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450. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre V. Premiers aphorismes de Jésus. — Ses idées d’un Dieu Père et d’une religion pure  Premiers disciples. »

Le Dieu de Jésus n’est pas ce maître fatal qui nous tue quand il lui plaît, nous damne quand il lui plaît, nous sauve quand il lui plaît. […] Le Gaulonite soutenait qu’il faut mourir plutôt que de donner à un autre qu’à Dieu le nom de « maître » ; Jésus laisse ce nom à qui veut le prendre, et réserve pour Dieu un titre plus doux. […] Le paradis eût été, en effet, transporté sur la terre, si les idées du jeune maître n’eussent dépassé de beaucoup ce niveau de médiocre bonté au-delà duquel on n’a pu jusqu’ici élever l’espèce humaine. […] ôté d’abord la poutre de ton œil, et alors tu penseras à ôter la paille de l’œil de ton frère 266. » Ces leçons, longtemps renfermées dans le cœur du jeune maître, groupaient déjà quelques initiés.

451. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Qu’est-ce qu’un classique ? » pp. 38-55

C’est en ce genre ce qu’il y a de plus grand… Chaque année je lis une pièce de Molière, comme de temps en temps je contemple quelque gravure d’après les grands maîtres italiens. […] En faisant ces vers, il pensait manifestement à Pope, à Despréaux, à Horace, leur maître à tous. […] En général, les nations diverses y auraient chacune un coin réservé, mais les auteurs se plairaient à en sortir, et ils iraient en se promenant reconnaître, là où l’on s’y attendrait le moins, des frères ou des maîtres. […] Ma conclusion pourtant, quand je parle de se fixer et de choisir, ce n’est pas d’imiter ceux même qui nous agréent le plus entre nos maîtres dans le passé.

452. (1903) Considérations sur quelques écoles poétiques contemporaines pp. 3-31

Tout de même, en disoient-ils beaucoup de choses louables, nous renvoyant encore à ce maître ignare dont ils prenoient aussi les œuvres à garant, lorsqu’ils vouloient autoriser quelqu’une de leurs fantaisies. […] Chaque maître apporte une pierre à l’édifice apollonien… Le maître mort, l’édifice n’en continue pas moins à s’élever… Ce sont seulement d’autres ouvriers et d’autres architectes qui continuent l’ouvrage commencé. […] Par malheur on lit si peu les Maîtres du xvie  siècle qu’on ignore tout de leurs habitudes, spécialement en matière d’hiatus qu’ils ne proscrivirent jamais.

453. (1817) Cours analytique de littérature générale. Tome I pp. 5-537

Copions d’abord l’antique et les grands maîtres, pour ne pas contracter les manières d’une école mesquine. […] Les vrais auteurs doivent être les maîtres du vulgaire, mais les disciples du public. […] Aussi voyons-nous que les grands maîtres ne donnent qu’avec fatigue et regret les leçons qui en développent les détails. […] Mais alors il est maître d’en imaginer les circonstances et d’y supposer tout ce qu’on en peut ignorer. […] Je renvoie à ses préfaces et à ses notes instructives, comme à celles des autres grands maîtres.

454. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome II « Querelles générales, ou querelles sur de grands sujets. — Première Partie. Des Langues Françoise et Latine. — Les traductions. » pp. 125-144

Tout traducteur, il est vrai, a pour ainsi dire, un maître qui est son auteur ; mais « ce maître ne doit pas exercer sur lui un empire oriental & despotique, ni le changer de chaînes comme un vil esclave. […] Il est peu de nos beaux-esprits qui ne se crussent insultés sérieusement, si on leur proposoit de copier quelque grand maître que ce soit.

455. (1861) Les œuvres et les hommes. Les historiens politiques et littéraires. II. « XVII. Mémoires du duc de Luynes, publiés par MM. Dussieux et Soulier » pp. 355-368

En ces quatre volumes, en effet, qu’on nous donne aujourd’hui, sous prétexte d’accroissements pour l’histoire, l’histoire dont les éditeurs se réclament, n’est jamais conçue que comme pourraient la concevoir ou un tapissier, ou un huissier, ou un maître à danser, ou un valet de chambre. […] Le maître à danser compte les pas et décrit les révérences de droite à gauche ou de gauche à droite, en avant, en arrière et sur les côtés, et le valet de chambre, qui croit sans douté qu’il n’y a que des corps glorieux à la cour, nous fait le détail des panades du cardinal de Fleury et des coliques du roi, eu termes qu’un écrivain moins royaliste est embarrassé d’indiquer. […] Et si nous disons, nous, chrétiens, qu’un jour nous aurons à répondre devant Dieu de nos actions et paroles oiseuses, nous demandons ce que ceux-là qui étaient nés et faits pour gouverner les hommes et qui passèrent ainsi toute leur vie dans des méditations ou des souvenirs de maîtres à danser, répondront, en attendant le jugement de Dieu, devant l’histoire… ?

456. (1874) Premiers lundis. Tome I « M. de Ségur. Mémoires, souvenirs et anecdotes. Tome II. »

» Alors le négrillon, continuant ses gambades, me dit, en me montrant avec sa main des paysans qui bêchaient un champ : « Maître-moi, maître-moi, mirez là-bas ; « li blancs travailler, travailler comme nous ! 

457. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — P — Ponsard, François (1814-1867) »

L’originalité et la gloire de son œuvre est justement d’avoir ramené vers les vérités fortes et salubres nos esprits égarés dans l’invraisemblable, le paradoxal et l’impossible, d’avoir exprimé ces vérités immortelles dans un style ferme, net, franc, de bonne école et de bonne race, d’avoir fait circuler dans les veines de la comédie moderne, après tant de fièvres et de langueurs, un reste de ce sang vigoureux et pur qui semblait tari depuis les maîtres, et de n’avoir pas craint de nous paraître banal pour être plus sûr d’être vrai. […] Mais on le crut, et comme nous sommes un pays qui aime, quoi qu’on en dise, à être mené, on applaudit à ce jeune maître qui semblait avoir caché une férule sous le manteau de Melpomène et qui débutait traîtreusement dans le drame par une imitation de

458. (1863) Molière et la comédie italienne « Chapitre premier. Préliminaires » pp. 1-8

La gloire du maître de la comédie n’a, du reste, rien perdu à ces investigations, et l’admiration qu’il inspire n’a fait que s’accroître, à mesure qu’on a pénétré la plupart de ses secrets. […] Il les étudia dans leurs œuvres, il les étudia dans leur jeu ; il fut leur disciple, mais un disciple qui surpassa ses maîtres.

459. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome I « Mémoires pour servir à l’histoire des gens-de-lettres ; et principalement de leurs querelles. Querelles particulières, ou querelles d’auteur à auteur. — Clément Marot, et deux poëtes décriés, Sagon & La Huéterie. » pp. 105-113

On y voit son valet, rendant cette justice à son maître, d’être estimé des bons écrivains, & de n’avoir pour ennemis,         Qu’un tas de jeunes veaux, Un tas de rimasseurs nouveaux, Qui cuident eslever leur nom Blasmant les hommes de renom ; Et leur semble qu’en ce faisant, Par la ville on ira disant : Puisqu’à Marot ceux-cy s’attachent, Il n’est possible qu’ilz n’en sçachent. […] Il convient que le démon de l’envie & de la rime l’a jetté dans d’étranges égaremens ; il reconnoît l’insolence qu’il a eue d’attaquer son maître dans l’art des vers.

460. (1774) Correspondance générale

Adieu, mon cher maître. […] mon cher maître ! […] Mon cher maître, j’ai la quarantaine passée ; je suis las de tracasseries. […] Adieu, monsieur et cher maître. […] Mon ami, je pense que l’Amour est un maître sauvage et cruel.

461. (1891) La bataille littéraire. Quatrième série (1887-1888) pp. 1-398

Les notes de Pierre Loti ont la fidélité de la photographie, l’esprit d’un croquis de maître ; tout y est peint en quelques touches. […] La vanité des choses humaines, les grimaces de convention, tout y est peint avec la grandeur et le scrupule des maîtres. […] Stéphane Mallarmé, désigné généralement comme le maître de l’école des décadents. […] Un maître poète, qui est aussi un maître prosateur, Théodore de Banville, vient de publier, chez M.  […] vous tous, là-haut, là-bas,             Place à mon maître !

462. (1900) La vie et les livres. Cinquième série pp. 1-352

Il aimait bien son maître, le savant et ingénieux Cuvillier-Fleury. […] Bergeret, maître de conférences à la Faculté des Lettres. […] Bergeret, maître de conférences à la Faculté des lettres, est un George Dandin ineffable. […] Bergeret, maître de conférences à la Faculté des Lettres, s’en va, penaud, préparer son cours. […] Tandis que ses maîtres lui faisaient la leçon, elle écoutait, distraite, les morts qui parlent.

463. (1886) Le roman russe pp. -351

Pourquoi un maître là-haut, alors qu’on n’en reconnaissait plus ici-bas ? […] Les maîtres avaient été improvisés sans trop de choix. […] Et pourtant Molière est son maître. […] Là, tous les plus grands entre les nouveaux venus saluent en lui le père et le maître. […] Ils écoutent autrement leurs maîtres, là-bas.

464. (1887) Revue wagnérienne. Tome II « Paris, le 8 novembre 1886. »

Les élèves de César Franck s’interrompent de louer Bach pour ne plus songer qu’au Parsifal ; les élèves de Saint-Saëns ne songent pas à railler des pasticheurs de Wagner ; et un ami de Benjamin Godard accepte sans trop s’irriter qu’un rédacteur de la Revue wagnérienne lui expose la haute philosophie et la religion du maître, le » néo-christianisme » … Mais voici que, dans un grand brouhaha, se complimentent, grasseyent, s’effacent, se saluent, s’emmêlent les simples amateurs, les wagnériens selon la mode : cavaliers élégants, mondaines, docteurs très répandus, belles juives, flâneurs cosmopolites. […] Les wagnériens les plus appliqués, quel que soit leur respect du maître, sont distraits de leur contemplation par tant d’agréments variés. […] C’est ainsi que, à la porte même du théâtre Wagner, deux restaurants sont installés, où les fidèles du maître peuvent se gaver d’épaisses boissons et de lourdes nourritures dans les longs entractes — la représentation commençant à quatre heures pour finir à dix, avec deux pauses d’environ cinq quarts d’heure. […] Dans Tristan, enfin, son idéal s’est clairement dégagé, et l’art nouveau dont il s’est fait le fondateur et l’apôtre, en s’inspirant, dit-il, des plus grands maîtres, s’y impose avec une autorité qui qui ne souffre pas de compromis. […] Voici encore quelques maîtres allemands, en premier lieu Mendelssohn, qui non seulement a assigné dans sa Cantate-Symphonie de Lobgesang un rôle assez significatif par moments au thème large et pompeux exposé par les trombones seuls au début de l’œuvre, mais qui s’est encore servi à deux reprises, dans son chef-d’œuvre Elie (1846), que Berlioz a loué en termes enthousiastes, d’une phrasé empruntée au récitatif au prophète qui ouvre cet oratorio, comme d’une sorte de « motif de malédiction citons encore deux courts retours expressifs de thèmes antérieurs dans des récitatifs d’EIie.

465. (1856) La critique et les critiques en France au XIXe siècle pp. 1-54

Il ne permet pas qu’on l’oublie, cet illustre maître de l’histoire littéraire, cet écrivain si spirituel qu’il pourrait se passer d’être savant, si érudit que son esprit charmant semble chez lui presque un luxe inutile. […] À la suite des maîtres une foule d’écrivains, nés avec des talents divers, se jetèrent dans l’histoire de la littérature, séduits par l’espoir d’un succès facile et par la possibilité d’un éditeur. […] Pendant plusieurs années ils viennent une fois chaque semaine se presser dans la chambre étroite qu’habite le jeune maître ; qui, debout, adossé à la cheminée, se livre, au milieu d’un silence et d’une attention religieuse, aux recherches les plus délicates sur les plus grands problèmes de la psychologie. […] Ici seulement Jouffroy est moins sévèrement cartésien que son maître : il redoute moins l’accusation banale de panthéisme. […] À notre grande surprise, nous avons trouvé des disciples de Descartes, hommes d’ailleurs du plus grand mérite, qui croient encore, comme le maître, au machinisme des bêtes.

466. (1856) Mémoires du duc de Saint-Simon pp. 5-63

. — Le roi, bon justicier, faisait la police, et au besoin, de lui-même, commandait aux maris d’enfermer leurs femmes3, aux pères de « laver la tête à leurs fils. » Nous comprenons maintenant l’adoration, les tendresses, les larmes de joie, les génuflexions des courtisans auprès de leur maître. […] La soif qui brûlait leur cœur, la furieuse passion qui les prosternait aux genoux du maître, l’âpre aiguillon du désir invincible qui les précipitait dans les extrêmes terreurs et jusqu’au fond des plus basses complaisances, était la vanité insatiable et l’acharnement du rang. […] Il médite des projets contre eux pendant tout le règne, et ce n’est pas toujours à l’insu du maître ; il veut « mettre la noblesse dans le ministère aux dépens de la plume et de la robe, pour que peu à peu cette roture perde les administrations et pour soumettre tout à la noblesse. » — Après avoir blessé le roi dans son autorité, il le blesse dans ses affections. […] Pouvait-il être toujours maître de lui sous Louis XIV ? […] Tous les vices combattaient en lui à qui en demeurerait le maître.

467. (1889) Ægri somnia : pensées et caractères

Ajoutez-y, chez quelques-uns, le plaisir de faire une dernière espièglerie d’écolier aux maîtres de leur jeunesse. […] Mascart, alors maître de conférences de physique17. […] que je supprime ce qui m’a fait le maître ! […] J’y avais débuté en 1834, comme maître de conférences. […] Mais il avait affaire à des maîtres de la science, dont le plus âgé, Balard, aurait pu l’avoir pour élève.

468. (1782) Essai sur les règnes de Claude et de Néron et sur la vie et les écrits de Sénèque pour servir d’introduction à la lecture de ce philosophe (1778-1782) « Essai, sur les règnes, de Claude et de Néron. Livre second » pp. 200-409

« L’esclave a-t-il sur son maître le droit de vie et de mort ? […] N’oublions jamais que le serviteur peut valoir mieux que son maître. […] et s’il faut que je serve, qu’importe sous quel maître ? […] et ces maîtres dans l’art de découper les viandes, quelle figure font-ils autour d’un philosophe ? […] Comme si tout audacieux n’était pas le maître de la vie d’un général, même au centre de son armée !

469. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — L — Lemercier, Népomucène Louis (1771-1840) »

Mais quelle misère que, Napoléon devenu maître du monde, Lemercier voie toutes les amertumes empoisonner sa vie ; qu’incrédule envers l’empereur, il doive marcher de revers en revers, comme l’empereur de triomphes en triomphes ; qu’il finisse par être attaqué jusque dans les débris de sa fortune ! […] Tel hémistiche, tel vers, telle période ne seraient pas désavoués par les grands maîtres.

470. (1860) Cours familier de littérature. X « LIXe entretien. La littérature diplomatique. Le prince de Talleyrand. — État actuel de l’Europe » pp. 289-399

M. de Talleyrand, aussi organisateur et aussi monarchique que son maître, avait pris dans l’Assemblée le rôle de la pensée, le rapport, au lieu du rôle de la parole, l’improvisation. […] Les adulateurs du maître du monde ont rejeté sur ce ministre la réprobation universelle qui s’est attachée à la conception et à la conduite de l’affaire d’Espagne. […] M. de Talleyrand, maître par ce seul mot des convictions au dedans et au dehors, n’eut qu’à ménager, par son habileté, la transition de la révolution à la légitimité, de l’invasion à la paix, du despotisme à la liberté représentative. […] C’était un résumeur infaillible et divinatoire ; les résumeurs sont admirables dans les salons, jamais dans les foules ; les improvisateurs seuls sont les maîtres du moment ; la sagacité froide n’improvise pas, elle juge. […] Les marches du grand escalier étaient bordées d’une domesticité depuis longtemps rentrée dans la retraite, mais dont les larmes attestaient l’attachement qu’ils portaient au plus indulgent et au plus libéral des maîtres.

471. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « George Farcy »

La portion extérieure en est fort claire et fort simple ; il étudia beaucoup, se distingua dans ses classes, se concilia l’amitié de ses condisciples et de ses maîtres ; il allait deux fois le jour au collège ; il sortait probablement tous les dimanches ou toutes les quinzaines pour passer la journée chez sa grand’mère. […] L’École normale dissoute, Farcy se logea dans la rue d’Enfer, près de son maître et de son ami M.  […] Viguier, qu’il avait eu pour maître à l’École normale, réclamant de lui un avis sincère, de bonnes et franches critiques, et, comme il disait, des critiques antiques avec le mot propre sans périphrase. […] La pensée de l’art noblement conçu le soutient et donne à ses travaux une dignité que n’avaient pas ses premiers essais, simples épanchements de son âme et de sa vie habituelle. — Il comprend tout, aspire à tout, et n’est maître de rien ni de lui-même. […] toujours j’enviai, Farcy, de te connaître, Toi que si jeune encore on citait comme un maître.

472. (1904) Prostitués. Études critiques sur les gens de lettres d’aujourd’hui « Chapitre IX. Le trottoir du Boul’ Mich’ »

On connaît l’influence de l’école ; sauf de très rares fragments, on ignore bientôt l’œuvre personnelle de chaque disciple et presque celle du maître. […] Sous les grâces indécises de son style on sent une pauvre âme flottante, mais avide de fixité belle et qui, si elle rencontrait dans le maître une lueur de divinité, dans le dogme un rayon d’amour, s’attacherait indéfectiblement au dogme et au maître, serait fidèle jusqu’au martyre, je dis jusqu’à la joie du martyre. […] On s’est donné, presque malgré lui, à ce maître qui ne voulait pas de disciples ; qui était fier d’esprit au lieu d’être doux et humble de cœur ; qui, loin de prêcher l’amour aux poses abandonnées, vantait l’individualisme et l’effort de se tenir debout. […] Camille Mauclair me fait songer à la désolation de l’âme de Jean errante parmi un siècle où ne passerait nul maître divin. […] À propos de Verlaine lui-même, il délaie en quelques pages un mot de Charles Maurras que je répète de mémoire — car l’élève pillard ne cite pas toujours ses maîtres — sur « le catholique aux cuisses de faune ».

473. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « La princesse Mathilde » pp. 389-400

Ayant quitté Rome avec ses parents en 1831, elle passa le reste de son enfance et sa première jeunesse à Florence ; elle acheva de s’y nourrir et de s’y former dans la vue du beau ; elle copiait dans la galerie les chefs-d’œuvre des maîtres. […] Alors, soit dans l’atelier élégant et curieux que le tableau d’un peintre d’intérieur a fait connaître au public, soit plutôt encore dans un atelier retiré et plus modeste où elle se rend tout à fait inaccessible, — là, devant des modèles, ou ceux des maîtres ou ceux de la nature vivante, elle travaille et jette sur le papier ses aquarelles hardies et franches qui luttent de vigueur et d’éclat avec l’huile. […] Elle passe tour à tour de la copie des maîtres à des études vivantes, soit à celles de modèles à caractère, soit aux portraits de ses amis.

474. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « FLÉCHIER (Mémoires sur les Grands-Jours tenus à Clermont en 1665-1666, publiés par M. Gonod, bibliothécaire de la ville de Clermont.) » pp. 104-118

Certes, quoi qu’ait pu dire Vauvenargues, Fénelon n’aurait point parlé ainsi, lui qui, au moment où il apprit la mort de Fléchier, s’écria : « Nous avons perdu notre maître !  […] » Il s’agissait surtout, en 1665, et en cette rude contrée, d’inspirer une terreur salutaire aux tyrans du pays, d’avertir, dans leurs déportements, les Canillac et les d’Espinchal qu’ils avaient trouvé enfin un maître et des juges. […] Il ne parla doucement qu’à son maître à danser… » Madame Talon elle-même, dont M.

475. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « VICTORIN FABRE (Œuvres publiées par M. J. Sabbatier. Tome Ier, 1845. » pp. 154-168

Ainsi était resté Victorin Fabre à l’égard de ses maîtres ; ainsi se montre aujourd’hui à son égard son trop fidèle editeur qui nous semble renchérir encore sur lui. […] Certes il n’était pas besoin d’entrer dans de telles particularités enfantines pour établir, ce qui est très-vrai, que Victorin Fabre, imbu des principes de 89, y resta constamment fidèle, et fut jusqu’à son dernier jour un patriote de ce temps-là ; pas plus qu’il n’était besoin, je pense, pour établir l’excellence de ses premières études, d’enregistrer ce propos mémorable d’un de ses maîtres : Enfin je ne lui connais d’autre défaut que celui de ronger ses ongles ! […] Sabbatier le répète souvent, prodiguant à ses amis ce terme rare ; Ginguené avait plus de sens que de finesse, et moins de délicatesse que de solidité ; ce mot exquis, si l’on y prend garde, s’applique à bien peu de juges, et je ne sais que Fontanes, parmi les maîtres de ce temps-là, à qui il convînt véritablement.

476. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Seconde partie. De l’état actuel des lumières en France, et de leurs progrès futurs — Chapitre III. De l’émulation » pp. 443-462

Les soupçons, les jalousies, les calculs de l’ambition, tout se réunit pour éloigner les esprits supérieurs des luttes révolutionnaires : les hommes violents et médiocres ne se rangent à leur place que quand l’ordre est rétabli : dans le bouleversement de toutes les idées et de tous les sentiments, ils se croient propres à perpétuer ce qui existe, la confusion ; et devenus les maîtres dans les saturnales du talent et de la vertu, ils pèsent sur la pensée captive de tout le poids de leur ignorance et de leur vanité. […] À peine est-il possible, dans les ouvrages d’imagination, dans ce domaine de l’invention que la puissance légale abandonne, à peine est-il possible d’oublier que l’amusement du maître et de ses courtisans est le premier succès qu’il importe d’obtenir. […] Ce respect balança les destinées, et César ne put se croire le maître que quand cet homme n’exista plus.

477. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre VII. Développement des idées de Jésus sur le Royaume de Dieu. »

Le maître les laisse croître ensemble ; mais l’heure de la séparation violente arrivera 346. […] Le chrétien véritable est bien plus dégagé de toute chaîne ; il est ici-bas un exilé ; que lui importe le maître passager de cette terre, qui n’est pas sa patrie ? […] Le sentiment qui a fait de « mondain » l’antithèse de « chrétien » a, dans les pensées du maître, sa pleine justification 366.

478. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre XXVIII. Caractère essentiel de l’œuvre de Jésus. »

Le grand maître de ceux qui se réfugient dans ce royaume de Dieu idéal est encore Jésus. […] On chercherait vainement une proposition théologique dans l’Évangile Toutes les professions de foi sont des travestissements de l’idée de Jésus, à peu près comme la scolastique du moyen âge, en proclamant Aristote le maître unique d’une science achevée, faussait la pensée d’Aristote. […] Marc-Aurèle et ses nobles maîtres ont été sans action durable sur le monde.

479. (1853) Histoire de la littérature dramatique. Tome II « Chapitre II. Mademoiselle Mars a été toute la comédie de son temps » pp. 93-102

les plus habiles lui répondent qu’ils n’en savent rien ; qu’en ceci chaque comédien est resté le maître de se montrer tout à fait comme un grand seigneur qui fronde, et de très haut, les vices de l’espèce humaine, ou tout à fait comme un philosophe qui s’en attriste. […] « Voilà ce que disent nos maîtres, les critiques qui ont vu, qui se souviennent et qui regardent, à la fois, dans le présent et dans le passé. […] Le parterre s’était mis à adopter ce Baron comme le dernier confident des pensées du maître, et jusqu’à la fin de sa vie il l’entoura d’attentions et de respects.

480. (1860) Ceci n’est pas un livre « Le maître au lapin » pp. 5-30

Le maître au lapin I.  […] Il l’appelle : le lapin, qui trottinait par la chambre, s’arrête soudain et se met à écouter le maître en se faisant la barbe avec ses pattes. — Dans un coin, une rainette à la robe verte grimpe après un arbuscule fiché entre deux carreaux ; tout auprès, une grenouille fait la planche dans une cuvette qui joue le rôle de bassin. […] Je ne sais si les maîtres allemands ont jamais surpassé cette puissance dans cette exactitude.

481. (1888) Les œuvres et les hommes. Les Historiens. X. « MM. Jules et Edmond de Goncourt » pp. 201-216

son peuple même qui entourait le roi de sa complicité, qui lui souriait, l’encourageait, comme si, habituée par les Bourbons à la jolie gloire de la galanterie, la France ne pouvait comprendre un jeune souverain sans une Gabrielle, et comme si, dans l’amour de ses maîtres, elle trouvait une flatterie et une satisfaction de son orgueil national !  […] et qui gémissent hypocritement sur le malheur d’un noble pays d’appartenir à un tel roi, il y ait une réponse à faire plus écrasante que celle-là… La France ne valait pas mieux que son maître. […] Ils ont écrit leur histoire sans défaillance, sans égarement, sans indulgent entrainement, sans la fascination de ces fascinatrices du xviiie  siècle, assez maîtres d’eux (la première fois, peut-être !)

482. (1895) Les œuvres et les hommes. Journalistes et polémistes, chroniqueurs et pamphlétaires. XV « Auguste Vacquerie » pp. 73-89

L’auteur, — qui est poète à sa manière, qui a fait Tragaldabas, un drame qu’on aurait dit une parodie de Hugo et qui n’était qu’une caricature par adoration, — l’auteur a voulu, comme son maître, théoriser ses pratiques théâtrales, et comme il avait réverbéré la poésie de Hugo en la décomposant, il a voulu aussi réverbérer ses théories. […] Vacquerie raconte au monde la famille de son maître en littérature, mais, tout en nous donnant cette vue d’histoire, il continue d’être lui-même (heureusement !) […] Lorsque des chiens de la maison il passe aux maîtres, il reste dans ce fondu et ce fondant de tendresse, il y reste malgré l’enthousiasme, l’admiration, le fanatisme, l’emportement de ses affections.

483. (1893) Les œuvres et les hommes. Littérature épistolaire. XIII « Alexandre de Humboldt »

Admirablement élevé avec des maîtres excellents, ajoutant une éducation encyclopédique à des facultés encyclopédiques ; riche, d’ailleurs, pouvant voir le dessus et le dessous du globe à ses frais et pouvant le faire voir à ses amis (il le paya, ma foi ! […] Même dans une question d’histoire naturelle, mais qui touche à une autre question bien autrement profonde, il a si peu d’intuition et de certitude à lui qu’il se réclame de Blumenbach, qu’il appelle son maître, et, d’un autre côté, il a si peu de fermeté et de foi en l’adhésion qu’il donne à cet illustre nomenclateur, qu’après avoir reconnu ses cinq races il ajoute : « Il n’en est pas moins vrai qu’aucune différence radicale et typique ne régit ces groupes », comme s’il se repentait déjà ! […] Mais je crois — ajoute-t-il, page 126 de la Correspondance, — que je m’exprime toujours de telle sorte que ce ne puisse embarrasser ceux qui en savent moins. » Ainsi, utilité dans tous les genres, et quoiqu’on ne puisse, dit-on, servir deux maîtres, ce livre est écrit pour ceux qui savent et pour ceux qui ne savent pas ou qui savent peu.

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