Mais Swift, lui, est un ironique de certitude, car si son livre aux domestiques, incroyable même quand on l’a expliqué, n’était pas la plus grosse, la plus colossale et la plus sanglante ironie, il ferait vomir de dégoût… Règle générale, du reste : si vous supprimez l’ironie dans le doyen Swift, ce bon prêtre anglican, ce digne homme, comme dit peut-être ironiquement à son tour le bon Walter Scott, il n’y aurait plus là qu’un cynique bon à jeter à la porte de toutes les maisons honnêtes pour sa peine d’en corrompre si abominablement les serviteurs.
Le silence, gardé deux siècles durant, sur l’un des plus fiers livres qu’ait produits non le génie d’un homme, mais le génie des hommes, était en vérité par trop honteux, et c’est être délivré de la honte que d’être autorisé à en parler aujourd’hui, sans qu’on vous jette une soutane sur la tête pour mieux enterrer vos admirations arriérées !
Je croyais à la transformation dernière, au brin d’immortelle cueilli enfin, et gardé, de toute cette masse de fleurs, de tous ces bouquets jetés à la tête de tout par une main que tout enivrait et qui, dans l’ivresse, s’est blessée ; et je n’ai pas eu ce que je croyais.
Parmi toutes ces poésies lyriques où la personnalité de l’auteur jette plus énergiquement son cri, M.
Ce type de grandeur cachée, ce beau sujet à traiter pour un observateur profond, épouvante les écrivains en France, où le ridicule a tant d’empire : or, celui qu’on a jeté sur la position de la vieille fille est si grand et si officiel, qu’ils croiraient peut-être le voir rejaillir jusqu’à eux, s’ils considéraient seulement la vieille fille par les côtés touchants, élevés, héroïques, et voilà pourquoi ils se sont abstenus de la peindre dans la splendeur possible de son isolement désespéré ou courageux.
De telles leçons nous font rentrer trop vite en classe, dans ce livre de vacances où çà et là le bonnet du professeur, qu’on allait oublier, pourrait jeter moins de profil !
Qu’elle arme contre toi des bourreaux, qu’elle te jette dans les fers, qu’elle t’envoie aux combats pour recevoir des blessures et mourir, ton devoir est d’obéir ; fuir ou quitter ton rang est un crime ; dans les tribunaux, dans les prisons, sur les champs de bataille, partout les ordres de la patrie sont sacrés ; un citoyen qui se révolte contre elle est plus coupable qu’un fils armé contre son père… » Les lois continuent : « Il ferait beau entendre Socrate racontant sous quel déguisement ridicule il s’est enfui de sa prison !
Pour les philosophes, nous partirons des grenouilles d’Épicure, des cigales de Hobbes, des hommes simples et stupides de Grotius, des hommes jetés dans le monde sans soin ni aide de Dieu , dont parle Pufendorf, des géants grossiers et farouches, tels que les Patagons du détroit de Magellan ; enfin des Polyphèmes d’Homère, dans lesquels Platon reconnaît les premiers pères de famille.
Lorsque les citoyens, ne se contentant plus de trouver dans les richesses des moyens de distinction, voulurent en faire des instruments de puissance, alors, comme les vents furieux agitent la mer, ils troublèrent les républiques par la guerre civile, les jetèrent dans un désordre universel, et d’un état de liberté les firent tomber dans la pire des tyrannies ; je veux dire, dans l’anarchie.
Cette chaste Suzanne est une jolie blanchisseuse, qui a de l’ambition et décide d’aller jeter son bonnet par-dessus les moulins de Paris. […] Quel scandale qu’un descendant dévot de Renan, ou un petit-neveu anticlérical de Veuillot, puisse sans contrôle jeter leurs manuscrits au feu ! […] Édouard Maynial, et jeta des vues jusque sur Victor Hugo. […] Maeterlinck ne cherche pas à savoir pour le plaisir de savoir, mais pour percer l’avenir, jeter un coup d’œil sur l’au-delà, pénétrer les mystères d’outre-tombe. […] Les jeunes ont besoin de jeter leur gourme.
Pensez aux festins qu’introduisait alors le comte de Carlisle, où l’on servait d’abord une table remplie de mets recherchés aussi haut qu’un homme pouvait atteindre, pour la jeter aussitôt et la remplacer par une autre table pareille. […] Car ce ne sont pas des ergoteurs d’école, des compilateurs misérables, des cuistres rébarbatifs comme les professeurs de jargon que lui imposait le moyen âge, comme ce triste Duns Scott, dont les commissaires de Henri VIII jettent en ce moment les feuillets aux vents. […] Ils jettent fleur sur fleur, clinquant sur clinquant ; tout ce qui brille leur agrée ; ils dorent et brodent et empanachent leur langage, comme leurs habits. […] Elle se jette dans ses bras et lui dit : « Je suis Argentile. » Or Curan était un fils de roi qui s’était déguisé ainsi pour l’amour d’Argentile. […] On jette une branche humide au fond d’une mine, et on en retire une girandole de diamants.
Il est dru, et même assez rude, résistant, ayant du silex dans sa complexion, comme le terroir de ses vignes ; prompt à s’exalter et prompt à s’abattre, d’un ressort puissant, d’une trempe d’acier, avec des alternances de tristesse, encore impétueux dans ses crises de pleurs et de sanglots enfantins ; difficile à manier et à conduire ; riche de sève comme les ceps du Mâconnais : il en est un lui-même ; c’est là qu’il a pris terre et ciel : tout son être physique et moral est né de ce Milly, y a jeté des racines profondes, y a poussé en pleine terre de craie et en plein air, y a puisé tous les aromes et tous les sucs de son génie poétique et oratoire. […] Nouveau retour à Milly, et, derechef, il rêve, s’ennuie, rime par-ci par-là, jette sur le papier ce qui lui vient, tourmenté de désirs vagues, d’une ambition indéfinie ; souvent malade du foie. […] ce rêve d’une âme à s’enflammer trop prompte Pour un enfant jeté par hasard sous vos pas, Ce trouble d’un coeur pur qui ne se connaît pas… Ces jeux de deux enfants loin des yeux de leurs mères, Qui prennent pour amour leurs naïves chimères, Risible enfantillage et des sens et du coeur, Voilà ce qui du ciel serait en vous vainqueur ! […] Jette-leur ton enfant, ou deviens toi-même leur pâture. […] » Les monstres à ces mots poussent un affreux rire : D’une convulsion du coeur la mère expire, Et les bourreaux, traînant le vivant et les morts Vers l’antre des lions, leur jettent les trois corps.
Les mains sont jetées en avant pour agripper et saisir le plus possible de l’homme. […] La première partie est close quand elle jette au feu son bouquet de mariage. […] Il a voulu que le démon y fût présent, sous la figure de l’aveugle, du monstre grimaçant entrevu dans ces voyages à Rouen qui la menaient à l’adultère, du mendiant à qui elle a jeté sa dernière pièce d’argent comme le suicide jette au diable une âme perdue. […] « Pour oublier tout, je me suis jeté en furieux dans saint Antoine, et je suis arrivé à jouir d’une exaltation effrayante. […] Faut-il jeter le remède à cause du poison ?
Et maintenant il a jeté sa pipe. […] si je pouvais me jeter à son cou, et pleurer ! […] Dans ma raideur formée d’égoïsme épileptique, le Diable m’a saisi et jeté à la fosse. […] Ce sont des assassins, moins encore, des meurtriers sans préméditation, que la passion, brusquement, arme et jette armés sur l’être qu’ils détestent ou dont ils sont jaloux. […] Il écrit lettre sur lettre à Mme Raffraye, il finit par forcer sa porte et par s’y faire jeter.
Reconnaissez-le : la seule cadence, le heurt savant des rimes constituent la Poésie… Et puis, enfin, je trouve outrecuidant de jeter par-dessus bord une forme que nous avons mis douze siècles à acquérir ; lisez la Chanson, monorime et mnémotechnique, de Roland, lisez les fabliaux, du moyen âge, voyez la Poésie grandir jusqu’au sublime Corneille ! […] Sully Prudhomme jette le gant aux rénovateurs-déformateurs de notre poésie ; qui le ramassera ? […] Ayant jeté un triste regard du côté du théâtre, le député-poète m’entraîna dans une brasserie silencieuse et put clamer à son aise : — L’influence de Mistral ? […] Le rieur ruisseau Reflète la lune Qui dans la nuit brune Jette son réseau. […] Charles Morice voulut bien nous donner ces vers inédits : Le grand arbre autrefois fier de sa frondaison, L’arbre mort maintenant, vert seulement de lierre, Jette d’un geste aigu l’ombre inhospitalière D’un écueil sur la mer de glèbe et de gazon.
Autour de ce trait on jette, rassemblées, toutes les autres qualités qui dans notre imagination étaient inséparables de lui, et l’amour éclate. […] Chateaubriand, qu’il ne distingue aucunement de Marchangy, le jette dans les convulsions. […] Ils sont très actifs littérairement ; cela veut dire que l’ambition par la littérature a remplacé chez eux l’ambition par les armes, qui leur fut interdite ; et viennent, du reste, les circonstances favorables, tous, poètes, historiens, romanciers et professeurs de littérature française, se jetteront avec ardeur dans l’ambition politique. […] La nature les jette dans la mêlée et semble leur souhaiter bonne chance en les lâchant, sans plus vouloir s’occuper d’eux. […] Ainsi, pour commencer par la question où Proudhon s’est jeté tout d’abord et qu’il a traitée avec la véhémence la plus retentissante, Proudhon rencontre ce grand fait social, universel depuis les temps les plus reculés, la propriété.
Leurs rois de mer19, « qui n’avaient jamais dormi sous les poutres enfumées d’un toit, qui n’avaient jamais vidé la corne de bière auprès d’un foyer habité », se riaient des vents et des orages, et chantaient : « Le souffle de la tempête aide nos rameurs ; le mugissement du ciel, les coups de la foudre ne nous nuisent pas ; l’ouragan est à notre service et nous jette où nous voulions aller. » « Nous avons frappé de nos épées, dit un chant attribué à Ragnar Lodbrog ; c’était pour moi un plaisir égal à celui de tenir une belle fille à mes côtés ! […] La colère et la convoitise le jettent tout d’abord sur sa proie. […] On l’a jeté parmi les serpents, et il y est mort, frappant du pied sa harpe. […] Chaque chef dans sa salle compte qu’il a des amis, non des mercenaires, dans les fidèles qui boivent sa bière, et qui ayant reçu de lui, en marque d’estime et de confiance, des bracelets, des épées et des armures, se jetteront entre lui et les blessures le jour du combat45.
quel prompt éclair jeté sur les situations, sur les groupes divers !
. — Mais un jour, sans conspiration aucune, sans que les mécontents du dedans se soient entendus avec l’exilé de l’île d’Elbe, par le seul fait de cette sympathie, de cette communication électrique qui s’établit à distance dans les atmosphères embrasées, Napoléon a senti que le moment de quitter ces jeux et ces passe-temps, bons pour les champs élyséens de Virgile, est venu, et qu’il faut, bon gré malgré, jeter une dernières fois les dés du sort.
Coran de jeter au vent ces rimes amoureuses et riantes en 1847, en pleine politique, à la veille des révolutions ?
Ses premiers mécomptes, la manière naturelle et facile dont Raymon les répare, dont il la fascine et l’enchante ; l’éclair sinistre qu’un mot de sir Ralph sur l’aventure de Noun jette dans l’esprit d’Indiana, le coup qu’elle en reçoit et qu’elle rend à Raymon ; sa croyance en lui, malgré la découverte, sa résolution de fuir avec lui, de se réfugier chez lui, plutôt que de suivre son mari au départ ; cet abandon immense, généreux, inébranlable, sans souci de l’opinion, sans remords, et mêlé pourtant d’un superstitieux refus ; toute cette analyse vivante est d’une vérité, d’une observation profonde et irrécusable, qu’on ne saurait assez louer.
Rossignol en vient à l’appréciation littéraire, et le coup d’œil qu’il jette sur la composition d’une seule églogue le mène aux considérations les plus intéressantes sur ce genre même de poésie, sur ce qu’étaient sa forme distincte et son rhythme particulier chez les Grecs, sur ce qu’il devint, chez les Romains, déjà moins délicats d’oreille, et qui se contentèrent d’un à peu près d’harmonie.
découpures élégantes ; Capri sévère, Ischia prolongée, les bizarres et gracieux chaînons de Procida ; le cap Misène isolé avec sa langue de terre mince et jolie, le château de l’Œuf en petit l’imitant, le Pausilippe entre deux doucement jeté : en tout un grand paysage de lointain, dessiné par Raphaël. — -Oh !
« A l’apparition des Ordonnances, ajoute-t-il, nous serions-nous portés vers le Parlement comme au temps de la Fronde, pour le supplier d’aller se jeter aux pieds du roi, afin de lui faire entendre la vérité, au moins pour la dernière fois, et de lui porter des propositions de conciliation ?
Heureuse cette littérature à la fois plus démocratique et plus aristocratique, plus raffinée et plus audacieuse, moins moyenne en un mot, si elle n’est pas jetée hors de toute beauté et de tout calme d’exécution, hors d’un certain bon sens indispensable au génie et de certaines conditions éternelles de l’art, par la pruderie, l’honnêteté exemplaire et les prétentions établies de l’autre littérature !
Ici l’acteur, aussitôt même entendu, n’a eu qu’à jeter au public le pseudonyme retentissant.
que de saillies, de traits charmants et sensés, que de précieux ou de piquants souvenirs, que d’idées, que de trésors jetés aux quatre vents de l’horizon et qu’il ne recueillera jamais !
Tous ses tableaux sont pleins d’imagination ; et ses harangues sont, comme celles de Tite-Live, de la plus belle éloquence : lorsqu’il raconte les malheurs attachés aux troubles civils, il jette de grandes lumières sur les passions politiques, et doit paraître supérieur aux écrivains modernes qui n’ont que l’histoire des guerres et des rois à raconter.
Alors qu’il naît du malheur, alors que l’excès des peines a jeté l’âme dans une sorte d’affaiblissement qui ne lui permet plus de se relever par elle-même, la sensibilité fait admettre ce qui conduit à la destruction de la sensibilité, ou du moins ce qui interdit d’aimer de tout l’abandon de son âme.
Elle jeta Calvin hors du royaume, où la reine de Navarre ne pouvait plus le protéger.
Pour Alfred de Musset, la poésie était le contraire ; sa poésie, c’était lui-même, il s’y était rivé tout entier ; il s’y précipitait à corps perdu ; c’était son âme juvénile, c’était sa chair et son sang qui s’écoulait ; et quand il avait jeté aux autres ces lambeaux, ces membres éblouissants du poète qui semblaient parfois des membres de Phaéton et d’un jeune dieu (se rappeler les magnifiques apostrophes et invocations de Rolla), il gardait son lambeau à lui, son cœur saignant, son cœur brûlant et ennuyé.
Pendant que Scapin explique son projet à Flaminia, Arlequin, par différents lazzi, interrompt la scène : tantôt il s’imagine d’avoir dans son chapeau des cerises qu’il fait semblant de manger, et d’en jeter les noyaux au visage de Scapin, tantôt il feint de vouloir attraper une mouche qui vole, de lui couper comiquement les ailes et de la manger, et choses pareilles.
Quand il fut à la porte de la chambre, il heurta ; en entrant il jeta son manteau à terre et, s’étant coiffé du petit chapeau, il courut, sans rien dire, d’un bout de la chambre à l’autre en faisant des postures plaisantes.
Si Dieu prend soin de vêtir de la sorte une herbe des champs, qui existe aujourd’hui et qui demain sera jetée au feu, que ne fera-t-il point pour vous, gens de peu de foi ?