupé de leurs crimes, non pour la scène, mais pour l’enseignement. […] le cabotinisme de l’acteur remonte jusqu’au poète ! […] Le poète Hugo ne tint aucun compte des paroles de ce poète qui s’appelait l’Arioste. […] La Vérité a pris le poète par les cheveux et l’a violenté.

521. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « Le Brun »

Certes il y avait, pour un poëte comme Le Brun, un beau rôle à remplir au xviiie  siècle. […] Quelques hautes pensées, qui n’ont jamais quitté le poëte depuis son enfance jusqu’à sa mort, dominent toutes ses belles odes, s’y reproduisent sans cesse, et, à travers la diversité des circonstances où il les composa, leur impriment un caractère marquant d’unité. […] Son pinceau maigre, quoique étincelant, joue d’ordinaire sur un fond abstrait ; il ne prend guère de splendeur large que lorsque le poëte songe à Buffon et retrace d’après lui la nature. […] Une note, placée en tête de la première publication du Vengeur, nous avertit, comme motif d’excuse ou cas singulier, que le poëte a composé cette ode, de soixante-dix vers environ, en très-peu de jours et presque d’un seul jet. […] Pour moi, j’ai peine à croire qu’il ne fût pas au nombre de ceux dont l’infortuné poëte a dit avec un reproche mêlé de tendresse : Que pouvaient mes amis ?

522. (1864) William Shakespeare « Deuxième partie — Livre IV. Critique »

Loi : le poëte part de lui pour arriver à nous. C’est là ce qui fait le poëte inimitable. […] Le poëte « sacrifie à la canaille ». […] Le poëte ne les voit pas, ou, s’il les voit, il les dédaigne. […] C’est à promulguer ces vérités que le poëte est bon.

523. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — G — Gille, Valère (1867-1950) »

Albert Giraud Un des plus jeunes poètes du Parnasse belge de 1887. […] Valère Gille, à l’exemple des grands poètes dont il est le fils et l’émule, débute en chaque morceau par l’invocation grecque, courte et puissante, saisissante et lumineuse. Ses pièces sont des tableaux délicats, fins, ambrés, pleins d’une lumière si pure, si lumineuse, que la Grèce tout entière nous apparaît dans sa splendeur première, telle que l’ont vue ses héros et ses poètes. Je ne puis résister au plaisir de citer la dédicace que le poète de la Cithare a placée en tête de son œuvre, avant que je puisse m’occuper du Collier d’opales, incomparable florilège de poèmes d’amour. Voici cette dédicace : « Aux poètes Iwan Gilkin et Albert Giraud, à mes chers amis, en souvenir de notre campagne littéraire pour le triomphe de la tradition française en Belgique. » Voilà les sentiments qui se manifestent en pays belge pour la tradition française, et qu’il est si doux de lire en première page de beaux et bons livres écrits en pure et belle langue française.

524. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — M — Millevoye, Charles (1782-1816) »

Millevoye, Charles (1782-1816) [Bibliographie] Les Plaisirs du poète, suivi de poésies fugitives (1801). — Armand, ou les tourments de l’imagination et de l’amour (1802) […] Bernard Jullien Millevoye, poète digne à plusieurs égards de l’attention de la postérité, s’est exercé assez souvent dans la narration poétique, et malheureusement il l’a toujours fait sans le moindre succès ; tellement que si l’on voulait juger de son mérite par ses travaux dans ce genre, on le mettrait avec raison au rang de ceux dont le nom est devenu ridicule. […] Quoi de plus touchant que l’Anniversaire où le poète déplore la mort de son père ! L’élégie fut-elle jamais plus attendrissante que dans la Demeure abandonnée, le Poète mourant, le Souvenir, la Promesse, l’Inquiétude, le Bois détruit, la Chute des feuilles ? […] Il vivra comme celui de Rouget de l’Isle, moins bon poète que lui, mais qui, dans un jour d’orage, put montrer à tous son visage à la clarté pénétrante de l’éclair.

525. (1867) Nouveaux lundis. Tome VII « Corneille. Le Cid. »

Mais ce n’est pas une raison pour passer à l’auteur de Corneille historien son épigraphe, qui ne tendrait à rien moins qu’à faire du grand poète un politique pratique et un habile. […] Le grand poète y est senti et loué de l’âme et du ton qu’il faut, comme il doit l’être, et surtout par où il doit l’être. […] Vinet était éloquent : écoutons-le sur Rotrou, sur ce poète généreux que Corneille, modeste cette fois, appelait son père en matière de théâtre, et en qui M.  […] Corneille, dans un congrès européen des poètes, ne figurerait qu’au second rang, comme Poussin ne vient qu’en second dans l’élite des-peintres. […] Refaisons donc le premier pas, la première démarche victorieuse avec le poète resté si grand à bon droit dans la mémoire française.

526. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « Mathurin Regnier et André Chénier »

Mathurin était né à Chartres, en Beauce, André, à Byzance, en Grèce ; tous deux se montrèrent poètes dès l’enfance. […] Il s’y lança avec candeur, s’y arrêta à propos, y fit la part équitable au peuple et au prince, et mourut sur l’échafaud en citoyen, se frappant le front en poëte. […] que l’esprit du poète se condense et se matérialise à mesure qu’il s’agrandit et s’élève. […] Son poëte, son pédant, son fat, son docteur, ont trop de saillie pour s’oublier jamais, une fois connus. […] André Chénier, un poëte grec vivant, se retrouvait aussi.

527. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Première partie. De la littérature chez les anciens et chez les modernes — Chapitre V. De la littérature latine, pendant que la république romaine durait encore » pp. 135-163

J’ai dit que les poètes qui avaient précédé Cicéron et Lucrèce, méritaient à peine d’être nommés. […] Ennius, le meilleur des trois, est un poète incorrect, obscur, et d’une imagination peu poétique. […] Horace se moque, dans l’une de ses épîtres, de ceux qui admirent les anciens poètes romains, Ennius et ses contemporains. […] J’ai dit que les Romains s’étaient occupés de philosophie avant d’avoir eu des poètes. […] Mais quel est le poète original, dans la langue latine, qui ait mérité quelque réputation avant Cicéron ?

528. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Victor Hugo — Victor Hugo en 1831 »

Victor Hugo s’était rattaché de bonne heure, a croulé par son propre penchant, et le poëte, en respectant la ruine, n’a pas dû s’y ensevelir. […] Un incident presque merveilleux, jeté au sein de cette vie de couvent, dut aussi influer beaucoup sur l’esprit et la gravité précoce de l’enfant poëte. […] C’est à ce séjour au collége des nobles qu’il faut rapporter les combats d’enfants pour le grand Empereur, dont le poëte fait quelque part mention. […] Je ne puis résister à en donner quelques phrases ; le critique vient de faire une citation : « À de pareils vers, dit-il, qui ne s’écrierait avec La Harpe : Entendez-vous le chant du poëte ? […] Le même a dit encore : « Ce poëte-là, une étoile !

529. (1885) Préfaces tirées des Œuvres complètes de Victor Hugo « Préfaces des pièces de théâtre — Préface de « Cromwell » (1827) »

Voilà le premier homme, voilà le premier poëte. […] Les rapsodes marquent la transition des poètes lyriques aux poëtes épiques, comme les romanciers des poètes épiques aux poètes dramatiques. […] Qu’on examine une littérature en particulier, ou toutes les littératures en masse, on arrivera toujours au même fait : les poètes lyriques avant les poètes épiques, les poètes épiques avant les poètes dramatiques. […] Comme Dieu, le vrai poëte est présent partout à la fois dans son œuvre. […] Malheur au poëte si son vers fait la petite bouche !

530. (1884) Propos d’un entrepreneur de démolitions pp. -294

Êtes-vous poète ? […] Il s’est vu des poètes, cependant, et même de très grands. […] Poète menteur ! […] Tous l’égorgeront avec la plus suave frénésie, parfaitement assurés qu’il est aussi impossible de dédoubler en lui le poète du musicien que le musicien du poète. […] les belles douleurs des poètes !

531. (1923) Au service de la déesse

Le poète de l’amour. […] C’est la règle du jeu : un poète ? […] Les romanciers ni les poètes ne sont dieux. […] Mais un poète, — en l’espèce, M.  […] Le poète Rustique se plaint de la vie chère.

532. (1893) Des réputations littéraires. Essais de morale et d’histoire. Première série

Un critique, poète et romancier par surcroît, s’expose à être pris pour un quart de poète, un quart de romancier et une moitié de critique. […] Une fois notre liste dressée des poètes en vogue, nous la fermons. […] Mais qu’est devenu Stésichore, grand poète épique et lyrique ? […] Il sera Poète s’il l’a : Poète en paroles, ou, faute de cela, peut-être encore mieux, Poète en acte. […] Quels sont les poètes absolument suprêmes ?

533. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — A — Arène, Paul (1843-1896) »

[Anthologie des poètes français du xixe  siècle (1887-1888).] […] [Nos Poètes (1888).] […] On ajoutera, pour être vrai, qu’il avait, comme Jean des Figues, la main fine et l’âme fière, et l’on gravera une cigale sur son tombeau, de goût presque antique, afin d’exprimer qu’il était naturellement poète et qu’il aimait le soleil. […] Armand Silvestre En réalité, le prosateur et le poète ne firent qu’un en lui. […] Courteline, un vrai lettré aussi, me disait un jour, en me parlant des contes de Paul Arène : « C’est superbe et on ne voit pas comment c’est écrit. » Dans ses poésies non plus, c’est-à-dire dans une expansion plus intime encore de sa nature, — car c’est dans le rythme surtout que ce poète affirme, même inconsciemment, les sincérités de son âme, — on ne rencontre que lui-même.

534. (1870) Portraits contemporains. Tome IV (4e éd.) « LEOPARDI. » pp. 363-422

Mais, en tout, il semble que Leopardi, parmi les modernes, puisse être dit un poëte du même ordre et de la même variété que Simonide parmi les anciens. […] Toute la suite de l’existence du poëte en fut entravée et resta sujette à la gêne. […] Bunsen, avec qui le poëte noua des relations toujours continuées. […] Le poëte était retourné de Rome à Recanati, à l’abborrito e inabitabile Recanati, comme il l’appelle. […] L’Allemagne, toujours si au courant, possède, depuis plusieurs années, des traductions en vers du poëte.

535. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « M. LEBRUN (Reprise de Marie Stuart.) » pp. 146-189

On sait la large empreinte qu’en reçut le poëte qui a dit : Ce siècle avait deux ans…. […] Lebrun, où il rendait un hommage à Delille, lui valut une visite du vieux poëte, ce qui était alors une gloire. […] Il y avait là un sujet vivant, le poëte y court. […] Il se trouvait dans le premier recueil manuscrit du poëte de douze ans une tragédie de Coriolan, que l’auteur remania plus tard à quinze. […] Une des moins mauvaises était encore l’Écossaise du vieux poëte Montchrétien, de l’école de Garnier.

536. (1921) Enquête sur la critique (Les Marges)

Pas de grands poètes, pas de grand critique qui ne soit patriote ; avec passion et générosité ! […] Henri de Régnier, grand poète, a magnifiquement jugé Michelet). […] Pourtant, il me semble qu’il existe une critique, bonne ou mauvaise, pour les romanciers ; mais y en a-t-il une pour les poètes ? […] Même dans les journaux qui ont un feuilleton critique hebdomadaire. quelle place fait-on aux poètes ? […] Mandin, « dans les journaux qui ont un feuilleton critique hebdomadaire, quelle place fait-on aux poètes ?

537. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) «  Poésies inédites de Mme Desbordes-Valmore  » pp. 405-416

Le tendre et délicat poète s’est éteint, il y a un an, le 13 juillet 1859. […] Et en général je dirai que des poètes véritables, et du moment qu’ils ont disparu, il n’y a plus que les qualités qui doivent compter. […] Ces poètes que nous avons connus vivants et que nous avons aimés, ils ont souffert, ils ont eu leurs fautes, leurs faiblesses, des plis à leurs ailes, leurs taches de poussière et leurs ombres ; ils se sont consumés sur le bûcher : il n’y a plus que la flamme qui monte. […] Elle aimait les femmes poètes, celles qui sont dignes de ce nom ; elle les louait volontiers, elle les préférait à elle, et cela non pas seulement tout haut, mais aussi tout bas, sincèrement. […] Je crois que Mme votre mère était poète jusque dans le moindre signe, jusque dans le moindre soin.

538. (1866) Petite comédie de la critique littéraire, ou Molière selon trois écoles philosophiques « Introduction » pp. 3-17

Premier axiome : le poète comique doit disparaître derrière ses personnages. […] » Donc, Alfred de Musset est un grand poète lyrique ; il n’est pas un bon auteur comique. […] Vous dites, par exemple, que le poète comique doit disparaître derrière ses personnages, et qu’il doit peindre la réalité. […] Est-il impossible de concevoir un genre de comédie où le poète, loin de peindre la réalité comme elle est, transporterait l’action dans un monde fantastique, donnerait à des idées abstraites une existence réelle, aux êtres réels une vie, en quelque sorte, idéale, un corps, une voix à des nuages, une constitution politique aux habitants de l’air ? […] C’est une construction a priori de sa raison intrépide, méprisant les faits, sacrifiant, à la façon allemande, aux superbes nécessités d’un système, de misérables accidents sans logique et sans signification, et quelques petits poètes, tels que Sophocle, Virgile, Racine, Goethe, vraiment trop superflus dans l’histoire littéraire.

539. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Seconde partie — Section 8, des plagiaires. En quoi ils different de ceux qui mettent leurs études à profit » pp. 78-92

Je dis que nous avons transplanté sans peine dans notre ouvrage, car lorsque nous prenons les vers dans un poëte, qui a composé dans une langue autre que la langue dans laquelle nous écrivons, nous ne faisons pas un plagiat. […] Fulvius-Ursinus auroit pris une peine fort inutile, s’il n’avoit recüeilli tous les endroits que le poëte latin a imitez du poëte grec que pour diminuer la réputation du poëte latin. […] Ils sont bien aises d’avoir l’occasion de réciter les vers du poëte ancien, pour les comparer avec les vers de l’imitateur moderne qui a voulu lutter contre son original. […] Que peut gagner en effet un poëte qui lit un ouvrage, lequel a déja reçû sa derniere main, que d’être redressé sur quelque mot, ou tout au plus sur quelque sentiment ? […] Il ne fait pas une élegie ni un tableau, sans devenir meilleur peintre ou meilleur poëte ; et il surpasse enfin ceux qui peuvent avoir été plus heureux que lui, en maîtres et en modeles.

540. (1898) Inutilité de la calomnie (La Plume) pp. 625-627

Je détestai un poète, chez qui la nature se manifestait sous des traits si vagues et si faux. […] La manière de ce poète est tout à fait déplorable. […] Est-ce pour nourrir de tels poètes que nous avons jeté aux vents toutes les semences de notre amour ? […] Ce poète crée avec croyance. […] C’est un poète délicieux et tragique.

541. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Seconde partie — Section 1, du génie en general » pp. 1-13

Si les heros du poëte tragique ne m’interessent point par leurs caracteres et par leurs avantures, sa piece m’ennuïe, quoiqu’elle soit écrite purement, et quoiqu’il n’y ait pas de fautes contre ce qu’on appelle les regles du théatre. […] La ressemblance des idées que le poëte tire de son génie, avec les idées que peuvent avoir des hommes qui se trouveroient être dans la même situation où ce poëte place ses personnages, le pathetique des images qu’il a conçûës avant que de prendre la plume ou le pinceau, font donc le plus grand mérite des poëmes, ainsi que le plus grand mérite des tableaux. C’est à l’intention du peintre ou du poëte : c’est à l’invention des idées et des images propres à nous émouvoir, et qu’il met en oeuvre pour executer son intention, qu’on distingue le grand artisan du simple manoeuvre, qui souvent est plus habile ouvrier que lui dans l’execution. […] C’est ce qui fait qu’un poëte plaît sans observer les regles, quand un autre déplaît en les observant. […] On peut profiter beaucoup dans la lecture de ces ouvrages, quoiqu’ils ne méritent pas toute la confiance du lecteur : je ne dois parler ici que du génie qui fait le peintre et le poëte.

542. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — D — Dupont, Pierre (1821-1870) »

Le recueil de ses chansons représente tout un petit monde où l’homme fait entendre plus de soupirs que de cris de gaîté et où la nature, dont notre poète sent admirablement l’immortelle fraîcheur, semble avoir mission de consoler, d’apaiser, de dorloter le pauvre et l’abandonné. […] Paul Mariéton Soulary, qui n’est pas populaire, passe pour classique auprès des dilettanti, le dernier public des poètes. […] Armand Silvestre Pierre Dupont ce n’est pas seulement un poète, mais un très grand poète ayant, pour frère, dans nos lettres et l’amour de la nature, notre La Fontaine qui, d’ailleurs, n’était pas un rimeur plus sévère que lui. […] Personne n’a cependant encore eu, que je sache, l’intention de rayer La Fontaine de la liste de nos poètes. […] Assez de poètes ont mis et mettront encore leur moi périssable au centre des choses, et feindront de pleurer sur tous pour avoir le droit de pleurer sur eux-mêmes.

543. (1856) Cours familier de littérature. II « Xe entretien » pp. 217-327

A quel orateur, à quel poète, à quel philosophe la Convention avait-elle pardonné ? […] Bonaparte fut le plus funeste mais le plus grand poète des temps modernes. […] Il faut voir les fleuves à leur source et les grands poètes dans leur obscurité. […] Sainte-Beuve fut ce poète de la nostalgie de l’âme sur la terre. […] C’était une leçon de diplomatie donnée par un vieux ministre à un jeune poète.

544. (1864) William Shakespeare « Première partie — Livre II. Les génies »

De là cette réalité : le poëte est prêtre. […] La sibylle a un trépied, le poëte non. Le poëte est lui-même trépied. […] La poésie est propre au poëte. […] Le grand poëte définitif de l’Allemagne sera nécessairement un poëte d’humanité, d’enthousiasme et de liberté.

545. (1864) Cours familier de littérature. XVII « XCVIIIe entretien. Alfieri. Sa vie et ses œuvres (3e partie) » pp. 81-152

Les lettres du poète et de la comtesse, emportées à Montpellier par Fabre après la mort des deux amis, lettres brûlées par la main sévère d’un troisième ami, puritain de décence, le prouvent. […] On n’a aucun détail sur la manière dont cette liaison fut contractée jusqu’après la mort du poète. […] J’éteignais le bruit de mes pas sur chaque marche de l’escalier pour ne pas éveiller l’ombre de ce soi-disant poète. […] Voilà le grand poète tragique des Piémontais ! […] Ce tombeau ne garde à la postérité que deux ombres : l’ombre d’une femme faible et charmante, à laquelle on pardonne pour ses malheurs et pour son sexe ; Et l’ombre d’un mauvais poète tragique, enflé d’orgueil et vide de vraie grandeur d’âme comme de vrai talent, et qui n’eut du génie tragique que la manie, Et du poète que la déclamation !

546. (1885) Le romantisme des classiques (4e éd.)

Horace, par exemple, qui est pour nous la fleur des poètes classiques latins, était critiqué comme novateur par les partisans des anciens poètes. […] Un poète mort il y a cent ans, par exemple, est-ce du vieux et bon vin ? […] Le poète de Rodrigue, ici, n’était pas plus modeste que son héros. […] Et le malheureux poète redouble les coups d’encensoir. […] Les beautés appartiennent au poète ; les défauts, au système dramatique.

547. (1923) Nouvelles études et autres figures

Il parvient à Tanagra où naquit la célèbre poétesse Corinne. […] Mais que représente Prométhée aux yeux du poète ? […] Mais le sentiment de la nature chez Hésiode ne ressemble point au sentiment de la nature des poètes modernes ou même d’un poète comme Virgile. […] Il n’essaie point de briller aux dépens du poète qu’il étudie. […] Mais ils n’ont pas tenu les promesses du poète.

548. (1896) Écrivains étrangers. Première série

Il était peintre, musicien, philosophe, autant que poète. […] Le mécontentement est le lot fatal du poète. […] C’était un grand embrouilleur d’idées, parfois même un psychologue subtil ; mais il avait choisi le métier de poète, et c’était un poète médiocre. […] Il n’y a jamais eu un poète dont il fût-plus facile de rire. […] Ruskin, parmi les plus parfaits poètes de la prose anglaise.

549. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « François Ier, poëte. Poésies et correspondance recueillies et publiées par M. Aimé Champollion-Figeac, 1 vol. in-4°, Paris, 1847. »

François Ier, poëte. […] « Sire, répondit le poëte, rien n’est impossible à Votre Majesté ; elle a voulu faire de mauvais vers, et elle y a réussi. » Louis XIV, avec son grand sens, se le tint pour dit. […] Ce fut là en partie le rôle de François Ier poëte, et celui des Valois, y compris plus d’une princesse. […] Le même roi, qui avait demandé à Bayard de l’armer chevalier, aurait presque demandé au gentil maître Clément de le couronner poëte. […] La rosée ajoutée aux roses par le vieux poëte français est une grâce de plus, que la rime seule peut-être lui a suggérée.

550. (1853) Histoire de la littérature dramatique. Tome II « Chapitre III. Le théâtre est l’Église du diable » pp. 113-135

» Est-ce qu’un poète a jamais préféré le vice honteux au vice aimable ? […] Tant que vous voudrez, Molière est un poète comique, le plus grand de tous les poètes comiques, mais il n’a rien fait de naïf. […] Récemment encore, le roi venait d’écrire le nom de Molière sur cette glorieuse liste de gens de lettres et de savants, honorés des libéralités de Sa Majesté, et le poète s’était empressé de remercier le roi, à la façon d’un poète comique pour qui tout est sujet de comédie et même un compliment. […] Vous avez aussi dans L’Impromptu un méchant poète, un marquis ridicule, un homme raisonnable comme Philinte. Et quelle merveilleuse habileté de ce poète, qui allait frapper ce grand coup du Misanthrope, d’essayer en même temps et ses comédiens et son public !

551. (1949) La vie littéraire. Cinquième série

. — Nos poètes. […] Les poètes nous aident à aimer. […] De 1820 à 1850 ils ont, en poètes, formé la légende. […] Le poète ne vit que dans ses vers. […] Rousseau, le dernier en date des poètes spirituels.

552. (1889) Histoire de la littérature française. Tome III (16e éd.) « Chapitre huitième »

Echapper à ces deux écueils dans la peinture de l’amour est le plus bel effort du poète dramatique. […] Aucun poète n’a mieux peint l’amour. […] Diversité non artificielle : c’est l’observation et le sentiment qui révéleront au poète toutes ces nuances. […] Le poète les fait passer par les mêmes alternatives. […] De la langue de Racine, et de quelques illusions auxquelles donne lieu la perfection de ce poète.

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