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614. (1895) Histoire de la littérature française « Cinquième partie. Le dix-huitième siècle — Livre V. Indices et germes d’un art nouveau — Chapitre III. Retour à l’art antique »

De ce mouvement est sorti le changement que nous signalions dans la facture des œuvres littéraires. […] Il n’a été révélé qu’après sa mort : la Jeune Captive, la Jeune Turentine furent imprimées dans la Décade et le Mercure ; les Œuvres ne parurent qu’en 1819. […] L’Aveugle, le Jeune Malade, la Jeune Tarentine, la Liberté, d’autres pièces encore, une foule de fragments inachevés, d’inspirations inemployées sont des œuvres absolument sans pareilles dans notre littérature. […] Parce que Chénier n’a pas vu les œuvres grecques par l’extérieur ; il a senti l’âme qui s’y réalisait. […] Charpentier, 1862 et 1872, in-12 ; Œuvres en prose, éd.

615. (1897) Le monde où l’on imprime « Chapitre VII. Maurice Barrès et Paul Adam » pp. 72-89

Au fond, il n’est pas de plus bel éloge d’une œuvre que de constater qu’elle est devenue rengaine. […] L’œuvre d’art est une œuvre conçue, engendrée, portée par l’artiste, mais qui doit se détacher de lui à sa maturité. […] L’œuvre du comte Tolstoï, suivant qu’on considère ses derniers ou ses premiers livres, est un exemple de ces deux genres. […] Ses enfants continueront son œuvre, rencontreront sans doute des papillons plus éducables et tenteront à leur tour de leur apprendre à vivre. […] Qu’on demeure attaché à se vouloir le meilleur possible : l’œuvre que sera la vie ainsi cultivée sera visible ; on l’admirera, et par instinct d’amour-propre on l’égalera.

616. (1912) L’art de lire « Chapitre II. Les livres d’idées »

Non, dans une république aristocratique ; non, surtout si vous observez que Platon parle surtout du respect aux lois anciennes, qui ne sont, au moment présent, l’œuvre ni de la foule, ni d’une élite, mais l’œuvre du passé, l’oeuvre lente des siècles ; et vous arrivez à cette conclusion que peut-être Platon est un homme qui veut qu’un peuple soit surtout gouverné par son passé, ce qui est l’essence même de l’aristocratisme. — Vous vous trompez peut-être ; mais vous avez comparé, rapproché, contrôlé une idée par l’autre, limité ou rectifié une idée par l’autre, et vous avez goûté le plaisir qui est celui que l’on doit aller chercher chez un penseur, qui est le plaisir de penser. […] Et d’abord, c’est un jeu divertissant, donc une jouissance ; mais ce n’est pas seulement un jeu ; c’est posséder son auteur jusqu’en son fond, c’est saisir comme sa racine, comme le germe d’où son œuvre est sortie et d’où elle pouvait sortir la même sans doute, mais dans une autre direction ; et c’est en vérité le bien connaître. […] Il semblerait alors que son œuvre fût ce tableau dont parlait Musset, « où l’on voit qu’un monsieur bien sage s’est appliqué ». […] Je sais des hommes de la plus haute intelligence qui n’en voient point ici et qui rattachent très ingénieusement le Contrat Social à l’œuvre tout entière, pour eux très une et très cohérente, de Rousseau.

617. (1904) Les œuvres et les hommes. Romanciers d’hier et d’avant-hier. XIX « L’Abbé Prévost et Alexandre Dumas fils » pp. 287-303

Mais la Critique, mais tous ceux qui, depuis quarante ans et plus, conduisent l’opinion littéraire, et qui avaient la prétention de décider des œuvres de l’esprit humain ! […] … D’ailleurs, il ne méprise pas l’œuvre de l’abbé Prévost. […] continue, fais ton œuvre, paye-toi des muscles de cet homme, de sa fortune, de sa raison, de son sang, de son honneur, de son âme. Poursuis ton œuvre ! […] J’ai opposé au prétendu chef-d’œuvre la réalité de cette pauvre œuvre, qui a volé la gloire, cette monnaie de la poche des sots.

618. (1894) La bataille littéraire. Cinquième série (1889-1890) pp. 1-349

Voici le très court résumé de cette œuvre dont l’émotion, je le répète, va faire le succès. […] Est-ce l’œuvre d’un jeune ? […] Guillaume parle de Michel-Ange ; il le suit dans sa vie œuvre par œuvre, victoire par victoire, et, sans diminuer son étude par des détails, explique ses chefs-d’œuvre par des sortes de monographies. […] Chacun se casera non pas selon ce qu’on aura dit de lui, mais selon ce qu’il aura fait, et, moins on se sera occupé des œuvres des autres, plus on aura de chances d’être en bon lieu, ayant eu plus de temps pour s’occuper de son œuvre à soi. […] C’est ce dédain qui nous a valu les autres belles œuvres d’Alexandre Dumas.

619. (1895) Les mercredis d’un critique, 1894 pp. 3-382

Revenons à la dernière œuvre de M.  […] Des yeux, il les suivit qui se retiraient de son œuvre. […] Un des grands mérites de cette dernière œuvre de M.  […] Une œuvre nouvelle de M.  […] Fais donc humblement, tenacement, ton œuvre, ô femme !

620. (1866) Petite comédie de la critique littéraire, ou Molière selon trois écoles philosophiques « Conclusion » pp. 355-370

Considérant toutes les œuvres de toutes les littératures comme les objets égaux d’une curiosité indifférente, elle s’interdit tout jugement d’appréciation sur la valeur absolue et même relative des œuvres et des littératures, et se borne à noter leurs caractères spéciaux. […] La première de ces vérités, c’est qu’il n’y a point de canon unique de la beauté, de la perfection littéraire, et qu’il faut presque autant de mesures et de balances qu’il y a d’œuvres à mesurer et à peser, bien loin qu’une seule littérature puisse imposer son système à toutes les autres. […] Je crois, pour ma part, que deux ou trois de ces ouvrages ont la plus haute valeur comme œuvres du génie, mais que pas un seul n’a la moindre valeur scientifique. […] Mais l’artiste crée tout, sa méthode, sa matière et son œuvre, et l’auteur d’un système philosophique est comme l’artiste.

621. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — R — Rostand, Edmond (1868-1918) »

Francisque Sarcey Un poète nous est né, et ce qui me charme encore davantage, c’est que ce poète est un homme de théâtre… Cyrano de Bergerac est une très belle œuvre, et le succès d’enthousiasme en a été si prodigieux, que, pour trouver quelque chose de pareil, il faut remonter jusqu’aux récits que nous ont faits, des premières représentations de Victor Hugo, les témoins oculaires. C’est une œuvre de charmante poésie, mais c’est surtout et avant tout une œuvre de théâtre. […] À la représentation de cette œuvre eût été préférable une reprise du Bossu ou de quelque autre mélodrame conçu dans la même poétique que la pièce de M.  […] Je vois à l’énormité de son succès deux causes, dont l’une (la plus forte) est son excellence, et dont l’autre est, sans doute, une lassitude du public et comme un rassasiement, après tant d’études psychologiques, tant d’historiettes d’adultères parisiens, tant de pièces féministes, socialistes, scandinaves ; toutes œuvres dont je ne pense, à priori, aucun mal, et parmi lesquelles il y en a peut-être qui contiennent autant de substance morale que ce radieux Cyrano, mais moins délectables à coup sûr, et dont on nous avait accablés ces derniers temps.

622. (1889) Les œuvres et les hommes. Les poètes (deuxième série). XI « Corneille »

Quant à la vie de Corneille, à la vie en dehors des œuvres, il l’a éclairée autant qu’il a pu. […] Excepté le nom de cette marquise, dont il n’y a jamais que le titre singulier dans les œuvres de Corneille et qui n’était autre, à ce qu’il paraît, qu’une actrice, mademoiselle du Parc, je ne vois rien de bien nouveau dans la biographie de M. Levallois ; car pour les détails de ce triste amour du grand Corneille vieillissant et dédaigné pour le jeune Racine, beau alors comme le jour à son aurore et qui s’élançait dans la gloire, nous pourrions en suivre la trace dans les œuvres même de Corneille, à la piste de ses plus beaux vers. […] Il le prouva, à vingt places de ses œuvres, dans des vers que M.  […] Seulement, c’est toujours là de l’inconnu tiré des Œuvres.

623. (1876) Chroniques parisiennes (1843-1845) « SAINTE-BEUVE CHRONIQUEUR » pp. -

Eugène Despois, a signalé une lacune dans les Œuvres posthumes de Sainte-Beuve1 : il a fait observer, avec raison, que dans les Premiers Lundis, dont l’ensemble embrasse toute la carrière littéraire du grand critique, la période intermédiaire, correspondant au règne de Louis-Philippe, n’était représentée, à partir de l’année 1834, que par un très-petit nombre d’articles. […] C'est donc une œuvre nouvelle et à beaucoup d’égards inédite que nous offrons aujourd’hui aux lecteurs. […] Et puis, en certains cas, à l’égard dès œuvres retentissantes qui font époque et révolution — ou du moins beaucoup de bruit (comme chaque jour en voyait naître alors), la critique était encore tenue à de plus grandes réserves par les journaux eux-mêmes qui n’admettaient pas qu’on s’exprimât en public en toute liberté sur ces grands sujets littéraires. […] « Ce dernier trait, dit Sainte-Beuve, (tel que M. de Balzac l’emploie) peut être vrai d’un artiste sculpteur ou peintre qui, au lieu de se mettre à l’œuvre, passe son temps à disserter et à raisonner ; mais, dans l’ordre de la pensée, cette parole du romancier, qui revient souvent sous la plume de toute une école de jeunes littérateurs, est à la fois (je leur en demande bien pardon) une injustice et une erreur.

624. (1929) La société des grands esprits

Bref, il traite l’œuvre de Pascal comme un simple manuel. […] À tous égards, son œuvre est immense. […] C’est ici le grand œuvre du patriarche. […] Quant à Byron, cette idée le hanta, et il en a rempli son œuvre. […] La Tentation était l’œuvre préférée de Flaubert, l’œuvre de toute sa vie.

625. (1900) La culture des idées

Une œuvre de littérature rentre nécessairement dans un de ces quatre modes. […] Il s’agit naturellement des œuvres où l’intelligence imaginative a la plus grande part, des œuvres dont le subconscient est toujours le maître collaborateur. […] Un rêve fut parfois le point de départ d’une œuvre ; parfois une œuvre fut entièrement conçue et exécutée pendant le sommeil. […] Ainsi les feuilletonistes ont réussi à empêcher l’acclimatation en France de l’œuvre d’Ibsen ; ainsi les drames en vers, œuvre d’imitation par excellence, réussissent maintenant jusque sur les théâtres du boulevard ! […] Rosset, p. 181, Œuvres choisies de Campanella.

626. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — H — Haraucourt, Edmond (1857-1941) »

Et je crois bien que son Âme nue est aussi l’une des œuvres poétiques les plus remarquables de ces dernières années. […] Haraucourt soit un succès d’argent ou un succès seulement littéraire, comme il paraît plus probable, il faut féliciter l’Odéon d’avoir donné une œuvre de belle tenue et écrite par un poète de grand mérite. Ceci l’emporte et doit l’emporter sur toutes les réserves que je serai forcé de faire tant sur l’œuvre elle-même que sur son interprétation.

627. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — L — Lebrun, Pierre (1785-1873) »

. — Œuvres complètes (1844). […] Lebrun, en publiant en 1858 une édition complète de ses œuvres, nous a montré, par quelques pièces de vers charmantes, que, dès l’époque du premier Empire, il y avait bien des élans et des essors vers ces heureuses oasis de poésie qu’on a découvertes depuis et qu’il a été des premiers à pressentir, comme les navigateurs devinent les terres prochaines au souffle odorant des brises.. […] Édouard Fournier Il échapperait à notre temps, s’il était resté ce que son âge, — il naquit en 1785, — voulait qu’il fût d’abord : un arrière-classique, un poète de l’Empire, rimant des Odes sur la Guerre de Prusse, sur la Campagne de 1807 et des tragédies telles qu’Ulysse et Pallas, fils d’Évandre ; mais il lui appartient, par la part qu’il prit au mouvement rénovateur, avec sa pièce de Marie Stuart assez fièrement imitée de celle de Schiller et surtout avec son brillant Voyage en Grèce, l’œuvre la plus sincère, la plus vraie de couleur et la plus éclatante qui ait été inspirée chez nous par la guerre des Hellènes.

628. (1859) Cours familier de littérature. VII « XXXVIIIe entretien. Littérature dramatique de l’Allemagne. Le drame de Faust par Goethe » pp. 81-160

Au lieu de lui demander ces œuvres sérieuses que l’Italie, la France, l’Angleterre font produire à leurs grands hommes de lettres, les Allemands rêvent, et nous pensons. […] Étudions un moment l’homme avant d’étudier l’œuvre : l’homme dans Goethe n’est pas moins caractéristique que l’œuvre. […] L’homme est dans ses œuvres, sans doute, mais il est aussi dans ses traits : la nature moule le visage sur l’âme. […] Méphistophélès, c’est la propagande perverse du mal par le génie du mal pour corrompre et ruiner l’œuvre de Dieu, l’homme et la femme. […] Ici une imitation de la scène des sorcières de Shakespeare défigure un peu cette belle œuvre.

629. (1889) L’art au point de vue sociologique « Chapitre onzième. La littérature des décadents et des déséquilibrés ; son caractère généralement insociable. Rôle moral et social de l’art. »

Mais le comble, c’est de voir le critique, plutôt que d’apprécier les œuvres d’autrui, annoncer qu’il va vous parler de lui-même à propos des œuvres d’autrui. […] La véritable critique et la véritable œuvre littéraire doivent également rechercher le sérieux et l’impersonnel. […] Mais, si les œuvres géniales sont les plus suggestives et les plus capables de susciter des œuvres originales comme elles, ce sont aussi, celles qui s’analysent et s’imitent le plus difficilement, parce que le procédé s’y dérobe ; elles se rapprochent de la vie, qu’on ne peut artificiellement reproduire. […] D’un bout à l’autre de son œuvre, on sent passer le vent de la mort comme celui de la mer auquel il s’identifie. […] Il est si facile d’être courageux, héroïque, généreux à la lecture des œuvres qui représentent le courage, l’héroïsme, la générosité !

630. (1856) Cours familier de littérature. II « XIIe entretien » pp. 429-507

On ne peut les visiter encore aujourd’hui sans étonnement ; la grandeur de l’épouvante explique seule la grandeur de l’œuvre. […] Job, atterré et anéanti par cette énumération lyrique des œuvres de Dieu, cesse toute vaine discussion avec lui-même ou avec l’éloquence vivante de la création parlant en œuvres sous ses yeux. […] dit-il ; jusqu’à présent je n’avais entendu ta voix que par les oreilles, maintenant mes yeux te voient par tes œuvres ! […] Que leur en coûtait-il de se dire, comme Job : Ce monde, œuvre évidente d’une puissance sans bornes, ne peut pas être en même temps l’œuvre d’une puissance folle. […] Dieu veut être entrevu et non vu dans son œuvre ; c’est le demi-jour qui fait travailler le regard, c’est le mystère qui fait travailler la pensée.

631. (1929) Critique et conférences (Œuvres posthumes III)

Son œuvre, si déplorablement interrompue, l’assure d’une noble et longue réputation. […] Il fréquentait avec les psychologues, avec leur œuvre tout au moins. […] Mais aujourd’hui son œuvre et son nom sont connus. […] Son nom, son œuvre sont connus et admirés de tous ceux qui lisent. […] Malheureusement, l’œuvre est incomplète.

632. (1912) Pages de critique et de doctrine. Vol I, « I. Notes de rhétorique contemporaine », « II. Notes de critique psychologique »

Taine porter sur cette œuvre. […] Je sais peu de morceaux, dans l’œuvre entière de M.  […] Ils se sont étalés dans leurs œuvres, librement, abondamment. […] Il y a aussi ajouté par la forme, par l’œuvre d’art. […] C’est l’œuvre de la terre natale et des morts.

633. (1925) La fin de l’art

Mais à Paris, l’œuvre a été achevée. […] Il était très fier de son œuvre. […] Cela ne peut donc pas être une œuvre sans intérêt, mais il ne semble pas (j’en ai vu de belles reproductions) que cela soit une œuvre pleine de charmes. […] Le Cid, qui nous paraît maintenant une œuvre nationale, fut d’abord une adaptation de l’espagnol. […] Les écrits posthumes prennent rarement place dans la partie glorieuse d’une œuvre.

634. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — A — Autran, Joseph (1813-1877) »

Jules Barbey d’Aurevilly Toute l’œuvre poétique de M.  […] [Les Œuvres et les Hommes : les Poètes (1861).] […] Cette préoccupation des petits, des humbles, domine toute son œuvre… Son hexamètre est sonore et bien rythmé ; sa phrase, toujours musicale, se déroule largement avec une noblesse de contours qui fait penser aux volutes antiques.

635. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — B — Bourget, Paul (1852-1935) »

. — Œuvres complètes : Relique (1899) ; Un cœur de femme (1899). […] Auguste Dorchain Les Aveux (1882) dominent jusqu’ici de très haut l’œuvre poétique de Paul Bourget. […] [Les Œuvres et les Hommes : les Poètes (1889).]

636. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre VIII. La littérature et la vie politique » pp. 191-229

Et Rotrou, son émule, écrit, lui aussi, des œuvres dramatiques où souffle un vent de révolte contre les théories formulées par Chapelain. […] Les hommes d’action prennent leurs formules toutes faites dans les œuvres des penseurs qui les ont précédés. […] Que d’œuvres manquées ont précédé les chefs-d’œuvre ! […] Une œuvre semblable s’est accomplie sous l’influence des mêmes causes en Angleterre et en Allemagne. […] Il a jeté une teinte de ridicule sur les œuvres nées loin de lui ; il a dédaigné, ignoré les hommes qui n’ont pas pu ou voulu entrer dans son orbite.

637. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « Daphnis et Chloé. Traduction d’Amyot et de courier »

Quel que soit le nom, l’œuvre est des plus agréables. […] L’originalité de l’œuvre n’est nullement dans l’action : elle est dans le caractère à la fois rustique et élégant de tout le début, dans la fraîcheur des petits tableaux nets et vifs qui se succèdent, et dans l’analyse graduelle, nuancée, du désir en deux cœurs adolescents, en deux pubertés naissantes et qu’on voit éclore. […] Il a fallu assez de temps pour que l’œuvre fût appréciée à son prix par les modernes ; mais le bon Amyot avait certainement le sentiment et l’instinct de ce qu’elle valait, lorsqu’il choisir exprès pour l’une des premières traductions du grec qu’il comptait donner au public. […] Au lieu d’attacher le lecteur par la nouveauté des événements, par l’arrangement et la variété des matières et par une narration nette et pressée…, il essaie, comme la plupart des autres sophistes, de le retenir par des descriptions hors d’œuvre ; il l’écarte hors du grand chemin, et pendant qu’il lui fait voir tant de pays…, il consume et use son attention… J’ai traduit avec plaisir ce roman dans mon enfance : aussi est-ce le seul âge où il doit plaire… » J’en supprime encore. […] Tout ce qu’il a dit à cet égard est juste : ce qu’il faut reconnaître en effet, c’est que ce sont deux œuvres parfaites, achevées, chacune dans son genre : Bernardin de Saint-Pierre, ce Grec d’imagination et de goût, s’est inspiré de l’une pour faire l’autre, et la faire un peu autrement ; il a vu, il a deviné au premier coup d’œil ce qu’il devait introduire de neuf dans la même donnée, pour inventer et réussir à la moderne ; non content de renouveler le paysage, il a renouvelé les âmes ; il les a montrées aussi naïves, aussi primitives, mais travaillées et comme perfectionnées à leur insu par l’air qu’elles ont respiré, par la nourriture qu’elles ont reçue des parents.

638. (1867) Nouveaux lundis. Tome VII « Entretiens sur l’architecture par M. Viollet-Le-Duc »

Parcourant plus tard l’Allemagne et étant à Nuremberg, cette ville gothique, toute dévote à elle-même, tout occupée à se conserver, à se repeindre, et qui est « une collection plutôt qu’une ville », il remarque qu’au milieu des raretés qu’elle offre à chaque pas « on a peine à trouver une de ces œuvres qui laissent un souvenir durable ; on est souvent étonné, jamais ému ; c’est toujours le dernier objet qui frappe le plus et qui fait oublier les autres : « Je me souviens à ce propos, dit-il, de l’impression que nous ressentîmes à Rome, il y a de cela dix-huit ans (1836). […] Viollet-Le-Duc de la ville éternelle peut sembler un peu légère à ceux qui ont en ces matières assez de religion pour ne pas oser s’avouer à eux-mêmes tout leur sentiment, la seconde impression est la bonne, la véritable, et il l’a reproduite dignement, en mainte page de son œuvre, par le crayon ou par la parole. […] On était à l’œuvre depuis plus de dix ans, — j’entends, à l’œuvre exacte et déjà serrée de près de toutes parts. […] Fils d’un père qui avait goûté l’un des premiers la vieille poésie française, ou ce que l’on appelait alors de ce nom, la poésie de la Renaissance, il devait être tenté de remonter au-delà et de s’assurer dans un autre ordre, à sa manière, du mérite des œuvres et des maîtres du vieux temps. […] Et pourtant on dit que comme Agatharcus le peintre était tout fier de ce qu’il faisait des animaux très vite et facilement, Zeuxis, qui l’entendait se vanter, lui dit : « Mais moi, c’est avec bien du temps que j’en viens à bout. » Car la facilité dans le faire et la promptitude ne donnent pas à l’œuvre un poids stable ni la perfection de la beauté : au contraire, le temps qu’on emprunte d’avance pour la création se retrouvera ensuite en force et en santé dans l’œuvre produite.

639. (1895) Histoire de la littérature française « Sixième partie. Époque contemporaine — Livre I. La littérature pendant la Révolution et l’Empire — Chapitre III. Madame de Staël »

Et de là le peu de valeur esthétique de son œuvre. […] Comme elle n’est pas artiste, elle voit dans la perfection artistique presque un inconvénient, une infériorité : la beauté formelle lui rend plus difficile à saisir la personnalité de l’œuvre. […] Avec sa lucide intelligence, elle parle des Anglais et des Allemands comme personne encore n’en avait parlé chez nous ; elle laisse à leurs œuvres la coupe et l’aspect étrangers. […] Avec Shakespeare, à qui elle revient toujours, elle offre pour modèles Schiller et Gœthe dont elle étudie longuement les œuvres. […] Œuvres complètes, Paris, Didot. 3 vol. gr. in-8. — A consulter : Lady Blennerhassett, Mme de Staël et son temps, trad.

640. (1903) Zola pp. 3-31

Je ne m’occuperai ici, strictement, que de l’œuvre littéraire de l’écrivain célèbre qui vient de mourir. […] Comme dit Joseph Prudhomme, au fond c’était superficiel ; autrement dit, en réalité, ce n’était que la façade de son œuvre. […] Je n’attribue pas à l’œuvre d’un romancier populaire tant d’influence internationale que je m’avise de protester ici avec indignation. […] Il dit, avec une colère qui est peu dans ses habitudes, particulièrement significative, par conséquent : « Son œuvre est mauvaise et il est un de ces malheureux dont on peut dire qu’il vaudrait mieux qu’ils ne fussent jamais nés. […] Il était intéressant, du moins pour le psychologue, à suivre dans cette nouvelle voie qui l’aurait amené, peut-être, comme un Tolstoï, dont je crois bien que l’exemple l’hypnotisait un peu, à renier et à détester ses « œuvres de gloire ».

641. (1913) Le bovarysme « Première partie : Pathologie du bovarysme — Chapitre III. Le Bovarysme des individus »

« Je ne me fais pas illusion, dit-il, sur mes œuvres poétiques. […] Avec soin il évite les œuvres. […] Réfugié dans les admirations, il tiré sa gloire personnelle des œuvres des autres. […] Sitôt qu’ils sont parvenus à s’unir voici les snobs dispensés d’agir, car ils n’ont recours pour réaliser leur illusion qu’à la foi qu’ils se dispensent les uns les autres, et, qui cherche à justifier sa valeur par des œuvres n’est point des leurs. […] Voir pour une application plus détaillée de ce point de vue une brochure publiée sous ce titre : Le Bovarysme, la psychologie dans l’œuvre de Flaubert, par J. de Gaultier chez Léopold Cerf, 1892.

642. (1929) Les livres du Temps. Deuxième série pp. 2-509

Ce sont également celles qui lui ont inspiré ses meilleures œuvres. […] Ce volume ne se distingue dans l’œuvre de M.  […] Et la raison, c’est précisément qu’ils ont fait leur œuvre. […] Toute l’œuvre de M.  […] Dans aucun cas, on n’accomplit une grande œuvre sans passion.

643. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Première partie. — Chapitre XIII. »

Plus le présent était déchu et privé de tels exemples, plus on les adorait dans le passé, comme l’œuvre d’un monde meilleur. […] Qui pourrait dignement célébrer tes œuvres ? […] Qui chantera les œuvres de Jupiter ? […] Cela paraît encore plus dans une seconde variante de la même œuvre autrement interpolée. […] Œuvres de Bossuet, t. 

644. (1940) Quatre études pp. -154

Œuvres, éd. […] Œuvres, IX, 9. […] Œuvres, VI, 343. […] Œuvres, II, 56-57. […] Œuvres, II, 124.

645. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — L — Louÿs, Pierre (1870-1925) »

Ces poèmes, joints à quelques autres, forment maintenant le recueil intitulé : Astarté, qui est l’œuvre d’un artiste très subtil et très délicat. […] Ce modeste recueil de chansons d’une petite morte est une œuvre. […] Pierre Louÿs lui-même, en guise d’avant-propos aux Lectures antiques, que depuis quelque temps il publie régulièrement dans le Mercure de France, nous a conté qu’un savant professeur de faculté, ancien élève de l’École d’Athènes, et à qui il avait envoyé son ouvrage, lui répondit qu’il avait, avant lui, lu l’œuvre de Bilitis.

646. (1895) Histoire de la littérature française « Cinquième partie. Le dix-huitième siècle — Livre II. Les formes d’art — Chapitre II. La tragédie »

Avec une conviction véritablement profonde, il essaya d’exprimer les généralités des caractères et des passions dans toutes les tragédies qu’il écrivit, si l’on excepte quelques œuvres de ses vingt dernières années, où les personnages représentent plutôt des opinions philosophiques que des êtres moraux. […] Dans sa première œuvre, dans Œdipe, il bannissait l’amour, et n’introduisait l’idylle surannée de Philoctète et de Jocaste que sur l’ordre des comédiens, trop jeune encore et trop inconnu pour leur imposer sa volonté. […] Il manqua d’abord de patience, de méditation ; il écrivit trop vite : Zaïre fut bâclée en dix-sept jours ; Olympie était « l’œuvre des six jours ». […] Nous aurons à y revenir pour indiquer les causes qui ont fait de l’œuvre de Ducis un remarquable cas d’avortement littéraire. […] Dans sa vieillesse, on chercha à l’opposer à Voltaire ; Mme de Pompadour, brouillée avec celui-ci, se déclara hautement pour Crébillion. — Éditions : Oeuvres, Impr. royale, 2 vol. in-8, 1750 ; Didot, aîné, 1812, 2 vol. in-2 ; Lebigre frères, 1832, 3 vol. pet. in-12. — À consulter : Brunetière, Époq. du th. fr., 9e conf.

647. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — C — Coppée, François (1842-1908) »

Coppée a la volonté et l’énergie voulue pour s’atteler à une œuvre, je ne dirai pas plus importante, car le Passant est un petit bijou, mais plus grande, plus vaste, il aura certainement un bel avenir au théâtre. […] Francisque Sarcey Les Deux Douleurs sont dans leur ensemble une œuvre de théâtre fort médiocre. — Je conviendrai aisément que M.  […] François Coppée une œuvre plus importante que cette Arrière-Saison, qu’il vient de publier, encore qu’il y ait là des pages gracieuses et d’un sentiment bien humain. […] Cependant, malgré le rang unique mérité par plusieurs de ses pièces, comme le Passant et le Luthier de Crémone, malgré l’importance exceptionnelle d’œuvres comme Severo Torelli et Pour la Couronne, il se pourrait que M.  […] Non seulement il nous donne à nous, ses contemporains, un plaisir dramatique que nous ne connaîtrions plus sans lui, mais il est certain que la postérité prêtera grande attention à la part de son œuvre oh ce parnassien a continué le mouvement romantique.

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