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852. (1890) Les œuvres et les hommes. Littérature étrangère. XII « Dante »

Il aborde l’homme et le poète à part, — comme ils le sont dans l’esprit humain et dans la gloire. […] Bien des choses lui manquent, nous le savons et il le sait aussi, mais il y a peut-être un critique futur dans cet enfant qui n’a pas craint de regarder le Dante au front, de voir la ride sous le laurier, l’infirmité humaine sous le rayon, et qui n’a pas eu peur de chercher la tache dans une telle splendeur de lumière. […] Il n’a été que cela, en effet, cet homme qu’on a voulu bâtir de plusieurs hommes, dans lequel on s’est acharné à supposer toutes les facultés humaines réunies dans je ne sais quel chimérique et éblouissant faisceau ; il n’a été qu’un poète : mais c’est suffisant pour la gloire, un poète, cette prodigieuse anomalie entre la vie et la pensée, mené par ses passions comme tous les poètes, et dont l’existence fut d’une tristesse et d’une misère à faire pitié.

853. (1890) Les œuvres et les hommes. Littérature étrangère. XII « Swift »

Avec une vocation manifeste pour l’observation de la nature humaine, profonde et sincère, en dehors de toute mode et de tout costume, il s’est détourné de l’œuvre éternelle pour s’occuper des questions éphémères de son temps. […] Même dans son pays et dans sa langue, l’astre de Swift a déjà pâli et ira chaque jour en décroissant, et par la souveraine raison que nous avons déjà donnée, mais que la Critique, cette vigie qui parle, doit incessamment répéter : c’est qu’en littérature tout ce qui ne s’appuie pas sur la grande nature humaine, doit, de nécessité périr ! […] Elle ne lira pas ses fameuses Lettres d’un drapier, — ces lettres qui turent de l’O’Connell écrit cent ans avant qu’O’Connell fût du Swift parlé aux masses soulevées de l’Irlande ; elle ne lira pas davantage ce Conte du tonneau, qui est du Rabelais anglaisé, qui est à Rabelais, le gigantesque bouffon aux entrailles si humaines, ce que sont les six pouces d’un habitant de Lilliput à la taille proportionnée d’un homme ; mais elle lira Gulliver.

854. (1906) Les œuvres et les hommes. Poésie et poètes. XXIII « Lefèvre-Deumier »

Ce livre, intense et individuel comme la passion qui l’a dicté, n’est point le plus beau que Lefèvre ait écrit (car Lefèvre n’a fait qu’une seule fois cette chose complète qu’on appelle un beau livre, et ce n’a pas été en vers) ; mais, à coup sûr, c’est celui où, malgré d’atroces bizarreries, des viols de langue dans des alliances de mots forcenées, il y a le plus de ces beautés humaines que le comble de l’art est d’imiter, et qui jaillissent parfois du fond de la vie. […] Avec vos yeux d’humains, vous ne voyez donc pas, Qu’où s’arrêtent vos sens, c’est le ciel qui commence ? […] que direz-vous donc de la mémoire humaine, Immense Josaphat, où les siècles mêlés S’assemblent en congrès, dès qu’ils sont appelés ; Et non pas seulement les hommes ou leur cendre, Mais où viennent aussi se grouper et se rendre Les empires défunts, les forêts, les cités, Et des fleuves taris les Ilots ressuscités, Et des océans morts les flottes vagabondes, Et non pas seulement la terre, mais les mondes ?

855. (1883) Le roman naturaliste

Elles se réduisent en deux mots à ceci : rien ne dure que par la perfection de la forme et la vérité humaine du fond. […] Et, puisqu’on a si souvent rapproché son nom de celui de Balzac, il est maître à bien plus juste titre que l’auteur de la Comédie humaine. […] Il fallait qu’il restât humain, entièrement humain, et c’est précisément l’art avec lequel Flaubert a su le maintenir humain, sous la loi des conditions moyennes et normales de l’humanité, de la réalité, de la vie, qui fait un des grands mérites encore de Madame Bovary. […] Même, il y en a qui sont véritablement humaines ! […] Au fond, la bêtise humaine, quand on essaie d’en donner la plus large définition, est un je ne sais quoi qui oscille de l’idiotie à la prétention.

856. (1890) Le réalisme et le naturalisme dans la littérature et dans l’art pp. -399

À mesure que la vie humaine s’est éloignée de la simple nature, l’art et la poésie sont devenus plus réfléchis en participant au grand mouvement qui n’a cessé, depuis l’origine des temps historiques, de porter l’esprit humain de la synthèse, vers l’analyse. […] D’abord ils s’attardent longuement à tout ce qui ne fait qu’encadrer ou meubler la scène de l’existence humaine. […] On connaît la préface de la Comédie humaine : « La loi de l’écrivain, ce qui le fait tel, ce qui je ne crains pas de le dire, le rend égal et peut-être supérieur à l’homme d’État, c’est une décision quelconque sur les choses humaines, un dévouement absolu à des principes. […] On n’a pas le temps de se reposer quand on s’est voué à l’éducation du genre humain, à la refonte générale de l’homme et de la société, de la nature même. […] Il se peut aussi qu’il ploie et contourne disgracieusement le corps humain.

857. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Deuxième partie. Ce qui peut être objet d’étude scientifique dans une œuvre littéraire — Chapitre VII. Objections à l’étude scientifique d’une œuvre littéraire » pp. 81-83

Il est certain que toute science humaine, même quand elle suit une méthode sûre, a ses limites et ses impuissances. […] L’histoire naturelle ainsi que l’histoire humaine a ses espaces vides.

858. (1913) Le bovarysme « Première partie : Pathologie du bovarysme — Chapitre VII. Le Bovarysme essentiel de l’existence phénoménale »

Il suit de là que le moi humain ne peut prendre de lui-même une connaissance intégrale. […] La matière et le monde extérieur tout entier ne devraient-ils pas leur origine à cette même fantaisie intellectuelle par laquelle les premières sociétés humaines confèrent la divinité à des idoles taillées dans le bois par la hache de leurs artisans, idoles auxquelles elles attribuent un pouvoir souverain et auxquelles elles se soumettent ?

859. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Troisième partie. Beaux-arts et littérature. — Livre troisième. Histoire. — Chapitre III. Suite du précédent. — Seconde cause : les anciens ont épuisé tous les genres d’histoire, hors le genre chrétien. »

Sans s’appesantir, et sans rien perdre de l’élégance attique, il jeta des regards pieux sur le cœur humain, et devint le père de l’histoire morale. […] Les causes des événements qu’Hérodote avait cherchées chez les Dieux, Thucydide, dans les constitutions politiques, Xénophon, dans la morale, Tite-Live, dans ces diverses causes réunies, Tacite les vit dans la méchanceté du cœur humain.

860. (1911) Lyrisme, épopée, drame. Une loi de l’histoire littéraire expliquée par l’évolution générale « Lettre-préface à Henri Morf et Joseph Bédier » pp. -

Kant, Hegel et quelques autres ont tellement pénétré la pensée humaine, qu’on peut fort bien être influencé par eux sans les avoir jamais lus. […] Après un long détour, d’ailleurs nécessaire, nous en revenons à la sagesse des philosophes grecs ; l’analyse minutieuse n’a vu longtemps dans la diversité les choses qu’un vaste désordre et s’est divertie à étiqueter ces contradictions apparentes ; la synthèse retrouvera peu à peu l’ordre et le rythme, plus beaux encore dans l’effort humain que dans la marche des étoiles.

861. (1827) Principes de la philosophie de l’histoire (trad. Michelet) « Principes de la philosophie de l’histoire — Livre cinquième. Retour des mêmes révolutions lorsque les sociétés détruites se relèvent de leurs ruines — Chapitre I. Objet de ce livre. — Retour de l’âge divin » pp. 357-361

Afin d’établir cette vérité d’une manière inébranlable selon le cours naturel des choses humaines, Dieu permit qu’un nouvel ordre de choses naquît parmi les nations. […] Partout avaient recommencé les violences, les rapines, les meurtres, et comme la religion est le seul moyen de contenir des hommes affranchis du joug des lois humaines (axiome 31), les hommes moins barbares qui craignaient l’oppression se réfugiaient chez les évêques, chez les abbés, et se mettaient sous leur protection, eux, leur famille et leurs biens ; c’est le besoin de cette protection qui motive la plupart des constitutions de fiefs.

862. (1901) Des réputations littéraires. Essais de morale et d’histoire. Deuxième série

Une des plus grandes souffrances pour la nature humaine est celle que donne une idée nouvelle. […] Qu’est-ce qu’un esprit humain qui n’est ni dans la foule ni dans ses conducteurs ? […] Car l’essence des minorités est d’être actives, et la nullité intellectuelle de ce petit nombre l’assimile au lourd bétail humain que les majorités sont par nature. […] Dire au contraire du mal de soi est, à coup sûr, une imprudence, parce que la malignité humaine s’empresse de nous prendre au mot. […] Cette vanité rappelle un trait du caractère de Lamartine, assez petit, mais bien humain

863. (1923) Nouvelles études et autres figures

Ce qui en a passé dans la Divine Comédie lui donne une signification humaine plus étendue. […] Il fuit loin du spectacle de l’anéantissement d’une forme humaine, et la mort l’a déjà marqué. […] L’histoire du genre humain expierait le crime du Deux Décembre. […] Mais quand on croit ainsi au progrès indéfini de l’espèce humaine, on ne la fait point partir du Paradis Terrestre. […] L’homme ne peut devenir ange qu’après avoir dépouillé par la mort l’enveloppe humaine.

864. (1924) Critiques et romanciers

Héraclite, pour garantir l’esprit humain contre les périls de la certitude. […] Quelles solitudes que tous ces corps humains ! […] À bien considérer la suite de l’histoire humaine, il croît découvrir qu’à travers les âges la vie humaine tend à quelque adoucissement et, autant dire, à quelque amélioration. […] Vous étudiez une œuvre littéraire : vous assistez à une expérience humaine. […] La peinture de la vie humaine que M. 

865. (1857) Réalisme, numéros 3-6 pp. 33-88

Jamais un homme, une action humaine ne sont insignifiants pour moi. […] Donnez-leur l’histoire du cœur humain dans les grandes conditions, cela devient pour eux un objet important. […] Il y a au-dessus des critiques une chose qu’ils ne peuvent arrêter : l’esprit humain. […] La grande, la forte poésie humaine est partout, excepté chez les romantiques. […] Le fantasque renie, non seulement le caractère humain, mais tous les caractères.

866. (1896) Les Jeunes, études et portraits

L’âme humaine rêve sans cesse de s’élargir. […] La laideur humaine se cache sous le joli décor de société. […] C’en est l’intérêt proprement humain. […] Quelle solitude que tous ces corps humains ! […] Nous sommes devenus beaucoup plus humains.

867. (1894) Écrivains d’aujourd’hui

Et des gens s’émerveillent du génie humain ! […] C’est un charme que l’humaine façon dont les traite M.  […] La nature humaine est infiniment plus complexe. […] » Il trace un tableau de l’universelle misère humaine. […] Il accueille le progrès humain et toutes les formes du progrès.

868. (1898) Manuel de l’histoire de la littérature française « Livre III. L’Âge moderne (1801-1875) » pp. 388-524

Le cœur humain de qui ? Le cœur humain de quoi ? Quand le diable y serait, j’ai mon « cœur humain » moi ! […] Anatole Cerfbeer et Jules Christophe, Répertoire de la Comédie humaine, Paris, 1887. […] Moïse] ; — sur la corruption de la nature humaine [Cf. 

869. (1928) Quelques témoignages : hommes et idées. Tome II

Mais il y a des Dieux et qui s’occupent des affaires humaines. » Cette alternative, M.  […] Mais cette mutilation — car c’en est une que de refuser tout sens humain à la vie humaine — le laissait désespéré. […] Que de palpitations humaines dont il ne reste d’autre trace qu’une forme imprimée dans un morceau de pierre !  […] Voici que se dégagent comme les traits d’un visage, immobile et vivant, que vous n’oublierez pas plus que les traits d’une face humaine. […] Le Bossuet dont nous venons de saluer la mémoire commenterait en termes bien émouvants ce témoignage du peu que représente la grandeur humaine.

870. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « MADAME DE STAEL » pp. 81-164

… N’êtes-vous pas heureux qu’une nation tout entière se soit placée à l’avant-garde de l’espèce humaine pour affronter tous les préjugés, pour essayer tous les principes ?  […] L’idée que Mme de Staël ne perd jamais de vue dans cet écrit, c’est celle du génie moderne lui-même, toutes les fois qu’il marche, qu’il réussit, qu’il espère ; c’est la perfectibilité indéfinie de l’espèce humaine. […] » Plus tard, en avançant en âge, en croyant moins, nous le verrons, aux inventions nouvelles et à la toute-puissance humaine, Mme de Staël n’eût pas placé hors de l’ancien et de l’unique Christianisme le moyen de régénération morale qu’elle appelait de ses vœux. […] Voltaire insultait Jean-Jacques, et c’est la voix seule du genre humain (pour parler comme Chénier) qui les réconcilie. […] Toute vie humaine, un peu grande, a sa colline sacrée : toute existence qui a brillé et régné a son Capitole.

871. (1835) Critique littéraire pp. 3-118

« Qui de vous, disait-il, amants humains, parmi les plus comblés, qui de vous n’a subi l’ennui ? […] Sainte-Beuve, une sorte d’homœopathie appliquée à la morale ; c’est l’âme humaine livrée aux empiriques. […] Je crois à la légitimité du bon goût ; mais je crois aussi à l’audace, à la fécondité de l’esprit humain ; j’ai foi à sa liberté, à sa puissance. […] Je veux qu’on tienne compte de l’expérience acquise au passé, mais qu’on n’en fasse pas l’absolue maîtresse de l’esprit humain. […] Il est obligé de nous donner souvent le détail et le menu de la vie humaine, et de nous entretenir, bon gré malgré, de choses simples, naturelles, ordinaires.

872. (1881) Études sur la littérature française moderne et contemporaine

Quel abîme que le cœur humain ! […] » Mais cette philosophie du cœur humain n’est pas complètement vraie. […] L’amour étroit de la patrie se confondait de plus en plus parmi nous dans un sentiment plus largement humain quand la guerre de 1870 a éclaté. […] Il est fort bon, quoi qu’en dise l’école du pittoresque impassible, qu’un sentiment humain se mêle aux descriptions de la nature. […] On est émerveillé du temps qu’il faut à l’esprit humain pour s’aviser des choses les plus simples.

873. (1866) Petite comédie de la critique littéraire, ou Molière selon trois écoles philosophiques « Troisième partie. — L’école historique » pp. 253-354

Ici il ne faut point rire ou se récrier, et dire qu’il nous importe peu, à nous humains et humains civilisés, que pour les crapauds les plus beaux objets du monde soient leurs crapaudes. […] Mais qu’on ne se hâte pas trop de dire qu’aucune portion du genre humain ne saurait être intéressée par un pareil spectacle. […] C’était ensuite la statuaire qui déroulait devant mes yeux, avec son histoire, quelque chose de l’histoire de l’esprit humain. […] Il le mouvait en effet, et il croyait avoir démontré la liberté humaine. […] Mais l’affranchissement de l’esprit humain fut très lent, et il eût été bien plus lent encore, si Molière n’avait pas été l’un des combattants.

874. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre III. L’âge classique. — chapitre VI. Les romanciers. » pp. 83-171

. —  Étude excessive des particularités humaines. —  Caractère de Sterne […] —  Son excentricité. —  Sa sensibilité. —  Ses gravelures. —  Pourquoi il peint les maladies et les dégénérescences de la nature humaine. […] Poussez à l’excès cette étude des particularités humaines, vous verrez naître le talent de Sterne. […] Ce n’est pas la dureté ni le tempérament morose qui l’affermissent ; il n’y a pas d’âme plus paternelle, plus sociable, plus humaine, plus ouverte aux émotions douces et aux tendresses intimes. […] La méchanceté, la stupidité, tout l’ignoble venin des plus ignobles passions humaines en suinte et en distille.

875. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre V. Les contemporains. — Chapitre V. La philosophie. Stuart Mill. »

—  Valeur des spéculations supérieures dans la civilisation humaine. […] Il ne se pose pas majestueusement en restaurateur de la science ; il ne déclare pas, comme vos Allemands, que son livre va ouvrir une nouvelle ère au genre humain. […] Renouveler la notion de cause, c’est transformer la pensée humaine ; et vous allez voir, comment Mill, avec Hume et M.  […] Il a décrit l’esprit anglais en croyant décrire l’esprit humain. […] Reprenons votre idée primitive ; je tâcherai de dire en quoi je la trouve incomplète, et en quoi il me semble que vous mutilez l’esprit humain.

876. (1898) Manuel de l’histoire de la littérature française « Livre II. L’Âge classique (1498-1801) — Chapitre premier. La Formation de l’Idéal classique (1498-1610) » pp. 40-106

« La plante humaine, selon le mot célèbre de Stendhal, naît-elle plus forte en Italie qu’ailleurs ?  […] Ils conçurent l’idée d’une autre vie, plus libre, plus ornée, plus « humaine » en un mot, que celle qu’ils menaient depuis cinq ou six siècles. […] son expression mérite qu’on la retienne : ce sont bien là des cas humains représentés au vif dont la description a enrichi notre connaissance de l’humanité. […] Montaigne va nous le dire : c’est « que tout homme porte en soi la forme de l’humaine condition ». […] ii]. — Liaison que Charron établit entre ces trois idées ; — sa confiance dans la raison humaine ; — dans le pouvoir de la volonté ; — dans l’universalité de la loi morale.

877. (1892) Un Hollandais à Paris en 1891 pp. -305

Byvanck, à qui suffit la comédie humaine, ne va guère entendre des drames. […] Çà et là ce sont des êtres humains et une société que l’on a devant soi. […] c’était plutôt un faune doux, timide et presque humain, quand il vint vivre parmi les hommes. […] Vouloir rapetisser la nature humaine, m’enlever, à moi, la suprême jouissance de la communion ! […] De tous côtés viendraient les gens qui s’intéressent aux grandes questions sociales ou humaines.

878. (1922) Gustave Flaubert

Il s’agit de poser un décor vrai, non pour la comédie humaine, mais pour la comédie de la bêtise humaine, de la misère humaine, et Flaubert s’en acquitte avec une minutie tranquille et impitoyable : la maison du notaire, l’église, la mairie, et, en face de l’hôtel du Lion-d’Or, la pharmacie de M.  […] Il connaissait l’existence humaine tout du long et s’y attablait sur les deux coudes avec sérénité ». […] Cette aventure humaine laisse un produit net, a pour moralité la survivance des plus aptes. […] Que de choses flottent encore dans les limbes de la pensée humaine ! […] Ce qu’emporte le bateau de Flaubert c’est une cargaison de ridicules humains.

879. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Académie française — Réception de M. Ponsard » pp. 301-305

ne répond-elle pas à une faculté et à une disposition permanente de l’âme et de l’admiration humaine ? […] Nisard, reprenant l’éloge de Voltaire que le récipiendaire avait fait avec chaleur pour ses services rendus à l’esprit de tolérance et d’examen, l’a accepté sous bénéfice d’inventaire en quelque sorte, et en le réduisant par les seuls côtés où ce grand esprit a trop blessé en effet ce même genre humain qu’il prétendait servir.

880. (1876) Chroniques parisiennes (1843-1845) « LXXIX » pp. 316-320

Alors en effet on se plaisait à concevoir une sorte de drame à la fois réel et idéal, qui reproduirait avec étude et fidélité les mœurs et les personnages de l’histoire, y associerait les passions éternelles de la nature humaine, et ferait parler le tout d’un ton plus simple et plus sincèrement poétique à la fois qu’on n’avait osé jusqu’ici. […] quand la scène sera libre, nous verrons bien. » Au commencement de 1830, Hernani vint apporter du mouvement et comme un éveil de prochain espoir ; c’était étrange, c’était peu historique, c’était plus qu’humain et assez surnaturel, mais enfin il y avait éclat, poésie, nouveauté, audace.

881. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — R. — article » pp. 109-114

Si on trouve des hommes portés l'injustice, à la malignité ; de telles dispositions sont dans eux des vices acquis par l'éducation, les circonstances, les passions, & non des germes inséparables de la Nature humaine. […] Aucune vertu, même momentanée, qui, selon lui, ne soit produite par un orgueil sensible ou déguisé ; & c'est sur ce faux principe qu'il établit ses réflexions chagrines contre la Nature humaine.

882. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Troisième partie. Beaux-arts et littérature. — Livre troisième. Histoire. — Chapitre IV. Pourquoi les Français n’ont que des mémoires. »

Concluons donc que c’est au changement des affaires humaines, à un autre ordre de choses et de temps, à la difficulté de trouver des routes nouvelles en morale, en politique et en philosophie, que l’on doit attribuer le peu de succès des modernes en histoire ; et, quant aux Français, s’ils n’ont en général que de bons mémoires, c’est dans leur propre caractère qu’il faut chercher le motif de cette singularité. […] La vérité humaine est semblable au triangle, qui ne peut avoir qu’un seul angle droit, comme si la nature avait voulu graver une image de notre insuffisante rectitude dans la seule science réputée certaine parmi nous.

883. (1906) Les œuvres et les hommes. À côté de la grande histoire. XXI. « Law »

… Dans l’esprit humain et dans l’Histoire, qui est la glace de l’esprit humain, mais une glace où les traits restent au lieu de passer, rien n’est isolé, tout se tient, tout s’enchaîne, et le devoir de l’historien est de montrer ces enchaînements, ces jointures, ces articulations, qui constituent l’ensemble de l’Histoire et de son unité.

884. (1827) Principes de la philosophie de l’histoire (trad. Michelet) « Principes de la philosophie de l’histoire — Livre second. De la sagesse poétique — Chapitre X. De la chronologie poétique » pp. 235-238

Mais les Phéniciens, nation maritime, enrichie par le commerce, durent s’arrêter dans la démocratie, le premier des gouvernements humains. […]   De cette manière l’étude du développement de la civilisation humaine, prête une certitude nouvelle aux calculs de la chronologie.

885. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre I. Les origines. — Chapitre III. La nouvelle langue. » pp. 165-234

—  Rédacteurs de moralités. —  Gower. —  Occlève. —  Lydgate. —  Analogie du goût dans les costumes, dans les bâtiments et dans la littérature. —  Idée triste du hasard et de la misère humaine. —  Hawes. —  Barcklay. —  Skelton. —  Rudiments de la Réforme et de la Renaissance. […] A-t-on jamais peint plus heureusement l’illusion humaine ? […] Ici, pour la première fois, paraît la supériorité de l’esprit, qui, au moment de la conception, tout d’un coup s’arrête, s’élève au-dessus de lui-même, se juge et se dit : « Cette phrase dit la même chose que la précédente, ôtons-la ; ces deux idées ne se suivent pas, lions-les ; cette description languit, repensons-la. » Quand on peut se parler ainsi, on a l’idée non pas scolastique et apprise, mais personnelle et pratique, de l’esprit humain, de ses démarches et de ses besoins, comme aussi des choses, de leur structure et de leurs attaches ; on a un style, entendez par là qu’on est capable de faire entendre et voir toute chose à tout esprit humain. […] Trois siècles de travail au fond de cette fosse noire n’ajoutèrent pas une idée à l’esprit humain. […] Le seul point qui fasse saillie, surtout dans le premier poëme, c’est l’idée de la Fortune230 et des violentes vicissitudes parmi lesquelles roule la vie humaine.

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